GB.276/LILS/2 |
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Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail |
LILS |
DEUXIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR
Révision de la procédure pour l'examen
des réclamations
présentées en vertu de l'article 24 de la Constitution
Table des matières
I. Les raisons d'une éventuelle révision de la procédure
II. Les objectifs possibles d'une révision
1. Lors de la 273e session (novembre 1998) du Conseil d'administration, la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail (la Commission LILS) a procédé à un échange de vues préliminaire sur la question d'une éventuelle révision de la procédure d'examen des réclamations présentées en vertu de l'article 24 de la Constitution(1) .
2. A l'issue de cet examen, le Conseil a demandé au Bureau de soumettre un nouveau document reflétant les orientations générales données par les membres de la commission et articulé autour des trois questions suivantes:
I. Les raisons d'une éventuelle révision de la procédure
3. Les raisons susceptibles de justifier une révision de la procédure actuellement en vigueur sont principalement au nombre de trois: l'augmentation du nombre de réclamations constatée au cours des années, le risque de chevauchement entre la procédure de réclamation et les autres procédures de contrôle, et la clarification et éventuellement l'harmonisation de la pratique de la confidentialité de la discussion relative à l'examen des réclamations et de celle de la conclusion de la procédure des articles 24 et 25 de la Constitution. Les indications qui suivent complètent et précisent celles qui ont été fournies dans le document précédemment présenté à la commission(2) .
1. L'augmentation du nombre des réclamations
4. L'examen d'une éventuelle révision de la procédure a été, à l'origine, suscité par le bureau du Conseil d'administration. Depuis la dernière révision, en 1980, du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations au titre des articles 24 et 25 de la Constitution, il incombe au bureau du Conseil d'administration d'examiner toute réclamation au regard de sa recevabilité et de faire rapport au Conseil. Confronté à un nombre croissant de réclamations, le bureau du Conseil s'est donc interrogé au milieu des années quatre-vingt-dix sur l'opportunité de réviser la procédure: si la tendance à l'augmentation des réclamations devait se confirmer, le renvoi automatique des réclamations à un comité tripartite pourrait à terme devenir un problème eu égard tant à la disponibilité des membres du Conseil pour participer aux comités tripartites qu'aux ressources du Bureau.
5. De l'origine de l'OIT au 15 septembre 1999, 89 réclamations ont été présentées; 76, soit plus de 80 pour cent du total, l'ont été au cours des deux dernières décennies, dont 50, soit environ 68 pour cent du total, au cours de la décennie quatre-vingt-dix.
6. Lors des débats de la commission en novembre 1998, des membres du Conseil ont demandé des informations complémentaires afin d'apprécier la portée et les raisons de l'augmentation, étant donné qu'il pourrait s'agir d'un phénomène conjoncturel lié au nombre accru d'Etats Membres et de conventions ratifiées plutôt que d'une constante. Or plusieurs éléments semblent indiquer que ces facteurs ne jouent qu'un rôle mineur. En effet, sur 174 Etats Membres, 47 (soit un peu plus du quart) ont fait l'objet d'une réclamation ou plus(3) et, au cours des vingt dernières années, seuls deux Etats devenus Membres après 1980 ont fait l'objet d'une réclamation. Par ailleurs, seules 13 réclamations ont porté, exclusivement ou partiellement, sur des conventions adoptées après 1980 et, sur les 163 conventions actuellement en vigueur, une soixantaine seulement ont fait l'objet de réclamations. En outre, les réclamations portent pour plus de la moitié sur les conventions fondamentales ou prioritaires, toutes adoptées avant 1980.
7. Les données objectives ne peuvent donc à elles seules expliquer l'augmentation du nombre de réclamations, qui a plutôt son origine dans une prise de conscience de l'existence et dans la maîtrise des procédures par les organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, due pour partie à l'action de promotion et d'information entreprise par le Bureau à la suite des instructions qui lui ont été données par la Conférence et le Conseil, au début des années quatre-vingt, ainsi qu'au développement de la démocratie dans un nombre croissant de pays.
8. Bien que, comme il ressort du tableau ci-dessous, le rythme d'augmentation des réclamations ne soit pas constant, il est peu probable, compte tenu de ce qui précède, que la tendance à une plus large utilisation des moyens constitutionnels de contrôle d'application des normes diminue à terme.
2. Les risques de chevauchement entre les différentes procédures de contrôle
9. La pratique constante de la commission d'experts, lorsqu'une procédure en vertu des articles 24 ou 26 de la Constitution est engagée, est d'attendre que le Conseil d'administration se soit prononcé quant au fond avant d'examiner les questions soulevées ou de reprendre leur examen. En conséquence, et en l'absence de commentaires quant au fond dans le rapport de la commission d'experts à la Conférence, la Commission de l'application des normes de la Conférence n'a pas à examiner la ou les questions faisant l'objet de la réclamation tant que la procédure des articles 24 et 25 de la Constitution n'est pas achevée.
Nombre de réclamations soumises au Conseil
10. La situation inédite créée en 1997 par le chevauchement d'une réclamation considérée comme recevable par le Conseil à sa session de mars et de l'examen par la Commission de l'application des normes de la Conférence d'une observation dans le rapport de la commission d'experts (priant un gouvernement de fournir des données complètes à la Conférence(4) ) trouve son origine dans les changements apportés à la date de la réunion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations(5) . En l'absence de dispositions précises régissant ce point et compte tenu du fait que la pratique invoquée de suspension automatique de l'examen du cas par la Commission de la Conférence souffrait une exception en matière de réclamations examinées par le Comité de la liberté syndicale, cela a donné lieu à controverses.
11. En effet, la commission d'experts se réfère régulièrement aux conclusions et recommandations intérimaires adoptées par le Comité de la liberté syndicale lorsque la procédure devant le comité a été déclenchée sur la base d'une réclamation au titre de l'article 24 qui lui aurait été renvoyée en vertu de l'article 3, paragraphe 2, du Règlement. Se fondant sur les éventuels commentaires de la commission d'experts, la Commission de l'application des normes de la Conférence peut donc examiner la question.
12. La question se pose donc de savoir si, tout en assurant la primauté des procédures qui peuvent entraîner l'adoption de «conclusions» constitutionnelles, sous la forme de publication sanctionnant une défaillance dans le respect de la convention ratifiée, voire même le déclenchement par le Conseil lui-même de la procédure prévue à l'article 26 de la Constitution, il ne serait pas nécessaire de trouver un aménagement qui permette d'éviter l'occurrence d'une situation exceptionnelle, dans le respect de la complémentarité des procédures de contrôle.
3. La clarification et
l'harmonisation de la pratique de la confidentialité
de la discussion
relative à l'examen des réclamations et de celle
de la conclusion de la procédure
13. L'utilité de la confidentialité des documents et des débats relatifs aux réclamations a été soulevée par un représentant gouvernemental qui s'est interrogé sur la nature réellement confidentielle des documents distribués au sujet des réclamations et sur la possibilité dans la pratique d'en préserver le caractère confidentiel. Il ressort de la discussion qui s'est tenue à la Commission LILS qu'il est utile de clarifier certains points, notamment celui de la distinction entre la confidentialité des séances consacrées à l'examen quant à la forme et au fond des réclamations et la décision de rendre la réclamation publique au cas où le Conseil n'est pas satisfait de la déclaration du gouvernement ou en raison de l'absence de déclaration du gouvernement, et, éventuellement, d'harmoniser les pratiques.
14. La question du caractère privé des séances du Conseil a déjà été examinée lors de la dernière révision du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations en 1980, et le Conseil avait décidé de maintenir le principe de l'examen à huis clos. Cependant, outre les difficultés pratiques de mise en œuvre de la confidentialité de l'examen des réclamations au Conseil d'administration - et des documents soumis -, il est important de noter que la portée de la confidentialité de la procédure n'est pas la même pour les réclamations portant sur l'application des conventions relatives à la liberté syndicale qui, en vertu de l'article 3, paragraphe 2, du Règlement, sont renvoyées au Comité de la liberté syndicale. En effet, tant la procédure du Comité de la liberté syndicale que celle suivie par les comités tripartites chargés de l'examen des réclamations satisfont à l'exigence de confidentialité, qui garantit les intérêts du Membre en cause et la sérénité du travail du comité tripartite désigné par le Conseil pour examiner la réclamation ou du Comité de la liberté syndicale. En revanche, tandis que les rapports du Comité de la liberté syndicale sont examinés par le Conseil en séance publique, ceux des comités tripartites le sont en séance privée conformément au Règlement. Ainsi, une même réclamation portant à la fois sur l'application de conventions relatives à la liberté syndicale et d'autres conventions pourrait paradoxalement se voir appliquer un traitement différent selon le sujet: un examen en séance publique pour les conventions relatives à la liberté syndicale, un examen en séance privée pour les autres conventions.
15. Par ailleurs, la question de la valeur de la publication en vertu de l'article 25 de la Constitution a été quelque peu obscurcie du fait de la pratique suivie par le Bureau. Depuis 1991 seules les recommandations des comités tripartites, telles qu'approuvées par le Conseil, sont publiées au Bulletin officiel. Il a été mis fin à la pratique suivie jusqu'en 1991 de publier dans le Bulletin officiel tant les rapports des comités tripartites que les réponses des gouvernements. Compte tenu cependant de l'intérêt général que présentent les rapports des comités tripartites, la question se pose de savoir s'il n'y aurait pas lieu de permettre leur diffusion tout en assurant la distinction entre une telle diffusion et leur publication éventuelle en vertu de l'article 25 de la Constitution. Quoi qu'il en soit, la commission d'experts, dans ses commentaires, reproduit de façon assez détaillée la substance de ces rapports et il serait souhaitable de faire en sorte que le Conseil d'administration fasse connaître lui-même l'intégralité de son raisonnement.
II. Les objectifs possibles d'une révision
16. L'article 24 de la Constitution ne prévoit pas les modalités pratiques de l'examen de la réclamation mais dispose que celle-ci «pourra être transmise» au gouvernement mis en cause et que celui-ci «pourra être invité» à présenter une déclaration en réponse. Pour exercer ces deux facultés, il appartient au seul Conseil d'administration de décider de la procédure à suivre et des modalités de l'examen en gardant à l'esprit que les modalités retenues doivent permettre l'éventuelle mise en œuvre de l'article 25. En d'autres termes, et quelles que soient les modalités d'examen de la réclamation, le Conseil doit être en mesure d'en tirer les conclusions et de clore la procédure.
17. Les discussions préliminaires qui se sont tenues à la Commission LILS sur la possible révision du Règlement ont montré l'existence d'un consensus sur deux objectifs: simplicité et cohérence d'une procédure dont la maîtrise appartient au Conseil d'administration et dont l'objet est, aux termes de l'article 24, d'examiner si «l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle [il] a adhéré».
18. L'objectif de simplicité doit à la fois satisfaire à l'exigence de transparence et d'objectivité de la procédure et à celle inscrite dans la Constitution d'accorder aux organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs un accès très large à la procédure, tout en tenant compte des contraintes, en temps et en ressources, qui pèsent tant sur le Conseil que sur le Bureau, notamment en ce qui concerne le renvoi automatique de toute réclamation recevable à un comité tripartite. L'objectif de cohérence doit, tout en respectant la spécificité de la procédure constitutionnelle de réclamation, assurer une complémentarité entre les différents mécanismes qui permettent d'assurer le contrôle de l'application des obligations volontairement acceptées par les Membres et éviter doubles emplois et chevauchements.
19. Les différents éléments du mécanisme de contrôle de l'application des normes ont, chaque fois que le Conseil d'administration a estimé que cela était nécessaire du fait des évolutions auxquelles l'Organisation était confrontée, fait l'objet d'aménagements en vue d'en renforcer l'efficience et la cohérence. Cette approche pragmatique a permis de maintenir jusqu'à maintenant la souplesse de l'ensemble quitte à en corriger les défauts ou les lacunes qui ont pu apparaître à l'usage, tout en améliorant l'efficacité.
20. L'article 24 de la Constitution permet à toute organisation professionnelle d'employeurs ou de travailleurs de déclencher à tout moment, à condition qu'elle remplisse les conditions de recevabilité établies dans le Règlement, une procédure d'examen de la manière dont un Membre applique une convention internationale qu'il a ratifiée, quel que soit l'objet de cette convention. Cette procédure partage avec la pratique de l'examen de l'application des conventions ratifiées fondé sur les articles 22 et 23 de la Constitution(6) , ainsi qu'avec la procédure de plaintes relatives à la liberté syndicale, le fait qu'elle peut être engagée par des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs. Elle partage également avec la procédure constitutionnelle de plainte prévue aux articles 26 et suivants la possibilité de se conclure par des mesures prises à l'encontre d'un pays qui n'assure pas de manière satisfaisante l'exécution d'une convention ratifiée. Sa spécificité réside dans le fait qu'elle réunit tous ces éléments dans une même procédure qui peut être qualifiée d'intermédiaire entre celles des articles 22 et 26 de la Constitution.
21. Il convient par ailleurs de rappeler, en ce qui concerne en particulier certaines observations relatives à un éventuel renforcement des conditions de recevabilité faites lors de la dernière discussion, notamment en ce qui concerne les réclamations répétitives, qu'un tel renforcement, outre la question de son éventuelle compatibilité avec le texte de la Constitution, ne se justifie pas. Ainsi, s'il est vrai que 15 réclamations présentées récemment portaient sur l'application de la ou des mêmes conventions par les mêmes pays(7) , aucune de ces réclamations n'a été déposée par la même organisation. Quatre de ces réclamations ont été considérées comme non recevables par le Conseil d'administration(8) . En outre, pour ce qui est des réclamations qui ont été considérées comme recevables, bien que portant sur une même convention, elles se réfèrent soit à des dispositions différentes de l'instrument, soit à l'application des mêmes dispositions à des secteurs d'activités différents, soit enfin à des situations de fait différentes résultant de l'action ou de l'inaction du gouvernement mis en cause.
22. La tendance constatée à une plus large utilisation de la procédure de réclamation par les organisations professionnelles appelle donc une rationalisation des méthodes de travail du Conseil et des moyens dont l'Organisation dispose pour permettre un bon fonctionnement de la procédure. En même temps, il conviendrait que toute révision vise à assurer la cohérence du système de contrôle dans son ensemble en évitant tout risque de chevauchement ainsi qu'à en préserver la spécificité au sein du système de contrôle.
1. L'optimisation des voies disponibles
23. En ce qui concerne les voies d'examen des réclamations qui, comme on le sait, sont renvoyées soit à un comité tripartite ad hoc, soit au Comité de la liberté syndicale, deux solutions seraient envisageables.
24. La première, déjà évoquée dans le passé, consisterait en un comité permanent. Bien que cette solution ne remédie pas au problème de la disponibilité des membres du Conseil d'administration appelés à siéger dans les comités tripartites, elle permettrait une organisation plus systématique de leur travail. Si le Conseil décide d'explorer plus avant cette solution, il serait nécessaire de le faire en gardant à l'esprit la nécessité de tenir compte de la répartition géographique dans la désignation des membres de ce comité permanent.
25. La deuxième solution, déjà ébauchée dans le document de novembre 1998, serait d'élargir le choix des voies disponibles pour l'examen des réclamations considérées recevables.
26. La première de ces voies pourrait consister à renvoyer la question soulevée dans la réclamation à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations pour examen, en invitant le gouvernement à faire sur la matière toute déclaration qu'il jugera convenable. La commission d'experts examinerait la question à sa session suivante avec, le cas échéant, la déclaration du gouvernement et ferait figurer ses commentaires dans son rapport. Lorsque le rapport de la commission d'experts est communiqué au Conseil, à chaque session de mars, l'attention de celui-ci serait attirée sur le résultat de l'examen de la question figurant dans le rapport. Le Conseil pourrait prendre les décisions opportunes en ce qui concerne les suites à donner à la réclamation. La question est de savoir quel type de questions faisant l'objet d'une réclamation devraient être transmises à la commission d'experts. La distinction proposée dans le précédent document (question de fait/question de droit) n'a pas reçu un assentiment unanime, dans la mesure où elle paraît difficile à mettre en œuvre dans l'abstrait. Néanmoins, l'expérience des réclamations montre qu'il est possible de distinguer ce qui relève des questions d'application courante. Quoi qu'il en soit, comme indiqué au paragraphe 28 ci-dessous, toute décision d'aiguillage devrait être motivée et il appartiendrait au Conseil, en cas de doute, de se prononcer sur la voie qui devrait être suivie.
27. La seconde voie qui pourrait être ouverte, notamment pour des réclamations répétitives(9) ou ne soulevant pas de problème particulier, consisterait à suivre à la lettre la procédure prévue aux articles 24 et 25 de la Constitution, c'est-à-dire à inviter directement le gouvernement mis en cause à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable et, si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante, à rendre publiques en vertu de l'article 25 de la Constitution la réclamation reçue et la réponse faite, dans des conditions qui devraient bien mettre en relief le caractère de sanction de cette publication. Les réclamations portant sur une question examinée depuis un certain temps par les organes réguliers de contrôle ou précédemment examinée en vertu de l'article 24 pourraient faire l'objet d'un tel traitement. Or rien dans les dispositions constitutionnelles ne permet de considérer que les réclamations qui ont déjà fait l'objet de commentaires des organes de contrôle ou de recommandations adoptées par le Conseil à la suite de réclamations antérieures soient irrecevables. A compter du moment où elles sont considérées comme formellement recevables, elles donnent lieu automatiquement à l'institution d'un comité tripartite ad hoc. Face à de tels cas, on se trouve devant l'alternative suivante:
28. Chacune des décisions prises en ce qui concerne la voie choisie devrait faire l'objet d'une motivation suffisante pour permettre d'éclairer le choix du Conseil et donner aux organisations professionnelles concernées des garanties de transparence quant à la décision adoptée.
29. L'institution de ces nouvelles voies, et en particulier la fonction d'aiguillage, pourrait être assurée par deux voies:
2.
La spécificité de la procédure de réclamation
et l'harmonisation de la pratique
en matière de confidentialité des séances et documents
relatifs aux réclamations
30. Il importe de préciser qu'il s'agit ici d'examiner la pratique de la confidentialité de la discussion relative à l'examen des recommandations par le Conseil d'administration et de celle de la conclusion de la procédure des articles 24 et 25 de la Constitution.
31. Le Conseil d'administration examine en séance publique les rapports des commissions d'enquête instituées en vertu de l'article 26 de la Constitution ainsi que les rapports du Comité de la liberté syndicale, y compris ceux relatifs à une réclamation qui lui aurait été déférée en vertu de l'article 3, paragraphe 4, du Règlement. La discussion de ces rapports en séance publique n'affecte pas pour autant le secret des délibérations qui conduisent à leur adoption. Le Règlement pourrait ainsi être amendé pour aligner la pratique sur celle applicable aux autres procédures (Comité de la liberté syndicale et commissions d'enquête).
32. L'argument relatif à l'affaiblissement de l'impact de la publication-sanction qui pourrait résulter de la publicité des débats au sein du Conseil pose un problème de portée plus générale: celui de la confusion qui a longtemps régné entre la diffusion du rapport des comités tripartites (comme tout autre rapport du Conseil d'administration) et sa publication au sens de la Constitution.
33. La notion de publication doit conserver le sens d'une décision formelle prise par le Conseil d'administration en vertu de l'article 25 «de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite». Il ressort clairement du contexte que la décision de publier, dans ce cas, résulte de ce que le Conseil d'administration a jugé que la réponse du gouvernement en question n'était pas satisfaisante. De fait, il n'y a eu jusqu'ici qu'une seule publication effectuée en vertu de cet article concernant une réclamation relative à l'application de la convention no 111 par la Tchécoslovaquie, en 1978. Le rapport a été publié dans un supplément spécial du Bulletin officiel, en indiquant que cette publication était faite conformément à une décision prise en vertu de l'article 25.
34. Pour renforcer la distinction entre publication de la réclamation et diffusion du rapport, on pourrait préciser sur un point la procédure applicable selon le règlement en vigueur. Selon l'article 8 du Règlement, «si le Conseil d'administration décide de publier la réclamation et, le cas échéant, la déclaration reçue en réponse, il détermine la forme et la date de cette publication». Cette disposition doit être comprise comme signifiant que le Conseil devrait donner une certaine solennité à la décision de publication. En conséquence, elle devrait faire l'objet d'une question spécifique à l'ordre du jour du Conseil au lieu d'être traitée sous un point général.
35. Si l'on estime que les rapports des comités désignés en vertu de l'article 24 de la Constitution devraient être disponibles intégralement une fois qu'ils ont été approuvés par le Conseil d'administration, l'article 1 du Règlement dans sa teneur antérieure à l'amendement de 1980 pourrait être rétabli.
3. La cohérence
du système: incidence de la procédure
de l'article 24 sur la procédure de l'article 22
36. Si, pour les raisons évoquées ci-dessus, il ne paraît pas souhaitable de modifier la pratique établie en matière de suspension de la procédure en vertu de l'article 22 lorsque la procédure de l'article 24 est engagée, c'est-à-dire lorsque l'examen quant au fond de la réclamation est engagé, il serait au moins nécessaire de procéder à un aménagement réduit permettant d'éviter des chevauchements de procédure qui ne seraient pas souhaités par le Conseil.
37. Lors de l'examen préliminaire de la réclamation (recevabilité et choix de la voie d'examen), le Conseil devrait être systématiquement informé de l'état de toute procédure en cours et, le cas échéant, se prononcerait en connaissance de cause quant aux conséquences de sa décision d'aiguiller la réclamation dans l'une ou l'autre voie. Pratiquement, dans un cas semblable à celui auquel il est fait référence au paragraphe 12 ci-dessus, le Conseil pourrait, après s'être prononcé sur la recevabilité, prendre la décision de transmettre la question à l'une des voies d'examen à sa session du mois de juin, après la Conférence, de manière à tirer profit de la discussion qui pourrait avoir eu lieu à la Commission de l'application des normes. Il pourrait à l'inverse décider de mettre en œuvre immédiatement la procédure en rappelant son caractère suspensif.
* * *
38. Compte tenu de ce qui précède, la commission voudra sans doute demander au Bureau de lui soumettre à une prochaine session des projets d'amendement au Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations présentées en vertu de l'article 24 de la Constitution qui tiennent compte des orientations formulées lors de l'examen de ce document.
Genève, le 12 octobre 1999.
Point appelant une décision: paragraphe 38.
1. Document GB.273/8/1.
2. Document GB.273/LILS/1.
3. La répartition des réclamations par région est la suivante: Afrique, 7 réclamations; Amériques, 28 réclamations; Asie, 3 réclamations; Europe, 37 réclamations dont une vingtaine pour les pays de l'Union européenne; Etats arabes, 1 réclamation.
4. Voir document GB.273/LILS/1, paragr. 4 et 34.
5. Entre la session de la commission d'experts (nov.-déc.) et la session de la Conférence à laquelle est soumis le rapport de la commission (juin de l'année suivante), le Conseil d'administration se réunit en mars et peut se prononcer sur la recevabilité d'une réclamation déposée précédemment. Or la ou les conventions sur lesquelles porte cette réclamation ont pu faire l'objet de commentaires de la part de la commission d'experts à sa session de novembre-décembre, assortis éventuellement d'une note de bas de page demandant au gouvernement de fournir des données complètes à la session de la Conférence. La Commission de la Conférence se trouve donc devant un cas qui est signalé à son attention par le rapport de la commission d'experts alors que la procédure de réclamation sur le même cas est engagée par le Conseil. Telle a été la situation à la 85e session de la Conférence en 1997.
6. L'observation d'une organisation d'employeurs ou de travailleurs sur l'application d'une convention ratifiée entraîne automatiquement l'examen par la commission d'experts du point soulevé dans l'observation. Voir document GB.258/LILS/6/1, paragr. 12 c) iv).
7. Chili (conventions nos 35 et 37, 1997-1998); Congo (convention no 95, 1994-1995); Danemark (convention nos 87 et 98, 1996-1997-1998); Mexique (convention no 169, 1996-1998); Pérou (convention no 102, 1994-1995; conventions nos 87, 100 et 111, 1995-1996); Uruguay (convention no 155, 1994-1996); Venezuela (convention no 158, 1991-1996).
8. Pérou (convention no 102, 1994-1995; conventions nos 87, 100 et 111, 1996); Danemark (convention no 98, 1997).
9. Voir paragr. 10 ci-dessus.