« 100 ANS – 100 VIES » | SENEGAL - “Grâce à la coopérative, les tanneuses de Guédiawaye ont fait un pas important vers le travail décent”

A travers l’appui apporté par l’OIT et le dynamisme de ses dirigeantes, une coopérative de tanneuses près de Dakar a permis à des femmes vulnérables d’avancer vers l’autonomisation, la formalisation et de meilleures conditions de travail.

Feature | Sénégal |
DAKAR - Pour lutter contre la précarité, les femmes font preuve d’ingéniosité. Au Sénégal, elles construisent des solidarités et s’organisent, à l’instar des tanneuses de Guédiawaye qui ont mis en place la « Coopérative Artisanale des Tanneuses de Guédiawaye » (COOPTAG). Elle est installée tout près de Dakar, au cœur du « bajju naar » , aux abords du Lac Thiourour.

Cette coopérative a pu voir le jour grâce à la collaboration entre les tanneuses, l’Union Nationale des Syndicats Autonomes du Sénégal (UNSAS) et l’OIT.

Dans le développement de la coopérative un membre a joué un rôle déterminant :il s’agit d’Astou Doukouré, actuelle trésorière générale de la COOPTAG.

A l’origine, cette dame d’une quarantaine d’années, mère de deux filles adolescentes, ne pensait pas travailler à la tannerie et reprendre le métier de sa mère. Mais la vie en a décidé autrement. Aujourd’hui, elle est fière d’avoir repris le flambeau.

Un métier ingrat

Enfant, Astou Doukouré a été obligée de travailler.

« Au décès de mon père, à l’âge de 10 ans, j’ai dû venir aider ma mère à la tannerie durant les jours fériés et les vacances scolaires. Le travail de tannage n’est pas facile pour les adultes et encore moins pour les enfants. Mais c’est lui qui m’a permis de poursuivre mes études secondaires », nous confie-elle.

Son baccalauréat en poche, elle abandonna le tannage pour devenir enseignante dans le privé. Malheureusement, au bout de quelques années, elle se retrouva au chômage. Devant assumer le rôle de chef de famille à la suite de son divorce et subvenir seule aux besoins de ses enfants, elle dut revenir à la tannerie.

Reprendre ce métier fut une décision difficile.Qualifiée par la plupart des Sénégalais d’« activité sale», la tannerie n’est ni valorisée, ni valorisante. Mais sur place, la solidarité, l’amitié permettent d’avancer.

De la production aux réseaux sociaux

Astou Doukouré a joué un rôle fondamental dans la création de la coopérative, l’amélioration des conditions de travail et les changements socio-économiques. Seule personne instruite du groupe, elle mena de front ses actions de production avec les activités de sensibilisation, d’information et de communication auprès des tanneuses, des autorités locales, de l’UNSAS et de l’OIT. Elle a su avec intelligence ménager les susceptibilités des tanneuses les plus anciennes et donner une voix aux plus jeunes.

Inlassablement, elle a poussé la coopérative à investir dans l’alphabétisation et la formation des jeunes femmes avec l’appui de l’OIT. Elle a encouragé l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans la gestion, le partage des informations et le développement de partenariat. Ainsi a-t-elle rendu visible la COOPTAG à travers les réseaux sociaux (Facebook, WhatsApp), collecté des cotisations et payé des factures via le « Banking Mobile » (Banque en ligne)

« Le soutien que nous avons apporté à la coopérative s’inscrit notamment dans le cadre des efforts de formalisation du travail informel, de l’autonomisation des femmes, de l’amélioration des conditions de travail et de la protection sociale dans un secteur particulièrement vulnérable », explique Fatime N’Diaye, qui a piloté le projet pour l’OIT.

« Grâce à la coopérative, les tanneuses de Guédiawaye ont fait un pas important vers le travail décent, même s’il reste beaucoup à faire. Nous nous félicitons du dynamisme montré par Astou Doukouré et l’ensemble des tanneuses de la coopérative dont la notoriété dépasse désormais les frontières du Sénégal. » conclut-elle.

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