Questions fréquentes concernant la Convention du travail maritime, 2006

1. Qu’est-ce que la convention du travail maritime de 2006?

2. Pourquoi l’appelle-t-on aussi parfois la convention du travail maritime «consolidée» de 2006?

3. Quand la convention du travail maritime de 2006 entrera-t-elle en vigueur et qu’adviendra-t-il alors des conventions existantes?

4. Pourquoi fallait-il une nouvelle convention?

5. La nouvelle convention traite-t-elle de sujets nouveaux?

6. Pourquoi a-t-on besoin de normes internationales efficaces pour réglementer les conditions de travail des gens de mer?

7. Les normes instaurées par la nouvelle convention seront-elles inférieures à celles que les conventions du travail maritime actuelles ont établies?

8. De quelle manière la nouvelle convention va-t-elle mieux protéger les gens de mer du monde entier?

9. En quoi la nouvelle convention facilite-t-elle, pour les pays, sa ratification et l’application de ses prescriptions?

10. Les obligations et responsabilités des armateurs s’étendront-elles aux gens de mer dont le travail n’a pas de rapport avec la navigation ou la sécurité de fonctionnement du navire?

11. Pourquoi la nouvelle convention a-t-elle des chances d’être presque universellement ratifiée?

12. Quels seront les avantages pour les navires des pays qui ratifieront la convention?

13. En quoi la convention du travail maritime de 2006 améliorera-t-elle le respect et l’application des dispositions qui en découlent?

14. Que sont le certificat de travail maritime et la déclaration de conformité du travail maritime?

15. Que signifie le principe selon lequel les navires des pays qui n’ont pas ratifié la convention ne doivent pas bénéficier d’un traitement plus favorable?

16. Comment sera assuré le respect de la nouvelle convention?

17. Comment la nouvelle convention sera-t-elle actualisée plus facilement que les conventions actuelles?

18. Les pays ayant ratifié la convention seront-ils liés par tous les nouveaux amendements?

19. En quoi les procédures d’amendement diffèrent-elles de celles prévues par les conventions de l’OMI?

20. En quoi la nouvelle convention innove-t-elle?

21. A quoi correspond le statut particulier de la partie B du code et pourquoi était-il nécessaire?

22. Puisqu’elle n’est pas obligatoire, pourquoi la partie B fait-elle partie de la convention alors qu’elle pourrait faire l’objet d’une recommandation?

23. Une convention de l’OIT peut-elle contenir des dispositions n’ayant pas force obligatoire?

24. Pourquoi semble-t-il y avoir parfois un chevauchement entre les règles et la partie A du code?

25. La convention exigera-t-elle des pays qui la ratifieront qu’ils appliquent aussi les conventions fondamentales de l’OIT relatives aux droits de l’homme ou d’autres conventions dont elle fait mention?

1. Qu’est-ce que la convention du travail maritime de 2006?

Il s’agit d’une nouvelle convention internationale du travail particulièrement importante qui a été adoptée par l’Organisation internationale du Travail (OIT) en vertu de l’article 19 de sa Constitution lors d’une session maritime de la Conférence internationale du Travail qui s’est tenue à Genève en février 2006. Ce nouvel instrument définit le droit des gens de mer à des conditions de travail décentes et favorise l’instauration de conditions de concurrence loyales entre armateurs. Il a été conçu en vue d’être universellement applicable, facile à comprendre, facile aussi à actualiser et enfin en vue d’être mis en oeuvre uniformément. Il est destiné à devenir un instrument juridique universel qui constituera, une fois entré en vigueur, le «quatrième pilier» de la réglementation internationale du secteur maritime, en complément des conventions fondamentales de l’Organisation maritime internationale (OMI), à savoir la Convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, telle que modifiée (SOLAS), la Convention internationale de 1978 sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille, telle que modifiée (STCW), et la Convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL 73/78).

2. Pourquoi l’appelle-t-on aussi parfois la convention du travail maritime «consolidée» de 2006?

La convention du travail maritime de 2006 inclut un vaste ensemble de normes mondiales basées sur celles que l’on trouvait déjà dans soixante-huit instruments (conventions et recommandations) du travail maritime adoptées par l’OIT depuis 1920. Elle réunit la quasi-totalité des instruments du travail maritime en vigueur en un seul et même texte qui revêt une présentation nouvelle, légèrement réactualisée pour tenir compte de l’évolution à la fois des conditions et de la langue. Elle représente la consolidation du droit international applicable dans tous ces domaines. Les conventions relatives aux pièces d’identité des gens de mer (conventions nos. 108 et 185) ont été révisées récemment – en 2003 – et n’y ont pas été incorporées, pas plus, d’ailleurs, que la convention (no. 71) sur les pensions des gens de mer, 1946, et la convention (no. 15) sur l’âge minimum (soutiers et chauffeurs), 1921, qui ne sont plus d’actualité dans ce secteur.

3. Quand la convention du travail maritime de 2006 entrera-t-elle en vigueur et qu’adviendra-t-il alors des conventions existantes?

La convention entrera en vigueur:

" …12 mois après la date à laquelle auront été enregistrées les ratifications d’au moins 30 Etats Membres représentant ensemble 33 pour cent du tonnage brut de la flotte marchande mondiale."

Il s’agit là d’une condition nettement plus élevée que le taux de ratifications habituel (pour les conventions de l’OIT) et qui fait entrer en jeu une nouvelle formule, laquelle est destinée à garantir à la convention un plus grand impact effectif. Cette condition découle du fait que le système d’application et d’exécution que la convention instaure dépend, pour être efficace, d’une coopération internationale étendue. Etant donné que bon nombre d’obligations qu’elle énonce s’adressent aux armateurs et aux Etats du pavillon, il est capital qu’elle soit ratifiée par les Membres de l’OIT qui ont à la fois des intérêts très forts dans le secteur maritime et un tonnage élevé sous leur juridiction.

Les conventions du travail maritime de l’OIT actuellement en vigueur seront progressivement abolies, au fur et à mesure que les Etats Membres de l’OIT ayant ratifié ces conventions ratifieront la nouvelle, mais il y aura une période de transition au cours de laquelle des conventions parallèles seront en vigueur. Les pays qui ratifieront la convention du travail maritime de 2006 ne seront plus liés par les conventions préexistantes dès que la nouvelle convention sera entrée en vigueur à leur égard. Les pays qui ne ratifient par la nouvelle convention resteront liés par les conventions en vigueur qu’ils ont ratifiées, mais ces conventions ne seront plus ouvertes à aucune nouvelle ratification.

4. Pourquoi fallait-il une nouvelle convention?

La décision de l’OIT d’élaborer cette nouvelle convention du travail maritime d’importance majeure a son origine dans une résolution adoptée en 2001 par les organisations internationales de gens de mer et d’armateurs puis appuyée par les gouvernements. Selon ses termes, le secteur maritime est «devenu le premier secteur économique réellement mondialisé», si bien que «les mesures prises, et notamment la réglementation doivent pouvoir s’appliquer à son ensemble». Elle soulignait que «l’élaboration d’un instrument qui rassemblerait le plus largement possible les instruments existants de l’OIT dans un texte unifié serait une priorité pour le secteur maritime si l’on veut que les normes répondent mieux aux besoins de tous les acteurs de ce secteur». Le sentiment était que, vu le très grand nombre de conventions maritimes et leur caractère généralement très détaillé, il était difficile aux gouvernements de ratifier et d’appliquer l’ensemble de ces normes, d’autant que beaucoup d’entre elles étaient dépassées et ne correspondaient plus aux conditions de travail et de vie à bord des navires. En outre, il fallait élaborer un système plus efficace de mise en application qui contribuerait à faire disparaître les navires qui ne respectent pas les normes et qui s’inscrirait dans le cadre du système international, désormais bien établi, d’application des normes adoptées par l’Organisation maritime internationale (OMI) pour assurer la sécurité et la sûreté des navires ainsi que la protection de l’environnement.

5. La nouvelle convention traite-t-elle de sujets nouveaux?

La convention comprend trois parties principales: les articles, qui définissent les grands principes et obligations, suivis des règles et du code (constitué de deux parties, A et B) qui contiennent des dispositions plus détaillées. Les règles ainsi que les normes (partie A) et les principes directeurs (partie B) du code sont présentés de manière intégrée sous les cinq titres suivants:

Titre 1: Conditions minimales requises pour le travail des gens de mer à bord d’un navire
Titre 2
: Conditions d’emploi
Titre 3
: Logement, loisirs, alimentation et service de table
Titre 4
: Protection de la santé, soins médicaux, bien-être et protection sociale
Titre 5
: Respect et mise en application des dispositions.

Ces cinq titres couvrent essentiellement les mêmes questions que les 68 instruments du travail maritime existants, avec les actualisations qu’il y avait lieu de faire.

La convention aborde parfois de nouveaux aspects, notamment en matière de sécurité et de santé au travail, pour répondre à des préoccupations telles que les effets du bruit et des vibrations pour les travailleurs ou d’autres facteurs de risques.

Les dispositions du titre 5 relatives aux inspections par l’Etat du pavillon, au recours à des organismes reconnus et aux possibilités d’inspection dans les ports étrangers (contrôle par l’Etat du port) sont basées sur les conventions du travail maritime actuelles, mais la nouvelle convention s’appuie sur leurs dispositions pour parvenir, par rapport à ces grandes questions, à une approche plus efficace, en parfaite cohérence avec d’autres conventions maritimes internationales, qui fixent des normes axées sur une activité maritime de qualité, comme en matière de sécurité et de sûreté des navires et de protection de l’environnement.

6. Pourquoi a-t-on besoin de normes internationales efficaces pour réglementer les conditions de travail des gens de mer?

A bord des navires sur lesquels l’Etat du pavillon n’exerce pas effectivement sa juridiction et son contrôle, comme l’exige pourtant le droit international, les gens de mer doivent souvent travailler dans des conditions inacceptables, affectant leur bienêtre et compromettant leur santé et leur sécurité et aussi la sécurité des navires.

Etant donné que les gens de mer travaillent hors de leur pays et que leurs employeurs sont souvent aussi basés hors de leur pays, il faut des normes internationales efficaces pour ce secteur.

Ces normes doivent être appliquées au niveau national, notamment par les pays qui ont un registre maritime et autorisent des navires à battre leur pavillon.

C’est un point déjà bien admis pour ce qui concerne la sécurité et la sûreté des navires ainsi que la protection du milieu marin.

Il importe aussi de noter qu’il y a beaucoup d’Etats du pavillon et d’armateurs qui s’enorgueillissent d’offrir des conditions de travail décentes aux gens de mer qui travaillent à bord de leurs navires, mais qui en paient actuellement le prix du fait de la concurrence des navires qui ne respectent pas les normes.

7. Les normes instaurées par la nouvelle convention seront-elles inférieures à celles que les conventions du travail maritime actuelles ont établies?

Non, le but est de maintenir les normes établies par les conventions du travail maritime actuelles à leur niveau actuel tout en laissant à chaque pays plus de latitude quant à la façon d’assurer ce niveau de protection dans sa législation.

8. De quelle manière la nouvelle convention va-t-elle mieux protéger les gens de mer du monde entier?

La convention vise à assurer une protection universelle à tous les gens de mer, catégorie qui recouvre aujourd’hui, estime-t-on, plus 1,2 million de personnes dans le monde. Elle tend à ce but par divers moyens. Jusqu’à présent, il n’avait pas été clairement établi que toutes ces personnes, notamment celles qui, par exemple, travaillent à bord de navires sans prendre part directement à la navigation ou au fonctionnement du navire, comme c’est le cas de bon nombre de personnes travaillant à bord des navires de passagers, rentrent dans cette catégorie. Désormais, la nouvelle convention inclut sans ambiguïté dans cette catégorie toute personne employée, occupée ou travaillant à quelque titre que ce soit à bord d’un navire rentrant dans son champ d’application. Exception faite de quelques exclusions spécifiques et de quelques domaines dans lesquels une certaine latitude est laissée aux autorités nationales pour exclure du champ d’application de certaines de ses dispositions les unités de plus petit tonnage (200 tonneaux de jauge brute ou moins) qui ne sont pas affectées à une navigation internationale, la convention s’applique à tous les navires (et à toutes les personnes embarquées à bord de ces navires), que ceux-ci soient de propriété publique ou privée, dès lors qu’ils sont affectés ordinairement à une activité commerciale.

La convention exclut de son champ d’application:

  • les bâtiments qui naviguent exclusivement dans les eaux intérieures, dans les eaux situées à l’intérieur ou au proche voisinage d’eaux abritées ou de zones où s’applique une réglementation portuaire;
  • les navires armés à la pêche;
  • les navires de construction traditionnelle, tels que les boutres et les jonques;
  • les navires de guerre ou leurs annexes flottantes.

Bon nombre des conventions du travail maritime actuelles ont peu ratifiées. La nouvelle convention a été conçue précisément pour apporter une réponse à ce problème. Pour une meilleure protection des gens de mer, il faut que la nouvelle convention soit rapidement ratifiée et mise en oeuvre au niveau national par une forte majorité de pays Membres de l’OIT ayant une activité maritime, comme c’est déjà le cas avec les trois grandes conventions de l’OMI (SOLAS, STCW, MARPOL).

9. En quoi la nouvelle convention facilite-t-elle, pour les pays, sa ratification et l’application de ses prescriptions?

L’OIT, à travers sa Constitution comme à travers bon nombre de ses instruments, a toujours veillé à faire la part des conditions nationales et à prévoir une certaine souplesse dans l’application des conventions, ayant pour ligne de mire de parvenir peu à peu à une amélioration de la protection des travailleurs en tenant compte des particularités de certains secteurs et de la diversité des situations d’un pays à l’autre. Cette souplesse s’appuie, d’une manière générale, sur les principes du tripartisme, de la transparence et de la responsabilité. Lorsqu’un gouvernement s’en prévaut pour l’application d’une convention, cela implique en règle générale que les organisations de travailleurs et d’employeurs intéressées sont consultées et que toute orientation décidée dans de telles circonstances est rapportée à l’OIT. Cette manière de faire est perçue comme étant à la fois nécessaire et déterminante pour assurer que tous les pays, indépendamment des particularités de leur situation individuelle, s’engagent par rapport au système de droit international, respectent leurs obligations internationales et les appliquent dans toute la mesure possible, et enfin s’efforcent aussi d’améliorer les conditions existantes. Cela est particulièrement important pour une activité aussi internationale que peut l’être l’activité maritime

La convention maritime du travail de 2006 épouse cette approche tout en introduisant une souplesse supplémentaire, pertinente au secteur, à un niveau national. Elle veut être «stricte sur les droits et souple sur leur mise en oeuvre». L’un des principaux obstacles à la ratification des conventions du travail maritime existantes est l’excès de détails que beaucoup d’entre elles comportent. La nouvelle convention proclame sans ambages les droits fondamentaux des gens de mer à un travail décent, mais elle laisse aux pays qui la ratifient une grande latitude quant aux modalités de transposition dans leur législation nationale des normes qu’elle instaure dans cette optique.

La flexibilité qu’offre la convention réside dans les aspects suivants:

  • les «droits des gens de mer relatifs à l’emploi et relevant du domaine social» qui sont énoncés à l’article IV doivent être pleinement appliqués, «conformément aux prescriptions de la présente convention» (c’est-à-dire conformément aux dispositions pertinentes des articles, des règles et de la partie A du code); toutefois, sauf disposition contraire de la convention, la mise en application de cet instrument au niveau national peut s’effectuer par voie de législation, de convention collective ou à travers toute autre mesure ou pratique;
  • la mise en application des normes obligatoires définies dans la partie A du code (autre que celles prévues sous le titre 5) peut être réalisée par des mesures qui sont «substantiellement équivalentes»;
  • nombre de dispositions prescriptives ou détaillées de certaines conventions qui avaient suscité des difficultés à certains pays désirant pourtant ratifier ces instruments ont été transférées dans les principes directeurs de la partie B du code. Les dispositions de cette partie B du code n’ont pas un caractère obligatoire et leur application n’est pas susceptible d’un contrôle de la part des inspecteurs de l’Etat du port, néanmoins, les gouvernements sont tenus de «les prendre dûment en considération» dans la mise en application de leurs obligations;
  • les prescriptions établies par la convention, autres que celles qui concernent la certification des navires, s’appliqueront à la majorité de ces derniers (elles ne s’appliquent pas aux navires armés à la pêche ni aux navires de construction traditionnelle ou encore aux navires de guerre). Cependant, l’application des règles de détail contenues dans le code peut être allégée en ce qui concerne les navires de plus faible tonnage (200 tonneaux de jauge brute ou moins) qui ne sont pas affectés à une navigation internationale. Cette question devrait être tranchée en consultation avec les organisations d’armateurs et de gens de mer concernées;
  • tous les navires auxquels la convention étend ses effets devraient être soumis à un système d’inspection mis au point par l’Etat du pavillon mais le système de certification n’est obligatoire que pour les navires de 500 tonneaux de jauge brute ou plus affectés à une navigation internationale (ou naviguant entre les ports d’un pays étranger). Le système de certification attestera que le navire est exploité dans le respect des prescriptions établies par la convention telles qu’elles sont définies dans la législation ou la réglementation de l’Etat du pavillon concerné (lorsqu’il s’agit d’autres navires, les armateurs peuvent aussi obtenir de l’Etat de leur pavillon que ceux-ci soient inclus dans le système de certification pour éviter qu’ils ne soient inspectés dans des ports étrangers ou tout au moins pour réduire l’éventualité d’une telle inspection);
  • la convention reconnaît expressément que certains Etats du pavillon peuvent s’en remettre à des organismes reconnus, comme les sociétés de classification, pour accomplir en leur nom certaines formalités prévues par le système de certification du navire;
  • les dispositions touchant à la construction et à l’armement du navire (titre 3) ne seront pas applicables aux navires construits avant l’entrée en vigueur de la convention pour le pays concerné. Les navires de moindre tonnage (de 200 tonneaux de jauge brute ou moins) peuvent être exonérés des prescriptions concernant spécifiquement le logement;
  • des dispositions spécifiques sont prévues pour que, «en cas de doute», la question de l’application de la convention à certaines catégories de personnes ou de navires ou à un navire en particulier soit tranchée, au niveau national, par voie de consultation avec les organisations d’armateurs et de gens de mer. Une résolution a été adoptée en même temps que la convention pour fournir aux autorités nationales des orientations en vue de déterminer dans un tel contexte ce que recouvre la catégorie des «gens de mer»;
  • le cas des pays qui peuvent ne pas avoir d’organisations d’armateurs ou de gens de mer à consulter a été prévu;
  • l’éventualité d’une situation nationale particulière aussi bien que de l’existence d’arrangements bilatéraux, multilatéraux ou autres relatifs à la couverture de sécurité sociale a été prévue.

10. Les obligations et responsabilités des armateurs s’étendront-elles aux gens de mer dont le travail n’a pas de rapport avec la navigation ou la sécurité de fonctionnement du navire?

Oui, les armateurs (ou les exploitants des navires) ont une responsabilité générale à l’égard de tous les gens de mer travaillant à bord de leur navires. Cela étant, ils pourront conclure des arrangements avec des personnes qui peuvent avoir elles aussi une part de responsabilité dans l’emploi de certaines catégories de gens de mer, en vue, par exemple, d’obtenir une certaine répercussion des coûts.

11. Pourquoi la nouvelle convention a-t-elle des chances d’être presque universellement ratifiée?

Parce qu’elle a été adoptée par un nombre record de voix – 314 pour et aucune contre (deux pays se sont abstenus, mais pour des raisons indépendantes du contenu de la convention), au terme d’un processus d’examen détaillé de ses dispositions, qui a nécessité pratiquement deux semaines et qui a associé plus de 1000 participants, représentant 106 pays. Un soutien d’une telle ampleur, pratiquement sans précédent, est la résultante d’un patient exercice de consultations tripartites et de l’engagement indéfectible dont ont fait preuve les gouvernements, les travailleurs et les employeurs, qui ont oeuvré de manière concertée depuis 2001 pour en élaborer le texte. Elle a aussi de bonnes chances d’être ratifiée presque universellement parce qu’elle allie fermeté pour tout ce qui touche au respect des droits et flexibilité pour ce qui concerne les modalités de la mise en oeuvre de ses prescriptions les plus techniques et aussi parce qu’elle comporte des avantages pour les navires des pays qui la ratifient.

12. Quels seront les avantages pour les navires des pays qui ratifieront la convention?

Les navires des pays qui ratifieront la convention et qui garantiront ainsi des conditions de travail décentes aux gens de mer s’assureront en retour d’une protection contre toute concurrence déloyale de la part des navires qui ne respectent pas les normes et bénéficieront en outre d’un système de certification qui leur épargnera les délais, souvent longs, que fait encourir une inspection dans un port étranger.

13. En quoi la convention du travail maritime de 2006 améliorera-t-elle le respect et l’application des dispositions qui en découlent?

La convention du travail maritime de 2006 vise à instaurer une constante «conscience de ses effets» à tous les niveaux, du système national de protection jusqu’au système international. Cela commence au niveau le plus élémentaire, celui du marin, qui doit, en vertu de ses dispositions, être dûment informé de ses droits et des procédures auxquelles il peut recourir lorsqu’il a lieu de présumer que les dispositions de la convention ne sont pas respectées, étant habilité, en vertu de ces mêmes dispositions, à exercer ces droits aussi bien à bord qu’à terre. Au niveau suivant, les armateurs possédant ou exploitant des navires de 500 tonneaux de jauge brute ou plus affectés à une navigation internationale ou à une navigation entre des ports étrangers sont tenus d’élaborer et de mettre en oeuvre des plans propres à garantir le respect des lois, règlements et autres mesures donnant effet à la convention. Ensuite, le personnel de commandement de ces navires a pour responsabilité de mettre en application les plans établis par l’armateur et de tenir selon les formes appropriées une trace écrite des dispositions prises en application des prescriptions de la convention. Au titre des nouvelles responsabilités qui lui incombent en matière d’inspection du travail à bord des navires d’une jauge brute de 500 tonneaux ou plus qui effectuent des voyages internationaux ou des voyages entre ports étrangers, l’Etat du pavillon (ou l’organisme reconnu agissant en son nom) devra contrôler les plans établis par l’armateur, vérifier qu’ils sont dûment mis en oeuvre et le certifier. L’Etat du pavillon devra aussi procéder périodiquement à des évaluations de l’efficacité de ses systèmes nationaux de contrôle, et les rapports qu’il soumettra au BIT en application de l’article 22 de la Constitution de l’OIT devront contenir des informations sur ces systèmes d’inspection et de certification, y compris sur les méthodes d’évaluation de la qualité de ces systèmes. A ce système d’inspection à caractère général dans l’Etat du pavillon (qui est basé sur la convention no. 178 de l’OIT) viennent s’ajouter les procédures auxquelles doivent se soumettre les pays qui sont, de manière incidente ou même principale, fournisseurs de main d’oeuvre maritime au reste du monde et qui, à ce titre, sont eux aussi tenus de faire rapport en application de l’article 22 de la Constitution de l’OIT. Ce système se trouve en outre renforcé par les mesures d’inspection qui peuvent être décidées de leur propre chef par les autorités de ports étrangers (contrôle par l’Etat du port).

14. Que sont le certificat de travail maritime et la déclaration de conformité du travail maritime?

On trouve en annexe à la convention le spécimen de deux documents qui sont des documents clés: un certificat de travail maritime et une déclaration de conformité du travail maritime. Le certificat est destiné à être délivré par l’Etat du pavillon une fois que celui-ci (ou l’organisme reconnu qui est habilité à procéder aux inspections en son nom) s’est assuré que les conditions de travail à bord du navire sont conformes à la législation et à la réglementation donnant effet à la convention. Le certificat aura une durée de validité de cinq ans, sous réserve d’inspections périodiques par l’Etat du pavillon. La déclaration de conformité, qui est jointe au certificat, résume la législation ou la réglementation nationale donnant effet à une série convenue de quatorze domaines visés par les normes et décrit le plan adopté par le propriétaire ou l’exploitant du navire pour assurer le respect entre deux inspections des prescriptions nationales donnant effet à la convention à bord du navire. La liste des quatorze domaines qui doivent être certifiés par l’Etat du pavillon et qui peuvent faire l’objet d’une inspection dans un port étranger figure dans les annexes à la convention.

15. Que signifie le principe selon lequel les navires des pays qui n’ont pas ratifié la convention ne doivent pas bénéficier d’un traitement plus favorable?

Cette notion, qui apparaît au paragraphe 7 de l’article V de la convention et figure aussi dans les conventions de l’OMI, signifie que la ratification de la nouvelle convention par un Etat ne doit pas entraîner de désavantage pour les navires qui battent son pavillon. Les conséquences pratiques de cette éventualité ressortent clairement des dispositions du titre 5, relatives au contrôle par l’Etat du port, dispositions en vertu desquelles les navires de tous les pays (qu’ils aient ou non ratifié la convention) sont passibles d’inspection dans tout pays ayant ratifié la convention et peuvent y être immobilisés s’ils ne satisfont pas aux normes minimales que cette convention instaure.

16. Comment sera assuré le respect de la nouvelle convention?

La nouvelle convention a été conçue pour que les exploitants et les propriétaires des navires respectent mieux ses dispositions et pour renforcer l’application des normes qu’elle instaure grâce à des mécanismes opérant à tous les niveaux.

Elle contient par exemple des dispositions qui concernent:

  • les procédures selon lesquelles les gens de mer peuvent faire connaître leurs griefs;
  • la supervision des conditions à bord des navires qui incombe à l’armateur et au personnel de commandement;
  • la juridiction d’un Etat du pavillon sur des navires battant son pavillon et les contrôles qu’il peut y exercer;
  • l’inspection d’un navire étranger dans un port.

En prescrivant aux Etats qui ont ratifié la convention non seulement de faire porter effet à cet instrument dans leur législation mais aussi de documenter cette application, la convention devrait améliorer aussi l’efficacité du contrôle exercé au niveau international, notamment par les organes compétents de l’OIT.

17. Comment la nouvelle convention sera-t-elle actualisée plus facilement que les conventions actuelles?

La partie de la convention qu’il faudra sans doute actualiser périodiquement, à savoir le code, qui comporte deux parties relatives aux aspects techniques détaillés de l’application des obligations fondamentales, peut être modifiée suivant une procédure accélérée («l’acceptation tacite», décrite à l’article XV) grâce à laquelle des changements peuvent entrer en vigueur, à l’égard de tous ou presque tous les pays ayant ratifié la convention, trois ou quatre ans après avoir été proposés.

18. Les pays ayant ratifié la convention seront-ils liés par tous les nouveaux amendements?

Un Membre ayant ratifié la convention ne sera pas lié par un amendement au code entrant en vigueur conformément à l’article XV s’il exprime formellement son désaccord dans un délai qui sera normalement de deux ans. Les amendements s’appuyant sur l’article XIV, qui énonce la procédure à suivre en vue de modifier des dispositions fondamentales, c’est-à-dire les articles et les règles, ne porteront effet qu’à l’égard des pays les ayant ratifiés.

19. En quoi les procédures d’amendement diffèrent-elles de celles prévues par les conventions de l’OMI?

Les deux types de procédure d’amendement – celle qui est prévue à l’article XIV pour la convention dans son ensemble et celle qui est prévue à l’article XV pour le code uniquement – sont basées dans une certaine mesure sur les procédures déjà bien établies dans le cadre d’une autre institution du système des Nations Unies, l’Organisation maritime internationale (OMI). Toutefois, la procédure de ratification expresse prévue à l’article XIV se rapproche davantage de la procédure de révision des conventions en vigueur actuellement à l’OIT. La procédure accélérée ou procédure par acceptation tacite prévue à article XV est analogue à celle de l’OMI, notamment en ce qui concerne la soumission des amendements aux Etats Membres et leur entrée en vigueur; la principale différence tenant ici au mode d’adoption des amendements: contrairement à ce que prévoient les procédures de l’OMI, les Membres qui n’ont pas ratifié la convention ont néanmoins leur mot à dire, les amendements devant être approuvés par la Conférence internationale du Travail, qui est ouverte à tous les Membres de l’OIT.

20. En quoi la nouvelle convention innove-t-elle?

Plusieurs aspects constituent une innovation pour le BIT. Tout d’abord, l’agencement de la nouvelle convention est entièrement différent de celui des conventions traditionnelles de l’OIT. La convention comprend des dispositions fondamentales – les articles et les règles – et un code, en deux parties (normes et principes directeurs). Les règles et le code, qui regroupe les normes et les principes directeurs, sont organisés suivant cinq titres:

Titre 1: Conditions minimales requises pour le travail des gens de mer à bord d’un navire.

Titre 2: Conditions d’emploi

Titre 3: Logement, loisirs, alimentation et service de table

Titre 4: Protection de la santé, soins médicaux, bien-être et protection sociale

Titre 5: Respect et mise en application des dispositions.

Le texte contient aussi une note explicative destinée à aider les Membres à appliquer la convention. La présentation relève de l’«intégration verticale», avec un système de numérotation qui établit un lien entre les règles, les normes et les principes directeurs. L’énoncé de chaque règle est suivi d’une phrase ayant pour but d’en expliciter le contenu.

Par exemple:

Règle 1.2 – Certificat médical

Objet: assurer que tous les gens de mer sont médicalement aptes à exercer leurs fonctions en mer
1. Aucun marin ne peut travailler à bord d’un navire s’il ne produit pas un certificat médical attestant qu’il est médicalement apte à exercer ses fonctions. ...

Norme A1.2 – Certificat médical

1. L’autorité compétente exige qu’avant de commencer à servir à bord d’un navire les gens de mer soient en possession d’un certificat médical valide attestant qu’ils sont médicalement aptes aux fonctions qu’ils accompliront en mer. ...

Principe directeur B1.2 – Certificat médical
Principe directeur B1.2.1 – Directives internationales…

Autres innovations: les procédures d’amendement et le système de certification des navires. Toutefois, la plupart de ces nouveautés s’inspirent en fait de ce que l’on trouve déjà dans les instruments d’autres organisations, notamment l’OMI. Une spécificité de la nouvelle convention tient au statut particulier de la partie B, non obligatoire, du code et à sa relation avec la partie A, obligatoire.

21. A quoi correspond le statut particulier de la partie B du code et pourquoi était-il nécessaire?

Le statut de la partie B du code repose sur l’idée qu’il faut combiner fermeté pour tout ce qui touche au respect des droits et flexibilité pour ce qui concerne les modalités de la mise en oeuvre. Sans cette innovation, la nouvelle convention n’aurait aucune chance de recueillir une large ratification. Ainsi, c’est dans les principes directeurs de la partie B, non obligatoire, du code, que l’on a fait apparaître bon nombre de dispositions des conventions du travail maritime actuelles qui portent sur les modalités d’application des droits fondamentaux des gens de mer (et non sur la nature de ces droits). Si on les avait intégrées dans les règles ou dans la partie A du code, qui ont un caractère obligatoire, cela constituerait probablement un obstacle à la ratification.

Ce statut particulier de la partie B est illustré par la série de questions et de réponses reproduites ci-après:

Question: La partie B est-elle obligatoire?
Réponse: Non.

Question: Les Membres qui ratifient la convention peuvent-ils passer outre la partie B?
Réponse: Non.

Question: Les inspecteurs de l’Etat du port contrôlent-ils la mise en application de la partie B?
Réponse: Non.

Question: Le Membre qui ratifie la convention doit-il suivre les orientations stipulées dans la partie B?
Réponse: Non, mais, s’il ne les suit pas, il peut avoir à indiquer – aux organes compétents de l’Organisation internationale du Travail – comment il a appliqué les dispositions obligatoires correspondantes de la convention consolidée.

22. Puisqu’elle n’est pas obligatoire, pourquoi la partie B fait-elle partie de la convention alors qu’elle pourrait faire l’objet d’une recommandation?

La partie A et la partie B du code sont liées. Les dispositions de la partie B, appelées principes directeurs, ne sont pas obligatoires mais elles sont utiles et parfois même essentielles pour la bonne compréhension des règles et des normes, obligatoires, de la partie A. Dans certains cas, les normes de la partie A sont libellées en termes si généraux qu’il pourrait être difficile de les appliquer sans les orientations que fournissent les principes directeurs correspondants de la partie B.

23. Une convention de l’OIT peut-elle contenir des dispositions n’ayant pas force obligatoire?

Il n’y a aucune raison pour que des dispositions obligatoires ne puissent pas être complétées par des dispositions non obligatoires. Il y a des précédents dans des conventions internationales du travail qui utilisent parfois «devrait» (non obligatoire) au lieu de «doit» (obligatoire).

24. Pourquoi semble-t-il y avoir parfois un chevauchement entre les règles et la partie A du code?

Les règles, qui seront approuvées par les assemblées nationales au cours du processus de ratification, non seulement définissent les droits fondamentaux des gens de mer mais encore déterminent le contenu du code, y compris le contenu qu’il aurait à l’avenir par suite des amendements qui viendraient à être adoptés selon la procédure accélérée. Chaque disposition de la partie A du code doit s’inscrire dans le cadre général des articles ou règles pour être valide, ce qui entraîne parfois un certain chevauchement avec les règles.

25. La convention exigera-t-elle des pays qui la ratifieront qu’ils appliquent aussi les conventions fondamentales de l’OIT relatives aux droits de l’homme ou d’autres conventions dont elle fait mention?

Non, mais ces pays devront s’assurer, en vertu de l’article III de la convention, que leur législation et leur réglementation respecte, dans le contexte de la convention, les droits fondamentaux, comme la liberté syndicale, symbolisés par les conventions fondamentales (il ne devrait pas en découler pour autant d’obligation par référence aux dispositions elles-mêmes de ces conventions).

Le fait que d’autres conventions internationales soient mentionnées dans le préambule ou d’autres parties de la convention du travail maritime de 2006 ne crée pas, pour un pays qui la ratifie, d’obligation légale par rapport à celles-ci.