GB.267/7 267e session Genève, novembre 1996 |
SEPTIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR
Cas no 1871 (Brésil): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Brésil présentée par la Fédération syndicale mondiale (FSM)
Cas no 1765 (Bulgarie): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de la Bulgarie présentée par le Syndicat national (SN)
Cas no 1737 (Canada): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Canada présentée par l'Association canadienne des travailleurs des fonderies et ouvriers assimilés (CASAW)
Cas no 1829 (Chili): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Chili présentée par l'Union internationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (UITBB)
Cas no 1870 (Congo): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Congo présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Cas no 1868 (Costa Rica): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica présentée par l'Association des cadres du Service national des eaux souterraines, de l'irrigation et du drainage (ASES) et le Mouvement des travailleurs du Costa Rica (MTC)
Cas no 1875 (Costa Rica): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica présentée par la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
Cas no 1879 (Costa Rica): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Cas no 1805 (Cuba): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Cuba présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Cas no 1861 (Danemark): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Danemark présentée par l'Association des diététiciens danois en milieu hospitalier (ADCD)
Cas no 1874 (El Salvador): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution
Plainte contre le gouvernement d'El Salvador présentée par le Syndicat d'industrie général des employés de la santé (SIGESAL)
Cas no 1815 (Espagne): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de l'Espagne présentée par la Confédération des syndicats interdépendants-Confédération syndicale des fonctionnaires (CSI-CSIF)
Cas no 1858 (France/Polynésie française): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la France/Polynésie française présentée par l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA)
Cas no 1876 (Guatemala): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Guatemala présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Cas no 1773 (Indonésie): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de l'Indonésie présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), la Confédération mondiale du travail (CMT) et le Serikat Buruh Sejahtersa (SBSI)
Cas no 1834 (Kazakstan): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Kazakstan présentée par la Centrale syndicale indépendante du Kazakstan (ITUCK)
Cas no 1883 (Kenya): Rapport dans lequel le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Kenya présentée par l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA)
Cas nos 1687 et 1691 (Maroc): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation
Plaintes contre le gouvernement du Maroc présentées par l'Union marocaine du travail (UMT) et l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, du tabac et des branches connexes (UITA)
Cas no 1855 (Pérou): Rapport intérimaire
Plaintes contre le gouvernement du Pérou présentées par la Fédération des employés de banque du Pérou (FEB), le Syndicat unitaire des travailleurs de l'éducation du Pérou (SUTEP) et la Fédération nationale unifiée des travailleurs de la santé (FENUTSSA)
Cas no 1857 (Tchad): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Tchad présentée par la Confédération syndicale du Tchad (CST)
Cas no 1893 (Tchad): Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Tchad présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Conclusions du comité
Recommandation du comité
1. Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail à Genève les 7 et 14 novembre 1996, sous la présidence de M. le professeur Max Rood.
2. Les membres de nationalité argentine et française n'étaient pas présents lors de l'examen des cas relatifs à l'Argentine (cas no 1881) et à la France/Polynésie française (cas no 1858), respectivement.
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3. Le comité est actuellement saisi de 81 cas dans lesquels les plaintes ont été transmises aux gouvernements intéressés pour observations. A la présente session, le comité a examiné 22 cas quant au fond et a abouti à des conclusions définitives dans 17 cas et à des conclusions intérimaires dans cinq cas; les autres cas ont été ajournés pour les raisons indiquées aux paragraphes suivants.
4. Le comité a ajourné à sa prochaine session l'examen des cas suivants: nos 1886 (Uruguay), 1887 (Argentine), 1888 (Ethiopie), 1889 (Brésil), 1890 (Inde), 1891 (Roumanie), 1892 (Guatemala), 1894 (Mauritanie), 1895 (Venezuela), 1897 (Japon), 1898 (Guatemala), 1899 (Argentine), 1900 (Canada), 1901 (Costa Rica), 1902 (Venezuela), 1904 (Roumanie), 1905 (Zaïre), 1906 (Pérou) et 1907 (Mexique), car il attend les informations et observations des gouvernements concernés. Tous ces cas se réfèrent à des plaintes présentées depuis la dernière session du comité.
5. Le comité attend encore les observations ou les informations des gouvernements sur les cas suivants: nos 1796 (Pérou), 1812 (Venezuela), 1825 (Maroc), 1828 (Venezuela), 1833 (Zaïre), 1845 (Pérou), 1850 (Congo), 1851 (Djibouti), 1852 (Royaume-Uni), 1863 (Guinée), 1872 (Argentine), 1873 (Barbade), 1877 (Maroc), 1878 (Pérou) et 1880 (Pérou). Dans les cas nos 1872 (Argentine) et 1878 (Pérou), les gouvernements ont annoncé l'envoi prochain de leurs observations.
6. Dans le cas no 1862 (Bangladesh), le comité attend encore les commentaires de l'organisation plaignante. Le comité lui demande d'envoyer sans tarder les observations et informations demandées. Dans le cas no 1881 (Argentine), le comité a décidé de transmettre copie de la réponse du gouvernement aux organisations plaignantes afin qu'elles transmettent leurs commentaires. Dans le cas no 1882 (Danemark), l'organisation plaignante a annoncé l'envoi prochain d'informations supplémentaires.
7. Dans les cas nos 1512, 1539, 1595, 1740, 1778, 1786 et 1823 (Guatemala), 1835 (République tchèque), 1843 (Soudan), 1864 (Paraguay), 1869 (Lettonie) et 1903 (Pakistan), le gouvernement a envoyé des informations partielles sur les allégations formulées. Le comité demande à l'ensemble de ces gouvernements de compléter sans tarder leurs observations afin qu'il puisse examiner les cas en question en pleine connaissance de cause.
8. En ce qui concerne les cas nos 1859 (Canada), 1865 (République de Corée) et 1891 (Roumanie), le comité a reçu tardivement les observations des gouvernements et se propose de les examiner à sa prochaine réunion.
9. En ce qui concerne les cas no 1831 (Bolivie), 1854 (Inde), 1867 (Argentine) et 1885 (Bélarus), le comité observe que, en dépit du temps écoulé depuis le dépôt des plaintes ou le dernier examen de ces cas, il n'a pas reçu les observations des gouvernements. Le comité attire l'attention de tous ces gouvernements sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond des affaires en instance, même si les informations et observations des gouvernements n'étaient pas reçues à temps. En conséquence, le comité prie instamment les gouvernements de transmettre d'urgence leurs observations et informations.
10. Le comité a été informé qu'une mission dirigée par M. Santiago Perez del Castillo s'est rendue en Colombie du 7 au 11 octobre 1996 pour recueillir des informations au sujet des cas nos 1761, 1787 et 1896. Le comité se propose d'examiner ces cas lors de sa prochaine session sur la base du rapport de mission du représentant du Directeur général.
11. Le comité a été également informé qu'une mission dirigée par M. Barney Jordaan s'est rendue au Swaziland du 30 septembre au 4 octobre 1996 pour recueillir des informations au sujet du cas no 1884. Le comité se propose d'examiner ce cas lors de sa prochaine session sur la base du rapport de mission du représentant du Directeur général.
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12. Le comité signale à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations les aspects législatifs des cas suivants: Bulgarie (cas no 1765), Indonésie (cas no 1773).
Cas no 1509 (Brésil)
13. Le comité a examiné ce cas relatif à l'assassinat du dirigeant syndical Valdicio Barbosa dos Santos à sa réunion de mars 1995. [Voir 302e rapport, paragr. 16.] Le comité avait noté que le ministère public avait demandé l'ouverture d'une procédure contre M. Marçal da Rocha, auteur de l'assassinat en question. Les autorités judiciaires avaient ordonné son arrestation et sa mise en détention préventive, mais il n'avait pas été retrouvé. En outre, le comité avait noté que le ministère public avait demandé l'ouverture d'une procédure contre M. Romualdo Eustaquio Luz Faría, coauteur de l'assassinat et que les autorités judiciaires l'avaient convoqué. Par communication en date du 19 avril 1996, le gouvernement déclare que M. Marçal da Rocha est toujours en fuite et que les autorités policières le recherchent pour l'arrêter. Le gouvernement déclare en outre que les autorités judiciaires ont demandé au défenseur de M. Romualdo Eustaquio Luz Faría de présenter une défense préalable conformément au Code de procédure pénale. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de continuer à le tenir informé de la procédure judiciaire en cours.
Cas no 1623 (Bulgarie)
14. Lors du dernier examen du cas en mars 1994 [voir 292e rapport, paragr. 333 à 352], le comité a demandé au gouvernement de déployer tous les efforts possibles pour que soit adopté un nouveau texte législatif définissant les principes de la redistribution des biens syndicaux confisqués des anciens syndicats bulgares, afin que le groupe de travail puisse continuer ses travaux et que l'ensemble des mesures déjà prises, et encore à prendre, puissent aboutir dans un proche avenir à l'affectation définitive des biens et fonds visés par la loi de 1991. Le comité avait également demandé au gouvernement d'assurer que les cotisations volontaires versées depuis février 1990 par les membres de la Confédération des syndicats indépendants de Bulgarie (CSIB) seront incluses dans la part des biens confisqués qui sera transférée à la CSIB.
15. Dans une communication du 20 mai 1996, le gouvernement indique qu'une circulaire a été adressée aux deux organisations syndicales en vue d'obtenir des informations sur le nombre effectif de syndiqués. De plus, le ministre des Finances a adressé une circulaire aux gouverneurs régionaux relative à l'amélioration de la gestion des propriétés d'Etat incluses dans les actifs de Sofis Ltd., dont la CSIB est actionnaire. Selon le gouvernement, ces documents ne portent pas atteinte aux droits syndicaux et répondent au devoir incombant à l'Etat de contrôler les fonds budgétaires affectés aux besoins sociaux ainsi que la gestion du patrimoine de l'Etat. Le gouverneur indique en outre qu'il est toujours prêt à prendre en considération et à satisfaire dans le cadre de la législation en vigueur les revendications et demandes des syndicats et des organisations d'employeurs liées à leurs besoins. Le gouvernement s'est fondé et se fondera sur le dialogue utile avec tous les partenaires sociaux au niveau national.
16. Le comité prend note de ces informations. Il note avec regret, cependant, que le gouvernement n'a fourni aucune information sur les progrès effectués dans le processus d'adoption d'une nouvelle loi définissant les principes d'attribution définitive des biens et fonds confisqués aux anciens syndicats bulgares. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout développement à cet égard et de fournir des copies des décisions finales concernant l'attribution dès qu'elles seront promulguées.
Cas nos 1678 et 1781 (Costa Rica)
17. A sa session de mars 1996, le comité a formulé les recommandations suivantes sur les allégations encore en instance [voir 302e rapport, paragr. 255]:
18. Dans sa communication du 2 septembre 1996, le gouvernement met en exergue dans une communication détaillée les nombreuses démarches effectuées par le ministère du Travail pour résoudre le conflit relatif à l'entreprise LACSA. Le gouvernement mentionne également les recours et tactiques de procédure utilisés par les parties qui ont retardé l'aboutissement de la procédure administrative relative à la violation de la convention collective, qui n'est pas encore terminée. Au sujet du conflit collectif au sein de l'entreprise Geest Caribbean Ltd., le gouvernement indique que, donnant suite à la recommandation du comité, il a réalisé des conciliations et médiations entre les parties pour que l'accord du 16 mai 1994, dont l'article 3 relatif aux licenciements soit appliqué. Le gouvernement signale cependant que l'entreprise Geest Caribbean Ltd. a cessé de fonctionner en mai 1996; elle garde sa personnalité juridique mais elle n'emploie plus de travailleurs dans le pays. Le gouvernement ajoute, par circulaire DM 1428-96 (dont il envoie copie) du 19 juin 1996, que le ministère du Travail a donné des instructions à l'Inspection du travail pour que le corps d'inspecteurs veille à ce que les droits syndicaux soient pleinement respectés dans l'entreprise Geest Caribbean Ltd. et dans les autres entreprises du pays, y compris dans les plantations, ainsi que la garantie que les comités permanents de travailleurs (non syndiqués) ne portent pas atteinte au rôle des syndicats représentatifs dans l'entreprise. En outre, par circulaire DM 2408-95 du 21 décembre 1995, il est donné priorité avec caractère d'urgence à toute procédure d'enquête sur les pratiques déloyales de travail contraires aux droits syndicaux, qui devra être transmise immédiatement à la Direction nationale de l'Inspection générale du travail. Le gouvernement indique également qu'il n'a pas connaissance du recours devant la Cour constitutionnelle auquel s'est référé le SITAGAH. En ce qui concerne l'évolution de la procédure à propos des actes de violence qui se sont produits en mai 1994, pendant le conflit collectif à l'entreprise Geest Caribbean Ltd., le gouvernement signale que les accusés (anciens travailleurs de l'entreprise et en majorité Nicaraguayens sans papier) n'ont pas été retrouvés et que les procédures ont été suspendues sauf l'une d'entre elles qui a abouti à un non-lieu.
19. Le comité prend note de ces informations. Au sujet du conflit collectif au sein de l'entreprise LACSA (cas no 1695), le comité, bien qu'il relève les tactiques dilatoires évoquées par le gouvernement, déplore le retard dans la procédure administrative relative à la violation de la convention collective et souligne que les faits allégués dans la plainte datent de 1992. Le comité souligne que les procédures relatives aux violations de la convention no 98 devraient être menées à bien rapidement, afin que les mesures de redressement nécessaires soient réellement efficaces. Un retard excessif dans l'examen des cas et, en particulier, l'absence de décision pendant une longue période équivaut à un déni de justice et donc à la négation des droits syndicaux des intéressés.
20. Au sujet du cas no 1781, le comité prend note avec intérêt des actions entreprises par le ministère du Travail dans le sens de certaines recommandations antérieurement formulées par le comité sur le conflit collectif au sein de l'entreprise Geest Caribbean Ltd. Le comité prend note également des informations du gouvernement selon lesquelles les procédure pénales ont été suspendues, les intéressés n'ayant pu être retrouvés. Le comité note que l'entreprise en question a cessé de fonctionner au Costa Rica en mai 1996 et demande au gouvernement d'indiquer quelles sont, aux termes de la législation, les possibilités d'appliquer l'accord du 16 mai 1996 compte tenu du récent arrêt des activités de l'entreprise en question.
Cas nos 1594 et 1846 (Côte d'Ivoire)
21. S'agissant du cas no 1594 (Côte d'Ivoire), le comité avait demandé au gouvernement de s'efforcer de prendre des mesures pour que les travailleurs licenciés à Irho Lame en raison de leurs activités syndicales légitimes obtiennent leur réintégration dans leurs postes de travail. [Voir 300e rapport, paragr. 17, approuvé par le Conseil d'administration en novembre 1995.]
22. Depuis lors, la Confédération mondiale du travail (CMT), dans une communication du 14 juin 1996, a expliqué les raisons pour lesquelles Dignité a refusé les propositions du gouvernement au sujet de la réintégration des travailleurs grévistes à Irho Lame. Selon elle, ces propositions étaient injustes et discriminatoires puisqu'avant l'arrivée de la mission de contacts directs en avril 1994 le gouvernement n'avait proposé de réintégrer que 200 travailleurs sur 618. En janvier 1995, après le passage de la mission de contacts directs, il n'a été proposé de reprendre que 100 travailleurs à raison de 25 par semestre pendant quatre semestres. Les autres travailleurs grévistes (des ouvriers) restaient licenciés sans droit. Par ailleurs, la CMT ajoute que rien n'a été fait pour réintégrer les travailleurs à Blohorn, Sodeci, Scaf Bassam, Nelci et Soat. Elle souligne qu'aucune des recommandations de la mission de contacts directs concernant le port autonome d'Abidjan n'a été mise en uvre.
23. Dans une communication du 4 septembre 1996, le gouvernement rappelle que Dignité a remporté les élections sociales dans plusieurs entreprises et qu'elle est associée depuis le retour du pluralisme syndical aux questions touchant les travailleurs. Le gouvernement explique qu'en matière d'élections sociales l'initiative appartient aux employeurs et que l'inspecteur du travail n'intervient qu'en cas de carence de l'employeur. Le ministre de l'Emploi a assuré que les élections seraient organisées au port autonome d'Abidjan et l'administration a entrepris des consultations à cette fin. En outre, elle a indiqué dans une lettre du 10 mai 1995, au président du Syndicat des employés manutentionnaires du port (SEMPA) que le SYLIDOPACI, syndicat rival, qui compte un certain nombre de syndicalistes parmi les dockers, doit pouvoir exercer librement ses activités syndicales. Enfin des élections sociales ont eu lieu à Cosmivoire, Blohorn et Cotivo.
24. S'agissant du conflit à Irho Lame, le gouvernement indique que les dénommés Dabone Hassan et Diebre Boukari sont poursuivis pour violence et voies de fait, qu'ils ont été placés sous mandat de dépôt le 30 janvier 1995 et que leur affaire est en instance devant le juge d'instruction. Le gouvernement rappelle qu'après la mission du BIT la direction d'Irho Lame, pour des raisons de difficultés économiques, a proposé un plan progressif de réinsertion de 100 employés. Ce plan a été refusé par le Secrétaire général de Dignité qui a exigé la réintégration immédiate de tous les travailleurs en grève depuis près de deux ans. Le gouvernement affirme qu'il s'est efforcé de trouver une solution à ce conflit.
25. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des élections sociales au port autonome d'Abidjan ainsi que des développements relatifs à la réintégration des travailleurs licenciés à la suite de ces conflits du travail. De plus, le comité exprime sa très vive préoccupation au sujet du maintien en détention de plusieurs syndicalistes arrêtés dont l'affaire a été examinée dans le cas no 1846. Il rappelle avec fermeté le contenu de sa recommandation au paragraphe 267 de son 302e rapport où il a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient libérés immédiatement Dabone Hassan, Denemou Augustin, Karim Sawadogo et Kagambega Philippe. Il insiste pour que le gouvernement le tienne informé des mesures prises à cet égard.
Cas no 1628 (Cuba)
26. Le comité a examiné ce cas à sa session de mai 1993. [Voir 287e rapport, paragr. 268 à 282.] Il avait alors demandé au gouvernement de se prononcer immédiatement sur l'enregistrement de l'Union générale des travailleurs de Cuba (UGTC) -- dont le nom a été changé par la suite en Union syndicale des travailleurs de Cuba (USTC) -- et de le tenir informé de toute mesure qui serait adoptée à cet égard. Par communication du 16 décembre 1993, le gouvernement avait critiqué les recommandations formulées par le comité et avait indiqué en particulier que le cas manquait d'objectivité juridique car la demande initialement présentée par M. Rafael Gutierrez Santos au ministère de la Justice (demande d'inscription d'une soi-disant organisation syndicale) avait été abandonnée par lettre du 1er avril 1992, transmise au comité. A sa réunion de mars 1994, le comité avait pris note des observations du gouvernement et décidé de les transmettre à l'organisation plaignante, afin qu'elle envoie ses commentaires et toute information utile à ce sujet, en particulier tout document qui prouverait la demande d'inscription ou d'enregistrement de l'organisation en question. [Voir 292e rapport, paragr. 21.]
27. Dans sa communication du 30 juin 1995, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) signale que, lors des événements qui secouèrent Cuba au cours de l'été 1994, des milliers de citoyens cubains quittèrent l'île, parmi lesquels figurait M. Rafael Gutierrez Santos, président de l'USTC. La reconnaissance de l'USTC comme organisation syndicale n'a toujours pas été accordée. Toutefois, les activités de l'organisation n'ont pas été paralysées et les membres ont élu le 13 septembre 1994 un nouveau comité directeur. En outre, la CISL déclare que M. Rafael Gutierrez n'a pas demandé le retrait de sa demande d'enregistrement mais a simplement informé le gouvernement du changement de nom de l'organisation. Dans sa communication du 31 mai 1996, la CISL indique que l'USTC n'est toujours pas reconnue, bien qu'elle ait prospéré et qu'elle compte des affiliés dans plusieurs provinces du pays. L'USTC affirme regrouper 3 000 adhérents. La CISL ajoute que M. Pedro Rubio Balbin, président de l'USTC, a été victime d'une perquisition de la police politique à son domicile, qui est aussi le siège de l'organisation, et d'une saisie de toute la documentation et des ressources minimales indispensables à la bonne marche de l'organisation syndicale.
28. Dans sa communication du 12 septembre 1996, le gouvernement déclare que, après analyse du contenu des deux communications de l'organisation plaignante et après avoir effectué les enquêtes pertinentes, il s'est avéré que les personnes mentionnées comme dirigeants de l'organisation appelée Union syndicale des travailleurs de Cuba n'ont pas la qualité de syndicalistes. Cette soi-disant organisation syndicale n'est connue dans aucun centre de travail du pays et ses dirigeants n'ont été élus par aucun collectif de travailleurs. Ils ne représentent et n'ont représenté à aucun moment un collectif de travailleurs. Cette situation amène à penser que le comité devrait se conformer au contenu de la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, qui protège les travailleurs dans l'exercice des droits syndicaux, et non des personnes qui invoquent cette convention sans remplir les exigences minimales pour exercer une activité syndicale réelle en utilisant une fausse image de syndicalistes à d'autres fins. Le gouvernement rappelle les dispositions du Code du travail qui garantissent le droit des travailleurs de constituer des syndicats sans autorisation préalable, le droit de se réunir et d'exprimer librement leurs opinions.
29. Par ailleurs, il n'a pas été possible de vérifier la véracité de la perquisition de domicile mentionnée dans une des communications de la CISL. Les services de police n'ont aucune trace de cette perquisition et aucune plainte n'a été déposée à ce sujet. En raison de l'absence de bien-fondé des arguments de la CISL, le comité ne devrait pas poursuivre artificiellement le traitement de ce cas, car il ne s'agit pas d'une activité syndicale protégée par la convention no 87.
30. Le comité prend note des informations fournies par le gouvernement qui ne contiennent pas d'éléments susceptibles de modifier les conclusions auxquelles il avait abouti dans ses rapports antérieurs. Le comité déplore que, depuis 1992, l'USTC n'ait pas été reconnue juridiquement par les autorités, question qui n'a rien à voir avec son degré de représentativité. Il insiste pour que cette organisation indépendante de la structure syndicale existante reconnue soit enregistrée et puisse fonctionner pleinement et sans discrimination. Le comité observe avec préoccupation qu'un autre cas relatif à Cuba (no 1805) examiné dans le présent rapport a également trait au déni de reconnaissance d'une autre organisation syndicale indépendante. Le comité se réfère aux conclusions formulées dans ce cas et en particulier aux commentaires de la commission d'experts demandant au gouvernement de garantir dans la législation et dans la pratique le droit de tous les travailleurs et employeurs sans distinction d'aucune sorte de constituer sans autorisation préalable des organisations de leur choix, hors de toute structure syndicale existante s'ils le désirent (article 2 de la convention no 87) ainsi que le droit d'élire librement leurs représentants (article 3 de la convention no 87). [Voir rapport III (partie 4A), CIT, 82e session, 1995, p. 173.]
Cas no 1641 (Danemark)
31. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de novembre 1994. [Voir 294e rapport, paragr. 39 à 77.] La Confédération danoise des associations professionnelles (AC), organisation plaignante en l'espèce, signale, dans une communication datée du 19 juin 1996, qu'elle est parvenue à un accord avec le ministre du Travail au sujet de la législation qui imposait un plafond salarial aux offres d'emploi public pour les chômeurs de longue durée. Le comité prend note avec intérêt de ces informations.
Cas no 1860 (République dominicaine)
32. Lors de l'examen du cas en mars 1996 [voir 302e rapport, paragr. 281], le comité avait demandé au gouvernement de lui communiquer le jugement rendu à l'égard du militaire qui avait tiré en direction du travailleur Alexander García lors d'une manifestation et de procéder à une enquête au sujet de l'allégation relative à l'agression commise contre une jeune fille au cours d'une autre manifestation qui avait eu lieu le 18 septembre 1995. Dans une communication datée du 9 mai 1996, le gouvernement indique que le Conseil de guerre qui a jugé le soldat Wagner Valentín Consuegra Rodríguez l'a condamné à une peine de quatre mois de prison pour homicide involontaire. Le comité prend note de ces informations; il relève aussi que les autorités n'ont pas été en mesure de vérifier la véracité de l'allégation relative à l'agression commise contre une jeune fille lors de la manifestation du 18 septembre 1995 étant donné que le nom de cette personne n'a pas été communiqué.
Cas no 1824 (El Salvador)
33. Le comité a examiné ce cas à sa réunion de mars 1996. [Voir 302e rapport, paragr. 142 à 160.] Il avait formulé les recommandations suivantes:
34. Par communication du 17 juillet 1996, le gouvernement déclare que M. Huezo a été arrêté pour agression envers un membre de la police nationale et pour délits de violation de lieu de travail, résistance à l'autorité, violation du libre exercice du droit de grève et du droit au travail. Le gouvernement indique en outre que M. Huezo a été libéré le 20 avril 1996 car les sanctions prévues en cas de culpabilité n'excèdent pas trois ans. D'autres plaintes contre ce dirigeant syndical sont en instance depuis novembre 1994 devant l'autorité judiciaire pour délits de faux témoignage, enlèvement, extorsion, menaces de mort, détention illégale, diffamation, dommages et préjudices.
35. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de le tenir informé sur les procédures judiciaires en cours à l'encontre de M. Huezo. En outre, constatant que le gouvernement n'a pas fourni les informations demandées sur les autres allégations examinées, le comité exprime l'espoir que le gouvernement enverra prochainement ces informations.
Cas no 1468 (Inde)
36. Ce cas, qui porte sur sept procédures judiciaires différentes relatives aux graves incidents survenus en 1988 dans l'Etat de Tripura, dans le cadre desquelles des accusations ont été portées contre des syndicalistes, a été examiné par le comité pour la dernière fois à sa réunion de novembre 1995. [Voir 300e rapport, paragr. 20.] Le comité avait alors noté que les plaintes avaient été retirées, mettant fin à ces affaires, et qu'un autre procès avait entraîné la condamnation de quatre personnes qui avaient en outre plaidé coupables. Il avait noté également que les trois autres affaires étaient encore en instance. Dans une communication datée du 3 septembre 1996, le gouvernement indique, à propos de ces trois dernières affaires, que le juge subdivisionnaire n'a pas retenu les accusations dans un cas tandis que, dans les deux autres, les accusés ont été acquittés à l'issue du procès. Le comité prend note de cette information avec intérêt.
Cas no 1817 (Inde)
37. Ce cas concernait la promulgation par le gouvernement des Règles sur les services publics centraux (accréditation des syndicats de service) de 1993. A sa session de mars 1996 [voir 302e rapport, paragr. 297 à 328], le comité avait demandé au gouvernement de prendre des mesures en vue d'amender certaines dispositions des Règles en insistant notamment sur le fait que les restrictions limitant l'affiliation des agents et employés de la fonction publique à un syndicat réservé à cette seule catégorie de travailleurs sont admissibles à condition que ces organisations ne doivent pas se limiter aux agents d'un ministère, département ou service particulier et que les organisations de base d'agents de la fonction publique puissent s'affilier librement aux fédérations et confédérations de leur choix.
38. Dans une communication du 30 septembre 1996, le gouvernement, rappelant que l'Inde n'a pas ratifié les conventions sur la liberté syndicale, insiste sur le statut spécial des fonctionnaires en vertu duquel ils doivent être traités différemment des autres travailleurs. Le gouvernement rappelle que les fonctionnaires jouissent d'un haut degré de sécurité d'emploi et qu'ils doivent rester impartiaux dans l'exécution de leurs tâches. Le gouvernement ajoute que les préoccupations légitimes des fonctionnaires telles que la sécurité de l'emploi, les salaires, la santé et autres éléments du bien-être sont traitées de manière appropriée par les termes des nominations et des Règles. Ils n'ont pas besoin de la protection accordée par la législation générale du travail aux autres travailleurs. Le gouvernement conclut qu'il n'est pas en position de prendre des mesures qui tendraient à diluer la distinction existant entre les fonctionnaires et les travailleurs du secteur privé. Il ne peut donc donner suite aux recommandations du comité.
39. Prenant note de ces informations et insistant sur le fait que le droit de tous les travailleurs, y compris les agents de la fonction publique, de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier constitue un des principes fondamentaux de l'OIT, le comité ne peut qu'exprimer le ferme espoir que le gouvernement reconsidérera sa position à cet égard dans un proche avenir.
Cas no 1840 (Inde)
40. A sa réunion de mars 1996, le comité a notamment demandé au gouvernement de prendre des mesures afin que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées pour que, lors des réunions publiques, la police ne recoure à la force que dans des situations où l'ordre public est gravement menacé. Le comité avait également demandé au gouvernement de diligenter immédiatement une enquête indépendante en vue de déterminer le bien-fondé de l'intervention policière à la plantation de théiers Choibari, district de Dhuri, Etat d'Assam, le 1er mai 1995.
41. Dans une communication du 20 juin 1996, le gouvernement déclare que la recommandation du comité concernant l'usage de la force par les autorités publiques a été portée à la connaissance du gouvernement de l'Etat d'Assam pour qu'il l'applique à l'avenir.
42. En outre, au sujet de la nécessité de mener une enquête indépendante pour préciser les circonstances des événements du 1er mai 1995 à la plantation de théiers choibari, le gouvernement indique que l'enquête déjà menée par le commissaire d'Etat au travail respectait cette exigence d'indépendance. Le comité prend note de ces informations. Il exprime l'espoir qu'à l'avenir les travailleurs et leurs organisations pourront tenir des réunions publiques à l'occasion du 1er mai.
Cas no 1552 (Malaisie)
43. Lors du dernier examen du cas à sa session de novembre 1995 [voir 300e rapport, paragr. 25], le comité avait noté que la Haute Cour avait infirmé une décision du tribunal du travail qui avait rejeté la demande de réintégration et d'indemnisation présentée par 21 travailleurs licenciés de l'entreprise Harris Solid-State-Sdn-Bhd. La Haute Cour avait également ordonné un nouvel examen du dossier par une autre chambre du tribunal du travail. Le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé de la décision rendue par le tribunal du travail.
44. Dans une communication datée du 7 octobre 1996, le gouvernement indique que la cour d'appel a ordonné la réintégration des 21 travailleurs licenciés et qu'il est probable qu'un recours sera présenté par les employeurs devant la Cour fédérale.
45. La Fédération internationale des travailleurs de la métallurgie a aussi fourni des informations sur l'arrêt de la cour d'appel dans des communications datées des 21 août et 7 octobre 1996. Selon la dernière communication, les 21 syndicalistes ont été réintégrés et ont repris leur travail le 1er octobre 1996. Toutefois, ils n'ont apparemment pas reçu leurs arriérés de salaires des six dernières années dont la restitution a été ordonnée par la cour.
46. Le comité prend note de ces informations avec intérêt et prie le gouvernement de le tenir informé de tout développement dans la mise en uvre de l'arrêt de la cour d'appel.
Cas no 1698 (Nouvelle-Zélande)
47. Le comité a demandé au gouvernement lors de sa session de juin 1996 [voir 304e rapport, paragr. 14-17] de le tenir informé de tout jugement significatif qui serait prononcé sur la mise en uvre de la loi sur les contrats d'emploi (la Loi) ainsi que de l'évolution des discussions qui doivent avoir lieu entre le NZCTU et le NZEF. Dans des communications en date des 18 juin et 25 octobre 1996, le gouvernement a fourni des informations additionnelles en ce qui concerne différentes questions soulevées par l'affaire Capital Coast Health.
48. Le gouvernement a précisé que deux autres décisions avaient été rendues par la cour d'appel relatives aux communications entre les employeurs et les salariés lors des négociations: New Zealand Fire Service Commission cl. Ivany and Ors, CA 145/95, et Airways Corporation of New Zealand Ltd. cl. New Zealand Airline Pilots' Association Union of Workers Inc. and Dallas Richard Bean and Ors, CA 251/95. Dans ces deux cas, la cour d'appel a confirmé le principe posé dans l'affaire Capital Coast Health selon lequel, lorsqu'un employeur accepte de négocier, il doit le faire avec le représentant autorisé des employés. La cour d'appel a néanmoins infirmé les décisions rendues par le Tribunal du travail qui avait émis des injonctions dans les deux cas contre l'employeur. Elle insiste sur le fait que chaque cas requiert un examen du contenu et des objectifs de toute tentative de persuasion en vue de déterminer si les communications directes de l'employeur avec les employés violent les obligations de l'employeur telles que stipulées à l'article 12(2) de la Loi. Si les communications en question ne sont qu'une tentative afin de convaincre les employés du caractère raisonnable de la position de l'employeur et que toutes les parties comprennent que la question doit être négociée avec les représentants, tel qu'il a été décidé dans les deux affaires, il n'y a pas de violation de l'article 12(2). D'un autre côté, la cour d'appel a confirmé qu'il serait contraire à la Loi si les employeurs tentaient d'exclure un représentant et de conclure des contrats directement avec les salariés, de chercher à convaincre les employés de retirer ou de remettre en question une autorisation accordée à un représentant. L'examen que la cour fera, aux termes de l'article 12(2), devra prendre en considération la nature de la relation d'emploi, le contexte général et l'historique de la plainte ainsi que les caractéristiques particulières de chaque cas.
49. Dans sa dernière communication, le gouvernement fournit deux récentes décisions de tribunaux du travail qui concernent l'interprétation de la loi. Le gouvernement indique aussi qu'il a eu des discussions informelles avec les organisations centrales d'employeurs et de travailleurs qui ont, notamment, porté, de façon générale, sur certains aspects du cadre légal de la négociation collective. Le gouvernement ajoute qu'il tiendra le comité informé du résultat des discussions.
50. Le comité prend note de ces informations et prie le gouvernement de continuer de le tenir informé de toutes décisions pertinentes qui concernent la mise en uvre de la loi sur les contrats d'emploi ainsi que de l'évolution de la discussion entre le NZCTU et le NZEF. Néanmoins, le comité réaffirme ses recommandations antérieures et prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que ces recommandations soient mises en uvre.
Cas no 1726 (Pakistan)
51. Lors de son dernier examen du cas en novembre 1994 [voir 295e rapport, paragr. 23], le comité avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour effectuer une enquête indépendante et impartiale sur les points relatifs à des arrestations, détentions et actes de torture subis par des travailleurs du projet d'autoroute de Daewo, et de le tenir informé des résultats et des mesures prises pour remédier à la situation. Le gouvernement avait été également prié de tenir le comité informé des moyens engagés pour assurer l'enregistrement du syndicat Awami ainsi que pour amender la législation en vue de garantir aux travailleurs le droit d'organisation et de négociation collective, conformément aux conventions nos 87 et 98.
52. Dans une communication en date du 14 mai 1996, le gouvernement indique que le tribunal d'appel du travail a confirmé la décision de la Cour du travail d'ordonner aux autorités compétentes d'enregistrer le syndicat Awami et que le certificat d'enregistrement a maintenant été accordé.
53. Le comité prend note avec intérêt de ces informations. Il note cependant que le gouvernement n'a pas répondu à la demande du comité pour qu'une enquête indépendante soit menée sur les arrestations, détentions et actes de torture subis par des travailleurs. Le comité demande donc une fois de plus instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que ces questions fassent l'objet d'une enquête indépendante et de le tenir informé des résultats. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé des mesures prises en vue d'amender la législation afin d'assurer le respect du droit des travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement.
Cas no 1826 (Philippines)
54. Lors du dernier examen du cas en mars 1996 [voir 302e rapport, paragr. 386 à 414], le comité avait en particulier prié instamment le gouvernement de prendre immédiatement des mesures afin que des élections visant à désigner l'organisation la plus représentative aient lieu à l'entreprise Cebu Mitsumi à Danao City.
55. Dans une communication datée du 31 mai 1996, le Congrès des syndicats des Philippines (TUCP) a fourni des informations sur l'absence de mise en uvre par le gouvernement des recommandations du comité. En particulier, le TUCP déclare que les élections au sein de l'entreprise Cebu Mitsumi ont été organisées les 24 et 25 avril 1996, mais très peu de travailleurs purent voter. Selon le TUCP, la direction de l'entreprise a contrôlé le processus électoral en déterminant l'endroit où le vote aurait lieu, le nombre de travailleurs habilités à voter à un moment donné et la manière dont le vote serait effectué. Sur le nombre d'électeurs inscrits égal à environ à 9 000 travailleurs, seulement 300 choisis par la direction ont pu voter le premier jour et le même nombre le lendemain. Le TUCP envoie des déclarations sous serment de travailleurs témoignant que la direction les a renvoyés chez eux la veille de l'élection en indiquant que les 24 et 25 avril étaient des jours de congé forcé. Le TUCP ajoute que le deuxième jour une centaine de gorilles de l'entreprise ont bloqué la porte d'entrée et éloigné les employés qui attendaient pour voter. Dans ces conditions, les représentants du Syndicat des travailleurs associés (ALU-TUCP) se présentèrent pour demander la suspension des opérations électorales. Ils furent alors harcelés par les gorilles alors qu'ils quittaient les lieux pour sauvegarder leur sécurité. Le ministre du Travail et de l'Emploi et la direction continuèrent néanmoins les opérations électorales malgré l'absence des représentants syndicaux. L'ALU-TUCP a porté l'affaire à l'attention du Secrétaire au travail et à l'emploi pour qu'il prenne immédiatement les mesures appropriées.
56. Le comité prend note de ces informations. Il regrette profondément que le gouvernement n'ait pas répondu aux allégations du TUCP. Il demande instamment au gouvernement d'instituer immédiatement une enquête indépendante sur le déroulement des élections d'avril 1996 dans l'entreprise Cebu Mitsumi et de tenir le comité informé des résultats. Si les allégations s'avéraient fondées, il lui demande instamment de prendre les mesures nécessaires pour organiser de nouvelles élections en garantissant leur impartialité et l'absence d'ingérence. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
Cas no 1785 (Pologne)
57. Dans son 302e rapport, approuvé par le Conseil d'administration en mars 1996, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation relative à la dévolution du patrimoine syndical confisqué durant la période de la loi martiale. [Voir paragr. 57 à 59.]
58. Dans une communication du 12 août 1996, le gouvernement indique que, le 10 mai 1996, la Diète a adopté les amendements à la loi du 25 octobre 1990 sur la restitution des biens des syndicats. La nouvelle loi a été promulguée le 4 juillet et est entrée en vigueur le 4 août 1996. La loi tient compte de la décision du tribunal constitutionnel du 25 février 1992 et permettra au gouvernement de mettre en place une procédure de dévolution des biens, aux termes de laquelle les biens de l'ancien Conseil central des syndicats seront partagés en deux parts égales entre NSZZ Solidarnosc et l'Alliance nationale des syndicats de Pologne (OPZZ). Le projet d'accord sur la division des biens entre les deux centrales n'ayant pas abouti, le ministre du Travail doit aux termes de la loi nouvelle, élaborer une liste des biens et déterminer par arrêté, en consultation avec les deux centrales, quels biens seront la propriété exclusive de l'une ou de l'autre. L'arrêté en question devrait être publié avant le 30 juin 1997.
59. Le comité prend note de ces informations. Il demande au gouvernement de garantir que le partage des biens entre les deux centrales se fasse équitablement et conformément à ses recommandations antérieures. Il lui demande également de continuer à le tenir informé de tout progrès intervenu dans la question de la dévolution définitive du patrimoine syndical et de communiquer le texte de l'arrêté du ministre du Travail.
Cas no 1788 (Roumanie)
60. Dans son 302e rapport approuvé par le Conseil d'administration en mars 1996 (paragr. 60), le comité avait notamment demandé au gouvernement de le tenir informé de l'issue des recours judiciaires introduits par les trois syndicalistes qui avaient participé à la grève des chemins de fer de 1993 et d'indiquer si les mesures de licenciement qui les avaient frappés avaient été levées. Dans une communication du 20 mai 1996, le gouvernement indique que le président de la Société nationale des chemins de fer de Roumanie (SNCFR) a confirmé dans une note du 8 mai 1996 que, suite aux demandes qu'ils avaient présentées, Ioan Vlad, Nicolae Vlad et Francisc Ungureanu ont été réintégrés dans leur emploi le 23 novembre 1995, et qu'ils exercent des fonctions qui correspondent à leur qualification professionnelle et à leur ancienneté. Le comité prend note avec intérêt de cette information.
Cas no 1581 (Thaïlande)
61. A sa réunion de novembre 1995 [voir 300e rapport, paragr. 34], le comité a prié le gouvernement de communiquer copie du projet de loi modifiant la loi sur les relations du travail dans les entreprises publiques afin qu'il puisse l'évaluer à la lumière des principes de la liberté syndicale. Il lui a également demandé de le tenir informé de l'évolution de la procédure d'adoption du projet devant le Parlement.
62. Dans une communication en date du 11 juillet 1996, le gouvernement indique que le projet de loi en question est passé en deuxième et troisième lectures devant la Chambre des représentants le 17 avril 1996. Le Sénat, ayant approuvé les principes de ce projet de loi, a constitué une commission spéciale chargée d'examiner ce texte en profondeur avant qu'il ne soit soumis pour adoption à l'ensemble du Sénat.
63. Le comité prend note de cette information. En outre, il prend note d'un récent avant-projet relatif à cette loi, qui a été porté à son attention et qui diverge encore des principes de la liberté syndicale sur un certain nombre de points importants, en particulier en ce qui concerne le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, de s'affilier à ces organisations et d'exercer leurs activités sans ingérence. Le comité appelle l'attention du gouvernement sur la possibilité de recourir à l'assistance technique du BIT pour faciliter la recherche de solutions à ces divergences. Il veut croire que le projet de loi sera adopté dans un proche avenir et que, dans sa forme finale, ce texte sera conforme aux principes de la liberté syndicale. Il prie le gouvernement de le tenir informé de tout progrès à cet égard.
Cas no 1856 (Uruguay)
64. Lors de son examen du cas en mars 1996, le comité avait recommandé: Pour ce qui est du licenciement de 39 travailleurs qui serait intervenu pour raisons financières, quatre jours après la fin du conflit collectif à l'entreprise Perses SA, le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête sur les motifs de ces licenciements et, s'il est démontré qu'il s'agissait de motifs antisyndicaux, de prendre les initiatives nécessaires pour que les intéressés soient réintégrés à leurs postes de travail. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard. [Voir 302e rapport, paragr. 439.]
65. Par communications des 9 septembre et 4 octobre 1996, le gouvernement indique qu'après avoir eu connaissance de la décision de restructuration du personnel de l'entreprise la Direction nationale du travail a convoqué les représentants de la Fédération uruguayenne de la santé (FUS) et de la Centrale des travailleurs (PIT-CNT) pour les informer de la décision de l'entreprise. Le gouvernement ajoute que, selon l'entreprise, elle a dû adopter la décision de restructurer le personnel en raison de diverses circonstances économiques. Elle a consisté à réduire le personnel de 8 pour cent (110 salariés environ). Parmi les licenciés, il y a une majorité de non-syndiqués. Le gouvernement signale que ni le syndicat de base (AFP), ni la Fédération uruguayenne de la santé (FUS), ni la Centrale des travailleurs (PIT-CNT) n'ont demandé la médiation du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Enfin, le gouvernement ajoute que, compte tenu de la requête du comité, l'Inspection générale du travail et de la sécurité sociale procède à une enquête à cet égard. Le gouvernement tiendra le comité informé des résultats de cette procédure. Le comité note les déclarations du gouvernement et demeure en attente des informations promises.
Cas no 1797 (Venezuela)
66. Le comité a examiné ce cas à sa réunion de mars 1995 [voir 297e rapport, paragr. 127 à 136] où il a suggéré au gouvernement de ne pas maintenir le projet de loi sur la protection de l'exercice de la démocratie interne dans les syndicats, les fédérations et les confédérations de travailleurs présenté devant le Congrès de la République, étant donné que ce projet contenait certaines dispositions contraires aux principes de la liberté syndicale. Il avait en outre rappelé au gouvernement que l'assistance technique du Bureau était à sa disposition pour l'élaboration d'un nouveau projet de loi. Dans une communication du 2 août 1996, le gouvernement a envoyé un nouveau projet de loi intitulé loi sur les droits démocratiques des travailleurs dans leurs syndicats, fédérations et confédérations. Constatant que ledit projet de loi comporte diverses dispositions contraires à l'autonomie syndicale et réglemente de manière trop détaillée la procédure électorale des organisations de travailleurs et les conditions d'éligibilité des dirigeants syndicaux, le comité rappelle à nouveau au gouvernement que le Bureau est à sa disposition s'il souhaite obtenir une assistance technique à cet égard.
Cas no 1822 (Venezuela)
67. Lors de l'examen antérieur du cas par le comité, à sa session de juin 1996 [voir 304e rapport, paragr. 499 à 511], restait en instance une allégation relative à la fermeture de l'entreprise Editores El Nuevo País CA, due à un simulacre de crise financière puisqu'un mois plus tard le quotidien El Nuevo País réapparaissait avec un nouveau personnel, sans syndicat et sans négociation collective. Le comité avait alors formulé la recommandation suivante: Le comité considère que la fermeture de l'entreprise Editores El Nuevo País CA a pu être effectuée à des fins antisyndicales, et il prie le gouvernement d'ouvrir une enquête et, si une telle intention est prouvée, d'initier des procédures pour réparer le préjudice causé au Syndicat national des travailleurs de la presse ainsi qu'à ses anciens membres employés par l'entreprise en question, y compris leur réintégration dans leur emploi s'ils le souhaitent. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
68. Dans une communication du 7 juin 1996, le gouvernement déclare que les discussions menées pendant six mois du projet de convention collective de travail entre le Syndicat national des travailleurs de la presse (SNTP) et l'entreprise Editores El Nuevo País n'ont abouti à aucun accord. En conséquence, le syndicat a demandé de convertir les discussions de conciliation en une demande conflictuelle envers l'entreprise. Est alors intervenue la fermeture de l'entreprise obéissant à des motifs financiers. Au cours des négociations collectives, et après nomination de la commission de conciliation, les travailleurs mirent fin au lien qui les unissait à l'entreprise, en aboutissant à un accord ayant autorité de chose jugée, conformément à la loi organique du travail. En conséquence, les comptes des travailleurs furent liquidés, l'accord ayant été homologué par l'inspection du travail (la copie des relevés d'accord figure en annexe).
69. Le comité prend note de ces informations. Il insiste néanmoins sur l'importance d'effectuer des enquêtes sur toutes les plaintes relatives à des pratiques discriminatoires afin qu'elles soient réparées et que les sanctions prévues dans la législation soient appliquées si leur caractère antisyndical est avéré.
* * *
70. Finalement, en ce qui concerne les cas nos 1618 (Royaume-Uni), 1685 (Venezuela), 1712 (Maroc), 1719 (Nicaragua), 1723 (Argentine), 1725 (Danemark), 1777 (Argentine), 1783 (Paraguay), 1791 (Tchad), 1793 (Nigéria), 1795 (Honduras), 1799 (Kazakstan), 1806 (Canada/Yukon), 1807 (Ukraine), 1809 (Kenya), 1811 (Paraguay), 1816 (Paraguay), 1818 (Zaïre), 1819 (Chine), 1821 (Ethiopie), 1830 (Turquie) et 1837 (Argentine), le comité demande aux gouvernements concernés de le tenir informé des développements relatifs aux affaires les concernant. Il espère que ces gouvernements fourniront rapidement les informations demandées.
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Brésil
présentée par
la Fédération syndicale mondiale (FSM)
Allégations: discrimination à l'encontre d'une organisation syndicale
71. La plainte figure dans une communication de la Fédération syndicale mondiale (FSM) datée du 20 février 1996. La FSM a communiqué des informations complémentaires dans une communication du 19 mars 1996. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication datée du 31 mai 1996.
72. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
73. Dans ses communications des 20 février et 19 mars 1996, la Fédération syndicale mondiale (FSM) allègue que l'une des organisations qui lui est affiliée, la Centrale générale des travailleurs (CGT) du Brésil, est victime de discrimination antisyndicale de la part du gouvernement qui l'a exclue des organes tripartites existant dans le pays (Conseil de sécurité sociale et de santé, Conseil du Fonds de garantie pour la durée du service et autres organes tripartites dans lesquels siègent les autres centrales syndicales). En outre, il n'a pas retenu de représentant de la CGT parmi les délégués présents aux sessions de la Conférence internationale du Travail, notamment à sa 83e session (1996), lors de laquelle la CGT aurait dû légitimement être représentée parmi les délégués titulaires du groupe des travailleurs en vertu du principe de rotation.
74. La Fédération syndicale mondiale précise que la CGT a été créée en 1986 et qu'elle a déjà convoqué trois congrès nationaux. Elle représente plus de 8 millions de membres. Le troisième congrès, qui s'est tenu en septembre 1994 à São Paulo, a accueilli 811 organisations syndicales de niveau national (syndicats, fédérations et confédérations). Des délégations internationales de 40 pays d'Europe, d'Asie et d'Amérique latine ont également participé à ce congrès en qualité d'observateurs. Les autorités du Brésil ainsi que des personnalités représentatives des milieux parlementaires et des partis politiques ont en outre assisté à sa séance inaugurale.
75. La FSM ajoute que la CGT est une organisation représentative du troisième degré, composée d'organisations syndicales de premier et de deuxième degré, qui déploie d'importantes activités au Brésil dans le cadre de plusieurs programmes sociaux, et notamment: a) des programmes d'alimentation; b) des programmes de santé et de prévention du SIDA; c) des programmes d'alphabétisation et de formation professionnelle à l'intention des travailleurs. Ces activités ont été mises en uvre par le truchement d'un accord conclu avec le ministère de l'Education et de la Culture et l'appui de chacun des Etats du Brésil. Le projet a permis de former plus de 6 000 travailleurs en 1994. En 1995, ils étaient 3 200 à avoir reçu une formation; d) plusieurs autres initiatives de la CGT ont été appréciées et reconnues par diverses institutions sociales.
B. Réponse du gouvernement
76. Dans sa communication du 31 mai 1996, le gouvernement déclare que l'Etat brésilien n'intervient nullement dans la désignation des représentants des travailleurs pour ce qui est de la composition des conseils tripartites et des délégations assistant à la Conférence internationale du Travail ou autres réunions techniques tripartites à vocation internationale.
77. Le gouvernement ajoute que les tentatives d'inclure la Centrale générale des travailleurs parmi les organisations invitées à désigner un représentant ont été catégoriquement repoussées par les autres centrales syndicales brésiliennes. Il joint à l'appui de sa déclaration une lettre de ces trois centrales dans laquelle celles-ci expriment leur opposition à la désignation d'un représentant de la CGT parmi les délégués appelés à participer à la 80e session de la Conférence internationale du Travail (1993) au motif que nul n'ignore que la CGT ne satisfait à aucun critère de représentativité. Pour conclure, le gouvernement précise qu'en application de l'article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l'OIT il a consulté les organisations les plus représentatives d'employeurs et de travailleurs et a désigné les délégués appelés à participer à la Conférence internationale du Travail en accord avec ces organisations.
78. En ce qui concerne la non-désignation d'un représentant de la Centrale générale des travailleurs (CGT) parmi les membres de la délégation brésilienne à la Conférence internationale du Travail, le comité rappelle que la question de la représentation à la Conférence internationale du Travail relève de la compétence de la Commission de vérification des pouvoirs de la Conférence. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 659.] Le comité se réfère également aux conclusions formulées par la Commission de vérification des pouvoirs en 1996 au sujet d'une protestation émanant de la Centrale générale des travailleurs dont le texte est reproduit ci-après:
La commission souhaite souligner qu'il est du devoir du gouvernement de prendre toutes les dispositions raisonnables pour évaluer le caractère représentatif des différentes organisations conformément au droit international et à la pratique et que le gouvernement a l'obligation de consulter toutes les organisations les plus représentatives aux termes de l'article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l'OIT. Cependant, étant donné que l'organisation protestataire n'a fourni aucune preuve à l'appui de sa protestation, la commission décide de ne pas la retenir. [Voir Conférence internationale du Travail, Compte rendu provisoire no 5B, 83e session, Genève, 1996.]
79. En ce qui concerne l'exclusion de la Centrale générale des travailleurs (CGT) des organes tripartites existant dans le pays, le comité constate que le gouvernement affirme de manière générale que l'Etat n'intervient nullement dans la désignation des travailleurs pour ce qui est de la composition des conseils tripartites et se réfère à l'avis exprimé par les trois autres centrales du pays, selon lequel la CGT ne satisfait à aucun critère de représentativité. L'organisation plaignante a pourtant indiqué que la CGT représente plus de 8 millions de membres et que 811 organisations syndicales (syndicats, fédérations et confédérations) ont participé à son dernier congrès. Le comité conclut que le critère retenu par la CGT pour arguer de sa représentativité ne correspond pas à celui des trois autres centrales syndicales ni, si l'on s'en tient aux faits, à celui du gouvernement (qui l'a exclue de trois organes tripartites nationaux). Le comité rappelle qu'il n'est pas appelé à exprimer une opinion quant au droit d'une organisation d'être invitée à participer à des organes consultatifs ou paritaires, à moins que le fait de son exclusion ne constitue un cas flagrant de discrimination affectant les principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 942.] Le comité attire cependant l'attention sur le principe selon lequel la détermination du syndicat le plus représentatif devra toujours se faire d'après des critères objectifs et préétablis, de façon à éviter toute possibilité de partialité ou d'abus. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 314.] Etant donné que ni le gouvernement ni l'organisation plaignante n'ont indiqué le degré de représentativité de la Centrale générale des travailleurs par rapport aux autres syndicales, ni s'il existe des procédures légales permettant de déterminer la représentativité des centrales syndicales existantes, le comité invite le gouvernement à s'assurer que les décisions prises au sujet de la composition des organes tripartites nationaux tiennent compte du principe susmentionné.
80. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité demande au gouvernement de s'assurer que les décisions prises au sujet de la composition des organes tripartites nationaux sont conformes au principe selon lequel la distinction entre des organisations plus ou moins représentatives devrait toujours se fonder sur des critères objectifs et préétablis, de façon à éviter toute possibilité de partialité ou d'abus.
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de la Bulgarie
présentée par
le Syndicat national (SN)
Allégations: critères excessifs pour déterminer
la représentativité des organisations de travailleurs
au niveau national
81. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication du Syndicat national (SN) datée du 21 février 1994. Par la suite, le syndicat plaignant a transmis des informations complémentaires dans une communication du 31 mars 1994. Le gouvernement a adressé ses observations dans une communication en date du 18 mai 1995.
82. Lors de sa réunion de juin 1995, le comité a décidé d'ajourner l'examen du cas et de demander au syndicat plaignant de lui fournir certaines informations complémentaires [voir 299e rapport, paragr. 5]. Le syndicat plaignant lui a fait parvenir les informations sollicitées dans une communication du 15 novembre 1995. Le gouvernement a adressé à son tour de nouvelles observations dans une communication du 9 mai 1996.
83. La Bulgarie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du syndicat plaignant
84. Le Syndicat national allègue une ingérence des autorités publiques dans la procédure d'admission des organisations nationales de travailleurs et d'employeurs au Conseil national tripartite de coopération sociale. Selon le syndicat plaignant, le décret no 7/22.01.1993 adopté par le Conseil des ministres qui porte réglementation des principes et des conditions d'admission au Conseil national tripartite viole les conventions nos 87 et 98 ratifiées par la Bulgarie en ce qu'il impose aux organisations syndicales nationales d'être implantées dans les anciens districts urbains et non dans les districts administratifs et d'exercer leur activité dans la moitié des branches définies en 1996, sans tenir compte des nouvelles branches d'activité qui peuvent se constituer dans le cadre de l'évolution de l'économie.
85. Le syndicat plaignant explique que le décret a été adopté en application de l'article 3 du Code du travail dans sa teneur modifiée et entré en vigueur le 1er janvier 1993, qui dispose:
Article 3. Coopération technique
Paragraphe 3. Les organisations nationales de travailleurs peuvent être
considérées comme représentatives pour autant qu'elles
regroupent au moins 50 000 travailleurs occupés
dans plus de la moitié des branches d'activité existantes
et qu'elles sont constituées d'organes nationaux et régionaux
...
86. Le syndicat plaignant précise que le décret d'application no 7 du 22 janvier 1993 soumet l'admission au sein du Conseil de coopération tripartite nationale à des critères restrictifs qui ont pour effet de l'empêcher de conclure des conventions collectives et de limiter les réclamations syndicales autorisées aux deux seuls syndicats nationaux représentatifs du pays, à savoir CL Prodkrepa et la Confédération des syndicats indépendants de Bulgarie (CITUB).
87. Le syndicat plaignant communique le texte du décret no 7 où sont énumérés les critères de représentativité en la matière, à savoir la nécessité de fournir la liste des organes nationaux et régionaux, de même que les noms et adresses de leurs dirigeants; le nombre minimum de membres; le nombre d'organisations existantes dans les branches d'activité relevant des branches d'activité nationale classifiées en 1986; la structure par branche des organisations de travailleurs (50 syndicats de base par branche, comptant au moins cinq membres chacun); la structure locale des organisations nationales de travailleurs (constituées d'organes régionaux implantés dans 80 pour cent des anciens districts urbains et de 50 syndicats d'entreprise au niveau du district, comptant au moins cinq membres chacun).
88. Le syndicat plaignant indique qu'il a introduit un recours en nullité contre le décret no 7 de 1993 devant la Cour suprême.
B. Réponse du gouvernement
89. Le gouvernement reconnaît que, le 4 mai 1994, le syndicat plaignant a déposé un recours devant la Cour suprême en vue d'obtenir l'annulation du paragraphe 2 de l'article 3 du décret no 7 de 1993 qui confère au Conseil des ministres le pouvoir de décider de l'admission des organisations les plus représentatives au niveau national à des fins de coopération tripartite sur proposition du président du Conseil national de coopération sociale. Le gouvernement produit cependant le texte de la décision no 404 de la Cour suprême rendue le 23 mars 1995, par laquelle elle a rejeté ce recours.
90. Dans son arrêt, la Cour suprême déclare que l'article 3, paragraphe 2, du décret en cause exige une structure syndicale par branche et par circonscription territoriale. A son avis, cet article ne fait qu'établir une norme minimum pour l'effectif des syndicats et les organes territoriaux des syndicats; pour que l'impact de la représentativité sur les salariés soit indiscutable, il convient également de prendre en considération l'existence de structures territoriales syndicales dans l'ensemble du pays. Ce critère permet de garantir que les accords conclus au niveau central sont vraiment nationaux.
91. Le gouvernement ajoute que le décret ne restreint nullement la liberté de chaque syndicat d'adopter la structure de son choix et se borne à définir les critères quantitatifs de représentativité aux fins de la coopération tripartite. Il indique enfin qu'en vertu du décret no 7 les organisations de travailleurs doivent, pour être considérées comme les plus représentatives au niveau national, remplir les conditions suivantes: compter 50 000 membres au minimum, que leurs membres proviennent de la moitié des branches d'activité définies en 1986, couvrir 80 pour cent des districts urbains sur l'ensemble du territoire national, être constituées d'organes nationaux et régionaux, regrouper 50 syndicats de base par branche d'activité, comptant au moins cinq membres chacun et 50 organisations locales correspondant aux districts urbains.
C. Nouvelles informations communiquées
par le syndicat plaignant
92. Dans sa communication du 15 novembre 1995, le syndicat plaignant indique que la Cour suprême a rejeté le recours en nullité qu'il avait introduit contre le décret no 7 de 1993, qui porte réglementation des conditions à remplir par les organisations syndicales pour être reconnues comme représentatives. Mais il explique que, par l'entremise de plusieurs membres du Parlement, il a entrepris des démarches en vue d'obtenir la modification de certains articles du Code du travail et qu'il a élaboré un projet à cet effet, lequel, après avoir reçu l'approbation de la Commission des droits de l'homme, est actuellement à l'étude devant la Commission des questions du travail et des affaires sociales. Pour motiver les modifications et adjonctions qu'il propose d'apporter au Code du travail, le syndicat plaignant explique que ce Code permet actuellement une discrimination dans l'affiliation syndicale qui rend difficile la création d'organisations syndicales distinctes de celles qui ont été reconnues comme les plus représentatives au niveau national. Il indique que, bien que le Code du travail prévoie la possibilité de désigner des organisations représentatives au niveau régional ou à l'échelon de la branche d'activité, cette disposition est sans effet dans la pratique. Il ajoute que l'application de ce décret porte atteinte au droit syndical ainsi qu'à la convention no 26 de l'OIT et au Code du travail.
93. Le syndicat plaignant estime que les violations les plus graves peuvent être regroupées comme suit:
94. Le syndicat plaignant déclare qu'il faudrait abroger le décret no 7/22.01.1993 ainsi que les dispositions du Code du travail qui peuvent risquer de conduire à une interprétation ambiguë ainsi qu'à l'adoption de dispositions normatives ayant pour effet de rendre tout accord d'entreprise impossible. Le syndicat plaignant indique enfin que la condition à remplir pour obtenir le statut d'organisation syndicale la plus représentative au niveau national -- à savoir, compter 50 000 membres -- est excessive compte tenu de ce que seulement 2,5 millions de travailleurs sont recensés dans le pays.
D. Nouvelle réponse du gouvernement
95. Dans sa communication du 9 mai 1996, le gouvernement se réfère expressément aux dispositions de la législation nationale qui régissent la représentativité des organisations de travailleurs. Il évoque également les dispositions du chapitre 4 du Code du travail qui traitent des conventions collectives (les articles cités disposent, par exemple, que les clauses des conventions collectives ne doivent pas établir, pour les travailleurs ou les employés, des conditions moins favorables que celles prévues par la législation en ce qui concerne notamment: les parties à la négociation collective, l'application des conventions collectives aux membres des organisations qui les ont signées et l'extension des conventions collectives aux travailleurs qui ne sont pas affiliés aux organisations signataires). Le gouvernement déclare que, si le syndicat plaignant allègue plusieurs violations de la législation lors de la conclusion de la convention collective dans le secteur de l'alimentation de la part des organisations syndicales CITUB et CL Prodkrepa, il doit, conformément aux dispositions du Code du travail, introduire un recours auprès des instances judiciaires chargées de résoudre les conflits du travail.
96. Le comité observe que, dans le cas présent, le syndicat plaignant s'élève contre les critères de représentativité définis par le décret no 7 adopté en 1993 pour pouvoir participer à la coopération tripartite prévue par l'article 3 du Code du travail, et allègue que ces critères ont pour effet de l'empêcher de conclure des conventions collectives et d'entraver son droit à formuler des revendications (le syndicat plaignant se réfère aux dispositions de plusieurs conventions dont le champ d'application ne s'étend qu'aux seuls membres des organisations les plus représentatives). Le syndicat plaignant et le gouvernement indiquent tous deux que le syndicat plaignant a introduit un recours devant la Cour suprême en vue d'obtenir l'annulation de certains articles du décret no 7 de 1993, et que ce recours a été rejeté.
97. Le comité observe que, selon le gouvernement, le décret en question n'oblige pas les organisations à modifier leur structure et se borne à énoncer les critères quantitatifs ou autres conditions d'admission à remplir pour pouvoir participer à la coopération tripartite. Les critères sont les suivants: que les organisations représentatives comptent 50 000 membres au minimum; que leurs membres proviennent de plus de la moitié des branches d'activité définies en 1986; qu'elles couvrent 80 pour cent des districts urbains sur l'ensemble du territoire national; qu'elles soient constituées d'organes nationaux et régionaux; qu'elles regroupent 50 syndicats de base par branche d'activité comptant au moins cinq membres chacun et 50 organisations locales correspondant aux districts urbains.
98. A cet égard, le comité s'en tient au principe selon lequel la détermination du syndicat le plus représentatif devra toujours se faire d'après les critères objectifs et préétablis, de façon à éviter toute possibilité de partialité ou d'abus. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 314.] De l'avis du comité, les critères de représentativité prévus par le décret no 7 de 1993 ne semblent pas contraires au principe susmentionné qui, par ailleurs, autorise la prescription de critères conformes aux caractéristiques des systèmes d'organisation syndicale et de négociation collective propres aux différents pays. Ce critère vise à éviter que la négociation au niveau national soit tenue de se dérouler nécessairement avec un nombre élevé d'organisations. En ce qui concerne plus précisément les 50 000 membres que doit compter une organisation syndicale pour être considérée comme représentative au niveau national (chiffre jugé excessif par le syndicat plaignant, au regard des 2 500 000 travailleurs recensés dans le pays), le comité estime qu'il ne s'agit pas d'une exigence disproportionnée étant donné que ce chiffre correspond à 2 pour cent seulement de la population nationale active.
99. Le comité constate, par ailleurs, que, contrairement à ce qu'affirme le syndicat plaignant, le décret en question n'empêche pas les organisations moins représentatives de négocier à un niveau inférieur du niveau national et de conclure des conventions collectives. En effet, l'article 51 du Code du travail prévoit que lorsque dans une entreprise il n'existe qu'une seule organisation de travailleurs ou d'employés, laquelle n'est affiliée à aucune autre organisation syndicale reconnue comme représentative au niveau du pays, de la branche ou de la profession, c'est avec ladite organisation de salariés ou d'employés que l'employeur sera de toute façon appelé à conclure une convention collective. Toutefois, le comité relève que l'application de cette disposition peut conduire à une situation où un syndicat majoritaire dans une entreprise ne peut négocier collectivement s'il n'est pas affilié à une centrale représentative. A cet égard, le comité doit rappeler l'importance qu'il convient d'attacher à ce que l'organisation majoritaire au sein d'une entreprise jouisse du droit de négociation collective. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.
100. En ce qui concerne la question soulevée par le syndicat plaignant, à savoir que certaines conventions collectives ne s'appliqueraient qu'aux parties contractantes et à leurs membres et non à l'ensemble des travailleurs, le comité estime qu'il s'agit là d'une pratique légitime -- tout comme le serait la pratique contraire -- qui ne semble pas violer les principes de la liberté syndicale et qui est en outre suivie par de nombreux pays.
101. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Canada
présentée par
l'Association canadienne des travailleurs des fonderies
et ouvriers assimilés (CASAW)
Allégations: attitude partiale et ingérence
de la police
dans un conflit du travail
102. Le comité avait examiné ce cas à sa session de juin 1994 [voir 294e rapport, paragr. 683-715, approuvé par le Conseil d'administration à sa 260e session (juin 1994)] au cours de laquelle il était parvenu à des conclusions intérimaires.
103. Le gouvernement a envoyé des réponses sur ce cas dans des communications des 20 décembre 1994 et 4 juillet 1996.
104. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il n'a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
105. Le comité rappelle que, dans ce cas, les allégations concernent des événements en rapport avec un conflit du travail dans le secteur privé dans les Territoires du Nord-Ouest (Canada). L'Association canadienne des travailleurs des fonderies et ouvriers assimilés (CASAW) s'était plainte de l'extrême lenteur de la procédure concernant le règlement d'un conflit et avait critiqué l'attitude partiale de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) lors de son intervention dans le conflit du travail et lors de l'enquête qu'elle avait menée sur l'explosion, attitude qui s'était traduite par un harcèlement constant des dirigeants et des membres de l'association. A cet égard, le comité avait pris note du fait que la Commission indépendante des plaintes du public contre la GRC avait mené une enquête relative à une cinquantaine d'allégations et qu'elle préparait son rapport.
106. Le comité avait formulé les recommandations suivantes à propos de ces allégations [voir 294e rapport, paragr. 715]:
B. Réponse du gouvernement
107. Dans sa communication du 20 décembre 1994, le gouvernement a transmis un exemplaire du rapport définitif de la Commission indépendante des plaintes du public contre la GRC sur 43 des 45 allégations présentées, et indiqué que le président de la Commission indépendante des plaintes du public contre la GRC (dénommée ci-après la Commission des plaintes) avait décidé d'organiser une audition publique concernant les deux allégations restantes, qui devait avoir lieu en février 1995.
108. Le 4 juillet 1996, le gouvernement a fait parvenir le rapport définitif de la Commission des plaintes sur les deux allégations restantes.
109. Les deux rapports de la Commission des plaintes comptent environ 130 pages d'enquête détaillée sur les plaintes présentées le 9 novembre 1992 par le président de la CASAW concernant l'allégation de traitement discriminatoire et intolérable de la GRC vis-à-vis des membres de l'association pendant une période de cinq mois, au cours d'un conflit du travail avec Giant Mine.
110. La loi sur la GRC autorise le président de la Commission des plaintes, lorsqu'il l'estime souhaitable dans l'intérêt du public, d'enquêter sur toute plainte déposée en vertu de la partie VII de la loi. Les critères permettant de déterminer l'intérêt du public à cet égard comprennent la gravité de la plainte et la nécessité, pour le public, de savoir que l'enquête a été menée par une tierce partie, c'est-à-dire par la commission. La loi prévoit que le président, après avoir conduit une enquête d'intérêt public, prépare un rapport intérimaire écrit contenant les résultats et les recommandations relatives à la plainte, et qu'il le fasse parvenir au ministre ainsi qu'au commissaire de la GRC. Ce dernier est alors tenu de réexaminer la plainte à la lumière des résultats et recommandations contenus dans le rapport, et de notifier par écrit au ministre et au président de la commission les mesures prises ou envisagées concernant la plainte. Après avoir examiné la réponse écrite du commissaire au rapport intérimaire, le président de la commission rédige le rapport définitif et de le faire parvenir au ministre ainsi qu'au commissaire de la GRC et aux parties intéressées.
111. En novembre 1992, le président de la commission avait décidé qu'il était souhaitable, dans l'intérêt du public, que la commission enquête sur la plainte soumise par le président de la CASAW. L'enquête a duré 31 jours consécutifs et elle a porté sur 43 des 45 incidents allégués. Une audition publique a été organisée pour enquêter sur les deux incidents restants.
112. Après une analyse détaillée et documentée, la commission a estimé que deux seulement des 43 allégations avaient été prouvées. Le président a également fait des recommandations générales concernant les deux allégations pour lesquelles les faits n'avaient pas été établis. Enfin, il a proposé une recommandation générale sur l'intérêt d'élaborer un plan d'urgence pour que la GRC puisse constituer le noyau d'un processus de règlement des conflits du travail. Dès réception de ce rapport, le commissaire en a accepté les résultats et indiqué les mesures à prendre, notamment veiller à ce que certains fonctionnaires reçoivent une formation appropriée d'enquêteurs et de rédacteurs de rapport. Dans son rapport définitif, le président s'est déclaré satisfait des mesures proposées.
113. Après l'audition publique concernant les deux dernières allégations, la commission a estimé que les mesures prises par les fonctionnaires étaient justifiées, et aucune recommandation spécifique n'a été faite. Cependant, certaines recommandations d'ordre général ont été formulées concernant l'instruction et l'information du public.
114. Le comité prend note de la réponse du gouvernement, et notamment des volumineux rapports de la Commission indépendante des plaintes du public contre la GRC.
115. Compte tenu du caractère méticuleux et détaillé de l'enquête qui a été menée à bien concernant les allégations de l'organisation plaignante par un organe indépendant et impartial, et compte tenu également du fait que les mesures proposées par le commissaire de la GRC concernant quatre des incidents allégués satisfont la Commission des plaintes, le comité estime que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.
116. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Chili
présentée par
l'Union internationale des syndicats des travailleurs
du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (UITBB)
Allégations: menaces contre un dirigeant syndical,
licenciements et actes d'ingérence antisyndicaux
et restrictions à la négociation collective
117. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans des communications de l'Union internationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (UITBB) des 25 janvier et 13 avril 1995. Par la suite, cette organisation a envoyé des informations complémentaires dans une communication du 16 mai 1995. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 2 octobre, 2 et 20 novembre 1995, et 3 janvier et 15 mai 1996.
118. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
119. Dans ses communications des 25 janvier et 13 avril 1995, l'Union internationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (UITBB) allègue que deux travailleurs employés par l'entreprise de construction du métro de Santiago (IMS) sont morts le 17 janvier 1995 du fait d'un éboulement qui s'est produit dans un tunnel dépourvu de tout dispositif de protection et de sécurité. L'organisation plaignante indique que la Confédération nationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois, des matériaux de construction et des activités connexes (CNTC) avait dénoncé les conditions précaires d'hygiène et de sécurité au travail qui existaient dans le chantier en question, mais que ni la direction de l'entreprise, ni les ministères respectifs, ni l'administration du métro n'avaient prêté attention à cette mise en garde.
120. L'organisation plaignante ajoute qu'en mai 1994 la direction de l'entreprise a licencié de nombreux travailleurs qui avaient participé à un court arrêt du travail pour appuyer leurs revendications en matière de salaires, d'hygiène et de sécurité du travail et qu'à la suite de cet incident la direction de l'entreprise a procédé à la liquidation systématique de l'organisation syndicale que les travailleurs avaient constituée.
121. En outre, l'organisation plaignante indique qu'il n'existe pas de droit de négociation collective pour les travailleurs de la construction. Enfin, elle signale que les organisations de travailleurs font l'objet d'une agressivité permanente, qu'à la suite du ferme soutien donné à l'action revendicative des travailleurs de l'entreprise IMS cette dernière a adopté une conduite contraire à toute éthique, et que le gouvernement a une responsabilité à cet égard parce qu'il stimule de diverses façons le développement d'un syndicalisme contrôlé par les employeurs. L'organisation plaignante allègue que des vigiles ont été engagés par l'entreprise afin d'empêcher ou de neutraliser l'activité des dirigeants syndicaux, et enfin que le président de la CNTC, M. Adrián Fuentes Hermosilla, a fait l'objet de menaces et qu'on l'a empêché de pénétrer sur le chantier.
B. Réponse du gouvernement
122. Dans sa communication du 2 octobre 1995, le gouvernement indique, à propos de l'allégation relative à la liquidation systématique de l'organisation syndicale que les travailleurs avaient constituée, que la Direction du travail a vérifié les données concernant les organisations syndicales constituées dans les entreprises du chantier de construction de la ligne 5 du métro de Santiago, et elle a pu établir l'existence du Syndicat de travailleurs de l'entreprise de construction IMS, créé le 12 mai 1994, qui a renouvelé son comité directeur à la suite de la démission des dirigeants précédents le 2 février 1995.
123. En ce qui concerne l'accident du travail qui a coûté la vie à deux travailleurs, le 17 janvier 1995, sur le tronçon D du chantier de la ligne 5 du métro (éboulement de la paroi ouest de ce chantier dont ont été victimes les travailleurs Víctor Hugo Oñate et Juan Ramón Moraga Muñoz), le gouvernement indique que, dès qu'ils ont eu connaissance de l'accident, les services d'inspection ont dépêché des fonctionnaires sur les lieux pour constater les faits et que toutes les mesures nécessaires ont été prises immédiatement pour respecter les normes de sécurité. Après une inspection oculaire, les travaux du tronçon D ont été suspendus immédiatement à cause du danger imminent pour la sécurité et la vie des travailleurs s'il se produisait de nouveaux éboulements. La suspension s'est appliquée au chantier de l'entreprise de construction IMS, dont le maître d'ouvrage est Metro SA, qui est responsable de la conception dudit chantier. Avant cet accident, aucune plainte relative à des questions de sécurité n'avait été reçue.
124. Le gouvernement ajoute que les services du travail ont immédiatement demandé des rapports à divers organismes techniques (Entreprise métropolitaine de travaux sanitaires, Service national de géologie et des mines, Intendance de la région métropolitaine) et qu'ils ont demandé, en outre, des rapports techniques d'enquête sur l'accident à l'entreprise maître d'ouvrage, Metro SA, et à la Mutuelle de sécurité, organisme chargé de la prévention dans les chantiers de l'entreprise, car c'est l'organisme de la sécurité sociale chargé des accidents du travail et des maladies professionnelles. La coopération du ministère des Travaux publics a également été sollicitée, et ce dernier a désigné deux ingénieurs spécialistes de la mécanique des sols. Sur la base de ces rapports, et en particulier des instructions données par la Metro SA qui a ordonné de diminuer la pente de la paroi et de construire un escalier pour abaisser la paroi de 12 à 8 mètres de hauteur, ainsi que du rapport des ingénieurs du ministère des Travaux publics qui indiquait que les mesures proposées étaient appropriées pour écarter l'imminence du danger pour la sécurité ou la vie des travailleurs, il a été décidé tout d'abord de lever partiellement la suspension des travaux pour réparer les dommages et, ensuite, une fois écarté le danger, de lever la suspension générale des travaux sur le tronçon D. En conséquence, les travaux n'ont été suspendus que jusqu'au 9 février 1995. Enfin, le gouvernement indique qu'à la suite de ces faits regrettables la Direction du travail a conclu conjointement avec le ministère des Travaux publics un accord de contrôle des travaux publics qui est actuellement mis en uvre. De même, une coordination a été établie entre la Direction du travail et le Service de santé métropolitain de l'environnement pour traiter, de façon globale, les questions d'hygiène et de sécurité au travail, en particulier les accidents graves et mortels. Le gouvernement déclare qu'actuellement un projet de loi, qui élargit les pouvoirs de la Direction du travail en matière de contrôle de l'hygiène et de la sécurité du travail, est soumis au Sénat de la République.
125. Dans ses communications des 2 et 20 novembre 1995, et des 3 janvier et 15 mai 1996, le gouvernement se réfère aux allégations relatives au licenciement de travailleurs de l'entreprise de construction IMS en mai 1994, au sujet desquelles il fournit les informations suivantes:
En mai 1994, l'entreprise de construction IMS a procédé au licenciement de 56 travailleurs qui étaient occupés à la construction de la ligne 5 du métro de Santiago. Le motif invoqué pour mettre fin au contrat de travail de 36 d'entre eux est le motif prévu à l'article 161, paragraphe 1, du Code du travail, qui dispose: Sans préjudice des dispositions des articles qui précèdent, l'employeur pourra mettre fin au contrat de travail si cette décision est motivée par les besoins de l'entreprise, de l'établissement ou du service, résultant, par exemple, de leur rationalisation ou modernisation, de baisses de la productivité, de changements dans les conditions du marché ou de l'économie, qui rendent nécessaire la cessation de la relation de travail d'un ou de plusieurs travailleurs, ou le défaut d'aptitude professionnelle ou technique du travailleur.
Les vingt autres travailleurs ont été licenciés pour le motif prévu à l'article 160, paragraphe 3, du Code du travail qui prévoit: Le contrat de travail prend fin sans droit à indemnité lorsque l'employeur le résilie en invoquant l'un ou plusieurs des motifs suivants: ... l'absence injustifiée du travail pendant deux jours consécutifs, deux lundis du même mois ou au total trois jours durant la même période, ainsi que l'absence injustifiée, ou sans avis préalable, du travailleur chargé d'une activité, d'une tâche ou d'une machine dont l'abandon ou l'arrêt entraîne une perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise.
Les services de l'inspection du travail n'ont pas connaissance de licenciements de travailleurs en représailles à la constitution du syndicat, et ils n'ont pas été informés de l'existence d'un bref arrêt du travail à l'entreprise IMS en mai 1994. Tout licenciement peut faire l'objet d'une plainte devant les tribunaux du travail.
126. Pour ce qui est de l'allégation relative à l'inexistence du droit de négociation collective pour les travailleurs de la construction, le gouvernement indique que l'article 305 du Code du travail dispose que Ne pourront négocier collectivement: i) les travailleurs au bénéfice d'un contrat d'apprentissage et ceux qui ont été engagés exclusivement pour des travaux provisoires ou saisonniers. Le gouvernement indique que, dans la pratique, bien qu'il s'agisse de travaux provisoires, dans les chantiers importants, des conventions collectives ont été conclues et ont amélioré dans une proportion importante les avantages accordés individuellement. Tel est le cas dans l'entreprise de construction IMS où une convention collective de travail a été conclue avec la médiation des autorités régionales des services de l'inspection du travail le 31 mars 1995 dans le cadre de négociations collectives libres et non réglementées. Le gouvernement déclare avoir présenté au Parlement, en janvier 1995, un projet de loi portant création d'une procédure de négociation collective pour les syndicats de travailleurs temporaires.
127. Pour ce qui est des menaces alléguées contre le président de la Confédération nationale des syndicats de travailleurs du bâtiment, du bois, des matériaux de construction et des activités connexes du Chili, M. Adrián Fuentes Hermosilla, le gouvernement indique que les services de l'inspection du travail n'ont pas d'informations à ce sujet et n'ont pas reçu de plaintes ni de réclamations, et que le Code pénal prévoit des sanctions sévères pour les auteurs de menaces. De même, en ce qui concerne l'allégation selon laquelle le développement du syndicalisme contrôlé par les employeurs et peu soucieux des véritables intérêts des travailleurs serait encouragé, le gouvernement souligne son adhésion au principe de l'autonomie syndicale, signale que les services de l'inspection du travail n'ont pas d'informations permettant de confirmer ces allégations, et précise qu'en vertu des dispositions des articles 289 à 294 du Code du travail toute personne peut dénoncer des conduites antisyndicales ou déloyales devant les tribunaux du travail, qui sont habilités à effectuer des enquêtes, à ordonner qu'il soit remédié à ces pratiques déloyales et même à infliger des amendes d'un montant élevé. Enfin, le gouvernement indique avoir présenté un projet de loi au Parlement qui élargit le champ d'application des dispositions en matière de protection contre les licenciements antisyndicaux.
128. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante allègue: 1) le licenciement, en mai 1994, par l'entreprise de construction du métro de Santiago (IMS) de nombreux travailleurs après un bref arrêt du travail visant à appuyer des revendications en matière de salaires, d'hygiène et de sécurité du travail; 2) l'impossibilité pour les travailleurs du bâtiment de négocier collectivement; 3) la mort accidentelle de deux travailleurs sur le chantier de la ligne 5 du métro réalisé par l'entreprise IMS; 4) l'existence de vigiles embauchés par l'entreprise en vue d'empêcher ou de neutraliser l'activité des dirigeants syndicaux, et le fait que le président de la CNTC a été menacé et s'est vu interdire l'entrée sur le chantier; et 5) le fait que le gouvernement encourage la mise en place d'un syndicalisme contrôlé par l'employeur.
129. Au sujet de l'allégation relative au licenciement de nombreux travailleurs de l'entreprise de construction IMS, en mai 1994, après un bref arrêt du travail visant à appuyer des revendications en matière de salaires, d'hygiène et de sécurité du travail, et de la tentative consécutive de destruction systématique de l'organisation syndicale de l'entreprise IMS, le comité note que dans sa réponse le gouvernement évoque 56 licenciements en mai 1994 (36 licenciements en vertu des motifs prévus à l'article 161, paragraphe 1, du Code du travail -- besoins de l'entreprise, rationalisation, changements économiques, etc. -- et 20 licenciements en application de l'article 160, paragraphe 3 -- absence injustifiée du travailleur). Le comité note également que le gouvernement n'est pas au fait du bref arrêt de travail évoqué par le plaignant et qu'il souligne que les travailleurs licenciés ont le droit de saisir les tribunaux. A ce sujet, eu égard à ce que le gouvernement n'a pas mentionné les faits concrets qui ont entraîné les différents licenciements et qu'il s'est limité à présenter les motifs légaux de licenciement invoqués par l'entreprise, le comité estime qu'il existe des preuves selon lesquelles les licenciements pourraient présenter un caractère antisyndical. Dans ces conditions, le comité rappelle d'une façon générale que le respect des principes de la liberté syndicale exige que nul ne soit licencié pour s'être livré à des activités syndicales légitimes et prie dès lors le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour la réintégration des travailleurs licenciés, pour autant que ce soit encore possible. Le comité note que le gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi afin d'élargir la protection contre les actes de discrimination antisyndicale et il lui demande de le tenir informé de l'évolution de ce projet.
130. S'agissant de l'allégation selon laquelle il est impossible aux travailleurs saisonniers de négocier collectivement, le comité note que le gouvernement déclare que, malgré les dispositions du Code de travail, il se conclut dans la pratique -- en marge des dispositions dudit Code -- des conventions collectives pour les chantiers importants. Cela a été le cas pour l'entreprise IMS, qui a conclu une convention collective du travail avec la médiation des autorités régionales responsables des services du travail en mars 1995. Le comité note également que le gouvernement a saisi le Parlement d'un projet de loi, qui établit un cadre concret pour la négociation collective, destiné aux syndicats de travailleurs temporaires. Le comité rappelle que ces travailleurs doivent pouvoir négocier collectivement et demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution dudit projet.
131. Pour ce qui est de la mort accidentelle de deux travailleurs survenue sur le chantier de la ligne 5 du métro réalisé par l'entreprise IMS, le comité note que le gouvernement déclare que différentes mesures ont été prises après l'accident pour éliminer les risques pour la santé ou la vie des travailleurs (inspection de visu, suspension du chantier, demande de rapports aux organismes techniques, etc.). A ce sujet, le comité rappelle qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur des questions relatives à la sécurité et à la santé du travail.
132. Pour ce qui a trait aux allégations concernant: 1) l'existence de vigiles embauchés par l'entreprise IMS dans le but d'interdire ou de neutraliser l'activité syndicale et les menaces dont a été l'objet le président de la CNTC, M. Adrián Fuentes Hermosilla; et 2) le fait que le gouvernement encourage la mise en place d'un syndicalisme contrôlé par l'employeur, le comité prend note de la déclaration gouvernementale selon laquelle les services du travail ne disposent pas d'éléments leur permettant de confirmer ces allégations et qu'en vertu des dispositions du Code du travail (articles 289 à 294) toute personne qui le souhaite peut saisir les tribunaux du travail en cas de conduite antisyndicale ou déloyale ou porter plainte devant les tribunaux d'instance en cas de menaces. Dans ces conditions, le comité ne peut que constater que les allégations formulées par l'organisation plaignante sont fort vagues et qu'elle n'a pas apporté de précisions supplémentaires malgré les invitations qui lui ont été faites.
133. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport où le comité demande à être
tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Congo
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: arrestation et condamnation de dirigeants
syndicaux
et de syndicalistes; restrictions au droit de grève
134. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) contre le gouvernement du Congo figure dans une communication datée du 23 février 1996. Le gouvernement n'ayant pas répondu, le comité a dû ajourner l'examen de ce cas à deux reprises. A sa réunion de juin 1996 [voir 304e rapport, paragr. 10], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de ce cas à sa prochaine session, même si les informations ou observations demandées n'étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n'a envoyé aucune observation.
135. Le Congo a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
136. Dans sa communication du 23 février 1996, la CISL indique que le gouvernement porte atteinte aux droits syndicaux à l'encontre d'une organisation affiliée, la Confédération des syndicats libres et autonomes du Congo (COSYLAC) et de ses membres. Elle fait en particulier état des allégations suivantes:
137. Selon l'organisation plaignante, le déni systématique de la demande légitime de dialogue avec un comité de négociation syndicale et la répression brutale de la protestation face à ce refus constituent des violations des principes les plus fondamentaux de la liberté syndicale.
138. Le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis la présentation de la plainte, le gouvernement n'ait répondu à aucune allégation de l'organisation plaignante, alors qu'il a été invité à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ce cas.
139. Dans ces conditions, conformément à la règle de procédure applicable [voir paragr. 17 de son 127e rapport approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session], le comité se voit dans l'obligation de présenter un rapport sur le fond de l'affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu'il espérait recevoir du gouvernement.
140. Le comité rappelle au gouvernement que l'ensemble de la procédure instituée par l'Organisation internationale du Travail pour l'examen d'allégations en violation de la liberté syndicale est d'assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Le comité note que, dans un autre cas d'allégations contre le Congo (no 1850), qu'il a examiné à sa précédente session, le gouvernement n'avait pas répondu non plus. Le comité demeure convaincu que, si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a pour leur propre réputation à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31.]
141. Le comité note que les allégations de ce cas se réfèrent à un déni du droit à la consultation des syndicats, à des restrictions au droit de grève, à des arrestations, incarcérations et condamnations de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, ainsi qu'à des licenciements sommaires de syndicalistes pour fait de grève.
142. S'agissant de l'allégation selon laquelle le gouvernement refuse tout dialogue avec les syndicats pour résoudre les questions afférentes à la privatisation, le comité note que, en dépit des promesses du gouvernement, aucune négociation n'a été entamée avec le comité de coordination établi par les travailleurs. La COSYLAC a alors appelé à une grève de ses membres pour protester contre l'attitude du gouvernement. De l'avis du comité, une restructuration du secteur public, particulièrement des privatisations entreprises dans le cadre de l'application d'une politique d'ajustement structurel, entraîne indéniablement des conséquences importantes dans le domaine social et syndical. Il serait donc nécessaire que les partenaires sociaux, en particulier les organisations syndicales, soient consultés, à tout le moins, sur la portée sociale et les modalités des mesures décidées par les autorités. Compte tenu de l'incidence que peuvent avoir sur les conditions de travail des travailleurs les mesures de privatisation de certaines entreprises du secteur public et, d'une manière plus générale, la politique d'ajustement structurel et de privatisation du gouvernement, le comité souhaite souligner l'importance qu'il attache à la promotion effective des consultations et de la collaboration entre les pouvoirs publics et les organisations de travailleurs dans ce domaine, conformément aux principes énoncés dans la recommandation no 113, afin de permettre l'examen concerté des questions d'intérêt commun et de trouver dans la mesure du possible des solutions mutuellement acceptables.
143. Pour ce qui est des limitations à l'exercice du droit de grève, le comité note que, selon l'organisation plaignante, la grève de protestation contre le refus de dialogue et de négociation sur les questions de privatisation, à laquelle la COSYLAC a appelé ses membres le 20 janvier 1996, a été immédiatement déclarée illégale par le gouvernement et considérée comme une tentative de coup d'Etat, et qu'elle a donné lieu à une intervention des autorités, à des arrestations et à des licenciements. Le comité rappelle à cet égard que les organisations chargées de défendre les intérêts socio-économiques et professionnels des travailleurs devraient en principe pouvoir utiliser la grève pour appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique et sociale, qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres, et plus généralement pour les travailleurs, notamment en matière d'emploi, de protection sociale et de niveau de vie. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 480.] En outre, le comité attire l'attention du gouvernement sur le fait que les décisions d'illégalité des grèves ne devraient pas être prononcées par le gouvernement, notamment dans les cas où ce dernier est partie au conflit. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 523.]
144. S'agissant des licenciements, le comité note que 122 travailleurs qui ne se trouvaient pas à leurs postes de travail au cours de la grève du 22 janvier 1996 ont été sommairement licenciés. Le comité rappelle à cet égard que le respect des principes de la liberté syndicale exige qu'on ne puisse pas licencier des travailleurs en raison de leur participation à une grève ou à toute autre action de revendication. Le comité demande au gouvernement de s'efforcer d'obtenir la réintégration immédiate des travailleurs dans leurs postes de travail et de le tenir informé de la situation de ces travailleurs.
145. En ce qui concerne l'arrestation et l'incarcération de syndicalistes, le comité note que, selon les indications de l'organisation plaignante, les autorités ont ordonné, le 22 janvier 1996, l'arrestation de quatre syndicalistes d'organisations des postes et télécommunications affiliées de la COSYLAC, MM. Lessita Otangui, secrétaire général de la FESYPOSTEL, Oba René Blanchand, président du SYLIPOSTEL, Odzongo Médard, de la FESYPOSTEL, Bouya Bernard, du SYNATEL. Le comité note que, selon les allégations, M. Oba a été détenu au siège de son syndicat. Il note que ces personnes ont été violentées à la direction générale de la sécurité du territoire, avant d'être incarcérées. Le comité note en outre que, selon l'organisation plaignante, ces quatre dirigeants syndicaux ont été condamnés le 14 février 1996 à quatre mois de prison et à 50 000 francs CFA d'amende, et que, d'après les avocats de la défense, aucune preuve de culpabilité n'a été présentée au tribunal. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas formulé de commentaires et observations à cet égard. Le comité doit rappeler que l'arrestation et la détention de syndicalistes pour des raisons syndicales constituent une grave entrave à l'exercice des droits syndicaux et violent la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 75.] Le comité rappelle également que, dans les cas impliquant l'arrestation, la détention ou la condamnation d'un dirigeant syndical, l'intéressé devrait bénéficier d'une présomption d'innocence. Si un mandat syndical ne confère pas à son titulaire une immunité lui permettant de violer les dispositions en vigueur, celles-ci, à leur tour, ne doivent pas porter atteinte aux garanties fondamentales en matière syndicale ni sanctionner des activités qui, conformément aux principes généralement reconnus en la matière, devraient être considérées comme des activités syndicales licites. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 65 et 42.] Compte tenu du fait que les condamnations en question semblent avoir eu pour motif l'organisation de la grève de protestation contre l'absence de consultation des organisations syndicales dans le processus de privatisation, le comité est fondé à considérer que les intéressés ont été condamnés pour des activités syndicales légitimes. Il déplore donc profondément ces condamnations imposées en violation des principes de la liberté syndicale et demande la libération immédiate et inconditionnelle de ces syndicalistes et leur réintégration à leurs postes de travail. Il prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
146. Le comité note en outre que deux autres syndicalistes, MM. Tchikaya et Mampuya, ont également été arrêtés. Le comité regrette qu'aucune observation du gouvernement n'ait été reçue à cet égard. Le comité demande au gouvernement de prendre rapidement les mesures nécessaires pour mener une enquête indépendante et objective afin d'éclaircir les faits et les circonstances exactes des arrestations intervenues. Le comité demande au gouvernement de libérer immédiatement et sans conditions ces syndicalistes et de les réintégrer dans leur poste de travail. Il lui demande de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
147. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica
présentée par
-- l'Association des cadres du Service national des eaux souterraines,
de l'irrigation et du drainage (ASES) et
-- le Mouvement des travailleurs du Costa Rica (MTC)
Allégations: licenciements antisyndicaux
148. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication conjointe de l'Association des cadres du Service national des eaux souterraines, de l'irrigation et du drainage (ASES) et du Mouvement des travailleurs du Costa Rica (MTC), datée du 8 janvier 1996. L'ASES a envoyé des informations complémentaires par une communication datée du 24 janvier 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications datées des 25 juillet et 17 octobre 1996.
149. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
150. Par ses communications des 8 et 24 janvier 1996, l'Association des cadres du Service national des eaux souterraines, de l'irrigation et du drainage (ASES) et le Mouvement des travailleurs du Costa Rica (MTC) allèguent que le Service national des eaux souterraines, de l'irrigation et du drainage (SENARA) a licencié 17 travailleurs, dont MM. Miguel Céspedes Araya, secrétaire général de l'association, Greivin Madrigal Chavarría, secrétaire exécutif, et récemment Mme Ana Nájera Herrera, ex-secrétaire générale et syndicaliste active.
151. Les plaignants ajoutent que le ministère du Travail et les parties intéressées sont convenus de la création d'une commission tripartite chargée d'étudier le bien-fondé des 17 premiers licenciements ainsi que la réintégration des travailleurs qui y auraient droit. Les plaignants font savoir qu'en octobre 1995, bien que cette commission ait estimé que le licenciement des dirigeants syndicaux Céspedes et Madrigal n'était pas justifié, le gouvernement n'a donné aucune suite à cet avis.
B. Réponse du gouvernement
152. Par sa communication du 25 juin 1996, le gouvernement déclare que, conformément à la législation nationale et aux conventions nos 87, 98 et 135 de l'OIT, ratifiées par le Costa Rica, les actes ou les omissions tendant à éviter, à limiter, à contraindre ou à empêcher, sous quelque forme que ce soit, le libre exercice des droits collectifs des travailleurs, de leurs syndicats où les associations de travailleurs sont interdits. La Direction nationale de l'inspection du travail est l'organe technique d'exécution du ministère du Travail et de la Sécurité sociale investi du pouvoir légal d'enquêter, par les moyens qu'elle estime convenables, sur les violations des droits des travailleurs et sur les pratiques de travail déloyales dont elle pourrait avoir connaissance. Il est important de préciser que l'Association des cadres du SENARA n'a jamais saisi cette direction d'une allégation de persécution syndicale ou de pratiques de travail déloyales à son détriment. Le gouvernement regrette que cette organisation saisisse l'OIT sans avoir auparavant eu recours aux mécanismes d'enquête et de règlement des différends prévus par la législation nationale dans les cas comme ceux qu'elle dénonce. Ceci démontre, de la part de ces organisations plaignantes, une témérité évidente et une méconnaissance de l'Etat de droit qui prévaut au Costa Rica.
153. S'agissant des allégations de licenciements par le Service national des eaux souterraines, de l'irrigation et du drainage (SENARA), dont ceux de deux dirigeants syndicaux, le gouvernement du Costa Rica fait savoir que le ministère du Travail, par l'intermédiaire de la Direction générale des affaires du travail, a convoqué à plusieurs reprises les représentants du SENARA et les représentants des travailleurs de cette institution, afin d'obtenir des informations sur les licenciements concernant divers travailleurs de cet organisme. Après plusieurs contacts à l'initiative du ministère, le 21 août 1995, des représentants du ministère de l'Agriculture et de l'Elevage, du SENARA, de l'ASES-CNTC et du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, se sont réunis dans le bureau du ministre de l'Agriculture et de l'Elevage, où ils sont convenus de créer une commission chargée d'enquêter sur le licenciement d'un groupe de travailleurs et de vérifier s'il était fondé. Le 13 octobre 1995, le Département des relations de travail a émis un avis concernant la plainte déposée par l'ASES relative à des allégations de violation de la législation du travail et à des licenciements arbitraires de la part de la direction. Il est important de rappeler dans ce paragraphe que, conformément au système juridique en vigueur, les interventions du Département des relations de travail ont pour but d'empêcher le développement des conflits qui surgissent entre les employeurs et les travailleurs ou de permettre une conciliation extra-judiciaire si elle a été demandée par n'importe laquelle des parties intéressées. C'est dans ce cadre que l'intervention de ce département a pris place. A cette fin, les parties ont été appelées à comparaître afin d'être entendues, et pour qu'il soit possible de leur proposer des solutions, conformément à la législation du travail. Cependant, les propositions émanant des entités citées plus haut n'ont pas de caractère légal obligatoire à la différence des décisions rendues par le ministère public.
154. C'est pourquoi il est important de reproduire ici la réponse à l'audience accordée par le ministre du Travail à l'employeur, le SENARA, à la suite du dépôt de la plainte en question, et afin de ne pas porter atteinte au droit à une bonne administration de la défense:
1. Le SENARA est une organisation respectueuse du libre exercice des droits syndicaux, et jamais au cours de son histoire elle n'a connu de situation dans laquelle ces droits aient été remis en question, ou bien une quelconque sanction lui ait été imposée à la suite d'événements de cette nature.
2. Pour répondre à ses besoins ponctuels, engendrés notamment par l'exécution de la deuxième étape du projet d'irrigation Arenal-Tempisque, le SENARA a dû renforcer son personnel permanent en recrutant temporairement des fonctionnaires experts en diverses spécialités. A la fin du chantier, les contrats de ce personnel temporaire sont venus à échéance.
3. Les ex-fonctionnaires du SENARA, Miguel Céspedes Araya, Greivin Madrigal Chavarría et Parménides Furcal Beriguete n'ont jamais été titularisés. Ils faisaient partie du groupe de travailleurs recrutés temporairement sur le budget des services spéciaux. Leur relation de travail est arrivée à son terme, quand leurs contrats temporaires sont venus à échéance, comme cela est indiqué dans les documents délivrés par le Département des ressources humaines de cette institution et dans le reste de la documentation jointe.
4. Le fait qu'au sein de ce groupe de travailleurs temporaires se soient trouvés des fonctionnaires qui étaient également syndicalistes n'a jamais eu aucun rapport avec l'échéance de leurs contrats, et l'affirmation du syndicat selon laquelle la cause tacite du licenciement a été l'exercice de l'activité syndicale n'est absolument pas fondée et vise simplement à tirer indûment profit de la situation. A la date d'échéance des contrats de travail, il n'existait aucun conflit de caractère syndical que le SENARA aurait pu, ou aurait prétendu résoudre par le licenciement illégitime de dirigeants syndicaux, de sorte que la mesure aurait été aussi absurde que l'administration d'un médicament en l'absence de maladie.
5. Dans ce cas, c'est donc à l'entité qui affirme que la cause tacite de la cessation de ces contrats de travail a été l'exercice des droits et de l'activité syndicale des ex-fonctionnaires qu'il incombe de prouver ce qu'elle avance.
6. En août 1995, une commission présidée par ce ministère a été créée, afin d'analyser la cessation des contrats de travail des plaignants. Cette commission a relevé:
a) qu'elle a été créée précisément pour revoir la situation à la lumière des faits réels et pour analyser la présence éventuelle de violation des droits du travail;
b) qu'en son sein la partie syndicale a demandé que l'on se concentre spécifiquement sur le thème de la réintégration des six ex-fonctionnaires. Les employeurs ont accepté de dialoguer sur ce thème, mais ils ont prévenu expressément:
tout ce qui précède a été spécifié par écrit avant l'élaboration de la résolution finale et figure dans le dossier;
c) à la demande de la partie syndicale, la commission n'a pas discuté ni examiné de preuves relatives aux aspects juridiques ou financiers et elle n'en a même pas débattu. L'analyse s'est limitée à l'aspect technique;
d) comme on pouvait s'y attendre, la position du SENARA et celle de la partie syndicale étaient opposées et on espérait que celle du ministère du Travail pourrait résoudre le conflit;
e) nous avons été surpris de ce que la position finalement adoptée par le ministère du Travail fasse référence au thème de la liberté syndicale, alors que les syndicats ne l'avaient mentionné que vaguement, et que ce thème n'avait fait l'objet d'aucune analyse au sein de la commission ni d'aucune recherche de preuve. Nous nous sommes étonnés aussi du fait que le ministère ne se soit pas contenté de faire connaître sa position et qu'il ait pris unilatéralement des mesures pour exécuter la décision, lesquelles ne relevaient ni de la compétence ni du mandat de la commission, telle la réinsertion de deux fonctionnaires; cette absence de compétence a rendu la résolution inefficace et préjudiciable à notre système juridique;
f) le SENARA a sollicité ensuite l'avis de l'autorité budgétaire, laquelle a estimé, à son instar, qu'aucun motif lié à la liberté syndicale n'était à l'origine de la cessation des contrats de travail des fonctionnaires cités ci-dessus, et qu'effectivement la législation en vigueur ne prévoyait pas leur réintégration.
155. Le gouvernement ajoute que le Département des relations de travail doit agir comme un amiable compositeur à moins que les parties en conflit n'aient décidé de donner un caractère obligatoire à la résolution finale, situation qui ne s'est pas produite dans le cas en question. Il admet que les organisations plaignantes n'ont pas épuisé, dans ce cas, et comme cela a été dit au début, le recours à l'instance de la Direction nationale et inspection générale du travail. Il appartient à cette entité de diligenter les poursuites judiciaires, lorsqu'elle a constaté l'existence de pratiques de travail déloyales, afin de sauvegarder les droits protégés par la loi et de demander l'imposition des sanctions prévues dans la législation du travail en vigueur, sans préjuger de toute autre mesure judiciaire qui pourrait être prise.
156. Quant à l'avis prononcé par l'autorité budgétaire en date du 3 janvier 1996, il confirme celui du SENARA selon lequel les travailleurs Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría n'étaient pas des employés permanents mais temporaires qui connaissaient parfaitement les conditions dans lesquelles ils prêtaient un service et le fait que ce service était assujetti à un délai déterminé. Cet avis confirme que la cessation de la relation de service avec les ex-fonctionnaires cités ci-dessus est conforme à l'échéance en vertu de laquelle ils avaient été nommés, et qu'elle ne dépend pas de critères arbitraires du SENARA qui violeraient la liberté syndicale.
157. Pour toutes les raisons précitées, le gouvernement considère que dans ce cas les plaignants ont délibérément fait fi des instances nationales de règlement de conflits, qu'elles soient administratives ou judiciaires, auxquelles le système juridique en vigueur leur donnait accès. A cet égard, il n'y a pas lieu de condamner le gouvernement sur la simple supposition que des faits ont été commis, dont à ce jour les instances administratives et juridiques compétentes n'ont pas eu connaissance. Par ailleurs, il a été parfaitement établi que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a agi en parfaite conformité avec le droit, et que les mesures pertinentes ont été prises pour sauvegarder les droits des travailleurs. Le gouvernement estime que la plainte doit être rejetée.
158. Dans une communication en date du 17 octobre 1996, le gouvernement indique que Mme Ana Nájera Herrera, ex-secrétaire générale de l'ASES, n'a introduit aucune plainte auprès des autorités du ministère du Travail. En outre, l'ASES n'aurait pas non plus épuisé les recours internes avant de déposer la plainte. Le gouvernement joint à sa communication copie de la réponse du SENARA en ce qui concerne la présente plainte et qui précise que la relation d'emploi de Mme Nájera était fondée sur un contrat pour l'exécution d'un projet déterminé et que son engagement répondait à la nécessité du projet. Sa relation d'emploi s'est terminée par l'exécution complète du projet, sans qu'il n'y ait motifs antisyndicaux. Mme Nájera a reçu l'indemnisation prévue dans la loi et n'a présenté aucune plainte administrative.
159. Le comité observe que dans la présente plainte les organisations plaignantes ont allégué: 1) le licenciement de 17 travailleurs du SENARA, dont les dirigeants syndicaux MM. Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría; et 2) le licenciement ultérieur d'une militante syndicale ex-secrétaire générale de l'ASES, Mme Ana Nájera Herrera.
160. Le comité note que, selon les informations envoyées par le gouvernement, la question des 17 licenciements a été examinée par une commission tripartite, qui s'est penchée en particulier sur le cas de six personnes, pour confirmer le licenciement de quatre d'entre elles (votes du ministère du Travail et du SENARA-ministère de l'Agriculture) et infirmer les licenciements de MM. Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría. La représentante du ministère du Travail a estimé, elle aussi, que dans ces deux cas il y avait eu violation des libertés syndicales.
161. Le comité observe cependant que la décision de la commission tripartite ne concorde pas avec celle des autorités budgétaires, qui ont estimé que MM. Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría étaient des travailleurs temporaires, qui savaient que leur relation de travail devait arriver à échéance quand ils ont été nommés, ce qui ne constituait pas une violation de la liberté syndicale. Le SENARA justifie la cessation des contrats temporaires des deux dirigeants par le fait que ces contrats étaient venus à échéance et que les travaux entrepris étaient sur le point d'être terminés. Le SENARA nie toute motivation antisyndicale et fait savoir qu'au moment des faits il n'y avait aucun conflit de cette nature. Enfin, le gouvernement semble nier que les conclusions de la commission tripartite ont un caractère obligatoire, et il souligne que les intéressés n'ont pas eu recours aux instances administratives et judiciaires prévues par la législation.
162. Compte tenu de tous les éléments disponibles, et notamment du résultat des travaux de la commission tripartite, du retard considérable qu'entraînerait le recours aux instances administratives et judiciaires pertinentes, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour favoriser la réintégration des dirigeants syndicaux, MM. Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría, dans leur emploi.
163. Enfin, en ce qui concerne l'allégation relative au licenciement de la militante syndicale et ex-secrétaire générale de l'ASES, Mme Ana Nájera Herrera, le comité note que sa relation d'emploi était fondée sur un contrat pour l'exécution d'un projet déterminé et que cette relation s'est terminée par l'exécution du projet. Le comité note que le gouvernement nie l'existence de motifs antisyndicaux et qu'il déclare que l'intéressée n'a introduit aucune plainte auprès des autorités compétentes mais qu'elle a accepté l'indemnisation prévue dans la loi.
164. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour favoriser la réintégration des dirigeants syndicaux de l'ASES, MM. Miguel Céspedes Araya et Greivin Madrigal Chavarría, dans leur emploi.
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica
présentée par
la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT)
Allégations: discrimination antisyndicale
dans le cadre d'un processus de restructuration
165. Cette plainte fait l'objet d'une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) en date du 19 mars 1996. La CLAT a envoyé des informations complémentaires dans une communication du 24 mai 1996. Le gouvernement a répondu dans une communication du 22 juillet 1996.
166. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
167. Dans ses communications en date des 19 mars et 24 mai 1996, la Centrale latino-américaine des travailleurs allègue que, dans le cadre du programme de restructuration de l'administration publique, des dizaines de travailleurs et de nombreux dirigeants syndicaux, appartenant en particulier à l'Union des employés de l'Institut de développement agraire (UNEIDA), ont été démis de leurs fonctions ou ont fait l'objet de mesures entravant l'exercice de la liberté syndicale; de manière concrète, l'organisation plaignante évoque la situation des syndicalistes nommément désignés ci-après (neuf dirigeants syndicaux du comité exécutif de l'UNEIDA, d'autres représentants et travailleurs syndiqués):
168. L'organisation plaignante assure que ces mesures visaient à affaiblir le syndicat, à entraver son fonctionnement et, en conséquence, à l'empêcher d'intervenir dans le processus de restructuration de l'Institut de développement agraire (IDA). Il convient de souligner en outre que le comité directeur de l'IDA n'a tenu compte ni de l'immunité syndicale (fuero sindical) de ces travailleurs ni de la qualité de leurs services dans leurs fonctions respectives, ni de leur ancienneté, et que les recours introduits par les intéressés n'ont encore fait l'objet d'aucune décision finale.
B. Réponse du gouvernement
169. Dans sa communication du 22 juillet 1996, le gouvernement déclare que le projet de modernisation structurelle et fonctionnelle de l'Institut de développement agraire (IDA) a fait l'objet d'un accord avec le conseil de direction dudit institut le 10 octobre 1995.
170. La restructuration de l'IDA vise, à notre époque, à mettre en place un instrument efficace de gestion administrative au bénéfice des paysans du Costa Rica. Il convient de souligner que l'adoption du projet précité a fait l'objet d'une concertation entre les groupements d'agriculteurs associés à la paysannerie du Costa Rica et les groupements professionnels, et qu'il a été tenu compte des observations des commissions de travail constituées en application de l'accord du 17 avril 1995. En ce qui concerne les cessations de relation de travail qui découlent du projet de restructuration de l'IDA, elles obéissent à des impératifs techniques dûment reconnus par le ministère de la Planification nationale et de la Politique économique.
171. S'agissant des cessations de relation de travail touchant certains dirigeants syndicaux inclus dans le projet précité, il convient de souligner qu'elles n'ont pas été décidées sur la base de l'appartenance des intéressés à la direction d'un syndicat, mais seulement en fonction de leur situation de fonctionnaire de l'IDA, en tenant compte des aspects techniques précités, l'IDA ayant préalablement respecté leurs droits à la défense.
172. M. Walter Quesada Fernández, secrétaire général de l'Union des employés de l'IDA-UNEIDA, Mmes Elieth María Rodríguez et Jeannette Mac Quiddy Artavia, ainsi que MM. Walter Arturo Porras Campos, José Francisco Molina Rojas et José Fausto Osorno, ont introduit des recours en amparo dans des communications écrites du 5 janvier 1996 devant la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême contre leur licenciement. Les requérants fondaient leur recours sur la violation des dispositions législatives relatives à la liberté syndicale et à l'immunité syndicale, ainsi que des conventions nos 87 et 135 de l'OIT.
173. Les requérants ont ajouté qu'en qualité de dirigeants syndicaux et en vertu de la législation ils ne pouvaient être inclus dans le plan de restructuration de l'institut, compte tenu du fait qu'une telle mesure administrative constitue une mesure de représailles antisyndicales, entachée du non-respect du droit de la défense et du droit à une bonne administration de la justice. La Chambre constitutionnelle (organe juridictionnel suprême), statuant sur le fond dans la décision no 161-96 du 10 janvier 1996, a rejeté le recours en amparo interjeté par les fonctionnaires précités, et elle a estimé que la démarche de l'administration était légale. En conséquence, il est clair que la démarche de l'administration, en ce qui concerne l'inclusion de dirigeants syndicaux dans le processus de restructuration de l'institut, est conforme à la Constitution politique et aux conventions internationales et ne constitue pas un acte de représailles antisyndicales.
174. De même, dans des décisions nos 162-96 et 175-96, rendues le 10 janvier 1996, la Chambre constitutionnelle statuant sur le fond a rejeté les recours en amparo introduits par les fonctionnaires touchés par le plan de restructuration.
175. Néanmoins, dans un esprit d'ouverture, et nonobstant les arrêts de la Chambre constitutionnelle, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale est intervenu comme médiateur dans cette affaire. Il a tenu trois réunions avec les représentants de la Fédération des travailleurs des services publics. Des représentants des différents syndicats de l'institut ont assisté à ces réunions et ont formulé une série de revendications à soumettre à l'examen du conseil de direction de l'institut. Par décision unie finale du 23 janvier 1996, le conseil de direction de l'institut a déclaré qu'en vertu de la législation en vigueur les revendications exprimées par les groupements professionnels tendant à obtenir l'annulation des licenciements et à rechercher d'autres formes de compensation et d'autres mesures rentrant dans le cadre de la mobilité volontaire des travailleurs n'étaient pas fondées en droit.
176. En fait, le processus de restructuration a été décidé en conformité avec les dispositions de la Constitution et de la législation nationales, et l'acceptation de la série de revendications susmentionnées aurait entraîné l'impossibilité de réaliser la modernisation structurelle et fonctionnelle de l'institut, au détriment du service assuré aux agriculteurs du Costa Rica et donc au préjudice manifeste du service public qu'il constitue et du fonctionnement de l'administration qui s'en serait trouvé affecté sur le plan de l'efficacité.
177. Il ne fait aucun doute -- conclut le gouvernement -- que les allégations de représailles antisyndicales formulées dans la plainte sont inconsidérées et que, comme cela a été démontré, le plan de modernisation de l'IDA n'a jamais visé à réduire le personnel pour des motifs d'appartenance syndicale mais qu'il s'est appuyé sur des critères techniques et des objectifs reconnus comme tels par la législation en vigueur.
178. Le comité constate que, dans le présent cas, l'organisation plaignante dénonce le licenciement ou le transfert de dirigeants et de membres de l'Union des employés de l'Institut de développement agricole dans le dessein de porter préjudice à ce syndicat et de l'empêcher d'intervenir dans le processus de restructuration dudit Institut de développement agricole (IDA).
179. Le comité constate de même que le gouvernement fait valoir que: 1) les cessations de la relation de travail n'ont pas été décidées sur la base du statut syndical des personnes touchées, mais que ces mesures découlent d'un processus de restructuration et de modernisation structurelle et fonctionnelle de l'IDA reposant sur des critères techniques, dûment reconnus par le ministère de la Planification nationale et de la Politique économique; 2) la médiation du ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'a pas abouti à une annulation des licenciements par les instances dirigeantes de l'IDA; 3) l'organe juridictionnel suprême, la Chambre constitutionnelle, statuant sur le fond a rejeté les recours en amparo pour persécution antisyndicale formés par les fonctionnaires en question, cette chambre ayant en outre confirmé que la décision de l'administration était conforme au droit.
180. Dans des cas antérieurs, le comité a estimé qu'il ne peut se prononcer sur les allégations concernant les programmes et les mesures de restructuration ou de rationalisation économique, que ceux-ci impliquent ou non des réductions de personnel ou des transferts d'entreprises ou de services du secteur public au secteur privé, que dans la mesure où ils ont donné lieu à des actes de discrimination ou d'ingérence antisyndicaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, quatrième édition, 1996, paragr. 935.] Tout en observant que la Chambre constitutionnelle a rejeté les allégations de persécution antisyndicale formulées par les dirigeants et membres du syndicat, le comité doit constater que, selon les allégations de l'organisation plaignante -- non contestées par le gouvernement --, la restructuration a eu comme résultat le licenciement de neuf dirigeants appartenant au comité exécutif de l'UNEIDA et de divers autres représentants. Le comité note que l'organisation plaignante et le gouvernement divergent sur la question de savoir si ces licenciements avaient un caractère antisyndical. Le comité souligne par ailleurs l'importance qu'il attache à la priorité à accorder au maintien dans l'emploi des représentants des travailleurs en cas de réduction du personnel afin de garantir la protection effective de ses dirigeants. [Recueil, op. cit., paragr. 961.]
181. Dans ces conditions, avant de se prononcer de manière définitive, le comité prie l'organisation plaignante et le gouvernement d'indiquer le nombre total de travailleurs de l'Institut de développement agraire avant et après le processus de restructuration, le nombre de dirigeants et de représentants syndicaux licenciés et le nombre de dirigeants et de représentants syndicaux avant le processus de restructuration. D'ores et déjà, le comité prie le gouvernement de respecter les principes mentionnés et d'enquêter afin de déterminer si les licenciements de dirigeants et de représentants syndicaux de l'UNEIDA dans le cadre du processus de restructuration sont dus à leurs activités syndicales. Si c'est le cas, ils doivent être réintégrés dans leurs postes de travail. En outre, le comité prie le gouvernement de réexaminer la question des transferts affectant M. Mario Moya Benavides et Mme Iriabel Zumbado. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
182. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Costa Rica
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: licenciements antisyndicaux, violations
de la convention collective et délais de procédures
183. La plainte qui fait l'objet du présent cas a été transmise par communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 18 avril 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations par communications du 1er août et du 11 septembre 1996.
184. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations des plaignants
185. Dans sa communication du 18 avril 1996, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) exprime sa plus profonde préoccupation devant la situation délicate et difficile dans laquelle se trouvent les organisations syndicales du secteur privé, lesquelles ont été la cible, de la part du patronat, d'une politique de représailles contre les syndicalistes tendant à l'anéantissement du mouvement syndical dans le secteur privé.
186. La CISL précise que, le 26 novembre 1995, l'Association des travailleurs du secteur des engrais (ATFE) et ses affiliés ont entrepris une grève au sein de l'entreprise Fertilizantes de Centroamérica S.A. (FERTICA), sise à Puntarenas, spécialisée dans la production d'engrais et récemment privatisée. Ce mouvement de grève était dirigé contre l'attitude antisyndicale adoptée par la direction, qui n'a plus voulu reconnaître ni la convention collective ni le syndicat, en substituant à ce dernier une association solidariste locale contrôlée par l'employeur et en licenciant les travailleurs affiliés à ce syndicat et ses dirigeants. La CISL ajoute, par ailleurs, que l'entreprise s'est livrée à des pratiques de travail déloyales et a réengagé des travailleurs dans des conditions moins favorables tant sur le plan de la rémunération que sur celui de la sécurité et l'hygiène du travail ou de la journée de travail. Toutes ces violations de la législation et des droits du travail ont été dûment constatées par les inspecteurs attachés au ministère du Travail spécialement mandatés pour enquêter sur cette situation. Malgré ce constat, aucun résultat n'a pu être obtenu à court terme, du fait que le système juridique du Costa Rica s'est toujours caractérisé par la lenteur des procédures, avec pour conséquence une absence totale de protection des travailleurs et des organisations syndicales qui les représentent (la CISL joint en annexe le rapport des inspecteurs du travail).
187. La CISL allègue également l'envoi d'un contingent anti-émeutes à l'entreprise FERTICA pour déloger les ouvriers qui s'étaient postés de manière pacifique devant les installations depuis le 11 septembre 1995.
188. La CISL signale, pour conclure, que le refus de l'entreprise de négocier avec le syndicat et l'utilisation parallèle de subterfuges juridiques interdisant toute solution au conflit, aggravés par l'attitude de tolérance complice de la part des autorités gouvernementales, illustrent le destin qui attend les organisations syndicales des établissements publics devant être privatisés.
B. Réponse du gouvernement
189. Dans ses communications des 1er août et 11 septembre 1996, le gouvernement déclare qu'au cours de l'année 1995 l'entreprise FERTICA a procédé à une série de réformes résultant du processus de privatisation. Cette réorganisation des structures de production a entraîné un conflit du travail qui a nécessité l'intervention du ministère du Travail et de la Sécurité sociale pour restaurer le dialogue et la paix du travail. Sans préjudice de ce qui précède, aux termes des normes nationales et en conformité avec les dispositions des conventions internationales de l'OIT ayant trait à la liberté syndicale et ratifiées par le Costa Rica, à savoir les conventions nos 87, 98 et 135, sont interdites les actions ou omissions tendant à éviter, limiter, contraindre ou empêcher le libre exercice des droits collectifs des travailleurs, de leurs syndicats ou de coalitions de travailleurs.
190. En ce qui concerne les allégations relatives à des licenciements antisyndicaux de représentants des travailleurs ainsi qu'à certains actes antisyndicaux par l'entreprise Fertilizantes de Centroamérica S.A. et à la violation de la convention collective par cette entreprise, le gouvernement déclare que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a tendu sans relâche à apporter une solution aux actes illégaux précités, engageant les procédures adéquates afin de maintenir l'état de droit et veillant au respect des règles selon lesquelles toutes les phases de la procédure doivent faire l'objet d'un traitement rapide, même lorsque ces phases concernent des actions interjetées par les parties et qu'il s'agit de recours ou de procédures incidentes, se transformant souvent en manuvres juridiques tendant à différer la conclusion finale de l'affaire.
191. En août, septembre et octobre 1995, des dirigeants de l'Association des travailleurs du secteur des engrais (ATFE) ont saisi la Direction de l'inspection du travail d'une plainte contre l'entreprise Fertilizantes de Centroamérica S.A. (FERTICA) pour violation des conventions nos 98 et 135 de l'OIT, ainsi que de la convention collective (transgression de la quasi-totalité de cet instrument), pour pratiques déloyales et persécution antisyndicale.
192. La Direction nationale de l'inspection du travail, pour faciliter l'enquête sur les trois actions engagées par l'ATFE, a désigné deux inspecteurs chargés de traiter de manière conjointe les plaintes susmentionnées. Le 20 novembre 1995, les inspecteurs mandatés à cet effet ont présenté un rapport (dont il est joint copie) concluant que, sous réserve d'un avis mieux fondé, la société FERTICA a annulé arbitrairement la convention collective dans sa totalité, portant atteinte aux articles 54 et suivants du Code du travail et à l'article 62 de la Constitution politique. Ont de même été relevés des éléments suffisants pour établir des actions antisyndicales de persécution syndicale et des pratiques déloyales contre l'Association des travailleurs du secteur des engrais (ATFE) contraires aux articles 363 et suivants du Code du travail et à l'article 60 de la Constitution politique, ainsi qu'aux conventions nos 98 et 135 de l'OIT. Pour ces motifs, l'ouverture de la procédure prévue par la législation est demandée. Il ressort du rapport précité que, en ce qui concerne la plainte pour persécution antisyndicale et pratiques déloyales, les inspecteurs chargés d'enquêter constatent que, le 9 septembre 1995, la société FERTICA a procédé à un licenciement de la totalité de ses travailleurs, dont 265 personnes affiliées au syndicat ATFE, entraînant pour les travailleurs syndiqués la perte d'un emploi stable. De même, le rapport indique que le 9 septembre 1995 la société FERTICA a licencié le comité directeur de l'ATFE, violant par ce fait les dispositions de l'article 10 de la convention collective, les normes nationales concernant la protection des représentants syndicaux consacrée par les articles 363 et suivants du Code du travail ainsi que les conventions nos 98 et 135 de l'OIT. Selon le rapport, à compter du 9 septembre 1995, la société FERTICA a cessé d'appliquer la convention collective dans sa totalité, rompant l'ordre juridique régissant les relations salariés-patronat. A compter de la date où ladite convention a cessé de s'appliquer, tous les comités paritaires résultant de la convention collective sont devenus inopérants, et tous les droits et toutes les garanties dont jouissaient les travailleurs, y compris l'immunité syndicale, sont devenus caducs.
193. Le gouvernement ajoute que, le 5 décembre 1995, les parties au conflit ont été convoquées à une audience prévue par l'article 365 du Code du travail, qui avait été fixée au 18 décembre. Pour faire droit à une demande formulée par la représentation patronale, cette date d'audience avait été reportée au 21 décembre 1995. Au cours de cette audience, le représentant patronal a interjeté un recours incident par lequel il mettait en question la validité sur le plan juridique de la représentativité du dirigeant syndical Indalecio Ordoñez Calvo (auteur de l'une des plaintes) en ce qui concerne les affiliés de l'organisation sociale plaignante. La décision prise par le Cabinet du ministre dans sa résolution du 8 janvier 1996 annule la résolution de la Direction nationale de l'inspection et déclare recevable le recours en appel qui a été formulé.
194. Appliquant la décision du ministre, la Direction nationale de l'inspection a convoqué les parties au conflit à une audience fixée au 19 janvier 1996. A cette date ne se sont présentés que les représentants des travailleurs, cependant qu'au domicile de l'entreprise faisant l'objet de la plainte on se refusait à recevoir la citation à comparaître. Le résultat de cette audience ressort des termes sans ambages de la décision prise par la Direction nationale de l'inspection du travail le 29 janvier 1996, qui confirme les conclusions formulées par les inspecteurs dans leur rapport du 20 novembre 1995.
195. Au nombre des faits avérés mentionnés dans cette décision, il est signalé que la société FERTICA n'applique plus la convention collective conclue avec l'ATFE depuis le 9 septembre 1995 alors que ledit instrument reste en vigueur jusqu'au 15 septembre 1996. Le 9 septembre 1995, l'entreprise faisant l'objet de la plainte a licencié tous les travailleurs, dont 265 affiliés au syndicat plaignant, avec un versement des prestations. Il est de même indiqué que les dirigeants syndicaux Indalecio Ordoñez Calvo et Marco Antonio Guzmán Rodriguez ont cessé de percevoir leur salaire le 10 septembre 1995, ce qui est contraire à l'article 9 de la convention collective précitée. En ce qui concerne le licenciement des membres du comité de direction du syndicat, la société FERTICA n'a pas respecté l'article 10 de ladite convention collective. Pour ces raisons, la Direction nationale de l'inspection du travail a décidé de déclarer recevables les plaintes pour violation de convention collective, pour pratiques du travail déloyales et pour persécution antisyndicale portées par l'ATFE contre la société FERTICA. Elle a en outre fait savoir aux parties au conflit qu'une fois que la décision du 29 janvier 1996 serait devenue applicable l'autorité ayant juridiction serait saisie de la plainte.
196. En ce qui concerne cette dernière décision administrative, le gouvernement fait observer que l'organisation plaignante, lorsqu'elle évoque des manuvres dilatoires, expose de manière téméraire une série de considérations subjectives tendant à induire l'OIT en erreur. Il signale que la décision du 29 janvier 1996 a fait l'objet d'un recours par la société FERTICA par communication écrite reçue le 21 février 1996, recours par lequel cette société demandait l'annulation de la décision. La Direction nationale de l'inspection du travail, par décision du 8 mars 1996, a déclaré non recevables ce recours et d'autres actions interjetées par le représentant de FERTICA.
197. Dans ce contexte, il importe de signaler que, le 22 mars 1996, la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice a demandé par télégramme au ministère la communication dans les plus courts délais possible du dossier administratif original relatif au recours en appel formé par la société FERTICA contre les décisions de la Direction nationale de l'inspection du travail. Cette démarche tendait à faciliter l'examen d'une action en inconstitutionnalité introduite par la société FERTICA. La Chambre constitutionnelle a rendu ce dossier original au mois de juin 1996 et, par décision no N-2810-96 datée du 13 juin 1996, a rejeté quant au fond l'action en inconstitutionnalité introduite par l'entreprise. Le dossier original susmentionné ayant été rendu par la Chambre constitutionnelle au mois de juin 1996, le ministère du Travail s'est attaché en priorité à l'examen du recours en appel contre la décision administrative du 29 janvier 1996, ce qui fait apparaître combien est injuste et hasardeuse l'accusation de l'organisation plaignante selon laquelle des retards seraient imputables au ministère. Il convient de signaler que, par décision du 29 juillet 1996, le ministère a tranché ce recours, déclarant irrecevables le recours en appel, l'action concomitante en nullité et l'exception en non-représentativité contre les décisions administratives des 29 janvier et 8 mars 1996 et confirmant en outre la démarche administrative. La Direction nationale de l'inspection du travail a été enjointe de saisir sans délai la juridiction compétente de la plainte, conformément aux articles 564 et suivants du Code du travail, en demandant d'imposer les sanctions prévues par la législation du travail en vigueur, sans préjudice de toute autre mesure qui pourrait être ordonnée. Concrètement, le maire ou le juge du travail, selon le cas, est prié d'ordonner le rétablissement des droits violés et la réparation des préjudices subis par les travailleurs, conformément à l'article 610 du Code du travail. Il est en outre expressément demandé d'ordonner la réintégration immédiate, avec versement des salaires échus, de tous les travailleurs touchés. Le gouvernement communique copie de la plainte déposée le 30 août 1996 tendant à ce que des sanctions soient prises contre l'entreprise.
198. Le gouvernement souligne que la procédure d'examen de cette affaire a été accomplie par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale conformément à l'ordre juridique en vigueur, et il déplore que les instances internationales en aient été saisies avant que les instances nationales n'aient été préalablement épuisées, entraînant en conséquence une démarche simultanée dans deux domaines ou selon deux modalités différentes, procédé qui démontre une inconséquence manifeste ainsi qu'une méconnaissance de l'état du droit qui régit le pays. Cette attitude témoigne également d'un manque de sincérité qui laisse l'administration sans défense, surtout si l'on veut bien considérer que non seulement la Direction nationale de l'inspection du travail est intervenue pour résoudre ce conflit, mais encore que le département des relations du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale a organisé diverses audiences pour essayer de résoudre les questions soulevées dans la plainte portée par l'organisation plaignante devant l'OIT.
199. Pour ces raisons, le gouvernement invite à rejeter cette plainte dans sa totalité.
200. Le comité constate que, dans le présent cas, l'organisation plaignante et les autorités du ministère du Travail concordent essentiellement (selon ce qui ressort de la réponse du gouvernement) sur la réalité des actes antisyndicaux de la part de l'entreprise FERTICA S.A. (licenciement de dirigeants et membres de l'Association des travailleurs de FERTICA S.A. et non-respect de la convention collective dans sa totalité). Le comité note à cet égard que, sur rapport de l'inspection du travail constatant lesdites infractions au mois de septembre 1995, le ministère du Travail a introduit une action en justice pour que des sanctions soient prises contre l'entreprise et que les préjudices subis soient réparés, cette requête demandant en particulier la réintégration immédiate des travailleurs touchés et le paiement des salaires échus ainsi que, d'une manière générale, le rétablissement des droits violés. Le comité a le regret de constater que, selon ce qui ressort du rapport de l'inspection du travail, l'entreprise en question a recouru à des pratiques déloyales (annulation arbitraire de la convention collective dans sa totalité et actes antisyndicaux de persécution syndicale se traduisant par un licenciement du comité directeur de l'Association des travailleurs de FERTICA S.A. et de 265 membres). Le comité a également le regret de constater que, après les licenciements de ces syndicalistes, l'entreprise a engagé, selon les allégations, de nouveaux travailleurs.
201. S'agissant de l'allégation de lenteur excessive de la conclusion de la procédure engagée devant les autorités, le comité prend note des déclarations du gouvernement concernant son obligation de garantir le respect des règles d'une procédure régulière, ainsi que des divers recours administratifs et procédures incidentes interjetés par l'entreprise, de même que du recours juridictionnel en inconstitutionnalité (qui a été rejeté) tenté par cette dernière. Le comité observe que, selon ce qui ressort du rapport de l'inspection du travail, les violations de la législation du travail par l'entreprise sont survenues le 9 septembre 1995 et ledit rapport est daté du 20 novembre 1995. Il observe de même que les actions administratives et judiciaires de l'entreprise n'ont pas permis au gouvernement de saisir l'autorité judiciaire avant la fin d'août 1996 pour que les sanctions et réparations prévues par la législation soient prononcées. Le comité constate que, entre les actes antisyndicaux dénoncés par l'organisation plaignante (septembre 1995) et la requête du ministère ordonnant des sanctions contre l'entreprise et des réparations (fin août 1996), il s'est écoulé onze mois.
202. Le comité observe que l'autorité judiciaire ne s'est pas prononcée sur la requête du ministère tendant à ce que des sanctions soient prises et que les droits violés soient rétablis, ce qui constitue une situation non satisfaisante si l'on veut bien considérer la longueur des délais que les dirigeants et membres du syndicat doivent supporter avant d'être rétablis dans leurs droits. A cet égard, le comité souhaite rappeler que les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l'absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, quatrième édition, 1996, paragr. 749.] Le comité exprime sa préoccupation, vu la lenteur et le peu d'efficacité des procédures dans un nombre considérable de cas, et prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que ces procédures soient rapidement diligentées.
203. Dans le cas présent, considérant le caractère patent des actes antisyndicaux constatés par l'inspection du travail, les graves conséquences qui en ont résulté pour le syndicat et ses membres, le laps de temps considérable qui s'est écoulé depuis la survenue des atteintes aux droits syndicaux, ainsi que les retards que peut avoir pris la procédure judiciaire (recours éventuels ou ouverture de nouvelles procédures incidentes), le comité prie le gouvernement de prendre de nouvelles mesures auprès des parties concernées afin que soit rapidement résolu le conflit entre l'Association des travailleurs de FERTICA S.A. et l'entreprise, par voie de négociation et compte dûment tenu des dispositions des conventions nos 98 et 135, ratifiées par le Costa Rica. En particulier, le comité demande que soient réintégrés dans leurs postes tous les travailleurs licenciés à raison de leur fonction ou de leur affiliation syndicale et que la convention collective soit appliquée.
204. Enfin, le comité a le regret de constater qu'aucune réponse n'a été apportée à l'allégation concernant l'envoi d'un contingent anti-émeutes à l'entreprise FERTICA S.A. pour déloger les travailleurs qui s'étaient postés de manière pacifique devant cet établissement depuis le 11 septembre 1995. A cet égard, le comité invite le gouvernement à considérer que le seul fait de participer à un piquet de grève et d'inciter fermement, mais pacifiquement, les autres salariés à ne pas rejoindre leurs postes de travail ne peut être considéré comme une action illégitime. Il en va toutefois autrement lorsque le piquet de grève s'accompagne de violences ou d'entraves à la liberté du travail par contrainte exercée sur les non-grévistes, actes qui, dans beaucoup de pays, sont punis par la loi pénale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 586.] Le comité invite le gouvernement à veiller, à l'avenir, au respect de ce principe.
205. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de Cuba
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: refus de reconnaissance de la personnalité
juridique
d'une organisation syndicale; agressions, détentions,
menaces et autres actes à l'encontre de dirigeants
d'organisations syndicales indépendantes
206. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1995 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir le 300e rapport du comité, paragr. 399 à 427, approuvé par le Conseil d'administration à sa 264e session (novembre 1995).]
207. Le gouvernement de Cuba a envoyé de nouvelles observations dans une communication datée du 12 septembre 1996.
208. Cuba a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
209. Lors de l'examen antérieur du cas, étaient restées en instance une série d'allégations qui relevaient divers actes à l'encontre de dirigeants ou de syndicalistes d'organisations syndicales indépendantes: agressions, détentions, menaces et actes d'intimidation ou de harcèlement, le refus de reconnaître la personnalité juridique de la CTDC et un licenciement antisyndical.
210. L'organisation plaignante avait plus particulièrement signalé que:
211. Par ailleurs, dans sa dernière communication datée du 7 juillet 1995, l'organisation plaignante avait allégué que:
212. Dans sa réponse, le gouvernement a mis l'accent sur la difficulté à trouver les informations concernant les personnes mentionnées dans la plainte. En effet, aucune de ces personnes ne possède la qualité de syndicaliste, les faits mentionnés ne sont pas de nature syndicale, ces personnes ne représentent aucun collectif de travailleurs, et elles n'ont de relations de travail avec aucune entreprise ou entité professionnelle à Cuba. Ces éléments placent le Comité de la liberté syndicale dans la situation d'avoir à connaître des faits n'ayant aucun rapport avec sa louable tâche de défense des libertés syndicales.
213. Se référant à diverses allégations, le gouvernement a envoyé les observations suivantes:
214. Le comité avait formulé les recommandations suivantes [voir le 300e rapport, paragr. 427]:
B. Nouvelles observations du gouvernement
215. Dans sa communication du 12 septembre 1996, le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de constater que M. Lázaro Corp Yeras et son fils n'ont pas été agressés par des personnes liées aux forces de sécurité cubaines, comme le déclare l'organisation plaignante sans apporter aucune preuve. Une plainte formelle relative à de tels faits n'a été déposée dans aucune unité de la police. Par ailleurs, l'enquête a permis de constater que M. Lázaro Corp Yeras n'est pas un dirigeant syndical, ne représente aucun collectif de travailleurs et n'a de relations professionnelles avec aucun centre de travail. M. Lázaro Corp Yeras a quitté le pays en septembre 1994.
216. Au sujet des allégations relatives à Mme Enid Amelia Luque, le gouvernement signale qu'en plus de ce qu'il a déclaré dans sa réponse antérieure du 13 juillet 1995, qu'il confirme, il signale que, selon les recherches menées, la citoyenne Enid Amelia Luque a provoqué un scandale public et des troubles dans le voisinage de son domicile en proférant des phrases offensantes qui ont suscité des réactions de réprobation envers sa conduite parmi des gens du voisinage. Il n'y a pas eu d'actes de violence, mais seulement un scandale public, ce qui a nui aux règles de bon voisinage entre les habitants de l'endroit. Le gouvernement ajoute que l'avertissement dont il est fait mention a été donné conformément aux lois de procédure, lors d'une entrevue avec des instructeurs de la police au cours de laquelle l'intéressé est informé de la faute commise et que les faits en question ne doivent pas se répéter. Il est faux de dire que la citoyenne Enid Amelia Luque a été placée dans une cellule et qu'elle a fait l'objet d'une fouille personnelle. Elle est restée peu de temps dans les locaux du poste de police, uniquement pour remplir les formalités requises. La citoyenne Enid Amelia Luque n'est ni syndicaliste ni dirigeante syndicale et elle ne représente aucun collectif de travailleurs. Elle n'est employée par aucun centre de travail. Elle a quitté le pays en août 1994.
217. Quant aux allégations que la CISL a présentées dans sa communication du 7 juillet 1995, le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de se rendre compte qu'il n'existe dans aucune entreprise ou entité de travail de tout le pays un syndicat portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. Les personnes mentionnées dans la communication de la CISL datée du 7 juillet 1995 dénommées: Juan Guarino Martínez Guillén, Jesús Cárdenas López et René José Montero Garay ne sont pas des dirigeants syndicaux, et ils n'ont pas fait l'objet de menaces ou de harcèlement. Les personnes mentionnées n'ont pas été proposées ni élues dans aucun centre de travail du pays en tant que représentant d'un collectif de travailleurs. Juan Guarino Martínez a quitté le pays en mars 1996.
218. Au sujet d'une prétendue expulsion d'un syndicaliste qui, selon les allégations de la CISL, serait membre d'un front syndical de la centrale Julio Antonio Mella, dénommé Eduardo Lamas Campos, le gouvernement indique que les recherches menées ont permis de se rendre compte que la personne susmentionnée a fait l'objet de trois mesures disciplinaires administratives de changement de poste de travail pour absences injustifiées au travail et pour manque de respect envers ses supérieurs et collègues. Lesdites mesures ont été prises, conformément à la législation du travail en vigueur, et ont été acceptées par le travailleur qui n'a pas utilisé les moyens de recours prévus par la législation pertinente. Le 10 octobre 1992, il a donné son congé à ce centre de travail afin d'éviter une sanction pour des causes similaires à celles mentionnées plus haut. M. Eduardo Lamas Campos n'a jamais été proposé ni élu par les travailleurs de la centrale Julio Antonio Mella comme dirigeant syndical. Eduardo Lamas Campos a des antécédents pénaux. En 1986, il a été condamné par les tribunaux à une année de privation de liberté pour un délit de vol à main armée.
219. Le gouvernement déclare également que dans le centre de travail Julio Antonio Mella il n'existe aucun front syndical portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. Les recherches menées ont permis de se rendre compte que dans ce centre il y a 77 sections syndicales appartenant au Syndicat national des travailleurs de l'industrie sucrière. Un total de 5 135 travailleurs sont affiliés à ces 77 sections, ce qui représente une affiliation de 100 pour cent. Les dirigeants syndicaux du centre Julio Antonio Mella ont été proposés et élus par les travailleurs eux-mêmes. Ils participent aux activités syndicales conformément aux règlements et statuts en toute liberté et n'ont dû demander l'autorisation à aucun organisme de l'Etat pour l'exercice de leurs activités de défense des droits et intérêts des travailleurs, conformément à ce qu'énonce l'article 13 du Code du travail. M. S. Eduardo Lamas Campos n'a jamais été proposé ni élu en tant que dirigeant syndical.
220. Le gouvernement précise que, dans le nouveau centre de travail où il a commencé à travailler après avoir donné son congé au centre Julio Antonio Mella, le Taller Pecuario, de la Empresa de Maquinaría Agrícola, M. Eduardo Lamas a de nouveau fait l'objet de sanctions pour s'être approprié de biens du centre de travail (700 plants de tomates). Comme on peut s'en rendre compte, les mesures disciplinaires imposées à M. Eduardo Lamas Campos sont dues à ses actes d'indiscipline au travail et ne sont pas liées à des activités syndicales.
221. Le gouvernement déclare en outre que la CISL déforme les faits et se base sur des personnes isolées qui ne représentent aucun collectif de travailleurs et qui, d'une manière ou d'une autre, ont adopté une conduite qui viole les lois en vigueur dans le pays, en se rendant coupables de faits qui n'ont rien à voir avec des activités syndicales; la CISL cherche à présenter ces personnes au comité comme des syndicalistes, alors qu'il est certain qu'aucune des personnes mentionnées n'a déployé des activités syndicales et ne représente aucun collectif de travailleurs. Le gouvernement prie le Comité de la liberté syndicale de conclure définitivement ce cas car il n'a pas trait à des activités syndicales protégées par la convention (n 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
222. Le comité observe que les allégations restées en instance se réfèrent à divers actes perpétrés à l'encontre de dirigeants ou de syndicalistes d'organisations syndicales indépendantes: agressions, détentions, menaces graves, actes d'intimidation et de harcèlement, refus de reconnaissance de la personnalité juridique de la CTDC et licenciement antisyndical.
223. En ce qui concerne les allégations d'agressions graves commises à l'encontre de M. Lázaro Corp et de son fils cadet, le comité note que le gouvernement déclare que: 1) les recherches menées ont permis de constater qu'ils n'ont pas été attaqués par des personnes liées aux forces de sécurité cubaines, et qu'il n'existe pas de plainte formelle contre de tels faits; 2) M. Lázaro Corp Yeras n'est pas un dirigeant syndical, il ne représente aucun collectif de travailleurs et n'avait de relations professionnelles avec aucun centre de travail; 3) il a quitté le pays en septembre 1994. Tenant compte de ces déclarations et du fait que M. Corp a quitté le pays en septembre 1994, le comité conclut que dans ces circonstances il ne semble pas possible d'ouvrir une enquête judiciaire comme il l'avait demandé à sa session antérieure.
224. Quant aux allégations relatives à la détention, aux menaces et aux actes de harcèlement dont a été victime Mme Enid Amelia Luque, secrétaire du Front syndical de la Confédération des travailleurs de Cuba, le comité prend note du fait que le gouvernement reconnaît que l'intéressée est restée dans les locaux de la police, bien que pour peu de temps, et qu'elle a fait l'objet d'un avertissement, procédure prévue par la loi, l'informant de la faute commise et de ce que ces faits ne devaient pas se répéter. En revanche, le gouvernement dément que Mme Enid Amelia Luque était syndicaliste ou dirigeante syndicale, qu'elle ait été placée dans une cellule et fait l'objet d'une fouille corporelle, et souligne que le motif de l'avertissement était des phrases offensantes (le gouvernement n'en indique pas le contenu) qui ont provoqué un scandale public parmi les gens du voisinage. Vu les divergences existant entre la version de l'organisation plaignante et celle du gouvernement, le comité rappelle le principe selon lequel les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s'il ne s'agit que de simples interpellations de courte durée, constituent un obstacle à l'exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition (révisée), 1996, paragr. 77.] Enfin, le comité prend note du fait que Mme Enid Amelia Luque a quitté le pays en août 1994 et insiste sur le fait que les personnes responsables de mesures antisyndicales doivent être sanctionnées.
225. Pour ce qui est des allégations concernant la détention, l'interrogation et les menaces à l'encontre de Juan Guarino Martínez Guillén et Jesús Cárdenas López (respectivement président et vice-président de la CTDC) et la citation de la police et les menaces à l'encontre de M. René José Montero Garay (secrétaire aux relations internationales de la CTDC), le comité prend note que le gouvernement dément qu'ils sont des dirigeants syndicaux et qu'ils ont fait l'objet de menaces ou de harcèlement, et signale que Juan Guarino Martínez Guillén a quitté le pays en mars 1996. Le comité constate que le gouvernement n'a pas démenti expressément la détention et l'interrogation de MM. Juan Guarino Martínez Guillén et Jesús Cárdenas López ni la citation de la police adressée à M. René Montero Garay. Le comité attire, par conséquent, à nouveau l'attention du gouvernement sur le principe mentionné dans le paragraphe précédent au sujet des interpellations de syndicalistes.
226. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba (CTDC) n'est pas parvenue à obtenir sa reconnaissance juridique en dépit du fait qu'elle a soumis tous les documents nécessaires, le comité note que le gouvernement déclare que les recherches menées ont permis de constater qu'il n'existe dans aucune entreprise ou entité de travail de tout le pays un syndicat portant le nom de Confédération des travailleurs démocratiques de Cuba. A cet égard, le comité prie le gouvernement de lui indiquer expressément s'il a reçu ou non les documents nécessaires à l'obtention de la reconnaissance juridique de la CTDC auxquels se réfère l'organisation plaignante et, dans l'affirmative, de le tenir informé de la suite qui y a été apportée. Dans ce contexte, et compte tenu du fait que diverses allégations du présent cas concernent des syndicalistes de la CTDC, le comité souhaite se référer à une des conclusions qu'il a formulées lors de l'examen antérieur du cas [voir 300e rapport, paragr. 420] qui est reproduite ci-après:
... le comité relève qu'une seule centrale syndicale est officiellement reconnue à Cuba et mentionnée dans la législation et que, dans des cas antérieurs, des plaintes lui ont été soumises concernant le refus de reconnaissance officielle d'organisations syndicales en marge de la structure syndicale existante officiellement reconnue. De même, dans son dernier rapport (1995), la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a demandé au gouvernement de garantir dans la législation et dans la pratique le droit pour les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, de constituer sans autorisation préalable des organisations de leur choix, y compris en dehors de toute structure syndicale existante s'ils le désirent (article 2 de la convention), ainsi que d'élire librement leurs représentants (article 3 de la convention). [Voir rapport III (partie 4A), CIT, 82e session, 1995, p. 173.]
227. S'agissant de l'allégation relative à l'expulsion d'un syndicaliste du Front syndical du centre de travail Julio Antonio Mella (M. Eduardo Lamas Campos) pour avoir réclamé de meilleures conditions de travail, le comité note que le gouvernement déclare que ladite personne n'était pas un dirigeant syndical et qu'elle a fait l'objet de mesures disciplinaires de changement de poste de travail, notamment à cause d'absences injustifiées au travail, qu'elle a ensuite quitté son poste de travail, et qu'ultérieurement elle a été sanctionnée de nouveau à son nouveau poste de travail pour appropriation de biens.
228. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Danemark
présentée par
l'Association des diététiciens danois
en milieu hospitalier (ADCD)
Allégations: violation du droit à la négociation
collective et ingérence dans les activités syndicales
229. Dans des communications datées du 30 novembre et du 9 juillet l995, l'Association des diététiciens danois en milieu hospitalier (ADCD) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Danemark.
230. Le gouvernement a communiqué ses observations sur le cas dans des communications datées du 28 juin et du 8 août 1996.
231. Le Danemark a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, l948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
232. Dans sa communication datée du 30 novembre l995, l'ADCD déclare que la plainte qu'elle a déposée concerne une lettre datée du 21 septembre l995 que le directeur des hôpitaux de la région de Vejle a adressée aux membres du groupe ERFA, groupe ayant pour but l'échange d'informations et de données d'expérience. Une traduction de cette lettre est annexée au présent rapport.
233. L'organisation plaignante indique, en fournissant les informations de base, que, le 9 août l995, elle avait entamé un boycottage à l'encontre de l'hôpital de la région de Vejle, en donnant instruction à ses adhérents de ne pas conclure de contrats de travail avec l'hôpital du fait que les fonctions de diététiciens en milieu hospitalier, telles qu'elles étaient définies dans cet hôpital, laissaient supposer que ceux-ci étaient affectés à des tâches pour lesquelles ils n'avaient ni qualifications ni formation et qu'en réalité ils étaient employés en tant que préposés à la restauration. Par la suite, quatre diététiciens ont été licenciés le ll août 1995, et l'organisation plaignante a porté l'affaire devant la Haute Cour du District occidental, en faisant valoir que les changements apportés à la définition des fonctions revenaient à modifier profondément la relation d'emploi des diététiciens, ce qui est contraire à la législation du travail en vigueur au Danemark. Cette affaire demeure en instance.
234. Selon l'organisation plaignante, la presse a manifesté un intérêt considérable pour cette affaire et a organisé plusieurs entretiens avec le président et le vice-président de ladite organisation. Un échange de lettres a ensuite eu lieu en septembre l995 entre le directeur de la santé de la région de Vejle et le conseiller juridique de l'organisation plaignante, par lequel celle-ci était invitée à donner des précisions et des preuves au sujet des déclarations faites lors de ces entretiens.
235. Lorsque l'organisation plaignante a pris connaissance de la lettre du 21 septembre 1995 adressée au groupe ERFA, qui est l'objet de la présente plainte, elle a informé par écrit le directeur que les déclarations faites dans la lettre étaient incorrectes, imprécises et diffamatoires, lui demandant de l'annuler. Cependant, aucune action n'a été prise dans ce sens.
236. L'organisation plaignante considère que la lettre adressée au groupe ERFA constitue une réaction aux démarches suivantes: la demande introductive d'instance déposée auprès de la Haute Cour du District occidental; le boycottage qu'elle a entamé contre l'hôpital de Vejle et les entretiens qu'elle a accordés à la presse locale. L'organisation plaignante affirme qu'elle représente les diététiciens et qu'elle entend servir et défendre les intérêts des membres de cette profession, qu'elle entre dans le champ d'application de la convention no 87 et que, néanmoins, dans la lettre datée du 21 septembre, elle est présentée comme une organisation purement locale qui ne respecte pas les principes régissant le marché du travail au Danemark. De l'avis de l'organisation plaignante, la lettre du directeur au groupe ERFA est contraire à l'article 3, paragraphe 2, de la convention no 87 car elle entrave l'exercice des droits de l'organisation plaignante d'organiser sa gestion et son activité sans l'intervention des autorités publiques, ainsi qu'à l'article 2 de la convention no 98. Ladite organisation déclare également que cette lettre constitue une violation de l'article 4 de la convention no 98 en vertu de laquelle, selon l'organisation plaignante, l'hôpital de la région de Vejle est tenu d'encourager et de promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire entre l'hôpital et l'organisation plaignante. Celle-ci ajoute que la lettre constitue un harcèlement particulièrement grave vu qu'elle a été adressée à un groupe indéterminé de membres du groupe ERFA.
237. L'organisation plaignante précise, dans sa communication du 9 juillet l996, que l'affaire portée devant la Haute Cour concerne des questions relatives aux droits individuels des quatre diététiciens licenciés, mais ne met pas en cause les déclarations diffamatoires faites par le directeur dans la lettre datée de septembre pour laquelle aucune action en justice n'a encore été intentée au niveau national. En outre, l'organisation plaignante souligne qu'elle ne conteste pas le droit du directeur de l'hôpital d'échanger des vues et des informations, y compris des vues critiques, avec le groupe ERFA. Elle met plutôt l'accent sur le ton vexatoire et l'absence de preuves ainsi que la nature incorrecte des informations fournies qui, de l'avis de l'organisation plaignante, constituent un harcèlement grave et entravent la liberté syndicale dont elle doit jouir au regard des hôpitaux au Danemark.
238. Enfin, l'organisation plaignante indique qu'elle regroupe plus de 90 pour cent de tous les diététiciens du Danemark et que, s'il est vrai qu'elle n'est pas partie à la convention collective conclue avec l'hôpital de Vejle, décrire l'organisation comme totalement incompétente constitue une erreur et un harcèlement, si l'on songe en particulier que la lettre du directeur a probablement été adressée à tous les autres directeurs des hôpitaux publics du Danemark.
B. Réponse du gouvernement
239. Dans sa communication du 28 juin l996, le gouvernement confirme les circonstances dans lesquelles le boycottage a été entamé le 9 août l995 et déclare que la lettre adressée le 21 septembre par le directeur de l'hôpital aux membres du groupe ERFA visait à les informer des divergences entre l'hôpital de Vejle et l'Association des diététiciens danois en milieu hospitalier (ADCD), et en particulier de l'arrêt de travail observé en août.
240. Le gouvernement déclare qu'il ne fera aucun commentaire sur les questions liées à l'action en justice encore en instance concernant la définition des fonctions des diététiciens, car il considère qu'il serait préférable d'attendre l'arrêt de la cour. Sa réponse est donc limitée aux questions se rapportant à la lettre du 21 septembre.
241. Le gouvernement estime que le désaccord résulte initialement du fait que certains membres ont quitté l'Association danoise de diététique (DDA) pour créer leur propre association, l'ADCD. A l'époque, la DDA avait conclu une convention collective avec leur employeur (l'Association des conseils régionaux du Danemark), convention que l'employeur avait décidé de conserver pour couvrir les membres de l'ADCD. Alors qu'en vertu de la législation danoise un syndicat dissident est habilité à conclure sa propre convention collective, l'employeur n'est pas tenu d'envisager une autre convention, en particulier si le travail en question entre déjà dans le champ d'application d'une convention.
242. En pareilles circonstances, l'Association des conseils régionaux ne conclut en général une convention collective qu'avec les organisations qui représentent la majorité d'une catégorie de personnel donnée. Toute organisation minoritaire est encouragée à conclure des accords de démarcation qui serviront de base à l'attribution de droits de négociation. Les comtés n'ont ni la possibilité ni l'autorisation d'intervenir dans l'affiliation syndicale du personnel, et il est contraire à la législation danoise de prendre en considération l'affiliation syndicale lors du recrutement des agents de la fonction publique. En conséquence, le directeur de l'hôpital a contrevenu à la législation danoise si, en qualité d'employeur du secteur public, il a engagé les membres du groupe ERFA à ne pas employer des diététiciens. En outre, il est contraire à la loi sur la protection contre le licenciement pour des motifs d'affiliation syndicale de licencier un employé du seul fait qu'il est membre d'une association ou d'un syndicat en général ou d'une association ou d'un syndicat déterminé.
243. Le gouvernement reconnaît que la lettre du 21 septembre exprime des critiques à l'égard des activités de l'ADCD. Il ajoute néanmoins que ces commentaires doivent être placés dans le contexte du différend en cours sur la question de savoir si les diététiciens sont plus ou moins qualifiés que les préposés à la restauration et s'il est donc justifié que les seconds soient les supérieurs des premiers. Le point de savoir si la lettre contient également une demande dissimulée de ne pas recruter de personnes qui seraient membres de l'ADCD ne pourra sans doute être élucidé qu'au moyen d'une action en justice.
244. Par ailleurs, le gouvernement juge difficile de déterminer comment la lettre peut être perçue comme une intervention dans les affaires intérieures de l'ADCD, alors qu'elle n'a pas été adressée aux membres de l'association.
245. Le gouvernement rappelle que certains aspects de cette affaire font actuellement l'objet d'une action en justice qui reste en instance et propose par conséquent qu'il soit envisagé d'attendre l'arrêt de la Haute Cour pour se prononcer.
246. En résumé, le gouvernement considère que: l'élément central de cette affaire est un différend entre la DDA et l'ADCD. Si l'ADCD est entièrement fondée à assurer sa reconnaissance et à s'efforcer de conclure sa propre convention collective, l'employeur cherchera tout naturellement à prendre position pour la convention collective conclue avec la DDA et à éviter de conclure une nouvelle convention collective concernant, du moins dans une certaine mesure, les mêmes fonctions; et si le ton de la lettre du 21 septembre est indubitablement critique à l'égard des activités de l'ADCD, il faut le considérer à la lumière du différend en cours et il est difficile de déterminer, d'après les éléments existants, si la lettre contient une incitation illégitime à ne pas employer de membres de l'ADCD.
247. Dans sa communication du 8 août l996, le gouvernement prend note des questions soulevées par l'organisation plaignante concernant la recevabilité de la lettre et rappelle que rien n'a été entrepris pour vérifier si la teneur de la lettre est contraire à la législation danoise. Le gouvernement relève également que, de l'avis même de l'organisation plaignante, la lettre ne contient pas une demande dissimulée de ne pas engager de personnes qui seraient affiliées à l'ADCD.
248. Le comité note que les allégations avancées dans le présent cas ont trait au contenu d'une lettre que le directeur des hôpitaux de la région de Vejle a adressée au groupe ERFA et qui, selon l'organisation plaignante, porte indûment atteinte à son droit d'organiser ses activités et à ses droits de négociation collective.
249. Premièrement, en ce qui concerne l'indication initiale du gouvernement selon laquelle certains aspects de cette question font actuellement l'objet d'une action en justice encore en instance et qu'il faudrait envisager d'attendre l'arrêt de la Haute Cour pour se prononcer, le comité note que l'affaire portée devant le tribunal concerne non pas la lettre du 21 septembre qui est l'objet de la présente plainte, mais la question de savoir si les changements apportés à la définition des fonctions des diététiciens enfreignent la législation danoise. En conséquence, le comité ne considère pas que le résultat de l'affaire portée devant la justice aurait une incidence sur l'examen de la plainte dont il est saisi. S'agissant du fait qu'aucune action n'a été intentée au niveau national concernant le contenu de la lettre, le comité rappelle que, si le recours à la procédure judiciaire interne, quel qu'en soit le résultat, constitue un élément qui doit, certes, être pris en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition 1996, annexe I, paragr. 33.]
250. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle cette lettre constitue une violation du devoir qui incombe à l'hôpital d'encourager et de promouvoir les procédures de négociation volontaire, le comité relève l'indication du gouvernement selon laquelle, dans le cas où un syndicat ferait dissidence, l'Association des comités régionaux ne conclurait une convention collective qu'avec l'organisation majoritaire, tout en incitant les organisations minoritaires à passer des accords de démarcation qui serviraient de base à l'octroi de droits de négociation. Par ailleurs, le comité note cependant qu'aux termes de la lettre émanant du directeur des hôpitaux: le négociateur autorisé pour les diététiciens est l'Association danoise de diététique (DDA) qui négocie la convention collective. Toutefois, la plupart des diététiciens ne sont pas membres de cette association, mais de l'ADCD qui n'a aucune compétence. [non souligné dans le texte].
251. Etant donné que les diététiciens, en tant que catégorie de travailleurs, semblent être majoritairement représentés par l'ADCD, que le directeur de l'hôpital n'a pas reconnue jusqu'à présent, le comité rappelle le principe selon lequel les employeurs, y compris les autorités publiques agissant en tant qu'employeurs, devraient reconnaître, aux fins de la négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs qu'ils occupent. Les autorités compétentes devraient, dans tous les cas, être habilitées à procéder à une vérification objective de toute demande d'un syndicat prétendant représenter la majorité des travailleurs d'une entreprise, pour autant qu'une telle demande semble plausible. Si le syndicat intéressé se révèle grouper la majorité des travailleurs, les autorités devraient prendre des mesures de conciliation appropriées en vue d'obtenir la reconnaissance, par l'employeur, de ce syndicat aux fins de la négociation collective. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 821 et 824.] Le comité demande donc au gouvernement de prier les autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que l'ADCD ne fasse pas l'objet de discrimination de la part de l'employeur en matière de négociation collective, notamment étant donné que le directeur de l'hôpital lui-même a admis qu'il s'agissait de l'organisation la plus représentative de cette catégorie de travailleurs.
252. En ce qui concerne l'incidence de la lettre du directeur sur le droit de l'organisation plaignante d'exercer ses activités sans ingérence, comme il est prévu à l'article 3, paragraphe 2, de la convention no 87 et à l'article 2 de la convention no 98, le comité note que le gouvernement reconnaît que cette lettre est critique à l'égard des activités de l'ADCD, mais indique qu'elle doit être considérée dans le contexte du différend en cours. Vu que l'organisation plaignante déclare en fait dans sa deuxième communication qu'il n'existe pas de différend sur la question de savoir si la lettre contient une demande dissimulée de ne pas engager de salariés qui soient membres de cette organisation, mais prétend que la lettre porte atteinte à ses propres droits en tant qu'organisation au regard des hôpitaux, le comité note que la plainte ne contient pas d'allégations de discrimination antisyndicale. Si un différend devait surgir à cet égard, le comité considère que la question de savoir si la lettre pourrait effectivement conduire à une discrimination à l'encontre des membres de l'ADCD ne peut être déterminée que par les tribunaux. En ce qui concerne le droit de l'organisation plaignante d'organiser ses activités librement, au titre de l'article 3 de la convention no 87, le comité ne voit pas comment la lettre, qui n'a pas été envoyée aux membres de l'ADCD, pourrait constituer une ingérence dans les affaires internes de l'organisation. En outre, le comité considère qu'en l'occurrence une simple critique ne peut être considérée comme une ingérence dans les droits de l'organisation au regard des autres hôpitaux, en violation de l'article 2 de la convention no 98.
253. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité demande au gouvernement de prier les autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que l'ADCD ne fasse pas l'objet de discrimination de la part de l'employeur en question en matière de négociation collective, notamment étant donné que le directeur de l'hôpital lui-même a admis qu'elle est l'organisation la plus représentative des diététiciens.
Annexe
Comté de Vejle
Hôpital de Vejle
Direction des hôpitaux de la zone intermédiaire
21 septembre 1995
Aux membres du groupe d'échange de données d'expérience
Chers collègues,
Je voudrais vous informer par la présente d'une très mauvaise
expérience que nous avons eue ici, à l'hôpital de Vejle,
en rapport avec l'Association des diététiciens en milieu
hospitalier danois (ADCD).
Peut-être aurez-vous l'occasion de faire face à leur étrange
comportement qui dépasse largement les bornes de la pratique et
de la décence ordinaires.
A notre hôpital, l'affaire s'est mal terminée dans la mesure
où nous avons dû licencier tous nos diététiciens
pour refus illégal d'obéir aux instructions, ce qui a conduit
l'association à traîner dans la boue les membres de notre
direction.
L'association a porté l'affaire devant la justice en faisant valoir
que les diététiciens ne pouvaient être intégrés
dans la catégorie des employés du service de la restauration
et des cuisines, ce qui a été le cas à l'hôpital
de Vejle au cours des quinze à vingt dernières années,
et ce qui semble l'être en général dans les grands
hôpitaux du Danemark occidental.
L'ADCD est donc d'avis que, par définition, les préposés
à la restauration ne remplissent pas les conditions requises pour
être en charge des diététiciens, l'argument étant
que leur période de formation n'est pas aussi longue que celle des
diététiciens. Ces derniers ont ensuite déployé
des efforts considérables pour en donner la preuve.
Le négociateur autorisé pour les diététiciens
est l'Association danoise de diététique qui négocie
la convention collective. Toutefois, la plupart des diététiciens
ne sont pas membres de cette association, mais de l'ADCD qui est totalement
incompétente.
Après avoir eu affaire à l'ADCD, je dois conclure que cette
association est loin de connaître et de respecter les règles
et les relations contractuelles les plus élémentaires sur
le marché du travail.
A en juger par ma propre expérience, vous devriez suivre de très
près les mesures que pourrait prendre cette association à
l'égard de votre hôpital -- ainsi que tout problème
de gestion/problème de coopération qui surgirait dans votre
service de la restauration, où les préposés à
la restauration et les membres de l'association s'acquittent de leurs fonctions.
Pour votre information, je joins à la présente lettre un
communiqué de presse et une déclaration officielle concernant
notre affaire.
Je vous prie d'agréer, chers collègues, l'assurance de ma
considération distinguée.
(Signé) Directeur exécutif.
Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution
Plainte contre le gouvernement d'El Salvador
présentée par
le Syndicat d'industrie général
des employés de la santé (SIGESAL)
Allégations: refus de reconnaître un syndicat
-- annulation de l'enregistrement du comité directeur
-- mutation de dirigeants syndicaux
-- menaces de licenciement et perquisition dans un local syndical
254. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication du Syndicat d'industrie général des employés de la santé (SIGESAL) datée du 12 février 1996. Par la suite, le SIGESAL a présenté des informations complémentaires dans une communication du 7 mai 1996.
255. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 8, 23 et 28 mai 1996.
256. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations du syndicat plaignant
257. Dans sa communication du 12 février 1996, le Syndicat d'industrie général des employés de la santé (SIGESAL) indique qu'il possède depuis seize ans la personnalité juridique et que jusqu'en mai 1995 il était connu sous le nom de Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador. A cette date, sur décision de l'assemblée générale, il a décidé de se transformer en syndicat d'industrie. Ce même mois, il a présenté la réforme de ses statuts au ministère du Travail, mais à ce jour celui-ci ne s'est pas encore prononcé. Il indique en outre qu'il compte 256 membres dont la majorité sont des agents de l'Etat, qu'il est l'un des syndicats les plus représentatifs dans le secteur de la santé publique et que, depuis que son assemblée générale a approuvé la réforme des statuts, il fonctionne comme un syndicat d'industrie.
258. Le syndicat plaignant ajoute que, le 1er avril 1995, l'assemblée générale ordinaire a élu le comité directeur pour la période 1995-96 et que la liste des membres de ce comité a été communiquée au ministère du Travail. Le 24 mai 1995, celui-ci a été dûment enregistré et les intéressés ont reçu leurs accréditations. Cependant, le 22 janvier 1996, le ministre de la Santé publique et de l'Assistance sociale a demandé au Département national des organisations sociales du ministère du Travail d'annuler l'arrêté d'inscription au registre du comité directeur général du syndicat, dont les membres sont des employés de l'hôpital Rosales, sous prétexte qu'étant des agents de l'Etat ils n'avaient pas le droit d'adhérer au syndicat ni, par conséquent, d'être élus au comité directeur. Le 25 janvier 1996, le Département national des organisations sociales du ministère du Travail, sans même entendre le point de vue du syndicat, a décidé d'annuler l'arrêté en question. Il a ordonné que celui-ci soit rayé du registre, que les membres du comité directeur rendent au ministère du Travail leurs accréditations et que les travailleurs de l'hôpital Rosales, membres de ce syndicat, s'en retirent parce qu'ils n'avaient pas le droit d'y adhérer. Le syndicat plaignant indique qu'il a demandé au ministre compétent de révoquer cette décision mais qu'à ce jour aucune réponse n'a été reçue et que, entre-temps, l'administration de l'hôpital a exigé du comité directeur qu'il lui remette le local et les biens du syndicat, sous prétexte que, ne représentant pas légalement une organisation de travailleurs, il n'avait pas le droit d'en faire usage. Qui plus est, cette administration envisage de fermer le local, avec le concours de la police nationale.
259. Dans sa communication du 7 mai 1996, le syndicat plaignant signale que la direction de l'hôpital Rosales a informé tous les travailleurs de l'arrêté ministériel annulant l'ordre d'inscription au registre du comité directeur, qu'elle leur a demandé de se retirer du syndicat et qu'elle a commencé de rembourser les cotisations. Depuis novembre, elle menace de licenciement ceux qui refuseraient d'obtempérer. Le syndicat plaignant ajoute que le secrétaire général, le premier secrétaire chargé des conflits et quatre autres dirigeants du syndicat ont été mutés sans consultation (des copies des ordres de mutation sont jointes à la plainte). Enfin, il affirme que la direction de l'hôpital, avec le concours de vigiles privés et de la police, a brutalement pénétré dans les bureaux du SIGESAL.
B. Réponse du gouvernement
260. Dans sa communication du 8 mai 1996, le gouvernement déclare que le Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador a été constitué le 10 avril 1978, que ses statuts ont été approuvés le 15 décembre 1978, que toutes les parties à l'acte établi devant notaire ont indiqué qu'elles exerçaient la profession d'infirmier et que l'article 5 des statuts dispose, au premier alinéa, que pour adhérer au syndicat, il faut être un travailleur ayant pour fonction de soigner les malades. Aux termes de l'article 47 et de l'article 204 du Code du travail, ont le droit de s'associer librement en formant des associations professionnelles les employeurs et les travailleurs privés et les travailleurs des institutions officielles autonomes. Les dispositions du Code du travail sont applicables aux relations de travail entre employeurs et travailleurs privés, ainsi qu'entre l'Etat, les communes, les organismes officiels autonomes et les agents qu'ils emploient (article 2). Elles ne s'appliquent pas quand la relation de travail a un caractère public et relève d'une décision administrative, comme par exemple la nomination à un emploi financé conformément à la loi sur les salaires sur le budget général, ou sur les budgets de certaines institutions.
261. Le gouvernement ajoute que, le 7 avril 1995, la documentation relative à l'élection du Comité directeur général du Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador a été présenté au Département national des organisations sociales, lequel a pris le 24 mai un arrêté ordonnant l'inscription au registre de ce comité. Le 22 janvier 1996, le ministre de la Santé publique et de l'Assistance sociale a demandé à ce département d'annuler cet arrêté, car le comité directeur en question se composait dans sa totalité d'employés de l'hôpital Rosales; or ces derniers travaillaient pour une institution publique dépendant du ministère et que, n'exerçant pas la profession d'infirmier, ils ne pouvaient donc pas être membres du comité directeur. Le gouvernement précise que, aux termes de l'article 209 du Code du travail, premier alinéa, sont des syndicats corporatifs les syndicats formés de travailleurs appartenant à une même profession, à un même art ou métier ou à une même spécialité. Sur cette base, le Département national des organisations sociales a pris un arrêté ainsi motivé: le Code du travail ne s'applique pas aux employés ou travailleurs dont les postes sont énumérés dans la loi sur les salaires, dont font partie les travailleurs de l'hôpital national Rosales, puisqu'ils relèvent du ministère de la Santé publique et de l'Assistance sociale; il ressort de la définition qu'en donne le Code du travail qu'un syndicat corporatif doit être composé de travailleurs exerçant la même profession, dans le cas d'espèce celle d'infirmier, conformément à la volonté des membres qui ont fondé le syndicat le 10 avril 1978; les membres du comité directeur exercent dans l'hôpital des fonctions de technicien, d'ouvrier, de chauffagiste, de gardien, de magasinier, de standardiste et de cuisinier, et non pas d'infirmier, et ne peuvent donc pas être membres de ce syndicat; par conséquent, les travailleurs qui se trouvent dans ce cas à l'hôpital Rosales doivent se retirer du syndicat.
262. Le gouvernement déclare que, certes, la définition employée dans les statuts est plutôt large, à savoir que les membres du syndicat doivent être des travailleurs ayant pour fonction de s'occuper des malades mais, au regard du Code du travail, un ouvrier, un standardiste ou un cuisinier ne s'occupant pas des malades, leur activité est d'une autre nature. Il en va autrement des syndicats d'entreprises ou d'industrie, auxquels peuvent s'affilier tous les travailleurs d'une entreprise puisque, en l'occurrence, ce n'est pas l'activité exercée qui compte mais le fait de travailler dans cette activité. D'après le gouvernement, le syndicat plaignant ne peut ni ne doit compter parmi ses membres des travailleurs qui ne sont pas des infirmiers étant donné que les employés de l'hôpital national Rosales ne relèvent pas du Code du travail: leur relation avec l'Etat dépend d'une nomination prévue par la loi sur les salaires. Le gouvernement ajoute que le syndicat en question peut continuer d'exister et de fonctionner pourvu que ses membres exercent la profession d'infirmier.
263. Dans ses communications des 23 et 28 mai 1996, le gouvernement indique que la liberté d'expression et d'association s'exerce pleinement à El Salvador, sans autres limitations que celles fixées par la loi, à savoir qu'il ne soit porté atteinte ni à la morale ni à la vie privée. Dans le cas d'espèce, le Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador (SIGESAL) a cherché à transformer un syndicat corporatif de branche en syndicat d'industrie, ce pour quoi la simple réforme des statuts ne suffit pas. En effet, selon la loi, chaque type de syndicat doit réunir certaines conditions indispensables: ainsi, un syndicat corporatif doit se composer de travailleurs appartenant à une même profession, à un même métier ou art, ou à une même spécialité; et un syndicat d'industrie est un syndicat formé par des employeurs ou travailleurs appartenant à des entreprises relevant du même type d'activité -- industrie, commerce, de services, social, etc. (article 209 du Code du travail). Enfin, le gouvernement indique que l'hôpital Rosales dépend du ministère de la Santé publique et de l'Assistance sociale et que, par conséquent, ses employés sont des agents de l'Etat et ne font pas partie des personnes qui, conformément au Code du travail, ont le droit de s'associer librement en formant des associations professionnelles ou des syndicats (article 204 du Code du travail).
264. Le comité observe que les allégations présentées dans le présent cas portent sur le refus des autorités administratives de reconnaître la transformation d'un syndicat corporatif en un syndicat d'industrie et sur l'annulation de l'enregistrement de son comité directeur, ainsi que sur la mutation de dirigeants syndicaux, sur les menaces de licenciement à l'encontre des membres du syndicat et sur l'intrusion dans un local syndical.
265. En ce qui concerne le refus des autorités administratives de reconnaître la transformation du Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador en un syndicat d'industrie (Syndicat d'industrie général des employés de la santé) et l'annulation de l'enregistrement du comité directeur -- qui dans un premier temps avait été inscrit --, le comité note que le gouvernement indique que: 1) quand, en 1978, ce syndicat corporatif a été constitué, tous ses membres ont déclaré exercer la profession d'infirmier; 2) en mai 1995, le Département national des organisations sociales a enregistré le comité directeur du Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador; 3) en janvier 1996, le ministre de la Santé publique et de l'Assistance sociale a demandé aux autorités administratives d'annuler l'enregistrement de ce comité directeur parce qu'il était composé en totalité d'employés de l'hôpital Rosales, lesquels, travaillant pour une institution publique et n'exerçant pas la profession d'infirmier (mais celle d'ouvrier, de technicien, de standardiste, de vigile, etc.), ne peuvent, comme l'indiquent les statuts du syndicat corporatif, être membres du comité directeur; 4) compte tenu des arguments présentés par le ministère de la Santé publique, les autorités administratives ont annulé l'enregistrement du comité directeur; 5) pour qu'un syndicat corporatif se transforme en syndicat d'industrie, il ne suffit pas de modifier les statuts mais il faut aussi réunir les conditions fixées par le Code du travail; 6) l'hôpital Rosales dépend du ministère de la Santé publique et de l'Assistance sociale; son personnel est composé d'agents de l'Etat, lesquels ne figurent pas parmi les personnes citées par le Code du travail comme ayant le droit de s'associer librement.
266. Le comité observe que le gouvernement se réfère à deux questions différentes dans sa réponse. D'un côté, il déclare que les travailleurs de l'hôpital Rosales, étant des agents de l'Etat, ne sont pas régis par le Code du travail et ne jouissent donc pas du droit d'association; d'un autre côté, il indique que l'enregistrement du comité directeur du syndicat a été annulé parce que ses membres ne sont pas des infirmiers, ce qui était exigé par les précédents statuts de ce syndicat corporatif (syndicat de travailleurs exerçant la même profession).
267. En ce qui concerne la première question, le comité rappelle au gouvernement que les travailleurs et les employeurs, sans aucune distinction, y compris les fonctionnaires publics, doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'y s'affilier, à la seule condition de respecter leurs statuts. Le comité demande donc instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation soit modifiée de sorte que les fonctionnaires publics, y compris le personnel hospitalier, puissent exercer leur droit de constituer des organisations et de s'affilier librement à celles-ci. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures pour mettre la législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale et le prie de le tenir informé de toute mesure qui sera adoptée à cet égard. Le comité rappelle au gouvernement que l'assistance technique du BIT est à sa disposition.
268. En ce qui concerne la seconde question, le comité observe que, en mai 1995, le syndicat plaignant a présenté aux autorités administratives les modifications de ses statuts visant à transformer le syndicat corporatif en un syndicat d'industrie, et que les autorités administratives n'ont pas répondu, mais que ce même mois le gouvernement a inscrit au registre le comité directeur -- inscription qui par la suite a été annulée à la demande du ministère de la Santé publique et de l'Assistance sociale. Le comité observe en outre que le gouvernement n'a pas indiqué en quoi les dispositions du Code du travail relatives à la transformation d'un syndicat corporatif en syndicat d'industrie n'ont pas été respectées (le gouvernement indique clairement que les membres du comité directeur exerçaient -- comme il est normal dans un syndicat d'industrie -- des professions et des métiers distincts, mais qui tous relevaient du secteur de la santé). A cet égard, le comité rappelle au gouvernement que les travailleurs devraient pouvoir décider s'ils préfèrent former, au premier niveau, un syndicat d'entreprise ou une autre forme de regroupement à la base, tel un syndicat d'industrie ou de métier [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 279] et que la liberté syndicale implique le droit pour les travailleurs ... d'élire leurs représentants en pleine liberté. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 350.]
269. Dans ces conditions, le comité prie instamment le gouvernement de prendre des mesures pour reconnaître la transformation du Syndicat corporatif des infirmiers d'El Salvador en un syndicat d'industrie et de procéder immédiatement au réenregistrement du comité directeur élu. Le comité demande au gouvernement de respecter les principes mentionnés dans le paragraphe précédent et de le tenir informé à ce sujet.
270. En ce qui concerne les allégations relatives à la mutation du secrétaire général, du premier secrétaire chargé des conflits et de quatre autres dirigeants du syndicat -- le syndicat plaignant a joint des copies des ordres de mutation -- et aux menaces de licenciement à l'encontre des travailleurs qui refuseraient de se retirer du syndicat, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas répondu sur cet aspect du cas. A cet égard, le comité signale au gouvernement que un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi -- licenciement, transferts, rétrogradation et autres actes préjudiciables --, et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent et que nul ne doit être licencié ou faire l'objet d'autres mesures préjudiciables en matière d'emploi en raison de son affiliation syndicale ou de l'exercice d'activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d'emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 724 et 696.] Constatant qu'en dépit de ses demandes réitérées le comité n'a reçu du gouvernement aucune réponse concernant ces allégations, il le prie instamment de prendre des mesures pour réintégrer à leurs anciens postes les dirigeants syndicaux qui ont été transférés et pour qu'aucun travailleur ne soit menacé d'être licencié s'il ne se retire pas du syndicat. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
271. Enfin, en ce qui concerne l'allégation relative à l'intrusion par la violence dans le local du syndicat de vigiles et de policiers, le comité déplore également que le gouvernement n'ait pas fait parvenir ses observations à ce sujet. Il souligne que en dehors des perquisitions effectuées sur mandat judiciaire, l'intrusion de la force publique dans les locaux syndicaux constitue une grave et injustifiable ingérence dans les activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 176.] Le comité demande donc au gouvernement de prendre des mesures pour qu'à l'avenir aucune perquisition ne soit effectuée dans des locaux syndicaux sans mandat judiciaire.
272. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement de l'Espagne
présentée par
la Confédération des syndicats indépendants-
Confédération syndicale des fonctionnaires (CSI-CSIF)
Allégations: favoritisme à l'égard
de deux organisations syndicales
lors d'une négociation collective
273. La plainte figure dans une communication de la Confédération des syndicats indépendants-Confédération syndicale des fonctionnaires (CSI-CSIF) datée du 7 décembre 1994. Le gouvernement a fait part de ses observations dans des communications des 8 mai 1995 et 1er octobre 1996.
274. A sa session de novembre 1995, le comité à décidé de transmettre la réponse du gouvernement à l'organisation plaignante pour qu'elle formule des commentaires. Il lui a demandé d'envoyer sans retard les observations et informations attendues. [Voir 300e rapport du comité, paragr. 6, approuvé par le Conseil d'administration à sa 264e session (novembre 1995).] L'organisation plaignante a fait connaître ses commentaires dans une communication du 28 décembre 1995 et le gouvernement -- qui, depuis les dernières élections législatives nationales, a changé -- a transmis de nouvelles observations dans une communication du 1er octobre 1996.
275. L'Espagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ainsi que la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l'organisation plaignante
276. Dans ses communications des 7 décembre 1994 et 28 décembre 1995, la Confédération des syndicats indépendants-Confédération syndicale des fonctionnaires (CSI-CSIF) allègue que la Communauté autonome de Madrid et, plus particulièrement, le Conseiller de l'économie et des finances se sont entendus avec les commissions ouvrières (CC.OO.) et l'Union générale des travailleurs (UGT) pour négocier en commission certains aspects de la convention collective et des questions intéressant fondamentalement les fonctionnaires et l'attribution de postes de travail, pour les fonctionnaires et les employés au service de la Communauté de Madrid. Le plaignant signale qu'il est le syndicat le plus représentatif des fonctionnaires et qu'il représente les employés de la Communauté autonome de Madrid. C'est pourquoi il critique cette décision prise sans publicité de négocier les questions susmentionnées, sans la participation de la CSI-CSIF, laquelle, de façon délibérée, n'a pas été convoquée et à laquelle on a caché que des négociations étaient organisées entre l'administration et les syndicats CC.OO. et UGT. Le plaignant précise qu'il n'a pas eu connaissance des négociations en question, qu'il s'agisse des employés ou des fonctionnaires, si ce n'est par des circulaires des CC.OO. et de l'UGT publiées le 8 novembre 1994, qui faisaient état de la constitution des commissions de négociation le 28 septembre 1994.
277. La CSI-CSIF transmet une copie d'un document en date du 22 décembre 1994 dans lequel l'UGT communique à ses sections syndicales l'accord préliminaire signé ce jour, le 22 décembre 1994, avec l'administration de la Communauté autonome de Madrid, l'Union générale des travailleurs et les commissions ouvrières. Cet accord préliminaire n'a pas été signé par la CSI-CSIF qui, si elle avait été convoquée, aurait demandé que l'on indique qu'elle ne l'avait pas signé. Il est pour le moins suspect que la CSI-CSIF ait été convoquée aux négociations des 23 et 27 décembre 1994. En réalité, la Communauté autonome de Madrid a négocié en cachette de la CSI-CSIF, puis elle a apporté à la table générale des négociations les accords (préliminaires) signés avec l'UGT et les CC.OO. afin d'essayer d'obtenir de la CSI-CSIF qu'elle y souscrive.
278. La CSI-CSIF signale enfin qu'elle a renoncé au recours qu'elle avait présenté devant le tribunal concernant les faits faisant l'objet de la plainte, de peur que les travailleurs de la Communauté autonome de Madrid n'en pâtissent puisqu'elle sollicitait la suspension de l'application des accords incriminés, en ce qui concerne notamment les salaires. Cependant, la CSI-CSIF précise qu'elle maintient sa plainte devant le Comité de la liberté syndicale.
B. Réponse du gouvernement
279. Dans sa communication du 8 mai 1995, le gouvernement déclare que les allégations de l'organisation plaignante ne correspondent en rien à la réalité des faits. S'il est incontestable, comme il ressort des documents annexés, que la commission générale de négociation des fonctionnaires ainsi que celle des employés de la Communauté de Madrid ont été constituées le 28 septembre 1994, comme l'indiquent les syndicats CC.OO. et UGT dans leurs circulaires, il est absolument faux, en revanche, que la CSI-CSIF n'ait pas eu connaissance de la constitution de ces commissions, faute d'y avoir été convoquée. En vérité, d'après les notes du directeur général de la Fonction publique en date du 26 septembre 1994 (jointes par le gouvernement), la CSI-CSIF a été convoquée, tant pour l'ouverture de la négociation collective concernant les fonctionnaires que pour la constitution de la commission de négociation de la convention collective des employés.
280. Le gouvernement ajoute que, si la CSI-CSIF avait été de quelque manière que ce soit tenue à l'écart de la constitution des commissions de négociation (ce qui, comme il ressort du paragraphe ci-dessus, est absolument inexact), ou de l'une quelconque des phases ultérieures du processus de négociation, on comprend mal le sens de la note que M. José Montero Regueirale, président de la CSIT (qui représente la CSI-CSIF devant la Communauté de Madrid), a remis le lendemain du jour de la constitution de la commission générale de négociations concernant les fonctionnaires -- soit le 29 septembre 1994 -- au directeur général de la Fonction publique, note dans laquelle il indique: la commission générale de négociation des fonctionnaires de la Communauté de Madrid pour 1994 étant constituée, je transmets ci-joint la proposition de la CSIT concernant la répartition des fonds visés au chapitre 1er de la loi de finances de la Communauté de Madrid pour 1994, au titre de la provision pour ajustements techniques (le gouvernement joint à sa réponse copie de cette note).
281. Le gouvernement ajoute que, tout au long du processus de négociation, la CSIT a exposé ses propositions sur les questions faisant l'objet de la négociation. Qui plus est, tout comme les autres syndicats participant à la commission générale de négociation des fonctionnaires, elle a été convoquée le 3 octobre 1994 à une nouvelle réunion de la commission (le gouvernement transmet les documents correspondants).
282. Le gouvernement indique que les documents susmentionnés prouvent on ne peut plus clairement que la CSI-CSIF a été traitée sur un pied d'égalité avec les autres syndicats ayant participé tant à la constitution de la commission de négociation qu'aux négociations qui ont suivi. Le fait qu'il n'a pas été tenu compte des rares propositions présentées par ce syndicat dans les accords conclus par les commissions précitées, accords qui ont également été signés par la CSI-CSIF, est une toute autre question.
283. Dans une communication en date du 1er octobre 1996, le nouveau gouvernement insiste sur le fait que les commentaires formulés par les plaignants dans leur communication du 28 décembre 1995 reprennent en grande partie ce qui avait été exposé dans leur communication antérieure; en conséquence, les commentaires formulés par le précédent gouvernement demeurent valides. Dans sa communication du 1er octobre 1996, le nouveau gouvernement souligne que les commentaires présentés le 28 décembre 1995 par l'organisation plaignante reproduisent pour l'essentiel une partie de la communication dans laquelle elle présentait sa plainte; par conséquent, les observations du gouvernement antérieur s'appliquent aussi à ces commentaires. En ce qui concerne l'indication selon laquelle les accords auraient été adoptés le 22 décembre 1994 (c'est-à-dire avant la convocation de la CSI-CSIF aux négociations des 23 et 27 décembre 1994), le nouveau gouvernement souligne qu'ils ont en fait été conclus le 27 décembre 1994 et que la CSI-CSIF les a également signés, comme il ressort des documents envoyés par le Conseil des finances du gouvernement de la Communauté de Madrid (lesdits accords en date du 27 décembre 1994 sont joints à la communication du gouvernement).
284. Le comité observe que, dans la présente plainte, la CSI-CSIF allègue: 1) que la décision de constituer des commissions de négociation sur certains aspects d'une convention collective ainsi que sur l'attribution de postes intéressant les fonctionnaires et les employés de la Communauté autonome de Madrid a été prise par les syndicats UGT et CC.OO. et le conseiller de l'économie et des finances de la communauté, à l'exclusion de l'organisation plaignante; 2) qu'elle n'a été tenue informée des négociations des commissions (constituées en septembre 1994) qu'en novembre 1995; 3) que les accords (préliminaires) ont été signés par l'UGT et les CC.OO. avant qu'elle n'ait été convoquée.
285. Le comité constate que le gouvernement a fait parvenir une documentation prouvant que le directeur général de la Fonction publique a convoqué l'organisation plaignante le 26 septembre 1994 en vue de l'ouverture de la négociation collective relative aux fonctionnaires et de la constitution de la commission de négociation de la convention collective des employés de la Communauté autonome de Madrid. Il observe également que le gouvernement joint les propositions concrètes présentées (le 29 septembre 1994) par l'organisation plaignante sur la question de la répartition des fonds dans le cadre de la commission générale de négociation. De même, le gouvernement a transmis des documents prouvant que l'organisation plaignante a été à nouveau convoquée le 3 octobre 1994 à la commission générale de négociation. Le comité observe que l'organisation plaignante n'a fait de commentaires sur aucun de ces points, bien que le comité l'y ait invité.
286. Le comité conclut que, comme l'indique le gouvernement, l'organisation plaignante a été convoquée pour participer tant à la constitution des commissions de négociation qu'aux phases ultérieures du processus de négociation.
287. Enfin, le comité note que l'organisation plaignante a renoncé au recours qu'elle avait présenté devant les autorités compétentes espagnoles, et il observe que l'accord final a été conclu le 27 décembre 1994 et qu'il a également été signé par l'organisation plaignante.
288. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
Rapport où le comité demande à être
tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement de la France/Polynésie
française
présentée par
l'Union internationale des travailleurs
de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration,
du tabac et des branches connexes (UITA)
Allégations: mesures d'arrestation et de répression
à l'encontre de syndicalistes
289. Par une communication du 11 octobre 1995, l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement de la France/Polynésie française. L'UITA a soumis des informations complémentaires dans une communication du 24 octobre 1995.
290. Le gouvernement a fourni ses observations par une communication du 23 mai 1996.
291. La France a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Ces deux conventions ont été déclarées applicables sans modification à la Polynésie française.
A. Allégations de l'organisation plaignante
292. Dans sa plainte du 11 octobre 1995, l'UITA explique que son organisation affiliée à Tahiti, A Tia I Mua, a appelé à la grève générale le 6 septembre 1995. Au cours de cette journée, des débordements ont eu lieu sur le site de l'aéroport de Tahiti-Faaa ainsi que dans la ville de Papeete. L'affiliée de l'UITA nie toute responsabilité dans ces débordements.
293. Le samedi 9 septembre, poursuit l'organisation plaignante, un puissant détachement de gendarmes en tenue de combat et de gardes mobiles armés a envahi le siège de la Confédération A Tia I Mua, à Papeete, où les dirigeants du syndicat s'apprêtaient à tenir une conférence de presse sur les événements du 6 septembre. Le secrétaire général, Hirohiti Tefaarere et une quinzaine de membres de la confédération, dont huit membres du secrétariat exécutif, furent interpellés avec violence et arrêtés.
294. Selon des informations complémentaires, plusieurs dirigeants syndicaux présents au siège d'A Tia I Mua, dont Hirohiti Tefaarere, auraient reçu des coups de pied et de poing dans les locaux du syndicat. Un représentant du Syndicat de l'office des postes et télécommunications, Henri Temaititahio, aurait reçu un coup de matraque à la tempe gauche, à la suite duquel il aurait perdu connaissance. Par la suite, les détenus, dont Cyril Lagayic, secrétaire général de la Confédération des syndicats indépendants de Polynésie (CSIP), furent menottés et entassés, face au plancher, dans un camion militaire et emmenés vers une caserne de gendarmerie.
295. Selon l'UITA, les syndicalistes détenus furent forcés de se mettre à genoux dans l'enceinte de cette caserne, mains dans le dos, menottes aux poings et face contre terre, dans des conditions humiliantes. Henri Temaititahio fut apparemment relâché le soir même, mais s'écroula à sa sortie de la caserne de gendarmerie. Selon l'UITA, il aurait été transporté dans un état grave à l'hôpital territorial le 11 septembre, souffrant d'une paralysie progressive du côté gauche. Cinq détenus, dont Cyril Lagayic, furent relâchés après un interrogatoire de police. Les autres furent déférés devant un juge d'instruction. Selon le procureur, ils étaient passibles de vingt ans de réclusion criminelle. Trois syndicalistes auraient été relâchés sous caution et huit autres, dont Hirohiti Tefaarere, mis en examen et écroués à la maison d'arrêt de Nuutania.
296. Dans sa communication du 24 octobre 1995, l'UITA indique qu'à la date du 23 octobre six personnes étaient toujours incarcérées à la maison d'arrêt de Nuutania. Il s'agissait de Hirohiti Tefaarere, secrétaire général, Ronald Terorotua, Irving Paro, secrétaires généraux adjoints, Albert Tematahotoa, délégué du personnel de la CEGELEC (service hôtelier), Henri Temaititahio, délégué suppléant A Tia I Mua (poste), et Emile Teuahau, adhérent de la SMPP/SOGEBA (bâtiment). Selon l'UITA, ils auraient subi des mauvais traitements pour lesquels ils ont déposé plainte au tribunal de Papeete. Plus précisément, l'UITA indique qu'Henri Temaititahio a été hospitalisé du 11 au 20 septembre puis, de nouveau, du 2 au 16 octobre, date à laquelle il a été incarcéré. Le 11 septembre, il avait été admis aux urgences de l'hôpital Mamao après avoir vu son médecin privé pour une paralysie progressive du côté droit, due à de violents coups reçus sur la tête et la nuque. A la date du 23 octobre, il n'est plus paralysé, mais il porte une minerve et a toujours des pertes de mémoire. L'UITA ajoute que, le 12 septembre, trois fourgons de gardes mobiles se sont rendus au domicile d'Henri Temaititahio et ont investi sa maison avant l'heure légale en présence de sa femme et de ses quatre enfants.
B. Réponse du gouvernement
297. Dans sa communication du 23 mai 1996, le gouvernement explique que le syndicat A Tia I Mua a lancé un mot d'ordre de grève générale pour le 6 septembre 1995. Le mouvement de grève a pris la forme d'un envahissement de la piste de l'aéroport international de Tahita Faaa, suivi de violences à l'encontre des forces de l'ordre présentes, de dégradations sur les aéronefs en instance de départ et d'incendies volontaires allumés.
298. Suite à ces événements, une information judiciaire était ouverte. Le juge d'instruction chargé du dossier a lancé un mandat d'amener puis de dépôt pour les motifs suivants: entrave à la circulation aérienne; destruction d'immeubles et d'installations de circulation aérienne; dégradation d'un aéronef dans l'emprise d'un aérodrome; voies de fait, avec ou sans arme sur agents de la force publique ayant entraîné une incapacité temporaire de travail inférieure ou supérieure à huit jours; destruction d'objets mobiliers et immobiliers appartenant à autrui par effet d'une substance incendiaire ou d'un incendie commis en bande organisée; vols et vols à l'aide d'effraction; non-assistance à personne en péril; omission d'empêcher un délit contre l'intégrité corporelle des personnes; dégradation de bâtiments d'utilité publique par l'effet d'un incendie commis en bande organisée. Ces faits sont prévus et réprimés par les articles L.282-1 et L.282-4 du Code de l'aviation civile et par les articles 309, 434, 435, 379, 381, 382, 63 alinéas 1 et 2, 257 et 257-3 du Code pénal.
299. Le gouvernement observe donc que c'est sur décision judiciaire et pour des motifs de droit commun que certaines personnes appartenant au syndicat A Tia I Mua ont été inculpées et placées en détention provisoire à la maison d'arrêt de Nuutania.
300. S'agissant de l'accusation de violences commises par des forces de gendarmerie lors de l'arrestation des personnes concernées, le gouvernement déclare que le juge d'instruction chargé du dossier a ouvert une enquête dont les conclusions ne sont pas encore connues. D'après le gouvernement, il semble, à ce jour, qu'aucun élément ne vienne conforter cette accusation. Le gouvernement ajoute que, lors de leur garde à vue, les personnes interpellées ont fait l'objet d'un contrôle médical qui n'a rien révélé de particulier.
301. La Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Papeete a décidé le 12 décembre 1995 la remise en liberté des personnes concernées détenues provisoirement depuis le 10 septembre 1995, dont M. Hirohiti Tefaarere qui a été placé sous contrôle judiciaire avec assignation à résidence en Polynésie française et interdiction d'intervention publique liée aux causes de sa détention.
302. Le gouvernement conclut en déclarant que les droits d'expression et d'opinion ont toujours été respectés en Polynésie française. Le gouvernement continuera à veiller à ce que les libertés d'expression et d'opinion restent garanties aussi bien à l'occasion de la prochaine consultation électorale pour le renouvellement général de l'assemblée territoriale qu'en toute autre circonstance.
303. Le gouvernement joint en annexe à sa communication divers documents dont des coupures de presse faisant état des motivations essentiellement politiques de la grève générale (arrêt des essais nucléaires) et des actes de violence commis lors des événements du 6 septembre 1995 ainsi que des déclarations de la gendarmerie démentant catégoriquement les accusations de tortures et de sévices commis sur la personne de syndicalistes.
304. Le comité note que le présent cas concerne diverses mesures prises par les autorités à la suite de violents incidents survenus lors d'une journée de grève générale organisée par le syndicat A Tia I Mua. L'organisation plaignante fait état de l'assaut donné par les forces de gendarmerie au siège du syndicat, d'arrestations, de mises en examen et d'incarcérations de dirigeants syndicaux, ainsi que de sévices exercés lors de l'interpellation de syndicalistes.
305. Pour justifier ces mesures, le gouvernement a fait état de violences exercées lors du mouvement de grève tant sur les biens publics et privés, notamment à l'aéroport international de Tahiti que sur des agents de la force publique. Il a également fourni dans sa réponse des pièces tendant à établir que la grève générale avait essentiellement des motivations d'ordre politique, à savoir une protestation contre la reprise des essais nucléaires français.
306. Il appartient au comité, conformément à ses principes et à sa pratique, de déterminer en particulier si les mesures prises ou les actions commises par les autorités étaient motivées par des activités d'ordre syndical ou au contraire par des actes dépassant le cadre syndical et qui étaient soit préjudiciables à l'ordre public, soit de nature politique. [Voir à cet égard Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 115.]
307. En analysant la documentation à sa disposition, le comité a relevé que, dans son appel à la grève générale, l'organisation A Tia I Mua avait mis en avant la question des essais nucléaires. Toutefois, d'autres revendications étaient également présentées, notamment la revalorisation du salaire minimum et la réduction du déficit du régime d'assurance maladie. Il apparaît ainsi que cette grève générale répondait à la fois à des motivations qui ressortissaient plus du domaine strictement politique que syndical et à d'autres objectifs qui entraient en revanche dans le cadre normal des activités d'une organisation de travailleurs.
308. Quoi qu'il en soit, la manifestation qui s'est tenue à l'aéroport international et les violences qui en ont résulté ont amené les autorités à prendre diverses mesures. Ainsi, les gendarmes ont pénétré à l'intérieur des locaux du syndicat A Tia I Mua et ont procédé à l'interpellation de dirigeants syndicaux qui y étaient réunis. A cet égard, le comité rappelle que l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corollaire indispensable que les autorités publiques ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans l'autorisation préalable des occupants ou sans être en possession d'un mandat judiciaire les y autorisant. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 175.]
309. Dans le cas présent, le comité a relevé que, dans le dossier fourni par le gouvernement, il est fait référence à un communiqué du colonel commandant le groupement de gendarmerie de Polynésie française indiquant que les interpellations effectuées le 9 septembre sur la personne de syndicalistes l'ont été dans le cadre de l'enquête sur commission rogatoire ouverte après les émeutes des 6 et 7 septembre. En outre, les arrestations ont été exécutées selon les prescriptions de sécurité fixées par les textes réglementaires sous la conduite des officiers de police judiciaire et le contrôle des magistrats. Le gouvernement fait également état dans sa réponse de l'émission d'un mandat d'amener par le juge d'instruction chargé du dossier. Il apparaît donc que l'intervention des forces de gendarmerie dans les locaux du syndicat a été effectuée sur ordre judiciaire dans le cadre de l'enquête sur les événements survenus lors de la grève générale.
310. L'organisation plaignante s'est référée à des sévices et mauvais traitements exercés par les forces de l'ordre lors de l'interpellation des syndicalistes. Le comité note que, pour sa part, la gendarmerie par la voix de son commandant a démenti catégoriquement les accusations ainsi formulées et a déclaré que les personnes interpellées ont, lors de leur garde à vue, fait l'objet d'un contrôle médical qui n'a rien révélé de particulier.
311. Le comité exprime sa préoccupation face aux graves allégations de mauvais traitements de syndicalistes et rappelle que, dans les cas allégués de mauvais traitements ou lorsque se sont produites des atteintes à l'intégrité physique ou morale, il a considéré qu'une enquête judiciaire devrait être effectuée sans retard, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 53.] Dans le cas présent, le comité note que le juge d'instruction chargé du dossier a ouvert une enquête dont les conclusions ne sont pas encore connues. Compte tenu de l'importance d'un climat exempt de violences, de pressions ou menaces de toutes sortes pour le libre exercice des droits syndicaux ainsi que des informations contradictoires contenues dans les déclarations du plaignant et du gouvernement sur la véracité de ces allégations, le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de l'enquête engagée.
312. Enfin, l'organisation plaignante a allégué que les autorités ont procédé à l'arrestation, la mise en examen et l'incarcération de plusieurs dirigeants syndicaux. Ces mesures ont été confirmées par le gouvernement. Le comité note que le gouvernement a dressé une liste des motifs à l'origine des arrestations et des poursuites. Tous ces motifs se rattachent à des actes de violence commis lors de la manifestation. Le comité relève à cet égard que l'organisation plaignante elle-même ne nie pas ces violences puisqu'elle fait référence à des débordements dont, selon elle, le syndicat ne serait pas responsable.
313. Dans ces conditions, le comité estime que les autorités étaient fondées à ouvrir une enquête judiciaire sur les événements liés à la grève générale et qu'il était légitime que, dans le cadre de cette enquête, les dirigeants du syndicat organisateur de la grève soient interpellés pour interrogatoire. Le comité constate par ailleurs que certains de ces dirigeants ont été déférés devant un juge d'instruction et mis en détention. Par la suite, ils ont été remis en liberté sur décision judiciaire, le secrétaire général du syndicat étant toutefois placé sous contrôle judiciaire avec assignation à résidence en Polynésie française. Il apparaît donc au comité que les dirigeants syndicaux concernés ont bénéficié après leur garde à vue des garanties d'une procédure judiciaire régulière dans le cadre d'une enquête justifiée par des actes dépassant le cadre normal et légitime des activités syndicales.
314. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de l'enquête judiciaire engagée sur les allégations relatives aux sévices dont auraient été victimes des syndicalistes lors de leur interpellation.
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Guatemala
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: enlèvement de syndicalistes et menaces à leur encontre
315. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datée du 3 avril 1996. Par la suite, l'organisation plaignante a envoyé des informations complémentaires dans une communication datée du 29 mai 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée des 9 mai et 13 septembre 1996.
316. Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
317. Dans ses communications des 13 avril et 29 mai 1996, la Confédération internationale des syndicats libres allègue que les violations des droits de l'homme suivantes ont été commises à l'encontre de syndicalistes ou de membres de leurs familles:
B. Réponse du gouvernement
318. Dans ses communications des 9 mai et 13 septembre 1996, le gouvernement déclare que Mme Débora Guzmán Chupén a déposé plainte le 19 février 1996 au sujet de nouvelles menaces, ladite plainte ayant été reçue par le juge de paix et transmise au ministère public. Des fonctionnaires de la Commission présidentielle de coordination de la politique de l'exécutif en matière des droits de l'homme (COPREDEH) se sont rendus au poste de la police nationale d'Amatitlán pour vérifier si les mesures de sécurité avaient été prises en faveur de la victime. Le responsable du bureau de l'ordre public a expliqué qu'ils avaient continué à faire des rondes dans le secteur autour de la maison de Mme Guzmán. Ils s'étaient également rendus dans la fabrique L y L Modas de la ville de Amatitlán afin de discuter avec la victime; cette dernière, ont-ils appris sur place, bénéficie d'un permis de travail qui lui a été accordé à partir du 20 février 1996 et qui arrive à échéance le 20 du même mois de la même année. Les fonctionnaires de la COPREDEH se sont rendus au domicile de Mme Guzmán Chupén, mais on leur a signalé que pour des raisons de sécurité cette personne ne se trouvait par dans la ville de Amatitlán, et qu'on ne savait où elle était. La COPREDEH a envoyé le 20 mars 1996 des communications au directeur général de la police nationale et au Procureur général de la République, afin qu'ils donnent des instructions à leurs organismes spécifiques respectifs pour accélérer l'enquête et déterminer la provenance des menaces; par ailleurs, une réunion est prévue avec la partie lésée et les institutions de l'Etat pertinentes en vue d'établir des stratégies de sécurité pour Mme Guzmán Chupén et les autres personnes qui ont été menacées. Le gouvernement signale que, depuis mars 1995, les autorités ont offert des mesures de sécurité à Mme Guzmán Chupén.
319. Quant à l'enlèvement de Edwin Rolando Yoc Acajabón, fils de M. Rolando Yoc, membre de l'Assemblée syndicale des travailleurs de la santé, le gouvernement déclare que des fonctionnaires de la COPREDEH ont rencontré des dirigeants syndicaux de la Grande alliance syndicale (GAS), qui ont signalé qu'ils étaient au courant du fait dénoncé officiellement à Sacatepéquez; ils ont indiqué que, le 21 février 1996, à 22 heures, alors qu'ils revenaient d'une réunion familiale et se dirigeaient vers leur résidence, son fils aîné qui les suivait a été enlevé par deux hommes inconnus à une distance de dix mètres de la résidence, se trouvant au 1-42 de la douzième rue, colonia los Llanos, à Jocotenango; ces personnes l'ont fait monter dans un véhicule de marque Sentra, de couleur noire, l'ont contraint à rester couché sur le sol du véhicule et l'ont apparemment emmené vers les installations de l'entreprise Cindal en tenant un pistolet braqué sur son front; ils lui ont demandé de dire à son père, M. Rolando Yoc, de cesser de se mêler de certaines choses sinon il le regretterait. Après l'avoir retenu pendant trois heures, ils l'ont libéré; son fils n'a pas pu reconnaître les personnes qui l'ont enlevé car il est resté dans le véhicule. Il n'a pas porté plainte auprès des autorités chargées d'enquêter sur ces faits en raison de l'état de désarroi de son fils et a, par conséquent, préféré porter les faits à la connaissance de la Grande alliance syndicale (GAS). Les fonctionnaires du service du Procureur des droits de l'homme ont invité la GAS à dénoncer les faits auprès des autorités compétentes, ce qui permettrait de faire progresser cette affaire. M. Yoc a également déclaré qu'il avait reçu périodiquement des menaces de mort par téléphone et qu'on lui avait demandé de cesser de dénoncer des faits survenus dans les services de la santé publique; il a toutefois précisé que, depuis la date de l'enlèvement de son fils jusqu'à ce jour, ni lui ni sa famille n'avaient été l'objet de persécutions. Au sujet de l'enlèvement de son fils, il examinerait avec sa famille la possibilité de porter plainte formellement auprès des autorités pertinentes en tenant compte de la santé psychique de son fils. M. Yoc a aussi signalé que l'incident pourrait être dû au fait que le 19 février 1996 il avait eu une réunion avec le ministre de la Santé publique, au cours de laquelle il avait informé le ministre que les travailleurs s'opposaient à la politique de santé mise en uvre; cette réunion avait été tendue et avait duré quatre heures, mais que cela ne voulait pas dire qu'il accusait quiconque en particulier, bien qu'il se pourrait que des tiers intéressés cherchent à nuire et à créer un climat d'instabilité dans le pays.
320. En ce qui concerne l'enlèvement durant trois heures et 45 minutes et les tortures physiques et psychologiques dont a été victime Mme Vilma Cristina González, le 28 février 1996, le gouvernement indique que, durant son enlèvement, à laquelle ont participé quatre individus, elle a été interrogée sur les activités de son frère Reynaldo Federico González et sur ses liens avec l'Union révolutionnaire nationale du Guatemala, et qu'on lui a fait comprendre que son frère Reynaldo Federico González devait renoncer à ses activités en tant que dirigeant de la Fédération syndicale des employés de banque et d'assurances; en outre, toute sa famille devait quitter le pays sinon elle serait supprimée physiquement. Le gouvernement ajoute que le ministère de l'Intérieur a pris les mesures nécessaires pour protéger la vie et l'intégrité physique des personnes visées. Les mesures de sécurité personnelle offertes par les autorités pertinentes ont été refusées par la victime, qui souhaitait que sa sécurité ne soit assurée qu'autour de sa résidence. Dans le cas de l'enlèvement de Vilma Cristina González, c'est le Juge de paix et le Procureur du ministère public qui ont eu connaissance de l'affaire. Le ministère public a convoqué la victime pour qu'elle vienne faire une déposition au sujet des faits qu'elle a dénoncés. Finalement, M. Reynaldo Federico González et sa sur, Vilma Cristina González, ont quitté le pays pour des raisons de sécurité. M. Reynaldo Federico González est revenu au pays pour s'entretenir avec les autorités pertinentes et s'informer des progrès de l'enquête. Le Procureur général de la République et chef du ministère public a indiqué qu'il avait eu un entretien avec M. González le 25 juin 1996. Ce cas continue à faire l'objet d'une enquête du ministère public.
321. Pour ce qui est des persécutions dont le dirigeant syndical, M. Víctor Hugo Durán, affirme avoir été victime, le gouvernement déclare que la Grande alliance syndicale (GAS) a dénoncé aux médias les persécutions dont M. Víctor Hugo Durán était victime parce qu'il s'était plaint de l'espionnage téléphonique qui existait dans l'entreprise guatémaltèque de télécommunications (GUATEL). Des fonctionnaires de la COPREDEH ont eu des discussions avec le secrétaire chargé des conflits de la Fédération des syndicats des fonctionnaires publics au sujet des menaces dont M. Víctor Hugo Durán a été l'objet. Le secrétaire chargé des conflits a relevé que M. Durán a effectivement reçu des menaces de mort par téléphone parce qu'il avait dénoncé des actes de corruption au sein de l'entreprise de télécommunications GUATEL; pour des raisons de sécurité personnelle et familiale, il n'a toutefois pas porté plainte auprès des autorités compétentes. La COPREDEH a demandé au ministère public et à la direction générale de la police nationale des informations sur ce cas.
322. Le comité constate que les allégations dans le présent cas se réfèrent à l'enlèvement, à l'intimidation ou aux menaces de mort dont ont été victimes un nombre important de dirigeants syndicaux ou de membres de leurs familles. En premier lieu, le comité ne peut que déplorer profondément ces enlèvements et menaces de mort et rappeler que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne et que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition (révisée), 1996, paragr. 46 et 47.]
323. Le comité prend note des enquêtes judiciaires entreprises et des mesures de sécurité offertes par les autorités à Mme Débora Guzmán et à Mme Vilma Cristina González à la suite des nouvelles menaces de mort dont elles ont été l'objet et de l'enlèvement pendant quatre heures de Mme Débora Guzmán Chupén, et constate que Mme Vilma Cristina González a quitté le pays pour des raisons de sécurité. Le comité prend également note du fait que le dirigeant syndical Víctor Hugo Durán n'a pas, pour des raisons de sécurité, porté plainte auprès des autorités au sujet des menaces de mort reçues et que, pour ce même motif, le dirigeant syndical Rolando Yoc ne l'a pas fait non plus pour l'enlèvement de son fils Edwin Rolando Yoc pendant trois heures, bien que les autorités l'aient invité à porter plainte.
324. Le comité souhaite souligner que, lorsque se sont produites des atteintes à l'intégrité physique ou morale, le comité a considéré qu'une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans retard, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions; de même, constatant que, dans les cas d'enlèvement ou de menaces de mort auxquelles se réfère le gouvernement, une plainte n'a pas été déposée, ou que, si elle a été déposée, les coupables n'ont pas pu être trouvés, le comité souligne que l'absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 53 et 55.] Le comité demande, par conséquent, aux autorités d'entreprendre des enquêtes sur les menaces de mort proférées contre le dirigeant syndical Víctor Hugo Durán et sur l'enlèvement de Edwin Yoc, et qu'elles fournissent des informations sur l'évolution des enquêtes sur les menaces de mort proférées contre Mme Débora Guzmán Chupén et Mme Vilma Cristina González et sur l'enlèvement de cette dernière pendant quatre heures.
325. Enfin, bien qu'encouragé par une meilleure coopération de la part du gouvernement, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas envoyé des observations sur les autres allégations et le prie instamment de le faire sans retard, plus particulièrement au sujet:
326. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement de l'Indonésie
présentée par
-- la Confédération internationale des syndicats libres
(CISL)
-- la Confédération mondiale du travail (CMT) et
-- le Serikat Buruh Sejahtersa (SBSI)
Allégations: déni de reconnaissance d'un
syndicat,
ingérence des pouvoirs publics dans les activités syndicales,
harcèlement et détention de syndicalistes
327. Le comité a examiné ce cas à ses réunions de mars 1995 et de mars 1996 [voir 297e rapport, paragr. 484-537, 302e rapport, paragr. 447-479, adoptés par le Conseil d'administration à ses 262e et 265e sessions (mars-avril 1995 et mars 1996)], où il a présenté des conclusions intérimaires.
328. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a fourni un complément d'informations par communications datées des 6 et 8 août 1996. La Confédération mondiale du travail (CMT) a fait de même par communications datées des 5 et 22 août 1996.
329. Le Serikat Buruh Sejahtersa (SBSI) a soumis une nouvelle plainte par communication datée du 11 juin 1996. l'Union internationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (UITBB) a exprimé son soutien en faveur de cette plainte par communication datée du 14 août 1996.
330. Le gouvernement a communiqué ses observations par communications datées des 30 août et 5 septembre 1996.
331. L'Indonésie a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; en revanche elle n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
A. Examen antérieur du cas
332. Lors de ses précédents examens du cas, le comité avait examiné de très graves allégations de violations des droits syndicaux en Indonésie, qui concernaient le déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, l'ingérence persistante des pouvoirs publics, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales et les restrictions dont la négociation collective et l'exercice du droit de grève font l'objet. La plainte portait également sur de graves allégations relatives au harcèlement et à l'arrestation de dirigeants syndicaux et à la disparition et l'assassinat de travailleurs et de syndicalistes.
333. Lors de ses précédents examens, le comité avait profondément déploré et souligné la gravité des allégations qui l'avaient conduit à penser que la situation générale des travailleurs en Indonésie n'avait pas évolué et se caractérisait toujours par des violations de plus en plus graves, dans la loi comme dans la pratique, des droits fondamentaux de l'homme, des droits syndicaux et des principes de la liberté syndicale. Il avait donc insisté sur le fait qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans le respect des droits fondamentaux de l'homme et que le système démocratique est fondamental pour le libre exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 34 et 35.]
334. A sa session de mars 1996, au vu des conclusions intérimaires du Comité de la liberté syndicale, le Conseil d'administration avait approuvé les recommandations suivantes:
B. Nouvelles allégations des plaignants
335. Par communication datée du 11 juin 1996, le SBSI signale plusieurs actes de discrimination antisyndicale et d'ingérence par les pouvoirs publics à l'encontre de lui-même et de ses membres, notamment des actes de violence physique.
336. Plus spécifiquement, au cours du mois de mai 1996, M. Aryanto, membre de la branche de Medan du SBSI et un travailleur employé par PT Sarimorawa Tanjung Morawa Deli Serdang auraient été battus dans les bureaux de l'entreprise par un officier des troupes de Tanjung Morawa. Le SBSI ajoute que, le 1er juin 1996, des officiers du gouvernement de district et de la sécurité ont vandalisé l'enseigne des branches de Medan et de Binjai de ce même syndicat. Le même jour, sept membres de la branche de Lampung du SBSI employés par PT Tris Delata Agrindo ont été contraints de renoncer à leur appartenance au SBSI. Ce même syndicat déclare que, le lendemain, M. Arsipto Parangin-Angin, employé par la société de transports Mayasari Bakti et nouveau membre du SBSI, a été arrêté et placé en détention par la police locale de Ciracas. Le 2 juin 1996, M. Rozali, employé par Mayasari Bakti et membre du SBSI, aurait été battu par un officier de marine de Cilandak. Enfin, le SBSI ajoute que M. Farid Mu'adz, président de la branche de Jakarta ouest du SBSI, a été arrêté. Son arrestation serait due au fait qu'il avait préparé une lettre circulaire décrivant le droit des travailleurs de recourir à la grève.
337. Dans leurs communications, la CISL et la CMT fournissent des informations sur l'arrestation, le 30 juillet 1996, du secrétaire général du SBSI, M. Muchtar Pakpahan. Il ressort des communications des plaignants que, tard dans la soirée (23 heures) du 30 juillet 1996, M. Pakpahan a été arrêté à son domicile puis déféré devant le substitut du Procureur pour être interrogé sur six chefs d'accusation, dont celui d'avoir fomenté les manifestations hostiles au régime du 27 juillet 1996. Les plaignants se déclarent gravement préoccupés par la situation psychologique et l'état de santé physique de M. Pakpahan, que les pouvoirs publics placent en détention, intimident et harcèlent depuis des années, en violation des conventions internationales se rapportant aux droits de l'homme et aux libertés syndicales concernées par l'OIT.
338. Par la suite, le 2 août 1996, M. Pakpahan a été accusé par les autorités indonésiennes de subversion en rapport avec les émeutes de juillet. Les plaignants précisent que la loi antisubversion met hors-la-loi quiconque diffuse des sentiments d'hostilité ou fait naître des dissensions, des conflits, des désordres, des perturbations ou des inquiétudes ou désorganise l'industrie, la production, la distribution ou les transports, de tels actes étant punissables d'une peine pouvant aller jusqu'à la peine capitale. Les suspects peuvent être placés indéfiniment en détention, sans être traduits en justice.
339. Outre le sort de M. Pakpahan, les plaignants déclarent que neuf dirigeants et membres de la branche de Riau du SBSI (nord-ouest de Sumatra) ont été placés en détention au début d'août 1996 pour interrogatoire. Ils sont accusés d'assemblée illégale sans autorisation de la police. En fait, 30 militants du SBSI ont été placés en détention dans différentes parties de l'Indonésie. Des dirigeants du SBSI ont été interrogés par la police et les militaires puis relâchés dans les localités suivantes: Serang, Pedang, Malang, Mojokerto et Ujung Padang. La CMT ajoute que certains militants ont été placés en détention tandis que d'autres sont recherchés par la police: Rekson Silaban, directeur de recherche, Santosa, coordinateur régional, Mehbob, membre du personnel de l'Institut d'aide juridique. Toutes ces personnes ont été accusées d'avoir fomenté les récentes émeutes.
340. La CISL ajoute qu'avant les arrestations le SBSI avait appelé le gouvernement indonésien à ne pas prendre prétexte des manifestations politiques pour arrêter des personnalités publiques critiques à l'égard du régime en place. Le SBSI invita instamment les autorités à évaluer de manière objective les raisons pour lesquelles les émeutes s'étaient produites. De son côté, il concluait que ces événements résultaient d'une explosion populaire devant le fait que le droit et la justice avaient été sacrifiés et remplacés par la répression. Les dirigeants du SBSI préconisaient un dialogue constructif plutôt qu'une démonstration de force de la part des militaires.
341. En dernier lieu, les plaignants insistent sur le fait que l'arrestation de M. Pakpahan et d'autres membres du SBSI constitue une violation des principes les plus fondamentaux de la liberté syndicale, et que le gouvernement indonésien cherche constamment à anéantir le SBSI en tant qu'instrument légal de défense des droits juridiques, sociaux et économiques des travailleurs.
C. Nouvelle réponse du gouvernement
Application, dans la pratique, du règlement ministériel
no 1 de 1994 et enregistrement du SBSI
(302e rapport, paragraphe 479 a), b) et c))
342. Le gouvernement déclare en la matière que la législation et la réglementation du travail garantissent la liberté d'association. Les travailleurs indonésiens ont la possibilité de constituer des organisations de leur choix sans qu'il soit nécessaire de s'affilier à un syndicat particulier. Le gouvernement estime qu'il existe aujourd'hui plus d'un millier de syndicats indépendants au niveau des entreprises. Un syndicat nouvellement constitué est seulement tenu de communiquer au ministère de la Main-d'uvre des renseignements concernant son organisation, ses statuts et les membres de sa direction. Il peut dès lors exercer ses activités et négocier avec des employeurs, entre autres, l'élaboration de conventions collectives.
343. Le gouvernement considère que, même si une relation étroite a pu être établie entre lui-même, d'une part, et les organisations de travailleurs et d'employeurs, d'autre part, à travers leurs programmes et activités propres, il faut du temps pour que les employeurs et les travailleurs deviennent conscients de leurs obligations respectives dans le cadre de la mise en uvre d'un nouveau système de relations du travail.
Situation dans l'entreprise Southern Cross Textile Company
(302e rapport, paragraphe 479 f))
344. Le gouvernement réitère qu'en 1993 l'entreprise PT Southern Textile Company (SCTI), sise à Jakarta, employait 1 500 travailleurs et que, depuis 1974, la SPSI s'est établie dans cette entreprise. Au début d'avril 1993, des négociations ont eu lieu entre la SPSI et l'employeur en vue d'une augmentation annuelle de salaire pour le 30 mai 1993. A cette période, la troisième convention collective de travail entrait dans sa deuxième année. Tandis que les négociations étaient en cours, le 19 avril 1993, entre 14 et 18 heures, un groupe de travailleurs a forcé les autres travailleurs à faire grève pour une augmentation de salaire. Le gouvernement réitère que, afin d'éviter toute inconduite et tout acte de destruction, l'employeur et la SPSI se sont entendus pour poursuivre les négociations hors des locaux de l'entreprise. Le gouvernement déclare qu'au début de la soirée du 22 avril 1993 et jusqu'au lendemain vers 11 h 30 un groupe de travailleurs a tenu les portes de l'établissement fermées, empêchant les autres de se rendre à leur travail. Devant cette situation, la direction de l'entreprise a licencié 16 travailleurs.
Evénements de Medan d'avril 1994; arrestations,
procès et incarcération de travailleurs
(302e rapport, paragraphe 479 g))
345. En ce qui concerne les événements survenus à Medan en avril 1994, le gouvernement considère que ces émeutes avaient été ourdies longtemps à l'avance. Les personnes à l'origine de ces actes illégaux ont été poursuivies et condamnées, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur, par des tribunaux indépendants et impartiaux.
346. En outre, à l'exception des cas de M. Mahammad Ali et M. Mulyadi, le gouvernement fournit des informations en ce qui concerne tous les travailleurs et les dirigeants syndicaux qui auraient été arrêtés, placés en détention ou condamnés en liaison avec ces événements, leurs noms et le lieu de leur détention étant indiqués à l'annexe B du deuxième rapport intérimaire du comité. Toutes ces personnes ont été poursuivies pour avoir incité des travailleurs à la rébellion et ont été condamnées à des peines de trois à six mois d'emprisonnement. Elles ont toutes purgé leur peine [voir annexe 1].
Information concernant M. Ariesha
(302e rapport, paragraphe 479 d))
347. Le gouvernement indique que M. Ariesha est accusé d'avoir incité des travailleurs à organiser des manifestations ayant dégénéré en émeutes. Le tribunal d'Etat de Medan l'a condamné à un an de prison et la Haute Cour d'Etat de Medan a alourdi cette condamnation de deux ans. M. Ariesha a fait appel devant la Cour suprême.
Information concernant M. Mulyono
(302e rapport, paragraphe 479 e))
348. Le gouvernement rappelle que M. Mulyono a été licencié le 6 mai 1994 aux motifs qu'il ne pouvait s'entendre avec son supérieur et qu'il causait souvent des perturbations du fait de son influence sur les autres travailleurs. Le gouvernement ajoute qu'un conciliateur du ministère de la Main-d'uvre a tenté de résoudre cette affaire de manière pacifique en invitant les parties à dialoguer. Les propositions du conciliateur n'ayant pas été acceptées par l'entreprise, il a été suggéré de faire recours contre ce licenciement devant la Commission régionale de règlement des conflits. Le 28 septembre, cette commission a décidé d'autoriser l'entreprise à licencier M. Mulyono avec effet à compter du 19 septembre 1994. Sur la base de l'accord conclu entre les parties, M. Mulyono a accepté la somme de 400 000 roupies à titre de dédommagement, somme qui devait être versée par l'entreprise au plus tard le 26 septembre 1994.
Information concernant M. Muchtar Pakpahan
et informations complémentaires des plaignants
(302e rapport, paragraphe 479 h))
349. Le gouvernement rappelle que M. Pakpahan a été traduit devant les tribunaux en raison de son implication dans les émeutes d'avril 1994. Le tribunal d'Etat de Medan l'a condamné à trois ans d'emprisonnement et, en appel, la Haute Cour de Medan a rajouté un an. M. Pakpahan a fait appel de cette sentence devant la Cour suprême qui, le 29 septembre 1995, l'a libéré sans condition. Par communication du 30 août 1996, le gouvernement insiste sur le fait que les nouvelles accusations dont M. Pakpahan fait l'objet ne sont aucunement liées à ses activités syndicales et qu'il s'est rendu coupable d'actes délictueux punis par la loi no 11/PNPS/1963 sur les activités subversives, article 1(3).
Enquête de police sur Mme Marsinah
(302e rapport, paragraphe 479 i))
350. En ce qui concerne la mort de Mme Marsinah, le gouvernement indique que cet homicide n'est toujours pas élucidé mais que les recherches se poursuivent et qu'il a lui-même chargé une équipe d'enquêter à nouveau sur cette affaire afin de tenter d'identifier le coupable.
Information concernant l'arrestation
de MM. Arsipto Parangun-Angin, Rozali,
Farid Mu'adz, Aryanto et le PT Tris Delata Agrindo
(informations complémentaires des plaignants)
351. En ce qui concerne M. Arsipto Parangun-Angin, le gouvernement précise que la société pour laquelle il travaille, PT Mayasari Bakti, emploie 4 000 travailleurs. Des syndicats sont établis au niveau de l'entreprise et ont conclu des conventions collectives de travail. Il ressort que M. Arsipto Parangun-Angin a effectivement été arrêté le 2 juin 1996 par la police de Ciracas pour avoir indûment conservé une somme de 160 000 roupies. En raison du caractère délictueux de cet acte, il a été dénoncé à la police. A la demande de la famille de M. Arsipto Parangun Angin, l'affaire a été résolue à l'amiable. L'intéressé a été remis en liberté.
352. En ce qui concerne M. Rozali, le gouvernement indique que, selon les informations qui ont été réunies, M. Rozali a eu le 4 juin 1996 une dispute d'ordre personnel avec un membre de la sécurité de la société. Il est encore employé par cette société.
353. En ce qui concerne M. Farid Mu'adz, le gouvernement indique que celui-ci a été interrogé le 6 juin 1996 par l'armée (Commando/Kodim du district militaire) pour avoir diffusé auprès des travailleurs un tract provocateur sur le droit de grève.
354. En ce qui concerne les coups dont M. Aryanto aurait été victime, le gouvernement précise que la société pour laquelle celui-ci travaille emploie 330 travailleurs et produit du papier pour les besoins des activités religieuses. M. Aryanto et ses collègues ont été impliqués le 24 mai 1996 dans un conflit avec des membres de la communauté locale, qui a dégénéré en bataille généralisée. Un habitant a été poignardé par un ami de M. Aryanto. Ce dernier a alors été attaqué et la police locale a dû intervenir.
355. Enfin, en ce qui concerne la société PT Tris Delata Agrindo, qui emploie 839 travailleurs, le gouvernement allègue que la SPSI a été établie comme syndicat dans cette entreprise le 29 août 1994, et que le 16 janvier 1996 une convention collective du travail a été conclue. Le 16 mai 1996, des travailleurs de l'entreprise ont annoncé la création d'un syndicat affilié au SBSI. Après une réunion qui s'est tenue le 17 mai 1996 entre les représentants de l'employeur, le SBSI, la SPSI et un certain nombre de travailleurs de l'entreprise, il a été convenu qu'il n'y aurait qu'un seul syndicat au niveau de l'entreprise. Le 18 mai, les personnes qui avaient contribué à la création du SBSI ont accepté volontairement de démissionner de leur affiliation à ce syndicat. Aucune contrainte n'a été exercée par les autorités ou par l'employeur. Ces travailleurs sont toujours employés par l'entreprise.
356. Le comité rappelle que ce cas traite de très graves allégations de violation des droits syndicaux en Indonésie concernant le déni du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix, l'ingérence persistante des pouvoirs publics, des militaires et des employeurs dans les activités syndicales et les restrictions permanentes à la négociation collective et à l'exercice du droit de grève. En outre, le comité rappelle sa profonde préoccupation devant l'extrême gravité des allégations relatives au meurtre, à la disparition, à l'arrestation et à la détention d'un certain nombre de dirigeants syndicaux et de travailleurs.
357. Le comité rappelle que, outre ses deux précédents examens de ce cas, il a déjà examiné au cours des deux dernières années deux autres plaintes contre l'Indonésie portant sur des allégations de même nature et aussi graves. [Voir 265e rapport, cas no 1431, paragr. 104-137; 295e rapport, cas no 1756, paragr. 398-429.] Le comité se réfère également à la mission de contacts directs ayant eu lieu en Indonésie en novembre 1993, aux longs débats ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence sur l'application des normes en 1994 et en 1995 et aux nombreux commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations à ce sujet.
358. Dans ces conditions, le comité ne peut que déplorer profondément que pratiquement aucune mesure corrective ne semble avoir été prise par les autorités indonésiennes. Au contraire, la gravité des nouvelles allégations conduit à penser que la situation générale des travailleurs de l'Indonésie n'a pas évolué et se caractérise toujours par des atteintes de plus en plus graves aux droits fondamentaux de l'homme et aux droits syndicaux et par des violations des principes de la liberté d'association dans le droit comme dans la pratique revêtant notamment la forme d'arrestations, d'emprisonnements et de harcèlement de travailleurs et de dirigeants syndicaux.
359. Le comité constate avec une profonde préoccupation que le gouvernement n'a pas fourni d'informations en ce qui concerne les graves allégations d'actes antisyndicaux dirigées contre, notamment, le Serikat Buruh Sejahtersa (SBSI), son secrétaire général, M. Muchtar Pakpahan, et d'autres militants de cette organisation.
360. S'agissant du premier sujet de préoccupation soulevé par le comité lors de ses précédents examens intérimaires du cas, qui concerne les obstacles législatifs empêchant les travailleurs de constituer les organisations de leur choix [voir 302e rapport, paragr. 479 a), c)], le comité a le regret de constater que le gouvernement se borne à mentionner le nombre des syndicats indépendants constitués au niveau de l'entreprise et ne donne aucune autre information à ce sujet.
361. Le comité se voit donc dans l'obligation de rappeler son avis selon lequel le système indonésien d'enregistrement des syndicats au plan national comporte des conditions si rigoureuses qu'elles constituent une restriction majeure à la liberté syndicale, étant donné que très peu de syndicats peuvent voir leur création légalement reconnue (par exemple le règlement prévoit qu'un syndicat peut être enregistré s'il compte au moins 100 unités (centres de travail) au niveau de l'entreprise, 25 organisations au niveau du district et cinq organisations au niveau provincial ou, au choix, au moins 10 000 membres dans toute l'Indonésie). Le comité rappelle que ces obstacles juridiques dénient aux travailleurs le droit de créer les organisations de leur choix et constituent donc une violation flagrante de l'un des principes les plus élémentaires de la liberté syndicale.
362. En outre, le comité souhaite rappeler que la prescription légale selon laquelle un syndicat indonésien doit obtenir la recommandation de la Serikat Pekerja Seluruh Indonesia (SPSI) pour être légalement reconnu constitue un obstacle à la libre constitution d'organisations et est donc contraire à la liberté syndicale. Le comité demande à nouveau instamment au gouvernement d'éliminer de tels obstacles (tels que l'article 2 c) du règlement ministériel no Per-03/ MEN/1993) afin de faire en sorte que le droit des travailleurs de s'organiser soit entièrement reconnu en droit comme en pratique, et de le tenir informé à cet égard.
363. En ce qui concerne le cas précis du SBSI, le comité déplore que le gouvernement n'ait pas précisé les mesures prises pour que ce syndicat puisse être légalement enregistré et n'ait pas précisé non plus le nombre d'organisations de base affiliées au SBSI. A sa connaissance, le SBSI remplit toujours toutes les conditions requises pour l'enregistrement sauf la recommandation de la SPSI. Le comité insiste donc une fois de plus sur le fait que toute position gouvernementale favorisant une organisation donnée, à travers la législation ou la pratique, constitue un acte de discrimination antisyndicale et est donc contraire aux principes de la liberté syndicale. Le comité demande donc une fois de plus instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que le SBSI soit dûment enregistré sans délai, et de le tenir informé à cet égard.
364. En ce qui concerne l'emprisonnement de M. Ariesha [voir 302e rapport, paragr. 479 d)], l'enquête concernant M. Mulyono [voir 302e rapport, paragr. 479 e)] ainsi que l'allégation d'actes de discrimination antisyndicale contre les travailleurs de l'entreprise Southern Cross Textile Company affiliés au SBSI [voir 302e rapport, paragr. 479 f)], le comité déplore que le gouvernement ne fait que reprendre l'information déjà fournie à cet égard. Il rappelle que M. Ariesha a été emprisonné à la suite des événements de Medan d'avril 1994 et que M. Mulyono a été licencié sur de vagues motifs, lui aussi, voici plus de deux ans. Le comité prie donc instamment le gouvernement: a) de prendre rapidement les mesures nécessaires pour que M. Ariesha soit immédiatement remis en liberté s'il ressort qu'il a été placé en détention au motif d'activités liées à l'exercice légitime des droits syndicaux; et b) d'ouvrir une enquête indépendante pour établir clairement les raisons pour lesquelles M. Mulyono a été licencié et, s'il apparaît qu'il a été licencié pour des activités syndicales légitimes, de prendre rapidement toutes les mesures nécessaires pour lui offrir la possibilité d'être réintégré dans son poste. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Enfin, en ce qui concerne la Southern Cross Textile Company, le comité rappelle que la diffusion de la circulaire par laquelle cette société indiquait que des mesures seraient prises contre tout travailleur membre du SBSI ou uvrant ouvertement ou non pour le SBSI remonte à quatre ans (23 novembre 1992). Le comité se voit donc à nouveau dans l'obligation de rappeler que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par l'Indonésie, prévoit que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre le congédiement ou tout autre acte préjudiciable en raison de son affiliation syndicale. Le comité prie donc le gouvernement de fournir sans retard des informations sur l'allégation d'actes de discrimination antisyndicale dirigés contre les travailleurs de la Southern Cross Textile Company affiliés au SBSI, et de le tenir informé à cet égard.
365. Le comité prend note des informations fournies par le gouvernement en ce qui concerne les travailleurs et dirigeants syndicaux qui auraient été arrêtés, placés en détention ou condamnés en relation avec les événements de Medan d'avril 1994. Le comité note que, sauf en ce qui concerne MM. Mahammad Ali, 19 ans (PT Peridoni), et Mulyadi, 24 ans (PT Ganda Seribu), à propos desquels le gouvernement ne fournit aucune information, tous les travailleurs et dirigeants syndicaux ont été condamnés à des peines de trois à six mois d'emprisonnement pour avoir incité des travailleurs à l'émeute. Tout en notant que toutes ces personnes ont apparemment purgé leur peine, le comité souhaite rappeler que les allégations de conduite délictueuse ou criminelle ne devraient pas être utilisées pour harceler des syndicalistes en raison de leur affiliation ou de leur activité syndicale, et que la condamnation de syndicalistes à de longues peines d'emprisonnement, très souvent sur des motifs de trouble de l'ordre public ou des motifs analogues, permet souvent de réprimer des activités de nature syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, quatrième édition, paragr. 43 et 64.] Le comité déplore, en outre, que le gouvernement ne fournisse aucune information sur les procès de MM. Icang et Suryandi, dont l'arrestation serait en rapport avec les événements survenus à Medan au printemps 1994 et qui sont accusés d'avoir organisé des rassemblements illégaux -- sans l'autorisation appropriée. Le comité prie instamment le gouvernement de fournir rapidement des informations sur: i) l'issue des procédures concernant MM. Icang et Suryandi; et ii) le sort de MM. Mahammad Ali, 19 ans (PT Peridoni), et Mulyadi, 24 ans (PT Ganda Seribu), qui auraient été placés en détention en relation avec les événements survenus à Medan en avril 1994. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
366. Notant avec regret que les circonstances de la mort de Mme Marsinah n'ont pas été éclaircies, le comité souhaite rappeler que l'absence de jugement des coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 55.] Le comité prie à nouveau le gouvernement de le tenir informé des résultats de l'enquête de police concernant l'assassinat de Mme Marsinah et de prendre les mesures nécessaires pour que ses auteurs soient traduits en justice.
367. En ce qui concerne l'allégation de violations de la liberté d'association signalées par le SBSI dans sa communication datée du 11 juin 1996, le comité constate les profondes divergences entre la version des plaignants et celle du gouvernement. D'une part, le plaignant allègue de graves mesures antisyndicales, notamment un harcèlement, des violences physiques et des arrestations. D'autre part, le gouvernement affirme, entre autres choses, que la plupart de ces événements ont été réglés pacifiquement et que, si des arrestations ont effectivement eu lieu, celles-ci étaient justifiées par le caractère criminel des accusations pesant contre les suspects. Pour pouvoir se prononcer sur cette question en pleine connaissance de cause, le comité prie donc les plaignants de fournir un complément d'information sur: i) les violences physiques dirigées contre MM. Aryanto et Rozali; ii) les motifs de l'arrestation de M. Asipto Parangun-Agin; iii) le contenu du tract distribué par M. Farid Mu'adz concernant le droit de grève; iv) les actes de discrimination antisyndicale commis contre sept travailleurs de PT Tris Delata Agindo, qui auraient été contraints de renoncer à leur affiliation au SBSI; et v) les actes de vandalisme commis contre l'enseigne du SBSI à Medan et à Binjai.
368. En ce qui concerne la situation spécifique du secrétaire général du SBSI, qui a été arrêté le 30 juillet 1996, le comité est extrêmement préoccupé par la gravité et la persistance de ces allégations. Rappelant que la Cour suprême a annulé, en décembre 1995, la décision rendue par une instance inférieure contre M. Pakpahan sur le chef d'accusation d'incitation de travailleurs à l'émeute, à Medan, en avril 1994, le comité croit comprendre que, le 2 août 1996, M. Pakpahan a été accusé de subversion en rapport avec les émeutes qui se sont produites en juillet 1996. Il a également été informé que les autorités indonésiennes ont prolongé le mandat d'arrêt de M. Pakpahan, permettant de le maintenir en détention au moins jusqu'au 28 septembre 1996. Le comité exprime sa profonde préoccupation du fait qu'une accusation de subversion peut être punie de la peine capitale. Il note, en outre, avec préoccupation que l'accusation de subversion qui a récemment été portée contre M. Pakpahan a trait au même type d'activités que celles pour lesquelles il a été précédemment emprisonné, jugé puis finalement remis en liberté par décision de la Cour suprême en septembre 1995. Le comité estime qu'il existe une forte présomption, non infirmée par le gouvernement, que les accusations portées et les mesures prises contre M. Pakpahan, sous prétexte d'activités subversives alléguées, sont liées à ses activités syndicales. En outre, le comité note avec préoccupation que, bien que M. Pakpahan n'ait pas encore été jugé en bénéficiant des garanties d'une procédure judiciaire normale, le gouvernement estime déjà qu'il a effectivement commis des actes criminels. Le comité souligne l'importance qu'il convient d'attacher au principe selon lequel tout syndicaliste prévenu doit jouir de la présomption d'innocence tant que sa culpabilité n'a pas été prouvée légalement à l'issue d'un procès public au cours duquel il bénéficie de toutes les garanties nécessaires à sa défense. Il prie donc instamment le gouvernement de prendre rapidement les mesures nécessaires pour la libération de M. Pakpahan, pour l'abandon des charges pénales liées aux événements survenus à Jakarta en juillet 1996 et pour garantir que M. Pakpahan puisse exercer librement ses activités syndicales légitimes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
369. En outre, le comité déplore également que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations en ce qui concerne les allégations de mesures antisyndicales dirigées contre des membres du bureau du SBSI après les événements de juillet 1996, dont l'arrestation, la mise en détention et l'interrogatoire par la police ou les militaires. Le comité souhaite rappeler que, même si des personnes exerçant des activités syndicales ou une fonction dirigeante dans un syndicat ne peuvent revendiquer une immunité sur le plan du droit pénal ordinaire, dans le cas où des dirigeants syndicaux font l'objet d'une arrestation, d'une mise en détention ou d'une condamnation, ces dirigeants doivent, en droit, être présumés innocents tant que leur culpabilité n'a pas été établie. Dans le présent cas, le gouvernement n'a pas démontré que les mesures qu'il a prises ne sont aucunement motivées par les activités syndicales exercées par les personnes en cause. Le comité doit donc insister sur le fait que le harcèlement, l'arrestation ou la mise en détention de dirigeants syndicaux pour des activités liées à l'exercice des droits syndicaux sont contraires aux principes de la liberté syndicale. Il prie donc instamment le gouvernement de fournir des informations sur: i) neuf membres du bureau de la branche de Riau du SBSI placés en détention au début d'août 1996 et, dans le cas où ces personnes seraient toujours en détention, de prendre les mesures nécessaires pour leur libération immédiate; ii) MM. Rekson Silaban, directeur de recherche, Santosa, coordinateur régional, Mehbob, membre du personnel de l'Institut d'aide juridique, tous membres du bureau du SBSI, qui ont été interrogés et accusés d'avoir fomenté les événements de juillet 1996, et de prendre les mesures nécessaires pour que les charges retenues contre eux soient rapidement abandonnées; et iii) toutes les mesures antisyndicales dirigées contre les membres du bureau et les militants du SBSI à la suite des événements survenus en juillet 1996, notamment les mesures d'arrestation, d'interrogatoire et d'accusation dont ces personnes ont fait l'objet. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
370. Le comité appelle l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs de ce cas en rapport avec l'application de la convention no 98.
Recommandations du comité
371. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport où le Comité demande à être
tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Kazakstan
présentée par
la Centrale syndicale indépendante du Kazakstan (ITUCK)
Allégations: interdiction faite aux syndicats nationaux
d'accepter
l'aide financière d'organisations internationales
372. Par communication datée du 23 janvier 1995, la Centrale syndicale indépendante du Kazakstan (ITUCK) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Kazakstan. Elle a présenté des informations complémentaires par communication datée du 17 septembre 1995.
373. Le gouvernement a envoyé ses observations concernant cette plainte par communication datée du 11 septembre 1996.
374. Le Kazakstan n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
375. Dans sa communication du 23 janvier 1995, l'ITUCK indique qu'elle a déposé une plainte faisant suite à l'adoption du Code civil du Kazakstan par le Parlement. Aux termes de l'article 106 de ce Code civil, il est interdit à des partis politiques, à des organisations non gouvernementales ayant des buts politiques ou à des syndicats de recevoir sous quelque forme que ce soit une assistance financière étrangère provenant d'un pays étranger, d'une organisation étrangère, de ressortissants étrangers ou d'organisations internationales.
376. L'ITUCK considère que l'adoption d'une telle disposition constitue une violation des droits des travailleurs et de la liberté d'association du fait qu'elle interdit à des syndicats nationaux d'avoir des contacts libres, même de nature financière, avec des organisations internationales de travailleurs. En outre, l'ITUCK souligne qu'elle est une confédération, récemment créée, de syndicats libres, qui s'efforce de constituer un mouvement syndical démocratique au Kazakstan. Il lui serait très difficile de survivre sans une assistance et une formation provenant d'organisations syndicales de pays développés.
377. Dans sa plus récente communication, l'ITUCK ajoute que le gouvernement a incorporé la disposition précitée dans le texte de la nouvelle constitution (son article 5) adoptée par référendum le 30 août 1995. L'ITUCK fait donc appel à l'OIT afin que les mesures nécessaires soient prises pour garantir que le gouvernement respecte les principes de la liberté d'association.
B. Réponse du gouvernement
378. Dans sa communication datée du 11 septembre 1996, le gouvernement rappelle que l'article 16 de la Constitution du Kazakstan garantit à tous les citoyens le droit de s'associer dans des organisations publiques, notamment dans des syndicats. Cette disposition est renforcée par le Code civil de la République et par les lois sur les associations publiques et les syndicats. Il précise en outre que le mécanisme de financement des associations publiques est régi par l'article 106 du Code civil de la République. Aux termes de cet article, les associations publiques sont financées notamment par des droits d'admission, des cotisations, des contributions volontaires, des donations, des recettes de conférences, des expositions, etc. Le financement des partis politiques, des associations publiques et des syndicats par des personnes étrangères, d'autres Etats ou des organisations internationales, n'est pas permis. Cette disposition est renforcée par l'article 5 de la Constitution ayant le même effet. Le gouvernement est d'avis que cette interdiction n'est contraire ni aux droits de l'homme reconnus internationalement ni aux dispositions des conventions pertinentes de l'OIT, et ne limite aucunement une éventuelle coopération avec des entités étrangères.
379. Le comité constate que, dans le présent cas, l'allégation porte sur l'interdiction faite aux organisations syndicales nationales du Kazakstan de recevoir une aide financière d'organisations internationales de travailleurs. Il note que cette interdiction est prononcée par l'article 106 du Code civil du Kazakstan et confirmée par une disposition constitutionnelle nouvellement adoptée.
380. Le comité rappelle au gouvernement qu'une législation interdisant l'acceptation par un syndicat national d'une aide pécuniaire venant d'une organisation internationale de travailleurs à laquelle il est affilié met en cause les principes relatifs au droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, quatrième édition, 1996, paragr. 632.] Le comité estime en outre que toutes les organisations nationales de travailleurs et d'employeurs devraient avoir le droit de recevoir une assistance financière des organisations internationales de travailleurs et d'employeurs respectivement, qu'elles soient ou non affiliées à ces organisations.
381. Au vu des principes énoncés ci-dessus, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures tendant à la modification de l'article 106 du Code civil ainsi que de l'article 5 de la nouvelle Constitution, afin de lever l'interdiction pour des syndicats nationaux, dont l'organisation plaignante, d'accepter une aide financière d'organisations internationales de travailleurs et, en attendant, de ne pas empêcher qu'ils reçoivent une telle assistance. Il prie le gouvernement de le tenir informé de tous progrès réalisés à cet égard.
382. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Le comité appelle le gouvernement à prendre des mesures tendant à la modification de l'article 106 du Code civil ainsi que de l'article 5 de la nouvelle Constitution afin que soit levée l'interdiction faite aux organisations syndicales nationales, y compris l'organisation plaignante, d'accepter une aide financière d'organisations internationales de travailleurs et, en attendant, de ne pas empêcher qu'ils reçoivent une telle assistance. Il prie le gouvernement de le tenir informé de tous progrès réalisés à cet égard.
Dispositions du Code civil et de la Constitution visées
par l'organisation plaignante du Kazakstan
Code civil du Kazakstan
Article 106:
Il est interdit aux partis politiques, aux organisations non gouvernementales ayant des buts politiques et aux syndicats de recevoir sous quelque forme que ce soit une aide financière étrangère, provenant d'un autre pays, d'une organisation étrangère, d'une personne étrangère ou d'une organisation internationale.
Constitution du Kazakstan
Article 5 (paragraphe 4):
L'aide financière destinée à des partis politiques et à des syndicats et provenant de gouvernements étrangers, de personnes étrangères, de sociétés étrangères, d'organisations non gouvernementales étrangères ou d'organisations internationales est interdite sur le territoire de la République.
Rapport dans lequel le comité demande à être
tenu informé
de l'évolution de la situation
Plainte contre le gouvernement du Kenya
présentée par
l'Union internationale des travailleurs
de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration,
du tabac et des branches connexes (UITA)
Allégations: refus de reconnaissance d'un syndicat
383. Dans une communication en date du 14 mai 1996, l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a présenté une plainte en violation du droit syndical contre le gouvernement du Kenya au nom de son organisation affiliée, l'Union des travailleurs de la protection des espèces sauvages et des secteurs connexes (KWAWU).
384. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication datée du 17 juillet 1996.
385. Le Kenya n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
386. Dans sa communication en date du 14 mai 1996, l'UITA allègue que le greffier des syndicats du Kenya maintient son refus de reconnaître l'Union des travailleurs de la protection des espèces sauvages et des secteurs connexes (KWAWU).
387. L'UITA explique que le syndicat susmentionné a été enregistré le 5 août 1994 mais que, le 31 mars 1995, le greffier a ordonné la radiation dudit syndicat. L'UITA déclare que les raisons de cette décision restent obscures et l'étaient manifestement pour la Haute Cour lorsque celle-ci a ordonné le rétablissement de l'enregistrement du syndicat le 27 juillet 1995. Le greffier semble toutefois avoir choisi d'ignorer la décision de la Haute Cour.
388. L'UITA considère cette attitude comme un déni flagrant du droit des travailleurs de jouir de la liberté syndicale ainsi que du droit de leur syndicat de négocier avec leur employeur. Cet acte du gouvernement kenyan constitue une violation des principes de la liberté syndicale, à laquelle il convient de porter remède.
B. Réponse du gouvernement
389. Dans sa communication datée du 17 juillet 1996, le gouvernement indique, en ce qui concerne la KWAWU, qu'il ne s'agit pas d'une question de reconnaissance mais d'enregistrement. Cette organisation, initialement enregistrée le 5 août 1994, a été radiée le 31 mars 1995, car le greffier des syndicats a été informé de ce qu'il existait déjà un autre syndicat, à savoir l'Union des travailleurs de la chasse et des safaris du Kenya.
390. De fait, cette anomalie a été signalée au greffier par l'Organisation centrale des syndicats, la Fédération des employeurs du Kenya et le ministère du Travail et de la Mise en valeur des ressources humaines eux-mêmes. Ce sont donc les partenaires sociaux en formation tripartite qui ont effectivement relevé cette duplication.
391. Le gouvernement ajoute qu'à la suite de la radiation, et conformément au droit garanti par la Constitution, la partie perdante a porté l'affaire devant la Haute Cour du Kenya. Le gouvernement souligne que la question est toujours en instance devant la Haute Cour et qu'elle n'a pas encore été jugée contrairement aux déclarations de l'organisation plaignante. Le gouvernement affirme que le greffier ne passerait jamais outre à une décision prise par la Haute Cour de rétablir l'enregistrement du syndicat. Le gouvernement conclut en déclarant qu'il attend la décision de la Haute Cour.
392. Le comité note que les allégations dans le présent cas se réfèrent à l'annulation de l'enregistrement de l'Union des travailleurs de la protection des espèces sauvages et des secteurs connexes (KWAWU) décidée par le greffier des syndicats le 31 août 1995. En outre, bien que, selon l'organisation plaignante, la Haute Cour ait ordonné le rétablissement de la KWAWU, le greffier continue à refuser de l'enregistrer. Le gouvernement, pour sa part, reconnaît que la KWAWU a été radiée, mais seulement parce qu'un autre syndicat -- l'Union des travailleurs de la chasse et des safaris du Kenya -- existait déjà. Par ailleurs, le gouvernement réfute catégoriquement l'affirmation de l'organisation plaignante selon laquelle la Haute Cour a déjà rendu un jugement ordonnant le rétablissement de l'enregistrement de la KWAWU.
393. Le comité note que, bien que le gouvernement admette qu'il y ait eu annulation de l'enregistrement, cela a été justifié par le fait qu'il existait déjà un autre syndicat pour les mêmes salariés que ceux que la KWAWU était en train d'organiser. A cet égard, le comité souhaiterait rappeler au gouvernement qu'une disposition autorisant le rejet de la demande d'enregistrement, si un autre syndicat déjà enregistré est suffisamment représentatif des intérêts que le syndicat postulant se propose de défendre, signifie que, dans certains cas, des salariés peuvent se voir refuser le droit de s'affilier à l'organisation de leur choix, contrairement aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 297.]
394. En conséquence, la découverte ultérieure par le greffier de l'existence de l'Union des travailleurs de la chasse et des safaris du Kenya, qui représente la même catégorie de salariés que celle représentée par la KWAWU, ne donne pas lieu, selon le comité, à des objections qui permettraient de justifier l'annulation de l'enregistrement de la KWAWU par le greffier. Le comité demande donc au gouvernement de faire en sorte qu'à l'avenir un syndicat puisse être enregistré même si un autre syndicat déjà enregistré représente les intérêts que le nouveau syndicat se propose de défendre.
395. Le comité note en outre la contradiction entre la déclaration de l'organisation plaignante et celle du gouvernement au sujet d'une décision de la Haute Cour à ce sujet. Si l'organisation plaignante affirme que la Haute Cour a ordonné le rétablissement de l'enregistrement de la KWAWU par une décision en date du 27 juillet 1995, elle ne fournit pas de copie de cette décision pour appuyer sa demande. Le gouvernement, en revanche, indique qu'il attend toujours la décision de la Haute Cour sur la question. Le comité demande donc au gouvernement de le tenir informé du résultat de la décision de la Haute Cour à ce sujet dès qu'elle aura été rendue. Il demande en outre au gouvernement de lui fournir une copie de la décision de la cour.
396. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport où le comité demande à être
tenu informé
de l'évolution de la situation
Plaintes contre le gouvernement du Maroc
présentées par
-- l'Union marocaine du travail (UMT) et
-- l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture,
du tabac et des branches connexes (UITA)
Allégations: intimidation antisyndicale, arrestation
et emprisonnement
de responsables et militants syndicaux, sévices corporels
à l'égard d'un dirigeant syndical, suspension de travailleurs
grévistes,
licenciement de responsables syndicaux
397. Le comité a examiné ces cas quant au fond à deux reprises et le plus récemment à sa session de juin 1995 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 299e rapport, paragr. 428 à 459, approuvé par le Conseil d'administration à sa 263e session (juin 1995).]
398. Depuis lors, en l'absence de réponse du gouvernement, le comité a dû ajourner trois fois l'examen de ces cas. A sa session de juin 1996, [voir 304e rapport, paragr. 10], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de ce cas à sa prochaine session, même si les informations ou observations demandées n'étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n'a envoyé aucune observation.
399. Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur des cas
400. Lors de sa session de juin 1995, le comité avait noté avec préoccupation que les allégations faisant l'objet de ces cas portaient sur des atteintes à la liberté syndicale dans quatre entreprises privées marocaines: actes de discrimination antisyndicale visant des délégués syndicaux et des travailleurs syndiqués et interventions violentes des forces de l'ordre et des autorités lors de mouvements de grève.
401. A cette occasion, le comité avait déploré que le gouvernement n'ait pas répondu aux sérieuses et graves allégations de sévices corporels infligés au secrétaire général du syndicat UMT de la société BISMA, M. Moukhbir Mohammed, lors de son arrestation en rapport avec une grève. Le comité avait demandé instamment au gouvernement de fournir ses observations sur ces allégations. Il avait également demandé au gouvernement d'ouvrir sans délai une enquête indépendante sur les circonstances de l'arrestation et des sévices corporels allégués et de l'informer du résultat de cette enquête. [Voir 299e rapport, paragr. 459 d).]
402. Le comité avait également regretté que le gouvernement n'ait pas fourni de renseignements sur l'évolution de la situation des travailleurs de la société BISMA qui avaient fait l'objet d'arrestations. Il s'agissait de 11 travailleurs, dont trois femmes; parmi eux se trouvaient également le secrétaire général adjoint de l'union locale UMT de Sidi Slimane, M. Khallaf Saïd, le secrétaire général du syndicat UMT de la société BISMA, M. Moukhbir Mohammed, et son adjoint, M. Bouzidi Cherkaoui. Le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer s'ils avaient été remis en liberté et réintégrés dans leurs postes de travail. [Voir 299e rapport, paragr. 459 c).]
403. Le comité avait aussi prié le gouvernement de le tenir informé du résultat des recours introduits par les quatre délégués syndicaux et syndicalistes de l'entreprise SINET et par les sept travailleurs de l'entreprise FILARSY de Casablanca. Il avait exprimé le ferme espoir que, si le tribunal venait à la conclusion que ces travailleurs avaient été licenciés en raison de leurs activités syndicales, le gouvernement prendrait les mesures nécessaires pour leur permettre d'obtenir leur réintégration dans leurs postes de travail. [Voir 299e rapport, paragr. 459 b).]
404. Le comité exprime sa profonde préoccupation face au manque de coopération du gouvernement et regrette notamment que, malgré le temps écoulé depuis le dernier examen de ces plaintes, le gouvernement n'ait pas répondu aux questions qui lui ont été posées à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ces cas.
405. Dans ces conditions, conformément à la règle de procédure applicable [voir paragr. 17 de son 127e rapport approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session], le comité se voit dans l'obligation de présenter un rapport sur le fond de l'affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu'il espérait recevoir du gouvernement.
406. Le comité rappelle une fois de plus au gouvernement que le but de l'ensemble de la procédure instituée par l'Organisation internationale du Travail pour l'examen des allégations en violation de la liberté syndicale est d'assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations à leur encontre. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31, approuvé par le Conseil d'administration en mars 1952.]
407. Le comité note avec une profonde préoccupation que les allégations de ces cas se réfèrent à de nombreuses infractions à la liberté syndicale, dont des actes d'intimidation antisyndicale, l'intervention violente de la police, l'arrestation de grévistes et des sévices corporels.
408. Le comité déplore que, s'agissant des actes d'intimidation antisyndicale et des allégations de sévices corporels à l'encontre de M. Moukhbir Mohammed, secrétaire général du syndicat UMT de la société BISMA, arrêté et malmené à l'occasion d'une grève de 48 heures le 26 juillet 1994 à Sidi Slimane, le gouvernement n'ait fourni aucune réponse à ces sérieuses et graves allégations. Le comité souligne à nouveau la gravité de telles allégations et rappelle que, dans de tels cas, seule une enquête judiciaire indépendante est de nature à éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités et sanctionner les coupables. Le comité prie à nouveau le gouvernement de le tenir informé d'urgence de l'évolution de la situation à cet égard. Il le prie fermement de prendre des mesures pour ouvrir une enquête indépendante sur les circonstances de l'arrestation de M. Moukhbir Mohammed, en particulier en ce qui concerne les sévices corporels dont il aurait fait l'objet, et prie instamment le gouvernement de l'informer du résultat de cette enquête.
409. En ce qui concerne l'arrestation, par les forces de l'ordre, lors de cette même grève, au siège de l'union locale de l'UMT de Sidi Slimane, de 11 travailleurs, dont trois femmes et parmi lesquels se trouvaient également le secrétaire général adjoint de l'union locale de l'UMT de Sidi Slimane, M. Khallaf Saïd, le secrétaire général du syndicat UMT de la société BISMA, M. Moukhbir Mohammed, et son adjoint, M. Bouzidi Cherkaoui, le comité note avec regret que le gouvernement n'a transmis aucun renseignement sur l'évolution de la situation de ces travailleurs. Le comité note avec préoccupation que ces arrestations datent de plus de deux ans et insiste à nouveau sur le principe selon lequel le droit de grève est l'un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 475.] En outre, de l'avis du comité, les autorités ne devraient pas recourir aux mesures d'arrestation et d'emprisonnement en cas d'organisation ou de participation à une grève pacifique: de telles mesures comportent de graves risques d'abus et de sérieux dangers pour la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 601.] Compte tenu de l'importance de ces principes et du temps déjà écoulé, le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de le tenir informé rapidement de la situation de ces travailleurs en lui indiquant, notamment, s'ils ont été remis en liberté et réintégrés dans leurs postes de travail.
410. Le comité regrette vivement que le gouvernement n'ait pas transmis de renseignements sur les résultats des enquêtes qu'il avait demandé au gouvernement de mener au sujet des licenciements de responsables syndicaux dans les entreprises SINET et FILARSY de Casablanca, ni d'informations sur les recours introduits par ces travailleurs. Le comité avait demandé au gouvernement de mener des enquêtes indépendantes pour établir les véritables raisons du licenciement, le 2 novembre 1992, de MM. Bouna Houcine, secrétaire général du syndicat d'entreprise de l'UMT, Mouzoune Hassan, secrétaire général adjoint, Attor Ahmed et Lachgar Brahim, délégués syndicaux dans l'entreprise SINET ainsi que, le 22 septembre 1992, de sept délégués syndicaux du bureau syndical de l'UMT de l'entreprise FILARSY. Le comité rappelle que le licenciement d'un travailleur en raison de ses activités syndicales porte atteinte aux principes de la liberté syndicale et que le licenciement pour fait de grève légitime constitue une discrimination antisyndicale. [Voir Recueil, op. cit., 1996, paragr. 702 et 704.] Ces syndicalistes ayant porté leur cas devant les tribunaux, le comité avait noté que le gouvernement le tiendrait informé des jugements rendus dans ces affaires. Le comité prie à nouveau le gouvernement de lui communiquer le résultat de ces enquêtes et des jugements. Il espère fermement que, si le tribunal était venu à la conclusion que ces travailleurs ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales, le gouvernement a déjà pris les mesures nécessaires pour leur réintégration dans leurs postes de travail.
411. Constatant que, dans plusieurs affaires examinées récemment par le comité, le gouvernement n'a pas fourni ses observations, le comité croit nécessaire de prier le Directeur général de prendre toute mesure appropriée pour rétablir un climat de coopération avec le gouvernement du Maroc, y compris si nécessaire par une mission de contacts directs.
412. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport intérimaire
Plaintes contre le gouvernement du Pérou
présentées par
-- la Fédération des employés de banque du Pérou
(FEB)
-- le Syndicat unitaire des travailleurs
de l'éducation du Pérou (SUTEP) et
-- la Fédération nationale unifiée
des travailleurs de la santé (FENUTSSA)
Allégations: restrictions à la négociation
collective,
discrimination et ingérence dans les activités syndicales,
licenciements antisyndicaux et refus du congé syndical
413. Les plaintes qui font l'objet du présent cas figurent dans des communications de la Fédération des employés de banque du Pérou (FEB), en date du 29 septembre 1995, du Syndicat unitaire des travailleurs de l'éducation du Pérou (SUTEP), du 5 octobre 1995, et de la Fédération nationale unifiée des travailleurs de la santé (FENUTSSA), datée du 15 novembre 1995.
414. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 24 janvier et 30 avril 1996.
415. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. En revanche, il n'a pas ratifié la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations des organisations plaignantes
416. Dans sa communication datée du 29 septembre 1995, la Fédération des employés de banque du Pérou (FEB) allègue que, par une résolution du 20 septembre 1995, le ministère du Travail et de la Promotion sociale lui a refusé le droit de négociation collective, faisant ainsi obstacle à tout mécanisme de négociation ou d'entente avec les employeurs. Ce refus repose sur le fait que, de l'avis du ministère du Travail et de divers établissements bancaires, la FEB ne regroupe pas vraiment la majorité absolue des travailleurs telles qu'exigée par l'article 46 du décret-loi no 25593 pour conclure une convention collective par branche d'activité.
417. A cet égard, la FEB signale que le critère de la majorité absolue, c'est-à-dire la moitié plus un, qui est mis en avant, n'est pas applicable en l'occurrence étant donné qu'elle est la seule organisation syndicale représentative des travailleurs du secteur bancaire au niveau national et qu'elle est dûment reconnue par l'administration du travail. En conséquence, les différents établissements bancaires n'avaient pas, jusqu'alors, remis en cause sa représentativité; la FEB avait d'ailleurs conclu deux conventions collectives sous l'emprise du décret-loi no 25593.
418. La FEB ajoute que par suite de la politique de déréglementation que l'actuel gouvernement applique dans le domaine du travail, en vertu de la loi no 26513 sur la promotion de l'emploi, les travailleurs syndiqués sont tout particulièrement victimes d'injustices et de menaces de licenciement. Plus concrètement, dans l'établissement bancaire Banco de Crédito del Perú, où la FEB comptait plusieurs centaines d'adhérents, ses effectifs se réduisent désormais à quelques dirigeants syndicaux sur lesquels pèsent des menaces de licenciement. L'organisation plaignante signale que cette diminution tient au fait qu'un grand nombre de travailleurs ont quitté la FEB de crainte d'être licenciés. Une politique similaire est appliquée dans l'établissement Interbanc, où, en l'espace d'une semaine, 60 travailleurs se sont retirés massivement de la FEB.
419. Enfin, la FEB prétend que, si les employeurs exigent devant l'administration du travail la majorité absolue pour pouvoir engager une négociation collective, d'une part, ils font savoir aux travailleurs syndiqués que, s'ils ne renoncent pas à leur affiliation, ils ne jouiront pas des avantages économiques qui seront accordés aux travailleurs non syndiqués, les menaçant également de licenciement économique. Par ailleurs, ils offrent de substantielles incitations aux cadres supérieurs afin qu'ils fassent obstacle aux travaux de la FEB.
420. Dans une communication datée du 5 octobre 1995, le Syndicat unitaire des travailleurs de l'éducation du Pérou (SUTEP) allègue que, dans le cadre de sa politique de flexibilisation et de déréglementation du travail, le gouvernement n'a pas donné suite, depuis 1991, au cahier de revendications que le SUTEP a soumis au ministère de l'Education conformément à l'article 17 du décret suprême no 026-82, relatif au droit d'organisation et de négociation collective des agents de la fonction publique.
421. De même, le SUTEP fait valoir que le gouvernement, par l'intermédiaire du ministère de l'Education et de ses organismes délégués, a refusé à ses dirigeants syndicaux le droit au congé syndical avec traitement, enfreignant ainsi les dispositions de l'alinéa e) de l'article 16 de la loi péruvienne relative aux enseignants, ainsi que la convention no 135 de l'OIT.
422. Dans une communication datée du 15 novembre 1995, la Fédération nationale unifiée des travailleurs de la santé (FENUTSSA) allègue qu'en application du décret-loi no 26093, l'Institut national de la santé (INS) a engagé un processus d'évaluation des tâches et du rendement du personnel qui s'est soldé par le licenciement de 36 travailleurs parmi lesquels tous les membres du comité directeur du Syndicat unifié des travailleurs de l'INS, 47 de ses adhérents et un dirigeant national de la FENUTSSA.
B. Réponse du gouvernement
423. En réponse aux allégations de la Fédération des employés de banque du Pérou (FEB) dans une communication datée du 24 janvier 1996, le gouvernement fait savoir qu'en mai 1995 la FEB a envoyé au ministère du Travail et de la Promotion sociale un projet de convention collective afin que les établissements bancaires soient informés de l'ouverture d'une négociation collective par branche d'activité. Après en avoir reçu notification, la majorité des établissements bancaires ont refusé d'engager une telle négociation, invoquant l'inaptitude légale de la FEB à négocier au niveau de la branche d'activité, vu que cette organisation ne rassemble pas la majorité absolue des travailleurs du secteur, comme l'exige l'article 46 du décret-loi no 25593.
424. Le gouvernement ajoute que, dans ces conditions, le ministère du Travail a commencé par demander à la FEB de préciser le nombre total de travailleurs entrant dans son champ d'action ainsi que le nombre de ses adhérents par centre de travail; or la FEB a répondu qu'elle ne disposait pas des informations requises. Ultérieurement, le ministère du Travail a demandé ces informations aux établissements bancaires, lesquels ont répondu en envoyant des informations certifiées sur le nombre de travailleurs pour lesquels était effectuée la retenue à la source des cotisations syndicales en leur qualité de membres de la FEB. Cela étant, la question a été réglée par l'administration du travail qui a déclaré fondé le refus des établissements bancaires de négocier collectivement, étant donné que la FEB n'avait pas établi qu'elle représentait la majorité absolue des travailleurs du secteur exigée par la loi.
425. Pour ce qui est des allégations de la FENUTSSA concernant des licenciements antisyndicaux, le gouvernement informe, dans une communication du 30 avril 1996, qu'en vertu du décret-loi no 26093 relatif à l'évaluation semestrielle du personnel de la fonction publique l'Institut national de la santé (INS) a approuvé le règlement du plan d'évaluation semestrielle des tâches et du rendement des travailleurs dudit institut. L'article 10 du règlement susmentionné dispose que les travailleurs qui ne se présenteraient pas à l'évaluation aux dates fixées ni à la date prévue pour les retardataires seraient déclarés en surnombre. Le gouvernement précise que l'objectif dudit décret est l'évaluation de la capacité de travail de tous les salariés sans aucune distinction, qu'ils soient ou non membres d'une organisation syndicale. Le 1er septembre 1995, l'INS a annoncé le licenciement de 66 travailleurs au motif qu'ils ne s'étaient pas présentés à l'évaluation. Enfin, le gouvernement signale que la FENUTSSA a interjeté devant la 24e Chambre du tribunal civil un recours en amparo qui est encore en instance.
426. Le comité observe que les plaintes qui font l'objet du présent cas ont trait à des restrictions au droit de négociation collective, à des actes de discrimination et d'ingérence dans les activités syndicales, à des licenciements antisyndicaux et au refus de congé syndical opposé à des dirigeants syndicaux.
427. S'agissant des allégations de la Fédération des employés de banque du Pérou (FEB) au sujet de restrictions imposées à la négociation collective, le comité prend note du fait que, conformément aux indications du gouvernement, l'administration du travail a déclaré fondé le refus opposé par les établissements bancaires de négocier collectivement, étant donné que la FEB n'avait pas établi qu'elle représentait la majorité absolue des travailleurs du secteur exigée par l'article 46 du décret-loi no 25593. A cet égard, le comité observe qu'il s'est déjà prononcé sur ledit article [voir 291e rapport, cas nos 1648 et 1650, Pérou, paragr. 460], lequel a fait l'objet d'une observation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
428. En effet, en relation avec l'article 46, qui subordonne la validité des conventions collectives de branche ou de profession à leur approbation par la majorité non seulement des travailleurs mais aussi des entreprises, le comité a signalé au gouvernement que la législation devrait promouvoir la négociation collective volontaire entre les organisations d'employeurs et de travailleurs à tous les niveaux, conformément à l'article 4 de la convention no 98. Le comité, comme la commission d'experts, a demandé au gouvernement de modifier sa législation en conséquence en consultation avec les partenaires sociaux. Le comité réitère cette demande et prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires à cet égard.
429. En ce qui concerne les allégations de la FEB relatives aux menaces de licenciement et aux pressions dont ont fait l'objet les travailleurs syndiqués des établissements Banco de Crédito del Perú et Interbanc, et qui ont incité un grand nombre de travailleurs à quitter la FEB, le comité observe avec regret que le gouvernement n'a pas répondu à ces allégations, et lui demande donc d'envoyer sans tarder ses observations à cet égard.
430. Pour ce qui est des allégations de la FENUTSSA concernant des licenciements antisyndicaux, le comité relève que, selon les informations fournies par le gouvernement, l'INS a annoncé le licenciement de 66 travailleurs au motif qu'ils ne se sont pas présentés à la réunion pour l'évaluation prévue par le décret-loi no 26093 et conforme au règlement applicable, et que la FENUTSSA a interjeté un recours en amparo devant une Chambre du tribunal civil, recours encore en instance. A cet égard, le comité constate avec regret que le gouvernement pas n'a procédé à une enquête sur la nature antisyndicale ou non de ces mesures, surtout si l'on tient compte du fait que, comme le signale l'organisation plaignante et ne le dément pas le gouvernement, parmi les 66 travailleurs licenciés figurent tous les membres du comité directeur du Syndicat unifié des travailleurs de l'Institut national de la santé, 47 de ses adhérents et un des dirigeants nationaux de la FENUTSSA. En outre, le comité regrette que l'immunité syndicale à laquelle ont droit les dirigeants syndicaux conformément aux articles 30 et 31 du décret-loi no 25593 n'ait pas été respectée.
431. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat du recours en amparo interjeté par la FENUTSSA, et de prendre des mesures afin que soient réintégrés dans leurs postes de travail les travailleurs licenciés pour des motifs antisyndicaux et d'assurer que soient réparés les préjudices subis. Le comité, comme il l'a signalé dans un cas similaire, prie aussi le gouvernement d'adopter les mesures nécessaires pour qu'à l'avenir l'application de ces programmes de réduction du personnel ne soit pas utilisée pour procéder à des actes de discrimination antisyndicale. [Voir cas no 1796, Pérou, 304e rapport, paragr. 458.]
432. Le comité constate également avec regret que le gouvernement n'a pas répondu aux allégations du Syndicat unitaire des travailleurs de l'éducation du Pérou (SUTEP) relatives au refus par le ministère de l'Education de donner suite au cahier de revendications dudit syndicat, ainsi qu'au refus d'accorder le congé syndical à ses dirigeants. Le comité prie le gouvernement d'envoyer rapidement ses observations à cet égard.
433. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Tchad
présentée par
la Confédération syndicale du Tchad (CST)
Allégations: discrimination contre une organisation syndicale
434. La plainte de la Confédération syndicale du Tchad (CST) contre le gouvernement du Tchad figure dans une communication du 30 septembre 1995. La CST a communiqué des informations complémentaires dans une communication du 26 novembre 1995. Le gouvernement n'ayant pas répondu, le comité a dû ajourner l'examen de ce cas à deux reprises. A sa réunion de juin 1996 [voir 304e rapport, paragr. 10], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvé par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de ce cas à sa prochaine session, même si les informations ou observations du gouvernement n'étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n'a envoyé aucune observation.
435. Le Tchad a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
436. Dans sa communication du 30 septembre 1995, la Confédération syndicale du Tchad déclare que le gouvernement pratique la discrimination et l'exclusion à son égard en l'empêchant de participer à la négociation collective et de siéger dans les organes nationaux.
437. Plus précisément, la CST fait état des allégations suivantes:
438. Dans sa communication du 26 novembre 1996, la CST indique que, après le dépôt de la plainte, la Direction du travail lui a communiqué, par lettre no 128 du 6 novembre 1995 des copies des rapports sur les conventions ratifiées par le Tchad pour la période du 31 juillet 1994 au 30 juin 1995, que la CST avait demandées par lettre no 080/PCST/94 du 7 septembre 1994.
439. Le 23 novembre 1995, la Direction du travail a adressé une convocation à la CST, la conviant à prendre part à une réunion du 24 novembre, qui avait pour but d'entendre une communication du ministre de la Fonction publique et du Travail sur la situation du recensement des agents de la fonction publique imposé au gouvernement par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, et au besoin recueillir les points de vue des organisations syndicales de travailleurs. La CST a répondu à cette convocation et a exprimé son point de vue.
440. En outre, par lettre no 143 du 20 octobre 1995, la Direction générale du ministère de la Fonction publique et du Travail a demandé à la CST de désigner trois de ses représentants devant participer à un séminaire-atelier sur le projet de nouveau Code du travail, organisé par le ministère en collaboration avec le Bureau international du Travail, dont la date, fixée en novembre 1995, a dû être reportée. Aucune nouvelle date n'a été retenue. Si le principe de la tenue du séminaire-atelier était maintenu, la CST apportera des amendements fondamentaux sur des articles dont les dispositions ne seront pas conformes aux conventions internationales de l'OIT ratifiées par le Tchad. La CST prendra position contre toute disposition tendancieuse qui vise à donner droit au gouvernement de contrôler les activités des organisations des travailleurs tchadiens.
441. Le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis la présentation de la plainte, le gouvernement n'ait répondu à aucune allégation de l'organisation plaignante, alors qu'il a été invité à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, à présenter ses commentaires et observations sur ce cas.
442. Dans ces conditions, conformément à la règle de procédure applicable [voir paragr. 17 de son 127 e rapport approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session], le comité se voit dans l'obligation de présenter un rapport sur le fond de l'affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu'il espérait recevoir du gouvernement.
443. Le comité rappelle au gouvernement que l'ensemble de la procédure instituée par l'Organisation internationale du Travail pour l'examen d'allégations en violation de la liberté syndicale est d'assurer le respect de cette liberté en droit comme en fait. Le comité est convaincu que, si la procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a pour leur propre réputation à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées et portant sur des faits précis, qui pourraient être dirigés contre eux. [Voir premier rapport du comité, paragr. 31.] Le comité note à cet égard que, dans un autre cas examiné également à la présente session, le gouvernement a fourni une réponse aux allégations formulées. Le comité l'encourage donc à faire en sorte que des réponses soient fournies à l'ensemble des plaintes présentées à son encontre.
444. Le comité note que la plainte de la CST porte sur le traitement discriminatoire pratiqué à son encontre par rapport aux autres centrales syndicales, notamment dans les procédures relatives aux normes internationales du travail, dans la représentation au sein de commissions ou réunions nationales et dans les relations avec le ministère de la Fonction publique et du Travail. L'élément de réponse fourni à la CST par le gouvernement semble indiquer que celui-ci nie le caractère représentatif de la CST.
445. Le comité note une amélioration de la situation, selon les informations fournies par l'organisation plaignante elle-même. Le comité note que le gouvernement a envoyé, en novembre 1995, des copies des rapports sur les conventions ratifiées, pour la période du 31 juillet 1994 au 30 juin 1995, en réponse à la demande formulée par la CST en septembre 1994. Il note également que le gouvernement a invité l'organisation plaignante à participer à un séminaire d'étude sur le projet de Code du travail. En outre, il note que le gouvernement a invité la CST à participer à une réunion sur la situation des agents de la fonction publique et que la CST a pu exprimer son point de vue à cette occasion.
446. Cependant, le comité constate que le problème subsiste pour la participation à d'autres organes et réunions: désignation de représentants des organisations syndicales dans le Haut Comité pour le travail et la sécurité sociale, désignation des représentants membres du conseil d'administration de la caisse nationale de prévoyance sociale, désignation des assesseurs auprès des tribunaux du travail et de la prévoyance, participation à la commission paritaire mixte de négociation des grilles de salaires.
447. A cet égard, le comité rappelle que le fait qu'une organisation syndicale ne soit pas admise à siéger dans des commissions paritaires n'implique pas nécessairement qu'il y ait atteinte aux droits syndicaux de cette organisation. Mais, pour qu'il n'y ait pas une telle atteinte, deux conditions devraient être remplies: il faudrait d'abord que la raison pour laquelle un syndicat est écarté de la participation à une commission paritaire réside dans son manque de représentativité déterminé objectivement; il faudrait ensuite que -- malgré cette non-participation -- les autres droits dont il jouit et les activités qu'il peut déployer ailleurs lui permettent effectivement de promouvoir et de défendre les intérêts de ses membres au sens où l'entend l'article 10 de la convention no 87. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 946.]
448. Le comité note que le gouvernement a pris récemment des mesures pour informer la CST et pour l'inviter à participer à un séminaire. Si un doute existe quant à la représentativité de la CST, le gouvernement devrait faire procéder à une détermination impartiale et objective de cette représentativité, notamment par rapport aux autres centrales existantes, et il devrait prendre les mesures appropriées en conséquence au cas où elle serait représentative.
449. S'agissant de la fin de non-recevoir du ministère du Travail aux demandes concernant les entraves aux droits syndicaux de certaines catégories de travailleurs, sur lesquelles la CST a attiré l'attention, le comité note que le gouvernement n'a pas donné de réponse à l'organisation plaignante. Le comité rappelle que le gouvernement devrait répondre dans les meilleurs délais aux demandes et revendications présentées par les organisations syndicales, surtout sur un problème aussi fondamental que le refus d'accorder le droit syndical qui est pourtant reconnu aux travailleurs sans restriction d'aucune sorte par l'article 2 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ratifiée par le Tchad.
450. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
Rapport définitif
Plainte contre le gouvernement du Tchad
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)
Allégations: suspension des activités d'une
organisation syndicale
et occupation de son siège
451. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 4 juillet 1996. Le gouvernement a envoyé ses observations dans les communications des 17 juillet et 5 septembre 1996.
452. Le Tchad a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de la confédération plaignante
453. Dans sa communication du 4 juillet 1996, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue que, le 2 juillet 1996, les autorités gouvernementales ont déclaré la suspension, jusqu'à nouvel avis, des activités de l'Union des syndicats du Tchad (UST) sur tout le territoire national. L'organisation plaignante note que les autorités font une interprétation erronée des statuts de l'UST en arguant que certaines prises de position récentes de l'UST relatives au contexte politique actuel du pays seraient en contradiction avec le caractère apolitique et neutre de l'organisation syndicale. Elle ajoute que les autorités semblent ignorer l'article 2 des statuts de l'UST, aux termes duquel l'organisation se réserve le droit de se prononcer sur les décisions politiques qui ont des répercussions sur la vie des travailleurs et que, si l'UST, conformément à la volonté de ses membres, a décidé de prendre position dans le débat politique national en vue de favoriser la réalisation de ses objectifs économiques et sociaux, la décision du gouvernement visant à la priver de ses moyens d'action est incompatible avec les principes de la liberté syndicale.
454. Par ailleurs, la CISL allègue que le 29 juin 1996 les forces de sécurité, sans produire de mandat judiciaire, ont occupé le siège de l'UST en vue d'empêcher la tenue de l'assemblée générale des travailleurs prévue ce jour-là.
B. Réponse du gouvernement
455. Dans sa communication du 17 juillet 1996, le gouvernement indique qu'avec la chute de la dictature, le 1er décembre 1990, le Tchad s'est engagé dans la voie de la démocratie pluraliste et que ce type de régime suppose l'affirmation des libertés dont la promotion exige de tous les acteurs le sens de la responsabilité et de la mesure, surtout dans un pays qui a connu plusieurs décennies d'animosités et de conflits armés. Le gouvernement ajoute qu'il importe que les acteurs comprennent la nature et le rôle des différentes organisations qui animent la vie économique, sociale, culturelle et politique du pays, ce qui veut dire éviter de confondre le rôle des uns et des autres, éviter de se tromper de cadre, de type d'organisation. Une organisation syndicale n'a pas pour vocation de se mêler des luttes politiciennes, de prendre des positions partisanes dans des contentieux opposant des acteurs politiques. Or, indique le gouvernement dans un communiqué de presse du 24 juin 1996, l'UST a annoncé qu'elle avait décidé d'uvrer et d'orienter désormais ses actions pour une lutte permanente de libération nationale (le gouvernement a joint à sa réponse le communiqué de presse en question dans lequel l'UST appelle ses affiliés à s'abstenir de voter au deuxième tour des élections présidentielles). Le gouvernement indique que cette affirmation traduit une volonté certaine de mutation décidée par les dirigeants de cette centrale et fait apparaître deux notions fondamentales incompatibles avec sa nature de syndicat: a) la notion de révolution permanente bien connue dans les milieux politiques, idéologiquement ancrés à l'extrême gauche du mouvement communiste international; b) la notion de lutte de libération nationale qui sous-entend une rébellion armée. C'est dans ce contexte que le gouvernement a décidé de suspendre l'Union des syndicats du Tchad, dont les dirigeants ont, par ailleurs, fait montre d'un activisme débordant pendant le dernier scrutin présidentiel. Cette décision constitue une mesure conservatoire. Le gouvernement précise qu'elle a été adoptée pour assurer le développement normal du second tour des élections présidentielles et qu'elle a été rapportée le 30 juin 1996 (copie de cette décision est jointe).
456. Dans sa communication du 5 septembre 1996, le gouvernement déclare que l'occupation par les forces de sécurité du siège de l'UST, le 29 juin 1996, jour prévu pour la tenue d'une assemblée générale, était requise pour prévenir tout débordement, étant donné que l'UST projetait de boycotter le deuxième tour du scrutin présidentiel à l'issue de cette assemblée, ce qui aurait été préjudiciable à la sécurité de l'Etat. Il ajoute que les forces de sécurité ont évacué les lieux le lendemain de l'occupation, une fois l'ordre rétabli.
457. Le comité observe que les allégations portent sur la suspension des activités de l'Union des syndicats du Tchad (UST) et sur l'occupation de son siège.
458. Le comité note que le gouvernement signale le caractère conservatoire de ces mesures, adoptées dans un contexte d'élections politiques, alors que l'UST, dans un communiqué, avait appelé ses affiliés à s'abstenir de voter. Dans ce communiqué, joint à la réponse du gouvernement, l'UST déclare qu'elle entend orienter ses actions vers une lutte de libération nationale. A ce sujet, le comité rappelle que ce n'est que dans la mesure où elles prendront soin de ne pas conférer à leurs revendications professionnelles un caractère nettement politique que les organisations pourront légitimement prétendre à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à leurs activités. D'autre part, la frontière entre ce qui est politique et ce qui est proprement syndical est difficile à tracer avec netteté. Les deux notions s'interpénètrent et il est inévitable, et parfois normal, que les publications syndicales comportent des prises de position sur des questions ayant des aspects politiques, comme sur des questions strictement économiques et sociales. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 457.]
459. Dans le présent cas, les prises de position de l'UST partiellement de nature politique ont eu pour conséquence la suspension de ses activités par voie administrative. Cette mesure constitue, sans nul doute, une violation de l'article 4 de la convention no 87, ratifiée par le Tchad, lequel dispose que les organisations d'employeurs et de travailleurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative. Par conséquent, le comité déplore profondément que le gouvernement ait eu recours à cette mesure. Cependant, il observe qu'elle a été rapportée.
460. En ce qui concerne l'occupation par les forces de sécurité du siège de l'UST, le comité signale à l'attention du gouvernement qu'il a, à de nombreuses occasions, souligné que l'inviolabilité des locaux syndicaux a comme corollaire indispensable que les autorités publiques ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans l'autorisation préalable des occupants ou sans être en possession d'un mandat judiciaire les y autorisant. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 175.]
461. En outre, constatant que l'occupation du siège de l'UST a eu lieu le jour même où devait se tenir l'assemblée générale des travailleurs, le comité rappelle au gouvernement que le droit des organisations professionnelles de tenir des réunions dans leurs propres locaux pour y examiner des questions professionnelles, sans autorisation préalable ni ingérence des autorités, constitue un élément essentiel de la liberté d'association, et les autorités devraient s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 130.]
462. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour éviter qu'à l'avenir une organisation syndicale fasse l'objet d'une mesure de suspension par voie administrative de ses activités ou d'occupation de ses locaux sans mandat judiciaire.
463. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
Soulignant que la suspension des activités d'une organisation syndicale par voie administrative et l'occupation de locaux syndicaux sans mandat judiciaire en vue d'interrompre des réunions syndicales constituent de graves violations des principes de la liberté syndicale, le comité demande instamment au gouvernement d'assurer qu'à l'avenir de telles mesures ne soient pas adoptées.
Genève, 14 novembre 1996.
Max Rood,
Président.
Points appelant une décision:
paragraphe 80;
paragraphe 101;
paragraphe 116;
paragraphe 133;
paragraphe 147;
paragraphe 164;
paragraphe 182;
paragraphe 205;
paragraphe 228;
paragraphe 253;
paragraphe 272;
paragraphe 288;
paragraphe 314;
paragraphe 326;
paragraphe 371;
paragraphe 382;
paragraphe 396;
paragraphe 412;
paragraphe 433;
paragraphe 450;
paragraphe 463.