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Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Venezuela (République bolivarienne du) (Ratification: 1982)

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La commission prend note des observations de la Fédération des chambres et associations de commerce et de production du Venezuela (FEDECAMARAS), reçues le 11 février 2022, ainsi que de celles transmises par le gouvernement dans son rapport. Elle prend également note des observations de la Centrale bolivarienne socialiste des travailleurs et travailleuses de la ville, de la campagne et de la pêche du Venezuela (CBST-CCP), reçues le 22 avril 2022, et de celles transmises par le gouvernement. La commission prend note des observations de la Centrale des travailleurs Alliance syndicale indépendante (CTASI), de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) et de la Fédération des associations de professeurs d’université du Venezuela (FAPUV), qui ont été transmises par le gouvernement. Les observations susmentionnées se rapportent à des questions traitées dans le présent commentaire. La commission prend également note des observations de l’Union nationale des travailleurs du Venezuela (UNETE), reçues le 5 septembre 2022. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires concernant les observations de l’UNETE.

Suivi des recommandations de la commission d’enquête (plainte déposée au titre de l’article 26 de la Constitution de l’OIT)

La commission prend note des discussions tenues aux 344e, 345e et 346e sessions du Conseil d’administration (mars, juin et octobre-novembre 2022) sur tout fait nouveau concernant le forum de dialogue social visant à donner effet aux recommandations adressées au gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela par la commission d’enquête, ainsi que des décisions prises par le Conseil d’administration. La commission note que le Conseil d’administration réexaminera à sa 347e session (mars 2023) les progrès accomplis par le gouvernement pour assurer le respect des recommandations de la commission d’enquête et qu’il poursuivra son examen des mesures qui pourraient être prises pour atteindre cet objectif.
La commission prend note avec intérêt des informations fournies par le gouvernement au Conseil d’administration concernant le forum de dialogue social visant à donner effet aux recommandations de la commission d’enquête, en particulier que: i) le 7 mars 2022, la séance d’ouverture du forum de dialogue social (ci-après le forum) s’est déroulée en visioconférence, sous la présidence du ministre du Pouvoir populaire pour le processus social du travail, avec la participation d’autres fonctionnaires de ce ministère et des organisations d’employeurs et de travailleurs suivantes: FEDECAMARAS, CBST-CCP, Fédération des chambres et associations des artisans et des micro, petites et moyennes entreprises et industries du Venezuela (FEDEINDUSTRIA), CTASI, CTV, UNETE, Confédération générale des travailleurs (CGT) et Confédération des syndicats autonomes (CODESA); et, avec l’assistance technique du BIT, les termes de référence du forum ont été adoptés au cours de la réunion, où figuraient parmi les sujets à traiter, les questions en suspens relatives à l’application des conventions, à savoir la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, la convention no 87 et la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976; ii) la première réunion en présentiel s’est déroulée du 25 au 28 avril 2022, avec l’assistance technique du Bureau, et a donné lieu à l’adoption d’un plan d’action consistant en un calendrier d’activités relatives au respect des conventions visées; iii) dans le prolongement du forum, des réunions bilatérales avec les partenaires sociaux se sont tenues du 11 au 21 juillet 2022; iv) du 26 au 29 septembre 2022, une autre session du forum a eu lieu, avec l’assistance technique du Bureau, au cours de laquelle les activités menées dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action adopté en avril ont été évaluées et actualisées; et v) une autre session du forum de dialogue social devrait avoir lieu en février 2023.
Libertés civiles et droits syndicaux. Climat exempt de violence, de menaces, de persécutions, de stigmatisation, d’intimidations ou d’autres formes d’agression dans lequel les partenaires sociaux pourront exercer leurs activités légitimes, notamment participer à un dialogue social présentant toutes les garanties. Dans son commentaire précédent, la commission a réitéré les recommandations de la commission d’enquête et exhorté le gouvernement, en concertation avec les organisations concernées, par le biais des réunions bipartites ou tripartites correspondantes, à prendre rapidement toutes les mesures nécessaires pour garantir le respect de ces recommandations. La commission a exhorté le gouvernement à enquêter sur les allégations en suspens de violations de la convention relatives aux libertés civiles et aux droits syndicaux – contenues dans le rapport de la commission d’enquête ou soulevées ultérieurement devant la commission d’experts – et d’y donner la suite appropriée, en vue d’assurer un climat exempt de violence, de menaces, de persécutions, de stigmatisation, d’intimidations ou d’autres formes d’agression dans lequel les partenaires sociaux peuvent exercer leurs activités légitimes, y compris la participation à un dialogue social présentant toutes les garanties. Enfin, la commission a prié le gouvernement de fournir des informations détaillées sur la suite donnée.
En ce qui concerne la situation du syndicaliste Rodney Álvarez, la commission rappelle qu’elle avait noté avec une profonde préoccupation les graves allégations d’atteintes aux garanties de la procédure en l’espèce et qu’elle avait instamment prié le gouvernement d’appliquer immédiatement les recommandations de la commission d’enquête concernant cette affaire. La commission note que le gouvernement indique que, le 1er juin 2022, le onzième tribunal de première instance du circuit judiciaire pénal de la zone métropolitaine de Caracas a statué en dernier ressort ordonnant la libération sans condition de M. Álvarez, à la demande du bureau du ministère public (le bureau du procureur général). De même, le gouvernement réaffirme que M. Álvarez était poursuivi pour homicide volontaire, soit une infraction de droit commun, et non pour l’exercice d’activités syndicales. La commission note que, d’après les informations transmises par le gouvernement au Conseil d’administration (GB.346/INS/12(Rev.1)), M. Álvarez a demandé à être réintégré dans son emploi et a réclamé le paiement des salaires échus et autres prestations qu’il a cessé de percevoir à partir du moment où il a été privé de liberté. À cet égard, l’inspection du travail de Puerto Ordaz, par ordonnance administrative no 001 du 17 octobre 2022, a ordonné que l’entreprise s’acquitte envers M. Álvarez du total dû au titre de ses droits au travail. Elle a en outre déclaré que la demande de réintégration de M. Álvarez à son poste de travail était sans objet du fait que le délai de prescription visé à l’article 34 c) du règlement de la loi organique sur le travail, les travailleurs et les travailleuses (règlement LOTTT) était dépassé. La commission prend note des observations de plusieurs partenaires sociaux (CTV, CTASI et FAPUV) indiquant que M. Álvarez n’a pas été réintégré dans son emploi et qu’après onze ans d’emprisonnement et la déclaration de son innocence, il n’a reçu aucune réparation pour les dommages résultant de son emprisonnement. La commission note que la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela (Constitution) prévoit que toute personne dont la situation juridique a été lésée à la suite d’une erreur judiciaire, d’un retard injustifié ou d’une omission peut demander à l’État de rétablir ou de réparer cette situation (art. 49(6)). Tout en prenant note de la résolution de l’affaire pénale, la commission rappelle le droit à des sanctions et des réparations appropriées pour toutes atteintes aux libertés civiles, et prie en conséquence le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer une juste réparation pour les dommages causés à M. Álvarez, y compris la compensation pécuniaire correspondante, en tenant compte du préjudice subi, et conformément à la Constitution.
La commission note l’indication générale du gouvernement selon laquelle les allégations et observations soumises par les partenaires sociaux ont été traitées, évaluées et transmises aux instances des pouvoirs publics concernés, dans le cadre de la coopération qui existe entre eux. Le gouvernement nie l’existence d’une politique de violence, de menaces, de persécutions, de stigmatisation et d’intimidations ou d’autres formes d’agression à l’encontre des organisations de travailleurs et d’employeurs (et de leurs membres) et affirme que cette question a été abordée dans divers espaces de dialogue entre le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail et les partenaires sociaux, espaces qui s’inscrivent dans le cadre de la politique renouvelée de dialogue national du gouvernement, conformément à la convention, et dans lesquels des garanties sont accordées à tous les partenaires sociaux sans exclusion. En outre, la commission note que le gouvernement a indiqué au Conseil d’administration que, le 23 août 2022, lors d’une réunion du Conseil national de l’économie productive (CNEP), dirigée par le Président de la République, l’intégration à la CNEP des associations et chambres d’employeurs des secteurs productifs dirigées par les présidents de la FEDECAMARAS et de la FEDEINDUSTRIA, est devenue effective.
La commission note que le plan d’action adopté dans le cadre du forum de dialogue social et sa mise à jour, pour donner suite aux décisions du Conseil d’administration du BIT et des recommandations de la commission d’enquête, ont notamment donné les résultats attendus suivants:
  • i)le traitement des signalements d’actes allégués de stigmatisation et de discrédit, notamment la présentation aux autorités compétentes, par les organisations concernées, de listes à jour contenant des informations qui permettent de recenser les cas concernant le gouvernement; la tenue de réunions bipartites entre le gouvernement et les organisations d’employeurs et de travailleurs aux fins de l’examen et de l’adoption de mesures pertinentes et du suivi de ces mesures; et
  • ii)le traitement effectif des signalements de cas de détention, de procédures judiciaires ou de mesures conservatoires de substitution à la privation de liberté, qui seraient liés à l’exercice d’activités syndicales légitimes, notamment la présentation de listes à jour des signalements préalablement vérifiés par les secteurs concernés, contenant des informations précises sur les cas; la communication de ces signalements au bureau du procureur ou à toute autre autorité compétente; la tenue de réunions bipartites afin de prendre les mesures voulues.
Quant aux allégations de FEDECAMARAS concernant les terres, la commission rappelle qu’elle avait pris note de diverses mesures mentionnées par le gouvernement, notamment la mise en place de tables rondes avec l’Institut national des terres (INTI) dans le but de trouver des solutions aux cas soulevés par la Fédération nationale des éleveurs du Venezuela (FEDENAGA), et la constitution d’une commission technique chargée de traiter les sujets intéressant la FEDENAGA et l’INTI, ainsi que l’établissement d’une liste des cas concernés devant faire l’objet d’une attention prioritaire, également signalés par la FEDECAMARAS. La commission prend note que le gouvernement fait état de la collaboration instaurée entre le ministère du Pouvoir populaire pour l’agriculture et les terres et l’Institut national des terres (INTI) pour traiter les cas présentés par la FEDECAMARAS. La commission prend note des observations de la FEDECAMARAS concernant la liste des propriétés foncières visées par les mesures de récupération des terres mises en place par l’INTI, indiquant que des réunions ont eu lieu avec l’INTI mais qu’il n’y a pas eu de restitutions effectives aux propriétaires légitimes, même si des progrès sont à noter dans le cas de deux propriétés, Fundo El 75 et Agropecuaria Boralito, S.A., dont les occupants illégitimes ont été installés ailleurs par l’INTI.
La commission accueille favorablement que le gouvernement indique qu’il est prévu de créer deux bureaux du procureur de la nation ayant une compétence spécialisée dans la défense des droits des travailleurs. La commission prie le gouvernement de rendre compte de tout fait nouveau à cet égard.
Le gouvernement conclut en réaffirmant que, contrairement aux allégations concernant une politique de violence, de persécution ou d’autres formes d’agression visant des partenaires sociaux, des efforts sont déployés pour continuer de renforcer les espaces de dialogue.
La commission note que la CBST-CCP souligne la création d’espaces de dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux, dont le forum de dialogue social et des réunions bilatérales. La CBST-CCP rejette les observations des partenaires sociaux qui affirment que l’État insuffle une politique de violence, de persécution et d’agression, et dit qu’il est en réalité le garant du libre exercice du droit syndical pour toutes les organisations, sans distinction.
La commission prend note des observations transmises par les autres partenaires sociaux qui affirment que les résultats obtenus par les instances de dialogue n’ont pas permis de surmonter les difficultés précédemment dénoncées ni de combler les retards dans la mise en œuvre du plan d’action visant à faire appliquer cet ensemble de recommandations. En outre, ils dénoncent d’autres violations de la convention:
  • –La FEDECAMARAS affirme qu’en avril 2022, des accusations ont été formulées à l’endroit de l’ancien président de la FEDECAMARAS lors d’une émission diffusée sur la chaîne de télévision publique. À titre de suivi et conformément au plan d’action, l’information a été envoyée au ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail pour que cette plainte puisse être examinée dans des réunions bipartites. La FEDECAMARAS ajoute que, le 12 août 2022, dans l’État de Bolívar, un dirigeant syndical et deuxième directeur principal de la Chambre de commerce et d’industrie de la municipalité General Manuel Cedeño (État de Bolívar) a été arrêté et inculpé pour des délits présumés en lien avec la vente de gaz. En outre, la FEDECAMARAS dénonce le fait que, les 29 et 30 août 2022, le député à l’Assemblée nationale de l’État de Yaracuy, M. Braulio Álvarez, a diffusé des messages de haine et des menaces à l’encontre du président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández, du président de la FEDENAGA, M. Armando Chacín, et d’autres dirigeants syndicaux, dans le cadre du processus de restitution des terres occupées illégitimement. Par ailleurs, la FEDECAMARAS reconnaît une certaine amélioration dans la relation avec le gouvernement: des réunions se sont tenues, dans un climat empreint de respect et de cordialité (par exemple, le 19 juillet 2022, avec le ministre du Pouvoir populaire pour le processus social du travail, sur le plan d’action et d’autres thèmes, et le 28 juillet 2022, sur les problèmes fonciers) et elle a participé au Conseil national de l’économie productive (CNEP) en août 2022. Elle répète qu’il est nécessaire de disposer d’une instance officielle et permanente pour résoudre les questions liées à la plainte, sous la coordination du ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail et en coordination avec les autres autorités publiques, en vue de parvenir à des solutions rapides et efficaces, car les réunions organisées n’ont pas respecté pas les modalités recommandées par la commission d’enquête, puis rappelées par la commission d’experts. En ce qui concerne l’un des cas examinés par la commission d’enquête, elle confirme que dans l’affaire concernant M. Eduardo Garmendia, ancien président de la CONINDUSTRIA, le non-lieu a été confirmé et la mesure d’interdiction d’aliéner et de grever ses biens a été levée le 24 août 2022. Enfin, l’organisation réaffirme sa préoccupation puisqu’à ce jour, le gouvernement n’a toujours pas accepté les recommandations de la commission d’enquête.
  • –La CTV, la CTASI et la FAPUV indiquent que l’issue des instances de dialogue n’a pas permis de remédier aux violations graves des droits de l’homme, des droits au travail et des droits syndicaux, ni de combler les importants retards dans la mise en œuvre du plan d’action. Tout en reconnaissant que des détenus ont été libérés sporadiquement, elles dénoncent à nouveau les nombreuses arrestations arbitraires de syndicalistes et de dirigeants syndicaux, dont certaines liées à l’exercice du droit de manifester pacifiquement et du droit à la liberté d’expression. Elles dénoncent la criminalisation et la judiciarisation des actions menées pour défendre les droits au travail et les droits de l’homme. Elles dénoncent aussi des arrestations et des emprisonnements sans mandat d’arrêt. De juillet à août 2022, les dirigeants syndicaux ci-après ont ainsi été appréhendés par la Direction générale du contre-espionnage militaire, le Service national bolivarien de renseignement ou la police nationale bolivarienne: M. Emilio Negrín, président de la Fédération des travailleurs des tribunaux; M. Alcides Bracho, dirigeant syndical des enseignants vénézuéliens; M. Gabriel Blanco, de la CTASI; M. Reynaldo Cortés, dirigeant syndical de la CTV; et M. Douglas González, dirigeant syndical dans une entreprise d’aluminium. La CTV, la CTASI et la FAPUV réitèrent leurs observations précédentes concernant les arrestations d’autres syndicalistes et dirigeants syndicaux. Elles dénoncent des actes d’intimidation et d’agression à l’endroit de dirigeants syndicaux et soulignent en particulier le cas de M. Pablo Zambrano, secrétaire exécutif de la Fédération des travailleurs de la santé (FETRASALUD), qui a été interrogé par le Corps des enquêtes scientifiques, pénales et criminelles et a fait l’objet de menaces de la part de divers groupes lorsqu’il a voulu déposer une plainte auprès du bureau du procureur.
La commission note avec regret que le gouvernement ne répond que partiellement aux observations précédentes des partenaires sociaux en fournissant uniquement des informations sur: i) le cas de M. Eduardo Garmendia (informations qui coïncident avec celles communiquées par la FEDECAMARAS dans le présent commentaire); et ii) le cas de M. Eudis Girot, dénoncé dans les observations de la CTV, de l’ASI et de la FAPUV: dirigeant syndical du secteur pétrolier, il a été arrêté par la Direction générale du contre-espionnage militaire, le 18 novembre 2020 à Puerto La Cruz, accusé, entre autres, de terrorisme et détenu dans l’établissement pénitentiaire Rodeo III. Il a été acquitté du délit de divulgation d’informations confidentielles (article 134 du Code pénal) et de possession illégale d’armes à feu (article 111 de la loi organique relative au désarmement et au contrôle des armes et des munitions), mais a été condamné pour incitation à la haine (article 235 du Code pénal) à une peine de prison de trois ans; la mesure conservatoire de substitution à la privation judiciaire de liberté a été maintenue. Le gouvernement fait également savoir que la procédure se trouve actuellement au stade de la présentation éventuelle de recours et, en cas d’arrêt définitif, le tribunal compétent imposera des formules alternatives pour l’exécution de la peine, conformément au Code organique de procédure pénale.
Tout en se félicitant des réunions organisées et des différentes sessions du forum de dialogue social tenues (en mars, en ligne, et en avril et en septembre 2022, en présentiel et avec l’assistance technique du BIT), avec la participation des partenaires sociaux, et accueillant favorablement les engagements que le gouvernement a pris devant le Conseil d’administration de poursuivre le dialogue sur l’application de la convention, notamment par la préparation d’un calendrier (prévoyant des activités tripartites et bipartites à réaliser entre la seconde moitié de novembre 2022 et février 2023), la commission prend note avec un profond regret de l’absence de réponses et d’informations concrètes sur les faits dénoncés par les partenaires sociaux dans leurs observations, actuelles et précédentes, l’absence de résultats tangibles dans les espaces de dialogue (y compris les différentes réunions bipartites) et le manque de respect des modalités de dialogue recommandées par la commission d’enquête (il n’y aurait eu ni rédaction d’un procès-verbal, ni établissement d’un commun accord d’un ordre du jour et d’un calendrier, ni nomination d’une présidence et d’un secrétariat indépendants). Elle déplore également que diverses organisations d’employeurs et de travailleurs aient formulé de nouvelles allégations graves de violations des libertés civiles et des droits syndicaux. À cet égard, elle prend note avec un profond regret des informations que le gouvernement a transmises au Conseil d’administration concernant certains des nouveaux cas dont il est question dans les observations des organisations syndicales et constate que, lors du forum de dialogue social de septembre et comme le précise le rapport du Conseil d’administration, des mesures privatives de liberté ont été confirmées à l’encontre de M. Emilio Negrín, président de la Fédération des travailleurs des tribunaux et participant au forum de dialogue social d’avril 2022, de M. Gabriel Blanco, dirigeant du Syndicat des travailleurs de l’Assemblée nationale et de la CTASI, et de M. Reynaldo Cortés, représentant syndical de la CTV. Tous les trois ont été accusés de conspiration et d’association de malfaiteurs. La commission observe que ces cas ainsi que d’autres concernant des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, sont repris dans la communication adressée au gouvernement par le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association et la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste (voir document AL VEN 4/2022, 13 septembre 2022).
Compte tenu de ce qui précède, la commission exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires, en concertation avec les organisations concernées par l’intermédiaire de mécanismes formels et en respectant les recommandations de la commission d’enquête, pour garantir l’application de ces recommandations et des décisions adoptées dans le cadre du forum de dialogue social. Elle l’exhorte de nouveau à enquêter sur les allégations en suspens de violations de la convention relatives aux libertés publiques et aux droits syndicaux figurant dans le rapport de la commission d’enquête ou communiquées ultérieurement à la commission d’experts, et d’y donner suite, conformément au plan d’action, en vue de garantir un climat exempt de violence, de menaces, de persécutions, de stigmatisation, d’intimidations ou de toute autre forme d’agression dans lequel les partenaires sociaux peuvent exercer leurs activités légitimes, y compris participer à un dialogue social présentant toutes les garanties. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur la suite donnée, en indiquant toutes les actions concrètes menées.
Articles 2 et 3 de la convention. Respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, en particulier vis-à-vis du gouvernement ou des partis politiques, et élimination de toute ingérence ou favoritisme de la part des autorités de l’État. Dans son commentaire précédent, la commission a de nouveau rappelé les conclusions de la commission d’enquête et les recommandations expressément relatives à la nécessité de garantir le respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, ainsi que l’élimination de toute ingérence ou favoritisme de la part des autorités de l’État. La commission a instamment prié le gouvernement de soumettre toutes les allégations en suspens aux réunions correspondantes tenues avec les organisations concernées, y compris celles relatives à l’ingérence et aux obstacles concernant les élections et celles relatives à l’utilisation des conseils au sein desquels les travailleurs participent à la gestion des activités de production (Consejos productivos de trabajadores, CPT) comme mécanismes qui limitent l’exercice de la liberté syndicale, en vue de parvenir rapidement à des avancées concrètes.
La commission note que, dans le plan d’action adopté par l’instance de dialogue social et sa mise à jour, les parties signataires ont indiqué que les élections syndicales étaient autonomes; dans le cadre de sa mise en œuvre de la décision adoptée, conformément à ce qui a été convenu à la réunion des organisations de travailleurs avec le Conseil national électoral (CNE) (28 septembre 2022), il a été décidé de lancer un plan de travail avec le pouvoir électoral pour fournir des orientations et un accompagnement aux organisations syndicales s’agissant de leurs processus électoraux, lorsqu’elles en font la demande. Ce plan d’action comprend, parmi ses résultats attendus comme suite aux décisions du Conseil d’administration du BIT et aux recommandations de la commission d’enquête:
  • –le traitement effectif des signalements relatifs aux procédures d’enregistrement et aux élections syndicales (y compris communication des signalements effectués par les organisations concernées; analyse et adoption des mesures appropriées et notification des organisations concernées par le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail; poursuite du dialogue sur l’assistance électorale offerte par le CNE aux organisations syndicales, à la demande de celles-ci); et
  • –le traitement et le suivi effectifs des signalements d’ingérence présumée des CPT dans le fonctionnement autonome des organisations d’employeurs et de travailleurs ou dans les relations entre ces organisations (y compris communication des signalements au ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail par les organisations concernées; vérification des signalements et examen des mesures à prendre pour garantir l’absence totale d’ingérence et l’application des mesures correctives pertinentes par le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail; notification des organisations concernées; consultations au sujet de l’adoption du règlement relatif à la loi constitutionnelle sur les CPT.
La commission note que le gouvernement rejette à nouveau les allégations d’ingérence et de non-respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, ainsi que de favoritisme de la part des autorités à l’égard d’organisations qui lui seraient attachées, en indiquant qu’il a apporté la preuve de son attachement strict à la liberté syndicale et qu’il a adopté une politique consistant à tenir compte de toutes les organisations représentatives. Le gouvernement souligne à ce propos la tenue du forum de dialogue social et ses différentes sessions.
En ce qui concerne la création des CPT, la commission note que le gouvernement redit ce qu’il avait indiqué aux organes de contrôle, y compris à la commission d’enquête, à savoir que loin d’exclure la liberté syndicale et de lui nuire, les CPT encouragent l’organisation de la classe ouvrière, donnent un élan à sa participation à la gestion des activités de production et ne remplacent nullement les syndicats ni ne leur sont contraires, conformément à l’article 17 de la loi constitutionnelle sur les CPT. Le gouvernement ajoute que le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail n’a reçu aucune dénonciation ni plainte concernant un cas concret dans lequel l’organisation des CPT dans une entité de travail en aurait empêché le bon fonctionnement. Le gouvernement répond aux observations de la FEDECAMARAS et d’autres organisations syndicales en disant que le plan d’action adopté dans le cadre du forum de dialogue social porte création d’un mécanisme de plainte ou de dénonciation sur les effets préjudiciables des CTP sur le fonctionnement d’une entité de travail et qu’à ce jour les organisations concernées n’ont déposé aucune plainte sur ce point.
La commission prend également note des observations de la FEDECAMARAS, de la CTASI, de la CTV et de la FAPUV qui alertent sur le fait que le gouvernement, au lieu de donner suite aux recommandations de la commission d’enquête, continue à encourager la constitution et les agissements des CPT et rappellent que ce sont des mécanismes d’ingérence dans l’autonomie des organisations syndicales et dans la vie professionnelle des travailleurs. La FEDECAMARAS dit que: i) 2 555 CPT ont été constitués dans les entreprises; ii) le président de la République a chargé le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail de rédiger un règlement pour les CPT; iii) une formation diplômante à la gestion d’un CPT en entreprise a été mise en place afin de renforcer, entre autres, le processus de transmission d’informations au vice-ministère de l’Éducation et du Travail pour la libération; et iv) le 30 août 2022, une tentative a été faite de créer un CPT chez Procter & Gamble Barquisimeto, dans l’État du Lara, mais le syndicat des travailleurs de l’entreprise (SINTRAPROB) s’y est opposé et aucun travailleur n’a voulu participer à l’initiative. La CTASI, la CTV et la FAPUV dénoncent le fait que s’est tenue, entre le 5 et le 7 février 2022, la troisième rencontre nationale des CPT, tout en indiquant qu’il en existe beaucoup et que dix avaient été constitués en 2022.
En ce qui concerne les procédures d’enregistrement et les élections syndicales, la commission note que le gouvernement dit que, dans le cadre du suivi du plan d’action, deux ateliers ont été organisés avec des organisations de travailleurs (CBSTCCP, CTASI et CTV) et d’employeurs (FEDECAMARAS et FEDEINDUSTRIA), les 24 et 25 août 2022 respectivement, sur les procédures et prescriptions établies par la législation concernant le registre national des organisations syndicales (RNOS). Le gouvernement a dit au Conseil d’administration que, le 19 octobre 2022, une réunion s’était tenue avec la FEDECAMARAS et la FEDEINDUSTRIA pour avancer dans la définition des procédures et conditions requises pour l’enregistrement de ces organisations au niveau national, une table ronde étant mise en place pour discuter des propositions présentées par les partenaires sociaux. La commission note que, à ce sujet, dans ses observations, la FEDECAMARAS dit que, le 6 mai 2022, les procèsverbaux de ses sessions annuelles (2018-2021) ont été versés au registre correspondant. La FEDECAMARAS dit également que, le 25 août 2022, un atelier a été organisé avec des organisations d’employeurs (FEDECAMARAS et FEDEINDUSTRIA) concernant le RNOS. À cette occasion, la FEDECAMARAS a de nouveau insisté sur la nécessité de préserver la confidentialité et la valeur commerciale des listes de membres des organisations syndicales et réaffirmé son point de vue selon lequel la réglementation à cet égard ne s’appliquait pas aux organisations d’employeurs. Elle a demandé s’il était possible d’élaborer une règlementation visant à établir un registre pour information uniquement, en se penchant sur d’autres expériences similaires en Amérique latine.
S’agissant des élections syndicales, le gouvernement réaffirme que le CNE ne procède à un accompagnement qu’à la demande de l’organisation syndicale et que les organisations peuvent tenir leurs élections avec ou sans l’assistance du CNE, selon que prévu par leurs statuts, ainsi que leurs modifications ultérieures. Le gouvernement affirme qu’il est prêt à continuer à travailler sur ce sujet dans les différents espaces de dialogue dans les cas où la pratique n’est pas conforme au système juridique en vigueur. Il dit qu’en mars 2022 le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail a rendu un avis juridique relatif aux observations de différentes organisations syndicales sur les agissements du CNE et sur l’existence ou non d’une obligation de passer par lui pour organiser les élections des comités directeurs des syndicats. Dans ses observations, la CTASI cite cet avis juridique d’après lequel, «pour garantir la légitimité des organisations syndicales, celles-ci, faisant usage de leur autonomie, pourront décider d’être accompagnées par le CNE ou d’organiser les élections par leurs propres moyens, pour autant qu’elles respectent les garanties démocratiques prescrites (sic) concernant le déroulement du processus électoral syndical».
À ce sujet, la commission observe, d’une part, que les observations de la CBSTCCP mettent en avant les procédures établies pour faciliter l’organisation d’élections, tant par le ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail que par le CNE, et qu’elles affirment avoir tenu des élections syndicales autonomes, en disant que 297 syndicats ont demandé au CNE des conseils techniques et un accompagnement pour leurs processus électoraux, et que, d’autre part, les observations de la CTASI, de la CTV et de la FAPUV soulignent qu’il n’y a pas eu de changement, ni en droit ni dans la pratique, concernant la politique gouvernementale relative à l’enregistrement des organisations syndicales et au retard électoral. Ces organisations dénoncent le fait que la participation du CNE aux élections syndicales n’est pas facultative, comme le montre la suspension des élections au barreau de l’État de Carabobo, ordonnée par le Tribunal suprême de justice, car les élections avaient été organisées sans la participation du CNE (mai 2022).
Compte tenu de ce qui précède, s’agissant de ces deux catégories de recommandations relatives à l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, la commission note avec un profond regret que le gouvernement ne fournit aucune information sur des avancées précises qui auraient été apportées en réponse aux allégations concrètes exprimées dans les observations précédentes de multiples partenaires sociaux et que les partenaires sociaux continuent de dénoncer, dans les observations les plus récentes de la FEDECAMARAS, de la CTASI, de la CTV et de la FAPUV, les agissements des CPT et l’ingérence et les obstacles concernant les élections syndicales et l’enregistrement des syndicats. De la même manière, la commission observe qu’il a été décidé, dans le plan d’action actualisé, de mener des consultations sur l’adoption du règlement d’application de la loi constitutionnelle sur les CPT, que la première réunion était fixée à fin octobre 2022 et que le dialogue – engagé le 28 septembre 2022 – sur l’assistance du CNE aux organisations syndicales s’agissant de leurs processus électoraux se poursuivrait, et que des réunions de suivi seraient organisées.
Compte tenu de ce qui précède, la commission se réfère à nouveau aux conclusions de la commission d’enquête et réitère ses recommandations spécifiques sur la nécessité de garantir le respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs, ainsi que l’élimination de toute ingérence et de tout favoritisme de la part des autorités de l’État. La commission prie instamment le gouvernement de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires, dans le cadre du dialogue avec les organisations concernées et des décisions prises dans le plan d’action actualisé lors du forum de dialogue social pour traiter toutes les allégations en suspens, y compris celles relatives à l’ingérence et aux obstacles concernant les élections et celles relatives à l’utilisation des CPT comme mécanismes qui limitent l’exercice de la liberté syndicale, en vue de parvenir rapidement à des avancées concrètes. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les activités concrètes menées et sur les résultats obtenus à ce sujet.
En dernier lieu, dans leurs observations, la CTASI, la CTV et la FAPUV affirment qu’a été instauré, le 7 mai 2021, le Conseil présidentiel du gouvernement du pouvoir populaire de la classe ouvrière, exclusivement constitué de militants du parti du gouvernement. Les organisations syndicales affirment que ce conseil examine notamment des questions relatives à la protection des prestations sociales, aux pensions et à la protection sociale, ainsi qu’à la présentation de modèles de contrats collectifs adaptés à la guerre économique. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur ce point.
Gestion financière, administration interne et inviolabilité des locaux. La commission prend note des observations de la CTASI, de la CTV et de la FAPUV sur le fait que l’État retient et ne transfère pas les cotisations syndicales, bien que plusieurs organisations syndicales aient demandé à plusieurs reprises au gouvernement de les leur restituer. Ces organisations disent que cette situation prévaut depuis septembre 2021, lorsque les salaires des entités publiques ont commencé à être administrés par la plateforme électronique «sistema patria». Par ailleurs, elles affirment que des actes antisyndicaux ont visé les locaux et les biens du Syndicat unitaire national (SUNEPINPARQUES). La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires sur ce point.
Articles 2 et 3. Questions législatives. La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, pour réviser différentes dispositions de la loi organique sur le travail, les travailleurs et les travailleuses (LOTTT), en particulier ses articles 367, 368, 387, 388, 395, 402, 403, 410, 484 et 494. Dans son commentaire précédent, elle a instamment prié le gouvernement de soumettre à consultation tripartite, sans plus de délai et dans le cadre des réunions de dialogue, la révision des lois et des normes qui posent des problèmes de compatibilité avec la convention, comme la LOTTT, à la lumière des conclusions de la commission d’enquête (comme celles relatives à l’enregistrement des syndicats, au retard électoral ou aux CPT) et des commentaires des autres organes de contrôle de l’OIT. La commission prie également le gouvernement d’inclure dans ce dialogue tripartite, compte tenu des allégations des partenaires sociaux, la discussion sur les effets de la loi constitutionnelle contre la haine, pour la coexistence pacifique et la tolérance sur l’exercice de la liberté syndicale, ainsi que sur toute mesure nécessaire pour garantir que l’application de ladite loi ne peut ni en limiter ni en réprimer l’exercice. La commission rappelle également que la commission d’enquête a recommandé de manière générale de soumettre à consultation tripartite la révision des lois et des normes qui développent la convention, comme la LOTTT, qui posent des problèmes de compatibilité avec la convention à la lumière des conclusions de la commission d’enquête et des commentaires des organes de contrôle de l’OIT.
La commission note que le gouvernement dit que la loi constitutionnelle contre la haine, pour la coexistence pacifique et la tolérance contribue à faire naître les conditions nécessaires pour promouvoir et garantir la reconnaissance de la diversité de la tolérance et du respect, ainsi que pour prévenir et éradiquer toute forme de haine, de harcèlement, de discrimination et de violence. Le gouvernement affirme que cette loi ne nuit pas à l’exercice de la liberté syndicale mais qu’elle contribue à son exercice. La commission note avec une profonde préoccupation que le gouvernement ne répond pas aux observations de la CTV, de la CTASI et de la FAPUV qui alertent sur le fait que la loi constitutionnelle contre la haine, pour la coexistence pacifique et la tolérance sert, comme les accusations de terrorisme, de prétexte à la criminalisation de l’activité syndicale, à la détention arbitraire de dirigeants syndicaux et à l’imposition de peines de prison à ces personnes pour avoir exercé leur liberté d’expression. La commission note avec regret que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur l’inclusion de la discussion des effets de cette loi sur l’exercice de la liberté syndicale, dans le dialogue tripartite.
La commission réitère les recommandations de la commission d’enquête relatives aux questions législatives et prie instamment le gouvernement de soumettre à consultation tripartite, dans le cadre d’un dialogue social officiel, et sans plus de délai, la révision des lois et des normes qui posent des problèmes de compatibilité avec la convention, comme la LOTTT, à la lumière des conclusions de la commission d’enquête (comme celles relatives à l’enregistrement des syndicats, au retard électoral ou aux CPT) et des commentaires des autres organes de contrôle de l’OIT. La commission prie à nouveau le gouvernement d’inclure dans ce dialogue tripartite, compte tenu des allégations des partenaires sociaux, la discussion sur les effets de la loi constitutionnelle contre la haine, pour la coexistence pacifique et la tolérance sur l’exercice de la liberté syndicale, ainsi que sur toute mesure nécessaire pour garantir que l’application de ladite loi ne peut ni en limiter ni en réprimer l’exercice. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tous faits nouveaux à ce sujet.
La commission accueille favorablement les informations que le gouvernement a fournies au Conseil d’administration dans lesquelles il s’engage de nouveau à consulter les partenaires sociaux sur les projets de loi ou les réformes correspondantes, engagées par l’Assemblée nationale, liées aux normes internationales du travail. À ce sujet, le gouvernement a dit que s’est tenue, le 11 octobre 2022, la consultation publique des organisations d’employeurs et de travailleurs sur la loi relative aux travailleurs et travailleuses à domicile, à laquelle ont participé la FEDECAMARAS, la FEDEINDUSTRIA, la CBST-CCT, la CTASI, la CTV et la CGT, et qu’il en irait de même pour la loi sur les travailleuses et les travailleurs en situation de handicap.
La commission observe toutefois avec une profonde préoccupation que: i) le gouvernement n’apporte pas de réponses précises aux multiples allégations graves soulevées dans le précédent commentaire; ii) d’après les observations de plusieurs partenaires sociaux, le dialogue mené jusqu’à présent ne remplit pas encore les conditions nécessaires pour être efficace et n’aurait apporté aucune solution concrète aux problèmes en suspens, ce qui fait que l’on ne peut regrettablement pas constater de progrès majeurs ni tangibles dans l’application des recommandations de la commission d’enquête; et iii) les allégations graves de violations de la convention renvoyant à des schémas ou à problèmes systémiques sur lesquels la commission d’enquête a attiré l’attention restent d’actualité.
La commission note que le gouvernement dit à nouveau qu’il a demandé l’assistance technique du BIT pour déterminer la représentativité des organisations d’employeurs et de travailleurs, compte tenu que cette assistance sera essentielle pour déterminer la représentativité avec des critères objectifs, vérifiables et pleinement respectueux de la liberté syndicale. Le gouvernement dit que, dans le cadre des ateliers susmentionnés concernant le RNOS, l’importance de ce registre a été rappelée aux partenaires sociaux s’agissant de la détermination de la représentativité des organisations sociales. Sur ce point, la commission réaffirme que, compte tenu que les recommandations sont liées entre elles et qu’elles doivent être examinées dans leur ensemble, leur application doit se faire de manière globale et dans un climat dans lequel les partenaires sociaux peuvent exercer leurs activités légitimes, notamment marqué par la participation à un dialogue social présentant toutes les garanties et le plein respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission recommande à nouveau que l’assistance technique du BIT soit définie de manière tripartite dans le cadre d’un dialogue officiel et à la lumière de ces considérations.
La commission exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires, avec l’assistance du BIT, par l’intermédiaire d’un dialogue officiel et comme indiqué dans le rapport de la commission d’enquête, pour qu’effet soit pleinement donné à ses recommandations afin que des avancées concrètes puissent être constatées sans délai, y compris celles décidées par les parties dans le plan d’action actualisé qui a été adopté lors du forum de dialogue social. La commission réaffirme également qu’il est fondamental que les questions soulevées ci-dessus reçoivent toute l’attention de l’OIT et de son système de contrôle, et ce, de manière continue, afin que soient adoptées des mesures solides et efficaces pouvant conduire au plein respect de la convention, en droit et dans la pratique.
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