Demande de compétences

L’instabilité des marchés du travail accentue les inégalités

Un économiste de l’OIT explique en quoi la disparition des emplois moyennement qualifiés modifie le marché du travail à travers le monde et comment l'éducation constitue un des outils permettant de réduire les inégalités en matière de revenus.

Audio | 19 mars 2015


Le monde du travail connaît des changements majeurs dans la demande de compétences.

Selon les Perspectives pour l’emploi et le social dans le monde 2015 de l’Organisation internationale du Travail, les emplois moyennement qualifiés comme la comptabilité et le secrétariat sont sur le déclin. Cela est dû au fait que, dans nos économies mondialisées, beaucoup de ces tâches peuvent désormais être exécutées par des ordinateurs. Où se trouvent donc les emplois maintenant?

L’économiste de l’OIT, Christian Viegelahn, explique que de nombreux emplois sont dorénavant situés aux deux extrémités de l’échelle des compétences:

«Dans les économies développées surtout, la proportion des emplois non-routiniers, faiblement qualifiés, comme les emplois dans les services de sécurité et de soins à la personne, et celle des emplois cognitifs hautement qualifiés et non routiniers, comme les avocats et les ingénieurs en génie logiciel, ont augmenté.»

Avec la perte de nombreux emplois moyennement qualifiés, les travailleurs, en particulier dans les pays développés, se retrouvent à briguer des postes en bas de l’échelle qui ne paient généralement pas très bien. Cela aboutit à de plus fortes inégalités de revenus.

M. Viegelahn ajoute:

«Oui, en effet, cela peut conduire à plus d’inégalités de revenu et poser problème puisque ces disparités ont un effet négatif sur les perspectives de croissance économique et de création d’emplois à moyen terme.»

Et dans les pays en développement – comment s’en sortent les gens pour trouver du travail?

M. Viegelahn répond que cela dépend souvent du niveau d’instruction de la personne:

«De manière générale, avec la polarisation de la demande soit vers des emplois peu qualifiés soit vers des emplois hautement qualifiés, les emplois très qualifiés comme avocat ou ingénieur ne sont pas faciles d’accès pour les travailleurs n’ayant pas de formation supérieure».

Avec la disparition des emplois moyennement qualifiés, il existe un risque que certains pays s’éloignent trop rapidement d’une économie basée sur l’industrie pour s’orienter vers une économie reposant sur les services.

Cette soi-disant désindustrialisation précoce inquiète les économistes comme M. Viegelahn:

«Cela peut bien sûr être une source de préoccupation pour certains travailleurs, car le secteur manufacturier a toujours été vraiment important pour que les travailleurs échappent à la pauvreté parce qu’ils y trouvaient des emplois très productifs, relativement bien payés mais maintenant, si par exemple, le secteur des services prend plus d’importance, il restera à voir si ce secteur peut vraiment prendre le relais de l ‘industrie et conduire vers moins de pauvreté».

Reportage de Carla Drysdale à l’OIT