Xe Conférence régionale africaine. L'emploi des jeunes: un bond dans l'avenir

Plus de la moitié de la population africaine a moins de 18 ans et est durement frappée par le chômage. Bien plus, 5 à 10 pour cent seulement des nouveaux arrivants sur le marché du travail pourront être intégrés dans l'économie formelle. Cet article explique comment un nouveau «Réseau pour l'emploi des jeunes» (YEN), réunissant l'OIT, la Banque mondiale et les Nations Unies, œuvre à aider les jeunes à trouver plus d'emplois, et des meilleurs, sur le continent.

Article | 25 novembre 2003

Au cours d'une récente conférence de jeunes du nord et de l'ouest de l'Afrique, les participants ont proclamé: «Nous sommes prêts à être partie intégrante de la solution, à être partenaires. Nous ne sommes pas seulement l'avenir, nous sommes le présent.»

Etre l'avenir et le présent exprime bien le défi auquel fait face la jeunesse d'aujourd'hui, à la recherche de plus d'emplois – et de meilleurs – dans un marché du travail étroit. En Afrique, près de 55 pour cent de la population a moins de 18 ans et est durement frappée par le chômage et la pauvreté. Les jeunes chômeurs représentent environ 60 pour cent des personnes sans emploi en Afrique, et ce pourcentage est plus élevé parmi les jeunes femmes dans tous les pays. Dans un nouveau rapport intitulé «Le travail décent au service du développement de l'Afrique» 1, le Bureau international du Travail (BIT) estime que seuls 5 à 10 pour cent des nouveaux arrivants sur le marché du travail pourront être intégrés dans l'économie formelle, et que la majorité des nouveaux emplois sera générée par l'économie informelle.

Il en résulte que «l'hémorragie des cerveaux» – des jeunes hautement qualifiés et éduqués de l'Afrique subsaharienne et d'Afrique du Nord – aggravée par l'émigration du sud vers le nord d'une main-d'œuvre jeune, prive l'Afrique de son capital humain et d'espoir pour l'avenir.

«L'énergie, la capacité d'innovation et les aspirations de la jeunesse sont un capital qu'aucune société ne peut se permettre de dilapider, souligne le BIT. Le chômage persistant des jeunes coûte cher au développement économique et social, perpétue d'une génération à l'autre le cycle de la pauvreté et s'accompagne d'une montée des crimes, de la violence, des crises, de la toxicomanie et de l'extrémisme politique.»

La session plénière sur le travail décent pour les jeunes, qui se tiendra au cours de la Xe Réunion régionale africaine, examinera le rôle que les partenaires sociaux de l'OIT pourront jouer dans l'élargissement des activités du YEN sur le continent.

L'emploi des jeunes sera débattu dans le cadre général du programme de l'Organisation sur l'emploi dans le monde, et l'importance du problème sera portée à l'attention des plus hautes instances politiques, en prévision du Sommet extraordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine qui se tiendra à Ouagadougou en 2004 autour du thème de l'emploi et de la réduction de la pauvreté.

La réponse de l'OIT

De par le rôle qu'elle joue avec l'ONU et la Banque mondiale dans le «Réseau pour l'emploi des jeunes» l'OIT considère cette entreprise comme partie intégrante de l'œuvre à accomplir pour réaliser l'objectif du millénaire, réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015.

L'OIT et ses partenaires au sein du YEN, y compris les représentants des organisations syndicales et patronales, travaillent avec les associations de jeunes pour proposer des solutions novatrices, propres à aider les pays à élaborer des plans d'action nationaux sur l'emploi des jeunes, selon le vœu de l'Assemblée générale des Nations Unies (résolution 57/165 sur la promotion de l'emploi des jeunes). Ces solutions se fondent sur les conclusions des quatre groupes de travail du YEN – création d'emplois, employabilité, esprit d'entreprise, chances égales – et plusieurs tirent parti du travail historique de l'OIT.

L'Egypte, la Namibie et le Sénégal ont pris l'initiative d'être les «chefs de file» 2 du YEN en Afrique, et nombre d'autres pays du continent ont manifesté leur intérêt de collaborer avec l'OIT sur l'emploi des jeunes.

Le Sénégal est l'auteur de la résolution 57/165, coparrainée par 106 pays et adoptée à l'ONU en décembre 2002. En Egypte, le BIT apporte son soutien technique et son expertise au gouvernement dans la mise au point d'un programme national d'emploi pour les jeunes

Le gouvernement kenyan a convoqué une table ronde sur la question, réunissant ministres, représentants des travailleurs et des employeurs et groupements de la société civile. Les participants ont pour tâche d'harmoniser les politiques nationales sur l'emploi des jeunes, passant en revue les programmes existants et s'efforçant de mobiliser ressources et soutien à des projets d'entreprise tournés vers les jeunes, hommes et femmes.

Le YEN entend s'assurer que les initiatives prises pour créer, à l'intention des jeunes, des emplois décents et productifs tiennent compte de leurs aspirations, leurs frustrations et leurs talents. En partenariat avec de jeunes dirigeants d'organisations comptant plus de 120 millions de membres dans le monde, le YEN s'efforce de permettre aux jeunes de jouer un rôle essentiel dans la conception et la mise en application des plans d'action nationaux.

Coopérant également avec le YEN, des organisations et jeunes dirigeants se préoccupent d'analyser les causes profondes du chômage tant au niveau régional que local.

Les organisations de jeunes, partenaires du YEN, comme les scouts et les YWCA (Associations chrétiennes de jeunes femmes) ont recours, par le truchement de leurs nombreuses représentations nationales en Afrique, à un mode d'éducation informel, inculquant à des jeunes connaissances et notions des valeurs et en faisant des êtres responsables, engagés, autonomes et capables de prodiguer un soutien. Ce sont là des qualités appréciées par les employeurs quand ils recrutent jeunes gens et jeunes filles.

Au niveau local, le YEN œuvre avec des jeunes d'entreprises, hommes et femmes, pour créer des emplois durables. Le TECA est un groupement de jeunes basé à Dar-es-Salam, en République-Unie de Tanzanie, qui a entrepris, en 1996, de collecter, contre rémunération, des déchets solides dans les maisons du voisinage. Le groupe, qui a démarré avec quelques charrettes, dispose aujourd'hui de six véhicules et de trois remorques, et ses 50 membres sont au service de 4 000 foyers. Ils perçoivent un salaire supérieur au minimum et le groupe paie un impôt sur les bénéfices.

A la base, le YEN tisse la toile d'un réseau de personnes engagées, qui jouent le rôle de catalyseur économique et social dans la perspective d'un changement. A titre d'exemple, on peut citer une organisation de formation et de conseils dont la finalité est de préparer une nouvelle génération de dirigeants africains. Celle-ci, qui s'intitule «Efficacité, responsabilité et professionnalisme du dirigeant en Afrique» travaille en particulier avec des chefs d'entreprise et des jeunes pour développer une culture de l'émancipation, de la créativité et de la responsabilité civique dans quelque 1 200 petites et moyennes entreprises et auprès de 1 500 jeunes dirigeants en Afrique occidentale.


1

2 Avec le Brésil, le Sri Lanka, l'Indonésie, la Hongrie, l'Azerbaïdjan et le Népal, ces pays africains conduisent l'élaboration de plans d'action nationaux sur l'emploi des jeunes.