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1. Social security for the informal sector: Designing pilot projects; Wouter van Ginneken

The context and aims of pilot activities

Intended beneficiaries and their social security needs

The three options

The project strategy

Conclusions

2. Sécurité sociale pour le secteur informel au Bénin: Etude de faisabilité du projet national; Bernardin Gauthé

Introduction

Les programmes existants

Les projets pilotes

3. Social Security for the informal sector in India: Feasibility study on area-based pilot projects in Anand (Gujarat) and Nizamabad (Andhra Pradesh); Shashi Jain

Introduction

Project areas in Gujarat and Andhra Pradesh

The area-based pilot project

4. Seguridad social para el sector informal en El Salvador: Análisis de viabilidad para los municipios de Ataco, Caluco, Santa Elena y Perquín; Sandra de Barraza and Carlos Umaña

Descripción y análisis de las localidades seleccionadas

Descripción y análisis de las instituciones

Viabilidad del proyecto por componente

Conclusiones: Perspectiva de replicabilidad a nivel nacional

5. Health insurance for informal sector workers: Feasibility study on Arusha and Mbeya, Tanzania; A.D. Kiwara and Frans Heynis

Introduction

Investigating conditions in Arusha and Mbeya

Assessing the feasibility of the pilot projects


Remark: Not all the tables referred to in the text have been included in this Web document. In order to obtain a copy of the complete document, kindly contact the Social Security Department.




2. Sécurité sociale pour le secteur informel au Bénin: Étude de faisabilité du projet national

Bernardin Gauthé, Consultant, Paris



1. Introduction

Comme dans les trois autres pays participant au Projet BIT sur la sécurité sociale pour le secteur informel (El Salvador, Inde, Tanzanie), les groupes couverts par les régimes de sécurité sociale au Bénin restent essentiellement les fonctionnaires et les salariés. Le Projet a donc l'intention d'entreprendre deux types d'intervention. Sa première fonction est de travailler ensemble avec le gouvernement, les agences de sécurité sociale, les partenaires sociaux, les ONG et les compagnies d'assurance afin de concevoir et mettre en oeuvre les projets de sécurité sociale pour le secteur informel. Sa seconde fonction est de fournir un soutien direct aux travailleurs du secteur informel et à leurs associations afin de mettre sur pied et de gérer leurs propres projets.

Les soins de santé sont désignés comme prioritaires en termes de prestations. De plus, l'aide à l'éducation, de même que les prestations de survivants et d'invalidité, est envisageable dans le développement du projet compte tenu du souhait des populations.

Pendant longtemps et malgré l'existence et la pratique séculaire des tontines qui sont en réalité une anticipation sur les contingences sociales, les mentalités africaines, et particulièrement celles du Bénin ont considéré (certaines continuent) que les maladies ne sont que le résultat d'un maléfice dont les causes et les conséquences sont difficilement maîtrisables: ceci engendre un fatalisme et une stratégie d'évitement qui empêchent même d'évoquer une maladie et d'anticiper sur sa survenance.

Dans les différentes études faites ces dernières années au Bénin notamment celles de la Banque mondiale sur le financement des soins de santé en Afrique subsahérienne (Shaw et Griffin, 1995), de la Coopération allemande (Djigbènondé, 1995) et du BIT (Gauthé, 1996) montrent bien à la fois l'urgence et les avantages d'un système de sécurité sociale pour le secteur informel. Le premier avantage est la possibilité de bénéficier au moment opportun des soins de santé sans être obligé de payer à l'acte. Une bonne partie des populations cibles éprouve en effet beaucoup de difficultés à trouver l'argent au moment de la maladie ou de l'accident, au risque d'un endettement ou de soins partiels. Le deuxième avantage non moins intéressant est la possibilité d'obtenir des réductions sur le coût des prestations si l'on est dans un groupe où les intérêts sont défendus collectivement. La fréquentation d'un centre de santé par un groupe ou une association peut favoriser une économie d'échelle et induire une diminution du coût des prestations.

Cette recherche des coûts bas pour les soins de santé s'inscrit dans une large mesure comme une conséquence de l'ajustement structurel actuellement en cours en Afrique mais surtout des effets de la dévaluation du franc cfa. Dans une étude de l'INSAE (Institut national de statistique et de l'analyse économique) et du PNUD (INSAE, 1995), il a été révélé que les ménages qui étaient au nombre de 69% à déclarer avoir réduit leurs dépenses de santé en septembre 1994, sont passés à 83% en mars 1995. C'est à Cotonou que cette proportion est la plus forte (94%), alors qu'à Parakou elle est de 76%.

La même étude montre que si les ménages prévoient aussi de fréquenter plus souvent les centres de santé parce que les coûts sont bas, ils sont encore plus nombreux à vouloir réduire les consultations privées. Et ils sont près de la moitié à avoir décidé de ne plus acheter en pharmacie les médicaments prescrits, ce qui signifie qu'ils les achèteront au détail sur le marché. Ceci est un pas vers l'automédication, comportement que l'on doit considérer comme inquiétant. Sans aucun doute, l'édification d'une sécurité sociale pour les populations du secteur informel contribuera à réduire ces risques. C'est aussi l'un des avantages du projet. Un dernier avantage est celui d'éviter, avec ce système de sécurité sociale, le drame que constitue le paiement à l'acte pour les femmes sur le point d'accoucher.

Concernant le Projet sur la sécurité sociale du secteur informel, trois options paraissent envisageables pour la mise sur pied de l'expérimentation (van Ginneken, 1996):

  • L'assurance sociale pour le secteur informel. Il est tout à fait possible pour les travailleurs du secteur informel de monter, par une action collective, un régime d'assurance sociale qui prendrait leurs besoins les plus élémentaires en charge.

  • Encourager une assistance sociale efficace. Les prestations vont surtout à ceux qui sont dans le besoin, mais pour cela, il faut vraiment une administration perfectionnée pour savoir qui est réellement dans le besoin, et surtout, faire en sorte que les prestations aillent bien à la population cible.

  • Réforme et élargissement de l'assurance sociale du secteur formel. On peut envisager à travers des options particulières que les travailleurs du secteur informel puissent adhérer au système formel.

Ces trois options peuvent se réaliser dans la même région ou zone géographique. Cette étude a donc pour but d'évaluer comment et sous quelles conditions peuvent se mettre en place, dans des zones pilotes déterminées, une sécurité sociale de base pour tous.

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2. Les programmes existants

2.1 Les programmes spécialement conçus pour le secteur informel

En 1980, une étude avait été menée par les services de l'Office Béninois de Sécurité Sociale (OBSS, 1996) en vue de l'extension de son système au monde rural. Les structures d'expérimentation retenues pour le projet étaient les coopératives de type agricole créées et organisées par les Centres d'action pour le développement rural (CADER). Mais ces structures coopératives n'ont pas fait long feu en raison de difficultés financières liées à leur gestion. Dès lors, le projet d'extension de la sécurité sociale au monde rural s'est estompé.

Aujourd'hui, devant les difficultés socio-économiques que vit la plus grande frange de la

population nationale, il est urgent de réfléchir à la création d'un système de base de sécurité sociale pour toute la population, système qui permet d'assurer toute la population sans que l'appartenance à une catégorie professionnelle constitue absolument le critère d'assujettissement (OBSS, 1996).

La viabilité d'un tel système requiert une organisation particulière qui intègre les collectivités locales, les coopératives, les associations, les syndicats, les entreprises, les individus eux-mêmes, fondée financièrement sur les cotisations, et qui couvrirait les soins de santé.

2.2 L'assistance sociale

Dans le secteur formel, les groupes vulnérables sont pris en charge au Bénin par plusieurs structures publiques et des ONG nationales et internationales à travers des programmes ciblés sur ces groupes. La Direction des affaires sociales (DAS) a installé sur toute l'étendue du territoire national des centres de promotion sociale (88 d'entre eux sont actuellement fonctionnels) et des centres d'actions sociales dans les principaux centres hospitaliers et scolaires et mêmes judiciaires. Mais, par faute de moyens, cette assistance sociale est très limitée, pour ne pas dire inexistante.

Quant aux ONG, c'est dans le domaine de l'intégration sociale que leurs actions sont les plus évidentes et les plus efficientes. Il existe plusieurs organisations dont le combat contre l'exclusion sociale est très remarquable et qu'il convient de signaler. C'est le cas notamment des organisations religieuses qui jouent aujourd'hui les premiers rôles en matière de protection et d'intégration des groupes marginalisés dans les villes et les campagnes. Ces organisations interviennent dans les domaines de la santé, de l'éducation, de la nutrition et même de l'assistance financière et matérielle. Leur action s'est accrue avec la dévaluation du franc CFA.

A Pahou, site du Centre régional pour le développement et la santé (CREDESA), les critères d'indigence sont définis par les populations locales. Cette collaboration a un double avantage: elle permet de désigner ceux qui sont réellement indigents malgré les stigmates sociaux reliés à ce statut, mais aussi elle facilite le contrôle de l'indigent lors d'un changement de situation économique de ce dernier. La pression sociale aide l'individu déclaré indigent à ne pas s'installer dans cette situation. Au CREDESA, les populations capables de contribuer à un fonds de sécurité sociale acceptent facilement l'idée que ces indigents puissent bénéficier gratuitement des prestations.

Un autre exemple est celui de la Maternité Lagune de Cotonou. Devant les difficultés quotidiennes de l'administration de la maternité au sujet des femmes sur le point d'accoucher et n'ayant aucun moyen de payer les médicaments de première nécessité, le Directeur de la maternité a ouvert un cahier de dons. Ces dons provenant de gens plus aisés sont consignés dans un fichier avec le nom de la bénéficiaire et les médicaments administrés à cette dernière. C'est là une forme d'assistance informelle.

Cependant, plusieurs contraintes empêchent la mise sur pied d'une véritable politique d'assistance sociale pour les groupes marginalisés:



  • Manque d'informations suffisantes et fiables sur les groupes déterminés. En effet, il n'existe pas encore d'études quantitatives et qualitatives sur les différents groupes vulnérables qui puissent permettre des actions véritablement ciblées.

  • Absence d'un cadre institutionnel opérationnel qui puisse coordonner les actions des différentes institutions intervenant dans la lutte contre la pauvreté et l'intégration des groupes marginalisés. Les actions menées sont sectorielles et/ou ponctuelles, ce qui entraîne sur le terrain des chevauchements d'actions et des gaspillages d'énergies.

  • Insuffisance de ressources humaines, matérielles et financières au niveau des structures étatiques d'intervention. La plupart des structures publiques intervenant dans le domaine de l'animation sociale souffrent de l'insuffisance en ressources humaines, matérielles et financières par rapport à l'ampleur des tâches à exécuter. Là où il en existe, la formation n'est pas toujours appropriée et les moyens d'intervention sont inadéquats. Le phénomène est encore plus accentué au niveau des ONG nationales qui sont pour la plupart de formation récente et n'ont pas encore accumulé l'expérience nécessaire pour la conception et la mise en oeuvre de politiques sociales cohérentes (Ministère du Travail, 1994).

2.3 L'assurance sociale pour le secteur formel

Le système de protection sociale en vigueur au Bénin et couvrant l'assurance sociale dans le secteur formel est composé d'un régime général géré par L'Office béninois de sécurité sociale et d'un régime spécial destiné aux fonctionnaires civils et militaires.

Le Régime général de l'Office béninois de sécurité sociale s'applique aux salariés du secteur privé, aux travailleurs des collectivités locales et au personnel de droit privé soumis au Code du travail. Il couvre six des neuf branches définies par la Convention n 102 de l'Organisation internationale du Travail (OIT) à l'exception de l'assurance chômage, de l'assurance maladie et des indemnités de maladie. Ce sont: les prestations de vieillesse, les prestations d'invalidité, les prestations de survivants, les prestations aux familles, les prestations de maternité, les prestations de risques professionnels. Ces prestations sont financées pour la plupart par des cotisations versées par les employeurs et les assurés eux-mêmes. Un lien de réciprocité existe entre lesdites cotisations et les prestations.

Quant au régime des fonctionnaires géré par l'Etat, il s'applique aux travailleurs civils et militaires recrutés dans un des corps réguliers de la fonction publique ou de l'armée. Il est financé par les ressources publiques de l'Etat et couvre effectivement les allocations familiales et les pensions. Les branches d'assurance-maladie et de la réparation des risques professionnels existent pour les fonctionnaires où ces derniers assument 20 pour cent des coûts de soins de santé, à l'exception des frais pharmaceutiques. Les deux systèmes ne couvrent donc qu'une partie infime de la population, 10 pour cent environ. Cet état de chose est lié au caractère désarticulé de l'économie nationale caractérisée par une prépondérance du secteur informel.

Cependant les bases structurelles et législatives d'une véritable sécurité sociale de base existent au Bénin. Ce qui reste à faire, c'est l'extension du système au secteur non structuré composé des paysans, des artisans, des commerçants et autres indépendants; ces composantes de la population sont tout aussi exposées que celles du secteur structuré aux risques sociaux indemnisés par l'OBSS.

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3. Les projets pilotes

3.1 Description des zones

Les projets pilotes ont pour but d'expérimenter la sécurité sociale de base, en particulier pour le secteur informel. Trois zones ont été retenues comme sites des projets pilotes: Cotonou, Pahou, Parakou.

Cotonou

La population très hétérogène de Cotonou empêche l'utilisation d'une approche de zone. Le choix de Cotonou s'imposait compte tenu de sa dimension économique et sociale (capitale économique et forte densité) mais aussi de la dynamique du secteur informel.

Une enquête préliminaire a permis d'identifier quelques groupes avec lesquels le projet pourrait fonctionner, comme le Syndicat national des pêcheurs, agriculteurs, éleveurs, artisans, vendeurs des marchés et assimilés du Bénin (SYNAPAAB), qui comprend approximativement 152.000 membres, dont à peu près 50 pour cent de femmes, sur tout le territoire national. Affilié à l'Union nationale des syndicats des travailleurs du Bénin (UNSTB), le SYNAPAAB se révèle très dynamique dans le secteur informel avec un degré d'organisation supérieur aux autres groupes.

De plus, ce syndicat prend de nombreuses initiatives dans le domaine des soins de santé

et crédits. C'est ainsi que les droits d'adhésion de 1 000 FCFA (2 $) et la part sociale de 2 000 FCFA (4 $) sont obligatoires pour tout membre. Une cotisation de 100 F cfa par mois est fixée pour les soins de santé, et un compte bancaire est ouvert au nom de l'association.

Le 2 septembre 1996, les agriculteurs, pêcheurs, éleveurs, artisans, vendeurs, vendeuses et assimilés du Bénin regroupés au sein du SYNAPAAB, ont créé une association pour le développement de leur bien-être. Dénommée "Association nationale de crédits épargnes pour le développement des paysans, artisans, agriculteurs, éleveurs et pêcheurs (ANCED), elle a pour objectifs immédiats:

  • l'octroi des crédits aux membres pour faciliter leurs activités économiques,

  • susciter l'esprit d'épargne des membres en vue de créer des réserves financières,
  • la construction d'un centre de santé pour les membres, etc.

Ce syndicat possède une réelle capacité d'organisation, de mobilisation et de gestion. Le dynamisme des principaux responsables et leur charisme constituent des gages d'efficacité et d'efficience tout au moins à court terme.

Un autre syndicat capable de contribuer à la phase expérimentale est le Syndicat national des travailleurs des imprimeries du Bénin (SYNTRA-IPB). Avec ses 2 000 membres ayant des revenus stables, cette catégorie nous permettra d'expérimenter le prélèvement automatique des cotisations sur les salaires. Cette option est le choix clairement indiqué par les principaux responsables de ce syndicat. Les modalités de cette option seront définies avec l'accord des patrons.

A ce propos des contacts préliminaires avec l'Organisation nationale des employeurs du Bénin (ONEB) ont permis de constater une forte sensibilisation des employeurs quant à l'édification d'une mutuelle de santé. La création d'un centre de santé et d'une mutuelle de santé sont des perspectives envisagées par les employeurs. L'adhésion du syndicat des employeurs est une garantie supplémentaire et un élément facilitateur dans les schémas possibles qu'envisage le projet.

Il faut noter que la participation des femmes dans ces différents syndicats est assez importante. C'est dans ce sens que nous comptons intégrer dans le projet pilote à Cotonou l'Union des femmes méthodistes du Bénin, qui est l'une des associations les plus dynamiques sur le territoire, avec une couverture nationale soutenue par des réseaux fiables quant à la gestion

de l'association et efficace quand il s'agit de mobiliser et de sensibiliser les membres. Créée depuis 1958, l'UFMB a obtenu le statut d'Organisation non gouvernementale (ONG) compte tenu de son engagement à promouvoir le développement de la femme et de la famille. L'un des objectifs de l'UFMB est d'amener chaque groupe de femmes à s'autofinancer et s'autogérer en procédant par:

  • des cotisations individuelles des membres,
  • la prise de décision sur les activités à mener,
  • la répartition des rôles entre les membres,
  • le point périodique des activités financières avec l'appui technique du comptable.

Il existe déjà une entraide entre les femmes quant aux coûts des soins de santé (tontines pour aider les femmes malades). L'UFMB a en son sein des groupements (40) qui fonctionnent à travers tout le pays.

Pahou

Le choix de Pahou est la conséquence de l'existence d'un Centre régional pour le développement et la santé dont les performances et les initiatives sont reconnues positives par l'ensemble de la population locale et par les ONG et les organisations internationales. Donc, la plupart des conditions requises se trouvent réunies dans cette commune rurale qui est à 40 km de Cotonou et d'accès facile. Comme le soulignait le Professeur Alihonou, directeur du CREDESA (Centre régional pour le développement et la santé), les populations se sont déjà organisées pour mener différentes actions (construction d'une maternité financée par les populations elles mêmes).

En réalité, depuis 1983, avec une communauté de 70 000 habitants (Pahou, Ouidah et autres communes) une expérience de promotion des soins de santé a été organisée. Des activités sanitaires, on est passé à des activités de développement à savoir l'encadrement des paysans, l'éducation des adultes, la scolarisation des enfants et des jeunes, la création des banques communautaires, etc. Tout ceci s'appuie sur la participation des communautés à la prise de conscience de leurs problèmes, à la réalisation des solutions et à l'éducation à l'utilisation de leur revenu.

Il s'agit en fait d'une approche de développement intégrée à la base impliquant un ensemble d'actions liées à la promotion de la santé. Ces actions sont entreprises par une équipe multidisciplinaire (médecins, agronomes, sociologues, économistes) avec la participation effective des communautés. Ainsi l'expérience du Projet de développement sanitaire de Pahou (PDSP), devenu en 1989 "Centre régional pour le développement et la santé" est celle d'une décennie de gestion pragmatique de projet de développement (CREDESA, 1993), soutenue par le ministère de la Santé.

Les résultats sont éloquents: dans cette communauté, la couverture vaccinale est passée de 11% en 1985 à 90% en 1987, et se maintient à ce taux; les taux de mortalité infantile sont passés de 110 pour mille à 30 pour mille, et dans les zones couvertes les centres de santé ont progressivement pris charge de la plupart des interventions essentielles des soins de santé primaires.

Pour ce qui est du projet de sécurité sociale, le CREDESA est tout à fait désigné pour une expérimentation d'approche rurale, compte tenu de son niveau d'organisation et de la compétence de l'équipe multidisciplinaire soutenue par une longue expérience. Selon le Bulletin d'information du CREDESA dans les enquêtes préliminaires pour la tarification des soins et le mode de leur financement, les populations avaient, dans un premier temps, rejeté l'idée d'assurance-maladie (500 F cfa/an/tête soit 1$) émise par l'équipe du projet au profit du paiement à l'acte. Aujourd'hui la tendance est inverse, dans la mesure où ce sont les populations elles-mêmes qui réclament cette assurance-maladie. Ce changement s'explique par les difficultés que rencontrent les populations, par la capacité actuelle de cotisation consécutive aux activités génératrices de revenus et par le travail de sensibilisation mené par l'équipe multidisciplinaire.

C'est dire que les besoins sont réels et l'opportunité d'un projet de sécurité sociale n'est plus à démontrer. Sa justification se trouve aussi dans le rapport entre la capacité des infrastructures du CREDESA et l'utilisation qui en est faite par les populations. Cependant, une augmentation de l'utilisation a été observée, consécutive à la création des banques communautaires. En réalité, les crédits accordés par les banques communautaires permettent de créer des activités génératrices de revenus, facilitant ainsi le paiement des prestations par les populations. Il est clair que la création d'une mutuelle de santé augmenterait considérablement le taux d'utilisation du centre de santé.

Parakou

Etant l'une des villes moyennes du Bénin, le choix de Parakou s'explique par sa particularité de ville très proche du village. Parakou n'est ni complètement une ville ni complètement un village. Ceci est intéressant pour un projet qui a l'ambition de se développer à la fois dans les grandes villes du Bénin mais aussi dans les villages. Parakou sera un laboratoire à l'image du pays où la rupture entre ville et village paraît à certains endroits floue et à d'autres brutale. Un autre paramètre qui milite en faveur du choix de Parakou est le développement du secteur informel et l'existence de plusieurs coopératives et ONG.

L'exemple de la Coopérative Béninoise de Matériel Agricole (COBEMAG) qui a son siège à Parakou est l'un des plus édifiants dans le département. Créée en 1974, avec 725 membres au Bénin dont 70 à Parakou, cette petite coopérative fait preuve de vitalité et de pragmatisme, fruits d'un partenariat efficace entre les artisans, les caisses locales de crédit agricole mutuel et les bailleurs de fonds.

L'existence d'une mutuelle de crédit soutenue par la Caisse Locale de Crédit Agricole mutuel (CLCAM) est l'une des initiatives positives à mettre à l'actif de cette coopérative. La mise en place d'une sécurité sociale sera relativement facile à réaliser compte tenu de la disponibilité et de la sensibilisation de ces petites mais nombreuses coopératives (plus de 100).

3.2 Organisation et structures administratives dans les zones

Dans nos différentes enquêtes socioculturelles dans les zones pour déterminer les structures organisationnelles possibles pour recouvrer les primes et administrer un système d'assurance, la volonté clairement exprimée des populations cibles est d'avoir une gestion locale dans laquelle sont impliquées les populations. Les syndicats, associations et coopératives que le projet envisage d'impliquer dans la gestion et l'administration du système, ont fait la preuve de leur capacité à gérer un groupe et à collecter des cotisations.

Cependant, plusieurs syndicats et associations ont évoqué la CLCAM et le COGEC (Comité de gestion de centre de santé) comme possibles structures administratives capables de collecter les cotisations et de gérer les prestations. Dès lors, ces structures feront partie du schéma

que nous comptons appliquer dans les projets pilotes et ensuite à travers tout le pays.

La CLCAM est une émanation de la FECECAM (Fédération des caisses d'épargne et crédit agricole mutuel du Bénin ). La FECECAM Bénin c'est donc:

  • 1 fédération nationale
  • 7 unions régionales
  • 67 caisses locales (CLCAM)
  • 166 000 sociétaires
  • 13,4 milliards de FCFA de dépôts collectés
  • 9,1 milliards de FCFA de crédits en cours
  • 60 000 emprunteurs
  • 1 250 sociétaires élus
  • 312 salariés.

La FECECAM opère avec un réseau à 3 niveaux. Dans les communes et les sous- préfectures la CLCAM collecte l'épargne locale et accorde des prêts à ses sociétaires. Au niveau départemental, l'URCLCAM (Union régionale de CLCAM) définit la politique régionale des CLCAM, gère leurs excédents de trésorerie, appui et contrôle leurs activités. Au niveau national, la FECECAM définit la politique nationale du réseau, coordonne, appuie et contrôle les activités des CLCAM et des URCLCAM.

Quant aux Comités de gestion des formations sanitaires (COGES) ils sont le résultat de la nécessité de faire participer pleinement la communauté à la gestion des centres de santé. COGEC pour la structure centrale et communale et COGES pour les centres de santé de sous-préfecture, circonscription urbaine. Le comité de gestion de la commune (COGEC) assure la promotion et le développement de la participation communautaire aux activités de santé. Il participe à la gestion de la formation sanitaire.

Comme le soulignait à juste titre le Directeur de la Maternité Lagune de Cotonou, les comités de gestion peuvent servir de tremplin pour réaliser une mutuelle de santé. Dans la même perspective on peut se servir des Unités communautaires de développement (UCD) citées par le ministre du Plan M. A. Tévoédjè dans son programme national de l'emploi au Bénin (Phase 1, 1996), pour renforcer l'équipe de contrôle et de vulgarisation du schéma appliqué.

De même l'implication dans le projet des 482 centres de santé du Bénin est nécessaire. Un protocole d'accord avec ces centres permettra de bien définir les soins et les coûts. La grande majorité des populations concernées fréquente ces centres qui sont à proximité de leurs domiciles, contrairement aux grands hôpitaux.

A Cotonou, les centres qui sont fréquemment cités et qui ont le label de qualité sont:

  • St Jean
  • St Luc
  • Bethesta

Tous ces centres sont confessionnels. Le centre le plus fréquenté de Pahou est le CREDESA.

A la lumière de toutes ces informations de terrain et compte tenu des réponses et des observations faites par les associations, les syndicats, les responsables des centres de santé, et les caisses locales de crédit, on peut esquisser des schémas possibles de sécurité sociale pour le secteur informel et déterminer concrètement le travail à faire sur le terrain dès les premiers mois du projet.

On peut déjà estimer pour un modèle possible, que les cotisations soient collectées toutes les semaines, tous les mois, voire tous les ans selon le choix du groupe, par un responsable désigné par les membres. Ces cotisations seront directement versées à la CLCAM. Un accord ayant été au préalable signé avec les centres de santé choisis par les adhérents et dont la gestion paraît viable, les soins seront dispensés par ces centres habilités. Ces centres de santé auront une liste régulièrement mise à jour (naissance, décès, annulation de contrat) et les bénéficiaires disposeront d'un passeport avec photo des différents membres de la famille susceptibles de bénéficier des prestations. Les centres seront assistés dans le travail de mise à jour et de contrôle par le COGEC.

La facture des prestations sera envoyée par les centres à la CLCAM qui règlera le montant. Pour les médicaments, les centres de santé rédigeront une ordonnance conformément à la liste des médicaments génériques établis pour chaque type de maladie. Le patient sera dirigé vers l'une des pharmacies choisies par le comité de gestion, l'assuré devra alors acquitter une somme symbolique au titre du ticket modérateur ( pour empêcher les abus ) et la pharmacie ne doit faire aucun crédit sur ce ticket modérateur. Bien entendu, la facture des médicaments utilisés par les assurés sera envoyée à la CLCAM. Ce schéma peut être appliqué aux trois zones du projet.

En supposant que ce schéma ait été retenu, une étude actuarielle se chargera alors dans les premiers mois du projet, de s'assurer de la viabilité du schéma retenu en fonction du niveau de cotisation des membres.

Si la capacité de cotisation des populations cibles est réelle, le montant des cotisations n'est cependant pas clairement défini, variant entre 1 000 FCFA (2 $) par an et 2 000 FCFA (4 $). Il conviendra d'harmoniser ce montant en fonction des bénéficiaires, de la composition du foyer etc. Ces critères seront définis dès le début du projet.

3.3 Le rôle de l'assistance sociale

La place de l'assistance sociale dans ce projet est aussi à définir. Il ressort de nos investigations sur l'assistance sociale à apporter aux personnes défavorisées les conclusions suivantes:

  • les structures étatiques doivent prendre en charge pour une bonne part le problème des défavorisés;

  • l'entraide communautaire est nécessaire;

  • les femmes enceintes et les handicapés doivent bénéficier en priorité de l'assistance sociale;

  • les critères d'éligibilité doivent être le manque de moyens financiers, l'abandon du mari ou de la famille, le handicap permanent;

  • pour empêcher la fraude et la corruption, l'accord du groupe ou du village doit être nécessaire pour bénéficier de l'assistance sociale, avec un droit de regard des responsables communautaires.

3.4 Le rôle de l'assurance sociale formelle

Concernant le rôle de l'assurance sociale formelle, des tentatives ont été faites par l'OBSS pour intégrer le secteur informel dans les régimes proposés par cet organisme mais sans succès, faute de moyens d'investigation. Lors du séminaire sur la sécurité sociale en Afrique francophone à Abidjan au mois d'octobre 1996, les représentants de l'OBSS ont manifesté leur volonté de participer à la mise en place de la nouvelle protection sociale pour le secteur informel. Mais l'encouragement de l'OBSS et de son ministère de tutelle dans la création des systèmes pilotes, ne doit pas faire oublier la crainte des populations de voir l'Etat trop impliqué dans la gestion.

Les règles du jeu seront cependant encadrées juridiquement par l'Etat avec, dans la mesure du possible, par la suite son appui technique (OBSS). En somme, nous recommandons que l'Etat évite de contrôler l'administration du système et d'en garantir de quelque façon que ce soit la viabilité financière, afin de diminuer les facteurs d'inefficacité et les subventions coûteuses que cela impliquerait.

Mais les résultats de ces expériences pilotes serviront sans aucun doute au système étatique de protection sociale dans son ambition d'élargir le système formel à d'autres catégories de travailleurs. C'est du moins la perception que nous avons eu dans les différents entretiens avec les autorités béninoises.

3.5 L'extension et la réplicabilité des projets pilotes

Après une longue période de crise politique et une dévitalisation de l'Etat, le Bénin est résolument engagé sur le chemin de la démocratie, servant même de modèle aux autres pays africains. L'engagement des bailleurs de fonds dans les programmes de développement témoigne d'une vitalité retrouvée.

Les rencontres avec les différentes autorités politiques, syndicales et associatives montrent une réelle volonté de contribuer à la réalisation du Projet. Il faut dire que ce Projet coïncide avec le programme national et les ambitions du nouveau gouvernement, mais répond surtout aux attentes des populations. Pour le ministère de la Santé, l'objectif premier reste l'accessibilité des populations aux soins de santé. Dans ce domaine, une politique de diminution du coût des soins de santé a été ou sera adoptée par le biais des centres de santé.

Le rôle des organisations

Dans les trois zones identifiées pour l'expérimentation, on peut estimer à 10 000 les adhérents dès la première année du projet. La réplication du schéma pourrait se faire rapidement, compte tenu de la structure d'organisation nationale des principaux groupes impliqués. Donc, au fur et à mesure de l'avancement du projet, de nouveaux groupes intégreront le système.

Le rôle des communes et du gouvernement

Dans la région de Pahou, on procédera par commune à l'extension de la couverture du projet pilote, avec l'appui des comités de santé et les organes de participation traditionnels existants. Ces organes sont:

  • les ménages

  • le Comité Villageois de Santé (CVS) ou le Comité de Santé de Quartier ( CSQ);
  • les groupements de femmes, les groupements de solidarité, les groupements de jeunes hommes et jeunes filles , le conseil des sages;
  • les coopératives villageoises;
  • le Comité Villageois de Développement (CVD) sera l'organe de coordination dans le village de l'extension.

Au niveau de la commune

  • le Comité de Gestion des services de santé de la Commune (COGEC);

  • les coopératives agricoles, de pêche et d'élevage;
  • la caisse locale de crédit agricole;
  • le comité de développement de la commune qui doit être l'organe de coordination à base communautaire.

Tous ces organes sont autant de courroies de transmission de l'information et de sensibilisation nécessaires dans l'extension et la réplication. La même stratégie sera utilisée pour l'extension à partir de Parakou, après l'intégration des différentes coopératives.

A priori, les groupes qui seront ciblés au cours de la phase d'expérimentation seront les travailleurs réguliers non couverts du secteur informel et les travailleurs indépendants. Ensuite, certaines catégories du secteur informel pourront être intégrées, comme les travailleurs à mi-temps, en fonction de leur capacité de cotisation. L'adhésion individuelle n'est pas souhaitable, parce que la réussite et la viabilité du projet repose pour l'essentiel sur la pression sociale et la discipline indispensable au bon fonctionnement d'un groupe. Lorsque survient un litige ou un abus quelconque des prestations, le groupe pourrait influencer positivement l'individu et prendre des dispositions adéquates.

Collaboration des partenaires de la sécurité sociale

Toujours dans le cadre de l'extension du projet, l'accord et l'avis positif de l'Organisation nationale des employeurs (ONEB) ayant été acquis, l'implication des patrons et par ricochet l'adhésion des employés de sociétés, s'inscriront dans les perspectives, mais toujours dans une option par groupe d'individus, par société etc.

Comme l'exprimait l'un des responsables patronaux, la coopération et l'investissement des employeurs seront d'autant plus efficaces que le système proposé serait simple et sans tracasseries administratives. La structure éclatée et décentralisée que suggère ce projet répond parfaitement au souhait des patrons, et s'inscrit résolument dans la nouvelle stratégie de développement intégrée à la base que réclament les groupes bénéficiaires et qu'approuvent les ONG.

Pour les autorités centrales (ministère du Travail, ministère du Plan, ministère de la Santé) et les responsables locaux dans les zones d'expérimentation, ce projet est opportun et applicable, mais leur crainte est qu'il s'arrête à cette étude, tant les besoins sont réels et urgents. Il s'agira dès lors, avec le concours des partenaires sociaux, des ONG et des compagnies d'assurance, de systématiser les résultats obtenus dans les différentes expériences du projet, pour ensuite les expliquer et les vulgariser.

C'est dans cette perspective qu'il est urgent d'insister sur la formation des différents partenaires de la sécurité sociale dès le début des expériences pilotes pour renforcer les politiques dans le secteur informel, certes hésitantes, mais suffisamment bien inspirées pour accompagner les initiatives de développement social.

Références

CREDESA. 1995. Bulletin d'informations du Centre Régional pour le Développement et la Santé. N 001 et N 003. (Cotonou)

Djigbènondé, O. 1995 Projet bénino-allemand de soins de santé primaires. (Cotonou, GTZ)

Gauthé, B. 1996. Étude sur les soins de santé en Afrique francophone. (Genève, BIT; document de travail, Département de la Sécurité Sociale).

van Ginneken, W. 1996. Social security for the informal sector: Issues and option and tasks ahead. Genève, BIT; working paper for the Interdepartment Projet on the urban informal sector.

INSAE / PNUD. 1995. La capacité d'adaptation des ménages béninois sous ajustement aux effets de la dévaluation du franc CFA. (Cotonou)

Ministère du Plan, de la Restructuration Economique et de la Promotion de l'Emploi. 1996. Programme national de l'emploi au Bénin. Phase 1 (Cotonou)

Ministère du Travail, de l'Emploi et des Affaires Sociales. 1994. Rapport national sur le Développement social. (Cotonou)

Ministère de la Santé. 1996. Statistiques sanitaires année 1995. (Cotonou)

OBSS. 1996. Note sur le Régime général de protection sociale et ses perspectives. (Cotonou)

Shaw, Paul, and Griffin, Charles, C, 1995. Le financement des soins de santé en Afrique subsaharienne par la tarification des services et l'assurance. (Banque Mondiale, Washington D.C.)



Annexe 1 Planification des activités principales du Projet (divisées en trimestres)

Remark: Not all the tables referred to in the text have been included in this Web document. In order to obtain a copy of the complete document, kindly contact the Social Security Department.



Annexe 2 Organisations et administrations participantes

Zones Organisations Administrations Adhérents

potentiels

1ère année



COTONOU

SINAPAAB

SYNATRA-IPB

ONEB

UFMB

C LCAM

UCD

COGES

COGEC

UCV

5000

2000

500

1000

PAHOU

CREDESA

CLCAM

COGEC

CVS

CSQ

UCD



1000

PARAKOU



COOPERATIVES

CLCAM

COGEC

UCD

500




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