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87e session
Genève, juin 1999


Rapport de la Commission du travail des enfants

Rapport
Projet de convention
Projet de recommandation

Présentation, discussion et adoption
 


Original anglais:
Le PRESIDENT -- Mesdames et Messieurs, après cette séance spéciale historique, je propose que nous examinions notre premier point à l'ordre du jour ce matin. Il s'agit du rapport de la Commission du travail des enfants qui figure dans le Compte rendu provisoire no 19.

Je demande à Mme Niven, déléguée gouvernementale, Royaume-Uni, rapporteur de la commission, de présenter le rapport.

Original anglais: Mme NIVEN (déléguée gouvernementale, Royaume-Uni; rapporteur de la Commission du travail des enfants) -- C'est un honneur et un très grand plaisir pour moi de vous présenter les conclusions positives des travaux de la Commission du travail des enfants. Le Président des Etats-Unis m'a grandement facilité la tâche en entérinant à ce point nos travaux. La commission s'est chargée, l'an dernier, de mettre au point de nouvelles normes internationales du travail visant l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants, tâche qui consistait à élaborer une nouvelle convention et une nouvelle recommandation sur les formes de travail des enfants qui ne sauraient être tolérées nulle part pour quelque raison que ce soit. Nous avons réussi à le faire, et la commission a travaillé dans un esprit de coopération et de consensus tellement positif qu'une question posée par un écolier pendant la première semaine de la commission m'est revenue à l'esprit. Cet enfant m'avait demandé: «Pourquoi est-ce que cela vous a pris tant de temps?» Oui, en effet, pourquoi? Finalement nous y sommes parvenus, et si je puis me faire l'écho des remarques liminaires de M. Trotman, vice-président travailleur de la commission, je dirais que nous avons réussi à mettre au point des instruments qui pourront être présentés à la conscience du monde et qui pourront apporter de réels changements.

Avant de poursuivre, je tiens à remercier notre président, M. Atsain, ainsi que les vice-présidents, M. Botha et M. Trotman, qui ont mené nos discussions avec beaucoup de sagesse. Je remercie également le personnel du BIT, M. Bequele, Mme Jankanish, Mme Christine Smith et tout le personnel d'appui qui nous a prêté son concours inlassable et efficace.

L'objectif de la commission était de parvenir à un texte clair, concis, ciblé, réaliste, un texte qui pourrait recueillir une ratification universelle et qui apporterait réellement de véritables changements. La convention exige que les pays prennent des mesures immédiates et efficaces en vue de l'interdiction et de l'élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. Ceci reflète le consensus qui s'est dégagé en commission selon lequel, quelle que soit la cause du problème, son élimination est une tâche urgente. Nous pensons que nous avons atteint l'objectif, qui était de mettre au point une convention forte visant les pires formes de travail des enfants. Nous avons défini celles-ci de la manière suivante: toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage, ainsi que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés; l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques; l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que les définissent les conventions internationales pertinentes; et enfin les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s'exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l'enfant. La convention requiert une mise en œuvre par le biais d'un système de surveillance et de programmes d'action. Elle demande aussi que des mesures soient prises non seulement pour empêcher l'exploitation des enfants, mais aussi pour assurer la réadaptation et l'intégration sociale des enfants qui auront été soustraits aux pires formes de travail des enfants.

Les principales questions dont était saisie la commission étaient les suivantes: comment devait-elle traiter le problème de l'utilisation des enfants soldats, l'importance de l'éducation et la question de savoir si toutes les formes de travail qui revenaient à empêcher systématiquement un enfant d'avoir accès à l'éducation devraient être incluses dans la définition des pires formes de travail des enfants; le rôle d'autres groupes intéressés que les gouvernements et les organisations d'employeurs et de travailleurs; comment déterminer les travaux dangereux et l'importance de la coopération et l'assistance internationales pour l'aide fournie aux pays pour la mise en œuvre de la convention. Des avis divers ont été émis quant à la meilleure façon de traiter la question des enfants soldats, et le texte que nous vous proposons est le fruit d'un compromis. Nous avons reconnu que la convention devrait se limiter au recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des activités militaires. La commission a encouragé le groupe de travail des Nations Unies à poursuivre ses travaux sur le projet de protocole facultatif relatif à la convention sur les droits de l'enfant.

Pour éviter d'étendre la portée de la convention au-delà de ce que la commission considérait comme constituant les pires formes de travail des enfants, ladite commission a décidé de ne pas faire figurer le déni d'accès à l'éducation dans la définition. En lieu et place, la commission a décidé de renforcer la convention en soulignant l'importance de l'accès à l'éducation de base gratuite et à la formation professionnelle pour tous les enfants qui auront été soustraits aux pires formes de travail des enfants.

La commission a aussi reconnu l'importance qu'il y avait à tenir compte des avis des autres groupes intéressés, à savoir les groupes autres que les gouvernements et les organisations d'employeurs et de travailleurs lors de l'élaboration et de la mise en œuvre des programmes d'action. Afin de donner des directives plus précises quant à la détermination des travaux dangereux, nous avons fait référence aux formes de travail mentionnées dans la recommandation. Pour ce qui est de l'application et de la mise en œuvre de la convention, nous avons aussi pris en compte la situation particulière des filles.

Enfin, nous avons reconnu que, si nous voulons atteindre les objectifs de la convention, il convient de renforcer la coopération internationale et d'apporter une aide, y compris par des mesures de soutien au développement économique et social, aux programmes d'éradication de la pauvreté et à l'éducation universelle. La recommandation fournit des orientations supplémentaires quant à la conception et à la mise en œuvre des programmes d'action, et détermine ce qui doit être considéré comme un travail dangereux pour les enfants. D'autre part, la recommandation donne des indications sur les systèmes de surveillance et recommande que les trois premières catégories de travail des enfants faisant partie des pires formes de ce travail soient considérées comme des infractions pénales passibles de sanctions, notamment pénales.

J'espère que j'ai résumé avec précision le rapport de la commission ainsi que le contenu du projet de convention et du projet de recommandation. Une fois encore, je tiens à applaudir les travaux de la commission menés sous la direction de notre président M. Atsain. Je dois dire que ces travaux ont été menés avec un sens profond des responsabilités et dans un esprit constructif et très positif. Nous pensons que nous avons atteint notre objectif en élaborant cette convention et cette recommandation. Nous demandons instamment à tous les Membres de traduire ces mots en action et d'œuvrer à la pleine application des dispositions de la convention de façon à ce que les enfants, que nous cherchons à aider, puissent dire que nous avons bien travaillé.

Original anglais: M. BOTHA (délégué des employeurs, Afrique du Sud; vice-président employeur de la Commission du travail des enfants) -- Cette convention et cette recommandation ne marquent ni le début ni la fin du processus qui vise à éliminer les pires formes de travail des enfants.

Mais, il s'agit de l'éventail de mesures le plus profond, le plus définitif et le plus ciblé, que la communauté internationale ait adopté jusqu'ici avec l'aide de ses partenaires sociaux. Les travailleurs, les gouvernements et les employeurs du monde ont fait part de leur détermination à interdire totalement les pires formes de travail des enfants et ont proposé, ou plutôt ont accepté, de prendre des mesures qui visent à supprimer ces pratiques tout à fait inacceptables.

Il s'agit d'un très grand défi. Des millions d'enfants travaillent aujourd'hui, alors que nous sommes dans cette salle, dans des métiers extrêmement dangereux et dans des conditions très dangereuses. Leur santé est gravement atteinte, leur croissance est ralentie, leur moralité corrompue, leur équilibre psychique compromis, leur vision du monde dans lequel ils ont vu le jour est assombrie par la réalité, et leurs perspectives de mener une longue vie, sont souvent réduites à néant.

Nous, les représentants de nos pays à cette Conférence, nous avons été chargés par nos gouvernements, nos syndicats et nos organisations d'employeurs d'examiner ces questions. On nous a présenté de nombreuses images d'enfants exploités et vivant dans des conditions de pauvreté dans de nombreux endroits du monde, qu'il s'agisse du monde développé ou en développement, du monde avancé ou du tiers-monde, du monde urbain ou rural. Les participants à la Marche mondiale ont eu un impact inoubliable. Les ONG, qui sont dotées d'une riche expérience et de connaissances approfondies, nous ont présenté des statistiques et des solutions possibles.

Nous savions parfaitement que les résultats auxquels nous aboutirions ici devraient être suivis d'effets, devraient être réalistes et devraient, en dernière analyse, être pris au sérieux. Il fallait que les plus faibles, les exploités et les victimes des pires formes de travail des enfants en sentent les conséquences.

La convention et la recommandation représentent un appel pratique à prendre des mesures. Elles vont au-delà des symboles et des vœux pieux. Il ne s'agit pas d'une simple brochure, il ne s'agit pas d'une affiche ni d'une publicité. Leur impact potentiel ne peut se concrétiser que si elles recueillent une ratification universelle par tous les Etats Membres de l'OIT.

Nous avons travaillé de concert pour mettre au point un instrument véritablement pratique et correspondant aux réalités. De nombreux représentants ont sacrifié les solutions qui leur semblaient idéales pour parvenir à un document consensuel. Aucun vote n'a eu lieu, aucun représentant n'a été intimidé. Tous les points de vue ont été entendus afin de trouver des solutions qui permettraient une ratification par tous les Etats Membres.

Du point de vue des employeurs, la non-ratification par un pays équivaudra à un désir de persister à infliger la douleur aux enfants du pays en question et à perpétrer des abus contre eux. Nous invitons les Membres de l'OIT à adopter la convention sur les pires formes de travail des enfants, 1999, et à la ratifier par la suite.

La convention et la recommandation soulignent nombre de mesures qui, nous le savons, permettront efficacement d'éliminer les pires formes de travail des enfants. Certaines de ces mesures ne nécessitent pas de modifications législatives. Nous invitons instamment les Etats Membres à prendre des mesures pratiques, même avant qu'une ratification finale ne soit intervenue, et nous les invitons en particulier à promouvoir l'instrument lui-même et à le faire connaître à l'opinion publique. De nombreux Membres ont déjà établi des programmes IPEC, ont signé des mémorandums d'accord et ont mis en place des structures tripartites. Nous invitons les Membres à entamer leur programme d'action dès maintenant s'ils ne l'ont pas déjà fait.

J'aimerais maintenant vous faire quelques observations sur les procédés utilisés au sein de la Commission du travail des enfants pour parvenir à un consensus sur cette nouvelle convention des droits de l'homme.

La recherche d'un consensus total par opposition à l'utilisation de majorités simples qui exprimeraient les différents points de vue a été et est évidemment une condition préalable à une ratification la plus large possible. L'OIT, vous le savez, n'en est pas à ses débuts en ce qui concerne les négociations de couloirs et de cafés, mais ces négociations représentent souvent un préalable au vote ou une tentative de dégager une vue majoritaire. Certaines parties gagnent, et celles qui ne font pas partie de l'accord peuvent perdre. Les procédures formelles permettent, elles, les prises de position publiques qui sont alors approuvées, défendues ou attaquées publiquement. A notre avis, cette approche permet de confronter les points de vue, engendre des gagnants et des perdants, et parfois l'impression d'avoir été trahi ou souvent un sentiment de gratitude.

Au contraire, l'élargissement de l'accord à toutes les parties intéressées exige de s'en tenir à ses positions jusqu'à ce que tous les efforts possibles soient déployés pour dégager d'abord un consensus, et les discussions ne peuvent se dérouler qu'en dehors des séances plénières, dans les couloirs ou en coulisses. Cela permet aux parties de s'engager sans se sentir menacées par les débats publics et permet également de tester les solutions possibles sans être exposé aux attaques publiques.

Alors que cette procédure, utilisée par deux fois durant les réunions tripartites dans des négociations d'ensemble, présentait certains inconvénients, ceux-ci ont pu être surmontés par un retour aux procédures formelles, une fois le consensus dégagé.

De tels procédés ont mis quelques personnes mal à l'aise mais la bonne volonté explicite constatée au moment des négociations, a probablement contrebalancé l'effet des conflits apparus lorsque les procédures formelles ont été réintroduites afin d'étudier les aspects qui n'avaient pas été abordés dans les discussions non officielles.

Bien que les procédures aient parfois été imparfaites, je crois qu'elles méritent d'être examinées plus avant. L'OIT à l'heure où elle se transforme, où elle évolue vers une nouvelle Organisation, doit mettre au point des procédures plus rapides et plus efficaces pour accroître sa crédibilité et sa légitimité. Les méthodes employées par cette commission peuvent constituer le point de départ vers un examen plus approfondi et vers la promotion de procédés innovateurs.

Ce fut un privilège que de participer à ce débat historique sur cette convention pour tous les membres du groupe des employeurs. Bien que nous l'ayons déjà fait lors des réunions tripartites, j'aimerais de nouveau remercier M. Bequele, Mme Jankanish ainsi que le Bureau pour la qualité remarquable du travail, et pour la documentation et les avis fournis pendant ces deux années. Je sais que ce travail était fait avec cœur et pas seulement avec raison.

Les gouvernements ont été formidables et ont travaillé dans une grande mesure en équipes régionales efficaces. Nous les saluons et les remercions car nous avons appris beaucoup auprès d'eux.

Notre rapporteur, Mme Niven, a travaillé très dur pour parvenir à un texte concerté, et ses efforts et son travail de coordination ont été extrêmement appréciés par le groupe des employeurs.

Monsieur Trotman, comme vous le savez, j'ai beaucoup appris avec vous, vous êtes infatigable et c'était toujours un très grand bonheur d'entendre le président vous appeler M. Botha, alors que moi il m'appelait M. Trotman. Je crois que vous pouvez demander l'asile en Afrique du Sud si jamais vous deviez quitter la Barbade.

J'aimerais également remercier notre président, M. Atsain, qui n'a jamais renoncé et qui est parvenu au résultat que nous voulions tous, à savoir proposer un ensemble d'instruments consensuel réaliste et ratifiable, et je lui exprime pour cela mon profond respect.

Original anglais: M. TROTMAN (délégué des travailleurs, Barbade; vice-président travailleur de la Commission du travail des enfants) -- Vous ne pouvez imaginer à quel point je me réjouis d'avoir entendu les propositions d'asile de la part d'un autre pays, mais je dois vous dire que, lorsque vous entendrez, d'ici le mois d'avril de l'année prochaine, que je serai en Afrique du Sud et que j'accepterai la proposition d'asile que m'a faite M. Botha au nom de son gouvernement, vous saurez à quel point ils ont pu forcer la main aux travailleurs pour arriver à ce degré d'accord.

J'ai été tellement harcelé par M. Botha et par son équipe pendant tout cet exercice et j'ai tellement dû plaider auprès de mes collègues qu'ils ont menacé de m'obliger à quitter le territoire de mon pays, la Barbade, et de ne pas me laisser aller même chez nos petits voisins du Nord, dont le dirigeant était ici il y a quelques instants, mais ils ont insisté pour que je quitte toute la région de l'Atlantique. Je suis heureux que l'Inde et l'Afrique du Sud aient offert de m'accueillir à cette occasion et que cela s'inscrit dans les relations qui ont existé au cours des deux dernières années entre les employeurs et nous-mêmes. Cela montre le degré de respect que les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs avaient les uns pour les autres, bien que nous ayons à traiter parfois des questions éminemment délicates. C'est pourquoi, c'est une source de grande satisfaction pour nous, le groupe des travailleurs, de pouvoir vous dire que la tâche qui nous a été assignée il y a deux ans et qui consistait à élaborer une convention, assortie d'une recommandation, a été achevée, et que nous sommes maintenant à même de vous présenter un texte définitif que nous jugeons hautement ratifiable, et qui exige à notre avis que des mesures soient prises d'urgence par les gouvernements en vue de sa ratification.

Je devrais dire des mesures urgentes et immédiates, selon les termes que nous avons utilisés ces deux dernières semaines.

Bien des paroles d'appréciation ont été utilisées en diverses instances, à propos des personnes qui nous ont aidés et que nous remercions. Il est tout à fait naturel de répéter ces remerciements, même si cela peut paraître quelque peu fastidieux, d'autant plus qu'il est probable que nous oublierons certaines personnes éminentes. Mais je tiens à remercier, au nom du groupe des travailleurs, tout le personnel de l'OIT et les experts qui ont parfois travaillé en coulisses, ainsi que tous ceux qui ont été à nos côtés durant toute cette période et qui nous ont permis de retrouver espoir lorsque nous étions vraiment abattus.

Nous les remercions tous. Nous tenons à rappeler aux gouvernements que nous avons toujours respecté leurs positions quand ils défendaient les intérêts de leurs gouvernements respectifs, et notamment le président de la commission qui a accompli un travail remarquable, et qui a su amener à s'entendre les différents groupes qui avaient parfois des idées divergentes.

De même que vous avez entendu M. Botha féliciter le groupe des travailleurs; nous aussi nous tenons à féliciter les membres de son groupe en particulier M. Botha lui-même. Le dirigeant sud-africain a montré à la région des Caraïbes, ou plutôt au groupe des travailleurs dans son ensemble, la valeur inestimable d'être prêt à adopter de nouveaux paradigmes.

Je crois que tout le monde avait conscience que nous n'avions pas nécessairement à faire les choses comme nous les faisons auparavant. Ce qui importe, c'est que nous soyons vraiment attelés à la tâche qui nous était assignée, et je suis heureux de dire que le changement de paradigmes s'est fait à l'avantage de nos travaux, et surtout, je l'espère, à l'avantage des enfants qui seront plus riches grâce à nos efforts.

Nous tenons aussi à remercier tous ceux qui ont participé aux travaux. Nous tenons à souligner que, lorsque nous avons achevé nos travaux lundi dernier, nous avons eu un sentiment d'euphorie qui a été très agréable à partager avec vous tous. Ce qui a été particulièrement remarquable, c'est le sens de partenariat qui a caractérisé les deux semaines de nos travaux. Nous étions tous décidés à coopérer, un sentiment que nous avons partagé durant les travaux et que nous devons partager dans les résultats. Et s'il y a quelque chose à en tirer pour l'avenir, c'est le sentiment que la relation tripartite doit passer d'une attitude de controverse à une attitude de partenariat où nous pourrions reconnaître les rôles respectifs que nous avons à jouer pour améliorer le sort des hommes, celui de nos mandants et celui de tous les mandants à travers le monde.

Nous sommes toutefois très anxieux de nous assurer que l'euphorie qui s'est manifestée lundi dernier ne constitue pas une fin en soi. Nous avons maintenant un document qui ne sera combattu que par ceux qui choisiront de ne pas le comprendre, ou qui continuent à caresser la notion erronée selon laquelle la pauvreté est un état noble et que les enfants de certaines régions doivent être maintenus dans cet état, c'est-à-dire l'état des pires formes de travail. Cela permettrait aux pirates financiers et sociaux de sauver leurs consciences de temps à autre, par des actes de générosité occasionnels. A la suite de certaines déclarations d'incompréhension que moi-même et mes collègues avons entendues, même après la fin de nos travaux, nous pensons qu'il est nécessaire de souligner une fois de plus certains des aspects importants de cette convention que nous vous recommandons pour adoption. La convention n'impose pas de nouvelles exigences aux gouvernements, aux organisations d'employeurs ou aux organisations de travailleurs. La convention ne cherche pas à protéger le travailleur privilégié qui a un emploi aux détriment du chômeur. C'est plutôt le contraire qui est vrai. La convention ne nie pas l'importance de la pauvreté et les conséquences que celle-ci a pu et peut encore avoir sur certaines formes de travail des enfants. La convention, toutefois, met l'accent sur les pires formes de travail des enfants. Elle identifie les formes de travail des enfants qui peuvent être considérées comme faisant partie des pires formes, et elle indique clairement qu'aucune excuse, où que ce soit, ne peut être invoquée pour justifier l'une des quelconques pires formes de travail des enfants.

Qu'il me soit permis de réaffirmer qu'il n'y a pas de nouvel âge fixé dans notre convention. Nous avons pris comme point de départ la convention no 138 sur l'âge minimum. Dans le même temps, il est clair que cette convention autorise les enfants de moins de 18 ans à travailler dans des conditions convenues.

Notre convention a su s'inscrire avec beaucoup de prudence dans le sillage de la convention no 138. Il est clairement reconnu que, dans les régions où des personnes travaillent en dessous de l'âge stipulé, le fait qu'elles travaillent avant l'âge de 18 ans ne constitue pas en soi une des pires formes de travail des enfants. Ces régions ont été clairement définies et elles sont facilement compréhensibles dans le document lui-même.

C'est pourquoi, nous demandons instamment à tous ceux ici présents et dans le monde de ne pas chercher des excuses à ce fléau représenté par les pires formes de travail des enfants. Commençons plutôt à prendre les mesures nécessaires pour remédier à cet état de choses comme le demande la convention. Montrons au monde que, contrairement aux opinions avancées ici et là, la fonction normative reste une partie essentielle des fonctions de l'OIT.

Notre groupe tient à souligner que ce que nous avons fait ici ces deux dernières semaines, c'est simplement de préparer le terrain.

Ce que notre commission ne peut pas faire, c'est de traduire notre travail en programmes d'action avec un calendrier défini pour l'abolition complète du travail des enfants, et plus particulièrement pour l'élimination immédiate et urgente des pires formes de travail des enfants dans les sociétés que nous avons en face de nous.

Ce que nous souhaitons, toutefois, c'est de dire clairement que les pires formes de travail des enfants sont telles que nous attendons qu'elles soient éliminées d'urgence et que ceux qui sont victimes des pires formes de travail des enfants soient soustraits le plus rapidement possible à ce travail pour être intégrés dans les sociétés et pour avoir la possibilité de recevoir une éducation de base ou son équivalent en fonction, bien sûr, de l'âge auquel ils seront soustraits aux pires formes de travail des enfants.

Ce n'est pas une tâche qui appartient à notre commission, c'est une tâche qui incombe aux pays concernés ainsi qu'aux partenaires sociaux, les organisations d'employeurs et de travailleurs. Nous tenons à souligner, une fois de plus, que les gouvernements ne sauraient, à eux seuls, atteindre cet objectif et que, par conséquent, les organisations d'employeurs et les organisations de travailleurs doivent accepter que nous ayons aussi des responsabilités mondiales et nationales pour travailler de concert afin d'améliorer la situation des enfants.

Nous avons donc abouti à une convention, et maintenant qu'allons-nous faire? Comment pourrons-nous nous assurer qu'après avoir trouvé les termes exacts du haut de cette tribune, après avoir voté la ratification de la convention dans nos divers pays, il y aura un système de surveillance convenable? Que pourrons-nous faire pour avoir un bon système pour l'établissement des rapports? Quel sera le rôle du Conseil d'administration du BIT? Quel sera éventuellement le rôle des organisations d'employeurs et des organisations de travailleurs pour faire en sorte que les pires formes de travail des enfants soient éliminées et que ce fléau soit balayé de la face de la planète?

Nous pensons que la tâche qui nous attend est pluridisciplinaire, mais elle est urgente. Des efforts immédiats doivent être déployés par les partenaires sociaux de façon à passer à l'étape suivante. Et, à cet égard, nous aimerions faire deux observations.

Tout d'abord, je tiens à souligner que nous avons besoin d'une solidarité mondiale dans ce domaine. Nous sommes d'avis que de nombreux pays souhaiteront agir rapidement pour éliminer ce fléau mais, dans le même temps, il faut reconnaître que ces pays ont besoin d'aide et d'appui internationaux pour que l'élimination des pires formes de travail des enfants devienne une réalité.

Deuxièmement, nous pensons que des mesures rapides doivent être adoptées par les responsables de manière à aboutir à des conclusions efficaces. Il faut que le but auquel nous avons abouti au sein de la commission, même s'il n'a pas été accepté par toutes les parties représentées dans notre commission, montre que nous pouvons agir de manière beaucoup plus efficace et rapide si nous voulons arriver à des conclusions.

Puisque nous avons deux années de discussion, peut-être, faudrait-il qu'après la première année de discussion il soit utile que les fonctionnaires du BIT chargés de cette tâche établissent un glossaire des termes et des phrases avec l'interprétation que le Bureau leur donne. Nous avons passé beaucoup de temps à essayer de comprendre le sens de certains mots dans les diverses langues. Et je crois que si les personnes intéressées connaissaient d'avance le sens que le BIT donne à certains termes et phrases, cela faciliterait probablement les choses.

Nous sommes très heureux de ce que nous avons fait. Nous regrettons vivement de n'avoir pas pu satisfaire tous les intérêts de tous les groupes, mais cela aurait été absolument impossible. Nous sommes toutefois convaincus que le travail accompli reflète l'honnêteté et l'intégrité de toutes les parties présentes à la commission, et nous sommes heureux que ce travail ait pu être mené à bien sans avoir eu besoin de recourir au vote une seule fois au cours de ces deux années de travail.

Nous recommandons le travail que nous avons accompli, le rapport, la convention et la recommandation à votre agrément et à votre éventuel appui.

M. ATSAIN (délégué gouvernemental, Côte d'Ivoire; président de la Commission du travail des enfants) -- Ce matin nous avons écouté, avec beaucoup d'intérêt, la déclaration qui a été faite par le Président des Etats-Unis sur cette convention. Permettez-moi de dire que je me sens très honoré de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de m'adresser, pour la seconde fois, à la Conférence internationale du Travail en ma qualité de président de la Commission du travail des enfants.

C'est pour moi-même, pour mon pays, la Côte d'Ivoire, et pour toute l'Afrique un grand privilège que j'aie été choisi pour diriger les travaux de cette commission et veiller à ce que la discussion particulièrement constructive de l'année dernière débouche cette année sur l'élaboration d'une nouvelle convention et d'une nouvelle recommandation concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de les éliminer de toute urgence. Je suis également très ému d'avoir été associé à cet événement qui fera date dans l'histoire de l'OIT. Ces nouveaux instruments s'inscrivent dans le cadre du mandat de l'OIT qui a pour mission, notamment, de protéger nos enfants au travail. Il en va de leur avenir que les pires formes de travail auxquelles ils se trouvent encore astreints soient proscrites et éliminées de toute urgence.

Au moment d'entamer notre seconde discussion, les vice-présidents employeur et travailleur et moi-même étions fermement décidés à préserver l'esprit de consensus qui avait prévalu tout au long des débats de l'année écoulée.

Nous nous devions d'élaborer ensemble des instruments susceptibles de répondre aux attentes de tous, et surtout de tenir les promesses que nous avions faites aux enfants du monde entier, en particulier aux enfants de la Marche mondiale qui sont venus spécialement à Genève nous exprimer et nous rappeler leurs espoirs. Nous ne pouvions les décevoir et trahir la confiance qu'ils avaient placée en nous.

Pour que les instruments que nous avions mission d'adopter puissent être ratifiés universellement, il fallait que tous les gouvernements de l'Afrique, de l'Asie, de l'Europe et des Amériques soient en mesure d'annoncer avec fierté «Nous avons élaboré une convention pour nos enfants.» Pour cela, il fallait au préalable que nous soyons parvenus à nous entendre sur quelques questions particulièrement délicates. Toutes les parties intéressées, qu'il s'agisse des gouvernements, des employeurs, des travailleurs, souhaitaient adopter un instrument dans lequel elles puissent se reconnaître. Pour cela, tous ont travaillé de longues heures avec détermination et persévérance, non seulement au sein de la commission, mais également au sein de leurs groupes respectifs et dans le cadre de réunions restreintes tripartites.

Je suis aujourd'hui très fier de pouvoir affirmer que le résultat a dépassé nos attentes. Le texte que nous avons élaboré en commission, sans jamais avoir eu recours au vote, et cela a été souligné à plusieurs reprises, est un texte fort. Il énonce clairement l'obligation morale de tous les pays de prendre immédiatement des mesures en vue d'interdire les formes les plus inacceptables du travail des enfants.

Qu'il me soit à cet égard permis de revenir sur trois points qui me semblent particulièrement importants.

D'abord, avant toute chose, le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur participation à un conflit armé a été défini comme l'une des pires formes de travail des enfants. Il a été pour la première fois reconnu explicitement dans une convention internationale que le fait d'arracher des enfants à leur foyer et à leur famille pour les envoyer au front est une forme d'exploitation.

Deuxièmement, l'importance de l'éducation qui doit être dispensée aux enfants en vue de les soustraire aux pires formes de travail a été plus nettement soulignée. La convention prévoit en effet que des mesures doivent être prises au plus vite pour leur assurer l'accès à l'éducation de base gratuite et à une formation professionnelle adaptée à leurs besoins.

Troisièmement, la pauvreté ne saurait être invoquée comme excuse pour tolérer que le fléau des pires formes de travail des enfants continue de sévir au seuil de ce XXIe siècle. C'est pourquoi la convention accorde une place importante à la nécessité de renforcer la coopération et l'assistance internationales, notamment par des mesures de soutien au développement économique et social, aux programmes d'éradication de la pauvreté et à l'éducation universelle.

Je ne doute pas de votre volonté commune d'adopter cette convention et cette recommandation. Je suis également certain que chacun d'entre vous aura à cœur de faire en sorte que la convention soit ratifiée et appliquée de toute urgence.

Avant de conclure, je souhaiterais adresser des remerciements particulièrement chaleureux à tous ceux qui ont contribué à cette page marquante de l'histoire de l'OIT que nous sommes en train d'écrire.

Qu'il me soit permis d'abord d'exprimer toute ma gratitude à M. Botha et M. Trotman, les vice-présidents des groupes employeur et travailleur, ainsi qu'aux porte-parole des groupes régionaux des pays de l'Afrique, de l'Asie et du Pacifique, de l'IMEC, de l'Amérique latine et des Caraïbes.

Je tiens à rendre un hommage particulier au dévouement dont ils ont fait preuve tout au long de cette seconde discussion. Grâce à leur contribution exceptionnelle et à la confiance qu'ils ont bien voulu me témoigner, nous sommes aujourd'hui en mesure de vous présenter deux instruments qui ont été, je le rappelle encore, adoptés de façon unanime par la Commission du travail des enfants.

En ma qualité de président, j'aimerais enfin exprimer ma reconnaissance et mes remerciements à Mme Niven, rapporteur de notre commission, ainsi qu'à M. Bequele et aux membres du secrétariat, et notamment aux traducteurs et interprètes, pour le travail exceptionnel qu'ils ont accompli.

C'est là une nouvelle page de l'histoire de l'OIT que nous sommes en train d'écrire ensemble.

Nous sommes heureux d'y avoir participé, d'y avoir travaillé et d'avoir ainsi peut-être contribué à ce que nos enfants vivent demain dans un monde meilleur.

Tel est le message que je voudrais lancer à la Conférence pour qu'elle puisse adopter cette convention et cette recommandation afin que, demain, nos enfants aient un avenir meilleur que celui que nous-mêmes avons eu aujourd'hui et que nos parents ont eu hier.

Original anglais: M. MISHRA (délégué gouvernemental, Inde) -- Puisque c'est la première fois que je prends la parole dans cette assemblée plénière, permettez-moi de féliciter Monsieur le Président pour son élection et pour l'excellente manière dont il a dirigé les débats de la Conférence.

Il y a un moment dans la vie d'une institution, où l'accomplissement de son mandat est une source d'enthousiasme et de satisfaction générale. Et ce moment est arrivé pour l'Organisation internationale du Travail, la plus ancienne des organisations internationales. Avec l'adoption de ce nouvel instrument international concernant l'élimination des pires formes de travail des enfants par la Commission du travail des enfants, la communauté internationale renforce son engagement d'éradiquer d'un fléau qui hante la conscience collective de l'humanité depuis des générations. Pour reprendre les mots du Président des Etats-Unis, ce matin, à la Conférence, c'est un progrès essentiel, un cadre offert aux enfants digne du troisième millénaire.

Je tiens à rendre hommage à l'éthique, à la culture et à la tradition du tripartisme, qui est l'assise même de l'Organisation internationale du Travail. Pour cela, il faut remercier le président de la commission, les vice-présidents, les responsables, et le personnel du BIT, y compris tout le personnel d'appui, méritent nos félicitations les plus sincères.

Ma délégation est très heureuse du fait que le document qui nous est présenté, et qui a été adopté par consensus, reflète la plus grande partie de nos préoccupations, qui sont les préoccupations des pays en développement. Le projet proposé pour adoption représente l'aboutissement logique d'une série d'initiatives audacieuses et imaginatives, prises depuis plusieurs années sur les plans national et international, et auxquelles la délégation de l'Inde a toujours contribué de manière constructive.

Quel est le thème central de toutes ces initiatives? C'est cet enfant que Wordsworth a décrit comme étant le «père de l'homme». L'enfance constitue, à n'en pas douter, l'âge le plus malléable et le plus influençable du développement de l'homme. Comment un enfant d'aujourd'hui pourrait-il devenir un membre responsable et productif de la société de demain si on ne lui garantit pas un environnement qui lui permette de développer pleinement sa santé sociale et physique? Si les enfants sont ignorés et privés de leur enfance, et du plaisir, et de la joie associés à cette période de la vie, les nations se priveront ainsi de ressources humaines potentielles nécessaires au progrès social, au développement économique, à la paix et l'ordre, à la stabilité sociale et à la citoyenneté responsable.

Les pires formes de travail des enfants, telles qu'elles sont décrites dans les articles 3 a), b) et c) de ce projet de texte, c'est-à-dire les formes d'esclavage, l'utilisation des enfants à des fins de prostitution et de pornographie ou pour le trafic de stupéfiants et dans l'article 3 d) concernant l'emploi d'enfants à des travaux dangereux, sont, sans aucun doute, des crimes honteux contre l'humanité. Elles représentent des pratiques perverses, et immorales, révoltantes pour une conscience humaine civilisée. Elles sont l'antithèse du progrès social et doivent être condamnées universellement. Avons-nous le moindre droit moral de soumettre nos enfants à une existence aussi dégradée? Avons-nous le moindre droit moral, la moindre autorité d'amener la génération qui nous succédera si près de la destruction? La réponse est non. On ne peut permettre que les bourgeons de l'enfance flétrissent avant de pouvoir fleurir dans leur jeunesse et l'accomplissement de leur humanité. Aucun individu, aucune institution, aucun Etat Membre et, moins encore, la communauté internationale, ne pourraient se justifier d'en être arrivés à cela.

Tel est l'objectif à atteindre à travers ce nouvel instrument international. Celui-ci ne vise pas l'élimination de toutes les formes de travail des enfants, mais simplement l'interdiction et l'élimination des pires formes de ce travail. Il vient donc compléter, de cette façon, la convention (no 138) sur l'âge minimum, 1973, qui reste à ce jour l'instrument fondamental concernant l'abolition du travail des enfants. En adoptant ce texte, la communauté internationale s'est peut-être montrée sélective, mais cette sélectivité, inévitable dans les circonstances actuelles, ne doit pas être vue comme une réticence, et encore moins une opposition à l'interdiction et à l'élimination des autres formes de travail des enfants.

Mon gouvernement a toujours adopté une politique et une approche active et constructive pour l'interdiction et l'élimination de toutes les formes de travail des enfants. Cette vision se reflète clairement dans la Constitution de l'Inde, et dans une série de textes législatifs adoptés au cours de plus de quarante ans et visant à déterminer et à appliquer un âge minimal d'accès à l'emploi, de même que dans une série de programmes et d'activités visant à libérer les enfants des travaux dangereux, et à assurer leur réinsertion à travers des programmes d'éducation, de nutrition, de santé et de formation professionnelle.

Conscients que la pauvreté, les problèmes d'éducation et le travail des enfants, vont de pair, de nombreuses initiatives novatrices et courageuses ont été lancées afin d'assurer une infrastructure solide à une éducation universelle gratuite et fonctionnelle qui garantisse un accès universel à l'éducation, et rende le processus d'apprentissage lui-même agréable, intéressant et utile pour les enfants. Toute une série d'efforts planifiés, coordonnés et concertés sont actuellement déployés pour lutter contre les problèmes de la pauvreté, du chômage et de l'analphabétisme des parents. Mais l'étendue et la complexité de ces problèmes, exacerbés encore par le manque de ressources, font qu'il est difficile, pour le gouvernement central, de fixer une échéance précise pour l'élimination totale du travail des enfants.

Nous n'avons jamais utilisé, et nous n'avons pas l'intention d'utiliser les problèmes de pauvreté, de chômage, de sous-emploi ou d'exclusion sociale comme alibis pour justifier l'existence et la permanence du problème de travail des enfants. Nous avons toujours cru à son éradication progressive et des stratégies diversifiées ont été mises en œuvre dans ce but. De même, les engagements pris sur les plans constitutionnel, juridique et politique visant à l'interdiction et l'élimination totale du travail des enfants ne sauraient être remis en question.

Toutefois, nous voudrions insister sur le fait que l'interdiction et l'élimination totale du travail des enfants ne peuvent être le fait d'un seul Etat Membre, d'un seul gouvernement, d'un seul ministère ou d'un seul département. Elles doivent être une préoccupation mondiale. Ainsi, le partage des tâches, dans un monde fondé sur des inégalités économiques qui ne cessent de s'accroître, entre les différents pays et à l'intérieur d'un même pays, devient une question de la plus haute importance. La coopération et l'assistance internationales doivent, dans ce contexte, être perçues comme des instruments importants d'un tel partage des tâches.

Je suis heureux de m'associer à M. Trotman qui a dit, ce matin, que cet instrument avait fixé le cadre, l'esprit et la voie d'une série d'actions collectives, planifiées et coordonnées sur les plans national et international.

A cette occasion, nous voudrions exprimer notre solidarité et notre engagement total aux côtés de la communauté internationale, vous dire que nous sommes avec vous. Il ne s'agit pas là d'un slogan ni d'une phrase toute faite, mais d'une véritable conviction et d'un désir sincère de nous associer à vous tous dans cette tâche gigantesque et pourtant si noble. Je voudrais évoquer, sur ce point, une déclaration relevée dans le rapport annuel de l'UNICEF datant de deux ans, et qui affirme que le jour viendra où les nations seront jugées, non en fonction de leur puissance militaire ou économique ni en fonction de la splendeur de leurs capitales et de leurs bâtiments publics, mais bien par rapport au bien-être de leurs populations, aux niveaux de santé, de nutrition et d'éducation atteints, aux chances qui leur seraient offertes d'obtenir une rémunération équitable pour leur travail, et leur capacité de participer aux décisions qui touchent à leur existence, par rapport au respect de leurs libertés civiles et politiques, aux dispositions prises en faveur des personnes les plus vulnérables et les plus désavantagées et au niveau de protection offert aux esprits et aux corps de leurs enfants:

Lorsque ce jour viendra, nos enfants entreront dans une nouvelle ère, que Rabindranath Tagore a décrit comme un monde où l'esprit serait sans crainte, la dignité reconnue et la connaissance libre. Ces enfants sauront se mobiliser et s'organiser, afin de se libérer des poids et des contraintes qui les ont enchaînés pendant des générations entières et les ont privés des droits les plus fondamentaux. Ce jour-là n'est plus très éloigné.

C'est par ces mots que ma délégation voudrait recommander l'adoption à l'unanimité de ce projet de convention.

Original espagnol: M. PRETI JORQUIN (délégué des employeurs, Guatemala) -- J'aimerais féliciter chacun des membres de cette commission, et plus particulièrement le président de cette commission et les deux vice-présidents pour la compétence avec laquelle ils ont su négocier un consensus en vue de l'adoption de cette convention par acclamation.

Ce jour est l'un des jours les plus marquants de l'histoire de l'OIT. L'adoption d'une convention en vue de l'élimination des pires formes de travail des enfants fait de ce jour un jour aussi important que ceux où l'on a adopté les conventions fondamentales.

Il y a quelques années, j'ai participé aux réunions préliminaires, qui se sont déroulées dans différentes parties du monde, et je n'aurais jamais cru que l'on parviendrait aussi rapidement à une si heureuse issue.

L'adoption de cette convention implique pour les employeurs, les travailleurs et les gouvernements des obligations qui vont au-delà de la convention proprement dite, car ce n'est pas la seule adoption de cette convention qui permettra d'offrir une vie digne à ces enfants qui, à l'heure actuelle, se trouvent dans des situations qui sont impossibles à supporter pour tout être humain. Il nous faudra également des mesures additionnelles et parallèles qui devront être mises en œuvre.

Les engagements pris dans le domaine de l'éducation par les gouvernements, et les investissements avec des conditions appropriées comme paramètre principal de création d'emplois réalisés par les employeurs, sont indispensables si l'on veut que les mesures prises par les pays aient des effets durables.

La mise en œuvre de ces mesures est sans doute moins urgente qu'une planification à long terme dans les domaines sociaux, économiques et du développement humain, sans laquelle il ne sera pas possible d'atténuer la situation d'exclusion que l'on connaît dans certains pays et qui est la principale cause de ces pires formes de travail des enfants. Par conséquent, il est nécessaire que l'OIT et toutes les autres organisations bilatérales et multilatérales contribuent à tracer la voie du développement qui permettra à nos enfants de recevoir une formation et de bénéficier des fruits d'un développement humain, social et économique dont ils ont été tenus à l'écart. Avec le consensus dégagé au sein de la Commission du travail des enfants, nous pouvons être certains que la ratification de cette convention sera universelle, ce qui en fera une convention fondamentale pour le bien des enfants, et même de l'humanité tout entière.

Les enfants sont l'avenir de l'humanité. En les protégeant et en investissant en eux, on fera de ce monde un monde meilleur.

J'invite et j'exhorte par conséquent les gouvernements des Etats Membres de l'OIT à ratifier sans tarder cette convention exemplaire dans laquelle se reflète le souhait des travailleurs, des employeurs et des gouvernements d'éliminer les pires formes de travail des enfants.

Original anglais: Mme LAURENT (déléguée des employeurs, Suède) -- Le choix des thèmes qui doivent faire l'objet de nouvelles normes a suscité, à plus d'une reprise, des critiques de la part des employeurs au cours des dix dernières années. Mais tel n'est certainement pas le cas en l'occurrence pour ce qui est de l'interdiction et de l'élimination des pires formes de travail des enfants. Sur ce point, bien au contraire, nous partageons l'opinion générale selon laquelle il s'agit d'une question essentielle. Il ne fait aucun doute que l'OIT est bien l'instance appropriée pour conduire ce débat.

Il s'est agi avant tout, au sein de l'Organisation internationale du Travail, de chercher des moyens d'assurer un avenir plus prometteur à ces enfants dont la vie active a commencé beaucoup trop tôt.

En tant que groupe, nous nous sommes entendus sur un projet de convention et de recommandation et nous y sommes parvenus sans recourir au vote. Toutes nos décisions ont été prises par consensus.

Nous nous sommes efforcés ensemble de rédiger des textes qui soient concis, qui soient simples, ciblés et réalistes. Ces discussions sont maintenant terminées et il est important de passer à l'acte et de ratifier sans retard cette convention. Il faut absolument libérer ces enfants de leur emploi.

J'espère très sincèrement que ces nouveaux instruments seront la preuve de leur efficacité et qu'ils seront ratifiés et mis en œuvre de façon universelle.

Lorsqu'elle sera en vigueur et appliquée, cette convention, il faut l'espérer, permettra à ces enfants de connaître cet avenir meilleur que nous avons voulu leur procurer.

Original anglais: M. AHMED (délégué des travailleurs, Pakistan) -- Au nom de la délégation des travailleurs du Pakistan, c'est un immense privilège et un immense honneur pour moi que de prendre la parole aujourd'hui, au sujet d'une convention extrêmement importante, convention qui vise à l'élimination des pires formes de travail des enfants. Nous ne l'ignorons pas, les fondateurs de cette grande Organisation en 1919 avaient déjà parlé des dangers du milieu du travail et déjà ils avaient évoqué le travail des enfants dans le préambule de la Constitution.

Dans le rapport, on signale à juste titre que le travail des enfants est dû, en grande partie à la pauvreté. C'est la raison pour laquelle il est dit dans la déclaration de Philadelphie que la pauvreté, où qu'elle existe, constitue un danger pour la prospérité de tous. Nous pensons que les enfants sont l'avenir de notre postérité, leur bien-être physique, mental, social est bon pour eux, non seulement en tant qu'individus mais également pour leur famille, la nation et l'humanité tout entière.

C'est pourquoi les soins aux enfants, leur éducation, un environnement approprié, sont de la responsabilité de la famille, de l'Etat et de la communauté internationale. La Déclaration du Sommet mondial pour le développement social affirme, à juste titre, que le capital humain est le centre du développement et le meilleur atout dans ce contexte. Le Directeur général, M. Somavia, a évoqué la situation des enfants dans son rapport. Deux cent cinquante millions d'enfants travaillent dans le monde. Ce rapport, qui figure dans le compte rendu no 19 insiste sur les priorités de l'action à divers échelons: une éducation de base, la formation professionnelle et la nécessité de soustraire les enfants du monde du travail, de les réintégrer dans la famille et de répondre aux besoins de la famille. Tout cela est très important car tant que les familles resteront pauvres, elles continueront d'envoyer leurs enfants au travail. Il incombe à la société et à l'Etat de veiller au bien-être des familles démunies et de permettre aux enfants d'acquérir une véritable éducation de base et une formation. L'article 3 y fait référence de façon expresse, aux conditions susceptibles de nuire à la santé, la sécurité ou la moralité de l'enfant. Les pratiques de l'esclavage, de la servitude pour dettes doivent être immédiatement éliminées. De même, les législations et autorités nationales doivent définir les risques de certains travaux avec les partenaires sociaux. L'Etat doit également consulter ces derniers pour la mise en œuvre des règlements. L'article 6 prévoit l'élimination des pires formes de travail des enfants par des programmes d'action et d'élaboration, et la mise en œuvre de ces programmes doit se faire en consultation avec les partenaires sociaux. L'article 7 porte sur les sanctions pénales et sur les mesures qui doivent être mises en œuvre dans un délai déterminé en vue d'éliminer les pires formes de travail des enfants. L'article 8 souligne la nécessité d'une coopération internationale en faveur du développement économique et social, des programmes d'éradication de la pauvreté et de l'éducation universelle. Nous nous félicitons donc de ce projet de convention et de recommandation.

Dans le contexte de l'action internationale, nous estimons que l'Etat se doit de fournir une éducation et de soustraire ces enfants, qui sont l'avenir de notre postérité, des pires formes de travail, de les réintégrer dans la société et de les protéger contre les aléas. Nous nous félicitons du travail effectué par l'OIT, plus particulièrement par son programme IPEC.

Dans mon propre pays, les travaux de l'OIT ont contribué au bien-être des enfants travaillant dans l'industrie des ballons de football et un accord a également été conclu dans l'industrie des instruments chirurgicaux et dans celle du cuivre. La collaboration avec l'OIT et avec les partenaires sociaux permettra de réintégrer ces enfants, de les rééduquer et de les réintégrer dans la société.

Nous nous félicitons également de l'intervention du Président Bill Clinton de ce jour. Nous sommes heureux de son engagement en faveur des droits des travailleurs et en vue de l'élimination du travail des enfants. J'y vois là une reconnaissance des travaux de l'IPEC à Sialkot.

Nous estimons qu'il faut poursuivre la coopération internationale afin que les pays du tiers monde puissent consacrer davantage de ressources au développement de leur système éducatif et assurer ainsi un meilleur avenir aux enfants. En ce qui concerne l'action internationale, il faut alléger la dette des pays du tiers monde et humaniser l'économie mondiale, notamment lorsque le FMI et la Banque mondiale imposent des politiques qui aggravent le chômage.

Nous espérons que la coopération entre l'OIT et les institutions de Bretton Woods permettra d'atténuer la pauvreté dans nos pays.

Nous nous félicitons de ce projet de convention et de recommandation. Nous nous félicitons aussi du travail effectué par les éminents membres de cette commission tripartite et en particulier M. Atsain, président, M. Bhota, vice-président employeurs et le camarade Trotman, qui a fort bien dirigé le groupe des travailleurs, M. Steyne, qui a travaillé au nom du groupe des travailleurs dans le comité de rédaction, Mme Niven, rapporteur du Royaume-Uni, M. Bequele et son équipe du BIT qui ont travaillé tard dans la nuit et pendant le week-end, tout cela pour le bien-être des enfants.

Nous invitons donc les Membres à adopter ce rapport, qui a déjà été adopté par la Commission afin de manifester notre solidarité pour un avenir meilleur pour l'humanité.

J'aimerais saisir cette occasion pour dire que les enfants des pauvres appartiennent à l'humanité. Nous devons en tenir compte et prendre soin d'eux. Tous les enfants sont des êtres humains quel que soit leur niveau de prospérité. La société ne doit pas leur dénier l'égalité des chances. La communauté internationale doit donc offrir l'égalité des chances aux enfants pauvres. Les enfants pauvres sont comme des fleurs qui fleurissent dans la forêt, mais personne ne les voit fleurir car on ne leur en offre pas la possibilité. Je crois qu'il est de notre responsabilité morale et juridique de leur offrir la possibilité de fleurir et de contribuer à la prospérité de la société.

Nous nous félicitons également que Mme Robinson, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, ait envoyé un message à cette occasion. Elle a été sensible au fait que la nouvelle convention fait référence de façon directe à la convention relative aux droits de l'enfant dont nous fêtons le dixième anniversaire cette année.

Nous appuyons pleinement les conclusions, le projet de convention et de recommandation, et nous enjoignons tous les Etats Membres à non seulement ratifier cette convention mais également à prendre des mesures pour la mettre en œuvre, pour offrir un avenir meilleur à nos enfants et permettre l'avènement d'une ère meilleure pour la société et l'humanité tout entière.

Original anglais: M. DOSHI (conseiller technique des employeurs, Inde) -- Je voudrais tout d'abord saisir cette occasion pour féliciter chaleureusement le Président de son élection à la tête de cette Conférence et la manière remarquable dont il a conduit nos travaux.

La séance d'aujourd'hui est consacrée à l'adoption du rapport de la Commission du travail des enfants. Je considère que l'un des souvenirs les plus marquants de cette 87e session de la Conférence internationale du Travail sera, à n'en pas douter, l'adoption historique, demain, de la convention et de la recommandation concernant l'interdiction des formes de travail des enfants. J'espère que les Etats Membres représentés dans cette salle exprimeront, à cette occasion, leur engagement résolu d'effacer cette tache de nos sociétés en adoptant à l'unanimité ces textes.

Ceci dit, l'adoption n'est qu'un premier pas, un premier pas important, certes, mais un premier pas dans un processus qui conduira, il faut l'espérer, à l'élimination des pires formes de travail des enfants dans les plus brefs délais. Nous devons maintenir notre engagement, notre détermination, pour permettre la ratification et l'application universelle de la convention et de la recommandation, qui ont été formulées au terme d'un travail considérable. Tout d'abord, nous avons les projets de textes préparés par le Bureau, qui ont été une excellente base pour le débat en commission, puis les textes dont vous êtes maintenant saisis, qui sont le résultat des débats qui se sont déroulés au cours des deux dernières semaines entre les mandants tripartites. Je voudrais à cet égard me faire l'écho de mes collègues employeurs qui ont dit à maintes reprises, depuis la première discussion, que nous voulions un ensemble d'instruments qui soit non seulement brefs et concis, qui puissent être ratifiés par tous les pays et applicables dans la lettre et dans l'esprit. Les négociations ont parfois été difficiles, mais je crois que nous avons atteint cet objectif.

Il est temps maintenant de passer des belles paroles aux actes, et qui plus est sans tarder. Si nous avons tous reconnu que ces formes de travail des enfants sont, dans une large mesure, la cause aussi bien que la conséquence de la pauvreté, au même titre que le manque d'accès à l'éducation, cela ne saurait en aucune manière constituer une excuse à l'inaction. Nos faillirions, de manière impardonnable, à notre devoir à l'égard des enfants victimes de ce que nous avons défini comme les pires formes de travail des enfants si nous ne mettions pas en place, au plus vite, des programmes d'action qui leur permettent d'échapper à ces formes de travail et qui leur donnent une chance de connaître un avenir meilleur. Ces enfants ont placé leur espoir en nous et nous ne saurions les décevoir. N'hésitons pas, par conséquent, à déclarer solennellement, ici même aujourd'hui, que nous allons traduite ces paroles en action immédiate, en permettant la ratification rapide et universelle de cette convention, suivie d'une action immédiate visant à éliminer les pires formes de travail des enfants de notre société car ces enfants font partie intégrante de notre avenir. Cette tâche ne sera pas aisée, tout particulièrement pour les pays en développement où le problème est particulièrement aigu. Toutefois, c'est une tâche qui n'est pas impossible à condition de nous y consacrer de toutes nos forces et d'utiliser au mieux les ressources dont nous disposons.

En ce qui me concerne et en tant que représentant d'un pays en développement, je puis vous assurer que les employeurs indiens vont œuvrer aux côtés de nos autorités, des organisations de travailleurs et de la société civile pour faire en sorte que les objectifs de cette convention et de cette recommandation soient véritablement traduits en actes.

C'est sur ces mots que je voudrais conclure tout en recommandant à la Conférence d'adopter ce rapport.

Original anglais: M. SEMRAU (conseiller technique des employeurs, Etats-Unis) -- Avant de lire le texte que j'ai préparé, je voudrais faire la déclaration suivante à consigner au nom du groupe des employeurs de la Commission du travail des enfants.

Le paragraphe 218 du rapport devrait refléter un échange de vues entre les employeurs et les travailleurs sur le sens du terme éducation de base tel qu'il apparaît dans la convention et dans la recommandation, y compris à l'article 7 de la convention. Les employeurs ont clairement compris, au cours des débats, qu'on entend par éducation de base l'éducation primaire plus une année, c'est-à-dire huit ou neuf années de scolarisation, et que cette scolarisation doit être basée sur le programme scolaire et non sur l'âge. Le rapport de la commission devrait refléter cette vision.

Depuis 1997, j'ai consacré une partie de mon temps à cette question du travail des enfants. Aux côtés de plusieurs centaines d'autres membres de cette commission, nous avons étudié le concept du travail des enfants.

Deux années donc; une petite partie de ma vie. Malheureusement, pendant ces mêmes deux années, plusieurs centaines de millions de jeunes ont connu non pas le concept du travail des enfants, mais bien la réalité dure et implacable de ce travail, jour après jour, privé de tout le plaisir et de la joie de ces années d'enfance.

Des jeunes qui ont été précipités bien trop tôt dans cette responsabilité de devoir gagner leur vie et de travailler pour leur propre famille, voire même pour leur famille, plus éloignée.

C'est la connaissance de cette situation tragique qui a poussé la commission à effectuer ses premiers pas visant à libérer les enfants de ces charges. Ces premiers pas sont des pas positifs et je crois que nous pouvons être fiers de ce que nous avons réalisé.

Cette convention sur les pires formes de travail des enfants traite d'un petit nombre de situations dans lesquelles les enfants sont exploités. Ce sont néanmoins les situations les plus atroces du travail des enfants.

Je voudrais, dans les quelques minutes qui me sont imparties, éviter de répéter ce qui a déjà été dit au sujet de cette convention. Nous sommes tous conscients du fait que ce document est un document qui peut parfaitement être ratifié et qui permettra un réel changement.

Je voudrais appeler votre attention sur certaines des raisons qui me paraissent importantes et qui expliquent pourquoi l'élaboration de cette convention sera sans aucun doute considérée comme l'une des activités les plus réussies de l'OIT. C'est un processus qui pourrait servir à l'avenir pour aboutir au même succès dans d'autres domaines.

Tout d'abord, tout le monde était d'accord pour considérer que cette question devait être traitée. Les gouvernements, les employeurs, les travailleurs et la société dans son ensemble étaient tous d'accord sur la définition du problème et sur la nécessité d'agir rapidement pour le régler.

Dans le même temps, l'élaboration de cette convention était marquée par le réalisme, du concept à l'achèvement. Chacun a reconnu que l'idéalisme devait céder au pragmatisme et que la fonction devait l'emporter sur la forme.

Un travail approfondi de recherches et de recueil de données a permis aux rédacteurs d'avoir toutes les connaissances nécessaires à leur disposition pour mener leur tâche à bien. Cela a également préparé l'opinion publique à accueillir le travail, une fois achevé.

Les rédacteurs ont adopté dans leur tâche des méthodes distinctes et uniques. Tout d'abord, la polémique et l'opposition ont céder le pas au consensus sur chaque question, ce qui fait que nous avons aujourd'hui un texte que la quasi-totalité des participants appuie.

En outre, les rédacteurs se sont entendus pour travailler sur le contenu et sur la forme par l'intermédiaire d'une structure représentative, dans un climat de confiance qui a contribué à la qualité du produit final.

Aujourd'hui, ce produit final peut être ratifié par chaque Etat Membre de l'Organisation.

En tant qu'employeur des Etats-Unis, je peux dire que ce texte est utile car il cadre bien le dialogue sur le travail des enfants en traitant de lois et de règlements qui sont parfaitement bien définis.

En tant que partenaire social, je puis dire que ce texte offre un plan de travail clair qui définit bien les orientations et les objectifs visés.

En tant que membre de la société, je puis dire que ce texte représente un premier pas important vers l'élimination des formes indésirables de travail des enfants. Nous pouvons tous admettre que les enfants peuvent, et même doivent, travailler dans des formes souhaitables de travail, pour leur donner des occasions d'apprendre et de développer des aptitudes qui leur serviront tout au long de leur vie.

Nous connaissons bien la différence entre ce qui est souhaitable et ce qui ne l'est pas. Cette convention définit non seulement les formes non désirables du travail des enfants, mais aussi les formes atroces du travail des enfants, et nous avons lancé le processus qui conduira à l'élimination de ces pires formes de travail des enfants.

Ce que nous avons appris de ce travail ainsi que les programmes et les institutions mis en place pour donner effet à cette convention contribueront à notre lutte continue pour éliminer toutes les formes indésirables de travail des enfants.

Et je tiens, en conclusion, à rendre hommage aux qualités de chef de M. Atsain, président de la commission; aux qualités de M. Botha, vice-président employeur, et de M. Trotman, vice-président travailleur, ainsi qu'à l'appui remarquable qui nous a été offert par le BIT, par l'Organisation internationale des employeurs et par la Confédération nationale des syndicats libres.

Enfin, je tiens à exprimer ma reconnaissance pour l'occasion qui m'a été donnée de participer à ces travaux.

Original anglais: M. MAKEKA (délégué des employeurs, Lesotho) -- Permettez-moi, avant toute chose, de me joindre à ceux qui vous ont félicité et qui vous ont adressé tous leurs meilleurs vœux à vous ainsi qu'à votre bureau. J'aimerais également féliciter M. Somavia, Directeur général du BIT, et je lui adresse tous mes meilleurs vœux.

Nous arrivons au terme de ce siècle et nous sommes à l'aube d'un nouveau millénaire. Nous sommes fiers d'avoir participé à cette rencontre historique où la communauté internationale, par l'entremise de l'Organisation internationale du Travail, adopte la convention et la recommandation historiques en vue de l'élimination des pires formes de travail des enfants. Je n'entrerai pas dans le détail de la convention et de la recommandation étant donné que le président de la commission, M. B. Botha, d'Afrique du Sud, l'a fort bien fait.

J'aimerais toutefois exprimer la satisfaction de ma délégation vis-à-vis du travail effectué par la Commission du travail des enfants. C'est pourquoi nous n'hésitons pas à recommander l'adoption par cette Conférence de la convention et de la recommandation par un vote unanime et nous recommandons également à tous les Etats Membres de l'OIT de les ratifier.

Ces instruments, selon les propos du Directeur général, Monsieur l'Ambassadeur Somavia, cherchent à éliminer de la face du monde ces formes de travail qui nous révoltent tous. Nous n'aimerions voir aucun de nos enfants dans ces formes de travail. Je suis fier de dire que les employeurs de l'Afrique abhorrent tous ces formes de travail des enfants. La décence, qui ne connaît aucune limite de culture ni de répartition géographique, nous pousse tous à encourager et inciter nos gouvernements non seulement à ratifier ces instruments, mais également à s'assurer que leurs dispositions deviennent une réalité partout dans le monde.

Le président et les membres du bureau de la Commission du travail des enfants ont cherché dès le départ à travailler de telle sorte que ces instruments recueillent un consensus, contrairement à nos procédures de vote traditionnelles. Nous aimerions les féliciter car, bien que cette procédure ait été un peu un jeu de hasard, et plutôt peu orthodoxe, elle a répondu à nos préoccupations, à savoir que, par le passé, les conventions nous étaient un peu imposées par la force, du fait de la tyrannie de la majorité, et qu'alors bon nombre de gouvernements votaient en faveur de ces instruments mais refusaient ou omettaient, par la suite, de les ratifier. C'est pourquoi, contrairement aux sceptiques qui se sont opposés à cette façon de procéder, nous estimons qu'à l'avenir il conviendrait de se demander si cette procédure ne serait pas la meilleure façon d'adopter des instruments.

On a essayé de faire reconnaître l'impossibilité pour les enfants de recevoir une éducation de base comme une des pires formes de travail des enfants. Nous sommes reconnaissants à tous les membres de la Commission d'avoir adopté une formule à laquelle nous pouvons tous souscrire. Mon pays est de ceux qui n'ont pas d'éducation de base gratuite et obligatoire. Et pourtant, il y a peu de temps encore, nous avions un des taux d'alphabétisme les plus élevés d'Afrique. Tous les partis politiques de mon pays, le Lesotho, aspirent à une éducation de base obligatoire et gratuite, mais c'est nier la réalité. La réalité est que nous n'en avons tout simplement pas les moyens du fait de notre pauvreté. Le gouvernement actuel du Lesotho a décidé de commencer par introduire l'année prochaine une scolarité obligatoire gratuite pour la première année de scolarité. Il faut également reconnaître qu'au Lesotho il y a de nombreux villages éparpillés dans les montagnes. Bon nombre de ces villages ne peuvent être atteints qu'à cheval. C'est pourquoi il est impossible pour le gouvernement de faire appliquer le système de scolarité obligatoire dans les écoles. Et surtout, même si les enfants ne travaillent pas, cela ne signifie pas qu'ils vont à l'école. Cette question est en effet beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît à première vue.

En conclusion, dans le secteur structuré de l'économie du Lesotho, il n'y a aucun enfant qui travaille. Nous avons des enfants qui travaillent au sein de leur famille. C'est ce groupe d'enfants dont les parents sont le plus durement frappés par la pauvreté. Nous espérons que les dispositions de l'article 8 de la convention qui nous est proposée deviendront une réalité pour ces groupes vulnérables.

Original anglais: M. POISSON (délégué gouvernemental, Canada) -- Le Canada est heureux de s'exprimer ici au nom des gouvernements du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège, de la Suède, de la Suisse, de la Turquie et de l'Uruguay.

Nous sommes heureux de soutenir l'adoption de cette nouvelle convention concernant l'interdiction et l'élimination des pires formes de travail des enfants. Nous sommes persuadés qu'il s'agit là d'un instrument important pour la protection des enfants.

Tous les enfants, qui sont les membres les plus vulnérables de notre société, exigent une protection spéciale. Ceux qui sont soumis aux pires formes de travail des enfants exigent notre attention de toute urgence. Il faut absolument les arracher à ce type d'emploi, assurer leur réinsertion et leur intégration sociale. C'est une tâche de la plus haute importance.

Cette convention se réfère également au recrutement et à l'utilisation des enfants dans les conflits armés. Elle envoie par là un message fort. En effet, la convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant fixe à 15 ans l'âge minimal pour le recrutement d'enfants aux fins de conflits armés. Cette nouvelle convention porte cet âge minimal à 18 ans dans ce domaine, tout en reconnaissant qu'il s'agit là de l'une des pires formes de travail des enfants.

Nous souhaitons vivement que l'élan qui a été imprimé ici, au sein de l'OIT, s'accélérera à l'avenir. Nous voyons, en particulier, dans cette convention, une première étape vers la fixation à l'âge de 18 ans du seuil minimal universel pour le recrutement d'enfants devant participer à des conflits armés sous toutes leurs formes. Nous voudrions exhorter les Etats à tirer parti de cette dynamique pour faire en sorte que cette norme plus exigeante soit entérinée dans le protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant consacrée à la participation des enfants aux conflits armés.

En conclusion, nous exprimons l'espoir que cette convention sera adoptée à l'unanimité par la Conférence internationale du Travail et nous espérons qu'elle sera ratifiée par tous les Etats Membres de l'OIT.

Original allemand: M. FENDRICH (délégué gouvernemental, Allemagne) -- Au nom des gouvernements de la France, de la Grèce, de l'Italie, du Luxembourg, de l'Autriche, du Portugal et de l'Espagne, ainsi qu'au nom de mon propre gouvernement, je me félicite que la Commission soit parvenue, au terme de négociations longues et compliquées, à dégager un consensus sur le projet de convention et de recommandation concernant l'interdiction et les mesures immédiates en vue de l'élimination des pires formes de travail des enfants.

Nous estimons que le contenu de cette nouvelle convention appartient aux droits fondamentaux du travail qui font l'objet de la Déclaration adoptée en 1998. C'est pourquoi nous aimerions nous associer à ceux qui ont remercié le président de la commission, les porte-parole des groupes, la Greffière et les membres du Secrétariat, que nous remercions du fond du cœur.

Nous espérons que la convention et la recommandation pourront être adoptées demain par la Conférence, que la convention pourra être ratifiée rapidement par le plus grand nombre possible d'Etats Membres de l'OIT.

Les enfants ont droit à l'éducation, conformément à la convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Ces droits sont menacés par le travail des enfants. La promotion de l'éducation et de la formation professionnelle est une stratégie essentielle permettant d'empêcher le travail des enfants.

La convention et la recommandation représentent un premier pas vers des normes plus élevées concernant le problème des enfants-soldats. Nous espérons que la référence expresse aux enfants dans les conflits armés, à l'article 3 a) du projet de convention, permettra de consolider les droits des enfants.

Etant donné que l'article 3 a) n'aborde que le recrutement forcé et obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés, dans le cadre du travail forcé, relevant du mandat de l'OIT, nous aimerions à nouveau insister sur le fait qu'il est absolument nécessaire de faire en sorte que la limite d'âge fixée par l'article 38 de la convention relative aux droits de l'enfant, article 38 qui porte sur la limite d'âge des enfants-soldats, soit relevée, afin de mettre un terme à l'utilisation des enfants-soldats dans les conflits armés.

Il faut également que les travaux du groupe de travail, en vue du protocole complémentaire sur les enfants et les conflits armés, soient terminés aussi rapidement que possible en songeant en particulier au dixième anniversaire de l'entrée en vigueur de la convention relative aux droits de l'enfant.

Nous vous rappelons que le libellé repris dans la nouvelle convention de l'OIT ne doit pas préjuger de la poursuite des négociations quant aux projets de protocole supplémentaire à la convention relative aux droits de l'enfant.

Nous nous félicitons de tous les efforts qui pourront être déployés par les gouvernements, les organisations régionales, les organisations intergouvernementales et les ONG, en vue de lutter contre l'utilisation d'enfants-soldats dans les conflits armés. Nous espérons que ces efforts contribueront à dégager un consensus en vue de relever la norme prévue à l'article 38 de la convention relative aux droits de l'enfant.

Original anglais: M. VAN DER HEIJDEN (conseiller technique gouvernemental, Pays-Bas) -- Au nom du gouvernement des Pays-Bas, je voudrais dire que nous sommes déterminés à œuvrer pour la réalisation des objectifs de la convention et de la recommandation sur l'élimination des pires formes de travail des enfants.

Elles représentent des violations graves des droits de l'homme, et il faut donc y mettre un terme sans délai. Nous sommes conscients du fait que le travail des enfants est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté et pourtant, la pauvreté ne saurait en aucun cas servir d'excuse à la tolérance des pires formes que prend ce travail. Le gouvernement des Pays-Bas est satisfait du texte de compromis de la convention et de la recommandation, les travaux menés à bien dans la Commission du travail des enfants et l'esprit de consensus présidé aux débats reflètent bien l'engagement des membres à l'égard de l'élimination des pires formes du travail des enfants. Ces nouveaux instruments viennent compléter la convention, et la recommandation de l'OIT sur l'âge minimum (1973) qui restent les instruments fondamentaux concernant le travail des enfants. Concernant l'enrôlement des enfants dans les conflits armés, nous sommes heureux d'avoir pu progresser vers des normes internationales plus élevées. La convention sur les pires formes de travail des enfants devrait inspirer les travaux du Groupe de travail des Nations Unies sur le protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant. Nous lançons un appel au groupe de travail des Nations Unies pour qu'il poursuive ses efforts afin de trouver une solution à cet important problème. L'accent mis dans la convention sur les pires formes de travail des enfants sur le rôle essentiel que joue l'éducation dans l'élimination du fléau, comme mesure à la fois préventive et curative mérite d'être souligné. L'accès à une éducation de base gratuite est essentiel pour éliminer le travail des enfants. Nous appuyons la participation de la société civile à la conception et à la mise en œuvre des programmes d'action. Il faut se féliciter de ce que la Commission du travail des enfants ait reconnu que les questions relatives aux formes cachées de travail des enfants doivent être traitées de toute urgence. En particulier le grand nombre des enfants domestiques dont 90 pour cent sont des filles, représente un problème qui nous préoccupe gravement. Nous espérons que cette convention sera ratifiée par un nombre sans précédent de Membres de l'OIT. Le gouvernement des Pays-Bas va sans tarder examiner la possibilité de ratifier ce texte.

D'autre part, nous sommes disposés et désireux de coopérer avec d'autres Membres pour donner effet aux dispositions de la convention, y compris par l'apport d'une coopération technique sous l'égide du Programme IPEC.

Le gouvernement néerlandais estime que cette convention fait partie comme étant du nombre des normes fondamentales du travail de l'OIT devant être discutées au sein du Conseil d'administration de l'OIT dans le cadre de la campagne générale de promotion de ces normes.

Ainsi, la convention sur les pires formes de travail des enfants entre également dans le cadre des mécanismes de suivi de la Déclaration de l'OIT sur des principes fondamentaux et des droits fondamentaux au travail, qui a été adoptée au mois de juin de l'année dernière.

L'adoption de la convention et de la recommandation sur les pires formes de travail des enfants et de la recommandation n'est pas le point final d'un long processus de négociations. Nous considérons qu'il s'agit plutôt du début d'une ère nouvelle et d'un combat intensifié pour éliminer les pires formes de travail des enfants.

Je conclurai mon propos en insistant sur le fait que nous devons absolument écouter le message issu de la marche mondiale contre le travail des enfants. Mettons un terme au travail des enfants, en commençant par les pires de ses formes.

Original anglais: M. UEMURA (conseiller gouvernemental, Japon) -- Tout d'abord, j'aimerais féliciter le Président à l'occasion de son élection. J'aimerais brièvement vous présenter le point de vue du gouvernement du Japon sur le projet de convention et de recommandation.

La situation des enfants au travail dans le monde entier préoccupe profondément le gouvernement du Japon et il accorde une très grande importance à l'élimination du travail des enfants, en particulier les mesures à prendre immédiatement en vue de l'élimination de ses pires formes. Ce projet de convention est à nos yeux le meilleur possible et nous sommes satisfaits du texte. Le gouvernement du Japon va étudier sérieusement la possibilité de ratifier cette convention.

Le Japon a activement travaillé pour résoudre le problème du travail des enfants dans le monde. J'ai le plaisir d'informer l'assemblée qu'en mai 1999 la loi portant prohibition de la prostitution et de la pornographie impliquant des enfants et relative à la protection des enfants a été adoptée par le Parlement du Japon. Cette loi protège les droits des enfants en imposant des sanctions pour toute exploitation des enfants et en prévoyant des mesures de protection des enfants ayant subi des sévices physiques ou psychiques.

Le gouvernement du Japon continuera à faire de son mieux pour aider d'autres pays dans leurs efforts en vue d'éliminer de façon effective les pires formes de travail des enfants par le biais d'une coopération et d'une assistance internationale.

M. VANDAMME (délégué gouvernemental, Belgique) - Au nom de la Belgique, je suis très heureux de figurer parmi les orateurs qui ont exprimé leur satisfaction devant l'adoption des nouveaux instruments sur les pires formes du travail des enfants. Nous sommes tous conscients de vivre un moment historique et de l'importance de ces instruments pour ce fléau mondial qu'il entend combattre de même que pour l'action future de l'OIT. Pour renforcer les conventions internationales et eu égard au drame que constitue le travail des enfants, les textes que nous avons examinés sont à notre avis satisfaisants car ils abordent les questions essentielles à traiter dans l'action immédiate en vue de l'élimination des pires formes de travail des enfants, celles-ci étant largement définies, notamment l'importance de la mise en place d'un dispositif national, de l'accès à l'éducation et de l'assistance internationale.

L'implication d'enfants dans les conflits armés, qui représente pour nous une partie très importante de cette question, a aussi été abordée d'une façon qui n'empêche pas de poursuivre la négociation d'un protocole optionnel à la Convention sur les droits de l'enfant. Nous partageons l'analyse de plusieurs délégations à ce sujet, dont l'Allemagne et le Canada. La délégation belge continuera d'œuvrer pour que la limite d'âge soit fixée à 18 ans, tant pour la participation à des hostilités que pour le recrutement, volontaire ou involontaire, dans des forces armées ou dans des groupes armés non gouvernementaux. Compte tenu de ces faits, nous sommes convaincus qu'un grand nombre de pays seront en mesure d'adopter demain la convention et de la ratifier, et que l'IPEC fournira un important programme d'appui. Au nom de ma délégation, je tiens à exprimer mes remerciements au secrétariat et à tous ceux qui ont œuvré en faveur de l'adoption de cet instrument qui me semble réaliste, efficace et significatif.

Original anglais: M. AKRAM (délégué gouvernemental, Pakistan) -- Au nom de la délégation pakistanaise, je voudrais féliciter la Commission du travail des enfants qui présente à la Conférence internationale du Travail un projet de convention et de recommandation sur les pires formes de travail des enfants. Nous avons tous fait un effort pour parvenir à un consensus. Toutes les parties ont fait des compromis. Le projet qui nous est présenté n'est pas parfait, mais nous ne pouvions pas faire mieux. Les efforts déployés par M. Trotman, vice-président travailleur, M. Botha, vice-président employeur, et par le président de la Commission méritent toute notre reconnaissance. Nous sommes convaincus que nous devons, comme l'a dit le Président Clinton ce matin, effacer de la surface de la terre les pires formes de travail des enfants. C'est le but que nous poursuivons avec l'adoption de cet instrument. Comme pour le processus de négociation, une certaine souplesse est nécessaire pour la mise en œuvre. A cet égard, j'aimerais rappeler une remarque qu'a faite par écrit la délégation des Etats-Unis, selon laquelle toute forme de travail que l'on propose d'interdire en plus du travail dans l'industrie du sexe et de la drogue doit être de la même gravité que les formes de travail éminemment dangereuses et facilement identifiables.

Il nous paraît aussi évident que la définition du travail dangereux qui figurera dans la recommandation qui sera adoptée en même temps que la convention ne doit pas donner lieu à une interprétation large. Il est important que chaque pays qui consulte les partenaires sociaux détermine les cas et domaines précis qui correspondent à ce type de travail dangereux, en tenant compte du niveau de développement économique et du niveau général de développement.

Le préambule de la convention reconnaît le lien qui existe entre la pauvreté et les pires formes de travail des enfants. Nous sommes entièrement d'accord avec le commentaire qui a été fait aujourd'hui même par le Président Clinton à ce sujet lorsqu'il a dit, et je cite que «Nous devons nous attaquer aux causes profondes du phénomène, à savoir le mélange tragique de pauvreté et de désespoir qui conduit à l'exploitation de la main-d'œuvre enfantine. Pour mettre fin à cette exploitation, il ne suffit pas de fermer des usines. Nous devons enfin faire en sorte que les enfants puissent aller à l'école et que leurs parents puissent trouver du travail, faute de quoi la situation de ces enfants risque de s'aggraver encore.»

Cela doit être une préoccupation de premier plan pour nous tous. Ce n'est pas en mettant des enfants au chômage qu'on arrivera à éliminer les pires formes de travail des enfants. Il vaudrait mieux s'attaquer tout d'abord aux conditions sociales et économiques qui expliquent l'apparition du travail des enfants, y compris dans ses pires formes. Il faut de ce fait prévoir un train de mesures efficaces pour lutter contre la pauvreté. Il faut, pour cela, accroître l'assistance aux pays qui connaissent ces problèmes, pour qu'ils puissent mettre en place des filets de sécurité sociale pour les familles les plus démunies et un système d'éducation ouvert à tous les enfants. Les mesures sociales et économiques doivent être accompagnées de mesures législatives et réglementaires destinées à limiter le travail des enfants et surtout les pires formes de ce type de travail. A l'échelon national, tous les pays ont des lois de ce genre et il faudrait les aider à les appliquer. A l'échelon international, il faut que des mesures soient prises pour aider les pays dans leurs efforts de lutte contre les pires formes de travail des enfants.

Toutefois, nous devons éviter de prendre des mesures qui auraient des effets négatifs sur l'économie d'un pays et son niveau de vie, et qui l'empêcheraient de participer au commerce international et d'en bénéficier, car cela ne ferait qu'aggraver les problèmes socio-économiques sous-jacents qui sont à l'origine du problème du travail des enfants, et cela ne serait d'aucune utilité pour l'élimination des pires formes de ce travail.

D'autre part, nous avons constaté que ces mesures peuvent donner lieu à des abus de la part des lobbies protectionnistes qui, sous prétexte de lutter contre le travail des enfants, défendraient en réalité leurs propres intérêts.

Les difficultés que pose la définition du travail des enfants et la tendance à appliquer les mesures de ce genre unilatéralement risquent de conduire à des attaques irréfléchies contre des activités économiques tout à fait légitimes. Il faut que l'OIT prenne clairement position et s'oppose à tous ceux qui établissent un lien entre ces mesures protectionnistes et la question du travail des enfants.

M. le Président Clinton a évoqué ce matin le programme IPEC. Ce sont des messages positifs de ce genre qui peuvent aider les pays à prendre des mesures positives. L'Organisation internationale du Travail doit jouer un rôle de défenseur et faire connaître les efforts que font les pays. Les dispositions de l'article 8 de la convention reconnaissent l'importance du partage international des responsabilités pour éliminer les pires formes de travail des enfants par des programmes de coopération et d'assistance.

La convention reconnaît le lien qui existe entre la pauvreté et le travail des enfants et l'article 8 de la convention insiste sur l'obligation à l'échelon international d'aider les pays à éliminer les pires formes de travail des enfants par des programmes de lutte contre la pauvreté.

Le Pakistan souhaite résolument éliminer les pires formes de travail des enfants. Nous avons lancé des programmes importants dans le cadre du programme IPEC, tant au niveau du gouvernement qu'à celui des employeurs et des travailleurs, pour lutter contre ce problème.

Nous sommes déterminés à atteindre l'objectif fixé pour la région et à éliminer le travail des enfants d'ici à l'an 2010, et ce à l'échelon politique le plus élevé. Le Pakistan fait partie des rares pays où l'assistance financière est fournie par le gouvernement à partir de son propre budget pour lutter contre les pires formes de travail des enfants.

Nous saluons donc l'adoption d'un traité qui permettra aux pays de prendre des mesures pour éliminer les pires formes de travail des enfants. Nous tenons à exprimer notre reconnaissance aux groupes des travailleurs et des employeurs d'avoir reconnu que les causes des pires formes de travail des enfants ne disparaîtront pas toutes du jour au lendemain, même si des mesures immédiates et efficaces doivent être prises pour assurer l'interdiction, et à plus long terme l'élimination, des pires formes de travail des enfants.

Mme KOCHERHANS (conseillère technique gouvernementale, Suisse) -- «Nous sommes aussi des êtres humains et nous ne comprenons pas pourquoi nous devons tant souffrir.» Tels sont les mots d'un enfant qui a dû travailler, et qui a souffert en travaillant. Nous ne savons pas encore si nous avons réussi à réaliser le rêve de cet enfant, mais au moins nous pouvons être certains que nous tenons une convention et une recommandation dont l'objectif est de mettre un terme aux pires formes de travail des enfants. La réalisation du rêve de cet enfant dépendra de notre capacité à réellement mettre en œuvre ces instruments.

La Suisse mettra tout en œuvre pour ratifier cette convention dès que possible. Nous tenons à faire savoir que nous ne tolérerons plus aucun travail des enfants du type de ceux qui sont abordés dans cette nouvelle convention.

A cet égard, mon pays souhaite s'associer à la déclaration prononcée par le délégué du Canada au nom de plusieurs pays.

Notre détermination doit permettre de transformer ce rêve en réalité. Nous devons rendre aux enfants leur bien le plus précieux, à savoir leur enfance.

Original arabe: M. TAWFIK (conseiller technique gouvernemental, Egypte) -- La Commission du travail des enfants a accompli un immense travail avec l'adoption de la convention et de la résolution concernant les pires formes du travail des enfants. Ce travail sera complété par l'adoption de ces deux instruments par la Conférence. Nous sommes convaincus que cette résolution et cette convention seront adoptées à l'unanimité. Nous sommes convaincus que cela renforcera la dignité de l'homme et pourra le libérer de la servitude, de l'esclavage et de la pauvreté. Il s'agit là d'un premier pas qui devrait être suivi par d'autres, qui viseraient à l'élimination effective du travail des enfants, y compris toutes les formes de ce travail, non seulement les formes les plus détestables. Cet objectif ne pourrait être atteint que par la coopération internationale, le renforcement des investissements, le développement économique, l'élimination de la pauvreté et le libre accès de tous à l'éducation.

Ma délégation a déjà exprimé ses observations en ce qui concerne cette convention et cette recommandation, qui ont été consignées dans le rapport de la commission. C'est pourquoi nul n'est besoin de les répéter ici. Cependant, je voudrais faire remarquer que la dernière partie du rapport, que la commission n'a pas eu encore le loisir d'adopter, et plus particulièrement le paragraphe 419, dans lequel figure la déclaration de la délégation égyptienne, à laquelle nous aimerions apporter une légère modification. Nous avons présenté au secrétariat notre proposition de modification concernant le paragraphe 419, et Madame la greffière nous a dit, au début de cette séance qu'il n'y avait pas besoin de vous lire la proposition de modification. Je voudrais simplement dire que la délégation de mon pays est tout à fait d'accord d'adopter ce rapport modifié selon notre proposition.

Nous voudrions réitérer nos félicitations à tous ceux qui ont entrepris cette œuvre historique que nous avons réalisée au cours de cette Conférence, et notamment le président de la commission et ses vice-présidents, ainsi que tous nos collègues du groupe gouvernemental qui ont entrepris ce travail dans un cadre de fraternité et d'entente mutuelle. Il serait toutefois prématuré de célébrer cet événement car nous ne pourrons être vraiment contents que le jour où nous pourrons éliminer le travail des enfants et lorsque tous les enfants du monde ne seront plus soumis à l'exploitation.

Original anglais: M. SAMET (délégué gouvernemental, Etats-Unis) -- C'est avec espoir et foi que je présenterai quelques observations supplémentaires concernant la convention sur les pires formes de travail des enfants que très certainement nous allons adopter demain. Bien entendu, le Président des Etats-Unis d'Amérique ce matin a pris la parole devant cette Conférence et il a indiqué clairement son intention de présenter cette convention au Sénat pour son avis et consentement en vue de la ratification. De plus il a donné son avis sur les mesures qu'il convient de prendre pour arrêter les pires formes de travail des enfants.

Comme l'a dit le Président, nous devons agir tous ensemble et le moment est venu justement d'utiliser ce consensus mondial croissant pour interdire les formes les pires de travail des enfants, de nous réunir tous ensemble et de dire qu'il y a des choses que nous ne pouvons pas et nous ne devons pas tolérer.

En fait, je suis fier que tous ensemble nous puissions dire d'une seule voix que nous ne tolérerons pas qu'on exploite nos enfants.

Comme l'a dit également hier le secrétaire du travail, M. Herman, nous ne voulons pas d'enfants en situation servile, nous ne voulons pas de travail forcé des enfants, nous ne voulons pas que les enfants soient brutalisés et exploités dans l'industrie du sexe. Nous ne tolérerons pas que les enfants soient enrôlés dans des milices pour participer à des conflits armés. Nous ne tolérerons pas de travaux qui sapent la santé et l'avenir de nos enfants.

Alors que nous proclamons cet engagement commun, nous devons également décider d'appuyer la résolution d'aujourd'hui, avec des ressources suffisantes pour assurer des lendemains meilleurs à nos enfants. Inlassablement, nous devons faire passer le message qu'il faut mener une campagne pour mettre fin au travail abusif des enfants à tous les secteurs de la communauté mondiale et à toutes les institutions qui agissent dans le système international. Ne pas faire tout cela reviendrait à ne pas faire ce que nous devons faire.

Comme le Président Clinton l'a dit, aujourd'hui, nous sommes prêts à jouer notre rôle dans le cadre de l'IPEC et d'autres initiatives, et nous continuerons de le faire.

Je voudrais remercier les délégations des travailleurs et des employeurs des Etats-Unis plus particulièrement Mike Semrau, Ed Potter, Bill Goold, Deborah Greenfield et John Hiatt car leur étroite collaboration avec la délégation gouvernementale des Etats-Unis nous a permis de progresser et d'aboutir à ce résultat positif.

Je voudrais également féliciter les vice-présidents, M. Trotman et M. Botha, pour leur excellent travail. Leur capacité de collaborer et d'aller de l'avant aux côtés des gouvernements sous la conduite de M. Atsain de la Côte d'Ivoire, est un exemple concret de ce qui fait de l'OIT une institution aussi unique, aussi précieuse et aussi durable.

Original anglais: M. STEYNE (conseiller technique des travailleurs, Royaume-Uni) -- Compte tenu du temps limité imparti, je serais tenté de dire simplement que je me rallie à ce qui a été dit ce matin par le représentant des Etats-Unis, mais je souhaiterais tout de même présenter mon intervention si vous me le permettez.

L'année dernière nous avons mis l'accent sur le fait que la volonté politique est ce qui doit nous guider dans la découverte des formes cachées de travail des enfants et lorsque nous avons adopté notre premier rapport, j'avais demandé, en empruntant les termes d'une autre grande personnalité américaine de ce siècle, Martin Luther King, quand les enfants qui travaillent pourraient-ils chanter «Enfin nous sommes libres»? Cette année, je parle au nom du Congrès des syndicats à un moment qui restera peut-être comme un grand moment dans l'Histoire. De fait, je pense que dans son discours, ce matin, le Président Clinton a souligné qu'il s'agissait d'un moment historique.

Demain, la Conférence devrait adopter à l'unanimité la convention et la recommandation sur les pires formes du travail des enfants et elle enverra un message invitant tous les gouvernements, toutes les organisations d'employeurs et tous les syndicats à s'engager à ratifier et à mettre en œuvre la convention et s'appuyer sur la recommandation pour les guider dans cette tâche.

La priorité, dans la lutte contre toutes les formes de travail des enfants est l'interdiction et l'élimination urgentes de ses pires formes pour tous les enfants de moins de 18 ans, à savoir: l'esclavage moderne, le commerce du sexe, le trafic de drogues et tous les autres travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils sont exécutés, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité des enfants. Le renvoi à la recommandation permet de mieux comprendre ce que l'on entend par travail dangereux et nous demandons instamment aux gouvernements d'utiliser cette référence de bonne foi et de ne pas chercher d'excuses pour ne pas agir.

Cette commission s'est distinguée par la communauté d'objectifs et la coopération entre les groupes que l'on a pu observer. Nous avons adopté des méthodes inhabituelles pour aboutir à un accord sur les dispositions de la convention sans avoir recours à un seul vote par appel nominal. Je voudrais remercier M. Atsain, notre président, M. Trotman, M. Botha, tous les trois du Commonwealth et nos collègues de la CISL, d'ACTRAV, le bureau et l'ensemble du groupe des travailleurs de la commission pour cette coopération remarquable. Je crois que chacun de nous est venu animé de bonne volonté, conscient des espoirs placés en lui et j'ai détecté autre chose derrière ces sentiments: l'amour que nous portons à nos enfants ou à nos petits-enfants en tant que parents et grands-parents.

Nous avons élaboré deux instruments extraordinaires qui peuvent assurer une protection réelle et immédiate pour des millions d'enfants exploités de la manière la plus abusive qui soit. Cette convention et la déclaration de l'année dernière sont les contributions les plus importantes qui soient venues s'ajouter à l'ensemble d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme depuis un très grand nombre d'années.

Je ne dissimulerai pas une certaine déception de notre part devant le fait que la forme la plus dangereuse de travail pour les enfants, à savoir leur enrôlement dans des conflits armés, n'a pas été interdit de manière absolument claire dans la convention. Il est assez illogique, voire à juste titre, d'interdire la prostitution des enfants de moins de 18 ans même s'ils ont l'âge du consentement, et de permettre aux enfants de 16 et 17 ans de s'enrôler comme volontaires dans des guerres. Je suis convaincu que l'on aurait pu trouver la volonté politique pour autoriser le recrutement de volontaires pour les former à combattre en prenant toutes les précautions pour que les moins de 18 ans ne soient pas envoyés au front. Néanmoins quelques années de débats tripartites nous ont fait progresser bien davantage que les longs débats sur le protocole facultatif. Tout recrutement obligatoire ou forcé pour des conflits armés est désormais interdit. Et tout gouvernement qui pense que donner à un enfant dans la misère quelques centimes pour qu'il s'engage équivaut à en faire un volontaire et devrait examiner la jurisprudence de la convention no 29.

Nous avons également débattu la question de savoir si le fait de refuser à un enfant l'accès à une éducation de base devrait être l'un des critères entrant dans la définition des pires formes de travail des enfants.

Les travailleurs n'ont pas voulu élargir la portée de la convention ni faire double emploi avec les obligations découlant de la convention no 138, l'instrument fondamental sur le travail des enfants.

Nous pensons que les enfants qui travaillent pendant de trop longues heures ou qui ne quittent pas les locaux de leur employeur sont systématiquement privés d'un accès à l'éducation. Ces éléments sont pris en considération dans ces nouveaux instruments qui exigent également qu'on accorde une attention particulières au travail exécuté dans des situations qui échappent aux regards extérieurs où les filles sont particulièrement exposées à des risques, notamment le travail domestique. Ne perdons pas de vue le fait que quand nous parlons d'enfants nous parlons de garçons et de filles.

Le congrès des syndicats est heureux de constater que les gouvernements qui ratifient la convention seront tenus de fournir une éducation de base gratuite c'est-à-dire d'une durée de huit à neuf ans ou l'équivalent et, le cas échéant, une formation professionnelle pour tout enfant qui serait retiré de l'une des pires formes de travail. C'est la clé de la prévention et de la réinsertion. Associée à des politiques visant à remplacer les enfants qui travaillent par des adultes au chômage appartenant à leur famille élargie. Cette mesure garantirait les droits fondamentaux au travail des adultes et briserait le cercle vicieux de la misère qui facilite la reproduction de générations successives d'enfants travailleurs.

Conformément à ce qui a été dit à Amsterdam et à Oslo et de fait selon ce qui a été dit dans la résolution de 1996 de l'OIT, le travail des enfants est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté. Malheureusement le Préambule ne cite de manière sélective qu'un paragraphe de la résolution de 1996 qui décrit la pauvreté comme étant la principale cause du travail des enfants. Cette même résolution décrit clairement comment le travail des enfants empêche le développement social et perpétue la pauvreté.

N'oublions pas que c'est une convention qui proclame des droits de l'homme inviolables. La communauté internationale devrait travailler avec les gouvernements et les partenaires sociaux pour en promouvoir la mise en œuvre. Mais je répète que quand les élites gouvernementales alimentent la course insensées aux armements et envoient leurs enfants dans les meilleures universités du monde, et qu'ensuite ils nous disent qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires pour fournir une éducation de base aux enfants des pauvres, il font deux choses. D'abord, leur hypocrisie les rend misérables et ensuite il devient évident que l'injustice sociale et l'absence de volonté politique est à l'origine de la pauvreté et du travail des enfants.

Travailler dans cette commission et au comité de rédaction a été franchement l'apogée de ma carrière de syndicaliste. Lorsque nous avons terminé nos débats, le sentiment d'euphorie que j'ai éprouvé ne peut se comparer qu'à celui que j'ai ressenti lorsque j'ai posé le pied pour la première fois dans une Afrique du Sud libre. Après que nous ayons eu accepté la convention j'ai téléphoné à ma famille et ma fille de 11 ans m'a dit: «C'est magnifique papa, tu dois être très heureux.» J'ai parlé à Richard, mon fils de 8 ans, je lui ai parlé de la convention, je lui ai dit que les gouvernements qui la ratifieraient devraient la mettre en vigueur. Sa réaction spontanée, comme toujours, a été: «Mais papa, les gouvernements qui veulent garder le travail des enfants, est-ce qu'ils ne vont simplement pas la signer?» Voilà le problème, tel qu'il est posé par deux enfants du sud de Londres qui ont pris part à la marche mondiale. C'est une question que se posent tous les enfants qui ont participé à la marche et l'ensemble du mouvement syndicaliste: ils attendent de voir.

Je vous demande instamment d'adopter à l'unanimité ces instruments sur les pires formes de travail des enfants et de reconnaître que ce sont des instruments relevant des droits de l'homme et qui exigent d'être suivis d'effets dès maintenant. Nous vivons dans un monde compétitif. Je vous demande donc de vous lancer dans une course à la ratification même si elle manque de dignité. Je vous demande de mettre en œuvre ces instruments le plus rapidement possible. Trouvons la volonté politique de travailler dans un esprit de tripartisme sur le plan national et international et au sein de l'IPEC pour apporter un changement rapide dans l'existence de millions d'enfants qui travaillent dans des conditions insupportables.

Pour conclure n'écoutons pas ceux qui parlent du droit des enfants au travail. Rappelons-nous leur droit d'apprendre et de jouer et notre responsabilité en tant qu'adulte de choisir pour eux une meilleure existence. Nous avons un lourd fardeau à porter. Il ne fait pas aussi mal qu'un lourd chargement de briques sur les épaules d'un enfant travailleur, il est moins pénible que le viol qu'un enfant subit ni que la prostitution à laquelle il est contraint de se livrer, mais nous devons l'assumer. Nous devons nous demander l'année prochaine à cette époque, combien d'enfants aurons été tirés des bordels ou des usines à chaux dans le monde? Quand nous parlerons à nos petits enfants de cette Conférence capitale, nous devons être sûrs que nous pourrons le faire avec fierté.

Original anglais: Mme ADLER (déléguée gouvernementale, Danemark) -- L'élimination du travail des enfants est, depuis fort longtemps, une des préoccupations prioritaires de la politique de mon pays. Nous pensons que l'Organisation internationale du Travail a un rôle particulier à jouer dans la lutte contre le travail des enfants, car elle dispose des ressources et de la capacité nécessaires pour s'occuper à la fois de l'établissement des règles internationales, de la diffusion de l'information et de la mise en œuvre des projets de développement.

Le Danemark s'est réjoui du fait que l'OIT ait confirmé son engagement à l'égard de l'élimination du travail des enfants, au cours de la session de 1998 de la Conférence, en adoptant la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail.

Nous nous félicitons donc de ce que la Conférence adoptera cette année une convention concernant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants.

Cette convention complète la Déclaration adoptée l'an dernier et la convention (no 138) sur l'âge minimum, 1973. Elle constitue un grand pas en avant dans la lutte contre les pires formes de travail des enfants et les plus intolérables.

Comme indiqué dans la déclaration conjointe présentée par le Canada au nom d'un certain nombre de pays, dont le Danemark, nous nous félicitons de ce que la convention mentionne expressément les enfants soldats.

Toutefois, nous aurions souhaité que la Conférence aille beaucoup plus loin dans ses efforts pour éliminer l'utilisation d'enfants dans les conflits armés. Nous espérons donc que des progrès déterminants seront réalisés par le Groupe de travail de l'ONU chargé du protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant qui, nous voulons croire, fera en sorte d'interdire totalement l'emploi d'enfants soldats.

Nous sommes convaincus que l'adoption de cette convention sur les pires formes de travail des enfants contribuera de façon significative à l'amélioration des conditions de vie de millions d'enfants employés à toutes sortes de travaux intolérables au détriment de leur sécurité et de leur santé.

Toutefois, nous regrettons que la Conférence n'ait pas jugé bon de définir dans le texte de la convention les types de travaux considérés comme dangereux. Nous pensons qu'une définition clairement établie de ces types de travaux aurait permis de les interdire plus facilement.

Nous espérons que cela ne va pas pour autant réduire la portée de cette convention et nous engageons tous les Etats Membres à se référer à la recommandation associée à cette convention pour déterminer quelles sont les pires formes de travail des enfants.

Le Danemark pense que le travail des enfants est avant tout un problème économique et social dû à la pauvreté et au manque d'éducation.

Nous saluons donc le fait que la convention mette l'accent sur l'importance de l'éducation dans l'élimination du travail des enfants.

Le Danemark espère que la convention et sa recommandation seront adoptées demain à l'unanimité et nous espérons que la convention sera massivement ratifiée par les Etats Membres de l'OIT. Nous espérons que, grâce à ces nouveaux instruments, les enfants du monde entier n'auront plus à travailler dans des conditions intolérables et qu'ils pourront, ainsi que leurs familles, mener une vie plus agréable.

Original anglais: Le PRESIDENT -- Je pense que nous avons terminé le débat concernant le rapport de la Commission du travail des enfants. Nous allons maintenant procéder à l'adoption du rapport.

Puis-je considérer que le rapport lui-même, c'est-à-dire le résumé des discussions qui figure aux paragraphes 1 à 426, est adopté?

(Le rapport, paragraphes 1 à 426, est adopté.)

Projet de convention concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination

Original anglais: Le PRESIDENT -- Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de convention concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination.

Puis-je considérer que la convention est adoptée dans son ensemble?

(La convention est adoptée dans son ensemble.)

Conformément au paragraphe 7 de l'article 40 du Règlement de la Conférence, les dispositions de ce projet de convention seront soumises au Comité de rédaction de la Conférence pour la préparation d'un texte définitif.

Projet de recommandation concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination

Original anglais: Le PRESIDENT -- Nous allons procéder à l'adoption du projet de recommandation concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination.

Puis-je considérer que la recommandation est adoptée dans son ensemble?

(La recommandation est adoptée dans son ensemble.)

Conformément au paragraphe 7 de l'article 40 du Règlement de la Conférence, les dispositions de ce projet de recommandation seront soumises au Comité de rédaction de la Conférence pour la préparation d'un texte définitif.

J'aimerais remercier les membres du bureau, les membres de la commission, ainsi que le personnel du secrétariat pour l'excellent travail qu'ils ont accompli.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 January 2000.