Discours prononcé par M. Guy Ryder, Directeur général, à l’occasion de sa réélection, par le Conseil d’administration du BIT, pour un deuxième mandat de cinq ans à compter d’octobre 2017

Déclaration | Genève | 7 novembre 2016
Je souhaite remercier le Conseil d’administration pour la confiance qu’il me témoigne en m’élisant pour un second mandat en tant que Directeur général de notre Organisation.

Ma gratitude va en particulier à celles et ceux qui ont proposé – pour certains à deux reprises – ou soutenu ma candidature.

C’est pour moi une source de réelle satisfaction de constater, à la lecture du résultat du scrutin, que j’ai obtenu des votes émanant des trois groupes – gouvernements, employeurs et travailleurs.

J’ai donc plus que jamais lieu de réaffirmer ce que j’ai toujours dit jusqu’ici, à savoir que je continuerai, dans l’exercice de mes responsabilités, travailler avec tous les Etats Membres et les mandants de tous les groupes.

Le message à retenir à l’issue de ce vote est que nous sommes prêts à unir nos forces et à conjuguer nos efforts pour atteindre un but commun. Sauf erreur de ma part, il s’agit là d’un atout institutionnel majeur pour l’OIT et d’un capital politique précieux dont nous pouvons et devons tirer le meilleur parti possible.

Ces derniers mois, en prévision de cette élection, j’ai fait de mon mieux pour vous indiquer le plus clairement possible ce que l’OIT devrait faire au cours des cinq prochaines années, comment elle devrait s’y prendre et pourquoi il importe tant qu’elle réussisse.

Il est facile d’indiquer ce que doit faire l’OIT. Elle doit devenir un acteur plus efficace et plus influent au service de la justice sociale dans le monde entier. Et quand je dis plus influent, je veux aussi dire que nous ne pouvons pas nous contenter de changements mineurs. Nous devons faire en sorte que l’OIT soit beaucoup plus visible et fasse davantage entendre sa voix dans chaque pays et au sein du système international. Comment y parvenir? En continuant de viser l’excellence dans tout ce que nous entreprenons – activités de sensibilisation, conseils sur les politiques à suivre, prestations de qualité – et en ciblant notre action, avec la volonté de nous atteler aux questions vraiment importantes, celles pour lesquelles l’OIT peut et doit changer les choses. Pour réussir, nous devons innover, comme l’Organisation l’a toujours fait, sans jamais renoncer à affronter des situations qui sont de notre ressort au seul motif que la tâche est trop difficile, trop contraignante ou qu’elle nous oblige à sortir de notre zone de confort.

Et la raison pour laquelle nous devons relever ces défis et faire aboutir notre action est que l’instauration de la justice sociale ouvre des perspectives extraordinaires pour l’humanité, alors que son déni met réellement en danger – comme on peut déjà le constater – la stabilité de nos sociétés et la préservation de la paix.

Quoi que nous réserve l’avenir, il se jouera en grande partie dans le monde du travail. C’est non seulement là que l’on fabrique des marchandises et que l’on fournit des services, mais aussi là que se construit la justice sociale, que se forge le progrès et que se façonnent les sociétés. Et là encore que se commettent des injustices, que des esprits et des corps sont brisés et que les inégalités s’aggravent.

Notre présence ici témoigne de notre attachement commun aux valeurs et aux objectifs de l’OIT. Elle témoigne également de la certitude partagée que, lorsque les gouvernements, les employeurs et les travailleurs, tout en œuvrant à la défense de leurs intérêts légitimes, unissent leurs compétences et leurs forces respectives à la faveur d’un processus tripartite, nous avons toutes les chances de bâtir l’avenir que nous voulons pour nous-mêmes, pour les autres et pour les générations futures.

J’ai évoqué devant vous et en d’autres occasions les défis extraordinaires liés à la réalité de cette transformation profonde et sans précédent du monde du travail, qui semble susciter autant d’enthousiasme que de crainte, mais qui paraît, en tout état de cause, nous unir dans un même constat: l’heure est venue de réfléchir en profondeur à l’avenir du travail.

Le centenaire de l’OIT, que nous célébrerons dans un peu plus de deux ans, nous en offre précisément l’occasion. Tirer pleinement parti de cet événement, en appréhendant 2019 comme une étape charnière à l’issue d’un passé dont l’Organisation a tout lieu d’être fière mais aussi comme un jalon marquant la voie vers les réussites futures, constituera sans aucun doute le plus haut des sommets qu’il nous faudra gravir au cours des années à venir.

Et ce n’est qu’ensemble que nous y parviendrons. Les alpinistes s’encordent lors d’une ascension difficile. Les mandants tripartites de cette institution doivent faire de même. C’est ensemble que nous atteindrons ces sommets ou que nous échouerons. Que nous gagnerons ou que nous perdrons, comme un seul homme.

Selon moi, c’est ainsi que nous devrions accomplir toutes les autres tâches que nous nous sommes légitimement fixées. Le succès d’une entreprise durable qui offre des possibilités de travail décent doit intéresser tout autant un représentant des travailleurs qu’un représentant des employeurs, de même que la protection des droits d’organisation et de négociation collective incombe autant à l’employeur qu’au travailleur.

C’est dans cet état d’esprit que nous parviendrons à remplir avec succès la tâche cruciale qui consiste à veiller à la pleine exécution des responsabilités de l’OIT en matière de normes. La charpente normative de l’OIT doit être solide pour permettre à notre organisation de faire preuve d’autorité et de donner corps, au niveau mondial, à ses valeurs fondatrices par l’établissement de ses conventions et recommandations et le contrôle de leur application.

C’est dans ce même état d’esprit que nous pourrons guider le monde du travail sur la voie d’une transition juste vers un avenir durable sur le plan environnemental.

Et aussi que nous parviendrons à faire en sorte que le monde du travail offre les mêmes chances à tous, indépendamment du genre, de la race, de la nationalité ou de toute autre caractéristique personnelle qui ne concerne nul autre que soi-même.

Et c’est toujours dans le même état d’esprit que toutes les vertus du tripartisme pourront être exploitées pour faire de l’OIT, forte de son rôle moteur dans l’élaboration du Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’un des partenaires clés dans l’action concertée mise en œuvre par le système multilatéral pour veiller à la réalisation de ce programme. Notre mandat nous l’impose, et nous le devons au système des Nations Unies et à sa nouvelle direction: nous ne pouvons faillir à la tâche.

Devant de tels défis et compte tenu des responsabilités qu’ils impliquent, il pourrait sembler difficile de ne pas ressentir de crainte. Mais il importe au contraire d’être prêt et déterminé.

Les quatre dernières années ont été marquées par un processus de réforme et d’amélioration de l’OIT, qui se poursuivra. Elles ont été pour moi des années d’apprentissage, dont je ne doute pas qu’il se poursuive lui aussi. Ces années ont également été synonymes de rapprochement et de création de liens de compréhension, de compromis et de convergence entre des points de vue souvent très éloignés sur des questions difficiles.
Nous devons ce succès à vous tous ici présents et à celles et ceux que vous représentez, et je vous demande de persévérer dans vos efforts pour ouvrir la voie vers de nouvelles réalisations.

En contrepartie, je m’engage à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour mériter la confiance que vous venez de me renouveler, à être à votre écoute, à répondre à vos remarques et à travailler aux côtés des formidables collègues que vous me donnez le privilège de diriger et sur les épaules desquels repose collectivement la charge des responsabilités que l’OIT a envers vous.

Je vous remercie.