Donner aux jeunes les qualifications adaptées aux emplois d’aujourd’hui

A une période où le chômage des jeunes atteint des niveaux alarmants, les gouvernements cherchent de toute urgence les moyens de faire face à la crise et de neutraliser la bombe à retardement d’une génération de plus en plus découragée et révoltée. Reportage du journaliste Patrick Moser.

Doter les jeunes hommes et femmes des qualifications dont ils ont besoin pour entrer sur le marché du travail est un élément crucial pour lutter contre le chômage qui touche environ 74,8 millions de jeunes dans le monde.

L’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) peuvent jouer un rôle central pour préparer les jeunes au travail, mais les experts affirment que dans bien des cas ces programmes sont incapables de répondre aux besoins du marché du travail.

Pourtant, il est communément admis que l’établissement de passerelles solides entre le monde de l’apprentissage et celui du travail est une clé pour garantir que les jeunes acquièrent les compétences exigées par le marché du travail. Les pays qui ont remporté un certain succès dans la création d’emplois pour les jeunes lient étroitement la formation professionnelle aux besoins du marché du travail.

Michael Axmann, un spécialiste des systèmes de développement des compétences à l’OIT, cite l’exemple de l’Allemagne qui vient de réformer son ancien «système dual» de formation qui associe l’apprentissage au sein des entreprises et la formation théorique dans les établissements scolaires.

A la fin des années 1990, une pénurie criante de qualifications dans le secteur informatique allemand avait entraîné la création d’un nouvel apprentissage conçu pour répondre aux besoins spécifiques du secteur et axé sur l’aide aux jeunes pour qu’ils planifient et mènent leur travail de façon indépendante. Dans l’informatique, l’apprentissage est devenu très populaire; il a facilité le processus de recrutement et a été le fer de lance d’un mouvement de réforme permettant d’accroître la flexibilité et la pertinence de ce «système dual».

«La formation à elle seule ne crée jamais d’emplois»


Le spécialiste de l’OIT avertit cependant que «la formation à elle seule ne crée jamais d’emplois».

Selon M. Axmann, la formation en entreprise aide les jeunes gens à mettre un pied dans le monde du travail. En raison du manque d’expérience professionnelle, ce type de formation aide les jeunes et les employeurs à faire connaissance.

«Les lieux de travail offrent un environnement propice à l’apprentissage, à l’acquisition de savoir-faire sur les équipements modernes et de compétences générales – esprit d’équipe, communication et négociation – liées à l’expérience du monde réel. La formation en entreprise facilite le recrutement en permettant aux employeurs et à leurs futurs employés d’apprendre à se connaître, tandis que les stagiaires contribuent au chiffre d’affaires des organismes de formation», explique l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) dans un récent rapport.

Le rapport de l’OCDE insiste sur le fait que «les possibilités de formation en entreprise sont aussi l’expression directe des besoins des employeurs qui sont les mieux à même d’offrir des débouchés dans les domaines où les qualifications font défaut».

Adapter les compétences aux emplois d’avenir


Dans tous les pays, les conséquences pour le développement des compétences sont considérables. La plupart des emplois qui seront créés au cours des vingt prochaines années n’existent pas aujourd’hui; pourtant l’essentiel de la main-d’œuvre de ces années est déjà en cours d’instruction ou de formation.

Le développement des compétences devrait jouer un rôle majeur dans la conversion des économies à l’utilisation d’énergies propres en créant de nouveaux «emplois verts». Plusieurs pays font déjà état de pénuries de compétences dans les énergies renouvelables et d’autres secteurs «verts». «Il existe un besoin impérieux de formation pour toute une série de compétences requises dans ces divers emplois afin que les économies puissent à la fois continuer à se ‘verdir’ et à réaliser le potentiel de croissance de l’emploi que recèle cette mutation», indique l’OIT dans un rapport à paraître sur les compétences et les emplois verts.

Dans bien des cas, il a fallu réformer les programmes de formation pour qu’ils répondent aux exigences du monde du travail actuel. «Cela implique souvent une refonte complète de la manière dont les compétences sont acquises. Plutôt que d’apprendre à mémoriser de grandes quantités de détails techniques, les étudiants doivent apprendre à réfléchir dans des contextes fonctionnels et à adopter une approche analytique des problèmes», explique M. Axmann.

«Dans l’enseignement et la formation professionnels, nous avons trop longtemps incité nos étudiants à façonner leur cerveau comme un ordinateur doté d’un petit processeur et d’une vaste mémoire; or, ce dont ils ont vraiment besoin pour réussir dans le monde du travail aujourd’hui, c’est d’un cerveau avec un processeur beaucoup plus performant, les capacités de mémoire pouvant être largement réduites», conclut le spécialiste de l’OIT.

L’emploi des jeunes en Serbie
En Serbie, le taux de chômage parmi les jeunes est trois fois supérieur à celui des adultes (respectivement 37,4 et 12,3 pour cent en 2010). Les jeunes les moins éduqués, les jeunes Roms, les jeunes déplacés et réfugiés, sont confrontés à des problèmes encore plus graves: sous-emploi, emplois précaires, mauvaises conditions de travail et travail dans le secteur informel de l’économie.

La politique et le plan d’action en faveur de l’emploi des jeunes (2009-2011) du pays mettent l’accent sur une croissance intensive en emploi, sur l’employabilité et l’insertion sur le marché du travail grâce à des mesures ciblées, et sur la gouvernance du marché de l’emploi des jeunes. Environ 3,9 millions de dollars, émanant de fonds publics et de donateurs et distribués par le fonds pour l’emploi des jeunes, ont appuyé la mise en œuvre de toute une série de mesures intégrées pour l’emploi des jeunes.

Les programmes actifs du marché du travail ont ciblé plus de 3500 jeunes démunis. La plupart de ces jeunes gens ont un faible niveau d’instruction (85 pour cent), sont au chômage de longue date (60 pour cent) et n’ont aucune expérience professionnelle (52 pour cent).

Les données produites par le gouvernement montrent que, parmi les jeunes bénéficiaires qui travaillent, pas moins de 85 pour cent occupent un emploi à plein temps. Plus de la moitié d’entre eux travaillent dans l’entreprise où ils ont suivi leur formation (57 pour cent) et utilisent les compétences acquises grâce à la formation sur le tas (62 pour cent). Qui plus est, les salaires des participants au programme sont entre 10 et 20 pour cent au-dessus du salaire minimum légal.

L’OIT a collaboré avec les ministères de l’Economie et du Développement régional, du Travail et de la Politique sociale, et avec les partenaires sociaux, au développement et à l’application de la politique et du plan d’action en faveur de l’emploi des jeunes; à la création du Fonds pour l’emploi des jeunes; au développement d’objectifs et de cibles spécifiques à l’emploi des jeunes fondés sur l’expérience; à l’intégration du marché du travail, des services sociaux et de migration; et au renforcement des capacités du marché du travail.