GB.270/3/1(Add) |
TROISIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR
Suite à donner à la discussion sur le rapport
du Directeur général à la 85e session (1997)
de la Conférence internationale du Travail
a) Inclusion dans l'ordre du jour de la 86e session (1998)
de la Conférence internationale du Travail d'une question concernant
une déclaration sur les droits fondamentaux des travailleurs
Addendum:
Extraits des déclarations faites à la 85e Conférence internationale
du Travail (1997) dans le cadre de la discussion du Rapportdu Directeur général en
ce qui concerne la garantie universelle
des droits fondamentaux des travailleurs et l'adoption
d'une éventuelle déclaration solennelle
Table des matières
Afrique du Sud
Algérie
Allemagne
Arabie saoudite
Argentine
Australie
Autriche
Bahamas
Bahreïn
Bangladesh
Bélarus
Belgique
Botswana
Brésil
Burkina Faso
Cambodge
Canada
Chili
Chine
Chypre
Colombie
République de Corée
Costa Rica
Côte d'Ivoire
Cuba
Danemark
République dominicaine
Egypte
El Salvador
Emirats arabes unis
Equateur
Espagne
Estonie
Etats-Unis
Fidji
Finlande
France
Grèce
Guinée équatoriale
Haïti
Hongrie
Inde
Indonésie
République islamique d'Iran
Irlande
Islande
Italie
Jamahiriya arabe libyenne
Japon
Jordanie
Kenya
Koweït
Lesotho
Luxembourg
Malaisie
Mali
Maroc
Maurice
Mexique
Mongolie
Namibie
Népal
Nicaragua
Norvège
Nouvelle-Zélande
Oman
Ouganda
Pakistan
Panama
Pays-Bas
Philippines
Pologne
Portugal
Royaume-Uni
Fédération de Russie
Sénégal
Singapour
Slovaquie
Soudan
Sri Lanka
Suède
Suisse
République tchèque
Thaïlande
Tunisie
Turquie
Ukraine
Uruguay
Venezuela
Viet Nam
Zambie
Zimbabwe
Organisation internationale des employeurs
Confédération mondiale du travail
Fédération internationale des journalistes
Confédération internationale des syndicats libres
Fédération internationale des travailleurs du textile
de l'habillement et du cuir
Internationale des services publics
1. On trouvera ci-dessous des extraits des déclarations faites à la 85e session de la Conférence internationale du Travail dans le cadre de la discussion du rapport du Directeur général, «L'action normative de l'OIT à l'heure de la mondialisation». Ces extraits portent exclusivement sur la question des moyens propres à assurer la garantie universelle des droits fondamentaux des travailleurs en tant que condition de la participation des travailleurs aux bénéfices de la mondialisation.
2. La plupart des extraits retenus se réfèrent en premier lieu à la ratification universelle des conventions internationales du travail portant sur les droits fondamentaux de l'homme. Pour certaines délégations, ce moyen serait suffisant pour atteindre l'objectif du Sommet social de Copenhague, la nécessaire promotion des conventions fondamentales pour en assurer une application universelle. D'autres délégations, tout en appuyant l'objectif de ratification universelle des conventions fondamentales, considèrent qu'il est nécessaire de disposer d'un moyen complémentaire permettant d'assurer sans délai la mise en œuvre universelle des droits fondamentaux des travailleurs dans tous les pays qu'ils aient ou non ratifiés les conventions fondamentales. En conséquence, elles soutiennent la proposition présentée par le groupe employeur à la 268e session du Conseil d'administration, et reprise par le Directeur général dans son rapport précité.
3. Bien qu'ils soient par eux-mêmes suffisamment explicites, il convient de lire ces extraits à la lumière des déclarations intégrales qui sont publiées in extenso dans le Compte rendu de la 85e session de la CIT. Les déclarations ont été classées par ordre alphabétique des délégations et, le cas échéant, au sein de chaque délégation dans l'ordre habituellement utilisé dans les documents: gouvernements, employeurs, travailleurs. Les déclarations des observateurs ont été classées en ordre chronologique tel qu'il apparaît dans le compte rendu de la Conférence.
* * *
I. Délégation
M. MBOWENI (ministre du Travail) -- ... Les normes du travail ne doivent pas servir d'écran de fumée pour dissimuler le protectionnisme. La communauté internationale doit parvenir à un consensus sur les normes du travail. Cela ne sera possible qu'à travers un dialogue permanent, qui nous permettra de comprendre la situation particulière de chaque pays. Il faut donc respecter un programme qui énonce les droits fondamentaux des travailleurs. Mettre au point et surveiller ces normes minimales devrait renforcer la consultation tripartite et non pas lui nuire.
M. SHILOWA (conseiller technique des travailleurs) -- ... Les pays qui se sont opposés au rapport du Directeur général sont les mêmes que ceux qui, à Singapour, disaient que l'OIT est l'organisme compétent pour s'occuper des normes fondamentales; et ils voudraient maintenant lui ôter tout moyen d'action efficace. Le moment est venu de leur demander quelles sont exactement leurs intentions; j'ai l'impression qu'ils veulent satisfaire les exigences d'institutions qui ne sont pas élues, sans se préoccuper de l'électorat.
... Je tiens à ce que l'on note bien que, même s'il existe des différences de méthode sur certains thèmes, nous appuyons fermement l'approche stratégique d'ensemble du Directeur général en faveur de la justice sociale...
M. DEMBRI (délégué gouvernemental) -- ... C'est pourquoi l'action de notre Organisation devrait être renforcée afin que les droits fondamentaux des travailleurs soient reconnus et préservés, car il en va ainsi de l'objectif d'équilibre recherché. Le rôle de l'OIT, dans cette phase difficile, consisterait à encourager la mise en œuvre des mécanismes qui permettraient aux Etats Membres de trouver des compromis acceptables pour concilier les finalités économiques et les finalités sociales du développement.
... On conviendra que le recours à une action internationale concertée devient plus que jamais nécessaire pour imaginer et pour mettre en œuvre les actions tangibles qui permettraient d'assurer, au niveau international, l'indispensable accompagnement social de la globalisation de l'économie.
C'est d'abord cela qui a été consacré par le Programme d'action arrêté au Sommet mondial pour le développement social de Copenhague et par la Déclaration de Singapour, ainsi que nous l'avons mentionné il y a quelques instants.
Mme VOSKUHL (déléguée gouvernementale) -- ... Premièrement, une déclaration solennelle de la Conférence de 1998 constituerait pour nous un signal de départ tout à fait approprié pour une initiative visant une plus grande reconnaissance mondiale des normes sociales et du travail, et un meilleur contrôle de leur application.
Deuxièmement, nous appuyons la proposition qui a été faite d'adopter, partout où les mécanismes de surveillance ne permettent pas d'évaluer clairement l'application des normes fondamentales, des mesures appropriées pour combler ces lacunes.
M. THÜSING (délégué des employeurs) -- ... En effet, avec les meilleures intentions du monde, je le reconnais, le rapport fait preuve, dans son interprétation des textes, d'une imagination qui pourrait déboucher sur un affaiblissement de la Constitution. Si nous nous engageons dans cette voie pour défendre les droits des travailleurs qui sont aujourd'hui reconnus comme fondamentaux, il n'y a pas de raison de ne pas continuer sur sa lancée d'appui suffisant pour l'avenir et qu'il y aurait des problèmes de demain ou après-demain pour défendre des conventions qui sont jugées, pour des motifs valables, fondamentales.
Le Comité de la liberté syndicale est un cas particulier. Il ne peut être considéré comme un précédent. Je considère comme essentiel le respect strict de la Constitution de l'OIT. C'est vrai aujourd'hui et ce le sera plus encore demain, car la Constitution de l'OIT est ce qui nous lie les uns aux autres par-delà les divergences d'intérêts et les particularités de chacun.
Il n'y a là aucune résignation. La déclaration solennelle de la Conférence dont il est question dans le rapport, peut, avec un ajout sur l'obligation de faire rapport, préparer les avancées ultérieures. Le succès de la campagne menée par le Bureau en faveur de la ratification conforte ces attentes.
M. AL-SENANY (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... Dans la mesure où il s'agit là de l'avenir de l'activité normative de l'Organisation et afin de profiter des compétences et des services spécialisés fournis par l'Organisation et par les partenaires sociaux, il serait peut-être utile d'établir un questionnaire qui serait envoyé par le BIT aux Etats Membres, un questionnaire qui tiendrait compte des points suivants:
Premièrement, la nécessité de réaffirmer les conclusions de la Déclaration ministérielle de l'OMC adoptée à Singapour, à savoir que l'OIT est l'organisation compétente pour élaborer les normes internationale du travail.
Deuxièmement, qu'il n'est point besoin d'établir une nouvelle procédure en matière de surveillance et de contrôle de l'application des normes internationales du travail et que l'on pourrait se contenter des mécanismes en vigueur, voire de les renforcer dans le cadre de notre Constitution pour la réalisation de nos objectifs.
Troisièmement, l'écart entre les Etats Membres en matière de croissance est une réalité que l'on ne saurait ignorer. C'est pourquoi, on devrait tenir compte de ces différences lors de l'élaboration des normes internationales du travail. Ce qu'il est possible d'appliquer dans un pays pourrait ne pas être applicable dans un autre pays.
Quatrièmement, étant donné que peu d'Etats ont ratifié les conventions internationales du travail, on devrait examiner quelles en sont les causes et examiner aussi la possibilité de ratifier partiellement certaines des conventions afin de favoriser la souplesse en matière d'application.
Cinquièmement, il serait souhaitable de revoir les méthodes de travail de la commission chargée de l'application des normes, dans la mesure où certains textes juridiques se prêtent à différentes interprétations qui ne s'excluent pas mutuellement. C'est pourquoi, nous proposons que cette commission se borne à examiner les violations flagrantes des conventions sans pour autant aborder l'interprétation de textes pouvant prêter à controverse.
M. CARO FIGUEROA (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Les nouveaux défis exigent de l'OIT, comme le dit le Directeur général dans son rapport, tant la révision de son activité normative que la réorganisation de son organisation interne.
C'est pour cela que nous appuyons l'adoption d'une déclaration solennelle qui réaffirmerait les droits fondamentaux des travailleurs et leur application par tous les Membres de l'OIT, qu'ils aient ou non ratifié les conventions pertinentes...
M. FUNES DE RIOJA (conseiller technique et délégué suppléant des employeurs) -- ... Aujourd'hui, nous sommes convaincus que l'action de l'OIT doit être axée premièrement sur la promotion des conventions fondamentales et le contrôle de leur application dans le monde entier; deuxièmement sur la coopération technique; troisièmement sur l'encouragement du dialogue social.
Pour le premier de ces paramètres, il faut tirer parti des mécanismes constitutionnels existant tant en matière de promotion que de contrôle et assurer un traitement égal à tous les pays, qu'ils aient ou non ratifié les conventions fondamentales.
Il ne s'agit pas d'une question de compétitivité, mais d'une nécessité liée à l'existence même d'une communauté internationale.
Sans le respect des règles du jeu de la communauté internationale, il n'y a pas de relations commerciales possibles car il n'y a tout simplement pas de relations internationales possibles. Le système de contrôle doit utiliser exclusivement les mécanismes existants et doit perfectionner ses procédures pour en garantir le sérieux, l'impartialité et l'efficacité.
M. FISHER (délégué gouvernemental) -- ... L'Australie apporte son soutien de principe à l'élaboration d'une Déclaration de principes qui définirait les normes internationales fondamentales du travail. Cependant, nous ne pouvons appuyer cette déclaration dans sa totalité tant que nous n'en connaissons pas les détails. De cette manière, l'OIT peut proclamer les principes des droits du travail et prendre la tête d'un mouvement international. Déjà, des pressions à ce sujet s'exercent dans d'autres enceintes, et l'OIT ne doit pas perdre l'initiative.
L'Australie estime que la déclaration ne devrait pas se référer à des conventions précises de l'OIT, mais qu'elle devrait plutôt décrire les grands principes auxquels tous les Membres de l'OIT devraient souscrire, qu'ils aient ou non ratifié les conventions en question. Nous savons que, si la tâche n'est pas facile, elle n'est pas non plus impossible.
Le Directeur général n'a pas encore dit comment cette déclaration devrait être appliquée. Pour l'Australie, il serait préférable de ne pas créer de nouveau mécanisme. Il faudrait plutôt élargir le mandat de la commission d'experts pour lui permettre de contrôler l'application des principes fondamentaux qui concernent le travail forcé, le travail des enfants et la non-discrimination. La liberté syndicale resterait du ressort du Comité de la liberté syndicale.
M. NOAKES (délégué des employeurs) -- ... Au cours de débats tenus au sein du Conseil d'administration et de ses commissions, les employeurs ont proposé que l'on envisage l'adoption par cette Conférence d'une déclaration de principes fondamentaux qui contiendrait l'essentiel de ce qui a été reconnu comme étant les conventions de base. Cette proposition a été faite dans un esprit constructif afin de permettre à l'Organisation internationale du Travail de relever de manière efficace les défis lancés par la mondialisation et la libéralisation des échanges et de démontrer qu'elle reste pertinente dans un monde en mutation.
Cette proposition n'a pas été pleinement développée. En fait, il n'aurait pas été souhaitable de chercher à éviter les discussions qui devaient avoir lieu pour obtenir le consensus nécessaire pour l'appuyer. Les détails de cette déclaration, le suivi et le mécanisme de contrôle à mettre en place devaient être discutés à fond.
A ce stade de la discussion, nous pouvons dire qu'il existe un certain degré de consensus sur ce concept et que cela correspond en gros aux idées présentées dans le rapport du Directeur général. Notre tâche est maintenant de chercher à élargir ce consensus, de chercher à répondre à toutes les préoccupations ou réserves et d'élaborer les détails de la proposition.
Je tiens à exprimer ma détermination à faire en sorte que cette proposition se transforme en réalité. Je pense que l'adoption de cette proposition sera sans l'ombre d'un doute dans l'intérêt de l'Organisation et de ses mandants.
Mme HOSTASCH (ministre du Travail, de la Santé et des Affaires sociales) -- ... Il nous faut maintenant définir nos objectifs. Il ne faut pas, dans le contexte actuel, sous-estimer l'importance des rapports sur les conventions non ratifiées où les Etats doivent exposer les raisons qui s'opposent à une ratification. Cependant, la défense des droits fondamentaux appelle des moyens plus puissants. La révision de la Constitution ne nous paraît ni constructive ni utile et, sur ce point, nous nous rangeons à l'avis du Bureau. En effet, les principes fondamentaux qui doivent être protégés figurent déjà dans la Constitution que tous les Etats Membres ont acceptée en adhérant à l'Organisation.
L'Autriche soutient donc davantage la proposition faite par le Directeur général d'élaborer sur une base consensuelle un document aux termes duquel les principes des conventions fondamentales pour la protection des droits des travailleurs s'imposeraient à tous les Etats Membres, indépendamment de toute ratification. Il appartiendra au Conseil d'administration et en tout état de cause à une session de la Conférence de discuter du point de savoir si la déclaration doit faire état du respect des principes des conventions ou entrer dans les détails.
Il faudrait également pendant ces discussions se demander si l'adoption d'une telle déclaration pourrait avoir une incidence négative sur la volonté et la motivation des pays à ratifier ces instruments.
La ratification est, en fin de compte, notre but ultime. Nous faisons nôtre l'idée selon laquelle le mécanisme de contrôle pourrait être calqué sur celui prévu par les conventions nos 87 et 98.
Mme MOXEY-INGRAHAM (ministre du Travail, de l'Immigration et de la Formation) -- ... Il est donc fondamental que la question des normes fondamentales soit traitée dans le cadre de cette libéralisation des échanges. Il est réconfortant cependant de noter que l'on a reconnu l'importance du problème à la Conférence de Singapour, mais aussi dans la Déclaration de Copenhague. Dans ce contexte, nous souscrivons fermement à certaines normes fondamentales comme la durée du travail et le salaire minimum, négociées généralement entre syndicats et employeurs. L'application de ces principes fondamentaux de l'OIT devrait être reconnue au niveau international, et l'OIT devrait concentrer ses efforts sur une échéance ferme et prendre des mesures pratiques permettant d'atteindre ces objectifs, de concert avec les organisations internationales, et notamment l'OMC.
Il en découle que nous appuyons entièrement la stratégie énoncée dans le rapport du Directeur général, à savoir qu'il faut exhorter les pays à garantir les droits universels en ratifiant les normes internationales du travail pertinentes. Ces principes, à leur tour, devraient être pleinement respectés et faire partie intégrante de tous les accords et les traités commerciaux multilatéraux.
J'ai donc l'honneur d'appuyer sans réserve les initiatives présentées dans le rapport du Directeur général.
M. AL SHO'ALA (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... Quatrièmement, la Constitution de l'OIT et la Déclaration de Philadelphie sont tout à fait claires. Nous n'avons pas besoin d'une nouvelle déclaration pour expliciter leurs objectifs. Au lieu de dédoubler les efforts sur des questions évidentes qui n'ont pas besoin d'explication, le Bureau international du Travail devrait respecter le principe de l'application progressive des normes internationales du travail, conformément aux possibilités et aux circonstances prévalant dans chaque pays, étudier la possibilité d'une ratification partielle des conventions internationales du travail et préparer les études nécessaires pour déterminer si les mécanismes actuels pour la supervision de l'application des normes internationales du travail ont réalisé les objectifs auxquels on s'attendait.
M. MANNAN (ministre du Travail) -- ... Or ce progrès social passe par la ratification des conventions de l'OIT. Les droits nationaux du travail doivent être alignés sur les normes internationales, à savoir les conventions de l'OIT.
M. MINTOO (délégué des employeurs) -- ... Toute action soutenue exige des moyens. L'adoption des conventions «fondamentales» ne suffit pas à assurer le progrès social.
Mme LYAKH (ministre du Travail) -- ... [L]e Bélarus souscrit à l'idée formulée par le Directeur général dans son rapport de tendre vers une application universelle des normes internationales fondamentales du travail. Nous plaidons pour l'adoption rapide par la Conférence d'une déclaration qui s'inscrirait dans le cadre de la Charte de l'OIT et qui préciserait les droits fondamentaux universellement reconnus qui s'imposeraient à tous les Etats Membres de l'Organisation, qu'ils aient ou non ratifié les conventions correspondantes. La déclaration devrait également prévoir les modalités de contrôle du respect des normes.
Il est important que ce mécanisme de contrôle soit établi compte tenu de tous les mécanismes déjà existants dans le cadre de l'OIT et de toutes les conséquences financières et organisationnelles qui en résulteront.
M. GONCHARIK (délégué des travailleurs) -- ... Il s'ensuit que la ratification des conventions de l'OIT ne suffit pas. Il est important que les Etats Membres de l'OIT respectent rigoureusement leurs obligations pour ce qui touche aux droits fondamentaux. C'est pourquoi nous approuvons l'idée de créer un mécanisme capable de garantir l'application de ces principes. A notre avis, il devrait être procédé à une étude approfondie de la situation sur le terrain et à une consultation de toutes les parties intéressées; des conclusions objectives seraient ensuite tirées, des recommandations formulées et un contrôle strict de leur application effectué.
Mme SMET (ministre de l'Emploi et du Travail) -- ... Mais notre tâche première est bien de prendre la mesure nécessaire pour assumer notre mission en ce qui concerne la promotion des normes fondamentales du travail. Je suis d'accord avec l'idée que la qualité de Membre de l'OIT impose des obligations minimales en ce qui concerne les normes fondamentales. J'appuie le projet d'une déclaration visant à légitimer un contrôle de l'application des normes fondamentales qui puisse concerner tous les Etats Membres. Nous devrions l'année prochaine décider les termes d'un renforcement du contrôle de ces normes.
M. PEIRENS (délégué des travailleurs) -- ... Il est temps de prévoir qu'un mécanisme à l'instar du Comité de la liberté syndicale puisse s'appliquer à d'autres conventions fondamentales qui doivent constituer un socle social mondial incontournable dans une perspective de développement humain durable.
Le renforcement de l'action sur les conventions fondamentales ne saurait aller sans dynamiser l'ensemble du travail normatif de l'OIT. La cohérence et l'interaction des conventions et principes doivent être maintenues et renforcées parce qu'elles constituent la seule garantie d'une action sociale équilibrée et efficace.
... En résumé, je me prononce en faveur d'une déclaration solennelle qui devrait avoir une portée constitutionnelle impliquant un système particulier et régulier de plaintes relatives aux conventions fondamentales, tel que je viens de l'exprimer.
M. TEMANE (ministre du Travail et des Affaires intérieures) -- ... Mais ce qui nous préoccupe en définitive au premier chef c'est que les normes internationales du travail, notamment les normes fondamentales, puissent être utilisées à des fins protectionnistes pour priver les pays en développement de leur avantage concurrentiel. Nous devons en effet nous rappeler que le monde dans lequel nous vivons est un monde d'inégalités où il y a des pays en développement, des pays développés, des économies grandes et petites, riches et pauvres. Il nous faut donc nous attendre à ce qu'il y ait des divergences de vues sur les mesures à prendre pour assurer le développement. Il nous faut rappeler que, même si des différences existent, notre sort à tous est lié. Nous demandons à nos collègues des pays développés de participer à notre réflexion pour faire en sorte qu'il ne soit pas fait obstacle à la libération des échanges quand il est clair que celle-ci peut faire reculer la pauvreté dans les économies en développement et assurer la prospérité du pays.
M. PAIVA (ministre du Travail) -- ... Le gouvernement du Brésil partage les préoccupations exprimées dans le rapport du Directeur général destiné à cette Conférence. Nous devrions rechercher les principes et mécanismes conçus dans le cadre des pouvoirs existants de l'OIT pour donner à l'Organisation un rôle plus important dans la mise en œuvre et le respect des conventions fondamentales, comme cela a été demandé par le Sommet social de Copenhague et lors de la Conférence ministérielle de l'OMC, qui s'est tenue à Singapour. Nous estimons que l'OIT pourrait engager une action tout à fait pertinente en cherchant à encourager les pays à mettre en œuvre directement les conventions fondamentales du travail par le biais d'un système de mesures d'accompagnement et d'assistance mutuelle.
M. OUEDRAOGO (délégué gouvernemental) -- ... C'est pourquoi mon pays adhère aux orientations majeures préconisées par le rapport du Directeur général pour guider l'action d'autres organisations communes dans les années à venir, à savoir:
Premièrement, assurer une plus grande universalité d'application des normes de l'Organisation internationale du Travail relatives aux droits fondamentaux, comme condition de la participation des travailleurs au bénéfice de la mondialisation.
... En ce qui concerne le premier aspect, le Burkina Faso est fier d'être parmi les pays qui ont ratifié les conventions pertinentes de l'Organisation internationale du Travail sur les droits fondamentaux de l'homme au travail. Nous demeurons convaincus que ces instruments ont un impact certain sur le développement économique et social et contribueront sans nul doute au renforcement du processus démocratique en cours dans notre pays. C'est pourquoi toutes ces conventions ont reçu plein effet dans la législation nationale, notamment dans le Code du travail.
... Exiger de tous les pays, sans distinction, le respect des droits fondamentaux de l'homme au travail est sans doute une condition nécessaire pour permettre à tous les travailleurs de profiter de la mondialisation, et la ratification par mon pays de conventions essentielles en la matière témoigne bien de l'adhésion du Burkina Faso à ces valeurs fondamentales.
Cependant, vous me permettrez d'exprimer quelques préoccupations à ce sujet. En effet, il est à craindre que l'introduction d'une conditionnalité sociale dans les relations économiques et commerciales ne pénalise les pays en développement, en particulier ceux d'Afrique, si elle n'est pas accompagnée par des mesures appropriées pour aider ces pays à asseoir des économies fortes et compétitives.
M. SUY (secrétaire d'Etat aux Affaires sociales, au Travail et aux Anciens combattants) -- ... Nous sommes d'accord qu'il faut renforcer le mécanisme de contrôle et le respect des conventions fondamentales de l'OIT en matière de droits de l'homme, et nous demandons à l'OIT de faire une déclaration solennelle destinée à réaffirmer le respect universel de ces droits fondamentaux des travailleurs par tous les Membres, que les conventions correspondantes aient été ratifiées ou non.
M. POISSON (délégué gouvernemental) -- ... Dans un premier temps, le Canada appuie sans réserve la proposition selon laquelle l'OIT devrait fournir à tous les pays un énoncé définitif sur les principes régissant les normes fondamentales du travail, et ce sous la forme d'une déclaration qui n'entraînerait aucun changement constitutionnel.
Deuxièmement, pour garantir que la déclaration ait l'effet escompté, il faudrait lui joindre une procédure de suivi, de rapport et de promotion. En effet, le but de la déclaration est d'étendre l'universalité de l'application des principes de base, et ainsi la procédure en question devrait être le point de départ pour recenser les obstacles à la mise en œuvre et mettre en lumière les cas de non-conformités chroniques.
Nous suggérons que le Directeur général soumette la version provisoire de la déclaration ainsi que des propositions concernant le suivi et la promotion à l'occasion de la réunion du Conseil d'administration qui aura lieu en novembre.
M. PARROT (délégué des travailleurs) -- ... [N]ous appuyons l'idée d'une déclaration qui contiendrait ces principes fondamentaux et qui serait adoptée lors d'une session à venir de la Conférence internationale du Travail. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'une déclaration n'est pas suffisante. Il faut que nous pensions aussi au renforcement de notre système de contrôle. Les gouvernements, lors du Sommet de Copenhague et de la réunion de Singapour, ont indiqué très clairement qu'il fallait que le Bureau international du Travail entreprenne de renforcer le système de contrôle et d'assurer l'application des principes fondamentaux de l'Organisation.
On sait que le Bureau international du Travail et l'Organisation elle-même perdraient toute crédibilité si nous n'étions pas en mesure d'y parvenir. C'est pourquoi il n'y a pas à hésiter. C'est pourquoi aussi les gouvernements qui ont tenu ce langage lors de la réunion de Singapour ou du Sommet de Copenhague doivent continuer de tenir ce langage à l'intérieur de cette maison afin de parvenir à un système de contrôle beaucoup plus efficace, qui permette de prononcer non seulement de belles paroles mais également d'assurer, en plus de ces belles paroles, que nous aurons un système beaucoup plus efficace pour l'application de tous ces principes fondamentaux.
... Enfin, je tiens à dire que, bien que le Directeur général garde le silence sur la question de la clause sociale et qu'il ait choisi plutôt de revenir sur le renforcement du système de contrôle et sur les moyens d'appliquer les normes qui ont été adoptées, surtout les normes fondamentales, pour le moment dans mon pays la clause sociale demeure un élément important pour y arriver. Nous considérons qu'il faut poursuivre le travail.
M. ARRATE MAC NIVEN (ministre du Travail et de la Prévoyance sociale) -- ... Premièrement, la grande action de l'avenir doit être axée sur les droits fondamentaux des travailleurs et sur le respect universel des droits de l'homme en matière de travail. Il faut pour cela faire des efforts conjugués pour garantir que tout travailleur qui veut se syndiquer puisse le faire sans obstacle, sans discrimination ni persécution; que tout travailleur qui désire s'associer pour négocier collectivement salaires et conditions de travail puisse le faire selon des modalités efficaces; qu'il n'existe dans le monde aucune forme de travail forcé; que le travail des enfants soit progressivement aboli et que nous condamnions en théorie et par une action pratique toute forme illégitime de discrimination dans l'emploi.
Cet effort exige, comme l'a dit le Directeur général dans son rapport, une convergence de vues sur de nouvelles formes de surveillance et de contrôle, faute de quoi notre Organisation n'aura pas la crédibilité et l'efficacité nécessaires et, en définitive, ce seront d'autres instances internationales, multilatérales ou régionales qui, de façon sans doute imparfaite, auront tendance à se substituer à l'OIT pour jouer le rôle qui lui revient.
Pour le Chili, il est évident que ces nouvelles formes de surveillance et de contrôle doivent garantir pleinement que les bénéfices du commerce libre pour les pays moins développés ne pourront pas être annulés par les décisions arbitraires d'autres Etats, encore moins s'il y a une intention protectionniste. Mon pays rejette toute action protectionniste fondée sur des intérêts étroits qui empêchent les pays les plus démunis de sortir de la pauvreté. Mon pays rejette également tout autre protectionnisme qui protège les privilèges et les injustices manifestes et empêche que les bénéfices du commerce et de la croissance soient répartis de façon équitable et aillent en particulier aux travailleurs et aux citoyens les plus humbles.
Sur ce point important, votre Organisation devra engager un dialogue conduisant à un consensus tripartite solide.
M. ARTHUR ERRAZURIZ (conseiller technique des employeurs) -- ... Nous appuyons l'effort consenti par l'OIT pour promouvoir les conventions fondamentales du travail et nous l'encourageons à perfectionner les mécanismes de contrôle afin qu'ils portent même sur les pays qui n'ont pas ratifié ces conventions.
M. ALARCON GOMEZ (délégué des travailleurs) -- ... Pour ce qui est du rapport du Directeur général, qui est le thème fondamental de cette intervention, nous partageons l'idée selon laquelle le lien entre la libéralisation du commerce et la protection des travailleurs passe par le respect des droits fondamentaux des travailleurs. Il est donc injustifiable que certains gouvernements se refusent a priori à ratifier les sept conventions fondamentales qui rendent compte de ces droits fondamentaux. Je tiens également à souligner l'initiative proposée dans le rapport du Directeur général concernant une déclaration solennelle ou une recommandation émanant de la Conférence pour établir de façon définitive des mécanismes réels de suivi permettant d'évaluer les efforts réalisés par les gouvernements pour élever jusqu'au plan social les progrès économiques dus à la libéralisation des échanges.
M. LI BOYONG (ministre du Travail) -- ... S'agissant du renforcement du contrôle des normes du travail fondamentales, nous sommes pour le respect très strict de la Constitution de l'OIT, et non pas pour une interprétation matérialiste de cette Constitution. Certains pensent que, pour mieux appliquer les normes fondamentales du travail, on doit avoir un mécanisme nouveau, y compris la formulation et l'adoption d'une déclaration des principes de base, par exemple, en plus des procédures de contrôle déjà existantes.
Cette proposition vise à forcer les Membres qui n'ont pas ratifié telle ou telle norme à s'acquitter des mêmes obligations que ceux qui l'ont ratifiée. Ce qui est contraire aux dispositions de la Constitution. Ce type de pratique qui revient à imposer des normes du travail par un moyen de pression ne peut qu'intensifier les différends et nous éloigner de notre objectif. Nous sommes résolument opposés à toute tentative qui transformerait l'OIT en un tribunal international.
M. LI QISHENG (délégué des travailleurs) -- ... Nous sommes favorables à un renforcement et à une amélioration des mécanismes de contrôle. Encore ne faudrait-il pas en faire un usage abusif. Le principe d'impartialité doit être profondément ancré dans le système si l'on veut éviter que les protectionnistes ne s'emparent des normes comme d'un prétexte pour s'en prendre aux intérêts vitaux des travailleurs de divers pays et, en particulier, des pays en développement.
M. MOUSHOUTTAS (ministre du Travail et de la Santé) -- ... Sur le principe, nous serions d'accord avec l'idée d'une déclaration qui s'accompagnerait d'une procédure de suivi. Toutefois, en cherchant à assurer une plus grande universalité aux droits fondamentaux, on doit veiller soigneusement à ne pas saper d'autres droits ni réduire à néant l'avantage comparatif de pays qui, quoique n'ayant pas ratifié ce que l'on appelle les conventions fondamentales, œuvrent en ce sens en toute bonne foi.
M. ANTONIOU (délégué des travailleurs) -- ... [N]otre objectif doit être de mettre le progrès social en relation avec le progrès économique qui devrait découler de la libéralisation des échanges.
Afin d'arriver à ce développement, il faut que l'on reconnaisse universellement un certain nombre de droits fondamentaux qui permettraient aux partenaires sociaux de partager équitablement les avantages qui découlent de la mondialisation.
M. CASTRO GUERRERO (délégué gouvernemental) -- ... La Colombie, au nom des 113 Etats membres du Mouvement des non-alignés et de certains Etats observateurs auprès du Mouvement, y compris la Chine, souhaite vous présenter le document suivant, approuvé au cours de la réunion des ministres du Travail, qui s'est tenue le 10 juin 1997, avec des réserves émises par le Chili, la Jamaïque, l'Afrique du Sud et le Venezuela. Il s'agit d'une réponse au rapport du Directeur général intitulé «L'action normative de l'OIT à l'heure de la mondialisation».
Le Mouvement des non-alignés accorde la plus grande importance au rôle qui incombe à l'OIT en matière d'action normative et de promotion des normes du travail, et nous tenons à réaffirmer l'engagement que nous avons pris de respecter les normes fondamentales du travail reconnues sur le plan international.
... Les instruments de l'OIT ont été ratifiés par les Etats sur une base volontaire. Toute proposition de déclaration sur les normes fondamentales du travail ne doit pas être contraignante sur le plan juridique. Le moyen le plus efficace de garantir le respect des normes du travail améliorées est la ratification universelle des conventions fondamentales.
... Fidèles à cet engagement, qui est de promouvoir les normes du travail conformément à la Constitution de l'OIT, nous pourrions adopter la stratégie suivante pour faire avancer la discussion sur le thème.
Première priorité: promouvoir la ratification universelle des normes fondamentales du travail.
Deuxième priorité: faire appliquer les normes fondamentales du travail.
Troisième priorité: renforcer les mécanismes de contrôle de l'OIT, qui doivent permettre de garantir l'objectivité, l'impartialité et la transparence du système.
Quatrième priorité: encourager l'action internationale.
Enfin, Madame la Présidente, le rapport du Directeur général appelle un examen plus approfondi de la part du Conseil d'administration du BIT, compte tenu des points de vue exprimés dans cette déclaration.
M. GARZON (délégué des travailleurs) -- ... Il est paradoxal que les gouvernements et les employeurs des pays en développement contestent le rapport du Directeur général alors qu'ils devraient se féliciter de l'audace des propositions qu'il offre pour établir, à partir de l'OIT, un contrôle social qui précisément prétend protéger les pays en développement, comme en témoigne l'impact du modèle actuel dans ces pays. Sans vouloir, en disant cela, appuyer les prétentions des pays développés, il semble que la position de ces derniers soit plus logique que ne l'est celle des pays en développement.
Nous n'hésitons pas à faire nôtres les propositions faites par le Directeur général. Depuis six ans, nous insistons sur la nécessité de donner à ces processus dits d'intégration régionale une dimension sociale. Dans le cas de la région andine, les gouvernements et les employeurs ne s'en sont pas du tout occupés. Le Sommet social de Copenhague et les différentes initiatives d'intérêt pour le monde qui en ont découlé ont suscité en nous beaucoup d'espoir. Et, maintenant, alors qu'à la dernière réunion de l'Organisation mondiale du commerce à Singapour l'OIT a été clairement identifiée comme l'organisme compétent pour élaborer les normes qui régissent les droits fondamentaux des travailleurs reconnus à l'échelle internationale, en se fondant sur diverses interprétations, on cherche à renvoyer à plus tard, voire à liquider, toute tentative de réglementer ou de contrôler le processus de libéralisation des échanges pour préserver les garanties sociales.
M. CHO (délégué des employeurs) -- ... Il est encourageant de constater que la campagne de ratification de l'OIT a été couronnée d'un succès remarquable. La décision, prise par le Conseil d'administration de demander aux Etats Membres de soumettre des rapports sur les conventions fondamentales à des intervalles plus fréquents, ne peut qu'encourager les Etats à les ratifier. Une déclaration relative aux grands principes des conventions fondamentales peut être envisagée. Un autre mécanisme de contrôle de l'application des conventions ratifiées ou non ratifiées pourrait faire l'objet d'une discussion sous la forme d'un rapport présenté par le Directeur général sur le progrès social dans le monde. Toutefois, ces mesures devraient être adoptées dans le cadre de la Constitution.
M. PARK (délégué des travailleurs) -- ... La Corée, quant à elle, n'a ratifié aucune des conventions fondamentales. Je suis favorable à une déclaration de la Conférence sur les droits fondamentaux et à un rapport régulier du Directeur général sur le progrès social, car cela ne peut que promouvoir les instruments du progrès social.
M. AYALES ESNA (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Si la mondialisation de l'économie a fait tomber les frontières nationales et si notre cadre de référence n'est plus constitué par les économies nationales mais par les marchés mondiaux, les relations professionnelles, influencées par cet environnement international, doivent aussi être réglementées par un droit international du travail, dont la base fondamentale devrait être les conventions adoptées par l'OIT.
... Nous appuyons la proposition visant la ratification non seulement des conventions fondamentales de l'OIT, mais aussi des normes qui permettent aux populations de vivre et de travailler dans la dignité.
M. ATSAIN ACHI (ministre de l'Emploi, de la Fonction publique et de la Prévoyance sociale) -- ... Certes, aucun pays africain ne se déclare défavorable au renforcement de la capacité de l'OIT à accentuer les actions normatives et à dresser périodiquement des rapports sur le non-respect des engagements auxquels ses mandants ont librement souscrit.
Mais recourir aux normes fondamentales qui s'identifient à une conditionnalité déguisée d'accès aux marchés internationaux constituerait une annihilation des efforts de redressement économique indispensables à l'accélération du progrès social dans les pays de la région africaine. Il est dans le mandat de l'OIT d'élargir son champ de réflexion en vue d'élaborer de nouvelles normes dans ce contexte.
Dans cette perspective, l'action normative devrait tendre à développer les instruments socialement pertinents mais politiquement réalisables et applicables. Cette démarche appelle une constante et permanente consultation de tous les Membres afin de parvenir au consensus volontariste qui constitue le fondement de notre Organisation.
M. VALDES MESA (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Une résolution ou une déclaration, qui ne prend pas en compte comme principes à défendre et à respecter l'ensemble des droits qui ont fait l'objet des revendications des travailleurs au cours de l'histoire, pourrait affaiblir l'impact des normes internationales du travail qui restent en dehors de cette conception limitée à un certain nombre de conventions considérées comme fondamentales.
Mme ANDERSEN (ministre du Travail) -- ... Je crois qu'il serait normal que les Etats Membres soient également tenus de respecter tous les droits fondamentaux des travailleurs. Outre ces deux conventions [sur la liberté d'association et la négociation collective], il y a aussi les concepts de la non-discrimination, de l'interdiction du travail des enfants, de l'égalité de traitement et de l'interdiction des travaux forcés.
Ceci pourrait être fait par l'adoption d'une déclaration visant à amender la Constitution de l'OIT. J'espère qu'une telle déclaration pourra être adoptée lors de la Conférence de l'année prochaine.
M. RONNEST (délégué des employeurs) -- ... Ce qui est nouveau, c'est l'idée d'imposer des obligations aux Etats Membres et par conséquent aux employeurs et aux travailleurs des Etats Membres -- obligations qui doivent être définies par l'OIT et qui ne suivent pas les procédures juridiques établies à l'OIT et dans les Etats Membres.
Il incombe à l'OIT de définir un nouvel ensemble de principes qui devraient être respectés par tous. Elle doit établir un nouveau mécanisme de contrôle et créer un système de «label social» fondé sur une déclaration de principes.
Il ne s'agit pas seulement d'un plan ambitieux mais également d'un plan controversé, qui manque probablement de réalisme. Ce plan est surtout décrit en termes si généraux qu'il est pratiquement impossible d'en saisir l'intention cachée et l'objectif réel et d'entrevoir comment il pourra être traduit dans la réalité ou ce qu'il signifiera pour le marché du travail, pour l'emploi et pour les entreprises. Ce dernier point ne semble pas avoir préoccupé grand monde.
M. ALBURQUERQUE (secrétaire d'Etat au Travail) -- ... Le Directeur général nous donne une réponse lorsqu'il propose dans son rapport annuel que les Etats Membres s'engagent à respecter certaines normes fondamentales et irréductibles comme, par exemple, la liberté syndicale et la négociation collective, l'interdiction du travail forcé, y compris la lutte contre le travail des enfants, l'âge minimum de l'admission au travail, l'égalité de traitement et la non-discrimination.
La proposition du Directeur général ne concerne que les droits qui doivent être reconnus universellement. Elle écarte ainsi d'emblée les prétentions de certains pays qui veulent priver les pays en développement des avantages qu'ils pourraient tirer du bas niveau de leurs salaires ou de leurs coûts sociaux.
Cette idée est partagée par le gouvernement de la République dominicaine qui, à tout moment, a soutenu qu'il voulait promouvoir le changement et s'insérer dans le processus de mondialisation tout en garantissant le respect des droits fondamentaux de ceux qui offrent leurs services en échange d'un salaire.
... Toutefois, la ratification de ces conventions de l'OIT ou une déclaration solennelle du respect des droits ne suffit pas pour assurer le progrès social. Il faut aussi mettre en œuvre des mécanismes qui permettent de suivre objectivement l'application effective de ces principes fondamentaux afin que l'opinion publique puisse apprécier les efforts déployés par chaque Etat en vue de traduire sur le plan social les progrès économiques dus à la libéralisation du commerce.
M. EL AMAWY (ministre de la Main-d'œuvre et de l'Immigration) -- ... Tout mécanisme de contrôle de l'application des instruments internationaux doit reposer sur le consentement exprès des Etats car seule la ratification crée des obligations en vertu de la Convention de Vienne sur le droit des traités. C'est pourquoi la proposition qui est faite dans le rapport du Directeur général d'adopter un mécanisme de contrôle indépendant de toute ratification constitue un antécédent grave et anticonstitutionnel qu'on ne saurait accepter. Il faut absolument insister sur la ratification des conventions fondamentales et leur application.
... Le mécanisme de contrôle de l'Organisation dispose de plusieurs moyens adaptés et efficaces pour renforcer l'application des conventions fondamentales du travail, dont l'article 19.5 e) de la Constitution, qui stipule que chaque Etat a le droit de ratifier ou non les conventions de l'Organisation, mais qu'il a aussi l'obligation de soumettre un rapport sur l'état de sa législation et sur sa pratique dans les domaines visés par les conventions.
... Le mécanisme de contrôle qui existe est suffisant. La majorité des délégations gouvernementales partage notre avis. Il est inutile et juridiquement difficile d'adopter un mécanisme spécial de contrôle pour certaines conventions.
La proposition concernant l'adoption, par la Conférence, d'une déclaration qui préciserait les droits fondamentaux que tous les pays Membres de l'Organisation devraient respecter, qu'ils aient ou non ratifié les conventions correspondantes, et qui instituerait un mécanisme pour garantir leur promotion, n'a aucune base constitutionnelle. On ne peut pas imposer aux Etats Membres de l'Organisation d'autres obligations que celles qui découlent des conventions qu'ils ont ratifiées.
M. MONGY (conseiller technique des travailleurs) -- ... Nous apportons notre appui à la plupart des propositions du Directeur général en vue de renforcer les procédures et mécanismes de contrôle des normes internationales de travail. Nous appuyons cependant tout ceci, mais nous avons des réserves à émettre, surtout pour ce qui est des mécanismes de contrôle.
M. TOMASINO HURTADO (ministre du Travail et de la Prévoyance sociale) -- ... Nous pensons d'ailleurs que la clause sociale, dont on parle tant, doit être prise en compte par les Etats Membres à condition que celle-ci se limite à la protection des droits fondamentaux des travailleurs et que, par ailleurs, l'application de cette clause sociale soit supervisée localement par les gouvernements et, au plan international, par l'OIT sans pour autant que cela constitue un obstacle aux opérations commerciales internationales, ce qui porterait atteinte au progrès social accompli grâce à la mondialisation.
M. AL TAYER (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... [N]ous estimons que le système de suivi des normes et la Constitution actuelle de l'Organisation ne nécessitent pas de nouvelles mesures ou nouveaux mécanismes. Ce système est objectif et non discriminatoire, ce qui lui a valu une grande crédibilité auprès des Etats Membres.
M. RIVADENEYRA ORCES (ministre du Travail et des Ressources humaines) -- ... [P]ermettez-moi de vous indiquer que mon gouvernement est en mesure d'appuyer les propositions exposées par le Directeur général dans son rapport au sujet de la garantie universelle des droits fondamentaux des travailleurs dans le contexte de l'emploi, et notamment les efforts entrepris par le Conseil d'administration. Il s'agirait de formuler un texte solennel qui réaffirmerait les principes essentiels de l'Organisation et qui établirait un mécanisme de suivi efficace et peu coûteux.
M. ARENAS BOCANEGRA (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... Nous appuyons donc la proposition du Directeur général tendant à revitaliser le système des normes internationales du travail. Nous nous sommes engagés à respecter les principes de la Constitution de l'OIT et de la Déclaration de Philadelphie qui énoncent des obligations que doivent respecter tous les Etats Membres. ... Il incombe à l'OIT de trouver un cadre juridique qui garantisse que la mondialisation et la libéralisation des échanges aillent toujours de pair avec le progrès social et l'amélioration des conditions de vie et de travail.
... [N]ous sommes convaincus qu'il faut observer, à l'échelon universel, les droits de l'homme au travail énoncés dans les conventions sur la négociation collective, la liberté syndicale, l'interdiction du travail forcé, l'absence de discrimination et l'âge minimum d'admission au travail. Nous sommes en outre convaincus de la nécessité pour l'OIT d'accroître sa campagne visant à augmenter le nombre des ratifications.
Parmi diverses initiatives, je tiens à souligner celle qui concerne l'élaboration de la discussion d'un projet de déclaration solennelle qui, comme cela s'est passé pour la Déclaration de Philadelphie, permettrait de définir clairement les obligations des Etats Membres de l'OIT concernant les droits sociaux fondamentaux.
M. JIMENEZ AGUILAR (conseiller technique des employeurs) -- ... Il importe maintenant de réfléchir sur l'avenir des normes internationales du travail et sur la nécessité de les adapter à la réalité de la mondialisation des marchés et des facteurs de production. La priorité de l'OIT doit être la protection des droits fondamentaux des travailleurs et des employeurs... Il faut donc adopter une nouvelle politique normative fondée sur la subsidiarité, qui renforce l'efficacité de l'OIT dans le cadre des droits fondamentaux, qui contribue à moderniser les instruments afin qu'ils puissent être dûment appliqués et qu'ils ne freinent pas la création d'emplois.
Mme ARO (ministre des Affaires sociales) -- ... J'appuie sans réserve la proposition du Directeur général ... qui vise à améliorer le contrôle de l'application des normes fondamentales, proposition qui prend toute son importance dans le contexte actuel de la libéralisation des échanges et de la mondialisation de l'économie. La libéralisation ne saurait être dissociée du développement social. Le libre-échange et l'internationalisation croissante du marché du travail présupposent la mise en œuvre des normes fondamentales du travail par tous les Etats...
... La meilleure façon de renforcer le système de contrôle sera d'adopter une déclaration qui définisse un accord commun et prévoie différentes possibilités d'amélioration du système de contrôle existant.
L'adoption de cette déclaration serait la façon la plus rapide d'améliorer le système de contrôle, car la mise en œuvre d'un amendement de Constitution de l'OIT réclame au préalable un certain nombre de ratifications d'Etats Membres.
M. SAMET (délégué gouvernemental) -- ... Rappelons-nous que nous discutons ici de ce que nous devons faire pour assurer une application plus large des normes fondamentales du travail. C'est là notre tâche principale. Ces normes sont maintenant parfaitement comprises et bien acceptées. Elles comprennent la liberté d'association, le droit à la négociation collective, l'interdiction du travail forcé et du travail des enfants, le principe de non-discrimination dans le travail.
Rappelons-nous également que l'OCDE et notre propre groupe de travail ont largement discuté des aspects économiques de la question, et nous avons appris tout ce que la science économique paraissait pouvoir nous apprendre, à savoir, primo, que la libéralisation du commerce et les normes du travail fondamentales se renforcent mutuellement en termes d'avantages économiques; secundo, que la mise en œuvre de ces normes fondamentales du travail est dans l'intérêt de toutes les économies, quel que soit leur niveau de développement. Nous ne pouvons pas dire que nos moyens ne nous permettent pas d'appliquer ces normes; en fait, nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas les mettre en œuvre.
Rappelons-nous également que, pour la première fois depuis la création du GATT -- de l'OMC désormais --, il y a cinquante ans, les ministres du Commerce du monde entier réunis à Singapour ont reconnu que l'application des normes fondamentales du travail était importante pour les objectifs du programme commercial du monde, et ils se sont engagés à leur apporter leur appui. Par ailleurs, les déclarations de nos ministres du Commerce ont sans doute mis un terme aux fausses allégations de protectionnisme ou aux arguments sans fondement sur le niveau des salaires.
... Mon gouvernement estime qu'il faut aller de l'avant sur les trois points suivants.
D'abord, nous devons nous engager, par une déclaration par exemple, à respecter les normes fondamentales du travail, que nous les ayions ou non ratifiées.
Deuxièmement, nous devons répondre de notre adhésion à ces droits fondamentaux en instituant un nouveau mécanisme de supervision.
Troisièmement, nous devons donner un sens concret à cette responsabilité en encourageant, par l'attribution d'un label, l'application des normes et en dissuadant d'y contrevenir de façon délibérée.
M. POTTER (délégué des employeurs) -- ... Le travail forcé des enfants, la discrimination rampante, l'absence de liberté syndicale, le défaut permanent d'application des législations du travail et de l'emploi -- voilà des situations choquantes qui devraient faire l'objet d'une déclaration de principes solennelle.
Ces principes seraient distincts des conventions fondamentales et des observations faites par les organes de contrôle. Ils feraient l'objet d'une procédure de plainte auprès du Conseil d'administration, qui serait la première instance à se déterminer. Il s'agirait d'une procédure politique parallèle qui ne supplanterait pas les procédures existantes.
Les questions essentielles seraient: a) le pays intéressé se conforme-t-il aux principes généraux ou s'obstine-t-il à les violer? b) le pays applique-t-il sa législation du travail? c) dans le cas des pays en développement, le pays progresse-t-il dans l'application des principes?
M. GRAY (délégué des travailleurs) -- ... Il est vital que la Conférence s'engage à mettre en œuvre de nouveaux mécanismes qui renforceront la capacité de l'OIT de réellement contrôler l'application par tous les gouvernements des conventions fondamentales, qu'ils les aient ou non ratifiées. Toute hésitation à ce stade ne ferait qu'affaiblir l'objectif et la crédibilité de l'OIT ainsi que celle du système multilatéral. Tous les gouvernements et les employeurs doivent le reconnaître, les enjeux sont énormes. Nous devons ensemble dégager un consensus pour aller de l'avant avec conviction. L'économie mondiale nécessite un internationalisme de progrès, qui se donne pour mission de se doter d'une économie qui marche pour les travailleurs. Par exemple, il faut accorder aux droits des travailleurs la même importance qu'à la protection des biens dans les accords commerciaux avec la Banque mondiale, la conditionnalité du Fonds monétaire international, la réglementation commerciale de l'Organisation mondiale du commerce.
Toute notre expérience montre que c'est en partageant les richesses avec ceux qui les produisent que l'on crée les fondements d'une démocratie et d'une justice sociale durables, et que l'humanité peut réaliser son potentiel de progrès. Cette même expérience montre que la meilleure façon d'y parvenir est de garantir les droits fondamentaux des travailleurs.
M. LOBENDAHN (ministre du Travail et des Relations professionnelles) -- ... [N]ous ne saurions présumer que l'économie mondiale se soumettra à un ensemble de règles, notamment dans le domaine social. Un changement social est nécessaire et nous devrions être prêts à respecter certaines règles fondamentales établies avec l'accord des Etats Membres.
Voilà ce que nous pourrions appeler le cadre social pour le développement international, qui doit être développé dans le cadre des procédures de l'Organisation internationale du Travail. Nous pourrions commencer par un engagement irréductible en faveur de certaines conventions internationales du travail que tous accepteraient d'appliquer.
Mme JAAKONSAARI (ministre du Travail) -- ... Les droits fondamentaux des travailleurs doivent être universellement respectés, et nous devons veiller à ce que la prospérité économique que peut engendrer le développement soit équitablement répartie.
Je souscris à la proposition qui vise à incorporer les principes des droits fondamentaux des travailleurs dans une déclaration ou dans une charte que la Conférence internationale du Travail pourrait approuver dans un proche avenir.
Il est urgent que les gouvernements, les partenaires sociaux et les entreprises renouvellent leur engagement de travailler ensemble pour promouvoir la productivité, la compétitivité, l'emploi et lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons contribuer à la mise en application des engagements pris lors du Sommet de Copenhague et œuvrer en faveur du progrès social et de la justice sociale, les véritables objectifs de cette Organisation.
... Il importe d'instaurer une procédure de suivi, mieux ciblée sur les problèmes, comme le propose le Directeur général. Celle-ci permettrait de façon concrète de suivre les progrès accomplis dans le respect des droits fondamentaux des travailleurs à l'échelle du monde entier.
M. RISKI (délégué des employeurs) -- ... Dans son rapport, le Directeur général essaie de voir comment on pourrait augmenter le nombre de ratifications des conventions dites fondamentales. L'une de ses principales propositions consiste à modifier les conditions d'adhésion. L'OIT a une Constitution tout comme ses Etats Membres. En Finlande, du moins, un accord international n'est accepté et reconnu en tant qu'obligation nationale qu'après avoir fait l'objet d'une décision d'ordre constitutionnel. Donc, je ne vois pas comment on pourra donner aux règles de l'OIT une nouvelle interprétation qui ne respecte pas ou ignore ce processus national de prise de décisions. Ni comment une nouvelle déclaration pourra, même si elle ne contient que des principes, devenir obligatoire sans l'acceptation et les décisions appropriées au niveau national.
Mlle VALKONEN (déléguée des travailleurs) -- ... [J]'appuie la préparation d'une déclaration sur les principes clés. Il est important maintenant, après la réunion des ministres du Commerce qui s'est tenue à Singapour, de nous mettre d'accord sur la teneur de ces principes. Le point de référence devrait être les engagements pris au Sommet social de Copenhague en 1995.
La liberté d'association, la non-discrimination -- qui inclut les principes d'égalité entre les hommes et les femmes -- et l'abolition du travail forcé et du travail des enfants constituent un noyau autour duquel il semblerait qu'un accord universel soit intervenu. Il est important de reconnaître que ces principes sont liés les uns aux autres. Si l'un de ces principes n'est pas respecté, les autres s'en trouvent sérieusement affaiblis.
Toutefois, négocier une déclaration qui sera adoptée dans un an n'est pas suffisant. Nous devons également essayer de voir ensemble à quoi cette déclaration nous mènerait. Il faudra modifier le système actuel afin d'englober les pays qui, jusqu'ici, n'ont pas ratifié les conventions sur, ou plutôt, contre la discrimination et le travail forcé et le travail des enfants. Je pense que ce travail pourrait être fait par le Conseil d'administration, et c'est une question qu'il faudra aborder l'esprit ouvert.
Il se peut fort bien qu'en fin de compte l'on constate qu'il n'est pas nécessaire d'apporter beaucoup de changements au système. Des procédures améliorées et des ajustements au système actuel pourraient s'avérer suffisants. On aiderait ainsi tous les pays à remplir leurs obligations constitutionnelles fondamentales.
M. CHOTARD (délégué gouvernemental) -- ... Comment bâtir un socle de droits fondamentaux de l'homme au travail qui soit réellement universel?
... J'aborderai en second lieu l'essentiel, c'est-à-dire les droits fondamentaux des travailleurs. Je ne peux que dire, une fois de plus, tout le prix que mon pays attache à ce qu'une déclaration solennelle puisse être adoptée lors de la prochaine session de la Conférence, déclaration qui soit la réponse des Etats adhérents de l'OIT aux appels lancés à Copenhague et à Singapour.
Dans cet esprit, l'action de persuasion du Bureau en vue de la ratification des normes internationales doit être poursuivie.
M. BOUSSAT (conseiller technique des employeurs) -- ... La déclaration solennelle de 1998 se devrait d'être didactique et pragmatique à la fois. Elle devrait proposer plusieurs méthodes pour tenir compte des situations tant économiques que socioculturelles des Etats. Cette déclaration devrait parler du développement des droits fondamentaux plutôt que de la défense de ces droits. Il s'agit de les promouvoir, il s'agit d'y faire adhérer.
M. DELHOMENIE (délégué des travailleurs) -- ... Le respect des règles universelles, l'adoption d'une déclaration solennelle, l'évaluation du progrès social, l'idée d'un label social global sont autant de pistes qu'il convient d'approfondir. Toutes ces idées ne sont pas et ne doivent pas être imaginées, mises en œuvre comme des instruments d'un protectionnisme des pays industrialisés au détriment des autres. Travailleurs des pays industrialisés, pays qui renferment encore beaucoup d'inégalités dont la plus importante reste le chômage, nous voulons que l'ensemble de la population mondiale puisse bénéficier progressivement des droits fondamentaux qui sont la raison d'être de notre Organisation tripartite.
M. PAPAIOANNOU (ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Grèce) -- ... Permettez-moi encore de faire remarquer que la déclaration solennelle proposée, qui codifiera les principes constitutionnels de l'OIT, ainsi que l'idée d'une convention internationale du travail sur le label social global constitueraient les points de départ de l'action des Etats Membres afin de faire reconnaître la dimension sociale de l'économie.
M. MODU AKUSE BINDANG (ministre d'Etat du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Au nom de la République de Guinée équatoriale, j'exprime l'espoir que cette 85e session de la Conférence internationale du Travail adoptera un texte solennel qui récapitule les principes essentiels et établisse les mécanismes de suivi périodique du progrès social dans le monde.
M. PIERRE (délégué des travailleurs) -- ... A l'instar du Directeur général, nous pensons que la mondialisation ne peut être laissée à elle-même. C'est pourquoi nous appuyons sa proposition suggérant à la Conférence de récapituler, par le truchement d'un texte ou éventuellement d'une recommandation, les principes essentiels et d'établir un mécanisme de suivi sous la forme d'un rapport périodique sur le progrès social dans le monde, suivi d'un débat politique.
M. KISS (ministre du Travail) -- ... Nous adhérons également à la déclaration sur le respect universel des conventions sur les droits fondamentaux des travailleurs.
M. ARUNACHALAM (ministre du Travail) -- ... Le meilleur moyen d'obtenir le respect des normes du travail est de faire ratifier par tous les conventions fondamentales. La proposition qui a été faite d'adopter une déclaration sur les normes fondamentales et d'élargir le champ d'application de la procédure spéciale réservée à la liberté syndicale remettrait en cause le caractère facultatif de la ratification des conventions de l'OIT. Si la procédure actuelle de contrôle est inadéquate, nous devons nous reporter à la Constitution de l'OIT pour trouver des voies de recours efficaces. Nous sommes bien conscients de la nécessité d'engager une action aux niveaux national et international pour traiter des problèmes liés au progrès social comme les questions d'environnement, la santé et la sécurité dans le travail, etc.
Cependant, nous avons relevé, avec inquiétude, une tendance de plus en plus marquée des organisations internationales faisant partie du système des Nations Unies à s'arroger des compétences étrangères à leur mission et à empiéter sur le domaine de compétence d'autrui. Il y a dès lors un chevauchement des fonctions et des responsabilités qui complique inutilement la tâche des gouvernements qui sont obligés de présenter à différentes organisations des rapports sur le même sujet. Toutes les questions relatives aux normes internationales du travail devraient être exclusivement du ressort de l'OIT.
M. KOHLI (délégué des employeurs) -- ... Ces normes [fondamentales du travail] ont déjà été répertoriées et doivent sans aucun doute être respectées, mais les employeurs de l'Inde n'aimeraient, en revanche, pas que le Comité de la liberté syndicale se réunisse ou que des plaintes puissent être déposées concernant le non-respect de ces normes fondamentales dans des pays qui n'ont pas ratifié les conventions correspondantes.
En revanche, il est temps d'établir une stratégie de promotion des normes du travail fondamentales qui complète la procédure établie concernant la liberté syndicale.
M. LATIEF (ministre de la Main-d'œuvre) -- ... A cet égard, je voudrais réitérer que l'OIT est une association volontaire de gouvernements et ne saurait imposer aux Etats Membres la ratification de ces normes et recommandations. Toute tentative allant dans ce sens constituerait une violation flagrante de ce principe fondamental du droit international qu'est le respect de la souveraineté des Etats.
Ma délégation ne peut que souscrire aux efforts entrepris pour faire ratifier toujours plus de conventions de l'OIT pour autant de Membres que possible, tout en aidant les Etats Membres à surmonter les difficultés qu'ils rencontrent dans la poursuite de cet objectif. Par ailleurs, cela réduira la nécessité de recourir à des sanctions, ce dont on ne peut que se féliciter, les sanctions créant un climat de tension qui nuit aux intérêts des travailleurs. Nous devons par ailleurs relever que malheureusement certains pays, notamment des pays développés, pratiquent à cet égard deux poids et deux mesures.
Le commerce international et l'application des normes du travail sont deux questions différentes pour lesquelles deux institutions différentes sont compétentes. Bien que liées entre elles, il y a des cas où elles devraient être examinées séparément. L'OMC et d'autres organisations apparentées ont pour mandat de s'occuper du commerce international et d'évaluer les défaillances des mécanismes des échanges. L'Indonésie considère que les tentatives faites pour lier les normes du travail aux avantages comparatifs des pays en développement dans un monde d'échanges commerciaux libres sont en contradiction avec les accords conclus et les décisions prises, tels qu'ils sont énoncés dans la Déclaration ministérielle de la réunion de l'OMC de Singapour.
M. KAMALI (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... Certains pays développés, obsédés par l'incidence à court terme de la libéralisation du commerce international, souhaitent profiter de ces préoccupations sociales pour revenir au protectionnisme. Ces pays proposent de nouvelles mesures pour défendre leur politique protectionniste dans les secteurs où ils ne disposent pas d'avantages comparatifs. Pour parler clairement, nous ne nous opposons pas aux mesures prises en faveur de l'amélioration des conditions de travail et de la protection des droits des travailleurs. Ce que nous ne voulons pas, c'est que l'on prenne prétexte des préoccupations sociales pour défendre les intérêts nationaux à court terme.
Mlle FITZGERALD (ministre du Travail) -- ... Premièrement, personne ne contestera que, même si la Constitution de l'OIT ne fait aucune distinction entre les différentes normes, on est parvenu à une large convergence de vues sur la notion de normes fondamentales du travail. Il nous faut une approche plus ciblée, comme l'a suggéré le Directeur général, si nous voulons atteindre nos objectifs.
Deuxièmement, quels moyens faut-il adopter pour réaliser des progrès en la matière? Il y a deux possibilités: mettre au point de nouveaux instruments et modifier la Constitution de l'OIT ou continuer avec la Constitution actuelle. Nous pensons que, si nous conservons la Constitution actuelle, nous réunirons le consensus dont nous avons tant besoin.
M. KRISTINSSON (délégué gouvernemental) -- ... Nous avons toutes les raisons de soutenir l'opinion selon laquelle la Constitution de l'OIT et la qualité de Membre de l'OIT impliquent un engagement à l'égard de la concession des droits fondamentaux à des travailleurs non seulement à l'échelon national, mais dans toutes les parties du monde. Ces droits sont garantis par plusieurs conventions fondamentales. Les mesures prises par le Directeur général pour encourager la ratification de ces conventions doivent être saluées.
... Le rapport du Directeur général propose que la Conférence internationale du Travail adopte une déclaration précise indiquant que les Etats Membres devraient renouveler leurs engagements découlant de leur qualité de Membres de l'OIT. C'est là une proposition intéressante que nous entérinons, et je voudrais me joindre à tous ceux qui ont exprimé l'espoir qu'une telle déclaration pourrait être adoptée par la prochaine session de la CIT.
Mme STEFÁNSDÓTTIR (déléguée des employeurs) -- ... Le Directeur général traite dans son rapport des droits fondamentaux fondés sur certaines conventions qui doivent être garantis à tous les travailleurs. A mon sens, cela ne peut se faire que sur une base volontaire. J'ai quelques doutes concernant la nouvelle interprétation de la Constitution: je ne pense pas que tous les Etats Membres considéreront qu'elle a force obligatoire.
J'ai également quelques doutes quant au principe d'un mécanisme spécial de supervision qui s'appliquerait aux droits fondamentaux.
M. TREU (ministre du Travail) -- ... [L]e gouvernement italien estime que l'Organisation a l'expérience et l'autorité nécessaires pour s'acquitter pleinement de son rôle traditionnel et des responsabilités nouvelles qui lui incombent dans un monde nouveau. Le rapport du Directeur général contient certaines propositions qui lui paraissent opportunes, réalistes et utiles. Il souscrit à l'idée d'une déclaration qui définirait de façon explicite des principes de base et des normes fondamentales que la Constitution de l'OIT énonce de façon implicite, et qui devraient être considérés comme un objectif à atteindre par tous les secteurs et tous les marchés. Il importe que l'OIT joue un rôle plus synergique dans la définition et la promotion de ces principes, afin de réduire le risque d'initiatives unilatérales et protectionnistes. En effet, un protectionnisme unilatéral peut conférer à certains pays des avantages de courte durée qui ne peuvent cependant que nuire à long terme au développement de tous en sapant l'approche consensuelle indispensable à la réalisation des objectifs communs.
Mme SASSO MAZZUFERI (déléguée des employeurs) -- ... [L]a reconnaissance du rôle spécifique et unique de l'OIT en matière sociale comporte l'exigence de renforcer sa capacité d'assurer le respect des principes qui inspirent les sept conventions sur les droits fondamentaux des travailleurs.
C'est dans cette optique qu'intervient la proposition d'une déclaration, incorporant ces principes, qui pourrait résoudre le problème du manque de ratification de ces instruments essentiels et surtout renforcer l'efficacité de notre Organisation dans le domaine qui lui est propre: la sauvegarde et l'application universelle de ces droits essentiels.
M. VANNI (délégué des travailleurs) -- ... Décider donc que l'adhésion à l'OIT implique le respect des principes énoncés dans les sept conventions fondamentales de l'Organisation, sur la base d'une «déclaration solennelle» à adopter en 1998 et qui ait force obligatoire pour tous les Etats Membres, est une proposition du Directeur général que les travailleurs italiens appuient avec le maximum de rigueur.
M. DERBI (délégué gouvernemental) -- ... Je voudrais également formuler certaines observations au sujet des idées et propositions figurant dans le rapport, dont j'accepte certaines et je rejette d'autres. Premièrement, s'attacher aux normes internationales du travail et les consolider étant donné qu'il s'agit là d'un instrument capital pour réaliser le progrès social et la sécurité sans dépasser le cadre des limites de la souveraineté nationale quant aux prérogatives des autorités législatives. Deuxièmement, refuser d'établir un lien direct ou indirect, implicite ou explicite entre la libéralisation des échanges et le respect des normes internationales du travail, car aucune preuve logique ne permet le maintien d'un tel lien. Même la Conférence ministérielle de Singapour l'a rejeté car nous estimons qu'un tel lien pourrait entraîner la destruction de notre Organisation, qui est l'autorité compétente et dont la structure tripartite est différente des autres organisations. Troisièmement, refuser la création d'un nouveau mécanisme de contrôle et tirer profit des mécanismes existants. Quatrièmement, refuser l'idée d'une déclaration énonçant des principes adéquats et demandant aux pays de rendre compte de l'application des normes et de présenter des plaintes à ce sujet, car cela est prévu par la Déclaration de Philadelphie et la Constitution...
M. SUZUKI (conseiller technique des employeurs) -- ... A mon avis, l'Organisation devrait adopter une nouvelle déclaration solennelle, énoncée en termes clairs et simples, où le principe de la subsidiarité serait considéré comme le principe universel et fondamental de l'OIT. Ce genre de déclaration aidera non seulement les Etats Membres, mais aussi leurs mandants du secteur privé à trouver des possibilités nouvelles et appropriées de résoudre les problèmes internes ainsi qu'à s'assurer du soutien de toutes les parties intéressées en vue de résoudre les problèmes nouveaux découlant de la mondialisation. Cela permettra également aux Etats Membres et à leurs partenaires sociaux de faire tout leur possible pour coopérer avec l'OIT pour résoudre les problèmes de la mondialisation.
M. ITO (délégué des travailleurs) -- ... La Confédération japonaise des syndicats estime qu'il est nécessaire d'établir un nouveau système de contrôle des normes fondamentales du travail, grâce auquel l'OIT pourrait surveiller l'application de ces normes, même dans les cas où elles ne sont pas ratifiées par un pays donné. Pour créer ce nouveau mécanisme, le Conseil d'administration de l'OIT devrait discuter de mesures concrètes lors de la prochaine session du Conseil en novembre prochain.
M. ALKHASAWNEH (ministre du Travail) -- ... [N]ous pensons qu'il est nécessaire de continuer le débat, la discussion et le dialogue équilibré, et de tenir compte également des engagements pris au sein des organisations internationales. Le développement économique et social doit être complet et il ne faut pas limiter le commerce international sous aucun prétexte.
Mme TOLLE (déléguée gouvernementale) -- ... En ce qui concerne certains aspects de la dimension sociale de la libéralisation des échanges internationaux, le Kenya partage l'opinion du Directeur général selon laquelle tous les travailleurs devraient avoir la possibilité de recueillir une part équitable des bienfaits de la mondialisation et, pour que cet objectif soit atteint, un système de consultations tripartites devrait être élaboré à l'échelon national. En conséquence, le Kenya estime qu'il faudrait inciter les Etats Membres de l'OIT à ratifier volontairement et à mettre en œuvre les sept conventions fondamentales, telles qu'identifiées par le Sommet mondial pour le développement social et par la Conférence ministérielle de Singapour réunies sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce.
En particulier, les domaines prioritaires devraient être pris en considération dans les normes portant sur la liberté syndicale, le droit d'organisation et de négociation collective, l'abolition du travail forcé, l'égalité de traitement et la non-discrimination.
... Les principes fondamentaux qui ont toujours caractérisé l'excellent travail de l'OIT au cours de ces années ont été sa philosophie de base en matière de volontarisme, de tripartisme et de libre choix de ses partenaires sociaux. A aucun moment, on a fait peser la menace d'utiliser des mesures coercitives pour faire respecter les normes du travail de l'OIT, y compris celles régissant les droits fondamentaux des travailleurs. Les pays ont toujours conservé le libre choix de leur adhésion à l'Organisation et de la ratification des normes de l'OIT.
... Nous ne devons pas perdre de vue que l'affiliation à l'OIT est restée purement volontaire et que le respect des normes du travail a toujours été lié à la persuasion morale et non pas à l'imposition de sanctions commerciales, car l'OIT n'impose pas de sanctions. Ces principes doivent être respectés dans le débat visant à amender la Constitution de l'OIT en adoptant une déclaration qui aura pour objectif de faire obligation à tous les pays d'assurer le respect universel des droits fondamentaux, en tant que condition préalable pour que tous les travailleurs puissent partager les bénéfices de la mondialisation.
M. OWUOR (délégué des employeurs) -- ... [M]a délégation ne souscrit pas à la proposition faite par le Directeur général du BIT de donner à ces conventions fondamentales la forme d'une charte assortie de ses propres dispositions en matière de contrôle et d'un système de suivi par des rapports réguliers soumis au Directeur général et examinés au sein d'une commission spéciale de la Conférence.
... Ma délégation considère également qu'en établissant une différence entre conventions fondamentales et conventions non fondamentales, on risque de créer une situation artificielle dans laquelle certaines conventions seront considérées comme des instruments de seconde catégorie, même si le non-respect de certaines peut porter atteinte à la santé et au bien-être des travailleurs touchés, davantage encore parfois que quand il s'agit du non-respect de conventions fondamentales. L'OIT connaît actuellement un régime d'austérité budgétaire. L'instauration d'un système de contrôle supplémentaire outre celui qui existe déjà -- la commission d'experts, le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration et la Commission de l'application des normes de la Conférence -- risque donc d'occasionner des dépenses supplémentaires sans aucune valeur ajoutée.
M. AL-KULAIB (ministre des Affaires sociales et du Travail) -- ... [N]ous considérons que le dispositif actuel de contrôle et de suivi des normes prévu par la Constitution est suffisant pour réaliser les objectifs de l'OIT. Nous pensons que la mise en œuvre de nouveaux dispositifs dans le domaine des normes ferait perdre toute la souplesse qui caractérise les conventions et empêcherait les Etats Membres de ratifier les nouvelles conventions.
M. AL HAROON (délégué des employeurs) -- ... [N]ous souhaitons tous tenir compte des effets sociaux de la mondialisation et du processus de développement devant conduire au bien-être de tous, partout dans le monde. En outre, nous estimons comme [le Directeur général] que tous les Etats Membres, du fait qu'ils ont souscrit à la Constitution ainsi qu'aux objectifs et aux principes de l'OIT, sont tenus de respecter un minimum d'obligations pour ce qui est des droits fondamentaux...
M. MOLOPO (ministre du Travail et de l'Emploi) -- ... Il est véritablement impératif que les valeurs sociales fondamentales soient prises en compte pour que la mondialisation puisse avoir un caractère durable. Ces valeurs sont le fondement de la Constitution de l'OIT et de la Déclaration de Philadelphie. Elles sont également reflétées dans les conventions fondamentales de l'OIT. Pour moi, cela met en évidence le rôle fondamental du mécanisme normatif de l'OIT. C'est la raison pour laquelle nous appuyons pleinement l'initiative prise pour renforcer le mécanisme de contrôle de l'OIT en tant que moyen de réaliser un juste équilibre entre la libéralisation des échanges et la dimension sociale.
Nous nous félicitons de la campagne qui a été lancée pour encourager la ratification des conventions fondamentales. Ainsi que je l'ai indiqué, ces conventions reflètent les valeurs fondamentales nécessaires à une croissance économique durable et à la libéralisation des échanges dans le monde entier.
M. JUNCKER (Premier ministre, Luxembourg) -- ... Nous devons en effet faire preuve pendant ces deux semaines d'imagination, de détermination et de courage pour fixer les bases d'un encadrement social équitable du système commercial multilatéral, de manière à faire bénéficier toutes les parties impliquées des bienfaits que peut engendrer la libéralisation du commerce international.
... L'idée d'une déclaration solennelle de la Conférence internationale du Travail nous paraît bonne. Elle devrait s'inspirer de quelques principes directeurs.
Premièrement, nous nous mettrons d'accord sur un socle des droits fondamentaux de l'homme au travail. Les sept conventions internationales du travail proposées par le Directeur général constituent à mon sens une base certes minimale mais utile.
Deuxièmement, l'action normative du BIT ne doit en aucun cas être diminuée. Les normes constituent la colonne vertébrale de tout le système.
... Troisièmement, la mondialisation des échanges n'aura des effets globalement positifs que si les travailleurs qui contribuent à la création des richesses en recueillent aussi les fruits, notamment en matière de droits et de protection sociale.
Quatrièmement, le système multilatéral dans ses aspects économiques et sociaux ne fonctionnera que si tous les acteurs appliquent les instruments normatifs. Nous devons donc doter l'OIT des instruments de contrôle nécessaires. Il faut veiller à ce que cette institution universelle et tripartite, ce qui la rend unique, ne devienne pas un tigre en papier.
... Cinquièmement, toute notre démarche devra par ailleurs s'inscrire dans un calendrier d'actions précis qui se déroulera par étapes successives.
Sixièmement, ce que nous entreprenons aujourd'hui ne doit pas être de l'art pour l'art. L'opération de toilettage de l'action normative de l'OIT n'est pas une fin en soi. Il faut répercuter les résultats de nos discussions sur les autres acteurs qui sont impliqués. Il faut notamment renvoyer la balle, si j'ose dire, à l'OMC. Les deux enceintes ne doivent pas simplement coexister l'une à côté de l'autre, il doit y avoir des échanges réguliers entre elles.
M. DATO' LIM (ministre des Ressources humaines) -- ... Le gouvernement de la Malaisie déplore que le rapport du Directeur général contienne un certain nombre d'initiatives visant à lier les normes du travail au commerce international. Certaines des mesures de coercition qui sont proposées dans ce rapport, telles que ... l'application du mécanisme de contrôle prévu dans le domaine de la liberté syndicale aux autres normes fondamentales du travail, vont générer un chômage généralisé et des difficultés pour les travailleurs et leurs familles dans les pays en développement. Ces initiatives vont à l'encontre des efforts déployés par l'OIT pour promouvoir le plein emploi et relever le niveau de vie et le bien-être des travailleurs. En outre, ces propositions semblent montrer que l'OIT se fie moins au pouvoir que lui confère sa Constitution pour promouvoir les normes du travail. Le gouvernement de la Malaisie n'est donc pas en mesure d'accepter ces initiatives.
Le gouvernement de la Malaisie appuie les efforts visant à promouvoir la ratification des normes du travail fondamentales par les Etats Membres. Cela étant, ces efforts doivent être accomplis en respectant l'esprit et l'objectif de la Déclaration de Philadelphie qui reconnaît les différentes réalités socio-économiques et capacités techniques des Etats Membres. Une approche plus pragmatique permettant aux Etats Membres de ratifier les conventions du travail fondamentales pourrait se concrétiser par l'octroi d'une assistance technique, portant surtout sur la mise en valeur des ressources humaines, sous l'égide de l'OIT. Voilà qui pourrait avoir un effet de catalyseur en donnant un nouvel élan aux pays en développement pour qu'ils puissent relever les défis de la mondialisation et surmonter leurs difficultés économiques. Cela aura pour effet de relever le niveau de vie et d'améliorer les conditions de travail.
M. DIARRA (ministre de l'Emploi, de la Fonction publique et du Travail) -- ... Le gouvernement du Mali reste persuadé que la ratification des conventions internationales est essentiellement une question de volonté politique de chacun des Etats Membres de l'OIT. Aussi, l'OIT se devra de mettre en exergue les questions fondamentales et d'aider les Etats Membres à arrêter leur politique et à agir tout en continuant à améliorer ses propres mécanismes de contrôle de l'application des conventions.
M. DEMNATI (ministre de l'Emploi et des Affaires sociales) -- ... Nous sommes d'accord avec le Directeur général en ce qui concerne le respect des droits fondamentaux des travailleurs dont le cadre général a été déterminé par certaines conventions adoptées par l'OIT et qui constituent la pierre angulaire du progrès social.
Toutefois, nous pensons, en même temps, que notre Organisation devrait déployer beaucoup d'efforts afin de réaliser un consensus international sur les droits fondamentaux qui devraient être respectés par tous, tout en déterminant leur contenu et les conditions de leur exercice sans porter atteinte aux autres droits et libertés, d'autant plus que les conventions et les recommandations adoptées à cet égard par la Conférence internationale du Travail se limitent à l'adoption d'une série de principes généraux pertinents sans pour autant déterminer les lignes de séparation entre l'application de ces principes et l'exercice des autres droits.
Nous pensons également que la définition du contenu et des dimensions de ces droits, ainsi que la réalisation d'un consensus à leur égard constituent deux conditions sine qua non pour assurer le respect de ces droits par la communauté internationale. Ce consensus est susceptible d'inciter les Etats Membres à ratifier les conventions fondamentales et de permettre à l'Organisation d'utiliser normalement ses mécanismes de contrôle.
... Nous considérons aussi que l'imposition aux Etats d'obligations qu'ils n'ont pas acceptées constituerait un précédent juridique inacceptable parce que contraire aux principes fondamentaux pertinents du Traité de Vienne.
M. OBEEGADOO (ministre du Travail et des relations professionnelles) -- ... Nous réaffirmons, en accord avec la position de l'OUA définie par de précédents orateurs, notre adhésion à l'adoption universelle des sept conventions fondamentales et notre conviction qu'il faut renforcer le mécanisme de contrôle indispensable pour atteindre cet objectif.
En mars dernier, pendant les débats du Conseil d'administration, Maurice a suggéré qu'une déclaration énonçant les principes fondamentaux des conventions essentielles soit adoptée afin de donner un nouvel élan à leur ratification et leur mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de l'adhésion volontaire par les Etats Membres. Nous avons également suggéré que des mécanismes régionaux de surveillance et d'évaluation soient mis en place par les Etats Membres eux-mêmes, la coordination étant effectuée par les équipes multidisciplinaires en collaboration avec le bureau de la zone. Nous pensons qu'un tel mécanisme, en étant plus proche des spécificités et sensibilités d'une région donnée, permettrait de mieux apprécier les obstacles à la ratification, et les équipes multidisciplinaires deviendraient ainsi un instrument de soutien du travail de l'OIT sur le terrain.
Nous pensons que, dans cette optique, la proposition du Directeur général, en vue d'une déclaration solennelle en 1998 réaffirmant le respect universel par les Etats Membres de l'OIT des droits fondamentaux des travailleurs, pourrait être acceptable pour tous et devrait donc être examinée plus avant pour dissiper toutes les ambiguïtés qui sont à l'origine des réserves exprimées.
... Lorsque tout est dit, le plus important est l'édification d'un consensus sur la voie que l'OIT doit emprunter. Dans ce but, il est indispensable que chacun comprenne les appréhensions des pays les moins avancés au sujet de leur principal point fort, leur avantage comparatif dans certains domaines du commerce international, qui risque d'être compromis par l'application universelle des normes du travail si la ratification cesse d'entrer dans le processus de décision national ou si le taux de ratification est fixé sans prendre en considération les réalités nationales. Dans un nouvel environnement économique mondial semé de dangers inconnus, où les embûches sont nombreuses et où les incertitudes de la concurrence internationale pèsent lourdement sur les pays les plus pauvres, il faut absolument prendre en considération ces craintes.
M. BONILLA GARCIA (ministre du Travail et de la Prévoyance sociale) -- ... Si les Membres souscrivent à l'idée d'un mécanisme par lequel l'OIT garantirait l'application et le respect des conventions, y compris de celles qui n'ont pas été ratifiées, et le progrès de la justice sociale dans chaque pays, nous esquiverions les réalités nationales.
On refuserait à chacun des Membres la liberté de décider en toute souveraineté du respect de ses obligations, et on renoncerait aux droits inhérents des citoyens de juger et d'évaluer les progrès réalisés dans le pays. Exiger que l'on mette en œuvre des normes qui n'ont pas été approuvées par les organes compétents de l'Etat constitue, par conséquent, une initiative dangereuse.
M. BOLD (délégué gouvernemental) -- ... En tant que Membre de longue date de l'OIT, la Mongolie plaide en faveur de l'acceptation et du respect accrus des conventions de base de l'OIT et du renforcement du mécanisme de contrôle afin d'assurer le respect le plus large possible des instruments.
M. SHAETONHODI (vice-ministre du Travail) -- ... Nous reconnaissons qu'il y a un besoin urgent de renforcer le mécanisme de contrôle de l'OIT et de favoriser la pleine application de ses normes partout dans le monde.
... La Namibie soutient également la proposition selon laquelle les Etats Membres devraient être forcés de soumettre des rapports réguliers à l'Organisation, qu'ils aient ou non ratifié les conventions fondamentales. Voilà une approche qui est à même, à notre avis, de donner aux Etats Membres le sens de leurs responsabilités au regard du progrès social partout dans le monde.
M. NEUPANE (ministre du Travail) -- ... Le fait de lier les normes du travail au commerce ... nous préoccupe fortement.
M. NAVARRO MOREIRA (ministre du Travail) -- ... Mon gouvernement est d'accord pour promouvoir les conditions essentielles et la dynamique du progrès social, qui doit être conforme aux principes consacrés dans la Constitution de l'OIT et la Déclaration de Philadelphie. Il faut en effet reconnaître universellement les droits fondamentaux, et notamment les droits de la liberté syndicale et de la négociation collective, l'interdiction du travail forcé, plus particulièrement le travail des enfants, l'égalité de traitement et la non-discrimination.
... Nous réaffirmons que le Nicaragua et son gouvernement respectent et continueront de respecter les principes énoncés dans la Constitution de l'OIT et dans la Déclaration de Philadelphie, afin de préserver la paix et la justice sociale, de sorte que les instruments qui consacrent ces principes et qui ont été adoptés par la Conférence internationale du Travail soient appliqués, compte tenu des progrès de la libération des échanges et de la mondialisation de l'économie.
M. OPSETH (ministre des Collectivités locales et du Travail) -- ... L'acceptation et l'application la plus large possible des normes fondamentales du travail doivent être l'un des principaux objectifs de l'OIT et des Etats Membres. Mon gouvernement, à cet égard, est favorable à l'idée avancée par le Directeur général d'une déclaration solennelle qui pourrait être adoptée par la Conférence en 1998. Cette déclaration devrait stipuler que tous les Etats Membres, dès lors qu'ils acceptent la Constitution et les objectifs de l'OIT, sont tenus de respecter un certain niveau minimal de droits fondamentaux des travailleurs, et cela, même si ces Etats Membres n'ont pas ratifié les conventions pertinentes. Il serait bon, à cet égard, qu'un projet de texte d'une telle déclaration soit produit dans les meilleurs délais, et il devrait faire l'objet de discussions à l'occasion de la réunion du Conseil d'administration de l'OIT du mois de novembre.
Mme BUVERUD PEDERSEN (déléguée des travailleurs) -- ... La première partie du rapport du Directeur général soulève la question de savoir si le mécanisme de surveillance de l'OIT en matière d'application des conventions devrait également s'appliquer aux Etats qui n'ont pas ratifié les conventions fondamentales. A mon sens, la réponse doit être affirmative. La Constitution de l'OIT, à laquelle tous les Etats Membres ont adhéré, établit les principes sur lesquels se fonde l'OIT et, à mon avis, lie les Etats pour toutes les questions qui touchent aux droits les plus fondamentaux des travailleurs.
M. BRADFORD (ministre du Travail) -- ... Le Directeur général a aussi évoqué la possibilité d'une déclaration de principes visant à renforcer l'application universelle des droits fondamentaux des travailleurs. La Nouvelle-Zélande est prête à collaborer à ce processus, mais nous avons quelques questions fondamentales à soulever. Par exemple, quels sont les objectifs que visent les Etats Membres? Quelles sont les autres possibilités d'atteindre ces objectifs? Les solutions proposées portent-elles atteinte au principe du volontarisme et de la flexibilité dans la poursuite de ces objectifs?
M. MARSHALL (délégué des employeurs) -- ... La proposition qui a été faite d'imposer aux pays qui adhèrent à l'OIT le respect de certains principes fondamentaux est intéressante, mais à la condition qu'il soit admis que si un recours est introduit il sera examiné à la lumière des résultats obtenus et non du processus par lequel ils ont été obtenus.
M. WILSON (délégué des travailleurs) -- ... Non seulement l'OIT devrait faire en sorte que tous les partenaires du système commercial multilatéral respectent les droits fondamentaux, de préférence en ratifiant et en respectant les conventions fondamentales, mais des mesures complémentaires devraient être prises pour renforcer les mécanismes de contrôle.
M. AL-BUSAIDI (sous-secrétaire aux Affaires sociales et au Travail) -- ... [N]ous pensons qu'il n'est pas nécessaire de recourir à de nouveaux dispositifs dans le domaine des normes internationales du travail, car le système et les normes actuels sont tout à fait suffisants.
M. ETIANG (ministre du Travail et de la Prévoyance sociale) -- ... L'Ouganda reconnaît la nécessité de promouvoir les conventions fondamentales de l'OIT sur les droits fondamentaux des travailleurs et donne la priorité à leur mise en œuvre.
... Concernant le mécanisme de contrôle, nous reconnaissons la nécessité de renforcer les procédures de contrôle, mais dans le cadre de la Constitution de l'OIT. L'introduction d'un mécanisme de contrôle particulier pour les conventions fondamentales risquerait d'entraîner des doubles emplois et de remettre en cause la procédure spéciale qui a été instituée pour la liberté syndicale et a donné de très bons résultats. Les travaux de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en seraient également affectés.
... Une déclaration sur les droits fondamentaux frayerait, quant à elle, la voie à la clause sociale et à l'établissement d'un lien entre les normes internationales du travail et le commerce. La question a été discutée dans différentes enceintes et tout lien a été catégoriquement rejeté. Si je reconnais l'interdépendance entre les normes de l'OIT et le commerce international, je suis fermement convaincu que les normes de l'OIT doivent rester du ressort de l'OIT et les questions commerciales de celui de l'OMC.
M. AKRAM (délégué gouvernemental) -- ... Nous sommes convaincus que la mise en œuvre de ces normes essentielles passe d'abord par la ratification des conventions y afférentes par tous les Etats Membres. Une telle ratification renforcerait l'efficacité de l'OIT et garantirait une utilisation optimale de ses mécanismes de contrôle. Nous pensons que les possibilités offertes par la Constitution de l'OIT en matière de normalisation et de contrôle n'ont pas été épuisées. On pourrait tirer un meilleur parti des mécanismes en place si on les rationalisait et on en garantissait l'impartialité et la transparence.
M. TABANI (délégué des employeurs) -- ... Nous nous voyons donc dans l'obligation d'affirmer sans ambiguïté que l'idée d'une déclaration et celle d'un label social mondial ne sont pas acceptables. De telles propositions tendent à légitimer l'utilisation des normes à des fins protectionnistes et à entériner implicitement la clause sociale.
M. AHMED (délégué des travailleurs) -- ... L'importance des normes fondamentales de l'OIT est régulièrement soulignée par tous ceux qui croient en l'amélioration de la condition socio-économique des travailleurs, car ces droits de l'homme fondamentaux sont universels dans leur application. C'est la raison pour laquelle le Sommet social international a rappelé la responsabilité de tous les Etats Membres mais aussi le rôle spécial de l'OIT dans la lutte contre la pauvreté et la promotion de l'emploi.
Nous invitons tous les Etats Membres à ratifier ces conventions et à les mettre en œuvre, dans leur lettre comme dans leur esprit.
M. DUCREUX (délégué gouvernemental) -- ... De l'avis du Panama, il est nécessaire de renforcer les principes universels qui régissent la vie de l'OIT. C'est la façon la plus efficace pour lutter contre les dangers croissants posés par la mondialisation en marge de la dimension sociale et d'un nouveau système de coopération mondiale qui offre à tous une protection sans exclusion nationale ou sociale.
M. CASTILLO MIRANDA (délégué des travailleurs) -- ... Nous devons, de même, insister sur la nécessité d'incorporer tous les droits relatifs au travail et garantis en la matière dans toutes les conventions et tous les traités régionaux et mondiaux visant l'intégration et le libre-échange qui sont conclus sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
Nous exigeons que la clause sociale devienne un instrument permettant la mise en œuvre des droits syndicaux universellement reconnus, en liant les principes fondamentaux de l'OIT au processus d'intégration et d'ouverture commerciale.
M. MELKERT (ministre des Affaires sociales et de l'Emploi) -- ... Le gouvernement des Pays-Bas souscrit sans réserve à toute une série de considérations formulées dans la première partie de son rapport. Une déclaration solennelle qui rappellerait les principes proclamés par la Constitution et la Déclaration de Philadelphie au sujet des droits fondamentaux des travailleurs pourrait jouer un rôle important. Il est néanmoins indispensable que cette déclaration s'accompagne d'un système de contrôle visant à surveiller l'application dans le monde entier. Au besoin, l'OIT pourrait contribuer à renforcer cette surveillance par des moyens d'action appropriés, notamment les procédures de contrôle et la coopération technique.
D'autres suggestions dans le rapport, comme celle qui porte sur le précédent que constitue la procédure actuellement appliquée en matière de liberté syndicale, devraient être étudiées de plus près et je suis certain que le Conseil d'administration, en novembre 1997, se livrera à une discussion approfondie de ces questions, parmi lesquelles figure l'établissement d'un programme de travail approprié.
Ce qu'il nous faut maintenant, c'est passer à l'action et non plus nous satisfaire de déclarations d'intention. Dans le cadre de cette discussion, il convient de rappeler que la mise en œuvre des procédures relatives aux normes est volontaire à l'OIT et repose sur le maintien d'un système adapté qui ne débouche sur aucune sanction.
M. QUISUMBING (secrétaire d'Etat au Travail et à l'Emploi) -- ... Tout en reconnaissant la nécessité de discuter de manière constructive de certaines questions, même lorsque celles-ci prêtent à controverse ... je pense que ces questions doivent tout d'abord faire l'objet d'une analyse approfondie au sein du Conseil d'administration. Cela me paraît nécessaire avant que l'on puisse envisager des déclarations appropriées, des mesures ou des mécanismes d'application sans risquer d'être entraîné dans des controverses stériles.
... Une déclaration solennelle réaffirmant les principes mêmes des normes fondamentales du travail, telles qu'identifiées à Copenhague, sans pour autant empiéter sur les droits souverains des Etats Membres, pourrait permettre de promouvoir la ratification de ces normes et leur mise en application progressive.
M. TAN (délégué des travailleurs) -- ... Tout d'abord, pour en venir au fond, nous aimerions mettre l'OIT au défi de prendre des mesures plus vigoureuses, plus concrètes pour obtenir l'application universelle des normes fondamentales. Afin d'obtenir des Etats Membres et des employeurs un respect plus strict des droits fondamentaux des travailleurs consacrés par les conventions de l'OIT, il faudrait mettre en place un mécanisme d'application des normes plus efficace, plus adapté et, en particulier, un système régulier de surveillance et d'instruction des plaintes.
M. ZAJAC (délégué des employeurs) -- ... La Confédération nationale du patronat polonais soutient la promotion de la ratification des conventions fondamentales, et elle est d'avis qu'il faut préparer sous forme de déclaration les règles de transparence ou de validité présentées dans la Constitution et la Déclaration de Philadelphie.
Nous confirmons également que les moyens prévus pour atteindre cet objectif doivent rester conformes à la lettre et à l'esprit de la Constitution. Les procédures doivent être objectives et elles ne peuvent pas donner lieu à la mise en place de sanctions économiques.
Nous sommes d'avis que ces procédures doivent être suffisamment fortes pour confirmer et renforcer le rôle de l'OIT consistant à défendre les travailleurs d'une manière suffisamment fiable, afin d'éviter les interventions et des revendications de la part d'autres organisations et gouvernements.
Mme FERNANDES RODRIGUES (ministre pour la Qualification et l'Emploi) -- ... Le rapport du Directeur général nous propose une réflexion profonde sur la nécessité et le moyen d'assurer les droits fondamentaux aux travailleurs de tous les Etats Membres.
Lesdits droits fondamentaux relatifs à la liberté syndicale et à la négociation collective, à la non-discrimination et à l'interdiction du travail forcé et de l'exploitation du travail des enfants découlent et trouvent leur fondement dans la liberté et l'égalité de toutes les personnes qui sont partie intégrante des valeurs universelles que tout Etat de droit doit reconnaître et garantir.
La définition des droits fondamentaux valables pour tous les Etats Membres de l'OIT trouve ainsi sa justification indépendamment des incidences sociales de la libéralisation du commerce international. Le débat sur la dimension sociale de la libéralisation du commerce international a rendu plus évidente la nécessité de définir les droits fondamentaux des travailleurs.
Le gouvernement portugais soutient la définition des droits fondamentaux des travailleurs, auxquels les Etats se doivent d'adhérer et qu'ils doivent faire respecter du simple fait qu'ils sont Membres de l'OIT. La volonté souveraine des Etats continuera à être respectée et, pour cette raison, ils seront libres de souscrire aux droits fondamentaux, mais ils manifestent la volonté de les accepter quand ils deviennent Membres de l'OIT.
La libéralisation du commerce international crée des conditions pour la croissance économique de tous les pays, lesquels doivent assurer le développement social des populations, dans la mesure où la croissance économique le leur permet.
Le renforcement de la justice sociale contribuera à l'intégration des économies nationales et régionales, favorisera la paix dans le monde et constituera la garantie la plus efficace de l'échec des thèses protectionnistes préconisées par quelques-uns.
... [L]a définition des droits fondamentaux des travailleurs doit avoir un système de contrôle adéquat. Ce contrôle pourrait être organisé sur la base des deux éléments qui font déjà partie des instruments courants de l'OIT:
Premièrement, la présentation de rapports périodiques sur l'état des législations et des pratiques nationales en ce qui concerne les principes fondamentaux.
Deuxièmement, une procédure d'examen des réclamations concernant des cas concrets, identique à celle utilisée en matière de liberté syndicale.
L'examen de ces cas rendrait possible la création d'une jurisprudence sur le contenu des principes fondamentaux, très utile pour l'élaboration des législations et pour les décisions des tribunaux nationaux sur les droits fondamentaux.
M. LANÇA (délégué des travailleurs) -- ... [N]ous appuyons une déclaration qui lierait tous les Etats Membres de l'OIT et qui les contraindrait à respecter, qu'ils les aient ou non ratifiées, les principes des conventions fondamentales de l'OIT concernant la liberté syndicale, la négociation collective, l'interdiction du travail forcé, la non-discrimination, l'âge minimum et l'organisation syndicale dans l'entreprise.
... L'expérience montre qu'il ne suffit pas de définir les normes et qu'il faut surtout renforcer les mécanismes de contrôle et les initiatives propres à assurer leur bon fonctionnement, de manière à inciter les gouvernements et les entreprises à les inclure dans leurs pratiques, leur politique, leur stratégie et leurs activités quotidiennes, au niveau national ou supranational.
M. SMITH (ministre d'Etat à l'éducation et au Travail) -- ... L'équité exige que la mondialisation et la libéralisation des échanges aillent de pair avec la promotion des normes essentielles du travail et des droits de l'homme fondamentaux. Il ne s'agit pas de saper l'avantage compétitif des pays en développement, mais plutôt de faire en sorte que le progrès social renforce la croissance économique, afin que, ayant l'un et l'autre, nous ayons plus des deux. nous puissions mieux partager ce dont nous disposons.
... Une autre preuve du succès du BIT a été l'engagement renouvelé donné par les ministres à la Conférence de l'Organisation mondiale du commerce en décembre dernier concernant le respect des normes du travail essentielles et le rôle de chef de file que l'OIT joue dans la promotion de ces normes.
Mais tout engagement doit être suivi d'une action concrète. Il nous faut maintenant veiller à ce que les engagements pris par les chefs d'Etat au Sommet social mondial et par les ministres à la Conférence de Singapour deviennent une réalité et cela rapidement. Nous devrons rendre des comptes devant la prochaine conférence ministérielle de l'OMC et nous devrons prouver que nous avons avancé.
... L'idée d'une déclaration ayant force obligatoire, reprenant les principes qu'implique la qualité de Membre de l'OIT, est une idée tout à fait intéressante. Il nous faudra maintenant veiller à maintenir l'élan apporté par cette proposition et adopter cette déclaration à la prochaine Conférence internationale du Travail.
Mlle FRANCE (déléguée des employeurs) -- ... Les employeurs du Royaume-Uni appuient pleinement la proposition tendant à élaborer une déclaration solennelle de principes rappelant les droits fondamentaux énoncés dans les conventions fondamentales. Cette déclaration devrait être soumise à approbation lors de la session de la Conférence de l'an prochain. Elle constituerait une voie politique parallèle qui ne remplacerait pas les procédures existantes, mais représenterait un outil de promotion important. L'application de ces principes par tous les Etats Membres doit être contrôlée, qu'ils aient ou non ratifié les conventions fondamentales. Le Conseil d'administration, sans aucun doute, procédera à l'évaluation initiale, mais la question essentielle que nous devons nous poser est celle-ci: le pays intéressé respecte-t-il en général ces principes ou fait-il des efforts dans ce sens? Il faudrait prévoir des mesures à l'égard des violations persistantes.
Pour les employeurs du Royaume-Uni, l'adoption d'une déclaration ne consiste pas seulement à réagir face à l'OMC pour affirmer l'existence de l'OIT. Celle-ci doit poursuivre et mettre à jour son mandat fondamental qui consiste à mieux faire respecter les droits des travailleurs le monde entier.
M. BRETT (délégué des travailleurs) -- ... Nous croyons aussi que l'OIT doit prendre des mesures pour que soient tenus les engagements pris à Singapour et que soient promues les normes fondamentales du travail. Mais je crains que certains des compliments mielleux adressés à l'OIT lors de la conférence de l'OMC dissimulaient plus une volonté d'éviter l'inscription de ces normes à l'ordre du jour de l'Organisation mondiale du commerce que le désir de les renforcer à l'OIT. J'espère que mes craintes sont sans fondement et que la grande majorité des gouvernements joindra ses efforts à ceux du groupe des travailleurs pour obtenir un renforcement du contrôle du respect des normes fondamentales du travail. Si une déclaration contraignante est le meilleur moyen d'y parvenir, nous nous y associerons de tout cœur. Les normes fondamentales du travail sont les normes d'une société civilisée et elles doivent s'imposer à tous les Etats Membres par le fait même qu'ils sont membres de l'organisation.
M. LUBLIN (premier vice-ministre du Travail et du Développement social) -- ... En principe nous soutenons la proposition faite par le Directeur général d'élaborer une déclaration ou une charte sur le respect, par les Etats Membres, des droits fondamentaux des travailleurs.
Pourtant, il serait bon de savoir, avant d'aller plus avant, même au stade des travaux préparatoires, quelle forme prendra un tel document, jusqu'où ira la formulation de ces droits fondamentaux et quel est le mécanisme de contrôle envisagé.
M. SHMAKOV (délégué des travailleurs) -- ... Ces règles présupposent le respect de droits fondamentaux qui doivent être garantis par tous les partenaires dans un système d'échanges multilatéraux.
C'est une question tout à fait d'actualité à un moment où l'OMC et l'OCDE discutent de leur possible élargissement. Nous souscrivons à l'idée d'adopter une nouvelle déclaration qui regrouperait les droits fondamentaux universellement reconnus. Nous appuyons également la création d'un mécanisme de contrôle. Celui-ci pourrait prendre la forme d'un rapport périodique du Directeur général sur les progrès sociaux réalisés dans le monde, rapport qui ferait l'objet de discussions tripartites.
... Pour conclure, je souhaiterais, pour résumer mon sentiment sur le rapport, citer ce paragraphe du Préambule de l'OIT: «La non-adoption par une nation quelconque d'un régime de travail réellement humain fait obstacle aux efforts des autres nations désireuses d'améliorer le sort des travailleurs dans leurs propres pays.» L'acceptation de cette vérité par tous les partenaires sociaux nous permettra d'apporter une réponse positive à la question que beaucoup se posent: Y a-t-il un avenir pour l'Organisation internationale du Travail? Les travailleurs de Russie veulent sincèrement que la réponse soit affirmative.
M. DIOP (ministre du Travail et de l'Emploi) -- ... Aujourd'hui, nous le savons, l'OIT est interpellée dans ce qu'il convient d'appeler «un tournant dans l'évolution de l'économie mondiale», avec la conclusion des accords issus du Cycle d'Uruguay et la création de l'Organisation mondiale du commerce. Il est donc extrêmement opportun que l'OIT réaffirme ses principes et ses règles et donne une impulsion nouvelle à leur mise en œuvre, compte tenu des enjeux et des possibilités sans précédent qui se présentent à la communauté internationale.
M. DIOP (délégué des travailleurs) -- ... C'est dans cet esprit que nous sommes favorables à l'idée «du projet de déclaration solennelle des droits fondamentaux des travailleurs par tous les Membres de l'OIT, que les conventions correspondantes aient été ratifiées ou non».
Mais à quoi serviraient les normes internationales du travail sans le renforcement des mécanismes de contrôle permettant d'assurer le suivi et l'impact de leur application?
M. LEE BOON YANG (ministre du Travail) -- ... La Conférence [ministérielle de l'OMC] a également discuté du lien à établir entre les normes du travail et le commerce. Tout en réaffirmant sa volonté de respecter les normes fondamentales du travail internationalement reconnues, la Conférence a condamné leur utilisation à des fins protectionnistes et a défendu l'avantage comparatif des pays en développement à bas salaires. Nous sommes dès lors troublés par le fait que, sur fond de libéralisation des échanges, le rapport de l'OIT intitulé «L'action normative de l'OIT à l'heure de la mondialisation» propose d'établir un lien entre le progrès social et la mondialisation résultant de la libéralisation du commerce. Dans le cadre de cette proposition, tous les Etats Membres seront tenus de respecter les sept conventions fondamentales, qu'ils les aient ou non ratifiées...
Si les mesures proposées par l'OIT devaient être mises en œuvre, les pays seraient contraints de respecter les conventions fondamentales du travail. Certains ne le pourront du fait de leur niveau de développement et s'exposeront à des mesures discriminatoires.
M. TKÁ (délégué gouvernemental) -- ... La partie gouvernementale de la délégation de la République de Slovaquie est également favorable au renforcement du mécanisme de contrôle, dans le cadre de l'Organisation internationale du Travail, par rapport aux normes fondamentales des droits de l'homme.
M. BEDA (ministre de la Main-d'œuvre) -- ... Toute déclaration, qui imposerait à ceux qui ne sont pas parties aux conventions de l'OIT le respect des normes fondamentales du travail, contreviendrait au principe de l'adhésion volontaire des Etats et créerait des problèmes qui empêcheraient les Etats Membres de les ratifier.
M. TAMPOE (délégué des travailleurs) -- ... J'ose penser que toutes les délégations à cette session ont pu profiter du rapport du Directeur général sur l'action normative de l'OIT à l'heure de la mondialisation. Je pense également que les délégations des travailleurs approuveraient une déclaration de cette Conférence aux termes de laquelle, même en l'absence de ratification des conventions pertinentes, l'ensemble des Etats Membres se trouvent du fait même de leur adhésion à la Constitution, aux objectifs et aux principes de l'OIT «soumis à un minimum d'obligations en matière de droits fondamentaux», ainsi que le prévoit le rapport. ...Comme le souligne le Directeur général, cela donnerait à l'OIT une base constitutionnelle pour promouvoir ces droits fondamentaux au travers de mécanismes adéquats qui garantiraient non seulement leur ratification, mais également leur transposition dans le droit national et dans la réalité ainsi que la Constitution l'exige.
Mlle WINBERG (ministre du Travail) -- ... Je salue donc l'idée d'une déclaration solennelle confirmant l'obligation de respecter les droits de l'homme fondamentaux, obligation qui fait déjà partie de la Constitution de l'OIT et de la qualité de Membre. Ce type de déclaration permettrait de préciser les dispositions de la Constitution et de définir les droits fondamentaux universellement reconnus. Voilà qui peut être fait indépendamment de la ratification des sept conventions fondamentales pertinentes de l'OIT auxquelles on a fait référence, à savoir les conventions sur la liberté syndicale, la négociation collective, l'interdiction du travail forcé, le travail des enfants, l'égalité de traitement et la non-discrimination, une question qui concerne de plus en plus de gens en Suède et dans d'autres pays.
Ce type de déclaration devrait s'accompagner d'un renforcement simultané des fonctions de contrôle de l'OIT. Cela ne signifie pas pour autant qu'un nouveau mécanisme soit nécessaire. Je pourrais envisager une procédure, un dispositif semblable à ce qui existe déjà dans le cadre du Conseil d'administration concernant la liberté syndicale. Néanmoins, je crois qu'il serait souhaitable que le Directeur général propose plusieurs formules au Conseil d'administration, qui prendra sa décision en novembre prochain.
Cependant, je souhaiterais émettre un avertissement. La reconnaissance de la nature fondamentale et constitutionnelle de certains droits ne signifie pas que toutes les autres normes devraient être placées dans une catégorie moins importante. Ces droits fondamentaux sont la condition sine qua non d'un bon fonctionnement du marché du travail mondial, car on pose ainsi un certain nombre de principes qui n'ont rien à voir avec le niveau de développement économique.
M. ARTIN (délégué des employeurs) -- ... Je voudrais toutefois faire en passant une remarque sur la première partie du rapport. Lorsque le Directeur général y parle de l'avenir de la mondialisation, il me semble prisonnier des idées du passé, de cette idée d'«ingénierie sociale» que la plupart ont abandonnée après les années soixante-dix. Le Directeur général semble aussi tenir pour acquis le fait que les principes qui s'imposaient en 1919 ou en 1946 doivent conserver toute leur valeur dans le monde du travail radicalement nouveau du prochain millénaire. Je n'en suis pas aussi certain.
M. EDSTRÖM (délégué des travailleurs) -- ... Après Singapour, l'attention du monde est maintenant tournée vers l'OIT. L'OIT recevra-t-elle un mandat lui permettant de renforcer son dispositif de contrôle pour les normes fondamentales concernant les droits de l'homme? Si l'on se base sur ce que les gouvernements ont déclaré au Sommet social des Nations Unies, à la réunion ministérielle de l'OMC qui s'est tenue à Singapour et au sein de cette organisation, la réponse devrait être affirmative. Mais je partage la préoccupation du Directeur général en voyant que certains gouvernements adoptent des attitudes qui se contredisent d'une organisation internationale à l'autre et qu'ils agissent comme s'ils n'étaient pas liés par les obligations qu'ils ont contractées du fait même de leur adhésion à l'OIT. A cet égard, j'aimerais dire que nous sommes véritablement très inquiets après avoir entendu la déclaration du gouvernement de la Colombie, déclaration faite au nom de 113 Etats.
Nous ne pouvons plus croire ces pays lorsqu'ils prétendent appuyer l'OIT et les droits de l'homme fondamentaux.
M. NORDMANN (directeur, Office fédéral de l'industrie des arts et métiers et du travail) -- La Suisse soutient en principe la suggestion d'adopter une déclaration relative aux principes fondamentaux de l'OIT, mais à la condition qu'elle ne constitue pas une vague déclaration d'intention dépourvue d'effets concrets. Il serait naturellement préférable d'arriver à la ratification la plus universelle possible des conventions fondamentales.
M. RYCHLY (délégué gouvernemental) -- ... Le gouvernement tchèque se félicite du consensus atteint, avec l'aide de l'OIT, sur le contenu de ce que l'on appelle les droits fondamentaux des travailleurs. Ces normes, contenues entre autres dans les sept conventions fondamentales de l'OIT, sont pleinement respectées par la République tchèque et nous apprécierions fort qu'elles soient universellement appliquées. La méthode à employer pour les promouvoir ou en contrôler davantage l'application, comme leur définition, devrait faire l'objet du consensus le plus large possible parmi les gouvernements et les partenaires sociaux. En outre, le mécanisme approprié doit être instauré sur une base juridique indiscutable.
M. FALBR (délégué des travailleurs) -- ... Nous sommes d'accord avec le Directeur général pour dire que le problème actuel de la mondialisation ouvre en même temps de nouvelles possibilités de renforcer et d'améliorer des activités de l'OIT, notamment l'action normative et les mécanismes de contrôle. Il ne fait aucun doute que la mondialisation et la libéralisation du commerce mondial font planer une menace sur les droits fondamentaux des travailleurs et des syndicats. Ainsi, l'OIT devrait mettre pleinement à profit son mandat pour jouer un rôle décisif dans la promotion de la dimension sociale dans le cadre de la mondialisation et dans une répartition équitable des profits découlant d'une économie mondialisée. Nous rendons hommage aux efforts faits par l'OIT pour obtenir une ratification universelle des conventions fondamentales. Il ne fait aucun doute que ces conventions fondamentales sont l'un des instruments les plus importants pour la protection des travailleurs et des hommes en général, et qu'elles doivent être pleinement appliquées et respectées.
... A cet égard, j'aimerais souligner la nécessité d'une coopération plus étroite à l'avenir entre l'OIT et l'OMC.
Dans le cadre de ces relations, l'OIT doit également prêter toute l'attention voulue à la clause sociale. Nous savons tous que c'est là une idée qui a été écartée au Sommet de Singapour, mais il ne faut pas l'oublier pour autant. Les gouvernements se sont engagés à Singapour à assurer l'application des conventions fondamentales de l'OIT, et nous aimerions qu'ils ne considèrent pas la clause sociale comme la manifestation d'un protectionnisme, mais comme un bon moyen de promouvoir la justice sociale.
M. EARSAKUL (ministre du Travail et des Affaires sociales) -- ... En ce qui concerne les normes fondamentales, il faut faire extrêmement attention à ne pas tourner les conventions pertinentes de l'OIT qui doivent être ratifiées. Il ne faut pas non plus violer la règle bien établie du droit international qui veut que les Etats ne peuvent être liés sans leur assentiment. Etant donné ces problèmes, dont je n'ai cité que quelques-uns, nous proposons que le rapport soit discuté plus avant et qu'il soit examiné par le Conseil d'administration du BIT, compte tenu de toutes les préoccupations qui auront été exprimées ici.
La démocratie thaïlandaise, qui fait l'objet d'une réforme constante, est bien implantée maintenant dans notre société. Nous n'émettons donc aucune réserve. Nous appuyons entièrement le Directeur général lorsqu'il plaide pour que les Etats Membres de l'OIT reconnaissent leur responsabilité en matière de respect des droits de l'homme fondamentaux consacrés par la Constitution de l'OIT.
M. SAHBANI (délégué des travailleurs) -- ... [L]'Organisation peut, conformément à sa compétence en vertu de la Constitution, s'enquérir auprès des gouvernements des motifs de leur non-ratification, ou amener les Etats Membres à adopter leur législation de manière à ce que leurs lois et pratiques soient en conformité avec les objectifs globaux de cette Organisation. C'est la raison pour laquelle nous approuvons dans ce rapport la référence expresse à la nécessité d'instaurer un minimum de droits fondamentaux respectés par l'ensemble des Etats Membres.
M. ÇELIK (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Mon gouvernement est d'avis que tous les travailleurs devraient bénéficier de façon équitable du surplus de bien-être qui résulte de la libéralisation du commerce international. La mondialisation de l'économie doit aller de pair avec le progrès social, et les mesures qui doivent être prises par l'OIT à cet effet méritent tout notre appui.
... Alors que le monde connaît un processus de mondialisation rapide, la Turquie appuie la proposition du Directeur général visant à faire adopter une déclaration supplémentaire qui lierait tous les Etats Membres de l'OIT et qui protégerait les droits fondamentaux des travailleurs par des garanties plus rigoureuses, qu'ils aient ou non ratifié de telles conventions.
M. ATASAYAR (délégué des employeurs) -- ... Les employeurs turcs estiment que la Constitution et les conventions de l'OIT sont suffisantes pour protéger les droits sociaux.
M. MERAL (délégué des travailleurs) -- ... Par ailleurs, nous sommes également favorables à l'établissement d'un mécanisme permettant à l'OIT de contrôler le respect des droits garantis par les conventions sur le travail forcé et la discrimination dans les pays qui n'ont pas ratifié ces instruments. D'un autre coté, nous aimerions également que soient établis des mécanismes qui garantissent une meilleure application des conventions ratifiées.
M. STOYAN (délégué des travailleurs) -- ... A l'aube du XXIe siècle, l'OIT a une possibilité fantastique d'élargir son activité normative et de jeter les bases d'un nouveau mécanisme qui favoriserait le respect universel des droits fondamentaux.
De façon générale, l'OIT doit définir sa position concernant les mesures sociales qui doivent accompagner ce processus de mondialisation de l'économie. Un premier pas obligé dans cette voie serait, à mes yeux, l'adoption de la déclaration sur les droits fondamentaux proposée par le Directeur général.
Mme PIÑEYRUA (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... Tout d'abord, la possibilité que la Conférence approuve une déclaration relative aux droits fondamentaux qui devraient être respectés par tous les Etats, que ceux-ci aient ou non ratifié les conventions internationales du travail pertinentes.
... L'application pleine et entière des principes figurant dans ces instruments doit constituer une aspiration commune à tous les Etats Membres en tant que réaffirmation des droits de l'homme fondamentaux.
Toutefois, au plan juridique et opérationnel, on constate que des définitions et des concepts clairs font encore défaut, surtout pour ce qui est des aspects pratiques.
Il est manifeste que la tentation de faire un usage protectionniste de certaines de ces propositions ne saurait être complètement écartée. Et si on les adoptait, certaines de ces propositions risqueraient de susciter une source nouvelle de problèmes et de frictions au niveau international qui seraient peut-être plus graves encore que les problèmes que l'on cherche à résoudre.
Nous pensons donc qu'il convient sans doute d'approfondir le travail conceptuel qui pourrait permettre d'établir un lien entre les normes du travail et les mesures commerciales et de définir également la forme à donner aux instruments proposés afin qu'ils opèrent de façon équilibrée pour protéger les droits de tous les travailleurs, y compris ceux qui ne sont pas directement liés aux activités d'exportation.
M. VARELA (délégué des employeurs) -- ... On peut donc se demander si le rôle de l'OIT est de devancer le changement et d'adopter des normes prévoyant des situations où les droits des travailleurs peuvent être affaiblis ou, au contraire, de suivre le rythme de ce changement et réagir à des cas concrets où sont commis des abus et sont enfreints les objectifs fondamentaux de l'OIT.
La première attitude est idéaliste et la seconde réaliste. C'est pourquoi, nous souscrivons à l'élaboration d'une déclaration énonçant les principes essentiels qui servent de guide en cette période de mutation... Mais, nous ne souhaitons pas que cette déclaration ait un effet contraignant et serve de prétexte pour sanctionner les pays qui se seraient écartés de ses idées directives.
L'OIT, créée par les Etats Membres, ne doit pas dépasser les limites qui sont imposées par ces Etats Membres et cesser d'être une conscience sociale pour devenir une police du monde du travail.
M. BENTANCOR (délégué des travailleurs) -- ... Il nous appartient d'exiger que les déclarations de ces sommets internationaux soient suivies d'une mise en pratique cohérente par la communauté internationale.
Le renforcement des mécanismes de contrôle et le respect des conventions de l'OIT, notamment celles qui traitent des droits fondamentaux de l'homme, sont des critères qui permettent d'évaluer concrètement la volonté politique des Etats Membres de respecter les engagements qu'ils ont pris et de donner suite aux déclarations qu'ils ont faites au cours des grandes conférences.
M. CORRALES LEAL (délégué gouvernemental) -- ... [L]e Venezuela se félicite du rapport du Directeur général qui jette les bases d'une rénovation de l'Organisation, qui ne saurait être reportée. Nous pensons, comme le Directeur général, qu'il faut accélérer le processus de revitalisation grâce à une application plus efficace et plus large des normes fondamentales du travail dans le monde entier. Il convient aussi de renforcer la capacité de l'Organisation de promouvoir les normes et d'évaluer les progrès. Pour mener à bien cette tâche, il ne s'agit pas de revoir le champ d'action de l'OIT qui a été clairement défini dans son mandat, mais de lui conférer force et dynamisme réel. Vouloir élargir les responsabilités de l'Organisation pour embrasser des domaines ou utiliser des instruments qui sont extérieurs à son champ de compétence, c'est la priver de force, de capacité de négociation et de crédibilité dans son propre domaine.
... A notre sens, le processus de dynamisation et de renforcement de l'OIT devrait être articulé sur trois plans. Premièrement, le choix et la révision des conventions qui doivent être considérées comme fondamentales dans le domaine de la protection sociale ainsi que l'élaboration d'une déclaration de l'OIT en la matière... Deuxièmement, la mise au point d'une stratégie visant à encourager efficacement la ratification des conventions internationales pertinentes par les Etats qui ne l'ont pas encore fait. Troisièmement, enfin, l'étude de mécanismes concrets de contrôle et de suivi de l'application des normes et des recommandations de l'Organisation, tout en respectant la souveraineté de tous les Etats, ce qui est un principe fondamental du droit international.
M. DE ARBELOA (délégué des employeurs) -- ... Nous partageons l'avis du Directeur général qu'il faut veiller à ce que les conventions relatives aux droits fondamentaux, qui sont l'essence même du tripartisme, soient universellement ratifiées et appliquées. A ce sujet, nous autres employeurs, nous associons à notre gouvernement et à nos délégués travailleurs pour marquer notre préoccupation et notre désaccord avec toute forme de «label social» qui ne pourrait qu'entraver encore la liberté du commerce international.
M. RAMÍREZ LEÓN (délégué des travailleurs) -- ... Lier les droits fondamentaux des travailleurs aux échanges commerciaux est, de notre point de vue, un impératif social et moral.
Pour atteindre cet objectif, il faut absolument renforcer le caractère normatif de l'OIT; c'est pour cela que nous voyons avec plaisir que l'Organisation a reçu un mandat du Sommet social de Copenhague et de l'Organisation mondiale du commerce. En effet, ces deux instances ont reconnu que l'OIT est l'instrument naturel et nécessaire pour rédiger des normes et contrôler les conditions d'emploi et de travail à l'échelon international.
Il faut absolument adopter une nouvelle déclaration solennelle qui, comme la Déclaration de Philadelphie, renforce l'engagement des Etats Membres à respecter les principes fondamentaux de l'Organisation et la fonction normative de l'OIT.
M. NGUYEN LUONG (vice-ministre du Travail, des Invalides et des Affaires sociales) -- ... Nous tenons à réaffirmer notre position, à savoir que la façon la plus efficace d'encourager les Etats Membres, et notamment les pays en développement, à accepter et à respecter les normes du travail est de leur accorder davantage d'assistance et de coopération technique. L'imposition de normes et d'un mécanisme de contrôle irréaliste ne pourra qu'avoir des effets négatifs.
M. MACHUNGWA (ministre du Travail et de la Sécurité sociale) -- ... La Zambie reconnaît l'importance des normes fondamentales du travail. Elle reconnaît également le besoin d'accroître le nombre des ratifications. Je propose donc que l'OIT renforce sa détermination à promouvoir ses conventions et persuade les Etats Membres de les ratifier. Je saisis cette occasion pour informer notre auguste assemblée que la Zambie a ratifié toutes les normes fondamentales, à savoir les conventions nos 29, 87, 98, 100, 105, 111 et 138. Voilà la preuve de notre détermination à appliquer ces normes.
Le Directeur général mentionne dans son rapport la possibilité d'assujettir les normes précitées aux mêmes mécanismes de contrôle que ceux qui s'appliquent à la liberté syndicale. Il est admis que les normes relatives à la liberté syndicale doivent être appliquées par les Etats Membres en vertu de la Constitution et des objectifs et principes de l'OIT. Il est admis en outre que les autres normes fondamentales ont une importance égale. La Zambie ne souscrit cependant pas à l'idée qui consiste à étendre aux autres normes les mécanismes de contrôle qui s'appliquent à la liberté syndicale. Nous sommes persuadés que la ratification des conventions de l'OIT devrait rester volontaire. Mais peut-être l'OIT devrait-elle intensifier les efforts qu'elle déploie pour obtenir des Etats Membres qu'ils révisent constamment leur position sur les normes fondamentales de l'OIT et accroître ainsi le nombre des ratifications. Je me rallie donc à la proposition tendant à recourir davantage à l'article 19.5(e) de la Constitution de l'OIT, particulièrement à l'égard des normes fondamentales.
Mme CHITAURO (ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Prévoyance sociale) -- ... Par ailleurs, les ... débats [au sein du Groupe de travail sur la dimension sociale de la libéralisation du commerce international et de la Commission des questions juridiques et des normes internationales du travail du Conseil d'administration du BIT] ont fait ressortir une opposition à ce qu'on établisse un lien entre les normes du travail et le commerce international, pour la raison simple et évidente qu'un tel lien pourrait très bien être utilisé à des fins protectionnistes.
M. SIBANDA (délégué des travailleurs) -- ... L'OIT se doit, par conséquent, de faire avancer le débat et de mettre en place un mécanisme qui permette non seulement d'obtenir l'adhésion de tous les Etats Membres aux normes fondamentales du travail, mais aussi de contrôler l'application de ces normes par tous les Etats Membres.
* * *
Organisation internationale des employeurs
M. OECHSLIN (délégué des employeurs) -- ... Le Conseil d'administration a déjà commencé l'étude des mesures qui peuvent accroître l'efficacité de l'OIT en la matière. Il faut permettre aux pays en développement de profiter de tous leurs avantages compétitifs, tout en assurant dans le cadre de notre institution la reconnaissance effective de quelques principes sociaux de base. Après avoir défini ces principes sur la base de conventions spécifiées et en nombre limité, certaines pistes ont été explorées, notamment l'élaboration d'une déclaration énonçant l'essence des droits fondamentaux ainsi qu'un meilleur usage des rapports que les Etats Membres doivent fournir à l'OIT sur la suite qu'ils donnent aux conventions adoptées. Les employeurs appuient d'une façon générale ces orientations et espèrent que le Conseil sera en mesure en novembre de les transformer en propositions concrètes dans le cadre de notre Constitution telle qu'elle est.
Confédération mondiale du travail
M. THYS (représentant) -- ... Il faut en effet que les Etats Membres soient cohérents avec leurs déclarations et leurs engagements de justice sociale et de plein emploi lors des grands rendez-vous internationaux, comme le Sommet de Copenhague par exemple. La volonté de faire respecter les normes de l'Organisation internationale du Travail dans leur sphère de compétence en est le test le plus concret. Or qu'en est-il réellement?
Dans cet esprit, la CMT partage donc l'idée d'une déclaration solennelle avancée par M. Hansenne, déclaration qui devrait avoir une portée constitutionnelle et amener les Etats Membres, du seul fait de leur adhésion à l'OIT, à respecter et à faire respecter les droits fondamentaux. Sans mettre en cause les procédures déjà en vigueur, un système complémentaire de plaintes devrait être mis en place au plus tôt pour les droits fondamentaux. Pour la CMT, il doit être clair qu'une telle démarche ne réduit en rien l'importance de promouvoir l'ensemble du dispositif des normes de l'OIT, et particulièrement celles relatives à la santé, à la sécurité au travail ou encore à la sécurité sociale.
A ce propos d'ailleurs, la CMT ... n'est pas opposée par contre à l'introduction d'une procédure nouvelle qui garantisse une sélectivité, une opérationnalité et une mise en œuvre optimale des normes...
Ce soutien de la CMT au concept de label social ne ferme pas pour autant la porte à celui de clause sociale, bien au contraire. La CMT les trouve complémentaires, l'un et l'autre étant susceptibles de promouvoir l'avènement d'une législation internationale équitable et efficace pour autant qu'ils soient conçus et contrôlés de façon multilatérale et qu'ils ne laissent place à aucune velléité protectionniste.
Fédération internationale des journalistes
M. KWON (représentant) -- ... Le processus de mondialisation exige la réaffirmation de notre attachement aux valeurs et droits fondamentaux consacrés par les normes de l'OIT. C'est le message contenu dans la proposition du Directeur général qui exprime notre engagement envers les conventions fondamentales de l'OIT.
Confédération internationale des syndicats libres
M. JORDAN (représentant) -- ... La CISL s'est rendue à Singapour dans l'espoir que l'OMC aborderait la question du lien entre le commerce et les normes du travail dans son programme d'activité, et est résolue à faire insérer une clause sociale dans le traité de cette organisation.
Cet objectif et cet engagement sont restés les mêmes, et les mesures proposées par le Directeur général viennent les compléter, mais ne les remplacent pas. M. Hansenne dans son rapport a décidé de ne pas parler de la clause sociale. Ce silence ne doit pas être interprété comme un indice signifiant que l'OIT n'a plus de rôle à jouer dans le débat difficile et constant sur ce thème. La question la plus importante du débat qui s'est déroulé à Singapour était bien le lien entre le commerce et les normes du travail. Et l'argument principal des pays qui disaient que l'OMC n'était pas l'endroit qu'il fallait pour traiter des normes du travail était que l'OIT pouvait donner à la mondialisation du commerce cette dimension sociale dont elle avait tant besoin. Il reste maintenant à ces pays d'honorer les paroles qu'ils ont prononcées à Singapour.
M. JARIKOV (représentant) -- ... Nous estimons que l'adoption par la Conférence de la Déclaration solennelle proposée devrait aller de pair avec le renforcement des conventions existantes et la mise en place de nouveaux mécanismes de contrôle pour veiller à l'application effective des normes du travail.
Fédération internationale des travailleurs du textile,
de l'habillement et du cuir
M. KEARNEY (représentant) -- ... La responsabilité de rendre la mondialisation bénéfique du point de vue social incombe aux gouvernements. Ils devraient commencer par ratifier et appliquer les conventions adoptées par l'OIT, et surtout les conventions fondamentales. Il est honteux que les gouvernements se rendent à Genève chaque année, participent à la Conférence internationale du Travail, appuient l'adoption de nouveaux instruments de l'OIT, puis fassent totalement fi de leur existence. L'OIT doit contribuer à ce processus, en reprenant confiance en elle-même, en retrouvant ses ambitions et en condamnant plus vigoureusement l'exploitation et les abus dont sont victimes les travailleurs. L'OIT doit demander fermement aux Etats Membres de ratifier et de mettre en œuvre les conventions. Elle doit traquer sans pitié ceux qui violent les conventions fondamentales, surtout celles qui concernent la liberté syndicale et la négociation collective.
Internationale des services publics
M. ENGELBERTS (représentant) -- ... Nous souhaitons que l'OIT et son système de surveillance soient renforcés afin de faire appliquer les droits fondamentaux des travailleurs. Tous ces gouvernements qui ont pris des engagements à Copenhague et à Singapour devraient se mobiliser pour permettre à l'OIT d'assumer son rôle de contrôle de l'application des conventions.
Confédération internationale des syndicats arabes
M. DJEMAM (représentant) -- ... Nous avons défendu la clause sociale et l'importance du rôle de l'Organisation internationale du Travail. La Conférence de Copenhague et celle de Singapour ont reconnu notre existence et nos droits. Il nous faut élaborer aujourd'hui un mécanisme qui oblige toutes les parties à développer les droits sociaux de tous les travailleurs, hommes et femmes, et de tous les peuples, à réprouver la marginalisation et la discrimination, à refuser de soumettre la décision politique à la loi de l'économie et des capitaux, à œuvrer en vue de combler le fossé entre le Nord et le Sud et à contribuer à diminuer le fardeau des dettes extérieures et des conditions d'ajustement structurel qui écrasent les sociétés pauvres.
A partir de là, nous appelons à œuvrer pour que l'Organisation internationale du Travail soit un partenaire réel et reconnu dans toutes les activités sociales et économiques internationales.
Confédération internationale des cadres
M. SAVARD (représentant) -- ... En conclusion, la Confédération internationale des cadres appuie sans réserve le projet d'une déclaration solennelle destinée à réaffirmer le respect universel des droits fondamentaux des travailleurs, de toutes les catégories de travailleurs, y compris donc les cadres et en respectant leur spécificité. Elle souhaite que tous les Etats Membres souscrivent à un tel projet et acceptent sans atermoiement d'établir les mécanismes de mise en œuvre adéquats.
* * *
Mme KELTOSOVÁ (ministre du Travail, des Affaires sociales et de la Famille de la Slovaquie, Présidente de la 85e Conférence internationale du Travail) -- ... Le renforcement du mécanisme de contrôle et le respect des conventions fondamentales de l'OIT en matière de droits de l'homme seront le test de la volonté des pays Membres de trouver une solution mutuellement acceptable et de montrer au monde extérieur que tous les engagements et déclarations qu'ils ont adoptés à diverses conférences, et notamment au Sommet mondial pour le développement social, ils les ont adoptés en étant pleinement conscients de leurs responsabilités politiques et résolus à leur donner suite.
Quelles que soient les divergences, il est évident qu'il existe un lien entre la mondialisation et la mise en œuvre des objectifs de l'OIT. Le progrès social, et notamment l'amélioration de la protection des droits des travailleurs, doivent aller de pair avec la mondialisation. Chaque Etat, chaque entreprise, chaque multinationale, chaque individu devrait avoir sa part des avantages de la mondialisation, faute de quoi les tensions découlant de ce phénomène risquent de mettre en péril la stabilité sociale, qui est la base du bon fonctionnement de chaque société nationale et, en fin de compte, de compromettre l'avenir du monde...
Mme PERLIN (déléguée gouvernementale, Canada, au nom du Groupe IMEC) -- ... Cette déclaration présente les vues communes du groupe de l'IMEC, d'un certain nombre de gouvernements d'Europe centrale et orientale et d'autres gouvernements. Elle reprend des éléments contenus dans des déclarations ministérielles et elle se fonde sur quatre considérations fondamentales.
Tout d'abord, le respect des dispositions de la Constitution de l'OIT et de la Déclaration de Philadelphie et des principes fondamentaux du tripartisme et du volontarisme.
Deuxièmement, la reconnaissance du fait que les droits fondamentaux des travailleurs dépassent les particularités locales et qu'ils relèvent directement des obligations constitutionnelles des Etats Membres de l'OIT.
Troisièmement, la conviction que la mondialisation offre une occasion d'améliorer les conditions de vie, d'accroître les possibilités de création d'emplois et le niveau de vie, quel que soit le niveau économique du pays concerné.
Quatrièmement, la conviction que l'OIT doit offrir un cadre multilatéral efficace sur la voie du progrès social, tout en respectant le droit pour chaque nation de définir le contenu et les priorités de ce progrès en fonction de son niveau de développement.
... Les propositions du Directeur général méritent d'être étudiées avec attention, mais elles devraient procéder selon des calendriers différents.
Dans l'immédiat, le Directeur général devrait présenter au Conseil d'Administration, en novembre, les trois documents suivants.
... Deuxièmement, un projet de déclaration solennelle qui n'oblige pas à amender la Constitution et qui pourrait être adopté à la Conférence de 1998. Il s'agirait d'une déclaration solennelle sur les principes des normes fondamentales du travail qui ont été approuvés par les dirigeants des pays du monde entier au Sommet social de Copenhague et qui ont été acceptés au Conseil d'administration. Dans le même temps, il faudrait qu'il y ait une procédure de suivi et d'encouragement de la mise en œuvre de cette déclaration. Cette procédure devrait favoriser l'utilisation de méthodes constructives et promouvoir l'application en mobilisant les moyens d'action dont dispose l'OIT, y compris la coopération technique...
Genève, le 6 novembre 1997.