VIH et Protection sociale

Sri Lanka: une initiative audacieuse permet aux patients affectés par le VIH d’obtenir une couverture santé

Pour la première fois, les principales compagnies d’assurance du Sri Lanka vont couvrir les frais médicaux liés au VIH. Cette initiative – initiée par l’OIT – se traduit par un accès facilité au traitement et une meilleure qualité de vie pour les patients séropositifs et leur famille.

Article | 7 juillet 2014
GENÈVE (OIT Info) – A Colombo, Palitha Bandara gère une entreprise d’achat et de vente de prêt-à-porter qui lui apporte un modeste revenu. Il y a huit ans, il a été diagnostiqué séropositif au VIH.

Jusque très récemment, son diagnostic positif au VIH l’excluait de l’assurance santé et il ne touchait aucun remboursement pour les frais médicaux liés au VIH. Pour les personnes qui se trouvent dans la situation de M. Bandara, cela a souvent de terribles répercussions financières pour elles et leur famille.

Toutefois, dans le cadre d’une initiative menée par l’Organisation internationale du Travail (OIT), quatre compagnies d’assurance du Sri Lanka ont à présent supprimé leurs clauses d’exclusion liées au VIH. Ces compagnies, à savoir Janashakthi Insurance PLC, People’s Insurance Ltd, Alliance Insurance Pvt Ltd et Co-operative Insurance Company Ltd, vont dorénavant payer les dépenses médicales de ceux qui vivent avec le virus.

Ce revirement politique a bouleversé la vie des nombreuses personnes qui sont touchées par le VIH dans le pays. Cela signifie que les frais engagés – comme les dépenses liées aux trajets jusqu’aux centres de soins – sont désormais couverts.

«Cela va être très utile pour les personnes séropositives en cas d’urgence médicale. Cela devrait aussi permettre d’améliorer la qualité de vie, pour nous et nos familles, et de réduire la stigmatisation et la discrimination à notre encontre», déclare M. Bandara qui est aussi membre de Sri Lanka’s Positive Hopes Alliance, un réseau de personnes vivant avec le VIH.

Impact sur les frais engagés

Chandra Schaffter
Chandra Schaffter, fondateur et vice-président de Janashakthi Insurance PLC, montre combien l’attitude des assureurs a évolué en ce qui concerne la politique de couverture santé.

«De mon point de vue, le VIH n’est pas très différent du diabète, du cancer ou de l’insuffisance rénale … il n’existe pas de véritable raison de le traiter différemment. L’assurance est censée couvrir des événements inattendus et pas des certitudes», explique-t-il.

Au cours des dernières années, l’OIT a plaidé pour un dialogue social avec les assureurs au Sri Lanka.

En août 2013, Indira Hettiarachchi, Coordinatrice nationale du projet de l’OIT au Sri Lanka, a été invitée à s’exprimer devant le forum trimestriel des PDG du pays sur les raisons économiques et sociales d’inclure les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) dans les polices d’assurance.

Soulignant que la couverture du VIH n’alourdirait pas énormément les coûts pour les compagnies, l’OIT a présenté des arguments humains et économiques, appuyés par des faits, et rappelé que de meilleures politiques permettraient d’éviter que ces personnes ne sombrent dans la pauvreté. La logique l’a emporté. De ce fait, plusieurs PDG ont décidé de réviser la politique de leur société.

Ce mouvement des assureurs est considéré comme une première étape du défi qui consiste à amener l’ensemble des 20 compagnies d’assurance sri-lankaises à abandonner leurs clauses d’exclusion relatives au VIH.

C’est une étape très importante sur le chemin de l’amélioration de la protection sociale pour les personnes infectées et affectées par le VIH.
«C’est une étape très importante sur le chemin de l’amélioration de la protection sociale pour les personnes infectées et affectées par le VIH. Nous avons bon espoir que d’autres sociétés d’assurance vont rejoindre cette initiative, qui est un pas décisif vers l’élimination des discriminations», déclare le Directeur du Bureau de l’OIT pour le pays, Donglin Li.

Recommandations de l’OIT

Ce progrès du secteur de l’assurance est conforme aux recommandations d’une récente étude de l’OIT, ACCESS to and EFFECTS of social protection on workers living with HIV and their households (L’accès à la protection sociale et ses effets sur les travailleurs vivant avec le VIH et leur famille). L’étude, présentée par l’OIT en juin 2014 à Genève, a été menée dans quatre pays, le Guatemala, l’Indonésie, le Rwanda et l’Ukraine.

Selon l’étude, le secteur public joue un rôle prédominant dans la protection sociale. Mais la majorité des personnes vivant avec le VIH, en particulier les femmes et les personnes transgenre, n’en bénéficient pas parce qu’elles ont une propension supérieure à travailler dans l’économie informelle, et souvent sans contrat de travail.

Le rapport relève le problème du niveau élevé des frais engagés, y compris les coûts de transport, pour accéder aux médicaments et aux traitements antirétroviraux des infections opportunes fournis gratuitement par les pouvoirs publics.

Au-delà des frontières sri-lankaises

«Il est extrêmement important que le secteur privé complète l’effort des pouvoirs publics et étende l’assurance santé aux PVVIH. J’espère que l’initiative des compagnies d’assurance sri-lankaises sera dupliquée dans d’autres pays également», affirme Alice Ouedraogo, Directrice du Programme de l’OIT sur le VIH/sida et le monde du travail (ILOAIDS) à Genève.

On pourrait en faire davantage encore pour accroître l’impact de la protection sociale pour les personnes comme M. Bandara. Au-delà d’une meilleure assurance santé, cela comprend un appui combiné en vue d’améliorer le revenu, les moyens de subsistance et l’emploi. Cependant, au Sri Lanka, l’extension de la couverture de l’assurance santé correspond à un ambitieux pas en avant.

«Cette intervention lève les obstacles financiers à l’accès au traitement et aux services connexes dans le secteur privé, élargissant le champ d’application du traitement, de la prise en charge et du soutien dans le domaine du VIH», conclut Dayanath Ranatunga, responsable pays de l’ONUSIDA. «C’est une formidable réussite de la réponse du Sri Lanka au VIH.»