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De meilleures qualifications et plus d’emplois formels pour les réfugiés syriens

Un nouveau projet de l’OIT, à l’appui des objectifs de la conférence de Londres sur la Syrie, cherche à renforcer les compétences des réfugiés syriens et à formaliser leur situation professionnelle, dans les secteurs de la construction et de l’agriculture en Jordanie. Il vise aussi à améliorer les perspectives d’emploi des Jordaniens dans les communautés qui accueillent des réfugiés.

Reportage | 29 novembre 2016
AMMAN, Jordanie (OIT Infos) – L’OIT a commencé à mettre en œuvre un nouveau projet en Jordanie: il a pour but d’aider les Syriens travaillant dans les secteurs de la construction et de l’agriculture à perfectionner leurs compétences et à obtenir des permis de travail.

Conçu à l’appui des objectifs de la conférence d’aide à la Syrie qui s’est tenue à Londres en février 2016, le projet financé par le Royaume-Uni va aussi permettre d’améliorer les perspectives d’emploi des Jordaniens dans les communautés qui accueillent des réfugiés.

Intitulé Soutenir les objectifs stratégiques de la conférence de Londres 2016 sur la Syrie, le projet s’appuie sur le travail déjà effectué par l’OIT pour atténuer les pressions sur le marché du travail causées par l’afflux de centaines de milliers de réfugiés fuyant la guerre en Syrie voisine, en collaborant avec le gouvernement afin d’améliorer l’accès des Jordaniens et des réfugiés syriens à l’emploi formel.

Améliorer les compétences et accélérer les demandes de permis de travail dans le bâtiment

Dans le secteur de la construction, l’OIT aide aussi les travailleurs à obtenir des certificats professionnels et leur inscription à la sécurité sociale.

«Après avoir consulté le ministère du Travail et les autres parties prenantes, nous avons constaté que la plupart des réfugiés syriens du secteur de la construction étaient des travailleurs indépendants, travaillant sans permis de travail en l’absence d’employeurs désireux d’engager les efforts et les frais nécessaires à l’obtention de ces permis», a déclaré Maha Kattaa, coordinatrice de l’OIT pour la réponse à la crise des réfugiés syriens en Jordanie.

«Aussi, pour que ces travailleurs puissent être employés de manière formelle, il faut une entité autre qu’un employeur individuel – comme une organisation officielle d’employeurs — pour faciliter leur accès aux permis de travail.»

L’OIT a par conséquent noué un partenariat avec la Société nationale pour l’emploi et la formation professionnelle (NET) afin de dispenser des formations courtes aux Syriens et aux Jordaniens dans les domaines des revêtements de sol, de la peinture, des plâtres, de la plomberie et de la décoration d’intérieur.

Ces cours permettent aux réfugiés d’améliorer leur expertise professionnelle et d’obtenir des certificats de compétences agréées qui vont à leur tour leur permettre de s’inscrire à la sécurité sociale jordanienne en tant que travailleurs indépendants.

Cette combinaison de compétences renforcées et de protection sociale accroît leur employabilité et leur capacité à attirer des organismes officiels qui peuvent demander des permis de travail en leur nom et régulariser leur situation professionnelle.

© ILO
Pour les Jordaniens qui n’ont pas besoin de permis de travail, la formation est l’occasion de perfectionner leurs compétences et d’améliorer leurs perspectives d’emploi.

Les cours de formation, qui se déroulent actuellement dans les villes d’Amman, Irbid, Mafraq et Zarqa, se concluent par un examen organisé par le Centre jordanien d’accréditation et d’assurance qualité.

Le formateur de la NET, Zyad Haymoor, a déclaré que la formation d’un mois, qui comprend aussi un module de formation pratique, couvre les domaines où les travailleurs manquent de connaissances, comme les questions de sécurité et de santé au travail, ainsi que la conception de plans d’architecture et de schémas techniques.

«Ces travailleurs ont déjà une solide expérience, pourtant nous devons les aider à perfectionner leurs compétences et leurs connaissances grâce à la formation», a précisé M. Haymoor.

«La certification va aider les travailleurs à obtenir la reconnaissance de leurs compétences et favoriser l’obtention d’un permis de travail. Cela va atténuer la pression que subissent le travailleurs syriens puisqu’ils seront employés en toute légalité», a-t-il ajouté.

Mohammed Ahmad Al Malouli, réfugié syrien, a des compétences poussées en calligraphie et il travaille actuellement à la décoration de l’intérieur d’une mosquée en construction à Amman.

Il dit s’être inscrit au programme de l’OIT parce qu’il voulait pouvoir travailler librement en Jordanie.

«Le programme m’offre une chance d’améliorer mes compétences et cela m’aidera à obtenir enfin un permis de travail. Cela me permettra d’être plus autonome sur le plan financier. La vie est chère en Jordanie et nous ne pouvons plus dépendre de l’aide financière», a déclaré M. Al Malouli.

A ce jour, environ un millier de travailleurs ont participé au programme, et 460 d’entre eux ont déjà réussi leur test d’aptitudes. Quelque 1 500 autres travailleurs syriens attendent de pouvoir s’inscrire au programme.

L’OIT prévoit d’étendre le programme à d’autres gouvernorats de Jordanie.

Augmenter les demandes de permis de travail dans le secteur agricole

Dans le cadre du même projet, l’OIT, en collaboration avec les coopératives agricoles et le ministère du Travail, travaille sur un programme pilote similaire destiné aux ouvriers agricoles syriens dans le Nord de la Jordanie.

En avril, le gouvernement a accordé un délai supplémentaire aux réfugiés syriens pour demander des permis de travail et il a supprimé les frais de candidature, dans le cadre des efforts déployés pour aider les réfugiés syriens à régulariser leur situation professionnelle. Au début cependant, le nombre de Syriens ayant déposé une demande de permis de travail dans l’agriculture était réduit.

© ILO
«L’OIT s’est entretenue avec des agriculteurs syriens réfugiés et a constaté que, malgré les mesures gouvernementales visant à faciliter le processus de demande de permis de travail pour les travailleurs syriens, le manque d’employeurs désireux et capables de gérer les formalités était la principale raison de ce démarrage poussif», a déclaré Mme Kattaa.

De ce fait, le ministère du Travail, en concertation avec l’OIT, a introduit un nouveau modèle qui prévoit de ne plus lier la demande de permis de travail à des employeurs appartenant spécifiquement au secteur agricole et d’autoriser les coopératives agricoles à faire la demande de permis de travail pour les réfugiés syriens.

L’initiative prévoit la diffusion d’instructions claires aux représentants locaux du ministère du Travail pour les autoriser à délivrer des permis de travail dans les meilleurs délais à un plus grand nombre de réfugiés syriens. Elle intègre aussi des campagnes d’information au sein des communautés de réfugiés sur la procédure à suivre pour demander un permis de travail, ainsi que sur leurs droits et prérogatives aux termes de la législation du travail.

A ce jour, plus de 9 000 ouvriers agricoles syriens ont obtenu des permis de travail grâce à cette initiative conjointe.

Entreprises conjointes

Mme Kattaa a expliqué qu’une partie essentielle du projet global prévoyait la création d’entreprises conjointes entre Jordaniens et réfugiés syriens.

«L’initiative va permettre aux chefs d’entreprise jordaniens d’étendre leur réseau et aux réfugiés de trouver des marchés dans les communautés locales», a-t-elle expliqué.

«Contribuer à mettre en adéquation les compétences des travailleurs jordaniens et syriens et les demandes du marché du travail est indispensable pour atteindre les objectifs de la conférence de Londres.»

Les chiffres officiels situent le nombre total de Syriens présents en Jordanie à 1,3 million, avec seulement 655 000 d’entre eux officiellement enregistrés comme réfugiés. Le gouvernement jordanien, dans le cadre de son Pacte présenté à Londres lors de la conférence d’aide à la Syrie, a convenu d’autoriser un certain nombre de Syriens à entrer sur le marché du travail en contrepartie d’un meilleur accès des Jordaniens au marché européen, à des prêts à taux bonifié, et d’une augmentation des investissements étrangers dans le pays.