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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d'administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d'administration- 25. Le comité a examiné pour la dernière fois ce cas concernant des
allégations d’actes antisyndicaux à l’encontre de travailleurs liés à un programme de
l’administration publique au moyen de contrats temporaires (contrats administratifs de
prestation de services, ci-après CAS) lors de sa réunion de mars 2015. [Voir rapport
no 374, paragr. 695-723.] À cette occasion, le comité: a) a prié le gouvernement de le
tenir informé du résultat des recours en justice formés par les dirigeants syndicaux
MM. Roger Freddy Gamboa Ryes, Alfonso Díaz Córdova et Jorge Dagoberto Mejía Maza et
Mme Estela González Bazán au motif du non-renouvellement de leur contrat administratif
de prestation de services; b) en ce qui concerne les allégations de pressions exercées
et de menaces verbales pour susciter le renoncement à l’affiliation syndicale, le
comité, tout en prenant note des déclarations du gouvernement concernant la difficulté
que soulèvent l’enquête et la recherche de preuves de menaces ou de pressions dans ce
type de cas, a souligné que les organisations plaignantes alléguaient une diminution
importante du nombre des affiliés et le non-renouvellement de contrats entre 2012 et
2013 de 27 dirigeants; il a demandé donc de nouveau au gouvernement d’ordonner sans
délai à l’inspection du travail de diligenter une enquête et de tenir le comité informé
du résultat; et c) a rappelé également que les contrats à durée déterminée ne devraient
pas être utilisés délibérément à des fins antisyndicales. Le comité souligne de plus
que, dans certaines circonstances, le renouvellement répété de contrats à durée
déterminée pendant plusieurs années peut être un obstacle à l’exercice des droits
syndicaux. Le comité a prié le gouvernement de tenir compte de ce principe dans les
enquêtes qu’il diligente.
- 26. Par des communications en date du 13 juillet 2015, du 16 août 2016 et
du 29 mai 2017, la Fédération nationale des travailleurs du Programme national d’appui
direct aux plus pauvres (programme «Juntos») (FENATRAJUNTOS) a envoyé des informations
complémentaires. Pour sa part, le gouvernement a envoyé des observations complémentaires
par des communications en date du 7 janvier 2016, du 31 octobre 2017 et du 8 février
2024.
- 27. Dans ses différentes communications, FENATRAJUNTOS allègue que le
gouvernement ne s’est pas conformé aux recommandations du comité. L’organisation allègue
en particulier que le gouvernement n’a pas ordonné, et n’a pas l’intention d’ordonner,
une enquête de l’inspection du travail, comme le recommande le comité, étant donné que
la Surintendance nationale de l’inspection du travail (SUNAFIL) a déclaré qu’elle
n’était pas compétente pour effectuer des inspections dans les domaines qui font l’objet
de la plainte. L’organisation réitère également ses allégations antérieures concernant
les pressions exercées sur ses membres pour qu’ils se désaffilient, sous forme de
menaces verbales, et la non-attribution de congés syndicaux.
- 28. L’organisation plaignante se réfère ensuite à des faits nouveaux en
alléguant le non-renouvellement par le programme «Juntos» des contrats («licenciements
déguisés») de plusieurs de ses dirigeants syndicaux en 2016 et 2017 en violation de leur
protection syndicale renforcée (fuero sindical) (M. Carlos Enrique Zúñiga Calderón,
secrétaire à la défense; M. Héctor David Rivera Huanca, secrétaire général de la
FENATRAJUNTOS à Puno; M. Fidel Aresio Salas Herrera, secrétaire général de la
FENATRAJUNTOS à Cusco; Mme Aurea Berrospi Palacios, secrétaire à la formation
syndicale). Elle ajoute que le programme «Juntos» n’a pas renouvelé les contrats de
Mme Alicia Elizabeth Huerto Ortíz et de M. Fidel Hamilton Santos Durán, tous deux de sa
fédération régionale de Huánuco, pour des raisons antisyndicales. Enfin, l’organisation
plaignante affirme que le programme «Juntos» n’a pas donné suite à sa demande de
négociation de son cahier de revendications pour 2014-2016, malgré ses demandes
répétées.
- 29. Dans ses communications en date du 7 janvier 2016, du 31 octobre 2017
et du 8 février 2024, le gouvernement fournit des informations sur les recommandations
émises par le comité et formule ses observations en relation avec les nouvelles
allégations de l’organisation plaignante. En ce qui concerne la recommandation a) du
comité, le gouvernement indique que seuls deux des cinq dirigeants mentionnés dans la
recommandation (MM. Roger Freddy Gamboa Reyes et Jorge Dagoberto Mejía Maza) ont engagé
des procédures judiciaires concernant le non-renouvellement de leurs contrats, avec les
résultats suivants: i) le recours en amparo introduit par M. Gamboa Reyes a été déclaré
irrecevable et classé; ii) M. Gamboa Reyes a également introduit un recours contentieux
administratif dont le jugement en première instance lui a été défavorable, mais son
appel était, en 2017, en attente de résolution; et iii) le recours en amparo introduit
par M. Jorge Dagoberto Mejía Maza a été déclaré irrecevable et classé.
- 30. En ce qui concerne la recommandation b) du comité, le gouvernement
signale que le ministère du Travail a conclu que le régime des travailleurs liés au
programme «Juntos» par des CAS est un régime public et que, par conséquent, en vertu de
l’article 4 de la loi générale sur l’inspection du travail, la SUNAFIL n’est pas
compétente pour effectuer des inspections dans les affaires qui font l’objet de la
présente plainte.
- 31. En ce qui concerne la recommandation c) du comité concernant les
renouvellements successifs de contrats temporaires sur plusieurs années qui pourraient
constituer un obstacle à l’exercice des droits syndicaux, le gouvernement indique que le
régime des CAS est de nature transitoire et constitue une amélioration substantielle par
rapport à l’ancien régime de contrats de «services non personnels à l’État». Le
gouvernement indique également que l’organe directeur de la fonction publique, SERVIR, a
des pouvoirs de supervision sur les entités publiques, en vertu desquels il: i) contrôle
le respect des règles et des politiques du système administratif de gestion des
ressources humaines; et ii) recommande la révision des actes et des décisions de
l’entité et les mesures correctives nécessaires. De même, tout citoyen peut déposer une
plainte auprès du Bureau du contrôleur général de la République concernant des actes
arbitraires ou illégaux présumés survenant dans toute entité publique.
- 32. En ce qui concerne les allégations de la FENATRAJUNTOS concernant une
série de licenciements arbitraires supplémentaires de ses dirigeants et membres, le
gouvernement réitère que ces travailleurs étaient sous contrat à durée déterminée, de
sorte que le non-renouvellement de leur contrat ne peut être assimilé à un licenciement
et qu’il n’y a pas d’infraction ou de représailles antisyndicales dans l’émission de la
lettre de résiliation du contrat CAS. Le gouvernement se réfère à cet égard aux
observations du programme «Juntos» qui indique que: i) il n’y a pas d’obligation légale
de renouveler ou de prolonger le CAS que l’État conclut, ni de justifier la décision de
ne pas le faire, puisqu’il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire de l’employeur; ii) le
non-renouvellement du contrat de M. Fidel Hamilton Santos Durán a été suivi d’une
résolution de licenciement prononcée contre lui pour l’utilisation inappropriée d’une
moto à des fins personnelles; iii) le deuxième tribunal civil de Huánuco s’est déclaré
incompétent pour examiner le recours en amparo introduit par M. Santos Durán pour
violation de sa liberté syndicale; iv) la plainte pénale déposée par le syndicat et par
M. Santos Durán a été déclarée irrecevable; et v) le recours en amparo introduit par
Mme Alicia Elizabeth Huerto Ortiz est en train d’être examiné par le premier tribunal
civil de Huánuco.
- 33. En ce qui concerne les autres allégations de la FENATRAJUNTOS
relatives à une série d’actes antisyndicaux commis par le programme «Juntos», le
gouvernement soumet les observations du programme, qui indiquent que: i) plus de dix
syndicats ont été constitués depuis la création du programme et, au cours de cette
période, il n’y a pas eu un seul cas fondé de menace ou de pression exercée sur les
travailleurs pour qu’ils n’adhèrent pas à l’un d’entre eux ou s’en désaffilient;
ii) l’octroi de congés syndicaux est effectué conformément à la loi, qui prévoit que
l’entité employeuse n’est tenue d’accorder des congés syndicaux que pour la
participation à des événements de présence obligatoire, dans la limite de trente jours
par année civile, avec salaire et par dirigeant; et iii) le programme «Juntos» respecte
les engagements pris dans le cadre de la convention collective signée en 2013 et a
participé à la négociation directe du cahier de revendications présenté par la
FENATRAJUNTOS pour la période 2014-2016, sans parvenir à un accord.
- 34. Le comité prend note des allégations de nouveaux actes antisyndicaux
formulées par l’organisation plaignante, de nature similaire à ceux déjà examinés par le
comité dans le cas présent (non-renouvellement de contrats de services administratifs,
pressions pour se désaffilier, non-octroi de congés syndicaux, obstruction à la
négociation collective).
- 35. Le comité prend également note des observations fournies par le
gouvernement concernant à la fois la mise en œuvre des recommandations formulées lors de
l’examen précédent du cas et les nouvelles allégations présentées par l’organisation
plaignante. Le comité note que le gouvernement réitère que le non-renouvellement des
CAS, qui sont des contrats à durée déterminée, ne constitue pas une discrimination
antisyndicale, qu’il n’y a pas eu de politique antisyndicale dans le programme «Juntos»,
comme en témoigne l’existence de nombreuses organisations syndicales en son sein, que
les congés syndicaux ont été accordés conformément à la loi et que le programme a pris
part à la négociation du cahier de revendications soumis par le syndicat pour la période
2015.
- 36. En ce qui concerne sa demande d’être tenu informé de l’issue des
actions en justice intentées par des dirigeants et des membres du syndicat ayant perdu
leur emploi, le comité prend note de l’information du gouvernement selon laquelle seuls
quatre travailleurs mentionnés dans le cas présent ont contesté en justice le
non-renouvellement de leur contrat, principalement par le biais d’actions en amparo. Le
comité note également que, sur la base des informations fournies par le gouvernement et
des informations judiciaires accessibles au public, ces quatre recours ont été déclarés
irrecevables. Dans le texte des décisions judiciaires dont il dispose, le comité note
que les tribunaux n’ont pas requis au programme «Juntos» d’expliciter les motifs des
non-renouvellements des contrats afin d’écarter l’allégation de leur caractère
antisyndical. Le comité note le lien entre cet aspect et l’indication par le programme
«Juntos» que les autorités peuvent décider de manière discrétionnaire de ne pas
renouveler les CAS. En ce qui concerne sa recommandation tendant à ce qu’une enquête
soit menée par l’inspection du travail sur la baisse significative de l’affiliation
syndicale et le non-renouvellement des contrats entre 2012 et 2013 de 27 dirigeants
syndicaux, le comité note qu’il découle des indications du gouvernement et des
dispositions de la loi générale sur l’inspection du travail que la SUNAFIL n’est pas
habilitée à effectuer des inspections du travail dans les entités publiques et dans les
matières couvertes par la présente plainte. Le comité prend également note des
informations générales fournies par le gouvernement sur d’autres organismes (SERVIR,
Bureau du Contrôleur général de la République) compétents dans le domaine des entités
publiques. Le comité regrette cependant de constater que le gouvernement ne fait pas
référence à des enquêtes menées par ces organismes ou d’autres sur les faits faisant
l’objet de la présente plainte.
- 37. Le comité rappelle que lorsqu’elles sont saisies d’allégations
d’actes de discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener
immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux
conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatés. [Voir
Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018,
paragr. 1159.] Sur la base de ce qui précède, le comité prie le gouvernement de veiller
à ce que, à l’avenir, les allégations d’actes antisyndicaux susceptibles d’affecter les
travailleurs du secteur public liés par des contrats CAS donnent lieu à des enquêtes
effectives et, dans ce contexte, de veiller à ce que les travailleurs qui allèguent que
leur contrat n’a pas été renouvelé en raison de leur activité syndicale disposent de
recours effectifs pour examiner si l’extinction de leur contrat était fondée ou non sur
des raisons objectives. Notant qu’aucune nouvelle information n’a été fournie par
l’organisation plaignante depuis 2018 et que la Commission d’experts pour l’application
des conventions et recommandations examine la question de la protection contre la
discrimination antisyndicale des travailleurs du secteur public sous contrat à durée
déterminée dans le cadre du suivi de l’application par le Pérou de la convention (no 98)
sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, le comité considère que
le présent cas est clos et n’appelle pas un examen plus approfondi.