Nouvelle étude de l'ONU sur les travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle et une identité de genre diverses en Asie du Sud-Est

Une étude de l’ONU note que la migration peut bénéficier aux travailleurs ayant une orientation sexuelle, une identité et une expression de genre différentes en Asie du Sud-Est, mais que la discrimination demeure.

Communiqué de presse | Bangkok, Thaïlande | 1 septembre 2022
© R. Setiawan / OIT
Une entreprise de confection gérée par une communauté transgenre et Emi 
BANGKOK, Thaïlande (OIT Infos) – La migration offre aux travailleurs d'Asie du Sud-Est ayant des orientations, identités et expressions sexuelles (OSIG) diverses une meilleure qualité de vie. Cependant, ils subissent encore des discriminations à de multiples niveaux, selon une nouvelle étude de l'ONU.

Le nouveau rapport intitulé A very beautiful but heavy jacket: The experiences of migrant workers with diverse sexual orientation, gender identity and expression in South-East Asia (uniquement disponible en anglais)  a été publié par l'Organisation internationale du Travail (OIT) en collaboration avec l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU Femmes) et Edge Effect.

Le titre – Un bel habit, mais lourd à porter – laisse entrevoir la complexité des expériences. Le rapport s'appuie sur des enquêtes et des entretiens avec 147 travailleurs migrants concernés qui travaillent dans la construction, la fabrication, l'agriculture, le commerce de détail, l'hôtellerie et le divertissement pour adultes. Le rapport explore leurs expériences tout au long du parcours de travail des migrants, depuis les pays d'origine comme le Cambodge, le Myanmar, les Philippines et le Viet Nam jusqu'aux pays de destination en Asie du Sud-Est (en particulier la Thaïlande), en Asie de l'Est et au-delà.

Le rapport note que les personnes ayant une orientation sexuelle et une identité de genre diverses décident de migrer pour des raisons similaires à celles de nombreux autres travailleurs migrants. 72 pour cent des travailleurs migrants interrogés dans le cadre de cette étude ont déclaré que l'avancement économique était leur principale motivation pour migrer; 63 pour cent ont indiqué que le fait de travailler à l'étranger leur permettait de répondre à leurs besoins fondamentaux, d'envoyer de l'argent à leur famille, d'économiser de l'argent pour ouvrir des entreprises ou acheter des terres dans leur pays d'origine, et d'acquérir des compétences et des expériences qui amélioreraient les possibilités d'emploi.

«La première chose que je voulais est d'avoir un revenu stable pour subvenir à mes besoins. Ce serait formidable si je pouvais trouver un partenaire pour me soutenir dans les difficultés rencontrées là-bas. Et bien sûr, je voulais pouvoir vivre librement et m'exprimer.» – Homme gay, Viet Nam.

L'étude révèle également que, parmi les travailleurs migrants interrogés, 41 pour cent ont déclaré que le fait d'échapper à la violence, à la discrimination ou aux restrictions de la liberté personnelle chez eux était une motivation; et 59 pour cent ont déclaré que leur qualité de vie était plus élevée dans leur pays de destination que dans leur pays d'origine.

«Bien sûr, j'étais anxieux, même si je n'ai pas fait mon coming-out. C'est comme si je mettais une très belle mais lourde veste chaque fois que je vais au travail. Je devais me cacher tout le temps, j'avais peur chaque fois que quelqu'un parlait de LGBT. J'étais triste, ou je pensais au hasard que quelqu'un parlait de moi derrière mon dos.» – Homme bisexuel, Viet Nam.

«Les Philippines sont un pays fortement chrétien, la famille n'est en général pas extrêmement ouverte en termes de diversité et de relations sexuelles. J'ai besoin d'aller dans un endroit où je peux être la femme que je suis et où je peux faire avancer mes visions et mes objectifs dans la vie.» – Femme trans, Philippines.

Bien que des acronymes tels que LGBTIQ soient souvent utilisés de manière générique, les personnes d’orientation sexuelle et d’identité de genre diverses ne forment pas un groupe homogène. Les travailleurs migrants gays et lesbiennes peuvent avoir des motivations et des expériences différentes de celles des hommes et femmes trans et des personnes ayant une identité de genre non binaire, et différentes de celles des personnes ayant une autre diversité de genre et de sexualité. L'étude montre que la discrimination sur le lieu de travail dans les pays d'origine est citée comme une motivation pour le travail migrant plus souvent par les personnes transgenres et ayant une diversité de genre (85 pour cent), de même que la discrimination au niveau de la communauté (52 pour cent); les gays et les lesbiennes (26 pour cent et 22 pour cent) ont signalé moins de cas de discrimination au niveau de la communauté.

S.E. David Daly, ambassadeur de l'UE au Royaume de Thaïlande, a déclaré: «L'Union européenne finance le programme Safe and Fair pour renforcer et protéger les droits des travailleurs migrants. Il est important de reconnaître que les travailleurs migrants ayant une orientation, une identité et une expression sexuelles différentes peuvent être confrontés à des défis supplémentaires et à la discrimination dans leur parcours migratoire. Ce rapport contribuera à combler le manque de connaissances sur les expériences des travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle, une identité et ou une expression de genre différentes et constituera la première étape du renforcement des politiques et programmes pertinents existants.»

Les travailleurs migrants avec une orientation sexuelle, une identité et une expression de genre diverses subissent au moins deux formes de discrimination: une discrimination liée à leur orientation sexuelle, et/ou leur identité et expression de genre, avec des conséquences qui leur sont spécifiques; et une discrimination liée à leur statut de migrant, qui affecte tous les travailleurs migrants, mais qui ont des conséquences distinctes pour les travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle, une identité et une expression de genre différentes.

De nombreux travailleurs migrants évitent donc de faire part de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre pour leur propre sécurité et par crainte que le fait d'être «out» ne compromette leurs chances de trouver un emploi sûr. L'étude montre que 32 pour cent des participants ont pris des mesures pour dissimuler leur orientation sexuelle et leur identité de genre, soit occasionnellement soit de façon permanente, y compris les personnes transgenres qui s'habillent pendant le transit selon le sexe qui leur a été attribué à la naissance.

Emily Dwyer, auteur principal de l'étude, a déclaré: «Il y a très peu de soutien disponible pour les travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle, une identité et une expression de genre différentes, avant leur voyage ou dans les pays de destination. La plupart des prestataires de services ne forment pas leur personnel à fournir un soutien spécifique, et il existe peu de politiques ou de financements pour soutenir le développement de services sûrs et pertinents. Ainsi, les travailleurs migrants à l’orientation sexuelle et identité de genre différentes qui sont victimes de discrimination et de violence n'ont souvent nulle part où aller et personne à qui parler, et cela doit changer.»

Sur la base de ses principales conclusions, l'étude souligne la nécessité d'efforts de collaboration pour garantir l'inclusion et l'égalité des chances pour tous les travailleurs migrants. Pour tenter de renforcer et de protéger les droits des travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle et/ou une identité de genre diverses dans la région de l'ASEAN, tant dans les pays d'origine que dans les pays de destination, le rapport détaille ci-dessous une série de recommandations pour aider à obtenir des résultats plus favorables.
  • Réforme des politiques pour réaffirmer que les principes des droits de l'homme inscrits dans les instruments des Nations unies relatifs aux droits de l'homme s'appliquent à tous;
  • Renforcer les connaissances et les capacités des principales parties prenantes;
  • Tirer parti de services et d'informations inclusifs pour tous les travailleurs migrants;
  • Assurer une programmation sensible au genre pour aller au-delà du binaire du genre;
  • Assurer un recrutement équitable pour tous les travailleurs migrants;
  • Assurer la disponibilité de programmes inclusifs pour les travailleurs migrants ayant une orientation sexuelle et/ou une identité de genre différentes.

Contact media:

Pichit Phromkade
Chargée de communication, Programme pour la sécurité et l'équité
Bureau régional de l'OIT pour l'Asie et le Pacifique
Email: phromkade@ilo.org, Mob: +66 89 616 0442


* Un bel habit, mais lourd à porter: Les expériences des travailleurs migrants ayant une orientation, une identité et une expression sexuelles diverses en Asie du Sud-Est.