Partenariats public-privé en Inde pour la prise en charge et le soutien en matière de VIH

Article | 14 octobre 2011

Les groupes de sociétés et les entreprises du secteur public créent des centres de conseil et de dépistage du VIH ainsi que des centres de traitement antirétroviral en partenariat avec le gouvernement.


«J’ai repris espoir», témoigne Ram Kumar, un employé de Mumbai Port Trust (MbPT) qui vit avec le VIH.


Ram Kumar est l’un des 195 employés qui bénéfice d’une thérapie antirétrovirale (TAR) mise en place par sa société, dans le cadre de la politique de prise en charge des employés et de leur famille.

a) PPP pour la création de centres intégrés de conseil et de dépistage

i) Mumbai Port Trust (MbPT)

MbPT est une entité autonome rattachée au ministère indien du Transport routier et des autoroutes. Elle a accès à une population de 200 000 personnes composée de 20 000 employés et des personnes à leur charge et de 35 000 retraités et leurs conjoints. Basée à Mumbai, où la prévalence du VIH est élevée, MbPT fut l’une des premières sociétés en Inde à assurer la prise en charge et le soutien de ses employés séropositifs, dès 1999. Elle a commencé à proposer des traitements antirétroviraux de deuxième intention en 2002. Elle s’est dotée d’un programme complet sur le lieu de travail, et notamment d’une politique élaborée avec l’aide de la société de contrôle du sida de la région de Mumbai (MDACS) et de l’OIT. Un noyau de maîtres formateurs VIH a été constitué au sein de MbPT.

«Sensibiliser le personnel au VIH et diffuser notre politique donne des résultats. Nous voulons protéger nos employés et éviter de nouvelles infections. Nous fournissons déjà un traitement à un certain nombre d’employés séropositifs», commente Elize D’Silva, spécialiste de la santé chez MbPT, qui est aussi l’un des maîtres formateurs de la société et anime régulièrement des séances d’information.

Entre octobre 2006 et juillet 2009, plus de 7 000 personnes ont fait un test de dépistage. Pour cent employés de MbPT (65 hommes et 35 femmes), le test s’est révélé positif. Les efforts de prévention de MbPT semblent avoir un impact. Entre décembre 2008 et juin 2009, aucun des employés testés n’était séropositif.

ii) Central Coalfield Limited (CCL)

CCL est une filiale de Coal India Limited implantée à Ranchi qui a créé un partenariat avec la société de contrôle du sida de l’Etat du Jharkhand (JSACS) pour mener des interventions sur le VIH sur le lieu de travail. CCL emploie près de 60 000 personnes dans une vaste zone d’exploitation minière.

CCL a élaboré sa politique et son programme sur le lieu de travail en collaboration avec l’OIT, en s’appuyant sur le Recueil de directives pratiques du BIT sur le VIH/sida et le monde du travail. En 2007, la société a créé un réseau de centres intégrés de conseil et de dépistage (CICD) dans les hôpitaux de l’entreprise, en collaboration avec la JSACS.

Ces centres sont ouverts à tous, et pas seulement aux employés de l’entreprise, afin d’améliorer l’accès aux services de conseil et de dépistage du VIH.

iii) Jubilant Organosys Limited (JOL)

JOL est une société pharmaceutique qui a créé des CICD dans ses unités de Nanjangud (Etat du Karnataka) et Gajrola (Etat de l’Uttar Pradesh).

L’initiative trouve son origine dans l’engagement de la direction. «Jubilant, en tant que société responsable, est attachée à contribuer aux programmes de sensibilisation et de prévention du VIH», indique Shyam Bang, directeur exécutif de JOL.

Le CICD de Nanjangud est réservé aux employés et géré complètement par l’entreprise, tandis que celui de Gajrola a été mis sur pied en collaboration avec la société de contrôle du sida de l’Etat de l’Uttar Pradesh (UPSACS).

Le centre de Gajrola a été créé en mars 2009 en partenariat avec l’UPSACS suite au succès du programme de traitement de la tuberculose de la société, et en raison de l’implication de JOL dans le programme de l’OIT pour l’éducation sur le VIH sur les lieux de travail.

La société rémunère un médecin, un technicien de laboratoire et un conseiller, alors que l’UPSACS assure la formation et fournit les kits de test et les préservatifs. Bien que l’initiative soit récente, 19 personnes à ce jour ont été orientées vers un centre de dépistage et trois ont été diagnostiquées séropositives. JOL s’efforce de populariser les services des CICD par la sensibilisation assurée par ses maîtres formateurs sur le VIH.

b) PPP pour améliorer l’accès au traitement: création de centres de thérapie antirétrovirale

«Je suis l’un des premiers à avoir fréquenté le centre de TAR de Ballarpur. Avant, je me rendais à Nagpur, à 150 km de chez moi. Ce centre m’aide énormément. Merci à BILT de l’avoir installé là», témoigne Priya Devi).

BILT a créé ce centre en partenariat avec l’Organisation nationale de contrôle du sida (NACO) et la Confédération de l’industrie indienne (CII), et avec le soutien du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

BILT est une usine de fabrication de papier qui exploite six sites en Inde et emploie plus de 10 000 personnes. «BILT s’est dotée d’un programme complet de lutte contre le VIH qui a eu un impact sur plus de 60 000 vies. Son centre de TAR de Ballarpur, dans l’Etat du Maharashtra, est reconnu à l’échelle nationale et internationale pour son rôle pionnier dans la lutte contre le VIH au niveau communautaire», explique R.R. Vederah, directeur général de BILT.

La société crée un environnement propice en organisant des séances régulières avec ses employés et en diffusant sa politique sur le VIH/sida sur le lieu de travail en collaboration avec l’OIT. Le centre de TAR de Ballarpur effectue aussi des bilans CD4 pour les centres de TAR créés par le gouvernement à Chandrapur et Gadchiroli dans l’Etat du Maharashtra.

L’initiative de BILT est plutôt positive et le personnel des centres de TAR est très enthousiaste. «Travailler dans le centre de TAR a été une expérience très enrichissante; je me sens très heureux quand j’aide autant de patients», commente un des responsables de la coordination (nodal officers) de BILT.

Enseignements

  • Les programmes sur le lieu de travail constituent un bon point d’entrée pour les PPP.
  • Il est important qu’un organisme fasse l’interface et fournisse une plate-forme neutre pour négocier les partenariats et instaurer une confiance mutuelle entre les partenaires.
  • Des entreprises du secteur public comme MbPT et CCL, qui disposent de grosses structures médicales et de santé et sécurité au travail, peuvent y intégrer des CICD et des centres de TAR en partenariat avec la société de contrôle du sida de leur Etat. Le potentiel de ces modèles est énorme pour intensifier le programme national.
  • Le secteur privé peut contribuer à élargir l’accès aux services dans le cadre du modèle de PPP. Les modèles d’entreprises privées comme Jubilant et BILT sont reproductibles.
  • Initialement, les employés hésitaient parfois à recourir aux services des CICD et des centres de TAR dans les locaux de l’entreprise. Il convient de créer un environnement propice, ce qui implique une diffusion efficace de la politique sur le VIH sur le lieu de travail et des efforts de sensibilisation réguliers.
  • Les CICD et les centres de TAR créés par les entreprises (publiques ou privées) doivent être accessibles à toute la communauté mais cela exige un effort planifié pour faire connaître ces établissements. Des partenariats avec les ONG locales et les réseaux de personnes vivant avec le VIH peuvent jouer un rôle essentiel dans ce contexte.
  • Des PPP pour la prise en charge et le soutien en matière de VIH offrent des opportunités de conseil, de test et de traitement du VIH aux employés contractuels et aux travailleurs migrants.

Document sur les bonnes pratiques:

Prevention of HIV/AIDS in the World of Work: A Tripartite Response (en anglais)