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87e session
Genève, juin 1999


Rapport de la Commission de l'application des normes

Discussion en plénière
Rapport général


Convention no 98: Droit d'organisation et de négociation collective, 1949

Costa Rica (ratification: 1960). Un représentant gouvernemental a déclaré que la protection des droits syndicaux est une activité essentielle pour le gouvernement et constitue l'un des principaux objectifs assumés avec détermination du Plan national de concertation mené par le Président de la République. Ainsi, conformément à cette tradition nationale, le gouvernement a fait du dialogue social une pleine réalité et a relancé de manière effective le Conseil supérieur du travail, organisme tripartite chargé de garantir le dialogue social dans les domaines socioproductifs et du travail. Entre autres résultats du conseil, peuvent être mentionnés les accords sur la politique salariale, le licenciement et la liberté syndicale. A cet égard, le pouvoir exécutif a saisi l'Assemblée législative d'un projet de loi qui modifie plusieurs articles du Code du travail et qui tient compte de l'accord sur la liberté syndicale adopté par le Conseil supérieur du travail. La Commission permanente des affaires juridiques de l'Assemblée législative a approuvé ce projet, et le gouvernement espère être en mesure, dans un proche avenir, de communiquer l'adoption de ce projet et qu'il fait partie de la législation. Le projet prévoit des procédures rapides dans les cas susceptibles de constituer des actes de discrimination antisyndicale. Ces procédures garantissent notamment l'exécution de sentences judiciaires.

A propos de l'allégation portant sur la longueur des délais des procédures qui concernent des actes de discrimination antisyndicale, et de l'absence d'exécution des sentences judiciaires ordonnant la réintégration de dirigeants syndicaux, le représentant gouvernemental a réitéré toutes les observations transmises par le gouvernement en réponse au document présenté par le Comité interconfédéral costa-ricien (CICC) sur l'application de la convention. Il convient de rappeler que le Comité de la liberté syndicale, dans son 311e rapport, à propos du cas no 1966 concernant l'entreprise FERTICA, a formulé une recommandation qui fait mention des préoccupations de la commission. Aussi le gouvernement, qui tient toujours compte des recommandations du Comité de la liberté syndicale, a-t-il signalé que le ministre du Travail et de la Sécurité sociale avait rappelé au président de la Cour suprême et, à travers lui, à la hiérarchie du pouvoir judiciaire, en lui communiquant copie du rapport du comité, le principe de justice rendue sans délai qui inspire l'OIT en matière de liberté syndicale et que prévoit l'ordre juridique national.

Dans le même souci, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a émis le 15 mai 1998 la directive DMT-063-98, dont copie a été adressée à l'OIT, dans laquelle il est rappelé aux autorités ministérielles compétentes leur devoir de garantir que les procédures applicables dans les cas qui constitueraient des actes de discrimination antisyndicale soient rapidement diligentées, dans un délai de deux mois, sans préjudice des droits qui découlent des principes du respect de la légalité et de la légitime défense.

En ce qui concerne l'allégation de longueur des délais de la justice dans les procédures administratives relatives à des pratiques du travail déloyales, afin de démontrer que les autorités gouvernementales sont pleinement disposées à résoudre les points qui préoccupent les organes de contrôle de l'OIT, le représentant gouvernemental a indiqué que le projet de loi de réforme des divers articles du Code du travail est avancé, le pouvoir exécutif l'ayant soumis à l'Assemblée législative le 30 novembre 1998. La Commission permanente des affaires juridiques de l'Assemblée législative a approuvé à l'unanimité le projet le 16 mars 1999. Ce projet de loi, qui vise à faciliter les procédures administratives prévues dans le Code du travail, tient compte des observations que la commission a formulées les années passées, notamment sur la lenteur des procédures concernant les actes de discrimination antisyndicale et les doutes qui existent quant à l'exécution des sentences judiciaires ordonnant la réintégration des représentants des travailleurs licenciés injustement dans leur poste de travail. Le projet est destiné à: 1) établir une procédure rapide dans les domaines administratif et juridictionnel, afin de déterminer si le licenciement est conforme au droit. Il s'agit donc d'une procédure rapide qui garantit le respect de la légalité, un procès équitable et le droit de défense; 2) faire en sorte que la législation favorise le développement harmonieux et ordonné du secteur du travail et de ses représentants. Le gouvernement espère être en mesure de communiquer, dans un proche avenir, l'adoption du projet de loi en question, pour ainsi disposer de procédures rapides en cas de discrimination antisyndicale et garantir l'exécution des sentences judiciaires, sans préjudice des garanties constitutionnelles du respect de la légalité et de la légitime défense.

A propos des allégations d'actes d'ingérence de l'employeur dans la constitution d'organisations syndicales, le représentant gouvernemental a signalé que ces actes ont trait à un cas survenu dans l'entreprise FERTICA, et qu'il convient de rappeler qu'il n'a cessé de déplorer, comme l'OIT, ces pratiques antisyndicales qui portent atteinte aux droits des travailleurs de FERTICA. De plus, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par une décision administrative, a confirmé l'applicabilité de la convention collective conclue le 15 septembre 1994 entre FERTICA et l'ATFe. Le ministère a prolongé cette convention pour une période s'étendant jusqu'au 15 septembre 2000. Voilà qui montre à l'évidence que la direction de cette organisation est reconnue. Elle est dûment inscrite dans les registres du Département des organisations sociales du ministère du Travail et de la sécurité sociale. Par ailleurs, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a émis une directive administrative en vertu de laquelle il demande aux autorités administratives compétentes de rester vigilantes en ce qui concerne la protection des droits collectifs des travailleurs.

Au sujet des commentaires de la commission sur la prétendue inégalité de traitement entre syndicats et associations solidaristes en ce qui concerne la gestion des indemnités de licenciement, le représentant gouvernemental a indiqué que cette question a été résolue grâce à l'élaboration, après consensus, d'un nouveau projet de loi pour la modification du régime des indemnités de licenciement. En effet, les représentants des entreprises, des associations solidaristes, des coopératives, des syndicats et du gouvernement mettent la dernière main à un projet de loi qui porte modification du régime des indemnités de licenciement, dont copie a été adressée à la commission. Le projet, qui sera soumis prochainement au pouvoir législatif, prévoit notamment que les travailleurs seront libres de choisir l'organisme financier qui gérera leurs cotisations. Entre autres organismes financiers, on trouve, à conditions de fonctionnement égales, les syndicats et les associations solidaristes.

Quant à l'allégation de non-respect du droit de négociation collective des agents de l'Etat, la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême a jugé contraires à la Constitution diverses résolutions relatives aux procédures de règlement des conflits collectifs de caractère économique et social, procédures prévues dans le Code du travail et applicables aux administrations régies par le droit public en matière d'emploi, bien que la loi ne répare pas cette omission. Le projet de loi susmentionné permettra de résoudre cette situation. Toutefois, dans le secteur public, la négociation collective a évolué notablement dans le cadre autorisé. Le gouvernement a soumis à la Commission des affaires économiques de l'Assemblée législative le projet de loi sur l'emploi public, publié dans le Journal officiel le 29 octobre 1998. Ce projet de loi, qui réaffirme le droit de négociation collective et de grève dans le secteur public, est conforme dans ses termes aux conventions de l'OIT, à la Constitution et au Code du travail. C'est le fruit de tout un processus de conscientisation de la nécessité d'un nouveau régime de relations du travail entre l'Etat et ses agents. De plus, il modifie le texte dont ont eu connaissance les experts, en ce sens qu'il vise à ce que le secteur public fonctionne de façon à satisfaire, tout d'abord, l'intérêt public et ensuite les fonctionnaires, afin que ceux-ci soient dignement rémunérés et incités à s'acquitter comme il convient de leurs fonctions. Par ailleurs, le projet de loi permettra une plus grande flexibilité de l'emploi et améliorera les possibilités de négociation des travailleurs.

A propos de l'absence alléguée d'organismes adéquats pour garantir le respect du droit syndical, le Costa Rica prévoit une ample protection juridique en matière syndicale dans la Constitution, les conventions internationales, le Code du travail et, depuis une date récente, dans la jurisprudence établie par la Chambre constitutionnelle. Le Costa Rica enregistre un taux élevé de syndicalisation qui, dans le secteur agricole, dépasse ceux de la France, de l'Espagne et des Etats-Unis. Parfois, ce taux est deux fois plus élevé que dans d'autres pays. Le droit syndical est une réalité au Costa Rica. Dans son rapport, la commission d'experts reconnaît les efforts du Costa Rica et se dit satisfaite des mesures adoptées par le gouvernement pour introduire dans la législation ou dans la pratique à l'échelle nationale des modifications de nature à lui permettre de satisfaire à ses engagements.

Ainsi, il apparaît que le Costa Rica progresse résolument sur la base des principes de justice sociale et dans l'application des conventions de l'OIT qu'il a ratifiées.

Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour les informations fournies. Toutefois, ils ont noté qu'il aurait été préférable que ces informations soient transmises à temps à la commission d'experts, de telle sorte qu'elle puisse les examiner et les prendre en considération dans son rapport. Ils ont rappelé que le cas du Costa Rica a été discuté en 1993 et 1997 dans le cadre de la convention no 87. La commission doit maintenant examiner des questions connexes, mais sous l'angle de la convention no 98. La discussion de cette commission est limitée aux informations contenues dans le rapport de la commission d'experts, et les faits devant la présente commission sont dès lors limités. En ce qui concerne le cas mentionné dans le rapport qui se réfère à la société FERTICA, ils ont noté que le représentant gouvernemental, dans sa déclaration, a déploré les actes d'ingérence commis par cette entreprise et a indiqué que ce cas a été renvoyé aux autorités judiciaires. Ils n'ont toutefois pas compris toute la portée de cette déclaration puisque le rapport de la commission d'experts ne fait qu'indiquer que l'inspection du travail a conclu que FERTICA S.A. a eu recours à des pratiques déloyales. La procédure est désormais devant les tribunaux, mais il n'est pas indiqué clairement à quel moment elle a été ainsi déférée devant les instances judiciaires et de quelle manière le cas est traité. Toutefois, ils ont exprimé l'espoir que le pouvoir judiciaire résolve rapidement cette affaire. Ils ont souligné que le représentant gouvernemental a noté la question importante des délais dans le cas du traitement des cas de discrimination antisyndicale et a même reconnu les problèmes rencontrés par les niveaux administratif et judiciaire pour ce qui est de cette question. Ils ont noté que la commission d'experts a reconnu que les plaignants sont responsables pour certains de ces délais. Toutefois, ils ont observé que le gouvernement a reconnu la nécessité d'accélérer les procédures tant administratives que judiciaires.

En ce qui concerne la non-reconnaissance du droit à la négociation collective des fonctionnaires qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat, ils ont déclaré qu'il est évident qu'aucune action n'a été entreprise à cet égard depuis de nombreuses années. Ils ont noté la référence faite par le représentant gouvernemental à un projet de loi qui faciliterait un règlement rapide de cette question. En raison du manque d'information, il n'est pas possible d'évaluer correctement cette situation. Ils ont exprimé l'espoir que ce projet de loi soit adopté rapidement. La commission d'experts a également examiné la question de la non-application des conventions collectives conclues par les parties. Le représentant gouvernemental n'a pas fourni d'information sur cette question et s'est référé aux décisions du Comité de la liberté syndicale à cet égard. En outre, la commission d'experts a noté les communications du CICC relatives à l'inexistence de la négociation collective dans le secteur privé, compte tenu de l'étendue des persécutions contre les syndicats. A nouveau, ils ont noté qu'il n'y a pas d'information concrète permettant de formuler des conclusions sur ce point. Finalement, ils ont prié instamment le gouvernement de fournir en temps opportun des informations concrètes à la commission d'experts de manière à ce que la situation prévalant au Costa Rica puisse être examinée. Ils ont exprimé l'espoir que le gouvernement adopte les lois nécessaires pour qu'elles soient pleinement conformes aux exigences de la convention.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour l'information orale fournie sur laquelle ils partagent les commentaires des membres employeurs. Ils ont rappelé qu'en 1993 et 1997 la commission a examiné en profondeur la situation des relations collectives du travail au Costa Rica à l'occasion d'un examen de l'application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En 1997, la commission a conclu que, malgré les missions de contacts directs qui ont eu lieu en 1991 et en 1993, des divergences importantes demeurent entre, d'une part, la législation et la pratique nationales et, d'autre part, les normes internationales sur les relations collectives du travail. Un problème structurel existe en ce qui concerne les relations collectives du travail au Costa Rica, situation principalement due au manque d'efficacité des lois et procédures visant la protection des syndicats. Toutefois, depuis cette date, la commission d'experts a reçu des commentaires du Comité interconfédéral costa-ricien sur l'application de la convention. La commission d'experts a dû constater que le gouvernement n'a pas répondu à une partie importante des observations du comité interconfédéral, notamment en ce qui concerne le nombre considérable de plaintes pour des actes de discrimination antisyndicale et la non-application des conventions collectives conclues entre des entreprises et des syndicats. Au cours de cette période, le Comité de la liberté syndicale a formulé des conclusions concernant l'entreprise FERTICA dans les cas nos 1879 et 1966. Dans ce dernier cas, le Comité de la liberté syndicale a constaté que dans la pratique ses recommandations requérant la réintégration des membres du bureau exécutif de l'organisation syndicale à FERTICA ainsi que la réintégration des 265 membres n'ont pas été mises en œuvre. La direction de cette entreprise a plutôt favorisé la création d'un comité directeur parallèle au comité syndical établi et a licencié 265 travailleurs qui étaient tous des dirigeants syndicaux. En outre, le Comité de la liberté syndicale a constaté le manque d'efficacité du système administratif et judiciaire mis en place dans le passé. Or le cas de FERTICA n'est qu'une illustration du problème structurel.

Les membres travailleurs ont indiqué que les organisations syndicales témoignent que, malgré la nouvelle législation de 1993, les organisations solidaristes existent toujours et le risque de licenciement reste très important pour les syndicalistes, notamment dans les plantations de bananes et dans les neuf zones d'exportation. Plus graves encore sont les cas où des dirigeants syndicaux et leurs familles sont menacés de mort.

En outre, les membres travailleurs ont constaté les problèmes persistants qui concernent la négociation collective des fonctionnaires publics et qui ont du reste déjà été discutés en 1993 et 1997. Relevant que le gouvernement reconnaît qu'il y a des problèmes, les membres travailleurs ont noté également l'existence d'un projet de loi sur la fonction publique prévoyant le droit de négociation collective et le droit de grève. Les fonctionnaires publics qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat ne disposent pas, dès lors, pour le moment, du droit de négocier collectivement, contrairement à l'article 4 de la convention.

En ce qui concerne le secteur privé, le gouvernement, tel qu'il ressort du rapport de la commission d'experts, reconnaît l'insuffisance des lois régissant la procédure de règlement des conflits du travail et le fait qu'il n'a pas pris les mesures significatives en ce qui concerne la discrimination antisyndicale bien qu'il existe un nombre considérable de plaintes au niveau national pour de tels actes. Dans ces conditions, les membres travailleurs ont insisté pour que le gouvernement modifie sensiblement et sans délai la législation et les procédures, si nécessaire, en faisant appel à l'assistance technique du BIT. Les procédures administratives et judiciaires devraient être traitées rapidement, et les décisions de justice devraient être exécutées, y compris dans les zones franches d'exportation et les plantations de bananes. En outre, les autorités doivent établir un système de relations collectives efficaces régi par des principes fondés sur la négociation de bonne foi, la reconnaissance effective de l'autonomie des organisations syndicales et le respect des accords conclus. Sur ce point également, le gouvernement pourrait, si nécessaire, faire appel à l'assistance technique du BIT. Toutefois, en raison de l'importance et de la complexité des questions soulevées et en raison du temps considérable écoulé, les membres travailleurs se sont demandé si une mission de contacts directs ne serait pas plus appropriée. Le gouvernement doit informer la commission d'experts sur la suite donnée aux plaintes concernant la discrimination antisyndicale et le non-respect des conventions collectives, et doit assurer que les recommandations du Comité de la liberté syndicale sur le cas FERTICA sont mises en œuvre. Enfin, en ce qui concerne le secteur public, les membres travailleurs ont demandé au gouvernement de prendre des mesures sans délai pour modifier la législation relative à ce problème.

Le membre travailleur du Costa Rica s'est dit surpris par les informations que le gouvernement a communiquées oralement. L'orateur a déploré la longueur des délais des procédures judiciaires concernant les actes de discrimination antisyndicale et l'absence d'exécution des sentences judiciaires ordonnant la réintégration de dirigeants syndicaux. A ce sujet, il s'est référé au cas des travailleurs de l'entreprise FERTICA qui ont été licenciés et n'ont pas été réintégrés, contrairement à ce qu'indiquaient les recommandations du Comité de la liberté syndicale, lesquelles ont été approuvées par le Conseil d'administration. Il a ajouté que l'entreprise refuse de tenir compte de ces recommandations et de prendre contact avec le ministère du Travail. L'orateur a nié l'affirmation du gouvernement selon laquelle l'inspection générale du travail ne peut intervenir dans la procédure. En effet, la loi organique du ministère du Travail et le Code du travail l'y autorisent. L'orateur a demandé au représentant gouvernemental d'indiquer où en est le cas de l'entreprise FERTICA. Plusieurs travailleurs de l'entreprise continuent d'être licenciés. Ces travailleurs ont été inscrits sur des listes noires et ils ne peuvent pas, par conséquent, obtenir un emploi dans d'autres entreprises. L'orateur s'est référé à la résolution de la Chambre constitutionnelle qui, selon le gouvernement, fixe un délai administratif de deux mois à l'inspection du travail pour se prononcer. A ce sujet, il a contesté les déclarations du gouvernement et indiqué que sont en cours de procédure administrative depuis plus de quatre mois les plaintes que la Confédération RERUM NOVARUM et le Syndicat de la municipalité d'Aguirre ont déposées pour actes de persécution antisyndicale contre le secrétaire général de cette organisation et deux membres de sa direction. En outre, l'orateur a indiqué que la plainte déposée il y a plus de six mois devant l'inspection du travail à propos du licenciement du secrétaire général du Syndicat bananier du sud est toujours en instance. Il a souligné que les juges du travail ne connaissent pas les conventions de l'OIT et que, en collaboration avec le bureau de l'OIT au Costa Rica, ils suivent une formation sur l'activité normative de l'Organisation et sur l'application des conventions. Au sujet des actes d'ingérence dans la constitution d'organisations syndicales, ce type d'agissements est devenu monnaie courante pour certains employeurs. La création d'un syndicat maison dans l'entreprise FERTICA en constitue l'un des exemples les plus manifestes. Dans cette entreprise, les membres de la direction du syndicat ATFe ont été licenciés et une direction parallèle a été instituée. Jusqu'à ce jour, l'entreprise retient les cotisations syndicales. L'inspection du travail en a été informée mais, contrairement à ce qu'a indiqué la commission d'experts, l'autorité administrative n'a pas donné suite à la plainte, au motif qu'il n'y avait pas de preuve suffisante. Quant à l'inégalité de traitement entre syndicats et associations solidaristes en ce qui concerne la gestion des indemnités de licenciement, la législation qui avait été promise n'a pas été élaborée: ainsi, les associations solidaristes gèrent les cotisations des travailleurs, c'est-à-dire des sommes qui représentent des millions, et entravent la négociation collective. Pour ce qui est de l'absence d'organismes adéquats pour garantir le respect du droit syndical, l'orateur a indiqué que l'inspection générale du travail devrait effectuer cette tâche. Or cet organisme est totalement laissé à l'abandon par le ministère du Travail et il ne dispose pas du nombre d'inspecteurs qu'il faudrait pour respecter la convention applicable de l'OIT. En outre, l'inspection ne dispose pas de véhicules pour les déplacements des inspecteurs et ceux-ci se plaignent de l'insuffisance de leurs indemnités de déplacement. A propos du droit de négociation collective, l'orateur a indiqué qu'il faisait l'objet au Costa Rica de sévères restrictions. L'attitude antisyndicale de certains employeurs, qui ne permettent pas la constitution d'organisations syndicales dans leurs entreprises, porte gravement atteinte à ce droit. De plus, le gouvernement a nié le droit de négociation collective aux agents de la fonction publique et indiqué aux municipalités ayant négocié des conventions collectives les moyens à utiliser pour ne pas les appliquer. Contrairement aux promesses faites pendant 15 ans, le gouvernement, qui a saisi l'Assemblée législative de projets de loi sur le droit de négociation collective et de grève dans le secteur public, a retiré ces projets ces jours-ci. Le gouvernement s'était engagé, devant la commission d'experts, à résoudre la question relative au droit de négociation collective par le biais du projet de loi sur l'emploi public. Enfin, l'orateur a indiqué que le Comité de la liberté syndicale a été saisi de nouvelles plaintes pour violation des conventions nos 87 et 98, lesquelles s'ajoutent aux quelque 45 plaintes que le comité a examinées à ce jour. A propos des plaintes déposées récemment, l'orateur a évoqué le cas de M. Adrián Herrera, secrétaire général du Syndicat des travailleurs du sud, qui a été licencié de l'entreprise COBASUR pour avoir présenté un cahier de revendications. Il a par la suite été agressé par des personnes au visage masqué qui l'ont frappé brutalement, qui ont tiré sur lui à bout portant et qui l'ont menacé de mort s'il ne quittait pas le syndicat. L'orateur a souligné que, sur les 712 conventions collectives qui existaient dans le pays dans les différents secteurs de production et services, seules 76 demeurent. En revanche, les accords directs, promus par les associations solidaristes, se sont multipliés pour atteindre le nombre de 330. En conclusion, l'orateur a affirmé qu'il est nécessaire que la commission approuve l'envoi d'une mission de contacts directs pour vérifier sur place ce qu'il a affirmé et pour que soit fournie l'assistance technique requise.

Le membre travailleur des Etats-Unis a noté que le Costa Rica n'était pas étranger à cette commission. En effet, il a rappelé que le Costa Rica avait fait l'objet de discussions devant cette commission il y a deux ans et que peu de progrès semblaient avoir été accomplis depuis. Il a indiqué que le gouvernement costa-ricien avait été en contact avec le mouvement syndical international depuis deux ans et qu'il avait déclaré que les problèmes concernant les droits fondamentaux du travail au Costa Rica seraient résolus. Le gouvernement avait également indiqué à l'AFL-CIO qu'il serait néfaste et contre-productif pour le Costa Rica d'être assujetti à la procédure de plainte en matière de relation professionnelle du système de traitement préférentiel en vertu du droit commercial américain. Les déclarations du gouvernement à cet égard avaient été respectées de bonne foi dans l'espoir que les réformes nécessaires en matière de droit du travail seraient menées à bien. L'orateur a regretté qu'à ce jour, soit deux ans plus tard, les problèmes majeurs dans la législation et la pratique n'aient toujours pas été corrigés. L'orateur a par la suite soulevé trois points concernant l'application de la convention par le Costa Rica. En premier lieu, il a noté le problème concernant les actes de discrimination antisyndicale en soulignant l'incapacité du gouvernement à empêcher de tels actes. Il a rappelé au membre employeur des Etats-Unis que la déclaration qu'il avait faite concernant les délais imputés aux plaignants dans les cas d'actes de discrimination antisyndicale provenait du rapport du gouvernement et non de celui de la commission d'experts. Le rapport de la commission d'experts mentionne que la responsabilité concernant les délais dans l'étude des cas impliquant des travailleurs victimes de discrimination antisyndicale n'est pas toujours le fait des autorités administratives mais concerne également les lacunes du système judiciaire. Néanmoins, il s'est référé à la déclaration du membre travailleur du Costa Rica selon laquelle il est fréquent que les autorités mettent de deux à trois ans avant d'examiner des cas de discrimination antisyndicale, période durant laquelle les syndicalistes restaient sans emploi et le mouvement syndical se voyait totalement anéanti. Concernant la capacité des autorités costa-riciennes d'enquêter sur les cas de discrimination antisyndicale, l'orateur
cite un rapport de la CISL selon lequel, en 1996, le ministère du Travail du Costa Rica comptait un seul inspecteur du travail pour 30.000 travailleurs œuvrant dans les zones franches d'exportation, dans lesquelles travaillent environ 90.000 personnes. L'orateur estime que, même si on acceptait l'argument du gouvernement selon lequel il n'avait rien à se reprocher au niveau des droits des travailleurs, il existe toujours le problème du manque de justice devant les tribunaux du travail. Bien qu'en principe le judiciaire soit indépendant de l'exécutif, il note que cela n'est pas le cas au Costa Rica. Ainsi, les autorités costa-riciennes se doivent d'assumer leurs responsabilités concernant les manquements des tribunaux dans le non-respect de la convention. Concernant les atteintes continues au droit de négociation collective et au droit de grève des travailleurs du secteur public non engagés dans l'administration de l'Etat, il rappelle que le gouvernement a déclaré à l'OIT depuis quatre ans qu'il existe des propositions législatives en instance devant remédier à ces violations. A cet égard, il rappelle que des lois non adoptées ne suffisent pas et qu'un droit virtuel à la négociation collective demeure inutile. Enfin, il se réfère aux commentaires de la commission d'experts sur cette convention et il exprime sa surprise concernant le fait que l'information fournie à la commission d'experts soit insuffisante pour établir un lien entre la persécution syndicale et l'absence de réelle négociation collective dans le secteur privé. Comme exemple de cette persécution, il note l'information contenue dans un rapport de la CISL selon laquelle les travailleurs costa-riciens du secteur de la banane sont licenciés et mis sur des listes noires pour le seul fait de vouloir créer des syndicats, violant ainsi leur droit de négocier collectivement. Il cite également l'existence et la reconnaissance des organisations solidaristes comme méthode de discrimination antisyndicale dans le secteur privé au Costa Rica. Ces organisations sont d'ailleurs mentionnées de manière spécifique dans le rapport de la commission d'experts. Il cite le cas de l'entreprise FERTICA comme un exemple flagrant de persécution antisyndicale où un employeur a eu recours à des licenciements antisyndicaux ainsi qu'à l'implantation d'organisations solidaristes afin d'empêcher une authentique négociation collective. En conclusion, il souscrit pleinement aux déclarations des membres travailleurs et du membre travailleur du Costa Rica selon lesquelles une mission de contacts directs devrait se rendre au Costa Rica afin de remédier au problème d'application de la convention.

Le membre travailleur du Brésil a déclaré que les articles 1, 2 et 6 de la convention ne sont pas respectés, comme en témoignent le rapport de la commission d'experts et la déclaration du membre travailleur du Costa Rica. La constitution d'un comité directeur parallèle, de même que la lenteur et le manque d'efficacité et de caractère coercitif des procédures applicables aux actes contraires à la convention ont été mentionnés. En outre, la négociation collective n'est pas possible dans l'administration publique. Le gouvernement doit veiller à ce que les mécanismes administratifs et judiciaires de protection de l'action syndicale soient effectifs et rapides. Enfin, l'orateur s'est rallié à l'idée que la commission sollicite une mission de contacts directs.

Le membre travailleur de la Colombie a déclaré que l'on se trouve confronté à un cas typique de violation des conventions de l'OIT. Il a fait part de sa préoccupation en ce qui concerne l'existence du mouvement mutualiste au Costa Rica, considéré comme un des pires ennemis du mouvement syndical. L'orateur a également critiqué un jugement rendu dans le cadre d'un conflit collectif au sein de l'entreprise de produits fertilisants d'Amérique centrale. On a prétendu que la protection des travailleurs était inconstitutionnelle et, par la suite, plus de 300 travailleurs ont été licenciés. Si un décret accorde la protection requise au droit de négociation collective des fonctionnaires publics, dans la pratique, ce droit ne peut s'exercer dans le secteur de l'éducation. Par ailleurs, les congés syndicaux sont refusés et l'exercice de l'activité syndicale est entravé. Enfin, le gouvernement devrait s'engager à respecter la convention et à combattre toute forme d'atteinte au droit au travail et à la négociation collective, comme le mouvement solidariste.

Le représentant gouvernemental du Costa Rica a indiqué que la commission d'experts dispose des documents et projets de loi auxquels il s'est référé, sauf ceux qui en sont au stade de la rédaction finale, comme c'est le cas du projet de loi relative aux indemnités de licenciement. Certaines des questions examinées aujourd'hui le sont depuis longtemps et le gouvernement est décidé à les résoudre. A cette fin, il a tout mis en œuvre pour résoudre les problèmes sans délai. L'orateur a signalé que le membre travailleur du Costa Rica manque à la vérité lorsqu'il nie que le gouvernement est décidé à résoudre, de manière concertée, les problèmes en question, rappelant que son organisation syndicale avait participé à cette concertation. Il a observé que le projet de législation sur l'emploi public avait été publié dans le Journal officiel le 29 octobre 1998. Il a rappelé également que le processus de réorganisation et de restructuration de l'inspection du travail, lancé en juillet 1998, découle d'un accord dans le cadre de la concertation susmentionnée, et qu'un règlement est sur le point d'être mis en place ces prochains jours. Des efforts ont été déployés pour inscrire dans l'exercice de 1999 les frais de déplacement de l'inspection du travail, ainsi que l'achat de véhicules à cette fin. L'orateur a indiqué au membre travailleur des Etats-Unis qu'au Costa Rica la division et l'indépendance des pouvoirs existent et que les retards dans l'administration judiciaire ne sont pas imputables au gouvernement. Quant à la négociation collective dans l'administration publique, la Cour constitutionnelle a déclaré qu'elle ne pouvait être exercée que si une loi le permettait. A ce sujet, le gouvernement a élaboré un projet qui, de fait, est issu de la concertation. Il sera négocié de manière tripartite. En réponse au membre travailleur de la Colombie, il a indiqué que le conflit avec les enseignants est dû à l'application d'une norme internationale en vertu de laquelle l'année scolaire doit durer au moins deux cents jours. Ainsi, il a fallu prendre certaines mesures qui ont concerné les enseignants. Toutefois, les autorités s'efforcent de trouver une solution. Il s'agit d'un conflit qui a à peine commencé et qui n'a pas encore donné lieu à une plainte. A propos de la syndicaliste qui était employée au Banco Agrícola, cette question sera bientôt résolue. Enfin, l'orateur a réitéré que son gouvernement est bien décidé à résoudre les points signalés par la commission d'experts.

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle a rappelé que, depuis un certain nombre d'années, la commission d'experts a attiré l'attention du gouvernement sur la nécessité de supprimer les divergences entre la législation nationale et les dispositions de la convention. En particulier, la commission d'experts a prié le gouvernement de prendre des mesures afin de garantir le déroulement rapide des procédures dans les affaires de discrimination antisyndicale, ainsi que d'encourager et promouvoir la négociation collective libre entre l'Etat et les organisations de fonctionnaires qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat, dans le but de réglementer les conditions d'emploi de ces fonctionnaires. La commission a rappelé au gouvernement qu'il peut bénéficier d'une assistance technique ou d'une mission de contacts directs pour l'aider à résoudre les problèmes persistants d'application de la convention en droit et dans la pratique. La commission a prié instamment le gouvernement de fournir à la commission d'experts lors de sa prochaine session un rapport détaillé sur les mesures réellement prises pour assurer le plein respect, dans un très proche avenir, des dispositions de la convention, tant en droit que dans la pratique.

Equateur (ratifications: 1967 et 1959, respectivement). Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

A l'occasion du séminaire-atelier sur les normes internationales du travail et leur application en droit positif équatorien, organisé les 17 et 18 février 1999 à Quito, Equateur, sous l'égide du bureau régional de l'OIT, Lima, un dialogue important a eu lieu ainsi qu'un rapprochement entre les députés du Congrès national, les participants et le ministère du Travail et des Ressources humaines. Ainsi a été évoquée la possibilité de communiquer au Congrès un projet de loi révisant le Code du travail et les lois connexes, en particulier en ce qui concerne les conventions nos 87 et 98.

Une nouvelle Constitution est entrée en vigueur le 10 août 1998, entraînant une réinterprétation de toute la législation nationale en un processus constant de réformes. A la lumière de la nouvelle Constitution et des résultats du séminaire-atelier précité, le ministère du Travail a recueilli et mis à jour les propositions des deux projets de réformes élaborés dans le cadre de la mission d'assistance technique (du 4 au 10 septembre 1997) pour mettre la législation en conformité avec les dispositions des conventions nos 87 et 98. Ainsi, des dérogations et modifications à certaines dispositions législatives critiquées dans les observations et demandes directes de la commission d'experts ont été prévues, et ce d'autant plus que le gouvernement s'est déjà engagé à suivre les directives techniques suggérées par l'OIT.

Il convient de souligner que certaines des suggestions de propositions de réformes suivront d'autres procédures plus appropriées, étant donné que la durée de l'examen des réformes par le Congrès reste indéterminée. Comme par le passé, l'OIT sera informée dès que les résultats de ces diverses initiatives seront connus.

Exposé des motifs

Depuis son entrée en vigueur le 10 août 1998, la Constitution consacre formellement la protection que l'Etat assure au travailleur, son attachement aux principes de droit social, l'intangibilité des droits reconnus aux travailleurs, et en particulier ce qui est prescrit dans les alinéas 6 et 9 de l'article 35 qui disposent respectivement: «En cas de doute sur la portée de dispositions légales, réglementaires ou contractuelles en matière de travail, celles-ci seront appliquées dans le sens plus favorable aux travailleurs»; «Le droit d'organisation des travailleurs et des employeurs est garanti, ainsi que leur libre développement, sans autorisation préalable et conformément à la loi». Par ailleurs, le droit à la liberté syndicale constitue un principe inaliénable, et même en cas d'incertitude sur le plan légal, il doit être défendu et promu par l'Etat.

L'harmonisation de la législation nationale en vue de la mettre en conformité avec les dispositions des conventions internationales du travail ratifiées s'impose dès lors que le gouvernement a adhéré à l'OIT et ratifié lesdites conventions. Elle devient, dans la pratique, une nécessité en vertu des commentaires adressés au gouvernement par la commission d'experts concernant le non-respect de ces conventions. Dans cette perspective, les conventions nos 87 et 98 consacrant des principes et des droits applicables aux travailleurs et aux employeurs dérogeraient tacitement, en vertu de l'article 163 de la Constitution, à divers articles de la Constitution nationale et obligeraient à en modifier d'autres. Ainsi, les dispositions de ces conventions doivent être consacrées de manière explicite dans la législation nationale.

A la lumière de ces arguments, le gouvernement présente le projet de loi suivant révisant le Code du travail.

Proposition de révision du Code du travail

Art. 1 – Après l'article 452 du Code du travail, le paragraphe suivant sera inséré:

«Après communication du refus d'enregistrement officiel, une requête de vérification des contradictions légales pourra, dans un délai de trente jours, être déposée auprès des autorités judiciaires compétentes.»

Art. 2 – L'article 466, alinéa 2, du Code du travail, comportera le paragraphe suivant:

«En cas de refus d'approbation des dispositions contraires à la Constitution ou aux lois par le comité d'entreprise, les dispositions de l'article 452 seront applicables.»

Art. 3 – L'article 454, alinéa 11, comportera le paragraphe suivant:

«En vertu des normes constitutionnelles, les organisations de niveau supérieur jouiront du droit d'exprimer d'une manière pacifique leurs opinions sur la politique économique et sociale du gouvernement.»

Art. 4 – Dans l'article 466, alinéa 4, supprimer le mot «équatoriens».

En outre, un représentant gouvernemental de l'Equateur a fait savoir devant la commission la préoccupation de son gouvernement sur le fait d'être à nouveau l'objet d'observations à propos de la compatibilité de certaines normes de la législation de son pays avec les dispositions de la convention. Il s'est engagé à redoubler d'efforts pour la rendre conforme à la convention. Ces deux dernières années, l'Equateur a été confronté à une situation politique particulièrement grave, comme le montre le fait qu'un président constitutionnel de la République a été démis de ses fonctions et qu'un gouvernement provisoire a été mis en place. Ce gouvernement, au bout de dix-huit mois, a transmis le pouvoir au Président de la République actuel, élu démocratiquement et conformément à la loi par le peuple en mai 1998, qui n'est entré en fonction qu'au mois d'août dernier. A la fin de 1997 a été instituée en Equateur une Assemblée nationale constituante chargée par le peuple d'élaborer une nouvelle Constitution. Après six mois de délibération a été adoptée une nouvelle Constitution qui est entrée en vigueur le jour où le nouveau gouvernement a pris ses fonctions, à savoir le 10 août 1998 seulement. Entre autres dispositions fondamentales, la Constitution prévoit la protection des travailleurs par l'Etat, le respect des principes du droit social et l'intangibilité des droits reconnus en faveur des travailleurs. L'orateur, se référant aux paragraphes 6 et 9 de l'article 35 portant sur le droit d'organisation, texte qui figure dans les informations écrites communiquées par le gouvernement, a souligné que le droit de liberté syndicale en Equateur est un principe auquel il ne peut être porté atteinte et qui ne peut être abrogé. Il incombe à l'Etat de protéger, de promouvoir et de mettre en œuvre ces principes. En outre, le paragraphe 12 de l'article 35 de la Constitution garantit expressément le droit de convention collective. Par conséquent, tout accord conclu conformément à la loi ne peut être modifié ou ignoré de manière unilatérale, ou enfreint. Par ailleurs, l'article 163 est particulièrement important étant donné qu'il prévoit que, une fois adoptées, les dispositions contenues dans les traités internationaux et conventions internationales font partie de l'ordre juridique interne et qu'elles priment les lois et autres instruments de moindre rang. Ainsi, en vertu de la Constitution, les conventions internationales, notamment celles de l'OIT, sont automatiquement intégrées dans la législation équatorienne, jouissent d'un rang particulier et priment donc les instruments et lois qui pourraient leur être opposés.

Néanmoins, il est évident que l'adoption d'une nouvelle Constitution entraîne un changement de cadre juridique et un intense travail législatif, nécessaire pour aligner la législation sur la nouvelle Constitution, y compris certains textes qui avaient été élaborés avec l'aide du BIT, aide d'une valeur inestimable, effectuée par le biais d'une mission d'assistance technique en Equateur en 1997. Les travaux alors réalisés doivent être réorientés pour tenir compte de la nouvelle Constitution, ce qui ne veut pas dire pour autant que ces textes aient perdu de leur valeur et de leur pertinence. L'orateur a souligné la valeur des normes constitutionnelles et indiqué que leur application sera garantie. Ainsi, quiconque estime que ces droits sont lésés, en particulier les droits dont jouissent les travailleurs, peut recourir à deux voies de droit fondamentales: le recours à l'habeas corpus devant n'importe quel juge de première instance ou, de manière directe, la saisine du tribunal constitutionnel, qui est une juridiction indépendante au rang le plus élevé.

Enfin, l'orateur s'est dit de nouveau préoccupé par le fait que, en raison de l'instabilité juridique et politique qu'a connue l'Equateur il y a quelques mois, et du caractère récent de la nouvelle Constitution, il n'est pas en mesure de communiquer maintenant des résultats concrets en ce qui concerne l'application des conventions, consécutivement aux observations de la commission. Conscient de cette situation, le gouvernement, avec l'aide, cette année, du bureau régional de l'OIT à Lima, a lancé d'une part une campagne d'information à destination des autorités législatives et judiciaires afin de leur faire connaître les engagements pris par l'Equateur au titre des conventions de l'OIT, de s'assurer ainsi que les services chargés d'administrer la justice garantissent l'application de ces conventions et, par ailleurs, de faire en sorte que les membres du Congrès national, en collaboration avec le gouvernement et les organisations syndicales et patronales les plus importantes, puissent dans les plus brefs délais adopter des instruments destinés à faire concorder les normes constitutionnelles et les conventions. Le gouvernement est fermement résolu, avec l'aide des travailleurs et des employeurs, à stimuler l'action législative autant qu'il sera nécessaire. Il compte bien sûr sur l'OIT dont l'aide a été jusqu'à ce jour indéfectible et exceptionnelle. Espérant qu'elle se poursuivra, il tient à dire toute sa reconnaissance à l'Organisation.

Les membres travailleurs ont rappelé que la commission a eu à examiner ce cas depuis de très nombreuses années, et ce, pour diverses conventions incluant la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La situation syndicale en Equateur a été discutée depuis 1987 et, en 1988 et 1989, le cas de l'Equateur a même été mentionné dans un paragraphe spécial. Concernant spécifiquement la convention no 98, des observations continues ont été formulées par la commission d'experts en 1990, 1991, 1992, 1994, 1996 et 1998. Des missions multiples d'assistance technique du Bureau se sont rendues au pays afin que les mesures qui s'imposaient soient prises. Or, les membres travailleurs ont constaté que toutes ces actions n'ont fait qu'entraîner les mêmes réponses du gouvernement, à savoir qu'il était occupé à étudier le problème et allait introduire bientôt une nouvelle législation. Les progrès constatés de temps en temps ont été trop insuffisants pour être crédibles.

Les membres travailleurs ont noté que le gouvernement s'est référé à la nouvelle Constitution dans ses informations orales et écrites. Or, le texte de la Constitution consacre explicitement que la liberté syndicale doit s'exercer dans le cadre de la loi. La loi n'a toutefois pas encore été modifiée, bien que le ministre du Travail ait annoncé des modifications à venir. En outre, le gouvernement n'a cité qu'une partie de la Constitution puisque d'autres dispositions de la nouvelle Constitution ne sont pas conformes aux normes internationales, comme l'unicité syndicale imposée par la loi dans la fonction publique. Le gouvernement s'est en fait limité à citer certaines dispositions et principes de la Constitution, mais il n'a fourni aucune mesure concrète qui aurait déjà été prise pour répondre aux questions de fond et aux multiples cas de non-conformité constatés par la commission d'experts. Le gouvernement a même réussi à étonner la commission d'experts l'année passée en ignorant totalement les résultats produits pendant la mission d'assistance technique.

Selon les informations des membres travailleurs, le gouvernement vient de remplacer en avril 1999 le SENDA (le Secrétariat national du développement administratif) par un autre système, à savoir le Conseil national pour les salaires dans la fonction publique. Ce conseil est composé de trois membres, dont les ministres des Finances, du Travail et un membre travailleur. Ce conseil déciderait à la majorité et est investi de larges compétences. Il a le contrôle total des négociations collectives et fixe des maxima salariaux. Il peut également dispenser d'appliquer une convention collective. La commission d'experts constate dans son rapport encore cette année que les mesures pour modifier l'article 3 g) de la loi sur la fonction publique et la carrière administrative, aux fins de permettre aux travailleurs des services officiels ou d'autres institutions de droit public ou d'institutions de droit privé à vocation sociale ou publique de jouir des droits prévus par la convention, n'ont pas été prises. La commission d'experts regrette que le rapport du gouvernement ne se réfère pas aux questions soulevées concernant la protection contre les actes de discrimination antisyndicale à l'embauche et la disposition du Code du travail relative à la soumission des projets de convention collective. Enfin, la commission d'experts se voit obligée de rappeler au gouvernement que, en ce qui concerne les enseignants, il est prié de prendre les mesures en vue d'amender la législation de manière à ce que les enseignants jouissent du droit à la négociation collective à tous les niveaux. La commission d'experts, ayant examiné également l'application de la convention no 87, observe que «tout en prenant note de la bonne volonté manifestée par le gouvernement, un nombre élevé de dispositions doivent encore être modifiées pour mettre la législation en pleine conformité avec la convention». En outre, la commission observe que certaines nouvelles dispositions de la Constitution de 1998 soulèvent ou sont susceptibles de soulever des problèmes en relation avec l'application de la convention.

Les membres travailleurs ont souligné leur accord avec la référence faite par la commission d'experts à la bonne volonté du gouvernement. Cependant, s'il se peut que la volonté du gouvernement soit bonne, elle est largement insuffisante. Il devient difficile d'accepter année après année de belles déclarations de bonne volonté, surtout si l'OIT n'a ménagé aucun effort pour aider le gouvernement grâce aux missions d'assistance technique. Les membres travailleurs ont, l'année passée, affirmé «que l'assistance technique et les missions de contacts directs de l'OIT ne doivent pas être utilisées pour gagner du temps. Ces mécanismes ont été conçus pour promouvoir l'application des conventions par une analyse approfondie des problèmes et par la recherche de solutions efficaces». Les membres travailleurs ont dès lors insisté pour que soient formulées des conclusions précises. Ils ont demandé que la commission discute de ce cas de nouveau l'année prochaine et que soit insérée cette requête dans les conclusions de la commission. Les autorités doivent cesser l'ingérence dans la négociation collective et mettre leur législation en conformité avec les dispositions de la convention, à la fois dans les secteurs privé et public, tout en tenant compte de l'ensemble des observations faites depuis plus de dix ans par la commission d'experts. Le gouvernement doit fournir dans les délais, afin que la commission d'experts puisse analyser la situation, un rapport détaillé concernant les mesures prises. Enfin, si aucun progrès réel ne peut être constaté l'année prochaine, les membres travailleurs adopteront des conclusions d'une autre manière dans le rapport de la commission.

Les membres employeurs ont relevé que, l'année dernière, cette commission a examiné le cas de l'Equateur en ce qui concerne l'application de la convention no 87. Bien que le cas actuel n'ait pas le même objet, les problèmes soulevés quant à la mise en œuvre des conventions nos 87 et 98 sont similaires. Suite à une mission d'assistance technique, deux projets de texte ont été élaborés en vue de l'abrogation, notamment, de l'article 1 du décret 2260 aux termes duquel le Secrétariat national du développement national (SENDA) doit donner son avis sur les projets de convention collective dans le secteur public. A cet égard, les employeurs ont exprimé leur accord avec les conclusions de la commission d'experts selon lesquelles cette disposition n'est pas en elle-même contraire aux dispositions de la convention et souligné que le BIT n'a pas le droit d'interférer dans les affaires nationales en la matière. Ils ont en outre pris note de l'information communiquée par le gouvernement dans son rapport à la commission d'experts indiquant que le SENDA n'existe plus.

S'agissant de la négociation collective dans le secteur public, une mesure légale devrait être prise afin de mettre les travailleurs en mesure d'exercer les droits affirmés par la convention, aussi bien dans les organes de l'Etat ou autres institutions du secteur public que dans les institutions du secteur privé au sein de la sphère publique ou sociale. En outre, il est nécessaire que des dispositions soient modifiées de sorte que la création de comités d'entreprise ne dépende pas de l'exigence de la participation de plus de 50 pour cent des travailleurs concernés. S'agissant du secteur de l'éducation, bien que le personnel enseignant jouisse du droit syndical et de négociation collective au niveau national, il devrait appartenir au syndicat de décider du niveau – national, régional, provincial ou par branche – auquel il souhaite étendre la négociation collective. Les membres employeurs ont déclaré toutefois apprécier la décision du gouvernement de prendre les mesures appropriées. Il n'est pas suffisant de préparer et d'adopter une nouvelle Constitution. Les Constitutions fixent un «programme» dont l'application nécessite l'adoption de lois. En conséquence, la commission devrait adopter des conclusions demandant au gouvernement de poursuivre à un rythme rapide le processus législatif entamé en vue de mettre la législation nationale en conformité avec les dispositions de la convention.

Le membre travailleur des Etats-Unis a indiqué que la commission, en examinant ce cas, semblait être constamment à la recherche du gouvernement véritablement honnête, étant donné que les mêmes questions fondamentales sur le non-respect par le pays des conventions sur la liberté syndicale et sur le droit d'organisation et de négociation collective se sont trouvées à l'ordre du jour de la commission de nombreuses fois. Il a noté qu'au cours d'une mission d'assistance technique du BIT le gouvernement avait indiqué qu'il était en train de prendre toutes les mesures nécessaires pour se conformer sur divers points à la convention. Le gouvernement a mentionné en particulier deux projets de loi rédigés en 1997; cependant, ces projets n'ont toujours pas été introduits dans la loi. Tout en reconnaissant que la commission avait choisi de discuter l'observation de la commission d'experts relative à la convention no 98 plutôt que celle concernant la convention no 87, il a souligné que les droits établis dans ces deux conventions sont étroitement liés et qu'il est difficile, voire impossible, de séparer les questions sur lesquelles elles portent.

L'orateur a indiqué qu'en dépit des affirmations du gouvernement une large proportion des travailleurs des institutions du droit public, classés dans la catégorie des fonctionnaires et personnel de carrière administrative, y compris les enseignants de l'école publique, n'avaient pas le droit de négocier collectivement ou de faire grève. Bien que le Syndicat national du personnel d'éducation puisse être autorisé à prendre part à un type de forum collectif, cela n'équivaut pas au droit de négocier collectivement au sujet des salaires, des heures de travail et des conditions d'emploi et cela ne remplace pas de façon acceptable le droit de grève. Si le SENDA n'existe, plus selon le gouvernement, suite à une loi introduite en avril 1999, cet organe a été cependant remplacé par le Conseil national de la rémunération du secteur public qui ne peut pas être considéré comme véritablement tripartite puisque les représentants gouvernementaux siégeant au conseil disposent de plus de voix que les partenaires sociaux. Ce conseil a une autorité totale pour déterminer les salaires, les heures de travail et les conditions d'emploi dans les institutions de droit public, et les conventions collectives avec les travailleurs du secteur public ne peuvent pas inclure l'indexation des salaires. En outre, les employeurs publics se prévalant de difficultés économiques ont le droit de suspendre leurs obligations existantes en vertu de conventions collectives.

Tout comme la commission d'experts, il a regretté qu'il n'y ait pas eu de réponse du gouvernement au sujet de l'absence de protection par la loi contre la discrimination syndicale lors de l'embauche dans les institutions de droit public ou privé. En l'absence de telles dispositions, on ne peut raisonnablement considérer qu'il y a une conformité effective avec les conventions nos 87 ou 98. En ce qui concerne les travailleurs des institutions de droit public, qui n'ont pas le droit de négocier collectivement, de même que ceux employés dans les institutions de droit privé à vocation sociale ou publique, qui ne peuvent exercer ce droit que s'ils parviennent à constituer un comité établi par plus de 50 pour cent de la population des travailleurs, il a souligné que cet obstacle légal permanent déniait le droit de négociation collective à une large partie de la main-d'œuvre.

Bien que cela ne soit pas soulevé par la commission d'experts, il a attiré l'attention de la commission sur la loi de 1990 sur les zones franches d'exportation. A son avis, cette loi donne lieu à des problèmes sérieux quant aux obligations conventionnelles du pays puisqu'elle autorise une entreprise à obtenir ce statut de zone franche indépendamment de sa situation géographique dans le pays, permettant ainsi que les travailleurs temporaires soient engagés sans être couverts par les garanties prévues dans le Code du travail, en particulier en ce qui concerne le droit d'organisation et de négociation collective. En outre, il ne peut y avoir une conformité effective et véritable avec les conventions nos 87 ou 98 lorsque le gouvernement et le système légal ne peuvent pas protéger l'intégrité physique et la liberté d'expression des travailleurs et de leurs représentants. Dans ce contexte, il a indiqué, que le 30 septembre 1998, un fonctionnaire du gouvernement avait publiquement menacé de poursuivre le président de la Confédération des syndicats libres de l'Equateur pour «remarques dénigrantes sur le pays et menace à la sécurité nationale». Il a affirmé que cela confirmait bien que les syndicalistes usant de la liberté d'expression dans le pays souffraient de menaces de représailles. En outre, le 5 septembre 1998, le corps torturé d'un représentant de la Centrale syndicale équatorienne a été trouvé.

Le membre travailleur des Etats-Unis a alors conclu en exprimant son plein accord avec les commentaires de la commission d'experts et en espérant que le gouvernement serait en mesure de démontrer des progrès réels dans la mise en conformité avec les exigences de la convention.

Le membre travailleur du Guatemala, accueillant favorablement les explications du ministre du Travail de l'Equateur, a déclaré qu'il est incontestable que la nouvelle Constitution de ce pays consacre des droits sociaux et du travail qui garantissent la négociation collective et reconnaissent la primauté des normes internationales sur les dispositions nationales. Il a cependant signalé que le problème concerne la situation de la pratique interne. Les constitutions ne réglementent pas et se bornent à proclamer des principes qui doivent trouver leur expression dans les lois internes ordinaires. Compte tenu des antécédents, la commission devrait conclure que le problème de l'application de la convention no 98 persiste et que, pour cette raison, elle doit appuyer les conclusions de la commission d'experts. Bien qu'il existe, comme l'a indiqué le ministre du Travail, un recours en garantie constitutionnelle, de même que d'autres voies de recours, pour formuler des réclamations en inconstitutionnalité, la lenteur de ces procédures ne permet pas de compenser le préjudice subi. L'Equateur doit non seulement adapter sa législation aux normes de l'OIT mais encore aux principes consacrés par sa nouvelle Constitution. Signalant les avantages que la négociation présente pour résoudre les différends dans le domaine social, l'intervenant a mentionné enfin l'existence, en Equateur, de restrictions au droit d'association et de négociation collective en ce qui concerne les enseignants.

Le membre travailleur de l'Equateur a félicité la commission d'experts pour son rapport, en particulier pour ce qui est de l'application des conventions fondamentales de l'OIT en Equateur, notamment les conventions nos 87 et 98. L'orateur a indiqué que l'un des projets de loi préparés par une mission d'assistance technique en 1997 prévoit la suppression du Secrétariat national pour le développement administratif (SENDA), après accord entre gouvernement, travailleurs et employeurs, étant donné que cette institution peut modifier unilatéralement, en vertu des dispositions du décret no 2260, les accords auxquels seraient parvenues librement les parties par le biais d'une convention collective. Dans son rapport, le gouvernement indique que le SENDA n'existe plus et qu'il reste à décider quelle entité le remplacera. De fait, cette entité existe: c'est le Conseil national pour les rémunérations dans le secteur public. Qui plus est, le conseil a des pouvoir illimités en ce qui concerne la fixation de plafonds pour les augmentations salariales, les prestations sociales et les conditions des conventions collectives, empêchant ainsi la liberté de négociation. Bien que cet organisme compte un représentant des travailleurs, les deux autres membres étant le ministre du Travail et le ministre des Finances, il est évident que les décisions du conseil dépendent exclusivement du gouvernement, lequel est donc juge et partie.

Quant à la demande de la commission visant à modifier l'article 3, alinéa g), de la loi sur la fonction publique et les carrières administratives, il est indispensable de prendre en compte l'article 253 du Code du travail. Cette disposition garantit le droit de convention collective pour tous les travailleurs des organismes sociaux ou publics, à la seule exception des fonctionnaires administratifs ou de direction. Par ailleurs, l'article 35 de la Constitution garantit une protection analogue.

L'orateur a indiqué que le gouvernement n'avait adopté aucune mesure pour faire concorder la législation et la pratique avec la convention. La discrimination syndicale s'est aggravée, comme il ressort des différentes pratiques et lois: comme suite à la réforme du Code du travail en 1991, les employeurs peuvent engager des travailleurs en faisant appel à des intermédiaires ou à des sous-traitants. Ils n'en engagent jamais plus de 29 afin que les travailleurs ne puissent ni former un syndicat ni recourir à la négociation collective. En effet, en Equateur, les travailleurs doivent être au moins 30 pour pouvoir exercer le droit de négociation collective, et la loi permet de conclure des conventions collectives dans les entreprises mais non par branche. Beaucoup d'employeurs obligent les travailleurs à s'affilier à des associations contrôlées par l'entreprise. Lorsque les travailleurs décident de s'organiser pour la première fois et qu'ils proposent une convention collective, ils sont licenciés et doivent intenter une action en justice pour percevoir des indemnisations. Cette situation crée un climat de crainte parmi les travailleurs qui souhaitent s'organiser et recourir à la négociation collective, étant donné qu'ils risquent de perdre leur emploi dans un pays dont la population active est de 4.200.000 personnes et dont
3 millions de personnes environ sont au chômage ou en situation de sous-emploi.

En ce qui concerne le droit de se syndiquer et celui de négociation collective du personnel enseignant, on n'enregistre aucun progrès. Les enseignants sont obligés d'organiser chaque année au moins une grève prolongée pour obtenir des augmentations salariales.

L'orateur a fait observer que le rapport du gouvernement nourrit l'espoir que la législation et la pratique pourraient progresser d'une manière favorable à l'application de la convention. Or c'est le contraire qui se produit, comme il ressort de l'examen des articles 51 à 57 de la loi du 30 avril 1999 sur la réforme des finances publiques, loi qui va à l'encontre des conventions nos 87 et 98.

Toutefois, l'orateur a noté que le gouvernement est disposé à procéder à des réformes législatives et que, selon son rapport, il aura recours à l'assistance technique du BIT. Des missions d'assistance technique ayant été envoyées à plusieurs occasions, il sera peut-être nécessaire de dépêcher une mission de contacts directs pour faire concorder, une fois pour toutes, la législation et la pratique avec la convention.

Le représentant gouvernemental a déclaré que le Secrétariat national pour le développement administratif (SENDA) a cessé d'exister et que, de ce fait, la faculté que cet organe avait de modifier unilatéralement les accords de négociation collective librement consentis par les parties a elle aussi disparu. Evoquant la situation dans le pays, l'intervenant a rappelé que la Constitution ne peut, en soi, assurer l'application des dispositions de la convention et qu'à cette fin il sera nécessaire d'adopter des centaines de lois, ce qui devrait se faire au cours des quatre prochaines années. Il a salué les efforts déployés par le bureau de l'OIT à Lima, qui a soutenu le gouvernement dans son action de promotion des normes. Enfin, il a réitéré la volonté du gouvernement de mettre la législation en conformité avec les dispositions de la convention.

La commission a pris note de la déclaration du ministre du Travail et des informations écrites fournies par le gouvernement ainsi que de la discussion qui a suivi. Elle a noté les récents développements constitutionnels intervenus mais exprime sa profonde préoccupation face au faible progrès constaté dans la mise en conformité de la situation avec la convention, tant en droit qu'en pratique. Elle a instamment prié le gouvernement de prendre, dans les plus brefs délais, les mesures nécessaires afin de mettre sa législation en pleine conformité avec cette convention fondamentale ratifiée il y a plus de quarante ans. Elle a souligné, en particulier, la nécessité de renforcer la protection des travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale au moment de l'embauche et d'éliminer les obstacles administratifs à la négociation collective dans le secteur privé. La commission a instamment prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que les travailleurs des services officiels ou d'autres institutions de droit public ou semi-public et les enseignants jouissent pleinement et à tous les niveaux du droit syndical afin de protéger leurs intérêts professionnels ainsi que du droit à la négociation collective de leurs conditions au travail. Elle a rappelé que le Bureau international du Travail était à la disposition du gouvernement pour fournir l'assistance technique qui serait nécessaire à cet égard. La commission a exprimé le ferme espoir que le gouvernement fournira à la commission d'experts, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur les mesures effectivement prises pour assurer, dans un proche avenir, la pleine application de la convention tant en droit qu'en pratique.

Malaisie (ratification: 1961). Une représentante gouvernementale a répondu aux préoccupations de la commission suscitées par l'application de la convention no 98 en Malaisie: d'abord sur l'article 15 de la loi de 1967 sur les relations du travail, qui a trait aux conventions collectives dans les entreprises dites «pionnières»; ensuite sur l'article 13 de la même loi concernant les restrictions, pour certaines questions, à la négociation collective; enfin, le droit des agents de l'Etat de négocier collectivement, en vertu de l'article 15 de la loi.

A propos du premier point, le gouvernement a informé la commission que la disposition en question est sur le point d'être abrogée. Toutefois, cette abrogation faisant partie d'une réforme générale de la loi de 1967 sur les relations du travail, l'abrogation de cet article a été retardée pour tenir compte des modifications à apporter à plusieurs dispositions qui sont en cours d'incorporation. Le gouvernement est pleinement conscient que la disposition en question est dépassée et il a pris les mesures nécessaires pour l'abroger dans un proche avenir. Le gouvernement a également prévu de transmettre au Bureau une copie des nouvelles dispositions, dès que le parlement les aura adoptées.

Au sujet du deuxième point, le gouvernement a pris note des commentaires de la commission, à savoir que les décisions relatives à l'embauche, la promotion et le licenciement devraient incomber à la direction de l'entreprise, car la liberté de gestion de l'entreprise en dépend. Le gouvernement a également pris note de l'observation de la commission selon laquelle le transfert, le licenciement et la réintégration du personnel ne devraient pas être exclus du champ d'application de la négociation collective. A ce sujet, le gouvernement a réitéré que ces trois questions ne devraient pas être prédéterminées dans une convention collective. Il estime que, si c'était le cas, cela porterait atteinte, en fin de compte, au droit de l'employeur d'administrer son entreprise. Néanmoins, même si ces questions sont exclues de la négociation collective, cela ne donne pas aux employeurs des droits illimités, comme il ressort de nombreuses décisions rendues par les tribunaux malaisiens. Malgré ces restrictions, les questions relevant de ces trois points font souvent l'objet de négociations, de consultations et de conventions entre les syndicats et les employeurs, chaque fois que cela est nécessaire, les tribunaux du travail autorisant ces négociations.

Pour ce qui est du troisième point relatif aux restrictions imposées à la fonction publique en matière de négociation collective, le gouvernement a réitéré que le Congrès des syndicats des employés dans le service et la fonction publique (CUEPACS) et le Département des services publics (PSD) se rencontrent régulièrement dans le cadre de commissions paritaires. A ces occasions, ils se concertent sur les conditions de rémunération et d'emploi, et trouvent une solution aux anomalies qui en découlent. Le CUEPACS, en tant qu'organisation centrale des syndicats de la fonction publique, s'occupe des questions fondamentales – salaires, pensions, indemnités. D'autres questions, qui intéressent certains services ou administrations, sont traitées par les syndicats, par le biais des commissions paritaires départementales ou directement par le biais du PSD. Actuellement, on compte environ 300 syndicats dans la fonction publique qui représentent les agents des différents services, catégories et administrations. Une fois que la négociation est arrivée à son terme, des circulaires sont adressées aux administrations intéressées en vue de l'application des accords.

En raison des objectifs différents du secteur public et du secteur privé, et du fait que l'Etat emploie plus de 850.000 personnes, il n'est pas possible de recourir à la négociation collective et aux conventions collectives avec chaque syndicat. Le gouvernement doit garantir l'égalité de salaires et de conditions d'emploi pour tous ses agents. De plus, au moment de déterminer les rémunérations et les autres prestations des fonctionnaires, il doit tenir compte de la situation économique, des possibilités budgétaires et des services qui doivent être fournis à tous les citoyens. En Malaisie, les mécanismes de consultation et de négociation au bénéfice des agents de l'Etat ne se limitent pas au CUEPACS, au PSD ou aux syndicats des diverses administrations. En fait, les syndicats ont accès au Premier ministre, qui est la plus haute autorité. A ce jour, les négociations en vigueur ont permis de procéder aux discussions et négociations sur les salaires et les conditions d'emploi des fonctionnaires, et de garantir la protection et la promotion des intérêts et du bien-être des agents de l'Etat. A titre d'exemple, au début de 1997, cinq syndicats représentant le personnel de cinq administrations ont soumis au gouvernement des propositions et des revendications en matière de salaire. Malheureusement, en raison du ralentissement économique qui a commencé au milieu de 1997, les débats sur ces propositions ont été momentanément suspendus. Toutefois, des discussions approfondies ont repris il y a six mois entre les cinq syndicats en question et le gouvernement. Il y a quelques jours, le Premier ministre a annoncé que le gouvernement avait approuvé, entre autres, des ajustements de salaires dans les cinq administrations concernées. Ces ajustements bénéficient à près de 11.000 personnes, en particulier parmi les catégories les moins bien rémunérées. Auparavant, une nouvelle circulaire avait été émise, en vertu de laquelle une certaine catégorie d'employés se sont vu accorder une indemnité spéciale de fonctions. Pendant ces négociations, le CUEPACS a joué un rôle essentiel en apportant son concours aux cinq syndicats.

De tout temps, le gouvernement a eu pour politique de veiller à l'égalité de tous les citoyens, en particulier dans le domaine social et économique. Seul le développement économique permet d'améliorer la qualité de vie. Il est donc essentiel que la législation, les politiques et les pratiques permettent de trouver un équilibre entre la protection des travailleurs et le développement des entreprises, afin de garantir la stabilité, l'harmonie et des conditions favorables au développement. L'oratrice a enfin indiqué que le délégué travailleur de la Malaisie, qui représente le CUEPACS, pourra corroborer ses déclarations.

Les membres employeurs ont souligné que la commission a déjà examiné ce cas en 1994. Il porte sur des questions ayant trait à la négociation collective, en particulier en ce qui concerne l'article 4 de la convention, lequel a un caractère plus promotionnel. A ce sujet, la commission d'experts a soulevé trois questions dans son rapport. La première porte sur l'article 15 de la loi sur les relations du travail, article qui limite le champ d'application des conventions collectives pour les entreprises dites «pionnières». Les membres employeurs ont indiqué qu'en 1994 le représentant gouvernemental s'était déjà engagé à ce que cette disposition de la loi sur les relations du travail soit modifiée. Or la procédure législative a pris du retard et le projet de loi correspondant n'a été soumis que récemment au parlement. A ce sujet, les membres employeurs ont estimé que le gouvernement devait fournir des informations sur le contenu du projet de loi. La deuxième question a trait à l'article 13 3) c) de la loi sur les relations du travail qui porte sur les questions considérées comme relevant des prérogatives internes de la direction, à savoir la promotion, le transfert, l'embauche, le licenciement ou la réintégration. Les membres employeurs ont rappelé qu'il existe un accord sur le droit de l'Etat de déterminer les domaines qui ne peuvent être visés par la négociation collective, car une convention préalable sur ces points constituerait une atteinte au droit de l'employeur d'administrer son établissement. Certes, la convention n'énumère pas les cas qui ne peuvent être soumis à la négociation collective. En effet, des dispositions détaillées de ce type iraient à l'encontre du caractère volontaire de la négociation collective. Les membres employeurs ont estimé que des dispositions à ce sujet ne peuvent être acceptées que dans des recommandations, lesquelles ne sont pas contraignantes. A ce propos, ils ont souligné que le fait de reconnaître des prérogatives internes à la direction peut conduire à accepter certaines limitations du droit de grève. Toutefois, la commission d'experts n'a jamais envisagé ce type de limitations. Quant à certaines restrictions au droit de négociation collective des fonctionnaires autres que ceux commis à l'administration de l'Etat (art. 52 de la loi sur les relations du travail), les membres employeurs ont pris note de l'indication du représentant gouvernemental selon laquelle des commissions ont participé à l'examen de questions liées aux conditions de travail, notamment la fixation des salaires. En conclusion, il faudrait prier le gouvernement d'indiquer précisément le nombre de négociations collectives qui ont eu lieu, le nombre de ces commissions et celui des conventions qui ont été conclues. Ces renseignements détaillés devraient être fournis par écrit, ainsi que des informations sur la modification de l'article 15 de la loi sur les relations du travail.

Les membres travailleurs ont estimé qu'il s'agit d'un cas grave. Malgré la visite d'une mission de l'OIT en 1993 et les discussions de la commission à ce sujet en 1994, la situation n'a pas évolué. Le gouvernement disposait de cinq ans pour tenir son engagement d'abroger les dispositions limitant le champ d'application des conventions collectives pour les entreprises dites «pionnières». La commission attend toujours. La Malaisie connaît également de sérieuses difficultés pour appliquer la convention no 87. Les membres travailleurs n'ignorent pas que la commission n'est pas en train d'examiner la convention no 87 mais ils souhaitent attirer son attention sur le chevauchement notoire des conventions nos 87 et 98. En effet, il est inutile d'accorder aux travailleurs le droit d'organisation s'ils ne peuvent pas négocier collectivement et inutile de leur accorder le droit de négocier collectivement s'ils n'ont pas le droit d'organisation. A propos des trois points soulevés par la commission, les membres travailleurs se sont dits désappointés par la déclaration du représentant gouvernemental. En 1994, le gouvernement avait indiqué qu'il prenait des mesures pour modifier l'article 15 de la loi sur les relations du travail. Les membres travailleurs ont demandé au gouvernement d'expliquer pourquoi cette procédure n'avait pas avancé depuis cinq ans. Ils ont aussi demandé au représentant gouvernemental de préciser où en est la procédure de modification et d'indiquer si le gouvernement envisage de prendre des mesures pour l'accélérer. Ils ont exprimé leur désaccord avec les membres employeurs qui ont affirmé que la promotion, l'embauche et le licenciement relèvent des prérogatives exclusives de la direction. Les membres travailleurs ont souligné que la commission d'experts avait, en fait, indiqué que ces questions peuvent éventuellement relever des prérogatives internes de la direction. Les membres travailleurs ont insisté sur le fait que les autres questions, à savoir le transfert, le licenciement et la réintégration, ne devraient pas être exclues du champ d'application de la négociation collective d'après la commission d'experts. Les membres travailleurs ont convenu que la législation pourrait être formulée d'une manière plus générale mais ils ont fait observer que, dans le cas où le gouvernement envisagerait de légiférer sur ce point, il devrait tenir compte des recommandations de la commission d'experts. Ils ont donc demandé au gouvernement d'indiquer quelles sont ses intentions à cet égard. Les membres travailleurs ont pris note de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle, dans la pratique, les employeurs malaisiens n'ont pas des droits illimités pour limiter la négociation collective. Cette affirmation est rassurante mais elle n'est pas en rapport avec la remarque de la commission d'experts. Tout simplement, la législation n'est pas conforme à la convention et elle doit donc être modifiée. Au sujet des commentaires de la commission sur certaines restrictions au droit de négociation collective des fonctionnaires autres que ceux commis à l'administration de l'Etat, les membres travailleurs ont pris note de la déclaration du représentant gouvernemental, selon laquelle les commissions paritaires nationales constituent un moyen suffisant de négociation collective. Les membres travailleurs reconnaissent que les syndicats n'ont pas présenté de plainte sur cette procédure, mais ils ont souligné la différence qu'il y a entre loi et pratique, et demandé instamment que la loi soit mise en conformité avec la convention. Le représentant gouvernemental a été prié de répondre sur ce point. Enfin, les membres travailleurs, s'adressant au représentant gouvernemental, ont dit que des contraintes liées au développement économique ne constituent pas une excuse pour ne pas aligner la législation sur la convention, qui est une convention fondamentale de l'OIT sur les droits de l'homme, sans clause de flexibilité. Ils ont exhorté le gouvernement à mettre sans délai la législation en conformité avec la convention.

Le membre travailleur de la Malaisie a souhaité apporter des précisions sur la question des restrictions dont il est fait mention au paragraphe 3 du rapport de la commission d'experts en matière de négociation collective dans la fonction publique en Malaisie. Ainsi que le gouvernement l'a indiqué dans son rapport à la commission d'experts, le Congrès des syndicats des employés dans le service et la fonction publique (CUEPACS), les membres des commissions paritaires nationales (NJC) et le Département des services publics se réunissent régulièrement pour discuter de questions touchant les employés du service public. C'est l'occasion pour les syndicats de la fonction publique de participer aux délibérations sur la rémunération, les conditions d'emploi ainsi qu'à la résolution des problèmes y relatifs. Le gouvernement a souligné que les NJC constituent un cadre satisfaisant pour les discussions et les négociations sur les salaires, ainsi que sur les conditions d'emploi des fonctionnaires et agents des services publics et que le CUEPACS en tant que Centre national pour les fonctionnaires joue un rôle significatif dans la protection des intérêts des fonctionnaires, notamment pour les négociations salariales. A cet égard, il a espéré qu'un système de négociation collective soit mis en place dans un proche avenir, et que, pour les quelques années à venir, le système de consultation et de négociation susmentionné demeure applicable et soit accepté par le CUEPACS. Celui-ci a conclu avec le gouvernement un accord de principe selon lequel, en fonction de la situation économique et de son amélioration éventuelle, l'échelle des salaires sera révisée tous les cinq ans. La dernière révision concernant les employés des services et de la fonction publique en Malaisie a pris effet le 1er janvier 1992. Elle a été approuvée par le gouvernement après des réunions et discussions avec le CUEPACS. A la demande de ce dernier, certains ajustements ont été introduits en 1995. Des négociations impliquant la participation du CUEPACS en vue d'une nouvelle révision de l'échelle des salaires seront entreprises dans quelques mois conformément à un accord conclu avec le Premier ministre des Finances de la Malaisie en date du 18 mars 1999. Ce système est considéré comme faisant partie du mécanisme de négociation collective. Le CUEPACS, qui représente quelque 800.000 fonctionnaires en Malaisie, espère que des améliorations seront apportées au système de négociation dans la fonction publique. Au cours de la réunion de la NJC en date du 24 avril 1999, le gouvernement a accepté le principe de la création d'un tribunal arbitral pour les employés des services et de la fonction publique pour traiter des questions relatives à l'emploi et à la fonction publique.

Le membre employeur de la Malaisie a déclaré souhaiter apporter des précisions sur les prérogatives d'administration internes mentionnées au paragraphe 2 du rapport de la commission d'experts. Il a noté avec satisfaction l'opinion de la commission selon laquelle les employeurs sont libres en matière d'administration interne et que cette liberté implique certaines prérogatives d'administration. De cette liberté résulte la création d'emplois et de postes de travail. Pour encourager et développer cette capacité des employeurs, il convient de continuer de reconnaître aux employeurs des droits d'administration et les exclure du champ des conventions collectives. Dans le cas de la Malaisie, ces droits sont définis par l'article 13 de la loi sur les relations de travail. Ces droits doivent rester garantis et l'organisation de l'orateur (Fédération d'employeurs de la Malaisie (FEM)) n'a pas incité le gouvernement à procéder à des modifications à cet égard. La loi sur les relations du travail fonctionne de manière satisfaisante depuis plus de vingt ans et, étant donné le contexte tripartite de son application, il n'est nullement besoin d'apporter des changements à la situation actuelle. En tout état de cause, le droit de l'employeur d'administrer son entreprise ne peut être exercé de manière arbitraire. Dans un cas précédent, le tribunal du travail a limité l'exercice de ce droit, et le tribunal du travail peut connaître de toute plainte à cet égard. En outre, et dans la mesure où l'exercice de ce droit suscite un mécontentement général, les problèmes qui en découlent peuvent être soumis par l'une ou l'autre partie au Conseil consultatif national du travail de la Malaisie, entité tripartite qui est chargée de discuter des questions du travail.

Le membre travailleur du Pakistan a noté que le gouvernement n'a pas tenu son engagement, pris en 1994, de modifier l'article 15 de la loi sur les relations du travail. Il a exhorté le gouvernement à hâter la procédure de modification et à modifier les articles 13 3) et 52 de la loi en question, conformément aux recommandations de la commission d'experts. Il a pris note des observations du membre employeur et du membre travailleur de la Malaisie, lesquels ont indiqué qu'ils souhaitent améliorer le système en vigueur dans leur pays. Il a prié le gouvernement de fournir les informations qu'a demandées la commission d'experts sur la manière dont est encouragée et promue, dans la pratique, la négociation collective entre les pouvoirs publics et les fonctionnaires autres que ceux commis à l'administration de l'Etat. Tout en prenant bonne note de l'information du gouvernement selon laquelle la législation malaisienne a été interprétée par les tribunaux, il a souligné que les travailleurs ne sont pas toujours en mesure d'ester personnellement en justice. Il a rappelé au gouvernement qu'il lui incombe de mettre sa législation en conformité avec la convention et il a exprimé l'espoir qu'il le fera dans un proche avenir.

Un autre représentant gouvernemental de la Malaisie a remercié les orateurs pour leurs commentaires. Il a rappelé la pratique courante du gouvernement de réexaminer toutes les lois du travail afin de les adapter aux développements économiques. Aucun délai n'est fixé pour la modification de l'article 15, mais depuis 1994 d'autres dispositions législatives ont été modifiées et toutes ces modifications doivent être soumises en même temps, ce qui, évidemment, cause du retard. La procédure d'amendement de la législation implique la consultation des partenaires sociaux. La crise économique de 1997 a modifié certaines priorités. Il est nécessaire de protéger les intérêts des travailleurs. L'orateur a assuré à la commission que son gouvernement soumettra les modifications législatives nécessaires aussitôt qu'il les aura adoptées.

Le membre travailleur de la Grèce a jugé inacceptable l'excuse du représentant gouvernemental selon laquelle il a tout mis en œuvre pour réformer la législation, mais que des difficultés subsistent pour adopter une nouvelle législation. L'orateur ne peut accepter qu'après cinq ans aucune modification n'ait été observée alors que la Malaisie est un pays économiquement développé et qu'il n'a pas trop souffert de la crise asiatique.

Les membres travailleurs se sont dits déçus par la réponse du gouvernement. Celui-ci n'a répondu qu'au premier point et n'a fait que répéter ce qu'il avait dit en 1992 et 1994. Les membres travailleurs ont prié la commission d'exhorter le gouvernement à mener à bien sans délai la procédure de modification. Ils ont souligné qu'il serait désastreux, pour le système de contrôle de l'OIT, de ne pas donner suite aux observations qui ont été formulées à plusieurs reprises. Il faudrait prier le gouvernement d'indiquer, pour répondre à la question de la commission d'experts, quelle législation précise les prérogatives internes de la direction d'entreprise. Enfin, la réponse du gouvernement, selon laquelle le système de consultation en matière de négociation collective pour les fonctionnaires est approprié, ne suffit pas.

Les membres employeurs ont rappelé le point de vue exprimé dans leur première intervention. La commission ne peut pas demander au gouvernement de supprimer les restrictions imposées par l'article 13 3) c) de la loi sur les relations du travail au sujet de questions relevant de prérogatives d'administration internes. Des dispositions ne sont pas forcément nécessaires en ce qui concerne les questions exclues de la négociation collective. Cette question doit être réglée en consultation avec les partenaires sociaux. Toutefois, les méthodes de détermination des questions relevant de la négociation collective peuvent varier d'un pays à l'autre. En conséquence, il suffirait de demander au gouvernement de fournir des informations complémentaires à cet égard. En outre, un accord a été conclu au sujet de la nécessité d'amender l'article 15 de la loi sur les relations du travail.

La commission a pris note des déclarations des représentants gouvernementaux et de la discussion qui a eu lieu par la suite.
La commission a pris note de la volonté du gouvernement d'abroger l'article 15 de la loi de 1967 sur les relations du travail qui limite le champ d'application des conventions collectives pour les entreprises dites «prisonnières» mais a rappelé que, selon la commission d'experts, le gouvernement annonce ces «mesures positives» depuis 1994. Comme la commission d'experts, la commission a prié instamment le gouvernement d'abroger l'article 15 et d'amender l'article 13 (3) de la loi sur les relations du travail le plus rapidement possible de façon à assurer que les organisations de travailleurs et les employeurs soient encouragés à négocier librement les conditions d'emploi des travailleurs, conformément à l'article 4 de la convention. En outre, la commission a prié le gouvernement de fournir plus d'informations sur la manière selon laquelle la négociation collective est encouragée et promue dans la pratique entre les employeurs du secteur public et les organisations de fonctionnaires. La commission a voulu croire que
le gouvernement fournira un rapport détaillé sur les mesures concrètes réellement prises aux fins de respecter les exigences de la convention sur toutes les questions soulevées par la commission d'experts.

Convention no 102: Sécurité sociale (norme minimum), 1952

Mexique (ratification:1961). Un représentant gouvernemental du Mexique a déclaré, faisant suite aux demandes d'éclaircissements et de données statistiques sur l'application dans la pratique de la nouvelle loi sur la sécurité sociale, entrée en vigueur en juillet 1997, et de la loi relative aux systèmes d'épargne aux fins de la retraite d'avril 1996, qu'il ne s'attendait pas à ce que sa délégation soit invitée à présenter cette année à la Commission des normes des informations que la commission d'experts avait par ailleurs demandées pour l'an 2000. Grâce à la volonté constante du gouvernement du Mexique de collaborer pleinement avec l'OIT, un groupe d'experts a pu être présent à cette session afin de communiquer les informations disponibles en réponse aux commentaires de la commission d'experts.

Un desdits experts a communiqué les éclaircissements demandés par la commission d'experts. En ce qui concerne le niveau et la durée des prestations, l'article 28 de la loi sur la sécurité sociale prévoit un plafond pour le salaire soumis à cotisation représentant
25 fois le salaire minimum général pour le district fédéral. S'agissant du montant des prestations pécuniaires en cas de maladie ou de maternité, celui-ci correspond, pour les indemnités maladie, conformément à l'article 98 de la loi, à 60 pour cent du dernier salaire soumis à cotisation et, pour les indemnités de maternité, à 100 pour cent dudit salaire, en application de l'article 101 de la loi.

La commission d'experts avait demandé concernant les prestations de vieillesse si, dans la pratique, le montant minimum de la pension vieillesse atteint le pourcentage prescrit, conformément à l'article 66 de la convention. Selon les termes des dispositions législatives applicables, et en se basant sur l'attribution de 1.075 pensions de vieillesse sous couvert de la nouvelle loi sur la sécurité sociale, ces prestations dépassent 40 pour cent du salaire soumis à cotisation des deux dernières années pour un bénéficiaire type ayant accompli les conditions d'âge et de durée de cotisations. Ce niveau de prestations est garanti pendant toute la vie du retraité et, jusqu'à ce jour, aucun retraité n'a opté pour la modalité de «retraite programmée».

La commission d'experts avait demandé au gouvernement d'indiquer la manière dont est assurée l'application de l'article 30 de la convention (paiement de la prestation pendant toute la durée de l'éventualité) en ce qui concerne la modalité de «retraite programmée» quand le bénéficiaire a épuisé le capital accumulé sur son compte individuel, et en particulier si, dans ce cas, le bénéficiaire a le droit de percevoir la «pension garantie» prévue à l'article 170 de la loi sur la sécurité sociale. L'orateur a indiqué que, lorsque le bénéficiaire d'une pension ayant opté pour la modalité de «la retraite programmée» a épuisé le capital de son compte individuel, la société administratrice des fonds de retraite (AFORES) notifie ce fait à l'Institut mexicain de sécurité sociale afin que ce dernier continue à verser la pension minimum garantie. Ainsi, lorsque le capital est épuisé, la pension sera directement prise en charge par l'institut grâce aux ressources que l'Etat fédéral aura affectées à cet effet, conformément à l'article 172, paragraphes 3 et 4, de la loi sur la sécurité sociale.

S'agissant des informations demandées au gouvernement sur la manière dont il est donné effet à l'article 29, paragraphe 2, alinéa a), de la convention relatif aux prestations de vieillesse réduite, l'article 154 de la loi sur la sécurité sociale prévoit que le travailleur âgé de 60 ans ou plus, qui n'a pas accompli la période de stage de 1.250 semaines de cotisation, pourra soit retirer le capital accumulé sur son compte soit continuer à cotiser jusqu'à atteindre le nombre de semaines requises pour l'ouverture du droit à la pension. Dans ce cas, si le bénéficiaire a précisément cotisé pendant la période minimale prévue à l'article 29, paragraphe 2, alinéa a), de la convention (750 semaines), il aura droit aux prestations de l'assurance maladie et maternité qui sont équivalentes à une prestation réduite de vieillesse.

En ce qui concerne les prestations en cas d'accident du travail et de maladie professionnelle, les prestations d'invalidité et les prestations de survivants, prévues aux articles 56, 57, 62 et 63 de la convention, il convient de signaler que la pension d'invalidité des travailleurs ayant rempli les conditions de cotisations prévues à l'article 122 correspond à 35 pour cent de la moyenne des salaires versés pendant les 500 semaines antérieures, montant auquel s'ajoutent, comme le précise la commission, les prestations familiales. Cette pension d'invalidité est versée à tous les bénéficiaires et correspond: à 15 pour cent du montant de la pension pour l'épouse ou la concubine du bénéficiaire; à 10 pour cent pour chacun des enfants de moins de 16 ans du bénéficiaire; si le bénéficiaire n'a ni épouse, ni concubine, ni enfant de moins de 16 ans, une prestation correspondant à 10 pour cent est accordée à chacun de ses parents économiquement dépendants; si le bénéficiaire n'a ni épouse, ni concubine, ni enfant, ni parents, une prestation d'assistance correspondant à 15 pour cent du montant de la pension sera accordée; si le bénéficiaire n'a qu'un seul ascendant, celui-ci bénéficie d'une prestation d'assistance correspondant à 10 pour cent du montant de la pension. Ces données découlent de l'article 138 de la loi sur la sécurité sociale. Les 15 pour cent de la pension correspondent à 5,25 pour cent du pourcentage qui sert de base au calcul de la pension, et les 10 pour cent correspondent à 3,5 pour cent de ce même pourcentage. Ainsi, un bénéficiaire ayant une épouse et un enfant aura droit à une pension correspondant à 43,7 pour cent du salaire soumis à cotisation, ce qui est manifestement supérieur au taux de 40 pour cent exigé par la convention. En conséquence, les pensions d'invalidité octroyées conformément à la nouvelle loi correspondront au minimum à 43,7 pour cent pour le bénéficiaire type et ne seront en aucun cas inférieures à 40,25 pour cent de la moyenne des salaires versés pendant les 500 semaines de cotisation précédant l'éventualité.

S'agissant de la pension de veuve et d'orphelin accordée au survivant type (veuve ayant deux enfants) du bénéficiaire décédé pour une cause ne résultant pas d'un accident du travail, celle–ci n'est jamais inférieure au taux de 40 pour cent prévu par la convention. Les données suivantes démontrent ce point: la pension de veuve correspond à 31,5 pour cent du salaire du bénéficiaire type; la pension accordée au premier enfant ainsi qu'au second correspond à 7 pour cent de ce salaire, le total correspondant à 45,5 pour cent du salaire du bénéficiaire type. Ces données découlent des articles 131 et 135 de la loi sur la sécurité sociale.

S'agissant des pensions résultant d'une lésion professionnelle (maladie professionnelle ou accident du travail), selon l'article 58, partie II, le bénéficiaire à qui une incapacité permanente totale est reconnue reçoit une pension mensuelle correspondant à 70 pour cent de son salaire soumis à cotisation.

En ce qui concerne l'ajustement des prestations à long terme au coût de la vie ou au niveau général des gains, le rapport qui sera présenté en l'an 2000 contiendra, conformément à l'article 65 de la convention, des informations détaillées en rapport avec l'évolution du coût de la vie, l'évolution du niveau général des salaires, l'évolution des prestations (moyenne par bénéficiaire et pour le bénéficiaire type) ainsi que l'évolution des prestations minima.

En ce qui concerne le financement des prestations, les statistiques demandées par le formulaire de rapport conformément à l'article 71, paragraphe 3, seront fournies dans le rapport qui sera présenté en l'an 2000.

S'agissant de l'administration et du contrôle du système de sécurité sociale, l'Institut de sécurité sociale réalise et présente tous les ans à son conseil technique et à son assemblée générale un rapport financier et actuariel contenant les calculs actuariels correspondant à chaque branche de sécurité sociale ainsi que les études correspondantes sur la viabilité financière.

Concernant la participation des personnes protégées à l'administration, les AFORES et les SIEFORES (sociétés spécialisées d'investissement des fonds de retraite) sont administrées par un conseil d'administration au sein duquel deux conseillers indépendants représentent les intérêts des travailleurs qui ont choisi une AFORE pour gérer leur compte individuel ou pour administrer la SIEFORE correspondante. Ces conseillers ne doivent avoir aucun lien avec le patrimoine de l'AFORE ou de la SIEFORE ni être en situation de dépendance vis-à-vis des actionnaires, et doivent réunir les conditions prévues par la loi relative aux systèmes d'épargne aux fins de la retraite. Le conseiller indépendant joue un rôle important dans la surveillance de la gestion du capital des travailleurs qui a été confiée aux AFORES ou investie dans les SIEFORES dans la mesure où leur vote est exigé pour l'approbation des programmes d'autoréglementation de l'AFORE et les contrats qu'elle conclut.

Après avoir indiqué que le rapport en préparation contiendra toutes les informations statistiques demandées dans le formulaire de rapport (art. 76, paragr. 1 b) i)), l'orateur a indiqué, s'agissant de l'application des dispositions transitoires prises en ce qui concerne les personnes déjà affiliées à l'Institut mexicain de sécurité sociale avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la sécurité sociale, que la loi de 1973 s'appliquait toujours malgré l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Elle a été partiellement abrogée afin de conserver les droits acquis des bénéficiaires sous couvert de la loi antérieure (principalement en matière de pension) de telle sorte que le travailleur qui remplit les conditions de la loi antérieure ou de la nouvelle peut demander à l'institut de lui calculer le montant de sa pension selon la loi de 1973 ou la loi de 1997; le travailleur choisit lui–même de percevoir les prestations de vieillesse selon la loi qui lui est plus favorable.

Afin d'assurer la revalorisation des prestations de vieillesse, d'invalidité et de survivants, ainsi que celles versées en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles liquidées sous couvert de la loi de 1973, conformément à l'article 65, paragraphe 10, de la convention, la loi de 1973, qui prévoit l'augmentation de ces pensions en fonction du même pourcentage et au même moment où intervient l'augmentation du salaire minimum général pour le district fédéral, demeure en vigueur.

L'orateur espère avoir élucidé les doutes relatifs à l'application de la convention no 102 par le Mexique.

Les membres travailleurs ont remercié les représentants gouvernementaux des informations qu'ils venaient de fournir et ont salué la volonté et la disponibilité du gouvernement à continuer à coopérer avec le BIT. Si les membres travailleurs ont proposé de discuter le cas du Mexique en relation avec la convention, c'est pour trois raisons. En premier lieu, ils ne veulent pas limiter la discussion au sein de la commission aux seules conventions fondamentales ou prioritaires. L'application de conventions de nature plutôt technique est importante pour la vie quotidienne des travailleurs, y compris ceux sans emploi, et de leurs familles. En outre, la commission doit s'occuper de nouveaux développements et de nouvelles tendances dans la politique sociale et dans la pratique par rapport aux conventions internationales. Les membres travailleurs ont constaté que les responsables au niveau national ne tiennent pas toujours compte des objectifs et principes directeurs des normes internationales. En deuxième lieu, le système de contrôle de l'OIT a également une fonction préventive. Il ne faut pas attendre plusieurs années avant de signaler et de discuter des problèmes d'application. La convention est rédigée de manière souple et laisse une très importante marge de manœuvre au niveau national pour tenir compte des niveaux de développement différents, des différences dans la conception, le financement et la gestion du système de sécurité sociale. Néanmoins, cette convention a clairement pour objet d'établir des normes minimales qui doivent être respectées indépendamment de la nature du système. En troisième lieu, des modifications importantes sont intervenues dans les systèmes de retraite et de la sécurité sociale en général, notamment en Amérique latine avec l'introduction des comptes d'épargne individuels, des sociétés d'investissement et l'abandon ou l'affaiblissement des systèmes nationaux. S'il est vrai qu'il y a des différences dans les modalités des réformes entre les différents pays, il existe cependant des similarités dans les approches. La présente commission a constaté que, dans certains cas, il y a des problèmes d'application de la convention. Elle a souligné que tous les systèmes de retraite, quelle que soit leur nature – privée, publique ou mixte – devraient respecter les normes minimales afin de garantir une crédibilité au niveau des contributions, des prestations, du nombre de travailleurs protégés, de la gestion et des modalités d'application.

Les réformes dans le système de sécurité sociale au Mexique sont récentes et les organes de contrôle ne disposent pas encore de toutes les informations nécessaires pour apprécier leur conformité avec les normes minimales. Pourtant, compte tenu de l'importance de ces réformes, qui modifient sensiblement la conception et le fonctionnement du système, les membres travailleurs veulent être assurés de cette conformité. Ils constatent déjà que certaines dispositions de la nouvelle loi du 1er juillet 1997 ne semblent pas être conformes à la convention. La commission d'experts s'est référée à l'article 162 de cette loi qui impose une période de cotisations considérable (24 années) pour avoir droit à une pension de vieillesse; l'article 29, paragraphe 2, de la convention prévoit pour sa part le droit à une pension réduite pour une personne protégée après quinze années de cotisations. La commission d'experts s'est également référée aux articles 141, d'une part, et 131, 135 et 144, d'autre part, de la loi relatifs aux pensions d'invalidité et à celles de survivants, selon lesquels le niveau des prestations serait limité à 35 pour cent du salaire antérieur moyen, alors que les dispositions de la convention imposent un minimum de 40 pour cent des gains antérieurs. Sur ce point ainsi que d'autres, le représentant gouvernemental a donné des informations. L'ensemble des informations et statistiques devrait être examiné par la commission d'experts.

Enfin, la commission d'experts a constaté que les textes de la loi en tant que tels ne donnent pas d'indications claires sur la conformité avec les principes et niveaux minima de la convention. Les questions portent sur plusieurs points: sur le montant de la pension de vieillesse qui ne semble pas être établi à l'avance, mais dépend du capital accumulé sur les comptes individuels, alors que la convention prévoit des niveaux de montants minima; sur les conséquences pour le bénéficiaire, lorsque le capital accumulé dans le compte individuel est épuisé, sachant que l'article 30 de la convention dispose que la pension doit être payée durant toute la durée de l'éventualité; sur la révision des pensions et autres prestations, pour tenir compte de l'évolution du coût de la vie, comme le prévoit l'article 65, paragraphe 10, de la convention; sur l'existence ou non de garanties quant au financement du système – en particulier, sur ce qu'il se passe pour les prestations en cas de crise financière et économique et en cas de difficultés des sociétés spécialisées d'investissement des fonds de retraite (SIEFORES et AFORES); sur l'existence ou non de garanties quant au contrôle et à l'administration des caisses et sociétés de pension et d'investissement; et, enfin, sur l'organisation de la participation des travailleurs dans la gestion du système. Le représentant gouvernemental a donné des éléments de réponse sur les questions posées. Ceux-ci doivent être examinés de façon approfondie par la commission d'experts.

Les membres travailleurs ont eu des échos négatifs de plusieurs organisations syndicales dans différents secteurs et entreprises. La commission d'experts s'est d'ailleurs référée à une communication de juin 1997 de la part de différentes organisations syndicales. Les craintes formulées par ces organisations sont de nature fondamentale. Des inquiétudes ont également été exprimées en ce qui concerne le système de soins de santé (couvert aussi par la convention). Les membres travailleurs posent également des questions quant aux garanties relatives à la solidarité intergénérations, au niveau de pensions en cas de maladie de longue durée, aux conséquences pour les travailleurs qui étaient déjà affiliés à l'Institut mexicain de sécurité sociale avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Ils demandent au gouvernement de fournir, comme le représentant gouvernemental l'a annoncé, des informations détaillées, y compris des calculs actuariels et des statistiques de manière à ce que la commission d'experts puisse analyser la situation réelle dans son ensemble. Ils demandent également au gouvernement de s'assurer que sa législation soit pleinement conforme à la convention et, le cas échéant, d'adopter les amendements nécessaires.

Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental des informations exhaustives complètes qu'il a présentées à si brève échéance dans ce domaine éminemment technique. Ayant pris note des nouvelles mesures adoptées récemment par le pays, notamment des nouvelles législations de 1996 et 1997, ils comprennent entièrement que les travailleurs soient préoccupés de voir que le nouveau système de sécurité sociale pourrait avoir pour effet non pas d'améliorer la situation mais de l'aggraver. Il n'était pas possible au représentant du gouvernement de fournir des données très détaillées. La situation du Mexique est à replacer dans le contexte des mesures prises par d'autres pays, notamment dans la région de l'Amérique latine. Des systèmes de sécurité sociale ont été réorganisés, du fait qu'ils se sont révélés inadéquats. Les anciens systèmes ne permettaient plus de satisfaire aux obligations ni de répondre aux objectifs en assurant des prestations correspondant aux besoins sociaux. Quant à ces prestations, elles ne comportaient plus de garanties sociales adéquates et leur niveau s'amenuisait. Il a donc été décidé de remplacer ou compléter les anciens systèmes, normalement à caractère public, par des systèmes privés de prestations. Dans le cas du Mexique, le système, organisé sur la base de l'Etat fédéral, n'est pas devenu entièrement privé et l'Etat apporte des garanties quant aux services des prestations minimales.

Les membres employeurs ont rappelé que cette convention avait été adoptée en 1952, alors que l'évolution actuelle n'avait pu être imaginée. A cette époque, la sécurité sociale ne reposait que sur des systèmes d'Etat. C'est plus récemment que des changements ont été introduits dans de nombreux pays. Même dans un pays qui a été associé aux prémices de certains types de sécurité sociale, notamment en conséquence des mesures inspirées par Bismark, des changements très étendus ont été envisagés. Dans le cas du Mexique, certains craignent que ces changements n'affectent le niveau des prestations servies et redoutent une détérioration de la situation. La convention comporte certes des dispositions concernant les prestations minimales mais elle ne couvre pas des situations dans lesquelles le système de prestations change. Il s'agit donc de savoir si le nouveau système garantit les normes minimales correspondantes. Des questions très techniques ont été soulevées par la commission d'experts. En déclarant qu'il n'aurait pas été en mesure de se livrer lui-même, à si brève échéance, à un exposé technique de cette nature, le membre gouvernemental n'a fait que souligner l'intérêt des éléments présentés oralement par son homologue.

Dans son rapport, la commission d'experts ne dit à aucun moment que la convention pourrait être violée par le Mexique. Ce qui est en question, ce sont les répercussions du nouveau système. Les questions soulevées par la commission d'experts ne trouveront leurs réponses que dans des statistiques. La législation est bien trop récente pour bénéficier encore de suffisamment de perspectives et il faudra plusieurs années de compilation de données. La commission d'experts s'interroge sur la nature des prestations servies dans certaines branches de sécurité sociale, comme la maladie et la maternité, de même que sur le niveau des prestations visées à l'article 66 de la convention. La commission d'experts s'interroge également sur le niveau des pensions de vieillesse et sur un éventuel plafonnement de ces prestations. Elle s'est notamment interrogée sur les modalités selon lesquelles une pension peut être calculée par anticipation si elle est fondée sur une accumulation de capital, de même que sur les modalités selon lesquelles le gouvernement s'acquitte de son obligation de garantir une pension minimum calculée sur la base du salaire minimum. Elle s'est encore interrogée sur le calcul des prestations à verser en cas d'accident du travail et de maladie professionnelle. Enfin, elle s'est interrogée sur la gestion du nouveau système et sur la participation, dans ce cadre, des travailleurs et des assurés. Les réponses qui seront apportées à ces questions seront examinées par le Bureau et par la commission d'experts. Si, à un stade ultérieur, ce cas est à nouveau signalé dans le rapport de la commission d'experts, il appartiendra à la Commission de la Conférence de décider de l'opportunité de l'examiner à nouveau. Entre-temps, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence devrait se borner à demander au gouvernement de fournir des informations en réponse aux questions soulevées par la commission d'experts.

Le membre employeur du Mexique a déclaré que la nouvelle loi de sécurité sociale, qui est issue de la concertation entre les secteurs productifs et de la médiation du gouvernement entre les participants et qui a bénéficié des contributions d'universitaires renommés, vient tout juste d'être appliquée, et que les conséquences les plus importantes de son application sont encore attendues.

La décision générale de procéder à une nouvelle réglementation constituait une nécessité imminente résultant de concepts devenus obsolètes en raison de la dynamique de la sécurité sociale qui exige de plus grandes avancées en matière de protection.

Les employeurs qui participent activement dans les organes de direction de l'Institut mexicain de sécurité sociale et du système d'épargne aux fins de la retraite sont pleinement convaincus que ces structures tripartites sont les forums les plus démocratiques où ils peuvent intervenir en tant qu'interlocuteurs. La transformation du système de sécurité sociale mexicain à travers sa nouvelle législation représente une avancée dans la protection des droits des travailleurs affiliés ainsi que leurs bénéficiaires. Il ne faut toutefois pas oublier que les avantages économiques obtenus dans les pensions produiront des effets sur les nouvelles générations. En outre, le respect des droits acquis avait été pris en considération de sorte que les ayants droit inscrits antérieurement auront la possibilité de choisir entre l'application de l'une ou l'autre loi de sécurité sociale en fonction de leur propre intérêt.

L'orateur a connaissance du fait que le rapport demandé par la commission d'experts sera présenté en l'an 2000 et contiendra les statistiques pertinentes ainsi que toutes les informations relatives aux personnes protégées. Enfin, il affirme que la loi mentionnée respecte de manière positive et satisfaisante les dispositions prévues dans les normes internationales de sécurité sociale.

Le membre travailleur du Brésil a affirmé que les commentaires formulés par la commission d'experts sur l'application de la nouvelle loi de sécurité sociale du Mexique sont très préoccupants. La convention no 102 est l'une des plus importantes de l'OIT dans la mesure où elle envisage non seulement des prestations de vieillesse mais également et surtout les autres prestations de sécurité sociale. La sécurité est sans aucun doute l'une des garanties les plus importantes pour les travailleurs tout au long de leur carrière professionnelle. Elle est une protection contre toutes les éventualités qui peuvent intervenir dans leur vie de travailleur. Il convient de partager les préoccupations relatives aux prestations de maladie et de maternité exprimées par la commission d'experts. Il n'apparaît pas clairement que ces prestations ne feront pas l'objet d'une réduction lors de la détermination du plafond pour le salaire soumis à cotisation et du montant de celles-ci. La commission d'experts a également fait référence à la manière dont la pension de vieillesse est garantie par le nouveau système ainsi qu'aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2 a), de la convention qui prévoient le droit aux prestations après quinze années de cotisation. Il n'apparaît toujours pas clairement que la loi mexicaine soit conforme à la convention; selon l'orateur, elle ne l'est pas.

Les pourcentages et le champ d'application de la pension d'invalidité et de la pension de veuvage ne semblent pas être conformes aux dispositions de la convention. Il convient de demander au gouvernement mexicain d'introduire les modifications nécessaires dans sa législation afin de l'harmoniser avec la convention no 102. Finalement, bien que le gouvernement mexicain considère que la privatisation constitue la solution à ses problèmes, celle-ci ne doit pas se faire aux dépens des droits minimums garantis par cette convention.

Le représentant gouvernemental a indiqué que l'exposé d'un autre représentant gouvernemental avait répondu aux préoccupations exprimées par les employeurs et les travailleurs. La concordance totale entre la législation et la convention no 102 doit ainsi être rappelée. Quant aux doutes relatifs aux calculs ou aux droits acquis, un autre représentant gouvernemental et le membre employeur du Mexique se sont clairement exprimés sur cette question. Enfin, les commentaires formulés par cette commission seront pris en compte lors de la préparation du rapport détaillé que le gouvernement doit présenter.

L'autre représentant gouvernemental a remercié les travailleurs et les employeurs pour leurs observations. Il a souligné que, toujours en vue de respecter les engagements du Mexique vis-à-vis de l'OIT, lors de la procédure d'élaboration de la loi sur la sécurité sociale, une attention particulière avait été apportée afin que ces dispositions soient en conformité avec la convention no 102. Cette loi étant en vigueur depuis à peine deux ans, il est trop tôt pour disposer de données définitives. Des statistiques confirmant ce qui a été déclaré au cours de cette réunion seront annexées au rapport. Concernant l'intervention des membres travailleurs, dans la mesure où ces derniers ne disposaient pas du texte de l'exposé, il est possible que certaines données leur aient échappé. Il serait en conséquence souhaitable que le texte de cet exposé soit distribué. Finalement, l'orateur a tenu à souligner que la loi n'était pas en contradiction avec la convention no 102.

La commission a remercié les représentants gouvernementaux pour leurs informations orales très détaillées et a pris note avec intérêt de la discussion qui a suivi. Elle a noté les réformes récentes entreprises par le gouvernement dans le système de sécurité sociale. Compte tenu de la grande complexité des questions abordées et de la nature hautement technique des informations fournies par les représentants gouvernementaux, la commission a considéré que ces informations devraient être en premier lieu examinées par la commission d'experts. Elle a accueilli favorablement la promesse du représentant gouvernemental selon laquelle le gouvernement enverrait un rapport détaillé en l'an 2000 contenant des informations complètes, y compris des données statistiques, sur tous les points soulevés dans l'observation de la commission d'experts.

Convention no 107: Populations aborigènes et tribales, 1957

Brésil (ratification: 1965). Un représentant gouvernemental s'est déclaré surpris que, bien que le Brésil soit l'un des pays ayant ratifié le plus grand nombre de conventions de l'OIT, il est régulièrement appelé devant la commission pour évoquer des questions d'application. L'intervenant a réaffirmé que la convention présente une grande importance pour son pays comme pour lui-même, puisqu'il a été étroitement associé, au fil des ans, aux questions concernant les indigènes, notamment à l'occasion de visites dans ces territoires et de l'élaboration d'un instrument juridique pertinent. A cet égard, il a fait observer que les commentaires formulés par la commission d'experts à propos de l'application de la convention au Brésil tiennent compte des informations fournies par le gouvernement et des nombreux faits positifs qui ont été constatés. La situation évolue rapidement. Il se félicite donc de l'occasion qui lui est donnée de fournir à la commission des informations à jour et de répondre à toutes les questions qui pourraient être posées.

En raison de la grande importance qu'il attache à la question indigène, le gouvernement brésilien a adopté une vaste stratégie englobant la démarcation des terres, l'assistance sanitaire et l'inspection du travail, autant d'aspects qui ont été signalés par la commission d'experts. Le gouvernement est néanmoins conscient qu'il existe des domaines dans lesquels les mesures prises pourraient être améliorées.

L'une des questions soulevées à nouveau par la commission d'experts concerne la présence des «garimpeiros» en territoire yanomami. Ce territoire couvre quelque 9,5 millions d'hectares, alors que ce peuple ne compte que 10.000 individus. Pour des raisons anthropologiques, le gouvernement du Brésil a décidé de réserver ces territoires aux Yanomami, population nomade vivant au Brésil et au Venezuela. Il prend des mesures pour faire partir les «garimpeiros», c'est-à-dire les prospecteurs d'or du territoire depuis 1987, et leur présence s'est considérablement réduite. Depuis le dernier rapport de la commission d'experts, quatre nouvelles opérations ont été conduites pour expulser les occupants illicites du territoire des Yanomami, et c'est ainsi que 4.500 personnes ont été chassées. Une nouvelle opération est prévue, en collaboration avec diverses institutions fédérales et avec la participation de représentants du peuple yanomami. L'intervenant a rappelé que les conditions climatiques et les difficultés d'accès rendent néanmoins ces opérations très difficiles.

Il existe à l'heure actuelle 15 unités de la Fondation nationale pour les Indiens (FUNAI) dans la région, qui ont pour responsabilité d'inspecter le territoire et d'aider la population. Les activités de prévention et de répression de la prospection illégale dans la région de l'Amazone se sont développées. On évoquera à titre d'exemple la réalisation, par la police fédérale, d'un programme de contrôle de l'approvisionnement et du trafic des aéronefs à l'aéroport de Boa Vista, plaque tournante des vols illégaux en direction de la région. De même, les négoces d'achat et de vente d'or de Roraima ont eux aussi été fermés.

Le gouvernement poursuit son programme d'assistance financière en faveur des villes et des villages situés sur la frontière avec le Venezuela et le Guyana. Il apporte son concours à la construction de centres sanitaires et d'écoles dans les Etats des Amazones et de Roraima, ce qui absorbe une partie de la main-d'œuvre locale et l'empêche ainsi de se diriger vers des activités illicites. Le gouvernement continue de mettre en œuvre le programme de Calha Norte, axé sur le développement économique durable de la région frontalière du Nord-Ouest et sur le renforcement de l'appareil judiciaire, de la police et des autorités fiscales et douanières. Quant aux mesures protectrices entreprises pour améliorer la situation des populations indigènes, le gouvernement applique une politique sociale délicate, consistant à promouvoir le bien-être des quelque 325.000 indigènes vivant au Brésil, c'est-à-dire une très petite partie de l'ensemble de la population du pays, qui se chiffre à 165 millions d'individus. Il convient de noter que 12 pour cent du territoire brésilien sont reconnus officiellement comme territoire indien.

En avril 1999, le groupe de travail Brésil-Venezuela sur la prospection illégale a enregistré des progrès appréciables pour ce qui est d'améliorer la coopération entre l'armée et la police des deux pays, de l'échange d'informations, notamment entre les experts en matière d'environnement, en vue de réaliser des missions dans les zones touchées par la prospection illégale et d'échanger des informations sur la politique environnementale dans les zones d'activité minière des deux pays. Un projet bilatéral d'activités économiques tendant à promouvoir le développement durable de la région est également en cours.

En ce qui concerne la démarcation des terres, en décembre 1998, le Président Cardoso a signé de nouveaux décrets d'homologation concernant 21 nouveaux territoires indigènes. Au nombre de ces territoires figure la réserve de Fazenda Baiana, dans l'Etat de Bahia, occupée par la population Pataxo, qui s'étend sur 304 hectares, soit l'une des plus petites zones concernées. L'une des plus grandes est celle de Uneiuxi, dans l'Amazone, qui est occupée par les Maku-Nadeb, et qui s'étend sur 403.182 hectares. La liste complète de ces zones vient d'être soumise pour examen à la commission d'experts. Le Président de la République a en outre décidé d'étendre les territoires indigènes de Comboios, Pau Brazil et Caieras Velha, occupés par les Guaraní et les Tupiniquim.

Simultanément, le ministre de la Justice a signé une déclaration qui constitue la première étape vers la reconnaissance de 12 territoires indigènes, notamment dans la région de Raposa Serra do Sol, qui est mentionnée dans le rapport de la commission d'experts. Cette initiative ouvre la voie, pour la FUNAI, de la promotion de la démarcation administrative de ces territoires indigènes en vue de leur homologation. Le territoire de Raposa Serra do Sol, occupé par les Ingariko, les Macuxi, les Wapixana et les Taurepang, qui constituent ensemble une population de 4.000 personnes, couvre une surface de plus de 1.5 million de km2. Des précisions concernant ces 12 territoires viennent d'être envoyées à la commission d'experts.

En ce qui concerne la déclaration relative au territoire de Raposa Serra do Sol, dont le sort préoccupe plus particulièrement la commission d'experts, cet instrument annule une résolution du ministère de la Justice de 1996 qui excluait de ce territoire un certain nombre de propriétés, dont une exploitation agricole, le village d'Uiramuta et quatre autres petites localités. Désormais, le territoire indien de Raposa Serra do Sol les englobe. Cette décision se fondait sur la perspective anthropologique défendue par la FUNAI, qui préconisait de démarquer de manière continue ce territoire indigène. La préservation de la culture de ces peuples dépend de la préservation de l'unité de leur territoire. Cette décision constitue donc, pour le gouvernement brésilien, un jalon dans sa politique en faveur de la préservation de la pluralité culturelle que représentent les communautés indigènes.

S'agissant des problèmes sanitaires affectant les indigènes et de la responsabilité de la coordination en matière sanitaire, le décret de 1998 désignant la FUNAI comme institution responsable de la situation sanitaire des peuples indigènes a été abrogé. Désormais, les programmes sanitaires concernant les populations indigènes seront menés exclusivement au niveau fédéral, par le ministère de la Santé. Sur la base d'un modèle d'assistance sanitaire proposé lors des deux conférences nationales consacrées à cette question, qui se sont tenues en 1986 et en 1993, avec la participation de représentants des divers groupes indigènes, le ministère de la Santé a décidé de constituer 29 districts sanitaires spéciaux relevant de la responsabilité fédérale afin d'assurer l'accès des peuples indiens aux services de santé. Ces districts sanitaires seront autonomes sur les plans administratif, budgétaire, financier et technique. Ils sont constitués sur la base de critères tels que la population, la zone géographique, le profil épidémiologique, les relations sociales entre les différents groupes indigènes, la répartition démographique traditionnelle des populations indigènes et la disponibilité des services, des ressources humaines et des infrastructures. Chaque district doit organiser un réseau de services sanitaires destiné à améliorer les services existants, en coordination avec un agent sanitaire pour les communautés indigènes. Le programme prévoit également la préservation des petits hôpitaux indiens de certaines municipalités, qui seront adaptés aux besoins sanitaires spécifiques de ces populations. Le financement des districts sera assuré par le ministère de la Santé, des organismes internationaux de coopération et le secteur privé. Leur mise en place progressive sera réalisée dans le cadre d'un projet financé par la Banque mondiale.

En ce qui concerne les projets hydroélectriques de Vale do Rio Ribeiro Do Iguapé, les trois projets de Batatal, Funil Ribeira et Itaoca n'ont atteint que le stade des études de faisabilité et ont été abandonnés à cause de l'annulation de la concession par effet de la loi no 8987/95. Le quatrième projet mentionné par la commission d'experts, dans la région de Tijuco Novo, s'appuie toujours sur une concession valide en faveur de la Compagnie brésilienne de l'aluminium. Ce projet est néanmoins gelé, du fait que le concessionnaire n'a pas encore obtenu les autorisations nécessaires sur le plan environnemental.

L'essentiel des observations formulées par la commission d'experts concerne les questions de travail des indigènes, comme il ressort du paragraphe 15 de cette observation. A cet égard, les données communiquées par le secrétariat à l'inspection du travail du ministère du Travail en 1999 font apparaître que 500 Indiens seulement travaillent dans deux distilleries de l'Etat du Mato Grosso do Sul. En mai 1999, il a été possible de parvenir à un accord entre les représentants des diverses communautés indigènes et des employeurs du secteur des distilleries, qui a débouché sur un document, le Protocole d'accord communautaire sur les droits sociaux des indigènes dans les relations du travail. Ce document définit les règles à respecter pour l'engagement de main-d'œuvre indigène, sur la base d'un contrat de services garantissant un traitement sans discrimination à leur égard, respectant leur organisation sociale, leurs croyances, leurs coutumes et leurs traditions, ainsi que l'application à leur égard de tous les droits du travail prévus par la législation brésilienne.

Pour conclure, en réponse aux demandes d'informations formulées par la commission d'experts quant aux évictions qui auraient frappé, en 1996, des populations indigènes de l'ethnie Guaraní-Kaiowá des territoires démarqués de l'Etat du Mato Grosso do Sul, l'intervenant a déclaré qu'il ne disposait pas d'informations à cet égard et qu'il poursuivait ses efforts pour en obtenir des autorités compétentes. Il a ajouté que le projet de loi no 2057 de 1991 concernant le statut des indigènes ainsi que la convention no 169 sont toujours à l'examen devant les commissions du Congrès national, de sorte qu'il n'y a pas eu de modification de la législation à ce sujet.

Les membres travailleurs ont rappelé que, alors que le Brésil a ratifié un grand nombre de conventions de l'OIT, la Commission de la Conférence l'a invité chaque année depuis 1988 à discuter des problèmes qu'il rencontre dans leur application. Les cas examinés concernent des conventions diverses, y compris les normes relatives au travail forcé et à la liberté syndicale. Il est souhaitable que les gouvernements ratifient les conventions, mais la ratification n'est pas en soi suffisante. Des mesures doivent être prises pour assurer leur application dans la loi comme dans la pratique, et, si les experts considèrent qu'il y a des insuffisances, celles-ci sont discutées à la Commission de la Conférence. En outre, le fait que les gouvernements remplissent leurs obligations en matière de soumission de rapports ne signifie pas que la Commission de la Conférence ne va pas examiner leur cas. A cet égard, certains pays n'ont pratiquement ratifié aucune des conventions de l'OIT et ne peuvent dès lors pas être appelés à fournir des informations à la présente commission.

Tout en appréciant les informations communiquées par le représentant gouvernemental, les membres travailleurs ont relevé que, sur la base des rapports transmis par le gouvernement, la commission d'experts a identifié de nombreux aspects de l'application de la convention qui posent problème. Le rapport soulève des questions très graves, telles que la situation des Yanomami et les problèmes de santé des peuples indigènes. Par conséquent, les membres travailleurs se sont félicités de la présence du représentant gouvernemental et des informations détaillées qu'il a fournies sur un grand nombre de points soulevés par la commission d'experts.

L'une de ces questions a trait à l'invasion des terres des Yanomami par les «garimpeiros». Il est établi que leur présence sur ces terres entraîne des conséquences très graves sur de nombreux aspects de la vie des populations indigènes concernées et sur leur environnement. La commission d'experts a exprimé sa préoccupation à ce sujet à maintes reprises. Il convient de se demander si dans la pratique le gouvernement exerce un contrôle quelconque sur la situation. Les informations fournies par le gouvernement indiquent que les mesures prises entre novembre 1997 et janvier 1998 se sont soldées par l'expulsion de quelque 800 «garimpeiros»; toutefois, les chiffres antérieurs indiquaient que, à l'issue des opérations menées de 1990 à 1995 et malgré les expulsions, le nombre de garimpeiros s'était accru de 3.000 au cours de ces cinq années. Ce nombre de «garimpeiros» a-t-il aussi augmenté entre 1995 et 1999? Lorsque l'on parle des «garimpeiros», on se réfère par exemple à des pistes d'atterrissage et à des stations de radio clandestines. Cela indique la présence d'importantes forces organisées derrière ces groupes, qui tirent d'importants profits des ressources minérales très riches sur le territoire des Yanomami. Cela est-il le cas? Et si oui, quelles mesures le gouvernement prend-il afin de les identifier et de lutter contre leurs activités?

Les informations contenues dans le rapport de la commission d'experts en ce qui concerne le décret no 1775 de 1996 relatif à la délimitation des terres indiennes ne sont pas rassurantes. Les intentions de la FUNAI sont certainement louables, notamment la proposition qu'elle a faite au ministère de la Justice de réexaminer les décisions administratives concernant la délimitation des terres indigènes à Raposa Serra do Sol. Elle a également demandé que des études complémentaires soient menées pour que le Président de la République puisse prendre des décisions en la matière. Cependant, tout cela semble vague et peu concluant. Il faut donc obtenir des informations sur la situation dans la pratique avec le décret no 1775. Il est à craindre que des groupes puissants et influents sapent le processus de démarcation des domaines indiens. Il semble en effet que la résolution ministérielle no 80 ait mis un terme aux progrès législatifs accomplis jusqu'alors. Les intérêts des peuples indigènes, ainsi que des personnes et des groupes les représentant, semblent être constamment menacés par certains groupes et l'on déplore des meurtres, des menaces de mort et des pratiques de corruption.

Dans les domaines de la santé, de la législation du travail et de la délimitation des territoires, les problèmes internes de la FUNAI, en termes de financement, de ressources humaines, d'organisation interne et d'implication dans des activités illicites, sont très préoccupants. Très peu de mesures semblent avoir été prises par le gouvernement pour résoudre ces problèmes qui affectent une catégorie très vulnérable de la population. Le gouvernement doit fournir des informations complémentaires sur les mesures prises pour améliorer le rôle de coordination de la FUNAI. Le Brésil a choisi de ratifier librement cette convention pour protéger les droits des personnes concernées. Le gouvernement devrait dès lors être instamment prié d'assurer en priorité l'application effective de la convention.

Des informations complémentaires sont également nécessaires sur la question de savoir si les pratiques de travail forcé imposées aux travailleurs indigènes ont pris fin. Les membres travailleurs ont souhaité savoir si des contrats de travail ont été élaborés pour les victimes du travail forcé dans le Mato Grosso do Sul.

Les membres travailleurs ont également demandé des informations sur l'état d'avancement du projet de loi no 2057 de 1991 relatif au Statut de l'Indien et à la convention no 169. Le Congrès national a-t-il établi un calendrier pour l'examen de ce projet? La convention no 169 a-t-elle réellement été soumise aux autorités compétentes et combien de temps est en moyenne nécessaire pour qu'une décision soit prise sur la ratification de conventions?

Les membres travailleurs ont exprimé leur déception au vu du peu de mesures prises suite aux suggestions qu'ils avaient formulées en 1996 au cours de l'examen de ce cas par la commission. A cette époque, le représentant gouvernemental avait salué ce que le gouvernement appelait les remarques très intéressantes et positives des membres travailleurs et s'était engagé à réagir à ces remarques dans le rapport qui serait soumis l'année suivante à la commission d'experts. Toutefois, il est très décevant de noter qu'aucune référence n'a été faite à une réponse quelconque dans le rapport de la commission d'experts de 1998. Les suggestions dont il s'agit comprenaient l'organisation de séminaires nationaux rassemblant tous les groupes concernés. Les membres travailleurs avaient souhaité que les organisations de travailleurs et d'employeurs, ainsi que les représentants des communautés indigènes, soient impliqués. Ils n'avaient pas insisté à ce moment-là pour que ce point soit inclus dans les conclusions de la commission, et ce en raison de l'engagement pris par le gouvernement d'organiser de tels séminaires nationaux. Cependant, en l'absence de réponse, ils souhaitent que cette proposition soit incluse cette année dans les conclusions de la commission.

Enfin, les membres travailleurs ont rappelé l'importance de la convention no 107. A ce jour, cette convention et la convention no 169 constituent les seuls traités internationaux consacrés aux droits fondamentaux des peuples indigènes. Les Nations Unies sont en train d'élaborer un instrument en la matière mais il ne sera pas adopté avant de nombreuses années. L'OIT porte donc la lourde responsabilité de démontrer qu'un tel instrument peut fonctionner, même si les progrès restent lents et modestes. Ces progrès ne peuvent toutefois être accomplis que si l'OIT, les gouvernements ainsi que les représentants des travailleurs et des employeurs font réellement l'effort de travailler ensemble pour atteindre les objectifs de la convention.

Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental pour les informations présentées. Ils ont noté que les gouvernements ont été invités à s'expliquer devant la Commission de la Conférence pour discuter de l'application de plusieurs conventions pour un certain nombre de raisons. Il s'agissait notamment d'obtenir un complément d'informations sur un cas spécifique. Si les informations présentées aujourd'hui par le représentant gouvernemental avaient été livrées préalablement, on aurait disposé d'une image plus précise de la situation. Les membres employeurs ont cependant apprécié les efforts du représentant gouvernemental pour répondre aux préoccupations de la commission d'experts, ce qui devrait faciliter la tâche des organes de contrôle.

La base des travaux de la commission est le rapport de la commission d'experts, laquelle a pris note, entre autres, des difficultés éprouvées par le gouvernement à propos des prospecteurs d'or dans les territoires yanomami, y compris des difficultés d'accès à ces territoires. L'invasion de ces territoires par les prospecteurs entraîne une série de problèmes, notamment la propagation de maladies et le départ des populations indigènes. Ce n'est qu'en déployant des efforts sincères pour résoudre ces difficultés que le gouvernement sera en mesure de s'acquitter de ses obligations internationales dans ce domaine.

En ce qui concerne la démarcation des territoires indigènes, s'il est vrai que cette opération porte sur des surfaces considérables, il reste néanmoins difficile d'apprécier dans quelle mesure elle s'est accomplie et dans quelle proportion la tâche reste à faire. Il serait utile de pouvoir disposer d'autres informations pour évaluer l'application de la convention par le Brésil dans ce domaine.

En ce qui concerne la possible absence de coordination des politiques concernant les populations indigènes, les membres employeurs accueillent favorablement l'annonce, par le gouvernement, de la révision de ses plans de décentralisation des services sanitaires dans l'intérêt des populations indigènes. Les membres employeurs ont cru comprendre que la décision de regrouper ces services sous la direction du ministère de la Santé n'a pas encore été appliquée. Même si les populations indigènes ne représentent qu'une faible proportion de la population, il n'en reste pas moins qu'elles nécessitent des mesures spéciales. Les membres employeurs accordent une importance particulière aux commentaires de la commission d'experts concernant la nécessité d'une action coordonnée pour la prestation de services de santé aux populations indigènes. Ils se rallient à l'opinion de la commission d'experts tendant à ce que le gouvernement soit prié de poursuivre ses efforts avec continuité et efficacité, de dégager des ressources humaines et économiques suffisantes pour éviter la disparition des populations indigènes et de prendre les mesures nécessaires pour assurer l'éradication des maladies introduites par les colons, question majeure pour les populations indigènes.

Les membres employeurs ont rappelé que la question soulevée par la commission d'experts à propos de l'emploi illégal de main-d'œuvre indigène au Mato Grosso do Sul se rapporte à l'application de la convention no 29. Il ne ressort pas clairement des informations qui ont été présentées si les cas dénoncés à propos des distilleries constituent l'ensemble du problème ou s'il s'agit simplement d'un exemple de pratiques plus généralisées, qui consistent à profiter de la situation vulnérable de ces populations.

Pour conclure, les membres employeurs ont déclaré que le gouvernement a manifestement pris certaines mesures de protection des populations indigènes, mesures qui font écho à un certain nombre de questions soulevées par la commission d'experts. Cependant, il reste manifestement beaucoup à faire. Ils ont donc appelé le gouvernement à consacrer autant de ressources que possible à l'amélioration de l'application de cette convention.

Le membre travailleur du Brésil s'est félicité des commentaires pertinents de la commission d'experts sur l'application de la convention par le Brésil. L'objectif de la convention est de promouvoir le développement culturel, économique et social des populations indigènes, de telle sorte qu'ils aient les mêmes droits et chances que tous les autres citoyens brésiliens. Il a noté que, bien que le Brésil ait ratifié la convention en 1965, le pays a fait l'objet de plusieurs observations de la commission d'experts depuis 1981. Les problèmes observés année après année par la commission d'experts donnent l'impression que l'application de la convention n'est qu'une fiction pour les populations indigènes au Brésil. La commission d'experts relève depuis dix ans des problèmes relatifs à l'application de la convention dans le pays.

Les articles 2 et 27 de la convention obligent expressément les Etats qui l'ont ratifiée à coordonner les actions entre les programmes de développement pour les populations indigènes et les autorités responsables pour leur application. A cet égard, la commission d'experts souligne depuis des années la diminution du rôle de la FUNAI, organe responsable pour l'application de la politique indigène. De plus, la politique de santé pour les populations indigènes n'est pas subordonnée à l'institution indigène, à savoir la FUNAI, mais à la Fondation nationale de la santé. Bien que le gouvernement ait promis à plusieurs reprises une réforme administrative, il ne l'a jamais entreprise.

En référence à l'article 10 de la convention, l'orateur a indiqué que le rapport du gouvernement à la commission d'experts ne fournit aucune nouvelle information sur les poursuites entamées contre les responsables du massacre de 70 Indiens en septembre 1993 (le massacre d'Haximu). Selon le rapport des précédentes années, le massacre a été perpétré par des «fugitifs». Bien qu'il y ait eu une condamnation formelle de ces actes, la pratique a été celle de l'impunité. En ce qui concerne l'article 11 de la convention, il a noté que le décret no 1775 de 1996 autorisant la redéfinition administrative des territoires indigènes était toujours en vigueur. Il estime que ce décret est une menace pour les territoires indigènes et, en particulier, la réserve indigène de Raposa Serra do Sol. Il a indiqué que sa fédération avait transmis l'information sur cette situation l'année dernière. Il s'est référé aux quatre projets de construction hydroélectrique dans l'Etat de Sao Paulo qui, à son avis, violeraient le territoire indien guaraní. Il a indiqué que le gouvernement n'avait pas encore présenté un rapport sur les effets d'impact environnemental et un rapport sur les conséquences éventuelles de cette construction pour la nation indigène. Dans ce contexte, il a invité le gouvernement à se conformer aux dispositions de l'article 12, paragraphe 1, de la convention. En ce qui concerne l'article 15 de la convention, il a noté que, bien que depuis plusieurs années la commission d'experts demande des informations sur l'existence des travaux forcés, le gouvernement n'a pas encore fourni de réponse au sujet de l'implication de fonctionnaires de la FUNAI dans le recrutement illégal d'indigènes pour des travaux forcés.

A propos des articles 19 et 20 de la convention, il a noté que la commission d'experts a fait état de préoccupations au sujet des conditions déplorables de santé des populations indigènes dans le pays et a cité en particulier le cas du peuple yanomami. Les restrictions de ressources ont également été mentionnées. Des informations terribles ont été présentées dans les rapports de la commission d'experts de 1997 et 1999, à savoir que 21 pour cent de la population des Yanomami sont décédés sur une période de sept ans; en conséquence, le taux de croissance de la population continue d'être négatif. L'orateur a également exprimé sa préoccupation en ce qui concerne le refus du gouvernement de définir un plan de services sanitaires pour les populations indigènes.

En conclusion, il a invité le gouvernement à adopter, sans autre délai, le projet de loi concernant le statut indigène dont le Congrès national est saisi depuis 1991 et à ratifier la convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989; il a affirmé que le retard dans l'adoption d'une nouvelle législation révélait un manque de volonté politique. Il a demandé à la commission de recommander qu'un expert soit envoyé dans le pays pour enquêter sur les faits relatifs à la violation de la convention.

Le membre travailleur des Etats-Unis a évoqué la mémoire de Chico Mendes, et déclaré que ce qu'il a légué concordait parfaitement avec l'esprit et l'objectif de la convention, puisque c'est sa vision qui a rassemblé en un même combat les droits des personnes qui extraient le caoutchouc, le développement durable, la protection de l'environnement et les cas de la sécurité, des droits territoriaux et du développement social et économique des peuples indigènes. Tout en reconnaissant que son pays n'est pas à l'abri de tout reproche quant à la manière dont il traite les peuples indigènes, il a déclaré que le préjudice irréparable et innommable, la persécution et la destruction que les autres nations ont infligés aux populations indigènes ne peuvent justifier le non-respect de la convention par les pays qui l'ont ratifiée.

Concernant le décret no 1775 de janvier 1996 et la résolution ministérielle no 80 qui a renversé la décision de la FUNAI de 1993 délimitant le territoire des peuples indigènes dans la région de Raposa Serra do Sol, il soutient qu'il existe une contradiction entre ces instruments et les faits avancés par le gouvernement dans son rapport à la commission d'experts. Le gouvernement déclare prendre toutes les mesures nécessaires pour exclure les «garimpeiros» des territoires yanomami et qu'il a toujours activement coopéré avec les autorités vénézuéliennes pour faire cesser la prospection minière illégale sur les terres yanomami. Néanmoins, au moyen du décret no 1775 et de la résolution ministérielle no 80, le gouvernement a maintenu des enclaves permanentes de «garimpeiros» au Raposa Serra do Sol et exclu 20 villageois indigènes du territoire délimité et protégé.

Concernant le projet de construction d'installations hydroélectriques sur des terres indigènes, il a demandé si le quatrième projet irait de l'avant, au vu des problèmes relatifs à l'environnement concernant ce projet.

Cependant, il indique que, s'agissant du quatrième projet du Tijuco, la convention no 107 impose effectivement au gouvernement d'en évaluer l'impact sur la population indigène.

Pour ce qui est de l'utilisation illégale de main-d'œuvre et de pratiques de travail forcé des peuples indigènes dans le Mato Grosso do Sul, il a noté le commentaire du gouvernement selon lequel son unité de coordination de l'inspection mobile du travail n'a relevé aucun cas de travail forcé. Le membre travailleur des Etats-Unis remet en question l'efficacité de cette enquête, particulièrement du fait que la commission d'experts a indiqué que l'examen de la question de l'utilisation illégale de main-d'œuvre par la FUNAI elle-même n'avait pas encore abouti à des résultats définitifs.

Il a conclu sa déclaration en indiquant que le jour de vérité était arrivé et qu'il était temps pour le gouvernement de se conformer pleinement aux obligations qui lui incombent en vertu de la convention. Il s'accorde avec l'opinion exprimée par le membre travailleur du Brésil qu'un expert devrait être nommé et envoyé au pays pour vérifier et enquêter sur les problèmes discutés devant la commission.

Le membre gouvernemental de l'Allemagne a rappelé que la commission avait déjà examiné l'application de la convention par le Brésil à plusieurs reprises, et pour la dernière fois en 1996. La situation reste chaque fois plus ou moins inchangée: la commission d'experts fait état de graves négligences en ce qui concerne la protection des peuples indigènes, ce que le gouvernement, en général, ne conteste pas. Le problème principal lié à l'application de la convention réside dans l'immensité des territoires en question et le manque d'infrastructures nécessaires. Les difficultés d'accès restreignent de ce fait l'autorité de l'Etat.

La commission d'experts, cette fois-ci, a noté avec intérêt plusieurs aspects de ce cas, expression qui, à l'accoutumée, désigne une première étape avant qu'un cas puisse être considéré comme un cas de progrès. En même temps, la commission d'experts a prié instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour améliorer la situation. La question essentielle touche au décret no 1775 de 1996 permettant de faire appel des décisions de délimitation des territoires indigènes, et à la résolution ministérielle no 80 qui restreint considérablement la superficie de territoire attribuée aux populations indigènes concernées. L'orateur s'est dès lors félicité de la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle des mesures ont été prises pour remédier à cette situation.

En conclusion, il a estimé que la commission devrait mettre l'accent dans ses conclusions sur les éléments positifs de ce cas. Le gouvernement devrait être encouragé à renforcer ses efforts afin que des progrès concrets soient enregistrés dans la protection des populations aborigènes et tribales.

Le représentant gouvernemental, en réponse aux commentaires formulés par les membres employeurs et travailleurs, a exprimé l'espoir que les informations qu'il a fournies au début de la discussion ont répondu à la plupart des points soulevés. En réponse à la question des membres employeurs au sujet des progrès réalisés dans le processus de délimitation des territoires, des informations complètes seront fournies à la commission d'experts quant à la proportion des territoires indigènes qui ont déjà fait l'objet d'une délimitation et de ceux qui sont toujours à l'étude. Cette proportion est environ de deux pour un. L'orateur a par ailleurs rappelé avoir déjà indiqué que la résolution ministérielle no 80 a été annulée.

Au sujet des nouveaux projets entrepris en vue d'améliorer la situation sanitaire des populations indigènes, leur cadre général répond aux souhaits exprimés par les représentants des populations indigènes et les ONG. Les insinuations selon lesquelles la FUNAI serait impliquée dans des activités illégales sont toutefois inacceptables.

En réponse à un certain nombre de commentaires formulés par les membres travailleurs, l'orateur a déclaré que la loi no 2057 de 1991 portant Statut de l'Indien et la convention no 169 sont toujours à l'examen. Le Brésil étant un pays démocratique, ces questions dépendent des décisions prises par le Congrès.

En référence à certains commentaires formulés par des membres travailleurs, l'orateur a indiqué que l'inspection mobile du travail n'a relevé aucun cas de travail forcé de travailleurs indigènes dans les distilleries du Mato Grosso do Sul au cours de la période couverte par le dernier rapport du gouvernement à la commission d'experts. Le fait que les commentaires de la commission d'experts attachent moins d'importance à cette question que par le passé montre bien que la situation s'est améliorée.

Evoquant la situation des «garimpeiros» dans les territoires yanomami et les méthodes utilisées par ces derniers, comme l'installation rapide de pistes d'atterrissage qui permettent d'amener en peu de temps un grand nombre de citoyens pauvres pour qu'ils travaillent dans ces territoires, l'orateur a observé que les mesures les plus efficaces contre les organisateurs de ces activités sont celles prises actuellement par le gouvernement, mesures qui consistent à contrôler l'accès aux territoires par voie aérienne et à fermer des magasins d'achat et de vente d'or. Il est important de savoir que, sans avions, les «garimpeiros» rencontrent d'énormes difficultés pour accéder aux territoires.

Estimant avoir répondu aussi complètement que possible aux points soulevés, l'orateur a toutefois reconnu que, si des progrès restent à faire, cela nécessite des ressources financières, de la formation et la coopération avec toutes les parties impliquées, y compris les organisations de travailleurs. Actuellement, le gouvernement met en œuvre des actions efficaces en vue de résoudre les problèmes d'application de la convention. Tout en remerciant tous les orateurs pour leurs commentaires, l'orateur a toutefois relevé que certaines déclarations de plusieurs intervenants sont exagérées et ont été démenties par les faits.

Les membres travailleurs ont exprimé des doutes quant aux progrès accomplis dans la résolution de beaucoup de problèmes soulevés devant la commission d'experts au cours des années et dans l'amélioration de la situation depuis que la Commission de la Conférence a examiné le cas pour la dernière fois. Ils ont invité le gouvernement à fournir des informations supplémentaires sur la plupart de ces problèmes, et en particulier la situation concernant le travail forcé dans le Mato Grosso do Sul et l'occupation par les «garimpeiros» de territoires indigènes. Ils ont rappelé à cet égard que l'intrusion de chercheurs d'or dans les zones indigènes constitue un danger majeur pour la santé des peuples qui y vivent. Ils espèrent également que le gouvernement donnera des indications dans son rapport à la commission d'experts sur les mesures prises pour améliorer les conditions de santé des indigènes. Concernant la dénégation par le gouvernement de l'existence de cas de travail forcé des travailleurs indigènes, il s'est référé au paragraphe 18 du rapport de la commission d'experts de 1998 mentionnant 84 violations touchant 2.290 personnes indigènes, y compris des enfants. Une procédure disciplinaire était en cours et la commission avait prié le gouvernement de l'informer entre autres des actions disciplinaires qui étaient engagées contre les responsables. Ces informations n'ont apparemment pas été fournies par le gouvernement.

Les membres travailleurs ont invité le gouvernement à tenir la commission d'experts informée de la situation quant à la construction d'installations hydroélectriques sur les territoires indigènes, ainsi que sur les progrès accomplis dans la révision de la législation concernant les populations indigènes. Enfin, ils ont rappelé les propositions qu'ils avaient faites lorsque la commission avait examiné le cas pour la dernière fois, que les représentants des peuples indigènes devraient participer à l'élaboration de solutions appropriées en ce qui concerne ces problèmes.

La commission a pris note des informations détaillées orales et écrites fournies par le gouvernement et de la discussion qui a eu lieu à la commission. Elle rappelle que ce cas a été discuté de nombreuses fois, et le plus récemment en 1996, et que la commission est restée préoccupée de la situation des peuples indigènes vulnérables du pays.

La commission se félicite des nouvelles mesures prises au sujet des normes à respecter dans l'emploi des peuples indigènes dans le Mato Grosso do Sul où existait une exploitation grave de la main-d'œuvre indigène dans les distilleries d'alcool. Elle demande au gouvernement de présenter un rapport détaillé sur la mise en œuvre en pratique de ces nouveaux arrangements et de s'employer à protéger ces populations de l'exploitation à laquelle elles ont été soumises. Elle se félicite également de l'information concernant la décision de revenir sur la précédente décision de diviser les terres indigènes à Raposa Serra do Sol.

La commission réitère sa préoccupation au sujet de la présence continue des «garimpeiros»en territoire indigène, de son effet néfaste sur la santé des peuples indigènes et de la possibilité pour ces derniers d'occuper leurs terres. Elle se félicite néanmoins des efforts continus du gouvernement pour faire partir ces chercheurs d'or. En outre, elle demeure préoccupée par la détérioration de la situation sanitaire de ces peuples, tout en notant avec intérêt la nouvelle information fournie au sujet de la coordination des services gouvernementaux responsables pour la santé des peuples indigènes. Elle espère que le gouvernement fera rapport à la commission d'experts sur les mesures qu'il prend pour protéger la santé des peuples indigènes.

La commission note l'information fournie sur la construction de projets hydroélectriques et demande au gouvernement de continuer à fournir des informations à ce sujet dans son prochain rapport.

Enfin, la commission demande au gouvernement d'informer la commission d'experts dans son prochain rapport des progrès réalisés quant à la révision de la législation sur les peuples indigènes. La commission espère que le gouvernement aura recours à l'assistance du Bureau pour la mise en œuvre de la convention.

Les membres employeurs ont rappelé que la commission d'experts a pour fonction d'établir les faits concernant l'application d'une convention. Le rôle de la Commission de la Conférence est de discuter des cas sur la base des faits établis par la commission d'experts. Les membres employeurs ne voudraient pas que le gouvernement tire une mauvaise conclusion de la discussion de ce cas par la commission. Ils se félicitent des mesures positives qui ont été prises et des progrès accomplis en vue de la résolution de ce difficile problème. Néanmoins, le gouvernement doit être invité à faire tous les efforts pour s'assurer que de nouveaux progrès seront obtenus.

Convention no 108: Conditions de vie, de travail et de sécurité des gens de mer, 1958

Fédération de Russie (ratification: 1969). Le représentant gouvernemental a fait savoir devant la commission que le ministère du Transport de la Russie avait demandé que certaines informations soient portées à l'attention de la commission. En particulier, le gouvernement en 1997 et 1998, après avoir pris en considération les recommandations du Conseil d'administration de 1996, avait adopté de nouveaux instruments légaux régissant l'application de la convention, notamment un règlement sur les passeports des gens de mer qui avait été approuvé par le décret gouvernemental no 1508 du 1er décembre 1997 et les instructions sur l'application du règlement en date du 30 juin 1998. Toutefois, la commission d'experts, dans son rapport publié en 1999, a attiré à nouveau l'attention du gouvernement sur différentes dispositions de ces instruments qui, de son point de vue, n'étaient pas en conformité avec la convention.

En ce qui concerne l'article 3 de la convention, il a mentionné le fait que, en application du règlement et des instructions, les passeports des gens de mer ne peuvent être détenus que pour une période limitée de temps, à savoir jusqu'à cinq ans, avec la possibilité d'une prolongation d'une nouvelle période de cinq ans. Il a noté que l'article 2, paragraphe 1, de la convention prévoit la délivrance d'un passeport spécifiant que le titulaire est un marin au cas où il ne serait pas possible de délivrer des documents d'identité à la catégorie spéciale des gens de mer; cependant, les instruments juridiques adoptés aux fins de la convention ne prévoient pas du tout la délivrance de documents d'identité de marins. Il a affirmé que dans la Fédération de Russie, tout comme cela était le cas dans l'ex-URSS, les documents d'identité des gens de mer sont aussi des passeports soumis à la convention et aux instruments nationaux régissant les conditions d'entrée et de sortie du pays. Le fait que ces instruments sont subordonnés à la législation nationale a été souligné par la commission et est dû à l'existence d'instruments régissant les passeports des gens de mer dont les dispositions vont plus loin que les exigences de la convention. Les documents établis ont pour objet de remplir les conditions de la convention, tout en étant conformes aux dispositions de la législation nationale relatives à l'entrée et à la sortie du pays et en donnant aux gens de mer certains avantages par rapport aux citoyens ordinaires aux fins des voyages. Il a soutenu que tous les éléments contenus dans les paragraphes 1 et 2 de l'article 6 sont couverts par la délivrance d'un seul document. Au sujet de la période de validité du document d'identité, il a indiqué que cela donnait aux gens de mer l'avantage de ne pas avoir besoin de faire une nouvelle demande pour un passeport tous les cinq ans, ce qui normalement prend de un à trois mois, période durant laquelle le marin ne peut pas quitter le pays.

Sur la question de la définition du mot marin et donc du droit au document d'identité, le représentant gouvernemental de la Fédération de Russie, se référant aux conclusions de la commission d'experts à cet égard, a noté que son gouvernement était d'avis que la reconnaissance du statut professionnel de la personne en tant que marin n'était pas l'objet principal de la convention, mais que le statut professionnel du marin était fixé en premier lieu par les documents délivrés conformément à la convention de 1978 de l'Organisation maritime internationale. La question de la définition de l'expression «gens de mer» est déterminée par les termes larges de l'article 1 de la convention no 108, en particulier son paragraphe 2 qui prévoit que: «en cas de doute quant à la question de savoir si certaines catégories de personnes doivent être considérées comme «gens de mer» aux fins de la présente convention, cette question sera tranchée, dans chaque pays, par l'autorité compétente, après consultation des organisations d'armateurs et de gens de mer intéressés». La convention renvoie ainsi à la législation nationale la question de l'interprétation plus ou moins large de l'expression «gens de mer». Son gouvernement, après avoir consulté des représentants des organisations d'armateurs et de gens de mer, et conformément à l'opinion majoritaire qui a prévalu lors de ces consultations, a décidé d'opter pour l'interprétation large aux fins de déterminer ceux qui doivent être considérés comme «gens de mer» au sens de la convention; par conséquent, selon son gouvernement, les exigences de l'article 3 de la convention ont été pleinement observées à l'égard des personnes considérées comme des gens de mer. Dans le cadre de la rédaction des instruments visant à l'application de la convention, des consultations ont été menées avec des organisations d'armateurs et de gens de mer aux fins d'assurer, dans la mesure du possible, le respect des exigences de la convention tout en tenant compte des intérêts des gens de mer russes. A cet égard, les sections 9 et 10 du règlement prévoient que les gens de mer russes dont la relation d'emploi avec les armateurs cesse doivent rendre le passeport à l'autorité émettrice ou à une autre autorité d'Etat compétente pour sauvegarde. Toutefois, cette exigence n'est pas applicable aux gens de mer en congé entre deux contrats, s'ils figurent dans les registres d'organismes de placement et d'emploi des gens de mer ou s'ils recherchent un emploi. Il n'est pas demandé aux gens de mer de rendre leur passeport aux agences de placement s'ils ont été employés dans le mois qui suit la fin de leur contrat, par un armateur russe, ou dans les trois mois qui suivent, par un armateur étranger.

Le représentant gouvernemental a proposé que l'article 1, paragraphe 1, de la convention soit amendé comme suit pour éviter de nouveaux problèmes d'interprétation: «la présente convention s'applique à tout marin employé, à quelque titre que ce soit, à bord de tout navire autre qu'un navire de guerre qui est immatriculé dans un territoire pour lequel cette convention est en vigueur et qui est normalement affecté à la navigation maritime, de même qu'à tout marin dont le niveau de formation professionnelle et l'état de santé correspondent aux exigences établies par les instruments internationaux sur l'équipage des navires en mer et qui sont prêts à être engagés à n'importe quel titre à bord de tels navires».

A propos de la demande de la commission d'experts tendant à ce que des mesures soient prises pour assurer que le document d'identité établi en conformité avec la convention et régi par elle soit distingué des passeports et autres documents de caractère purement national, le représentant gouvernemental a admis que les instruments légaux en vigueur adoptés aux fins de la convention allaient dans une certaine mesure au-delà des exigences de la convention, en particulier la section 6 du règlement qui établit la période pour laquelle le passeport du marin est délivré, et la section 11 qui établit la procédure pour le retrait lorsque des circonstances particulières entraînent «des restrictions temporaires» à l'autorisation de quitter le pays. Cela est nécessaire afin de se conformer à la législation relative à la procédure pour l'entrée et la sortie du pays. Ces dispositions ne désavantagent pas les marins: depuis l'adoption du règlement et des instructions, aucune plainte n'a été introduite par les organisations représentant les gens de mer russes à propos de leur mise en œuvre.

Au sujet de la loi du 30 avril 1999 «sur l'adoption et la mise en œuvre du Code de la marine marchande» en application de laquelle les équipages des navires battant pavillon russe peuvent inclure les citoyens étrangers et les personnes apatrides, il a informé la commission que son gouvernement était en train de considérer la question de la préparation et de la délivrance de documents de gens de mer pour les citoyens russes aussi bien que pour les personnes étrangères et apatrides employées dans des navires russes. Il a expliqué que la délivrance de documents d'identité ne serait pas liée à l'autorisation de quitter le pays, il a conclu que ce document ne contiendrait plus les lacunes soulignées par la commission d'experts, mais malheureusement les avantages du passeport des gens de mer seraient aussi perdus.

Les membres employeurs ont rappelé que l'examen de cette question a débuté avec la réclamation présentée, en vertu de l'article 24 de la Constitution, par le Syndicat des marins de Russie à la suite du refus de l'autorité compétente de Novorossiisk de délivrer des pièces d'identité aux marins conformément aux dispositions de la convention no 108. Le Conseil d'administration a désigné un comité tripartite pour examiner cette réclamation. Bien que ce comité ait demandé au gouvernement de soumettre un rapport avant septembre 1996, celui-ci n'a pas été reçu à cette date et les deux autres dates butoirs fixées pour les rapports suivants n'ont pas non plus été respectées. La commission d'experts n'a donc pas eu l'occasion d'examiner ce cas à la lumière d'un rapport du gouvernement et s'est ainsi vue obligée de répéter ses observations précédentes en 1997 et en 1998. Cet élément est un signe de la faible collaboration entre le gouvernement et les organes de contrôle de l'OIT.

Se référant à la déclaration du représentant gouvernemental de la Fédération de Russie, les membres employeurs précisent que de nombreuses questions demeurent en suspens. Il convient de noter que la disposition législative obligeant les marins à rendre leur passeport national a été abrogée, répondant ainsi à un des points soulevés par la commission d'experts. Les autres points n'ont toutefois toujours pas trouvé de solution. L'objectif et le contenu des dispositions de la convention, tels que notés par le comité tripartite et la commission d'experts, ainsi que la nécessité de procéder à une distinction claire entre les pièces d'identité des gens de mer et les passeports ont été rappelés. La déclaration du représentant gouvernemental de la Fédération de Russie, et notamment sa proposition d'amendement des dispositions de l'article 1 de la convention, confirme, d'une part, que le gouvernement n'assure toujours pas la pleine conformité de ces dispositions importantes de la convention et, d'autre part, signifierait que le gouvernement ne se considère pas tenu par les recommandations de la commission d'experts et du comité tripartite.

Les membres employeurs considèrent que la définition du terme «marin» est l'un des points essentiels et que, à cet égard, le représentant gouvernemental s'est fondé sur des prémisses erronées en se référant à des instruments d'une autre organisation disposant de ses propres règles, nommément l'Organisation maritime internationale. Ces instruments ne peuvent être utilisés pour procéder à l'interprétation de la définition du terme marin établie clairement dans la convention no 108. Suite à cette définition contenue à l'article 1 de la convention, les marins inscrits auprès d'agences de placement ou ceux recherchant un emploi devraient bénéficier d'une pièce d'identité; le chômage temporaire ne peut les priver de leur statut de marin ni de leur droit de conserver leur pièce d'identité. Le but principal des pièces d'identité des gens de mer n'est pas de remplacer les passeports puisque ces deux documents ont des objets différents. Les pièces d'identité des gens de mer sont destinées à leur assurer une permission temporaire à terre qui ne peut être refusée qu'exceptionnellement dans des cas individuels ou pour des motifs d'ordre public.

Les membres employeurs ont indiqué que les problèmes résultaient du fait que la législation nationale confondait les pièces d'identité des marins et les passeports, aboutissant ainsi à des restrictions dans l'établissement des pièces d'identité des gens de mer. Il est possible d'avoir une réglementation spécifique pour les passeports, mais les passeports et les pièces d'identité des gens de mer doivent être différenciés. Il est regrettable de constater que le gouvernement n'ait pas indiqué quand, ou si, il avait l'intention de mettre en œuvre les commentaires de la commission d'experts afin de mettre la législation en conformité avec les dispositions de la convention. A propos de la déclaration du représentant gouvernemental concernant la tenue de consultations tripartites, ils ont souligné qu'il est surprenant de constater que ce point n'a pas été mentionné plus tôt par le gouvernement compte tenu du nombre d'années pendant lesquelles le Conseil d'administration et la commission d'experts examinent ce cas. Les membres employeurs invitent le gouvernement à procéder rapidement aux consultations, à respecter les commentaires de la commission d'experts et à communiquer rapidement son rapport afin de permettre à la commission d'experts et à la Commission de la Conférence de procéder à un nouvel examen de ce cas.

Les membres travailleurs ont remercié à leur tour le représentant gouvernemental de la Fédération de Russie pour ses informations et explications complémentaires. Ils ont indiqué que ce cas est discuté dans le cadre d'une «note de bas de page Conférence» et que, à leur avis, l'insertion d'une telle note pour une convention de nature plutôt technique comme la convention no 108 n'est pas habituelle. D'après le rapport, ils ont constaté que la collaboration et la communication entre le gouvernement et la commission d'experts n'étaient pas optimales. Ils déplorent cette situation. Le fait que plusieurs ministères sont impliqués, comme le Département des transports maritimes du ministère des Transports et le ministère du Travail, et que ceux-ci ont parfois des intérêts et des objectifs différents, ne devrait pas être une excuse pour expliquer ces problèmes persistants.

Ils ont rappelé que le Conseil d'administration a adopté en mars 1996 des recommandations et conclusions à la suite d'une réclamation déposée par le Syndicat des marins de Russie. Le syndicat a dénoncé le règlement concernant les passeports des marins approuvé par le décret no 146 du 24 février 1994. Selon ce règlement, seuls les armateurs russes ont le droit de demander des documents d'identité pour les marins, seul un marin qui a une relation d'emploi avec un armateur russe peut être considéré comme tel et le marin doit déposer son passeport ordinaire lorsqu'on lui délivre un document d'identité de marin. Ce règlement a été rédigé en l'absence de consultation avec les organisations de marins et vise, selon les informations dont disposent les membres travailleurs, à protéger les intérêts de certains armateurs. Le texte est en violation flagrante de plusieurs dispositions importantes de la convention no 108. Le gouvernement devait envoyer un rapport au sujet de l'application de la convention no 108 et du suivi des recommandations adoptées par le Conseil d'administration, au plus tard en septembre 1996. Ce rapport devait permettre à la commission d'experts de suivre le cas. Malheureusement, il n'a pas été reçu et la commission d'experts a dû demander à nouveau de l'envoyer avant septembre 1997. Le rapport du gouvernement n'est arrivé qu'en novembre 1997, à une date trop tardive pour que la commission d'experts puisse l'examiner. De plus, le rapport dû en septembre 1998 n'est arrivé qu'à la mi-novembre, c'est-à-dire quelques jours avant la session de la commission d'experts. Ce rapport était simplement basé sur celui de 1997.

La commission d'experts a également formulé des commentaires sur la convention no 108 dans la partie générale de son rapport. Les membres travailleurs ont plusieurs préoccupations majeures à cet égard. Les pièces d'identité des marins permettent à ceux-ci de débarquer du bateau pendant l'escale dans le port et permettent également le retour dans le pays qui a délivré le document. Sans ce régime, le marin serait obligé de résider sur son lieu de travail sans interruption, ce qui serait une situation intolérable. La convention no 108 vise à atténuer quelque peu les conditions de travail et de vie difficiles du marin. Dans certains pays, l'émission et la conservation du document d'identité sont utilisées directement ou indirectement pour lier le marin à un armateur déterminé. Cela peut donner lieu à des abus importants et il en résulte que le droit au travail et la liberté de travail des marins sont affectés.

Six questions de droit et de pratique ont été soulevées dans la réclamation de 1995. Depuis lors, le gouvernement de la Fédération de Russie a indiqué qu'il avait modifié certains éléments de la législation mais, selon la commission d'experts et selon les informations des membres travailleurs, des problèmes persisteraient. Les termes «gens de mer» ou «marin» sont définis de manière trop étroite. L'article 1, paragraphe 1, de la convention détermine de façon claire qu'elle s'applique à tout marin employé, à quelque titre que ce soit, à bord de tout navire autre qu'un navire de guerre. Selon le paragraphe 2, en cas de doute, l'autorité compétente doit trancher la question après consultation des organisations d'armateurs et de gens de mer intéressées. Le gouvernement a indiqué qu'il avait modifié la législation. Cependant, il semble que la nouvelle législation ne soit toujours pas conforme à la convention. Le marin doit en effet répondre à deux critères: en premier lieu, il doit être titulaire d'un brevet conforme aux dispositions de la convention internationale de 1978 de l'Organisation maritime internationale. Cette convention est beaucoup plus restreinte que la convention no 108 de l'OIT puisqu'elle ne vise que les officiers. Les matelots ou personnes auxiliaires sont donc exclus. En deuxième lieu, le marin doit avoir un contrat d'engagement maritime. Les marins qui sont inscrits dans un bureau de placement sont donc exclus.

En ce qui concerne le refus par les autorités de Novorossiisk d'établir des documents d'identité aux gens de mer sans distinction quant à l'armateur qui les emploie, ils notent que l'article 2 de la convention no 108 dispose pourtant que le Membre devra délivrer à chacun de ses ressortissants exerçant la profession de marin, sur sa demande, «une pièce d'identité des gens de mer». La convention ne permet pas de délivrer ces documents par l'intermédiaire d'un armateur. Les risques d'abus sont en effet très grands. En l'occurrence, les autorités du port concerné voulaient protéger les intérêts d'un armateur en particulier. Les marins ne pouvaient pas être recrutés par d'autres compagnies concurrentes. Il n'est pas certain que les autorités du port de Novorossiisk ou d'autres ports n'essayent plus à l'avenir de donner des avantages à certains armateurs russes.

Au sujet de l'exigence de rendre le document d'identité pour sauvegarde à l'autorité émettrice à la fin de chaque engagement, la commission d'experts a rappelé que le statut de marin n'est pas limité aux seules périodes sous contrat. Le gouvernement a indiqué qu'il a modifié sa législation à cet égard. Néanmoins, la commission d'experts a noté avec préoccupation que la législation la plus récente maintient des dispositions qui vont également à l'encontre de la convention. Le gouvernement a évoqué des craintes au sujet de l'utilisation frauduleuse du document d'identité. Cependant, la prévention de la fraude ne doit pas conduire à la privation de droits accordés par la convention.

A propos du droit individuel du marin de demander en sa qualité personnelle l'établissement du document d'identité, le gouvernement a fait savoir que les marins (du moins certains) disposent à présent du droit de demander eux-mêmes ledit document. Concernant l'absence de consultation avec les organisations syndicales des marins dans le cadre de la rédaction des règlements sur les marins, les membres travailleurs ne sont pas encore convaincus que cette consultation ait effectivement eu lieu. Selon la commission d'experts, la forme retenue par l'autorité pour la confection du document d'identité est telle qu'il peut être utilisé comme titre de voyage international. La commission a souligné toutefois que ce document d'identité poursuit un autre objectif que le passeport et que le statut et la forme de ce document d'identité relèvent directement de la convention no 108, selon son article 4, et non de la législation nationale.

Les membres travailleurs prennent acte de la déclaration du gouvernement de la Fédération de Russie selon laquelle, d'une part, les marins ont maintenant la possibilité de demander en leur qualité personnelle le document d'identité et, d'autre part, l'obligation du dépôt du passeport national afin de retirer le document d'identité du marin a été supprimée. Ils constatent cependant que la commission d'experts est d'avis que plusieurs éléments de la législation ne sont pas encore conformes à la convention. Ils ne s'estiment donc pas encore en mesure de juger si la législation et la pratique dans leur ensemble sont maintenant en conformité avec la convention. Ils ont conclu que le gouvernement devrait de toute façon modifier les dispositions nationales (lois, règlements, décrets d'application, instructions) et les pratiques afin de préserver les droits de tous les marins, conformément à la convention. Le gouvernement a fourni peu d'explications à ce sujet et il devrait communiquer dans les délais toutes les informations demandées par la commission d'experts.

Le membre travailleur de la Fédération de Russie a exprimé sa reconnaissance pour les commentaires de la commission d'experts que les syndicats de Russie approuvent totalement. Il attire l'attention de la commission sur deux aspects du cas à l'examen. Premièrement, il convient de soulever le problème d'un document ayant à la fois la fonction de passeport et celle de pièce d'identité des gens de mer. Il existe une explication historique à la combinaison de ces deux fonctions: l'URSS ayant fonctionné en système fermé, le gouvernement voulait limiter le droit de quitter le pays. Quand, en 1991, l'URSS s'est effondrée et quand, en 1992, la Fédération de Russie est née, le Syndicat des marins de Russie a demandé aux autorités de l'Etat d'aborder ce problème afin que les fonctions de passeport et celles de pièces d'identité des gens de mer ne soient plus combinées. Dans le cadre de la convention no 108, la pièce d'identité des gens de mer n'est pas attribuée pour une durée limitée, ce qui est pratique pour les gens de mer et les employeurs dans la mesure où leur qualité de marin est reconnue même en cas de changement dans leurs conditions de travail ou de transfert à un autre armateur ou une autre compagnie, sans avoir besoin d'un autre document. Dans la mesure où le passeport a une durée de validité limitée, le marin doit encore réunir les documents nécessaires lors de son expiration. La pièce d'identité est un document complémentaire aux autres documents identifiant les qualifications des marins et fournit des informations sur la période pendant laquelle le marin a été employé à un poste permettant ainsi d'évaluer son expérience dans ce domaine. L'orateur indique qu'il y aura une répartition des fonctions entre les organes délivrant les pièces d'identité des gens de mer ou les passeports: les premières seront délivrées par le ministère du Travail et le ministère des Transports, alors que les secondes seront délivrées par le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Défense. Il se demande pourquoi cette question n'est toujours pas résolue et suggère que cette situation constitue un obstacle indirect pour quitter le territoire, permettant ainsi d'éviter que les marins qualifiés partent pour travailler sur les navires battant pavillon de complaisance. Toutefois, l'existence de ces limitations pourrait dans la pratique aboutir au départ définitif des marins alors que, s'il leur était permis de partir et ensuite revenir sur le territoire, ces travailleurs qualifiés reviendraient certainement dès qu'il y aurait une amélioration de l'économie. Si le gouvernement en avait l'intention, cet aspect du problème pourrait aisément être résolu.

Le deuxième aspect du problème sur lequel il convient d'attirer l'attention de la commission concerne la définition du terme marin donné à l'article 1 de la convention. Tout en convenant du fait que la formulation de cette définition peut donner lieu à des interprétations différentes, l'orateur indique que, si l'interprétation de son gouvernement était retenue, cela pourrait donner l'impression qu'il n'y a pas de marins au chômage dans le pays dans la mesure où lorsque le marin se retrouve sans emploi, son passeport lui étant retiré, il perd la qualité de marin. L'orateur propose une définition amendée du terme marin pour l'article 1: «Aux fins de la convention, le terme 'marin' signifie toute personne qui, d'après ses qualifications personnelles et sa condition physique, peut occuper une fonction à bord d'un navire, autre qu'un navire de guerre, immatriculé dans un territoire pour lequel la convention est en vigueur et qui est normalement affecté à la navigation maritime.»

Le membre travailleur du Zimbawe a rappelé que le Conseil d'administration avait été saisi de ce cas en mars 1996, suite à une réclamation transmise par le Syndicat des marins de Russie et que le gouvernement n'avait pas envoyé le rapport demandé par le Conseil d'administration. A l'époque, la principale question soulevée était la définition de l'expression «gens de mer» et par conséquent le droit à l'attribution du document d'identité. Dans son rapport, la commission d'experts a clairement expliqué ce que le gouvernement a appelé la question «à l'origine de l'ensemble des autres problèmes» et analysé en détail les dispositions de la convention. Par conséquent, l'orateur a invité le gouvernement à respecter les dispositions de la convention telles qu'expliquées par la commission d'experts au lieu de se fonder sur une interprétation conforme à sa réglementation interne. Il a vivement encouragé le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations, et en particulier amender sa réglementation afin de la mettre en conformité avec les obligations découlant de cette convention qu'il a volontairement ratifiée.

Faisant suite à la discussion, le représentant gouvernemental a présenté les excuses de son gouvernement pour la soumission tardive des rapports et a affirmé que cela ne se reproduirait pas à l'avenir. Son gouvernement souhaite prendre les mesures nécessaires pour assurer une meilleure coopération avec la commission d'experts et la Commission de la Conférence. Il a remercié les membres de la commission ayant formulé des commentaires et a confirmé que son gouvernement leur accorderait toute l'attention requise.

La commission a pris note des informations orales fournies par le représentant gouvernemental ainsi que de la discussion qui a suivi. Elle a rappelé que la commission d'experts avait formulé des commentaires et observations abondants relatifs à l'application de plusieurs articles de la convention. Elle a également rappelé que la commission d'experts avait pris bonne note des conclusions et recommandations adoptées par le Conseil d'administration en mars 1996 à la suite d'une réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution.

La commission a regretté que les informations orales fournies par le représentant gouvernemental reprennent les informations déjà mises à la disposition de la commission d'experts l'année dernière. La commission a également noté avec une profonde préoccupation que, depuis lors, aucun progrès substantiel n'a pu être constaté dans la mise en œuvre par le gouvernement des recommandations du comité. La commission a vivement exhorté le gouvernement à fournir, dans le prochain rapport qu'il doit soumettre à la commission d'experts, des informations détaillées sur les mesures concrètes prises afin de pouvoir très prochainement constater la pleine application de la convention tant en droit qu'en pratique.

Convention no 111: Discrimination (emploi et profession), 1958

République islamique d'Iran (ratification: 1964). Un représentant gouvernemental de la République islamique d'Iran a déclaré que le gouvernement a pour politique de promouvoir activement et d'accroître la participation des femmes dans toutes les activités politiques, économiques et sociales, y compris à travers une politique d'égalité des chances. Cette politique comprend également d'autres mesures visant à permettre aux femmes d'accroître leur présence et leur participation dans toutes les sphères de la vie sociale. Pour réaliser cet objectif, un bureau a été établi auprès de la présidence. Des postes spéciaux de conseiller ont été créés dans tous les ministères ainsi qu'auprès des autorités judiciaires, afin de développer le rôle des femmes. Des comités nationaux et provinciaux ont également été établis ainsi qu'une campagne extensive organisée par le gouvernement. Deux cent un bureaux existent dans tout le pays pour élaborer des programmes locaux contribuant à la promotion des droits des femmes et à leur émancipation. La société civile a également entrepris une vaste campagne pour améliorer le rôle et la participation des femmes. Plus de 90 ONG de femmes et d'associations sont actives dans le pays et certaines d'entre elles ont même obtenu le statut consultatif auprès des Nations Unies. Les médias participent également à un débat très vif sur les droits, le rôle et la participation des femmes.

En ce qui concerne l'éducation, la formation et l'emploi des femmes, leur taux d'alphabétisation est passé de 26 pour cent en 1976 à 74,2 pour cent en 1996. Le taux d'alphabétisation de la jeune génération est beaucoup plus élevé: plus de 95 pour cent des adolescentes savent lire et écrire. Le niveau moyen d'éducation des femmes a également augmenté. Le nombre de filles quittant l'école après leurs études primaires ou secondaires diminue, tandis que la proportion de diplômées de l'enseignement supérieur augmente de manière constante. En dehors de la croissance en chiffres absolus, le pourcentage d'étudiantes dans l'enseignement supérieur par rapport au nombre total d'étudiantes a plus que triplé entre 1986 et 1996. Les statistiques révèlent également que, dans certains domaines, le nombre de diplômées surpassera celui des diplômés. En 1992, 47,5 pour cent des médecins et spécialistes paramédicaux étaient des femmes. Ce taux évolue rapidement, étant donné que le nombre de candidates et de diplômées des facultés de médecine augmente. A l'heure actuelle, 60,2 pour cent des étudiants en médecine sont des femmes et 39,8 pour cent sont des hommes. Cela constitue un changement majeur car le nombre de diplômées surpassera largement le nombre de diplômés.

En 1976, 83,6 pour cent de la population féminine active avait un emploi. En 1996, ce taux était de 86,7 pour cent, alors que, pendant la même période, la population féminine totale a augmenté de 80 pour cent. Dans les zones urbaines, les femmes sont principalement employées dans les services. Dans les zones rurales, leurs principaux employeurs se trouvent dans l'industrie et le secteur de production. En 1996, environ 46 pour cent des travailleuses étaient occupées dans les services, 34,5 pour cent dans l'industrie et 17 pour cent dans l'agriculture. Le nombre total de travailleuses a augmenté de 81 pour cent entre 1986 et 1996. Le nombre total de travailleuses a augmenté de 44 pour cent entre 1991 et 1996. Le nombre de femmes salariées du secteur public a augmenté, respectivement, de 452.000, 290.000 et 84.000 en comparaison à 1976, 1986 et 1991. Le nombre de salariées dans le secteur privé a également augmenté, respectivement, de 150.000 et 131.000 en 1986 et 1991. Le nombre de femmes employeurs a augmenté, respectivement, de 11.000 et 6.000 depuis 1976 et 1991. Au cours de la même période, le nombre de femmes indépendantes a également augmenté de 216.000, 166.000 et 90.000 depuis 1976, 1986 et 1991 respectivement. Dans les provinces d'Ispahan, de Bushehr, de Chaharmahal et de Bakhtiari, de Ghom, du Kurdistan et de Yazd, le taux de chômage des femmes est inférieur à celui des hommes. Il est également intéressant de noter que l'emploi des femmes dans le secteur public a doublé entre 1981 et 1991.

Ces chiffres sont éloquents. L'augmentation du nombre de femmes ayant un emploi est assez importante. Les statistiques montrent également que les femmes ont tendance à ne plus exécuter de travaux simples et qu'elles participent de manière accrue à des activités plus complexes. En 1979, seulement 13 pour cent des femmes occupaient des emplois techniques ou scientifiques. Ce pourcentage est passé à 39,7 pour cent en 1991. Le nombre de femmes occupant des positions supérieures et à responsabilités a augmenté, en particulier sous le nouveau gouvernement. Le nombre de femmes exerçant des fonctions judiciaires est également important et le nombre de femmes juges augmente de manière constante. Des femmes occupent des fonctions telles que juge d'instruction, vice-présidente de la juridiction provinciale, juge de siège, ainsi que des fonctions élevées comme juge de cour d'appel. Le poste le plus élevé occupé par une femme est celui de procureur adjoint auprès de la Cour suprême. En dehors des universités qui organisent des licences en droit, plusieurs femmes étudient actuellement à l'Ecole des sciences juridiques. Cette institution est liée au pouvoir judiciaire et est la principale école de formation des juges.

Les informations présentées ci-dessus montrent clairement que la croissance de l'emploi et de l'éducation supérieure des femmes représente plus qu'une tendance: il s'agit d'un succès important. Les chiffres montrent également que d'autres développements importants vont intervenir, car l'investissement dans l'éducation supérieure des femmes continuera à déployer ses effets pendant plusieurs années. Les activités du Bureau des affaires féminines montrent que la volonté politique existe au plus haut niveau pour promouvoir l'emploi des femmes. En vue d'intégrer de manière plus efficace cette dimension dans l'ensemble des politiques nationales, le Directeur du Bureau des affaires féminines participe à toutes les réunions de Cabinet du gouvernement. Une Commission sur l'emploi des femmes a également été établie. Cette commission rassemble des représentants de plusieurs ministères ainsi que de l'Organisation de la planification et du budget. La commission d'experts a également reçu une copie du plan national d'action pour les femmes et du rapport intérimaire sur l'application de la Déclaration de Beijing.

L'orateur a ensuite évoqué deux questions soulevées dans le rapport de la commission d'experts. L'une d'elles est l'article 1117 du Code civil, adopté en 1934. La commission a demandé à être tenue informée de tous développements relatifs à la révision de cet article. La réponse à cette question est que l'article 18 de la loi sur la protection de la famille, adoptée en 1975, a révisé l'article 1117 du Code civil. Les codes vestimentaires pour les fonctionnaires ne sont pas discriminatoires, puisqu'ils s'imposent tant aux hommes qu'aux femmes. Plusieurs pays imposent des codes vestimentaires à leurs fonctionnaires. La commission d'experts a demandé si des licenciements pouvaient être prononcés dans ce cadre. Ce n'est pas le cas. Le licenciement sanctionne des infractions plus graves. La sanction habituelle consiste en une notification écrite au travailleur. L'article 9 de la loi sur les infractions administratives dont une copie a été transmise à la commission d'experts énumère les sanctions administratives.

La situation générale de l'emploi des Baha'is a été évoquée par le passé dans plusieurs rapports. Ces derniers indiquaient que ni la Constitution ni le Code du travail ne contiennent de critères en matière d'emploi conduisant à, ou faisant intervenir, une discrimination sur l'une quelconque des bases mentionnées dans la convention. Le gouvernement a fourni à plusieurs reprises copie des dispositions légales correspondantes, des plaintes, jugements, et même des formulaires à remplir par les parties à un litige en matière d'emploi, de conditions d'emploi ou de licenciement. Cette documentation témoigne de la politique de non-discrimination.

Les décisions en matière de recrutement dans les institutions publiques sont et doivent être basées sur le principe de non-discrimination et sur le mandat constitutionnel de ces institutions, leurs besoins, les qualifications de la personne concernée et la nécessité de garantir la sécurité de l'Etat. Ces considérations ne doivent pas être considérées comme étant discriminatoires. Les droits des citoyens, y compris le droit à l'emploi, sont universels et accordés à tous les citoyens. Ne pas appartenir à une religion officielle ne prive aucun individu de ses droits en tant que citoyen. La Constitution stipulait explicitement le droit de chacun à l'emploi et le gouvernement doit assurer l'égalité de traitement dans l'accès à l'emploi. Le gouvernement tient fermement à appliquer pleinement la Constitution.

En ce qui concerne les minorités religieuses, l'année dernière le gouvernement a fourni dans son long rapport à la commission d'experts des statistiques détaillées sur la population active, l'emploi, le chômage, l'emploi précédent et la population non active, y compris la population estudiantine, pour chacune des minorités religieuses. L'ensemble des faits et chiffres disponibles souligne que les minorités religieuses bénéficient de la politique nationale de non-discrimination dans l'emploi et dans l'accès à l'emploi. Leurs membres sont employés à des fonctions diverses, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. La répartition de la population en fonction de la religion est la suivante: 99,56 pour cent de musulmans, 0,05 pour cent de zoroastriens, 0,13 pour cent de chrétiens, 0,02 pour cent de juifs et 0,25 pour cent appartenant à d'autres religions non déclarées. La population active totale du pays est de 16.027.223. La population active des juifs est de 3.480, 3.164 d'entre eux ayant un emploi et 316 étant au chômage. La population active des chrétiens est de 25.687, 23.748 d'entre eux ayant un emploi et 1.939 étant au chômage. La population active des zoroastriens est de 7.973, dont 7.287 ont un emploi et 686 sont au chômage. Les statistiques démontrent que le taux d'emploi des minorités religieuses est même supérieur à la moyenne nationale, comme l'a noté la commission d'experts dans son rapport. En ce qui concerne les conditions d'emploi, outre les dispositions légales non discriminatoires applicables à tous les travailleurs, la commission d'experts a déjà reçu des informations sur des cas individuels, prouvant que tous ces cas étaient traités de manière non discriminatoire. Personne n'est tenu de révéler sa religion en déposant une plainte auprès des tribunaux du travail et personne ne peut prononcer un jugement fondé sur la religion d'une des parties au conflit.

En conclusion, l'orateur a souhaité attirer l'attention de la commission sur un développement important. Deux récentes missions de l'OIT organisées par le Bureau des activités pour les travailleurs et le Bureau des activités pour les employeurs ont récemment visité le pays. Ces deux missions ont été couronnées de succès. Sur la base d'une telle expérience, il a été décidé d'inviter une mission technique de l'OIT dans le pays afin de discuter de l'application de la convention et d'envoyer une invitation écrite dans les meilleurs délais. L'orateur a exprimé l'espoir que la commission prenne en compte les informations et le rapport substantiel communiqués ainsi que les mesures importantes qui ont été prises en coopération avec l'OIT.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour ses informations. Cependant, s'agissant d'informations reçues pendant les travaux mêmes de la commission, ils ne peuvent qu'en prendre acte et attendre le résultat de leur examen par la commission d'experts.

Le cas de la République islamique d'Iran a déjà été discuté de nombreuses fois: tous les ans de 1983 à 1990, puis en 1993, en 1996 et en 1997. En 1996 et en 1997, des conclusions très fermes reprises dans un paragraphe spécial ont été adoptées, le gouvernement n'ayant pas accepté l'envoi d'une mission de contacts directs. Une telle mission vise notamment à recueillir sur place des informations vérifiées et objectives. Un dialogue réel et constructif n'est possible que si l'on dispose d'informations non contestées sur l'application en droit et en pratique de la convention concernée.

Le rapport de la commission d'experts aborde deux questions: la discrimination sur la base du sexe et la discrimination fondée sur la religion. Le rapport du gouvernement, selon la commission d'experts, ne contient pas d'informations sur l'opposition éventuelle du mari à l'occupation d'un emploi ou à l'exercice d'une profession par son épouse, ni sur les conséquences pour la sécurité d'emploi en cas de non-respect du code vestimentaire par les femmes.

Un problème majeur réside dans le fait que l'information fournie par le gouvernement ne permet pas à la commission de comprendre la situation dans la pratique. Le gouvernement fournit des données très générales sur l'emploi des femmes, l'accès des femmes à la formation, ainsi que sur la profession. Ces chiffres ne permettent pas de vérifier l'évolution de la présence des femmes sur le marché du travail en tenant compte de l'accroissement important de la population, de la nature des fonctions et des évolutions dans les structures de l'économie. Le représentant gouvernemental a fourni aujourd'hui des informations statistiques complémentaires, mais celles-ci ne peuvent pas encore être appréciées.

En outre, le système de gouvernement a la particularité d'être bipolaire. A côté d'institutions constitutionnelles comme le parlement, le gouvernement et le président, il y a des centres de décision parallèles qui fondent leur compétence notamment sur la religion et certaines lois. Ce système complique la compréhension de la situation réelle et la portée effective de certaines lois, ordonnances, décisions, quant à la situation de la femme et des minorités religieuses dans l'emploi et la profession. Selon les informations dont les membres travailleurs disposent, des lois, instructions et pratiques récentes renforceraient la discrimination à l'égard des femmes et des minorités religieuses. Il s'agit en particulier de la ségrégation selon le sexe en ce qui concerne les soins de santé, de l'extension du droit d'opposition du mari à l'accès à la formation de niveau supérieur de l'épouse, de la décision selon laquelle la fonction de directeur d'école de minorités religieuses est réservée à des personnes adhérant aux principes et pratiques islamiques.

En ce qui concerne la discrimination sur la base du sexe, selon les informations contenues dans le rapport, la situation de l'emploi des femmes semble s'améliorer. Pourtant, il faut comparer les chiffres absolus dans le contexte d'une population féminine de 30 millions. Le nombre de femmes ayant un travail rémunéré varie selon les sources de 600.000 à 1,7 million. En général, le nombre de femmes au travail est estimé à moins de 10 pour cent. Les femmes n'ont pas accès à des postes importants tels que la fonction de juge. Néanmoins, le représentant gouvernemental vient de donner, à ce sujet, des informations contraires. Celles-ci devront être vérifiées. La commission doit disposer d'informations sur l'impact réel du non-respect du code vestimentaire par les femmes, et notamment les conséquences sur la cessation éventuelle de l'emploi, ainsi que sur l'application du droit d'opposition du mari à l'égard de l'emploi et de la formation de l'épouse.

En ce qui concerne la discrimination fondée sur la religion, la commission d'experts se réfère aux conclusions contenues dans le rapport du rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, selon lesquelles les Baha'is et les autres minorités religieuses sont victimes de discriminations importantes quant à l'emploi et la profession. La commission d'experts a indiqué que, selon les informations fournies par le gouvernement, des efforts avaient été réalisés pour améliorer la situation de l'emploi des minorités religieuses reconnues comme telles – ce qui exclut les Baha'is. Cependant, les chiffres avancés par le gouvernement ne permettent pas d'évaluer la situation réelle de l'emploi. Selon les informations dont disposent les membres travailleurs, le nombre de personnes appartenant aux minorités religieuses aurait fortement baissé en raison de leur émigration. Par ailleurs, la plupart de ces personnes ne travaillent pas sous contrat de travail ou dans la fonction publique mais comme indépendants et dans le secteur informel. Les Baha'is sont formellement exclus des emplois dans la fonction publique. Cette discrimination va à l'encontre de la convention.

Les membres travailleurs ont souligné que la présente commission et la commission d'experts devraient disposer, sans délai, d'informations vérifiées et objectives. Ils ont insisté sur l'importance, à cet effet, d'envoyer une mission de contacts directs. Le représentant gouvernemental a formulé une proposition à cet égard. Selon cette proposition, le gouvernement inviterait une mission technique du BIT. Cela pourrait signifier un premier pas sous réserve que certaines conditions soient remplies. Cette mission ne doit pas se limiter à quelques échanges de vues d'ordre technique. Elle doit remplir les objectifs suivants: recueillir les données, avoir la possibilité de vérifier et de comparer les informations, traiter toutes les questions soulevées par le rapport de la commission d'experts, faire rapport à la commission d'experts. Les membres travailleurs demandent que ces éléments soient acceptés par le gouvernement et qu'ils soient repris dans les conclusions de la commission. Ainsi, la commission sera en mesure de continuer à suivre le cas. Si ces conditions n'étaient pas remplies, cela équivaudrait à un refus de la mission.

Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental pour les informations qu'il a fournies. Ce cas a déjà une longue histoire car la commission en a discuté à maintes reprises depuis 1980, et il a figuré sept fois dans un paragraphe spécial. Il semble que, partiellement, l'on se trouve à la veille d'un développement positif dans ce cas, mais il faut garder à l'esprit que l'aube signifie le début et non la fin. En ce qui concerne les statistiques qui ont été fournies, même si le taux de croissance est impressionnant en soi, l'on ne connaît toujours pas en termes absolus la situation relative des femmes dans l'éducation et sur le marché du travail.

En ce qui concerne le code vestimentaire obligatoire pour les fonctionnaires féminins, la commission d'experts a demandé des informations sur les sanctions susceptibles d'être imposées et sur l'application de la loi sur les infractions administratives. Cependant, le représentant gouvernemental n'a pas fourni d'informations spécifiques à cet égard. En ce qui concerne l'article 1117 du Code civil, les membres employeurs ont pris note de la déclaration du représentant gouvernemental, selon laquelle cet article a été révisé en 1975. Ils ont cependant exprimé le regret qu'aucune indication n'ait été donnée sur la façon dont il a été révisé, ni sur les implications d'une telle révision. Ils ont prié le gouvernement de fournir des informations concrètes attestant que l'article 1117 n'existe plus.

La partie la plus dramatique de ce cas concerne le problème persistant relatif aux Baha'is. La commission d'experts a fait état de la persécution dont ils font l'objet, y compris le refus d'admission dans les universités et les licenciements. Les membres employeurs disposent d'informations indiquant que de telles pratiques subsistent. Le gouvernement n'a pas fourni d'informations spécifiques en ce qui concerne le taux de participation des Baha'is dans les secteurs privé et public. Bien que la commission d'experts ait également demandé des informations relatives aux différents mécanismes de représentation des travailleurs et au nombre de Baha'is prenant part à ces différents mécanismes, le représentant gouvernemental n'a pas fourni d'informations sur cette question. Les membres employeurs ont exprimé le regret que, alors même que le gouvernement semble dire que tous les citoyens bénéficient de l'égalité de traitement, qu'ils soient membres ou non d'une religion reconnue, il déclare au même moment que la sécurité nationale est déterminante.

Une des caractéristiques essentielles de ce cas a été le refus du gouvernement d'une mission de contacts directs pour évaluer la situation. Le représentant gouvernemental a cependant donné certaines indications de la volonté du gouvernement de trouver un moyen plus définitif de résoudre ce conflit. Le gouvernement doit accepter une mission, qui devrait être sérieusement préparée, et prévoir la communication d'informations fiables et vérifiables sur la législation et son application, ainsi que la présentation de statistiques traduisant la situation actuelle, afin que la commission d'experts soit en mesure d'évaluer la situation en pleine connaissance de cause.

S'exprimant également au nom des membres gouvernementaux de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Belgique, du Canada, du Danemark, des Etats-Unis, de la Finlande, de la France, de l'Irlande, de l'Islande, de la Norvège, du Royaume-Uni et de la Suède, le membre gouvernemental des Pays-Bas a pris note avec intérêt des informations communiquées par le gouvernement et s'est félicité des progrès accomplis pour accroître la participation des femmes dans l'emploi et l'éducation. Cela laisse espérer que d'autres progrès seront possibles en la matière. Une politique toujours plus active de la part du gouvernement dans ce domaine peut et doit conduire plus rapidement à une égalité des chances pour les hommes et les femmes, y compris dans l'enseignement supérieur. Le gouvernement de l'orateur a l'intention d'examiner attentivement les informations fournies par le gouvernement sur la question de l'éventuelle révision de l'article 1117 du Code civil.

L'orateur a regretté qu'aux efforts accomplis en vue d'accroître la participation des femmes dans l'emploi et dans l'éducation ne corresponde pas un effort en vue d'abolir la discrimination fondée sur la religion. Bien que des efforts aient été faits pour améliorer la situation en matière d'emploi des membres des minorités reconnues, le fait que seulement certaines minorités religieuses soient reconnues crée une discrimination dans l'emploi et l'éducation. Les informations disponibles montrent que cela est particulièrement vrai pour les Baha'is, la minorité religieuse la plus importante, mais qui reste non reconnue. L'absence de chiffres dans le rapport de la commission d'experts sur l'emploi des Baha'is et des personnes sans religion est décevante. L'orateur a prié le gouvernement de fournir ces chiffres par écrit.

A de nombreuses reprises, le gouvernement s'est engagé à coopérer avec les instances internationales, y compris l'OIT. Il faut se féliciter de ces engagements, mais il est temps que le gouvernement les tienne, afin de garantir le plein respect de ses obligations en vertu de la convention. Le gouvernement de l'orateur se félicite de l'annonce par le représentant gouvernemental qu'une mission de l'OIT serait invitée à court terme. Le dialogue avec l'OIT, entamé il y a quelques années, serait grandement renforcé par une telle mission et offrirait au gouvernement la possibilité de dissiper le scepticisme existant.

Le membre travailleur de la Grèce a rappelé que le cas de l'Iran avait été discuté à maintes reprises au sein de la commission. Il a noté que le ton du gouvernement avait à présent changé et s'est félicité de l'attitude du représentant gouvernemental en tant qu'interlocuteur au sein de la commission. Le changement doit néanmoins être constaté dans les faits, étant donné qu'il faut être prudent avec les statistiques. Le représentant gouvernemental a fourni des chiffres selon lesquels il n'y aurait pas de discrimination en ce qui concerne l'emploi des femmes et des minorités religieuses. Dans le rapport soumis à la commission d'experts, le gouvernement indique que le taux de chômage des juifs et des chrétiens est moins élevé que celui des autres Iraniens. Mais il faudrait savoir combien de juifs, de chrétiens et de Baha'is travaillent dans des entreprises publiques ou dans la fonction publique. Selon le gouvernement, les femmes jouissent de l'égalité de traitement. Est-il vrai cependant qu'une mère n'a pas le droit d'ouvrir un compte d'épargne pour ses enfants et que le ministère de l'Enseignement interdit aux femmes de donner des cours aux garçons de plus de dix ans dans des écoles privées? L'orateur a rappelé que le gouvernement indique aussi que les femmes peuvent exercer toute profession, mais il faudrait savoir combien de femmes occupent des postes à haute responsabilité; combien y a-t-il, notamment, de femmes ministres et peuvent-elles accéder à des instances supérieures telles que le parlement?

En félicitant la commission d'experts pour son observation sur ce cas, le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré que cette observation illustre l'importance du rapport de la commission d'experts. Ce rapport fournit une base objective et impartiale aux discussions de la commission. Les termes «mission technique» utilisés par le gouvernement ne semblent pas faire référence à une mission d'assistance technique. En principe, de telles missions ont lieu lorsqu'il n'existe pas de difficultés politiques entre l'OIT et le gouvernement quant aux changements à entreprendre. Dans le cas présent, en revanche, il existe clairement de telles difficultés. L'orateur a en conséquence prié le gouvernement de préciser qu'il ne demande pas une mission d'assistance technique. Il s'est dit d'accord avec les points mentionnés par les membres travailleurs comme devant être examinés au cours de la mission. Les questions liées aux Conseils islamiques du travail devraient également être étudiées, y compris la question de savoir si ces conseils représentent sans discrimination tous les travailleurs d'une même société. Il importe de sortir de l'impasse dans laquelle la commission s'est trouvée, et l'orateur a exprimé l'espoir que la mission conduise à des progrès, mais il faut garder à l'esprit que la mission ne peut être qu'un instrument de progrès et non une fin en soi.

Le membre travailleur de la Turquie a fait référence à l'article 6 du Code du travail de l'Iran, selon lequel: «les Iraniens, sans considération d'appartenance tribale ou ethnique, jouissent tous des mêmes droits; la couleur de la peau, la race, la langue non plus que tout autre critère de cette nature ne constituant un privilège ou une cause de distinction». De l'avis de l'intervenant, l'absence dans cette disposition de toute mention expresse du sexe donne l'impression qu'une position privilégiée est donnée aux hommes et qu'une discrimination existe à l'égard des femmes en matière d'emploi. Les discriminations caractérisées dans les domaines du mariage, des successions, de la tutelle et du divorce, telles qu'elles ressortent du Code civil, et qui sont toujours en vigueur, ont leurs corollaires en matière d'emploi et de profession. L'intervenant a demandé au représentant gouvernemental de fournir un complément d'information sur plusieurs points spécifiques:

L'intervenant a fait observer que les articles 75 à 78 du Code du travail semblent avoir été formulés sur la base de l'idée, dénuée de tout fondement, que les femmes sont des créatures faibles, ayant besoin d'être défendues par les hommes. Il a demandé si la modification de ces articles était envisagée. En ce qui concerne la discrimination dans l'emploi et la profession sur la base de la religion, il a demandé au représentant gouvernemental des précisions sur le fait que les musulmans qui, ouvertement, ne s'acquittent pas de leurs obligations religieuses, souffrent de conséquences négatives par rapport à l'emploi et si les différences des Sunnites entraînent une discrimination dans l'emploi à leur égard.

Le membre travailleur de la Colombie a déclaré que les travailleurs se trouvaient dans l'obligation d'exprimer leur point de vue face à la violation continue de cette convention par le gouvernement. Le rapport de la commission d'experts affirme que des progrès substantiels ont été accomplis en ce qui concerne la discrimination sur la base du sexe; toutefois, les dénonciations formulées au sein de diverses instances montrent que la situation des femmes ne s'améliore que très lentement. Il convient de mentionner les plaintes réitérées relatives à la discrimination fondée sur la religion qui rend l'accès à l'éducation et à l'emploi dans l'administration publique impossible pour de nombreux Iraniens. En outre, si les femmes peuvent accéder à certaines charges dans la magistrature, elles sont reléguées au traitement de dossiers relatifs au droit familial et ne peuvent rendre des décisions. Par ailleurs, la discrimination contre les femmes se traduit par les mauvais traitements infligés aux domestiques, dont la presse s'est fait l'écho. En conclusion, l'orateur insiste auprès du gouvernement pour qu'il respecte les droits des minorités religieuses et des femmes.

Le membre travailleur de l'Italie a indiqué que, dans une certaine mesure, il semblait ressortir du rapport de la commission d'experts une tendance à une amélioration de la situation relative à la discrimination qui a trait au sexe et aux minorités religieuses et ethniques. Ce qui peut apparaître comme un pas en avant, c'est la volonté des autorités iraniennes de continuer la collaboration avec le BIT. L'acceptation d'une mission qualifiée du BIT pourrait constituer un véritable changement d'attitude, la République islamique d'Iran n'ayant jamais accepté la visite du rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. L'ouverture des écoles et des professions aux femmes doit être renforcée par d'autres mesures en leur faveur: la réduction de la pression sur la femme dans la famille et la société, et la révision du Code civil. Depuis 1997, quelques signes positifs ont été notés tels que la désignation de femmes à des charges de responsabilité politique. On peut noter des nominations de femmes à des postes de responsabilité au ministère de la Culture et à celui de l'Environnement.

Mais, comme le souligne le rapport de la commission d'experts, c'est envers les minorités ethniques et religieuses que la discrimination, relative à l'accès à la formation et à l'emploi, est maintenue. Les données statistiques sur les taux de chômage concernant ces minorités mentionnés au paragraphe 4 du rapport doivent être précisées pour pouvoir être comparées. Les personnes qui veulent entrer à l'université doivent subir un examen de théologie islamique. Cela empêche les membres des minorités religieuses d'accéder à la formation supérieure. De même, les personnes qui veulent occuper un emploi dans la fonction publique doivent remplir des exigences quant à la religion islamique. Les minorités religieuses sont donc exclues de l'administration publique. Le membre travailleur a indiqué que les travailleurs appartenant à la communauté Baha'i qui ont été licenciés dans les années quatre-vingt n'ont pas été indemnisés. Au contraire, ils doivent restituer les salaires et les pensions qu'ils ont reçus sous peine d'emprisonnement. S'il existe vraiment des possibilités de représentation syndicale pour les minorités religieuses, comme le gouvernement l'indique (voir paragraphe 7 du rapport), on peut peut-être espérer la ratification par le pays des conventions nos 87 et 98. Mais l'orateur est plutôt d'avis que les syndicats indépendants sont encore interdits dans la République islamique d'Iran, comme la CISL l'a fait savoir (voir paragraphe 123 de la partie générale du rapport de la Commission d'experts). Les syndicats italiens souhaitent encourager le dialogue entre les pays, même lorsque les conditions sont difficiles. Ils ont demandé au gouvernement italien, lors de la récente visite du Président de la République islamique d'Iran en Italie, de faire valoir, dans le cadre des relations politiques et économiques entre les deux pays, l'exigence du développement des droits de l'homme, de la liberté syndicale et de l'égalité entre tous les travailleurs.

Le membre travailleur du Pakistan a relevé que, la République islamique d'Iran étant un pays voisin du sien et les deux pays ayant des liens historiques étroits, les développements intervenant en République islamique d'Iran auraient un impact au Pakistan. L'orateur a salué les développements récemment intervenus, y compris le renforcement de la démocratie et les mesures prises pour améliorer le dialogue avec l'Ouest. De récentes discussions entre le gouvernement et le Vatican ont conduit à un engagement de mener une politique plus ouverte sur les questions religieuses. L'orateur a attiré l'attention sur les commentaires de la commission d'experts relatifs à la discrimination fondée sur la religion et exprimé l'espoir que le gouvernement honore son engagement de promouvoir et d'encourager les minorités religieuses et les femmes dans l'emploi et l'éducation. Notant l'intention du gouvernement d'inviter une mission technique dans le pays, il a prié instamment le gouvernement d'examiner attentivement les questions soulevées par la commission d'experts concernant les contradictions entre la loi et la pratique nationales, d'une part, et les dispositions de la convention, d'autre part. Il a exprimé l'espoir que la mission technique conduise à des progrès et à une coopération suivie.

Le membre employeur de la République islamique d'Iran a remercié tous les orateurs de leurs commentaires, notamment le représentant gouvernemental pour les informations données à la commission et pour son acceptation d'une mission de l'OIT. Une telle mission devrait, à son avis, améliorer l'image du pays. L'intervenant a souhaité que, dans le cas où cette mission aura effectivement lieu, elle ait des consultations avec non seulement le gouvernement mais aussi les organisations d'employeurs. Pour ce qui est de l'amélioration du rôle des femmes dans le pays, l'intervenant a souligné que les trois personnes que son entreprise avait accueillies comme consultantes à propos des normes internationales étaient trois femmes. La meilleure façon d'apprécier les progrès accomplis par le pays serait assurément de se rendre sur place. L'intervenant s'est déclaré optimiste quant au nombre des améliorations que la mission de l'OIT aura l'occasion de constater.

Le représentant gouvernemental a remercié tous les intervenants, tout en relevant qu'il serait difficile de répondre dans l'immédiat à toutes les questions qu'ils ont posées. L'orateur a déclaré qu'il essaierait cependant de répondre oralement à certaines questions et qu'une réponse écrite serait apportée par la suite aux questions subsistantes. Il a reconnu que la commission ne peut que prendre note d'une grande part des informations et statistiques qui lui ont été présentées. Elles feront ultérieurement l'objet d'un examen plus attentif par la commission d'experts. Ce cas a une longue histoire, développée au fil des ans, à laquelle il est souhaitable de mettre fin de manière constructive. Le gouvernement de l'orateur tient à ce qu'un dialogue réel ait lieu.

En ce qui concerne les critiques relatives à la nature générale des chiffres fournis, l'orateur a expliqué qu'il présentait les taux de croissance tels que demandés par les membres travailleurs de cette commission deux ans avant. Les chiffres absolus et les pourcentages que les membres travailleurs viennent de demander seront communiqués à la commission d'experts et aux membres de la mission de l'OIT. En ce qui concerne les préoccupations relatives à la reconnaissance d'un nombre limité de religions, il a souhaité clarifier les dispositions de la Constitution. Cette dernière ne fait référence à des religions déterminées que pour des questions de statut personnel, de telle sorte que les questions liées au mariage, aux testaments et aux successions soient réglées selon leurs propres traditions. Cependant, en matière d'emploi, la Constitution accorde des droits à «tous». Le gouvernement tient à garantir la pleine application des dispositions de la convention. Concernant la question de la fiabilité des statistiques fournies, il a déclaré qu'il s'agit de statistiques officielles. Il a également confirmé que les membres des minorités religieuses sont employés dans le secteur public et dans la fonction publique. Répondant à la question de savoir si les femmes peuvent enseigner aux garçons, il a déclaré qu'il n'y a pas d'interdiction en la matière et que, dans les universités, les femmes représentent 35 pour cent du personnel académique. Il n'y a pas de femmes ministres, mais une femme occupe le poste de vice-Président du pays et une femme est vice-ministre. Le nombre de parlementaires femmes a augmenté, elles sont actuellement 14. Lors des récentes élections aux conseils municipaux et ruraux, 114 femmes ont été élues.

En ce qui concerne la demande de clarification formulée par le membre travailleur des Pays-Bas sur la nature de la mission technique, l'orateur a confirmé que son gouvernement ne demande pas une mission d'assistance technique, mais plutôt une mission en vue de discuter de l'application de la convention. Toutefois, la coopération technique pourrait être requise à l'avenir dans le cadre du suivi de la mission technique. En réponse aux commentaires du membre travailleur de la Turquie, il a déclaré que le Code du travail mentionne le sexe comme autre base illicite de discrimination. Il s'est référé à cet égard au rapport soumis à la commission d'experts. Aucun emploi n'est interdit aux femmes. En ce qui concerne l'article 75 du Code du travail relatif aux travaux difficiles et dangereux, la question a été soulevée par la commission d'experts il y a quelques années et un texte détaillé a été communiqué en réponse. Après examen de cette question par l'OIT, cette disposition a été jugée non discriminatoire. Les articles 75 à 78 du Code du travail sont fondés sur les conventions de l'OIT. De plus amples informations en la matière seront transmises à la commission d'experts dans le prochain rapport du gouvernement. Sur la question de savoir si les musulmans non pratiquants subissent des discriminations, l'orateur a souligné que le gouvernement ne cherche pas à savoir qui pratique et qui ne pratique pas. Il a invité la mission technique de l'OIT à le confirmer.

D'autres questions soulevées par les orateurs telles que celle de la violence domestique n'étant pas directement liées à la convention, l'orateur a déclaré que, au regard des comparaisons internationales, le taux de violence domestique dans le pays est relativement bas, et ce, en raison de traditions culturelles. Il a manifesté son désaccord avec l'affirmation selon laquelle les femmes avaient fait l'objet de pressions accrues. Si l'éducation et l'emploi des femmes se sont développés, c'est grâce aux politiques menées en faveur de leur émancipation. En ce qui concerne la représentation syndicale, des informations seront transmises à la commission d'experts, mais l'orateur a assuré la commission que les syndicats indépendants ne sont pas interdits.

Le gouvernement de l'orateur souhaite inviter une mission de l'OIT dans le pays afin de discuter de l'application de la convention, y compris concernant les femmes et les minorités religieuses, ainsi que toute autre question liée à l'application de la convention. Le gouvernement ne voit pas d'objections à ce que la mission discute également de ces questions avec les organisations iraniennes d'employeurs. Concernant le caractère déterminant de la sécurité de l'Etat, évoqué par les membres employeurs, le représentant gouvernemental n'a mentionné ce point que dans le cadre des institutions publiques et comme l'une des considérations. Il a également confirmé que les femmes juges peuvent prononcer des verdicts.

Quant aux questions soulevées par les membres travailleurs à propos de la mission technique, le représentant gouvernemental a confirmé que la mission pourrait discuter des faits et interprétations. Le représentant gouvernemental a conclu en confirmant que son gouvernement a décidé, d'une manière définitive, d'inviter une mission de l'OIT.

Les membres travailleurs, se référant à la déclaration du représentant gouvernemental de la République islamique d'Iran, ont souligné que le plus important, c'est que l'accord quant aux objectifs de la mission soit clair. Les quatre objectifs qui ont été mentionnés précédemment n'ont pas été contredits par le représentant gouvernemental dans ses commentaires. Les membres travailleurs comprennent notamment que les informations pourront être recueillies, que la mission pourra traiter toutes les questions soulevées par la commission d'experts et qu'elle établira un rapport qui sera soumis à la commission d'experts.

La commission a pris note des informations orales détaillées fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle a rappelé que ce cas a été régulièrement examiné par la commission au cours des dernières années. Elle a pris note des efforts entrepris pour promouvoir l'emploi des femmes et des minorités religieuses reconnues, mais elle a également noté avec préoccupation que l'impact pratique de ces mesures reste incertain et que d'importants problèmes persistent dans l'application de la convention. Elle s'est félicitée de la demande du gouvernement afin qu'une mission technique examine l'ensemble des points soulevés par la commission d'experts et la présente commission sur l'application de la convention. Elle a exprimé l'espoir que cette mission se déroule aussitôt que possible de telle sorte que ses résultats puissent être examinés par la commission d'experts lors de sa prochaine session. La commission a également prié le gouvernement de continuer à transmettre à la commission d'experts des informations complètes sur les mesures prises pour éliminer toutes les formes de discrimination interdites par la convention en matière d'accès à l'emploi, tant dans la loi que dans la pratique. Enfin, elle a exprimé le ferme espoir que le gouvernement soit rapidement en mesure d'indiquer à la commission d'experts que sa législation et sa pratique sont en conformité avec la convention concernant tous les motifs de discrimination visés par celle-ci.

Convention no 118: Egalité de traitement (sécurité sociale), 1962

Jamahiriya arabe libyenne (ratification: 1975). Un représentant gouvernemental de la Jamahiriya arabe libyenne a souligné le lien existant entre les observations formulées sur son pays par la commission d'experts dans son rapport, mais a souhaité s'exprimer uniquement sur celles relatives à la convention sous examen. A cet égard, il a évoqué une correspondance du Directeur général du BIT, que son gouvernement n'avait toujours pas reçue au début de ce mois de juin. Il a indiqué que les observations de la commission d'experts seront communiquées aux instances compétentes de son pays afin qu'une solution soit trouvée aux différents problèmes soulevés par la loi no 13 de 1980 sur la sécurité sociale. L'orateur a réitéré le respect de son pays pour les principes de l'OIT et les normes internationales du travail et évoqué les nombreux obstacles, en liaison avec l'embargo, auxquels son pays a été confronté dans l'accomplissement de son obligation de rapport. Rappelant l'attachement de son pays à l'idée de coopération, il a exprimé l'espoir d'une prochaine amélioration de la situation.

Les membres employeurs ont noté que ce cas était l'un des rares où le représentant gouvernemental n'avait fourni aucune information sur le sujet examiné. Ils ont rappelé que le rapport de la commission d'experts a été publié il y a deux mois et exprimé leur surprise suite à la déclaration du représentant gouvernemental selon laquelle son gouvernement n'était pas informé des commentaires de la commission d'experts. De plus, le gouvernement a eu plusieurs jours pour préparer sa déclaration depuis l'adoption de la liste des cas devant être examinés par la commission. Ils ont souligné également que ce cas n'est pas nouveau puisqu'il a déjà été discuté au sein de cette commission lors de la Conférence de 1992, et que la commission d'experts a formulé des observations depuis plusieurs années concernant la mise en œuvre de cette convention par la Jamahiriya arabe libyenne.

En ce qui concerne les pensions, les résidents non libyens ne reçoivent qu'une somme forfaitaire dans le cas d'un arrêt prématuré de leur travail, alors que les nationaux ont le droit de continuer de percevoir la totalité de leur salaire. Il existe également d'autres différences de traitement entre les nationaux et les non-nationaux en droit et en pratique en ce qui concerne d'autres secteurs de la sécurité sociale. Ils ont noté, par exemple, que la cotisation au système de sécurité sociale est obligatoire pour les nationaux alors qu'elle se fait sur une base volontaire pour certaines catégories de travailleurs étrangers. Cela constitue une violation flagrante du principe de l'égalité de traitement prévu par la convention. De plus, et sans tenir compte de certains accords spéciaux sur la sécurité sociale, les étrangers n'ayant pas cotisé pendant dix ans n'ont pas droit, contrairement aux nationaux, à une pension de vieillesse ou à une pension en cas d'incapacité totale suite à un accident non lié au travail. Une autre mesure discriminatoire figure dans l'article 161 du Règlement sur les pensions de 1981 stipulant que les pensions ou toute autre somme d'argent ne peuvent être transférées à des bénéficiaires résidant à l'étranger que lorsqu'il existe un accord entre la Jamahiriya arabe libyenne et le pays du bénéficiaire en question. Les membres employeurs estiment que ce type de discrimination est particulièrement grave, considérant que le nombre de travailleurs migrants augmente régulièrement et qu'un grand nombre de travailleurs étrangers ont été expulsés du pays.

En conclusion, le fait que le représentant gouvernemental n'ait fourni aucune information précise représente un exemple flagrant de mauvaise collaboration entre le gouvernement libyen et cette commission. Le gouvernement devrait se voir prier instamment de mettre sa législation nationale ainsi que sa pratique en pleine conformité avec les dispositions de la convention. De plus, les très nettes divergences entre la législation nationale et les dispositions de la convention, notées par la commission d'experts depuis plusieurs années, devraient être reflétées de manière particulièrement sévère dans les conclusions.

Les membres travailleurs se sont ralliés aux observations des membres employeurs et ont ainsi constaté et regretté que le représentant gouvernemental n'ait fourni aucune information orale sur le cas lui-même. Ils ont rappelé que la commission a discuté de ce cas en 1992; de son côté, la commission d'experts a formulé des observations en 1992, 1994, 1995, 1996 et 1998 sans compter les demandes directes adressées au gouvernement depuis 1978, c'est-à-dire trois années après la ratification de la convention par la Jamahiriya arabe libyenne.

Les membres travailleurs ont rappelé que la convention garantit l'égalité de traitement des travailleurs étrangers avec les nationaux pour ce qui est de la sécurité sociale, tout au moins en ce qui concerne les branches de sécurité sociale reconnues par la convention. Les membres travailleurs ont noté que ce pays a accepté l'égalité de traitement pour toutes les branches de sécurité sociale énumérées dans l'article 2, paragraphe 1, de la convention. Les membres travailleurs se sont dits très préoccupés puisque des milliers de travailleurs étrangers, notamment en provenance de pays arabes et d'autres pays, feraient l'objet d'expulsions. De plus, ils ont insisté sur le fait que la législation réserve un traitement différent aux étrangers en cas de cessation prématurée de l'activité. En effet, les nationaux ont droit au maintien de leur salaire alors que les travailleurs migrants ont seulement droit à un montant forfaitaire. En outre, les travailleurs migrants n'ayant pas accompli un stage de dix années de cotisations au régime de sécurité sociale n'ont droit ni aux pensions de vieillesse ni aux pensions d'incapacité totale dues à une lésion d'origine non professionnelle, ni aux pensions et allocations dues aux conjoints ou autres ayants droit du défunt. Et cette condition n'est pas exigée pour les nationaux. Enfin, les travailleurs étrangers ne sont pas assurés que les pensions et autres prestations soient payées à l'étranger. Les membres travailleurs ont insisté sur le fait que le paiement à l'étranger est un droit prévu par l'article 5 de la convention. Une fois de plus, les membres travailleurs ont regretté, comme la commission d'experts, qu'aucune information nouvelle ne soit fournie. Les membres travailleurs ont insisté pour que la Jamahiriya arabe libyienne respecte ses obligations par rapport aux travailleurs d'origine étrangère. Les membres travailleurs ont dès lors demandé que des conclusions aussi précises et concrètes que possible soient formulées. De plus, le gouvernement devrait finalement, après tant d'années de passivité, reconsidérer la situation et prendre les mesures nécessaires. Le gouvernement devrait aussi recourir à l'assistance technique du BIT. Le gouvernement doit payer les prestations et montants dus aux travailleurs expulsés selon les termes de la convention. Le gouvernement devrait chiffrer les montants ainsi dus depuis les expulsions, libérer des lignes budgétaires ou des crédits et payer effectivement les montants, y compris aux travailleurs qui résident à l'étranger. Enfin, le gouvernement doit fournir des informations détaillées et dans les délais au BIT.

Le représentant gouvernemental a réitéré que les procédures nationales de modification législative sont longues. Il a aussi réaffirmé que son gouvernement n'essayait pas de se soustraire à son obligation de répondre aux commentaires émis par la commission d'experts, mais qu'il a été incapable de le faire parce que les commentaires n'ont pas été envoyés en arabe. Se référant à certains commentaires émis, il a déclaré que, si des travailleurs étrangers ont été expulsés, c'était pour des raisons valables. L'embargo dont la Jamahiriya arabe libyenne a fait l'objet a affecté les travailleurs étrangers autant que nationaux. Dans la mesure où il a été allégué que la Jamahiriya arabe libyenne devait de l'argent à des travailleurs individuels, l'orateur a demandé une liste justifiant ces allégations, ce qui permettrait à son gouvernement d'examiner la réclamation. Il a réaffirmé l'intention de son gouvernement de soumettre les commentaires de la commission d'experts concernant la convention aux autorités nationales et locales. Après avoir tenu les consultations nécessaires, le Comité national du peuple procédera aux modifications nécessaires de la législation nationale.

Les membres employeurs ont indiqué que la Jamahiriya arabe libyenne a ratifié la convention en 1975. La commission d'experts a formulé six observations depuis 1990 en ce qui concerne les inégalités qui prévalent dans le système de sécurité sociale du pays. En fait, cette question a été soulevée par la commission d'experts à treize occasions depuis 1978. Depuis au moins vingt ans, la commission d'experts a prié le gouvernement de rendre sa législation conforme aux dispositions de la convention. Toutefois, le gouvernement n'a pas indiqué s'il avait pris des mesures en vue de répondre aux points soulevés par la commission d'experts. Dans ces circonstances, la déclaration du gouvernement est inadéquate.

Les membres travailleurs se sont ralliés aux observations précédentes des membres employeurs.

Le représentant gouvernemental a indiqué que le gouvernement n'a pas rejeté le principe d'égalité consacré dans la convention. Il a confirmé que son gouvernement réexaminera la situation et en fera rapport à la commission d'experts. Il a exprimé l'espoir que le prochain rapport du gouvernement satisferait les demandes de la commission et remplirait ses obligations au regard de la convention.

La commission a pris note des informations fournies oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle a constaté avec une profonde préoccupation que le gouvernement n'a pas donné de nouvelles informations substantielles depuis l'examen du cas, par la commission, en 1992. Elle a rappelé que, cette année-là, elle avait exprimé l'espoir que le gouvernement serait en mesure de modifier sa législation pour la rendre pleinement conforme à la convention. La commission s'est dite fort préoccupée par le fait que, en dépit du temps qui a passé, de graves disparités demeurent entre la convention, d'une part, et la législation nationale et la pratique, d'autre part. La commission a aussi déploré profondément que, à ce jour, le gouvernement n'ait pas accepté l'assistance technique que lui avaient proposée la commission en 1992 et la commission d'experts à plusieurs reprises. Etant donné le caractère à la fois technique et complexe des sujets examinés, la commission a rappelé au gouvernement que le Bureau est en mesure d'apporter l'assistance technique nécessaire en matière de sécurité sociale afin de faciliter l'application de la convention, et afin qu'elle puisse constater des progrès lors de l'une de ses prochaines sessions. Elle a également exhorté vivement le gouvernement à communiquer à la commission d'experts un rapport détaillé sur les mesures spécifiques et concrètes qui sont prises pour rendre la législation pleinement conforme à la convention, et garantir dans les faits l'application de la convention.

Convention no 111: Discrimination (emploi et profession), 1958

Afghanistan (ratification: 1969).

Convention no 87: Liberté syndicale et protection du droit syndical, 1948

Djibouti (ratification: 1978).

Les membres travailleurs ont relevé que la commission d'experts avait exprimé sa plus grande préoccupation face aux mesures prises et aux pratiques utilisées par le gouvernement de l'Afghanistan, ainsi que d'autres autorités, pour interdire l'éducation des jeunes filles et le travail des femmes et pour marginaliser au maximum la vie de centaines de milliers de veuves. Les rapports émanant du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et du Secrétaire général des Nations Unies ainsi que les observations de la CISL et d'Amnesty International sur la situation des femmes révèlent que les autorités imposent aux femmes des conditions de vie et de travail extrêmement difficiles. La commission d'experts, ayant, en outre, pris connaissance des textes réglementaires qui restreignent de façon drastique l'emploi des femmes, n'a pu que constater la dramatique détérioration de la situation de ces femmes. Les mesures prises par les autorités ont de graves conséquences sur le système de santé et d'enseignement, ce qui a des répercussions sur les femmes, les jeunes filles et les jeunes garçons. De plus, l'interdiction quasi généralisée du travail des femmes a des conséquences dramatiques sur la mise en œuvre des programmes humanitaires des Nations Unies et des ONG. La commission d'experts souligne, dans les termes les plus sévères, la violation par l'Afghanistan de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et fait également référence aux discriminations fondées sur l'opinion politique. Les membres travailleurs insistent auprès du BIT et des délégués des trois groupes présents à la Conférence afin que des initiatives internationales et bilatérales soient prises pour attirer l'attention du gouvernement au pouvoir en Afghanistan, ainsi que de tous les responsables politiques de ce pays, sur la nécessité absolue de prendre d'urgence des mesures visant à mettre fin aux très graves discriminations exercées à l'encontre des femmes dans l'emploi. Face à un cas d'une telle importance, le BIT et l'ensemble de la communauté internationale doivent prendre leurs responsabilités.

Les membres travailleurs ont rappelé que la commission d'experts était particulièrement préoccupée par l'application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, par Djibouti. De graves violations de la liberté ont eu lieu et continuent d'avoir lieu en droit et en pratique. Le Comité de la liberté syndicale a été saisi de plaintes relatives à de très graves mesures de représailles antisyndicales ayant frappé les dirigeants de l'Union djiboutienne du travail et de l'Union générale des travailleurs de Djibouti, ainsi que les militants et membres de ces organisations. Pourtant, le gouvernement s'est engagé, en janvier 1998, à l'issue d'une mission de contacts directs du BIT dirigée par le professeur Verdier, membre de la commission d'experts, à rétablir le dialogue avec les syndicats et les représentants authentiques des travailleurs. La commission d'experts a également constaté que plusieurs dispositions de la législation violaient gravement la convention no 87, telles que l'agrément préalable à la constitution d'un syndicat, l'interdiction faite aux étrangers d'accéder aux fonctions syndicales ainsi que les larges pouvoirs du Président de la République lui permettant de mettre fin à une grève par réquisition. Les membres travailleurs estiment que ce cas soulève des questions importantes et que le gouvernement devrait prendre, dans les plus brefs délais, des mesures permettant de renouer le dialogue.

Les membres employeurs ont regretté que certains gouvernement n'aient pas répondu à l'invitation qui leur a été faite de se rendre à la commission pour discuter des questions relatives à l'application des conventions ratifiées par leur pays. Ils se réfèrent en particulier aux gouvernements de l'Afghanistan et de Djibouti. La commission d'experts a exprimé dans son rapport des commentaires suscitant de sérieuses inquiétudes concernant l'application de certaines conventions par ces pays. C'était pour cette raison qu'ils avaient été inclus dans la liste des cas proposés à la discussion. En de pareilles circonstances, la conduite de ces pays, en ne répondant pas à la demande qui leur est faite de se présenter devant la commission, témoigne d'une attitude générale de non-coopération à l'égard du travail de la commission, et de l'Organisation dans son ensemble. Le rapport de la commission d'experts contient un grand nombre d'informations sur les cas en question, et les membres employeurs encouragent tous ceux qui sont concernés à lire les commentaires respectifs avec une grande attention.

La commission a pris note des déclarations des membres employeurs et travailleurs sur l'application de la convention no 87 par Djibouti et l'application de la convention no 111 par l'Afghanistan.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 January 2000.