Chapitre 1 – Comment déterminer le salaire minimum?

1.1 Définition et objectifs

Le salaire minimum est défini comme «la rémunération minimale que l'employeur est tenu de payer aux salariés pour le travail effectué au cours d'une période donnée, et qui ne peut être réduite par une convention collective ou un contrat individuel.»1.

Cette définition renvoie à la nature contraignante du salaire minimum, quel qu’en soit le mode de calcul. Le salaire minimum peut être fixé de plusieurs manières: la loi, une décision de l’autorité compétente, une commission ou un conseil des salaires, un tribunal du travail ou les tribunaux. Il peut également être déterminé en donnant force de loi aux dispositions des conventions collectives.

Le but d’un régime de salaire minimum est de protéger les travailleurs contre les salaires excessivement bas. Il contribue à assurer à tous un partage juste et équitable des fruits de la croissance, et une rémunération de base à tous les employés qui ont besoin de cette protection. Le salaire minimum peut aussi être un élément d'une politique visant à éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités, y compris entre les hommes et les femmes, et promouvoir le droit à l'égalité de rémunération pour un travail de valeur égale.

Les systèmes de salaire minimum ne doivent pas être envisagés ou appliqués isolément, mais plutôt être conçus de manière à compléter et renforcer les autres politiques sociales et de l'emploi. Plusieurs types de mesures peuvent être utilisés pour lutter contre les disparités de revenus et les carences du marché du travail, y compris les politiques favorables à l'emploi, les transferts sociaux, et la création d’un cadre propice à la pérennité des entreprises.

Il convient également de distinguer entre les objectifs du salaire minimum ‒ qui fixe un taux plancher ‒ et la négociation collective, à laquelle les partenaires sociaux peuvent recourir pour convenir de salaires supérieurs à ce seuil. La Figure 1 illustre une répartition salariale hypothétique, comprenant un «espace de salaire minimum» et un «espace de négociation collective», qui peuvent servir à établir des normes minimales et fixer les salaires au-delà du seuil existant.

La Figure 2 montre que l'efficacité du salaire minimum dépend de nombreux facteurs, y compris: l’étendue de la protection accordée à tous les travailleurs engagés dans une relation d’emploi, notamment les femmes, les jeunes et les travailleurs migrants, indépendamment de l’arrangement contractuel auquel ils sont assujettis; les secteurs d’activité économique visés (champ d’application); la fixation et l’ajustement du salaire minimum à un niveau adéquat, tenant compte des besoins des travailleurs et de leur famille, d’une part, et des facteurs économiques, de l’autre (taux du salaire minimum); et le respect de la législation sur le salaire minimum par les employeurs (conformité).

Figure 1. Distribution des salaires

Légende: La Figure 1 montre la distribution salariale hypothétique d'un échantillon de 56 salariés avant l'introduction du salaire minimum. Le niveau des salaires est en abscisse et le nombre de salariés en ordonnée. La Figure montre l’éventail complet des salaires du marché, y compris une part relativement faible de travailleurs extrêmement mal payés, à l'extrémité gauche de la distribution des salaires; par exemple, un employé perçoit un salaire de 1 $, deux employés sont payés 3 $, tandis que cinq employés ont un salaire de 8 $. Le cercle rouge, appelé «espace de salaire minimum» montre que le système de salaire minimum devrait en principe cibler les salariés les moins payés, afin d'éliminer les «salaires excessivement bas». Le cercle bleu, dénommé «espace de négociation collective» illustre la possibilité de recourir à la négociation collective pour fixer les salaires au-dessus du seuil existant.

Figure 2. Principaux aspects d’un système de salaire minimum effectif 2


1 BIT, 2014, Systèmes de salaires minima, Etude d’ensemble des rapports sur la convention (no 131) et la recommandation (no 135) sur la fixation des salaires minima, 1970 (ci-après «Etude d’ensemble 2014»). Voir également les conclusions de la discussion tripartite sur ce rapport.
2 BIT, Policy Brief, Advances and Challenges in Labour Protection. Département des conditions de travail et de l’égalité.