Que sont le travail forcé, l'esclavage moderne et la traite des êtres humains?

Qu’est-ce que le travail forcé?

Le travail forcé peut être défini comme un travail accompli contre son gré et sous la menace d'une peine quelconque. Cela renvoie à des situations dans lesquelles des personnes sont contraintes à travailler par le recours à la violence ou l’intimidation, ou par des moyens plus subtils tels que la manipulation de dettes, la rétention de papiers d’identité ou la menace de dénonciation aux autorités migratoires.

La définition du travail forcé

D’après la Convention (No. 29) sur le travail forcé, 1930, le travail forcé ou obligatoire désigne:
«tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré».

Le protocole relatif au travail forcé (article 1 (3)) réaffirme explicitement cette définition.

Cette définition consiste en trois éléments:
  1. Travail ou service renvoie à tout type de travail quels que soient l’activité, l’industrie ou le secteur, y compris au sein de l’économie informelle.
  2. La menace d'une peine quelconque renvoie à une large gamme de contraintes servant à forcer quelqu’un à travailler.
  3. Absence de consentement: l'expression «offert de plein gré» rappelle qu’un travailleur doit consentir à une relation de travail de manière libre et éclairée et qu’il ou elle est libre de quitter son emploi à tout moment. Ce n’est pas le cas par exemple lorsqu’un employeur ou un recruteur font de fausses promesses pour que le travailleur prenne un emploi qu’il n’aurait pas accepté autrement.

Exceptions à la définition du «travail forcé»

L’article 2 (2) de la convention n° 29 décrit cinq situations qui constituent des exceptions à la définition du «travail forcé» sous certaines conditions. (Voir Etude d'ensemble, Commission d'experts de l'OIT):
  • Service militaire obligatoire.
  • Obligations civiques normales.
  • Le travail pénitentiaire (sous certaines conditions).
  • Le travail en cas de force majeure (guerre, de sinistres ou menaces de sinistres tels qu'incendies, inondations, famines, tremblements de terre).
  • Les menus travaux de village (au sein de la collectivité).

Le travail forcé imposé par les autorités étatiques

La Convention (no. 105) sur l’abolition du travail forcé, adoptée par l’OIT en 1957, concerne principalement le travail forcé imposé par les autorités étatiques. Elle interdit spécifiquement le recours au travail forcé:
  • en tant que sanction pour l’expression d’opinions politiques,
  • en tant que punition pour avoir participé à des grèves,
  • en tant que mesure de discrimination (raciale, religieuse ou autre),
  • en tant que mesure de discipline du travail,
  • à des fins de développement économique.

La portée des instruments de l’OIT sur le travail forcé

Les deux conventions sur le travail forcé jouissent d’une ratification quasi universelle, ce qui signifie que la plupart des pays ont l’obligation légale d’en respecter les dispositions et de faire régulièrement rapport aux organes de contrôle de l’OIT. Ne pas être soumis au travail forcé est un droit fondamental de l’homme: tous les Etats Membres de l’OIT doivent respecter le principe de l’élimination du travail forcé, qu’ils aient ou non ratifié les conventions.

En juin 2014, à la Conférence internationale du Travail (CIT), les gouvernements, les employeurs et les travailleurs ont décidé de donner un nouvel élan à la lutte mondiale contre le travail forcé, y compris la traite des personnes et les pratiques analogues à l’esclavage.

Ils ont adopté à une écrasante majorité le Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, et la Recommandation (n° 203) sur le travail forcé (mesures complémentaires), 2014, qui viennent compléter la convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930, et les instruments internationaux existants en donnant des orientations spécifiques sur les mesures efficaces à prendre en matière de prévention, de protection, de recours et de afin d’éliminer toutes les formes de travail forcé.

La réalité du travail forcé, de la traite et de l’esclavage moderne

Le travail forcé peut être imposé à des adultes et des enfants, par des autorités étatiques, par des entreprises privées ou des individus. On peut l’observer dans tout type d’activités économiques telles que le travail domestique, la construction, l’agriculture, la confection, l’exploitation sexuelle, la mendicité forcée, etc. dans tous les pays.

La définition du travail force recouvre:
«les pratiques traditionnelles de travail forcé, comme les séquelles de l’esclavage, les pratiques analogues à l’esclavage ou les différentes formes de servitude pour dettes, mais également aux nouvelles formes de travail forcé qui ont émergé ces dernières décennies, comme par exemple la traite des personnes.1» que l’on nomme également «esclavage moderne» afin d’attirer l’attention sur des conditions de vie et de travail contraire à la dignité humaine.

Le travail forcé se distingue de simples conditions de travail d’exploitation ou qui ne respectent pas les normes. Divers indicateurs peuvent être utilisés pour établir quand une situation relève du travail forcé, notamment les restrictions à la liberté de mouvement des travailleurs, la confiscation des salaires ou des documents d’identité, les violences physiques ou sexuelles, les menaces ou l’intimidation, ou les dettes imposées de manière frauduleuse, auxquelles les travailleurs ne peuvent échapper.

En plus d’être une violation sévère des droits humains et des droits fondamentaux au travail, l’exaction du travail forcé est une infraction pénale.


1 OIT, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales concernant les droits au travail à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, 2012, CIT.101/III/1B, paragraphe 272.