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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 28. Le comité a examiné pour la dernière fois ce cas, dans lequel l’organisation plaignante allègue le licenciement de 15 responsables syndicaux de l’Union des employés de l’Université de San Agustin – FFW (USAEU) à titre de représailles pour avoir organisé une grève, ainsi que la partialité des autorités judiciaires, à sa réunion de juin 2011. [Voir 360e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 311e session, paragr. 105-115.] A cette occasion, le comité a exprimé l’espoir que des moyens de subsistance adéquats seraient consentis sans délai aux travailleurs licenciés, a prié le gouvernement de continuer d’intervenir activement auprès des parties concernées afin de parvenir à un compromis et a prié instamment ce dernier de prendre toutes les mesures nécessaires afin de diligenter une enquête indépendante concernant les allégations de discrimination antisyndicale au sein de la Eon Philippines Industries Corporation (entreprise A) et à l’hôpital Capiz Emmanuel de la ville de Roxas (entreprise B).
- 29. L’organisation plaignante fournit des informations complémentaires dans des communications en date des 12 janvier et 1er octobre 2012, 3 mai 2013 et 10 mai 2014. En ce qui concerne l’engagement pris par le gouvernement de faciliter l’emploi des travailleurs licenciés, l’organisation plaignante allègue que, bien que de nombreux postes vacants aient été affichés par différents organismes publics et que les travailleurs licenciés aient présenté leurs lettres de candidature et satisfait aux critères de qualification, le gouvernement a refusé de les engager. Dans un cas, le gouvernement a enjoint des travailleurs à passer des examens et des entretiens pour s’entendre dire plus tard que le poste était déjà réservé à un autre candidat.
- 30. En ce qui concerne la subvention de subsistance destinée aux responsables syndicaux et aux représentants départementaux licenciés, l’organisation plaignante fait savoir que, en février 2012, le gouvernement a proposé d’accorder un montant unique de 10 000 pesos philippins (238 dollars E.-U.) à titre de projet individuel visant à assurer des moyens de subsistance. L’organisation plaignante juge ce montant scandaleux, d’autant plus qu’il était censé être une initiative innovante du gouvernement en contrepartie des recommandations du comité pour une réintégration immédiate avec versement de l’intégralité des arriérés de salaires et prestations, et propose que chacun des travailleurs licenciés reçoive environ 2 000 000 de pesos philippins (47 960 dollars E.-U.) au titre des arriérés de salaires (sans prestations) et d’une réintégration. L’organisation plaignante affirme en outre que cette pseudo offre était accompagnée d’une lettre du gouvernement contenant plusieurs contrevérités sur les suites données à la réunion de février 2012. Dans une réponse en date du 2 mars 2012, l’organisation plaignante a mis en relief ces faits fabriqués de toutes pièces et a transmis la contre-proposition des travailleurs consistant à accepter l’intégralité des arriérés de salaires à compter de la date du licenciement en avril 2005 jusqu’à celle de la décision finale de la Cour suprême sur la question du licenciement, assortie d’une indemnité de départ d’un mois par année de service. L’organisation plaignante a demandé au gouvernement de transmettre cette proposition au nouveau groupe d’administrateurs de l’université, mais n’a reçu aucune réponse. Parallèlement, deux des travailleurs licenciés – M. Rudante Dolar et Mme Ma Luz Calzado – ont été contactés par le ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) et invités à signer un document indiquant qu’ils retiraient leur plainte devant l’OIT, mais les travailleurs ont refusé de s’exécuter.
- 31. En ce qui concerne la procédure judiciaire relative aux licenciements, l’organisation plaignante indique que: i) la Cour d’appel a rejeté la demande en révision déposée en janvier 2011, tendant à faire réexaminer sa décision antérieure selon laquelle le licenciement des membres de l’USAEU était légal; ii) le 25 août 2011, l’organisation plaignante a déposé une requête en réexamen par voie de certiorari devant la Cour suprême, illustrant en plus de 100 pages l’ensemble des circonstances entourant le licenciement massif des responsables syndicaux de l’USAEU, l’ingérence manifeste et continue de la direction de l’université dans les affaires purement syndicales et ses pratiques antisyndicales, ainsi que les décisions et les résolutions douteuses de la Cour d’appel et de la Commission nationale des relations professionnelles (NLRC) concernant la question du licenciement; iii) la Cour suprême a rejeté la requête pour dépôt tardif et pour n’avoir pas suffisamment démontré que la Cour d’appel avait commis une erreur justifiant l’invalidation de la décision attaquée; iv) le 9 décembre 2012, l’organisation plaignante a déposé une motion de réexamen de la décision en faisant valoir que des requêtes déposées avec un retard d’un jour avaient déjà été acceptées par la Cour suprême et que plusieurs questions constitutionnelles devaient être expliquées et résolues d’une manière faisant autorité par la Cour suprême, qui a compétence exclusive à cet égard; et v) la motion de réexamen a été rejetée par la Cour suprême, qui a estimé qu’il n’y avait aucune raison impérieuse ni aucun argument substantiel justifiant une modification de la décision de la cour, et l’organisation plaignante a déposé une deuxième motion de réexamen. L’organisation plaignante ajoute que le gouvernement n’a pas procédé à l’intervention nécessaire auprès des tribunaux dans l’affaire relative au licenciement illégal en instance et refuse toujours d’enquêter sur les activités antisyndicales de l’université, qui a installé un nouveau groupe de responsables syndicaux qui ne font qu’obéir aux ordres de la direction. De plus, une renégociation de la convention collective n’est toujours pas à l’ordre du jour à l’université et les dernières négociations remontent à avril 2003.
- 32. En ce qui concerne les allégations de partialité des autorités judiciaires, l’organisation plaignante réitère qu’elle a présenté des arguments et des documents sur la corruption dans le système judiciaire depuis 2006, mais que le gouvernement les a ignorés. De plus, en 2014, le président de la Cour suprême a été destitué et démis de ses fonctions pour des faits de corruption. L’organisation plaignante explique que l’intéressé faisait partie de la deuxième chambre de la Cour suprême qui avait révoqué la décision initiale du secrétaire au Travail en déclarant illégale la grève déclenchée en 2003 par l’organisation plaignante; il faisait aussi partie de l’ancienne première section de la Cour suprême qui avait rejeté la plainte du syndicat pour licenciements illégaux et pratiques de travail déloyales, ainsi que sa motion en réexamen.
- 33. Enfin, en ce qui concerne les allégations de discrimination antisyndicale dans les entreprises A et B, l’organisation plaignante allègue que le gouvernement refuse toujours d’enquêter sur ces allégations et que les syndicats sont inexistants puisque tous les membres ont été licenciés.
- 34. Le gouvernement présente ses observations sur plusieurs des questions en instance dans des communications en date des 5 mars 2012, 2 mai 2013, 26 mai 2014 et 1er octobre 2019. En ce qui concerne l’affaire relative aux mesures de licenciement, le gouvernement rappelle les procédures devant la Cour d’appel et la Cour suprême et précise que ce qu’il est convenu d’appeler une intervention de l’exécutif ne peut aller au-delà d’une demande au pouvoir judiciaire d’accélérer le règlement de l’affaire sur le fond, ce qui a déjà été fait. Le gouvernement ajoute que le recours persistant aux poursuites judiciaires a rendu difficile la recherche d’une solution originale. Compte tenu du caractère définitif de la décision de la Cour suprême, du refus de la direction de réintégrer les travailleurs et de l’absence de base légale pour l’obliger à accepter un arrangement ou un réembauchage, les négociations du DOLE sont principalement fondées sur des considérations humanitaires. Ces négociations représentent donc une approche originale, avant de travailler sur d’autres schémas, tels que les subventions de subsistance ou l’aide à l’emploi.
- 35. En ce qui concerne l’aide à l’emploi, le gouvernement fait savoir que le groupe des travailleurs a présenté des curriculum vitae et une liste des travailleurs dont les dossiers de candidature sont en instance dans les organismes publics. En réponse, le DOLE a envoyé des lettres de recommandation pour faciliter leur candidature, et le bureau régional du DOLE a reçu l’instruction d’examiner les qualifications des membres syndicaux licenciés en cas de vacance de poste. Il reste que l’emploi dans les organismes publics est régi par des normes de qualification fondées sur le mérite, et les comités de promotion et de sélection, tout comme les autorités de nomination des organismes publics, ont toute latitude pour sélectionner les candidats qu’ils estiment les plus aptes à répondre aux besoins de l’organisation ou de l’organisme. Le gouvernement indique en outre que le coordonnateur régional de la Fédération des travailleurs libres (FFW) a fait savoir au bureau régional du DOLE que certains des travailleurs licenciés – M. Theodore Neil Lasola, M. Ramon Vacante, Mme Ma Luz Calzado et M. René Caballum – ont été de nouveau embauchés. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles deux travailleurs licenciés auraient été invités à retirer leur plainte devant l’OIT, le gouvernement précise que, si la personne de contact du DOLE s’est mise en rapport avec eux, ce n’était pas pour leur demander le retrait de leurs plaintes mais pour s’enquérir de leur situation.
- 36. En ce qui concerne l’aide aux moyens de subsistance, le gouvernement fait savoir qu’il avait initialement proposé 535 000 pesos philippins (10 300 dollars E.-U.) pour financer une proposition de projet globale, mais que les travailleurs licenciés ont insisté pour recevoir des propositions de projet individuelles. Sur la base des règles régissant le programme de formation aux moyens de subsistance des travailleurs licenciés, le coût standard par tête pour un bénéficiaire est de 10 000 pesos philippins (193 dollars E.-U.) et se compose d’outils et de dispositifs visant à aider les travailleurs touchés à lancer leur entreprise et à entamer leur formation pour le développement de leurs compétences. Alors que M. Lasola, s’exprimant en tant que chef de file des travailleurs licenciés, a insisté sur le fait que l’aide aux moyens de subsistance ne devait pas être basée sur des normes par tête, sa demande n’a pu être satisfaite, car le programme du DOLE est régi par les règles et règlements existants qui ne permettent pas d’accorder une subvention unique de 1 000 000 de pesos philippins (19 254 dollars E. U.) à un bénéficiaire individuel. De ce fait, en février 2012, le DOLE a rencontré des représentants des travailleurs à plusieurs reprises pour faire le point sur les moyens de subsistance et présenter des options en la matière dans une série de domaines (commerce des produits de base, station de remplissage d’eau, transformation alimentaire et station Internet en particulier). Un fonctionnaire du DOLE a été désigné pour assurer la coordination de l’assistance, mais le groupe a décidé à l’unanimité de rester sur sa position et de donner la priorité aux recommandations du comité concernant la réintégration de tous les responsables syndicaux licenciés, le montant de l’aide aux moyens de subsistance ne suffisant pas à répondre à leurs revendications.
- 37. Le gouvernement indique en outre que, étant donné que l’affaire est en instance devant l’OIT depuis 2006 et que les questions soulevées par l’organisation plaignante ne font que se répéter, l’Organe régional tripartite de surveillance (RTMB) de la Région 6 a reçu pour instruction d’engager un dialogue actif avec les enseignants licenciés afin d’élaborer et mettre en œuvre un plan d’action pour régler définitivement les questions pendantes. M. Lasola a fait valoir que les moyens de subsistance et une éventuelle embauche ne constituaient plus des solutions, puisque tous les responsables licenciés ont été réemployés tandis que l’un d’entre eux se trouve à l’étranger. Le RTMB explore donc conjointement avec les parties la possibilité que la direction de l’université accorde une aide financière aux dirigeants syndicaux licenciés.
- 38. Le comité prend dûment note des renseignements détaillés fournis par l’organisation plaignante et le gouvernement. Il note avec regret que la Cour suprême a confirmé l’illégalité de la grève déclenchée par l’organisation plaignante en 2003, qui avait entraîné le licenciement d’un certain nombre de responsables de l’USAEU, d’autant que les dirigeants syndicaux ont été licenciés pour ne pas avoir immédiatement obtempéré à l’ordonnance de compétence juridictionnelle émise au titre de l’article 263 (g) du Code du travail (devenu l’article 278 (g)) qui a déjà été déclarée à plusieurs reprises contraire à la liberté syndicale et qui est en instance de modification depuis plusieurs années. Le comité note en outre que, compte tenu du caractère définitif de la décision de la Cour suprême et de l’absence de fondement juridique obligeant la direction de l’université à accepter un règlement global, le gouvernement s’est concentré sur d’autres programmes, en particulier une aide à l’emploi et à la subsistance des travailleurs licenciés. Le comité fait observer à cet égard que, si l’organisation plaignante dénonce le refus du gouvernement d’engager l’un quelconque des travailleurs licenciés à l’un quelconque des postes vacants dans les organismes publics, le gouvernement, pour sa part, affirme qu’il a pris les mesures nécessaires pour fournir des lettres de recommandation et explique que les autorités investies du pouvoir de nomination ont toute latitude pour choisir le candidat le plus approprié pour chaque poste vacant. Le comité note également que les négociations sur l’aide aux moyens de subsistance semblent avoir été infructueuses, le gouvernement favorisant une assistance collective et les travailleurs licenciés insistant pour obtenir une aide individuelle de subsistance d’un montant supérieur à celui que le gouvernement est en mesure d’accorder en vertu des règlements existants. Enfin, le comité constate que, compte tenu du laps de temps écoulé depuis que les allégations ont été formulées en 2006, le RTMB a reçu pour instruction d’engager un dialogue avec les travailleurs licenciés pour élaborer et mettre en œuvre un plan d’action visant à régler ces problèmes. Le comité croit comprendre que, compte tenu du fait que tous les travailleurs licenciés ont depuis lors été réemployés et que l’un d’entre eux se trouve à l’étranger, la réintégration ou l’aide à la subsistance ne constitue plus une réponse adéquate aux demandes des travailleurs, ce qui a amené le RTMB à étudier d’autres options, comme celle d’une aide financière. Au vu de tout ce qui précède et en l’absence de toute nouvelle information de la part de l’organisation plaignante au cours des cinq dernières années, le comité veut croire que le RTMB a pu proposer des mesures acceptables par les deux parties et que cette question a depuis lors été réglée de manière satisfaisante.
- 39. Le comité note en outre que le gouvernement ne fournit aucune information sur les enquêtes relatives aux allégations de discrimination antisyndicale dans les entreprises A et B, mais veut croire que, compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis que ces allégations ont été formulées en 2006 et en l’absence de toute information récente de l’organisation plaignante, ces questions ont été résolues depuis. Le comité s’attend à ce que toute nouvelle allégation de discrimination antisyndicale fasse l’objet d’une enquête rapide et soit accompagnée, le cas échéant, des mesures correctives appropriées. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ce cas.