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87e session
Genève, juin 1999


 

Rapport IV (2 B) 

 

 

Le travail des enfants

 

 

Quatrième question à l'ordre du jour

 

 


 

 

Bureau international du Travail Genève 

 

ISBN 92-2-010812-7
ISSN 0074-6681/0251-3218

 

 


TABLE DES MATIÈRES

Introduction

Textes proposés


Introduction

La question intitulée «Le travail des enfants» a fait l'objet d'une première discussion à la 86 e session de la Conférence internationale du Travail (1998). A la suite de cette discussion, et conformément à l'article 39 du Règlement de la Conférence, le Bureau international du Travail a élaboré et communiqué aux gouvernements des Etats Membres un rapport(1) contenant un projet de convention et un projet de recommandation concernant l'interdiction et l'abolition immédiate des pires formes de travail des enfants, fondés sur les conclusions adoptées par la Conférence à sa 86 e session.

Le Bureau a invité les gouvernements à lui faire parvenir leurs observations ou amendements éventuels le 30 novembre 1998 au plus tard, ou à lui faire savoir, dans le même délai, s'ils considéraient que les textes proposés constituaient une base de discussion satisfaisante pour la Conférence à sa 87 e session (1999).

Au moment de la rédaction du présent rapport, le Bureau avait reçu les réponses des 83 Etats Membres suivants(2): Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Bahreïn, Bangladesh, Bélarus, Belgique(3), Bénin, Bolivie, Botswana, Brésil, Bulgarie, Canada, Cap-Vert, Chili, Chine, Chypre, Colombie, République de Corée, Croatie, Danemark, Egypte, El Salvador, Emirats arabes unis, Equateur, Espagne, Estonie, Etats-Unis, Ethiopie, Finlande, France, Grèce, Haïti, Hongrie, Inde, Indonésie, Irlande, Italie, Japon, Jordanie, Kenya, Koweït, Lettonie, Liban, Madagascar, Malaisie, Mali, Maroc, Maurice, Mexique, Myanmar, Norvège, Nouvelle-Zélande, Ouganda, Pakistan, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Portugal, Qatar, Roumanie, Royaume-Uni, Sénégal, Slovaquie, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, République arabe syrienne(4), République-Unie de Tanzanie, République tchèque, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie, Ukraine, Venezuela, Yémen, Zambie, Zimbabwe et Saint-Siège(5).

Conformément à l'article 39, paragraphe 6, du Règlement de la Conférence, les gouvernements étaient priés de consulter les organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives avant d'établir le texte définitif de leurs réponses et d'indiquer quelles organisations ils avaient consultées.

Les gouvernements de 49 Etats Membres (Afrique du Sud, Allemagne, Bangladesh, Bélarus, Belgique, Bénin, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, Chine, Chypre, République de Corée, Croatie, Danemark, Egypte, El Salvador, Emirats arabes unis, Espagne, Estonie, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Indonésie, Irlande, Italie, Japon, Jordanie, Kenya, Lettonie, Maurice, Myanmar, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Slovaquie, Suède, Suisse, République arabe syrienne, République-Unie de Tanzanie, République tchèque, Togo, Turquie, Venezuela, Zimbabwe) ont déclaré qu'ils avaient consulté les organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives.

Dans le cas de 37 Etats Membres (Afrique du Sud, Allemagne, Bangladesh, Bélarus, Belgique, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, République de Corée, Croatie, Danemark, Egypte, Espagne, Estonie, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Indonésie, Irlande, Italie, Japon, Jordanie, Kenya, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Suède, Suisse, République arabe syrienne, République tchèque, Turquie, Venezuela, Zimbabwe), les réponses des organisations d'employeurs et
de travailleurs ont été incorporées dans celles des gouvernements ou jointes à ces réponses, ou encore communiquées directement au Bureau.

La Commission des droits de l'enfant des Nations Unies a formulé des observations au cours de sa 20 e session.

Afin que les versions française et anglaise du projet de convention et du projet de recommandation concernant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants puissent parvenir aux gouvernements dans les délais prévus à l'article 39, paragraphe 7, du Règlement de la Conférence, le rapport IV (2) est publié en deux volumes(6). Le présent volume bilingue (rapport IV (2 B)) contient les versions française et anglaise du projet de convention et du projet de recommandation, amendés en fonction des observations des gouvernements et des organisations d'employeurs et de travailleurs et pour les raisons exposées dans les commentaires du Bureau. En outre, quelques légères modifications de forme qui paraissaient opportunes ont été apportées aux textes en vue surtout d'assurer l'entière concordance des deux versions des instruments proposés. Si la Conférence en décide ainsi, ces textes serviront de base à la deuxième discussion de la question intitulée «Le travail des enfants» lors de sa 87 e session (1999).

TEXTES PROPOSÉS

On trouvera ci-après la version française: A) du projet de convention concernant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants; B) du projet de recommandation concernant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants. Ces textes sont soumis à la Conférence pour servir de base, lors de la 87 e session, à la discussion de la quatrième question de l'ordre du jour.

A. Projet de convention concernant l'interdiction et l'élimination immédiate
des pires formes de travail des enfants

adopte, ce        jour de juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, la convention ci-après, qui sera dénommée Convention sur l'abolition immédiate des pires formes de travail des enfants, 1999.

Article 1

Tout Membre qui ratifie la présente convention doit prendre des mesures pour assurer l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants.

Article 2

Aux fins de la présente convention, le terme «enfant» s'applique à l'ensemble des personnes de moins de 18 ans.

Article 3

Aux fins de la présente convention, l'expression «les pires formes de travail des enfants» comprend:

a) toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, le travail forcé ou obligatoire, la servitude pour dettes et le servage;

b) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques;

c) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que les définissent
les conventions internationales pertinentes;

d) les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s'exercent, sont susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou la moralité de l'enfant.

Article 4

1.  Les types de travail visés à l'article 3 d) doivent être déterminés par la législation nationale ou l'autorité compétente, après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées, compte tenu des normes internationales pertinentes.

2.  L'autorité compétente, après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées, doit localiser les types de travail ainsi déterminés.

3.  La liste des types de travail déterminés conformément au paragraphe 1 du présent article doit être périodiquement examinée et, au besoin, révisée après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées.

Article 5

Tout Membre doit établir ou désigner des mécanismes appropriés pour surveiller l'application des dispositions donnant effet à la présente convention.

Article 6

1.  Tout Membre doit élaborer et mettre en œuvre des programmes d'action en vue d'éliminer en priorité les pires formes de travail des enfants.

2.  Ces programmes d'action doivent être élaborés et mis en œuvre en consultation avec les institutions publiques compétentes et les organisations d'employeurs et de travailleurs.

Article 7

1.  Tout Membre doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre effective des dispositions donnant effet à la présente convention et les faire respecter, y compris en prévoyant et en appliquant des sanctions pénales ou, le cas échéant, d'autres sanctions.

2.  Tout Membre doit, en tenant compte de l'importance de l'éducation en vue de l'élimination du travail des enfants, prendre des mesures efficaces dans un délai déterminé pour:

a) empêcher que des enfants ne s'engagent dans les pires formes de travail;

b) prévoir l'aide directe nécessaire et appropriée pour les soustraire au travail et assurer leur réadaptation et leur réinsertion sociale, entre autres, par l'accès à l'éducation de base gratuite;

c) identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec eux;

d) tenir compte de la situation particulière des filles.

3.  Tout Membre doit désigner l'autorité compétente chargée de la mise en œuvre des dispositions donnant effet à la présente convention.

Article 8

Les Membres doivent prendre des mesures, le cas échéant, afin de s'entraider pour donner effet aux dispositions de la présente convention par une coopération ou une assistance internationales.

B. Projet de recommandation concernant l'interdiction
et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants

adopte, ce        jour de juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, la recommandation ci-après, qui sera dénommée Recommandation sur l'abolition immédiate des pires formes de travail des enfants, 1999.

1.  Les dispositions de la présente recommandation complètent celles de la convention sur l'abolition immédiate des pires formes de travail des enfants, 1999 (ci-après dénommée «la convention») et devraient s'appliquer conjointement avec elles.

I. Programmes d'action

2.  Les programmes d'action visés à l'article 6 de la convention devraient être élaborés et mis en œuvre en consultation avec les institutions publiques compétentes, les organisations d'employeurs et de travailleurs et, le cas échéant, d'autres groupes intéressés. Ces programmes devraient viser, entre autres, à:

a) identifier et dénoncer les pires formes de travail des enfants;

b) empêcher des enfants de s'engager dans les pires formes de travail ou les y soustraire, les protéger de représailles, assurer leur réadaptation et leur réinsertion sociale par des mesures tenant compte de leurs besoins en matière d'éducation et de leurs besoins physiques, affectifs et psychologiques;

c) accorder une attention particulière:

d) identifier les communautés dans lesquelles les enfants sont particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec elles;

e) informer, sensibiliser et mobiliser l'opinion publique et les groupes intéressés, y compris les enfants et leurs familles.

II. Travaux dangereux

3.  En déterminant les types de travail visés à l'article 3 d) de la convention et leur localisation, il faudrait au moins prendre en considération:

a) les travaux qui exposent les enfants à des sévices physiques, affectifs ou sexuels;

b) les travaux qui s'effectuent sous terre, sous l'eau, à des hauteurs dangereuses ou dans des espaces confinés;

c) les travaux qui s'effectuent avec des machines, du matériel ou des outils dangereux, ou qui impliquent de manipuler ou porter de lourdes charges;

d) les travaux qui s'effectuent dans un milieu malsain pouvant, par exemple, exposer des enfants à des substances, des agents ou des procédés dangereux, ou à des conditions de température, de bruit ou de vibrations préjudiciables à leur santé;

e) les travaux qui s'effectuent dans des conditions particulièrement difficiles, par exemple pendant de longues heures, ou la nuit, ou sans possibilité pour l'enfant de rentrer chez lui chaque jour.

III. Mise en œuvre

4. (1) Des informations détaillées et des données statistiques sur la nature et l'étendue du travail des enfants devraient être compilées et tenues à jour en vue d'établir les priorités de l'action nationale pour l'abolition du travail des enfants, en particulier pour l'interdiction et l'élimination immédiate de ses pires formes.

(2) Dans la mesure du possible, ces informations et données statistiques devraient comprendre des données ventilées par sexe, groupe d'âge, profession, branche d'activité économique et situation dans la profession.

(3) Des données pertinentes devraient être compilées et tenues à jour en ce qui concerne les violations des dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants.

5.  La compilation et le traitement des informations et données mentionnées au paragraphe 4 ci-dessus devraient être effectués en tenant dûment compte du droit à la protection de la vie privée.

6.  Les informations compilées conformément au paragraphe 4 ci-dessus devraient être régulièrement communiquées au Bureau international du Travail.

7.  Les Membres devraient établir ou désigner des mécanismes nationaux appropriés pour surveiller l'application des dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants, après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs et, le cas échéant, d'autres groupes intéressés.

8.  Les Membres devraient veiller à ce que les autorités compétentes chargées de mettre en œuvre les dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants coopèrent entre elles et coordonnent leurs activités.

9.  La législation nationale ou l'autorité compétente devrait déterminer les personnes qui seront tenues responsables en cas de non-respect des dispositions nationales concernant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants.

10.  Les Membres devraient, pour autant que cela soit compatible avec le droit national, coopérer aux efforts internationaux visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants en:

a) rassemblant et échangeant des informations concernant les infractions pénales, y compris celles impliquant des réseaux internationaux;

b) recherchant et poursuivant les personnes impliquées dans la vente et la traite des enfants ou dans l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'enfants aux fins d'activités illicites, de prostitution ou de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques;

c) tenant un registre des auteurs de telles infractions.

11.  Les Membres devraient prévoir que les pires formes de travail des enfants indiquées ci-après sont des infractions pénales:

a) toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, le travail forcé ou obligatoire, la servitude pour dettes et le servage;

b) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques;

c) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que les définissent
les conventions internationales pertinentes.

12.  Les Membres devraient veiller à ce que des sanctions, y compris s'il y a lieu des sanctions pénales, soient appliquées aux violations des dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des types de travail visés à l'arti-
cle 3 d) de la convention.

13.  Les Membres devraient, s'il y a lieu, prévoir d'autres recours pour assurer l'application effective des dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants.

14.  D'autres mesures visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants pourraient notamment consister à:

a) informer et sensibiliser le grand public, y compris les dirigeants politiques nationaux et locaux, les parlementaires et les autorités judiciaires;

b) associer et former les organisations d'employeurs et de travailleurs et les organisations civiques;

c) dispenser la formation appropriée aux agents des administrations intéressés, en particulier aux inspecteurs et aux représentants de la loi, ainsi qu'à d'autres professionnels concernés;

d) permettre aux Membres de poursuivre dans leur propre pays leurs ressortissants qui commettent des infractions aux dispositions nationales visant l'interdiction et l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants, même lorsque ces infractions sont commises en dehors de leur pays;

e) simplifier les procédures judiciaires et administratives, en veillant à ce qu'elles soient appropriées et rapides;

f) faire connaître les meilleures pratiques relatives au travail des enfants;

g) faire connaître les dispositions juridiques ou autres relatives au travail des enfants dans les langues ou dialectes divers;

h) mettre en place des procédures spéciales de plainte, des dispositions visant à protéger ceux qui font légitimement état de violations des dispositions de la convention contre toute discrimination et toutes représailles, ainsi que des lignes téléphoniques ou centres d'assistance et des médiateurs.

15.  La coopération et l'assistance internationales entre les Membres en vue de l'interdiction et de l'élimination immédiate des pires formes de travail des enfants devraient inclure:

a) la mobilisation de ressources pour des programmes nationaux ou internationaux;

b) l'assistance mutuelle en matière juridique;

c) l'assistance technique, y compris l'échange d'informations.


1.  BIT: Le travail des enfants , Conférence internationale du Travail, 87e session, Genève, 1999, rapport IV (1).

2.  Les réponses qui sont arrivées trop tard pour être incluses dans le rapport pourront être consultées par les délégués à la Conférence.

3.  Le gouvernement de la Belgique a transmis avec sa réponse un avis du Conseil national du travail (CNT).

4.  Le ministère des Affaires sociales et du Travail a répondu pour le gouvernement. Le ministère de l'Industrie a présenté des observations en tant qu'employeur du secteur public industriel.

5.  Le Saint-Siège jouit du statut d'observateur auprès de l'OIT.

6.  Le rapport IV (2 A) parviendra aux gouvernements un mois environ après le présent volume et contiendra un résumé des réponses reçues ainsi que les commentaires du Bureau.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 January 2000.