Jugement n° 2906
Décision
1. L'OEB versera au requérant une indemnité de 3 000 euros pour tort moral. 2. Elle lui versera également la somme de 500 euros à titre de dépens. 3. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Considérant 7
Extrait:
Suite à sa promotion au niveau A5, le requérant a été informé que celle-ci résultait d'une erreur de dactylographie et que l'intention de l'Administration était de le promouvoir au niveau A4(2). En effet, sa promotion a été rapportée. Il a contesté cette décision mais le Président a décidé de la maintenir. Le Tribunal a considéré que, comme sa promotion au niveau A5 procédait d'une erreur purement matérielle et non d'une réelle intention de l'Administration, elle pouvait être rapportée. Il lui a néanmoins octroyé une indemnité pour tort moral. "La question centrale que conduit à examiner la présente affaire tient à déterminer si le Président pouvait légalement rapporter [...] la décision [...] ayant prononcé la nomination du requérant au grade A5. En l'absence de disposition du Statut des fonctionnaires qui régirait spécifiquement les conditions d'abrogation ou de retrait des décisions administratives, cette question ne peut être tranchée qu'en application des principes généraux du droit appliqués par le Tribunal."
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Statut et Règlement du personnel; Absence de texte; Promotion; Intention des parties; Erreur de fait
Considérant 8
Extrait:
"Selon ces principes, une décision individuelle relative à un fonctionnaire lie l'organisation qui l'a prise à son égard, et crée ainsi des droits au profit de l'intéressé, à compter du moment où elle lui a été communiquée dans les formes prévues par les dispositions applicables (voir, par exemple, les jugements 2112, au considérant 7 a), et 2201, au considérant 4). Elle ne peut dès lors, en règle générale, être rapportée qu'à la double condition qu'elle soit entachée d'illégalité et qu'elle n'ait pas encore acquis un caractère définitif (voir, notamment, les jugements 994, au considérant 14, ou 1006, au considérant 2). En outre, dans le cas particulier où une décision individuelle n'est pas créatrice de droits, elle peut, dans la limite autorisée par le respect du principe de bonne foi, être rapportée à tout moment (voir le jugement 587, au considérant 4)."
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 587, 994, 1006, 2112, 2201
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Retrait d'une décision; Droit applicable; Bonne foi; Abrogation; Promotion; Valeur obligatoire; Condition; Droit
Considérant 11
Extrait:
"[D]ès lors que la décision ayant promu le requérant au grade A5 résultait [...] d'une erreur de dactylographie, qui est une erreur purement matérielle, et non d'une véritable intention de son auteur, le Tribunal estime que celle-ci n'était pas de nature à créer des droits au profit de son bénéficiaire et pouvait, par suite, être ultérieurement rapportée. En effet, parmi les éléments constitutifs de la notion même de décision administrative figure, précisément, l'exigence qu'un tel acte corresponde bien à l'intention de son auteur. Si l'on ne saurait certes contester l'existence matérielle d'une décision ne répondant pas à cette exigence, il n'en importe donc pas moins de limiter, dans toute la mesure du possible, la portée conférée à un tel acte. Le Tribunal a d'ailleurs déjà eu l'occasion de juger qu'il lui appartenait, dans cet esprit, d'écarter l'application d'une décision procédant d'une erreur purement matérielle (voir le jugement 1111, au considérant 5), dans un cas d'espèce où était en cause la répétition de versements d'une indemnité attribuée à tort. Bien qu'il ne s'agisse pas ici tout à fait d'une question semblable, il convient, de la même façon, de dénier tout caractère créateur de droits à une décision résultant d'une telle erreur matérielle, afin de permettre à l'autorité compétente de la rapporter à tout moment. Adopter le parti inverse serait, au demeurant, susceptible de conduire à de graves anomalies au regard tant des intérêts mêmes de l'organisation concernée que du respect du principe d'égalité de traitement entre les fonctionnaires, dans la mesure où cette solution pourrait aboutir, dans certains cas extrêmes, à conférer un caractère définitif à des décisions individuelles aberrantes prononcées par pure inadvertance."
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 1111
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Egalité de traitement; Promotion; Intention des parties; Intérêt de l'organisation; Erreur de fait; Droit
Considérant 12
Extrait:
"Si le Président de l'Office est théoriquement investi, en matière de promotion, d'un pouvoir discrétionnaire, il résulte de la jurisprudence du Tribunal que, compte tenu du rôle essentiel dévolu à la Commission de promotions dans le cadre de la procédure prévue par l'article 49 du Statut des fonctionnaires et par différentes directives subséquentes, le Président ne peut cependant prononcer une promotion que si celle-ci a été recommandée par cette commission (voir les jugements 1600, au considérant 10, et 1968, aux considérants 16 et 17). En admettant même que le Président de l'Office ait été en droit de nommer un fonctionnaire au grade A5, en dehors des procédures habituelles, dans le cadre de l'exercice d'avancement annuel, une telle promotion n'aurait donc de toute façon pu être légalement décidée que si elle s'appuyait sur une recommandation préalable de la Commission elle-même émise en ce sens."
Référence(s)
Référence aux règles de l'organisation: Article 49 du Statut des fonctionnaires Jugement(s) TAOIT: 1600, 1968
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Recommandation; Promotion; Commission des promotions; Condition
Considérant 13
Extrait:
"Si la décision [de promotion du requérant au grade A5] ne présentait [...] aucun caractère créateur de droits du fait qu'elle procédait d'une erreur matérielle, elle ne pouvait pour autant être rapportée que dans certaines conditions imposées par le respect du principe de bonne foi. En effet, ce principe exige, en premier lieu, que le pouvoir de rapporter une décision ainsi entachée d'erreur matérielle s'exerce dès que l'autorité compétente a pris conscience de l'erreur en cause, et non à une date ultérieure choisie à sa convenance. Il résulte, en second lieu, de ce même principe que, dans l'hypothèse où le bénéficiaire d'une décision procédant d'une telle erreur matérielle n'a pas lui-même contribué à cette erreur, l'intéressé ne doit subir aucune conséquence défavorable de l'application de la décision en cause pendant la période où celle-ci n'avait pas encore été rapportée. En particulier, il importe ainsi que la rémunération éventuellement perçue par le fonctionnaire concerné sur le fondement de cette décision ne donne pas lieu à remboursement ou à toute autre forme de répétition."
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Bonne foi; Intérêt du fonctionnaire; Promotion; Erreur de fait; Condition; Conséquence; Droit
Considérant 16
Extrait:
"Quand bien même l'Organisation défenderesse était en droit [...] de rapporter la décision qui avait promu à tort le requérant au grade A5, il n'en demeure pas moins, en effet, que l'erreur matérielle ayant ainsi entaché sa décision initiale était, en elle-même, fautive. En soumettant à la signature du Président un projet de décision dont le contenu n'avait pas été convenablement vérifié, les services de l'Organisation ont fait preuve d'une grave négligence, qui est d'autant moins excusable que les actes individuels pris en matière de promotion revêtent un caractère particulièrement sensible. Or la succession de la notification au requérant de cette décision puis de celle l'ayant ultérieurement rapportée pour lui substituer un simple avancement au grade A4(2) était évidemment de nature à susciter chez l'intéressé une vive déconvenue. Ce faisant, l'OEB a ainsi manqué au devoir qui incombe à toute organisation internationale, en vertu de la jurisprudence du Tribunal, d'éviter d¿exposer l'un de ses fonctionnaires à un dommage inutile (voir, par exemple, les jugements 1526, au considérant 3, ou 2007, au considérant 11)."
Référence(s)
Jugement(s) TAOIT: 1526, 2007
Mots-clés
Décision; Décision individuelle; Préjudice; Négligence; Obligations de l'organisation; Intérêt du fonctionnaire; Promotion; Erreur de fait
Considérant 17
Extrait:
"Les diverses modalités de promotion au sein d'une organisation internationale comme l'OEB relèvent en effet d'un régime juridique complexe, dont les fonctionnaires ne peuvent être réputés posséder une parfaite maîtrise, et c'est évidemment à l'Organisation elle-même qu'il appartient de s'assurer de la légalité des décisions qu'elle prend en la matière."
Mots-clés
Procédure devant le Tribunal; Organisation; Obligations de l'organisation; Statut et Règlement du personnel; Promotion; Obligations du fonctionnaire
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