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Rapport définitif - Rapport No. 364, Juin 2012

Cas no 2847 (Argentine) - Date de la plainte: 04-AVR. -11 - Clos

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent que les autorités de la province de Buenos Aires font obstacle à l’exercice du droit de grève par la promulgation d’une résolution qui prévoit que les absences des agents de l’administration publique provinciale motivées par l’exercice du droit de grève seront déduites de leurs salaires; de même, les plaignantes allèguent un délai excessif des formalités d’examen de la demande du statut syndical par la FESPROSA

  1. 82. Les plaintes figurent dans une communication de la Centrale des travailleurs argentins (CTA), la Fédération syndicale des professionnels de la santé de la République argentine (FESPROSA) et l’Association syndicale des professionnels de la santé de la province de Buenos Aires (CICOP), datée d’avril 2011. La FESPROSA et la CTA ont présenté de nouvelles allégations dans une communication du 29 juin 2011.
  2. 83. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication reçue le 23 mai 2012.
  3. 84. L’Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 85. Dans une communication d’avril 2011, la CTA, la FESPROSA et la CICOP font savoir qu’elles présentent une plainte formelle contre le gouvernement de l’Argentine au motif de la violation de la convention no 87 de l’OIT par l’introduction de mesures impliquant une restriction du droit de grève et une discrimination.
  2. 86. Les organisations plaignantes font savoir que la CICOP est un syndicat de premier niveau, dont le statut est enregistré sous le numéro 1708, et dont le champ d’application s’étend sur tout le territoire de la province de Buenos Aires. La CICOP est affiliée à la FESPROSA – organisation de deuxième niveau, enregistrée sous le numéro 2580 – et à la CTA – organisation de troisième niveau, enregistrée sous le numéro 2027.
  3. 87. Selon les organisations plaignantes, la présente plainte est motivée par le comportement du gouvernement de la province de Buenos Aires, qui viole les droits inscrits dans les conventions nos 87, 98, 135, 151 et 154 de l’OIT. Les organisations plaignantes estiment que les violations suivantes ont été commises:
    • a) par la résolution no 4575/09 datée du 27 novembre 2009, le ministère de la Santé de la province de Buenos Aires, alors qu’il n’était pas compétent pour ce faire et avant même que la grève n’ait lieu dans le cadre des actions syndicales menées à bien dans les hôpitaux et les centres sanitaires de cette province, a menacé les travailleurs qui y participeraient d’une déduction de salaire correspondant aux journées d’action syndicale, affectant et conditionnant ainsi le libre exercice du droit de grève, ce qui constitue une violation évidente de la législation en vigueur et des principes de l’OIT. Ainsi, le ministère a violé le droit de répondre ou de ne pas répondre à l’appel à la grève de l’organisation syndicale; et
    • b) la Direction provinciale des hôpitaux, qui dépend du ministère de la Santé de la province de Buenos Aires, a remis, le 16 mars 2011, au cours d’une grève convoquée par la CICOP, un mémorandum à tous les directeurs des hôpitaux de la province, leur demandant de lui transmettre la liste des travailleurs membres de la CICOP, exclusivement, qui s’étaient rendus normalement à leurs postes de travail à cette date afin de pouvoir prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de tous ceux qui ne figureraient pas dans cette liste. Les plaignants estiment qu’il y a eu ingérence et persécution manifestes à l’encontre de ce syndicat et de ses membres.
  4. 88. Les organisations plaignantes font savoir que, le 27 novembre 2009, le pouvoir exécutif de la province de Buenos Aires a décidé, par la résolution conjointe du ministre Chef du Cabinet no 949, du ministre du Gouvernement no 47, du ministre de l’Economie no 248, du ministre de la Justice no 1525, du ministre de la Sécurité no 1930, du ministre de la Production no 447, du ministre des Questions agricoles no 85, du ministre de l’Infrastructure no 898, du ministre du Développement social no 183, du ministre du Travail no 288, du secrétaire général au Gouvernorat de la province no 199, du secrétaire aux Droits de l’homme no 701, du secrétaire aux Sports no 275, du secrétaire au Tourisme no 269, de la directrice exécutive de l’Organisme provincial pour le développement durable no 126, du président de l’Institut de la culture no 1166, du directeur général de la Culture et de l’Education no 3705, qu’il convenait de «prévoir que les absences à leurs postes de travail des agents de l’administration publique de la province au motif de l’exercice du droit de grève et qui ne seraient pas justifiées par l’un ou l’autre des motifs prévus par la loi en vigueur seraient déduites du salaire mensuel correspondant...». Selon les plaignants, cette disposition arbitraire et intimidatrice de l’autorité constitue un obstacle et un empêchement à l’exercice régulier du droit de grève protégé par la loi. Par ailleurs, cette disposition conditionne la volonté du syndicat dans son ensemble et de chacun de ses membres de répondre à l’appel à la grève lancé par l’organisation syndicale.
  5. 89. L’action directe menée à bien par la CICOP en diverses occasions a toujours été associée à des conflits du travail de nature salariale, ou à des discussions sur l’environnement et les conditions de travail de l’ensemble des professionnels de la santé de la province de Buenos Aires. Cette action directe prend notamment la forme d’assemblées, de mobilisations et/ou de grèves. Quoi qu’il en soit, cette action est décidée par des assemblées, qui précisent la durée et les caractéristiques qu’elle doit prendre, et elle est toujours notifiée en temps voulu aux organismes pertinents. Jusqu’à présent, les démonstrations de force qui ont eu lieu n’ont pas été qualifiées d’illégales par quelque autorité judiciaire que ce soit. Par ailleurs, l’exécutif de la province, loin de chercher à résoudre le conflit par la négociation, cherche à retarder la résolution du conflit par l’application de mesures d’intimidation, en violation du droit de grève légitime.
  6. 90. Les organisations plaignantes affirment que le gouvernement de la province de Buenos Aires a appliqué cette résolution depuis qu’elle est en vigueur et que, récemment encore, il a procédé à des déductions de salaire correspondant aux journées de grève dans quelques cas, ponctuels et limités; il s’est cependant abstenu de le faire massivement et systématiquement lors de divers conflits du travail et des grèves qui ont eu lieu au cours de cette même période. La menace sous-jacente d’appliquer cette résolution à l’avenir procède de l’intention évidente de limiter l’exercice du droit de grève, le caractère illégal intrinsèque de cette mesure étant par ailleurs facile à comprendre. Cependant, ce critère a désormais évolué radicalement. Dans le cadre d’un conflit du travail qui a commencé début mars 2011 en l’absence d’un accord salarial lors de négociations collectives du secteur, l’assemblée des délégués de la CICOP a résolu de faire grève dans tous les hôpitaux de la province les 16 et 17 mars et d’en prévoir d’autres par la suite au cas où on n’arriverait pas à un accord. Or, le jour précédant la grève (le 15 mars), la Direction provinciale des hôpitaux – qui dépend du ministère de la Santé de la province de Buenos Aires – a remis un mémorandum aux directeurs de tous les hôpitaux de sa juridiction, expliquant que le ministère, en application de la résolution no 4574/09, procéderait à une déduction effective sur les salaires des travailleurs qui répondraient à l’appel à la grève lancée par la CICOP. Les plaignants réitèrent qu’aucune autorité administrative du ministère du Travail de la province ou de la nation n’a approché la CICOP pour la convaincre de renoncer à la grève et de reprendre la voie de la négociation. Par ailleurs, les grèves menées à bien n’ont jamais été qualifiées d’illégales par quelque autorité judiciaire que ce soit.
  7. 91. Le 17 mars, le président de la CICOP a remis un document au ministre de la Santé de la province de Buenos Aires et au directeur des hôpitaux de la province, libellé en ces termes:
    • Nous avons eu connaissance du fait qu’un mémorandum de la direction des hôpitaux de la province daté du 15 mars courant fait savoir aux autorités des divers hôpitaux de la province que le ministère dont vous avez la charge fera procéder à une déduction de salaire concernant les travailleurs qui répondront à l’appel à la grève lancé par notre syndicat les 16 et 17 du mois en cours. Monsieur le ministre, nous attirons votre attention sur le fait que cette mesure se fonde sur des considérations erronées du point de vue juridique et par conséquent inconstitutionnelles. Par la présente, nous vous prions de bien vouloir évaluer la situation et renoncer à cette mesure illégale de déduction de salaire. Le critère applicable auquel nous souscrivons prévoit que les jours de grève ne sauraient être considérés comme des jours ouvrés, comme s’il s’agissait – entre autres – d’une décision prise unilatéralement par les travailleurs de la santé. La grève n’est pas un acte volontaire fondé sur le libre arbitre; c’est une situation à laquelle les travailleurs de la santé se voient contraints de recourir devant l’absence de solution aux problèmes de travail et d’argent public auxquels notre secteur se trouve confronté. Voilà pourquoi le droit de grève existe, sans condition, sans restriction, sans qu’on puisse lui opposer, comme cela a été fait à tort dans la mesure de référence, l’absence du travailleur à son poste de travail. Le comportement collectif auquel donne lieu la grève est régi premièrement par la Constitution nationale et celle de la province de Buenos Aires, ainsi que par les conventions nos 87 et similaires de l’OIT (Organisation internationale du Travail); le deuxième comportement, isolé et sporadique, individuel – dans l’emploi public et privé –qui consiste à ne pas se présenter à son poste de travail et, par conséquent, à ne pas mériter son salaire, est régi par le droit individuel du travail et les lois sur l’emploi public ou privé, respectivement. La grève avec assemblée, sur le lieu de travail, que nous nous voyons obligés de mener à bien, est la conséquence du non-respect de ses devoirs par l’Etat provincial, notre employeur, que vous représentez, et notamment de la non-application et du non-respect de la loi sur les négociations paritaires; l’article 39 de la Constitution de la province de Buenos Aires n’a pas non plus été réglementé, et ce fait relève exclusivement de la responsabilité de l’Etat. La jurisprudence locale et nationale à laquelle on a si souvent recours s’agissant des enseignants, des fonctionnaires et du personnel judiciaire fait état, systématiquement, de l’obligation de l’Etat de s’abstenir de déduire les journées de grève du salaire, sur la base des fondements juridiques que nous venons d’exposer. Pour toutes ces raisons, Monsieur le ministre, nous vous engageons à réfléchir à la question. Nous espérons que vous nous communiquerez, dans les vingt-quatre heures à partir de la réception de la présente, la modification de ce critère erroné et illégal qui consiste à ordonner que l’on déduise les journées de grève de nos salaires. Une absence de réponse de votre part sera comprise sur le plan juridique comme un refus, qui ouvrira la voie aux recours judiciaires pertinents, s’agissant de défendre la Constitution nationale et celle de la province de Buenos Aires (CD nos 177535870 et 177535883, voir exemplaires en annexe).
  8. 92. Aucune réponse à ces lettres n’a été obtenue à ce jour. Par ailleurs, ce même 16 mars, pendant le déroulement normal de la grève, la Direction provinciale des hôpitaux déjà citée a remis un nouveau mémorandum aux directeurs de tous les hôpitaux dans lequel elle leur intime de lui faire parvenir, le lendemain, la liste du personnel qui aurait exercé son droit de grève constitutionnel et légitime, afin de pouvoir procéder aux déductions de salaire. Ce mémorandum dit, textuellement:
    • A la suite de la note no 1, je vous fais parvenir en annexe la liste des travailleurs professionnels dont vous êtes responsable. Veuillez nous faire savoir quels sont ceux qui, sur cette liste, assumaient un service actif ou un service de garde dans l’hôpital les jours 16 et 17 courants. Vous devrez également exclure de cette liste ceux qui n’étaient pas de service ces jours-là, ceux qui étaient en vacances, en congé maladie ou autre, ou ceux qui bénéficiaient d’une autorisation légalement établie les exemptant de la déduction de salaire. Toute communication tendant à éviter la déduction salariale doit nous parvenir par cette même voie avant le 18 mars 2011, 11 heures. Ce délai n’est pas prolongeable.
  9. Selon les plaignants, cette initiative, déjà grave en soi – car la publication de ce texte en a fait une menace contre la pleine jouissance du droit de grève –, est en outre malveillante, et elle peut être assimilée à de la discrimination; en effet, ce mémorandum comprend en annexe la liste complète et exclusive des membres du syndicat, pour que chaque directeur puisse en exclure les travailleurs qui étaient normalement à leur poste, ceux qui étaient en vacances, ou ceux qui n’étaient pas en service, etc., afin de procéder ensuite par défaut à des déductions de salaire concernant tous les autres.
  10. 93. En d’autres termes, pour désigner les travailleurs auxquels cette déduction salariale illégale doit être appliquée, le ministère de la Santé part du principe que seuls les membres de la CICOP sont en grève – alors qu’en réalité ces grèves font en principe l’objet de l’adhésion presque totale de tous les professionnels de la santé de la province, qu’ils soient ou non membres du syndicat – et, sauf preuve du contraire, il présume que tous les membres du syndicat ont participé à la grève.
  11. 94. Les organisations plaignantes indiquent que, face à cette nouvelle escalade dans le conflit, le président de la CICOP a transmis une lettre à Monsieur le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale de la nation, dont la teneur était la suivante:
    • Aujourd’hui, le ministre de la Santé de la province de Buenos Aires a remis une circulaire à tous les directeurs des hôpitaux de sa juridiction, les intimant d’envoyer dès demain la liste du personnel qui exerce son droit de grève constitutionnel et légitime. L’événement est déjà grave en soi (car la publication de ce texte en fait une menace contre la pleine jouissance du droit de grève); mais la tentative est également malveillante – et relève du délit de discrimination – étant donné que la circulaire comporte en annexe la liste complète et exclusive des membres de notre syndicat. Etant donné le pouvoir que l’Etat vous a conféré pour décider des moyens de protéger l’exercice des droits consacrés par la Constitution nationale dans le domaine du travail, nous vous demandons de bien vouloir prendre des mesures pertinentes visant à faire cesser immédiatement ce comportement illégal; en effet, la menace de déductions salariales, ajoutée à la demande d’une liste spécifique de travailleurs visés, relève d’un comportement qui se situe en dehors de l’Etat de droit. Compte tenu de ce qui précède, notre syndicat a le devoir de réagir, en entamant des poursuites judiciaires pertinentes contre ceux qui ont distribué cette circulaire intimidatrice, et en poursuivant personnellement ceux qui, dans les hôpitaux, adoptent les comportements qu’on leur a illégalement demandé d’adopter.
  12. Selon les plaignants, le ministre du Travail de la nation n’a toujours pas répondu à cette lettre.
  13. 95. Toujours selon les plaignants, dans la résolution no 4575/09, le ministre de la Santé de la province de Buenos Aires prévoit que «l’absence à leurs postes de travail des fonctionnaires de l’administration publique de la province, motivée par l’exercice du droit de grève, et qui ne serait pas justifiée par l’un ou l’autre des motifs prévus par la loi en vigueur, fait l’objet d’une déduction du salaire du mois correspondant...». L’ingérence du pouvoir exécutif de la province, qui a obligé les responsables des unités hospitalières à remettre la liste des membres de la CICOP ainsi que la menace de procéder à une déduction de journées de salaire impliquent une violation sans équivoque du droit d’association, du droit de grève et du droit de négociation collective, car la grève a lieu alors que des négociations salariales et relatives aux conditions de travail sont en cours.
  14. 96. Les plaignants ajoutent que cette déduction salariale, qui s’apparente à des représailles, doit être interprétée comme une sanction discriminatoire, parce qu’elle s’applique à l’encontre de ceux qui exercent un droit fondamental et consacré par la Constitution comme tel. Cette mesure est incompatible avec la convention no 87, tout comme la menace de déduction salariale à l’encontre des travailleurs, au motif qu’ils répondent à un appel à la grève, et la mesure d’intimidation qui consiste à demander un jour avant le déclenchement de la grève la liste des membres du syndicat concerné.
  15. 97. Dans leur communication du 29 juin 2011, la FESPROSA et la CTA font savoir que la FESPROSA est une organisation de deuxième niveau qui a été fondée en 2007 et qui rassemble 25 000 professionnels de la santé publique dans 22 provinces. Les plaignants font savoir que les formalités visant à obtenir le statut syndical pour la FESPROSA ont débuté le 28 juillet 2008, sous le numéro de dossier 1 2015-1284154, et que trois organisations syndicales déjà enregistrées ont cosigné le document fondateur, à savoir: l’Association des professionnels de la santé de la province de Buenos Aires, l’Association professionnelle de la santé de la province de Mendoza et l’Association des professionnels de la santé de la province de Salta.
  16. 98. Les plaignants ajoutent que la Direction nationale des associations syndicales a transmis ces documents à la Fédération des associations de travailleurs de la santé (FATSA), qui a demandé que le champ d’application de la FESPROSA soit précisé. Cette dernière a répondu opportunément, précisant la portée du statut qu’elle sollicitait. La FATSA a répondu à nouveau en demandant que soient précisés, de bonne foi, les questions de territoire et les personnels concernés, et elle s’oppose à la reconnaissance de la FESPROSA, exigeant au préalable que l’on procède à une comparaison des membres, pour déterminer quelle est l’organisation la plus représentative. La FESPROSA a alors répondu qu’il n’était pas question de regrouper tous les travailleurs de la santé mais uniquement ceux qui possédaient un titre universitaire et qui travaillaient dans des établissements publics; l’intention n’était donc pas de prendre la place de la FATSA, et par conséquent la comparaison demandée n’était pas pertinente.
  17. 99. Selon les plaignants, la demande de statut de la FESPROSA n’a rien à voir avec une quelconque mesure de l’organisation la «plus représentative»; en effet, il existe à cette fin un système «radial ascendant» qui reflète le statut des entités de premier niveau (syndicats de base) dans celle de deuxième et de troisième niveau (fédérations, confédérations ou centrales); par conséquent, ces dernières comprennent la somme des représentations des syndicats qui leur sont affiliés, et il n’y a donc pas de raison pour que le gouvernement refuse un statut syndical qui lui est demandé, notamment lorsque ce critère a déjà été appliqué à plusieurs reprises par le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale.
  18. 100. Les plaignants font savoir que, après avoir analysé l’octroi des personnalités juridiques de chacune des organisations affiliées à la FESPROSA, la Direction nationale des associations syndicales s’est prononcée le 6 mai 2010, en faveur de l’octroi du statut syndical sollicité par la FESPROSA. Le 17 mai 2010, le secrétariat au Travail s’associe à cette décision et la transmet au ministère du Travail, accompagnée du projet de résolution par lequel le statut syndical est octroyé à la Fédération syndicale des professionnels de la santé de la République argentine, qui est agréée comme association syndicale de deuxième niveau. Ce même jour, le 17 mai 2010, le dossier est transmis au chef du Cabinet du ministère du Travail, où il se trouve encore sans que rien n’ait été résolu. Une prompte résolution de l’affaire avait pourtant été demandée le 9 décembre 2010, or aucune réponse n’a été obtenue à ce jour.
  19. 101. Les plaignants ont conclu qu’il est évident que le gouvernement viole de manière récurrente les dispositions de l’article 3 de la convention no 87 de l’OIT, étant donné qu’il limite systématiquement le droit d’association des travailleurs et, dans ce cas précis, il omet tout simplement d’octroyer le statut syndical demandé par la FESPROSA.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 102. Dans sa communication reçue le 23 mai 2012, le gouvernement transmet la réponse du ministère de la Santé de la province de Buenos Aires et affirme qu’il n’est pas évident, eu égard au déroulement des faits et aux négociations initiées, que le décompte des jours non travaillés au motif de la grève constitue un déni ou une restriction du droit de grève.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 103. Le comité observe que, dans ce cas, les organisations plaignantes s’opposent à la résolution no 4574/09 promulguée par les autorités de la province de Buenos Aires, cette résolution prévoyant que les absences des fonctionnaires de l’administration publique provinciale motivées par l’exercice du droit de grève et qui ne sont pas justifiées par l’une ou l’autre des causes prévues par la loi en vigueur feront l’objet d’une déduction de salaire du mois correspondant. Les organisations plaignantes allèguent que, dans le cadre d’un conflit du travail, il a été décidé de mener une action directe les 16 et 17 mars et, ensuite, d’autres successivement, jusqu’à ce qu’un accord intervienne dans tous les hôpitaux de la province; elles allèguent aussi que la Direction provinciale des hôpitaux a transmis, un jour avant le début de l’action directe, un mémorandum aux directeurs de tous les hôpitaux, dans lequel elle leur a fait savoir que, dans le cadre de l’application de la résolution mentionnée, elle procéderait à une déduction salariale effective concernant les fonctionnaires qui participent à l’action directe (selon les plaignants, un jour après le début de la grève, les autorités ont demandé, par le biais d’un nouveau mémorandum adressé aux directeurs des hôpitaux, la liste du personnel qui était en train d’exercer son droit de grève). Le comité observe que, selon les plaignants, l’envoi des mémorandums mentionnés constituait une menace au plein exercice du droit de grève et qu’il a pris un caractère discriminatoire étant donné qu’il était accompagné de la liste complète des membres du syndicat, afin que chaque directeur d’hôpital puisse exclure les travailleurs qui étaient restés à leur poste de travail.
  2. 104. A cet égard, le comité observe que, selon les allégations, les organisations plaignantes ont fait grève, et il constate qu’elles connaissaient le texte de la résolution no 4574/09 et la décision de la Direction provinciale des hôpitaux de déduire du salaire les journées de grève; observant également que la grève n’a pas été qualifiée d’illégale par l’autorité judiciaire et que le gouvernement affirme qu’il n’est pas évident, eu égard au déroulement des faits et aux négociations initiées, que le décompte des jours non travaillés au motif de la grève constitue un déni ou une restriction du droit de grève, le comité rappelle qu’à de nombreuses occasions il a signalé que les déductions de salaires pour les jours de grève ne soulèvent pas d’objection du point de vue des principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 654.] Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations. Cependant, le comité rappelle que, selon les allégations, les déductions salariales ont touché, ou ont menacé de toucher, les travailleurs affiliés à l’organisation syndicale et non les autres grévistes. Le comité souligne que cette façon de procéder pose des problèmes en relation avec les principes de la liberté syndicale et prie ainsi le gouvernement d’examiner cette question en consultation avec les partenaires sociaux afin d’assurer le respect du principe de non-discrimination entre les travailleurs.
  3. 105. S’agissant des allégations selon lesquelles l’Autorité administrative du travail de la nation n’a pas donné suite à la demande de statut syndical de la FESPROSA présentée en juillet 2008, en dépit du fait que la Direction nationale des associations syndicales et le secrétariat au Travail se soient prononcés favorablement à cet égard en mai 2010, le comité regrette qu’un laps de temps de presque quatre ans se soit écoulé et il prie instamment le gouvernement de se prononcer sans délai à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 106. Compte tenu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité prie instamment le gouvernement de se prononcer sans délai sur la demande de statut syndical de la Fédération syndicale des professionnels de la santé de la République argentine (FESPROSA).
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