ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil >  > Plaintes Article 24/26

RECLAMATION (article 24) - TURQUIE - C087 - 1996

1. La Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK), 2. La Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TURK-IS)

Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

Rapport no. 303 du Comité de la liberté syndicale, Cas Nos. 1810, 1830 -- Réclamation présentée par la Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TURK-IS), en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant l'inexécution par la Turquie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 -- Plainte contre le gouvernement de la Turquie présentée par la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK)

Rapport no. 303 du Comité de la liberté syndicale, Cas Nos. 1810, 1830 -- Réclamation présentée par la Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TURK-IS), en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant l'inexécution par la Turquie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 -- Plainte contre le gouvernement de la Turquie présentée par la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK)

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. Allégations: atteintes aux droits syndicaux des travailleurs et de leurs organisations, restrictions aux droits de réunion et de manifestation, déni du droit syndical des fonctionnaires et restrictions au droit de grève; législation syndicale restrictive, critères de représentativité portant atteinte à la négociation collective, discrimination antisyndicale, ingérence des autorités dans les affaires syndicales
  2. 4. Par une communication du 4 juillet 1994, la Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TURK-IS), invoquant l'article 24 de la Constitution de l'OIT, a adressé au Directeur général une réclamation alléguant l'inexécution par le gouvernement de la Turquie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Par la suite, TURK-IS a envoyé des informations complémentaires sur cette affaire dans une communication du 12 décembre 1994.
  3. 5. A sa session de novembre 1994, le Conseil d'administration a déclaré cette réclamation recevable et a décidé de la transmettre au Comité de la liberté syndicale pour examen (cas no 1810) (voir GB.261/14/14).
  4. 6. Depuis lors, plusieurs organisations syndicales de travailleurs se sont associées à cette plainte: la Fédération internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (FITBB), la Fédération graphique internationale (FGI), la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIOT), l'Internationale des services publics (PSI), les 15, 17, 20 et 21 décembre 1994, ainsi que l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) et la Fédération internationale des syndicats de la chimie, de l'énergie et des industries diverses (ICEF) les 6 et 10 janvier 1995, respectivement.
  5. 7. Dans une communication du 24 mars 1995, la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK) a également présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre la Turquie. Par la suite, elle a présenté des allégations supplémentaires sur cette affaire dans une communication du 2 juin 1995.
  6. 8. Le gouvernement a transmis ses commentaires sur ces deux affaires dans des communications des 15 septembre 1995 et 8 janvier 1996.
  7. 9. La Turquie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
  8. A. Allégations des plaignants
  9. 10. La réclamation présentée par TURK-IS se réfère à l'inexécution par la Turquie de la convention no 87 et en particulier à diverses restrictions législatives ayant trait aux droits syndicaux et à leurs relations avec les libertés publiques, au droit des travailleurs de constituer des organisations et d'y adhérer et au droit des organisations de rédiger leurs statuts et règlements, d'élire leurs représentants, d'organiser leur gestion en toute liberté, y compris par le recours à la grève. Elle porte aussi sur la suspension administrative d'organisations de travailleurs, sur l'atteinte au droit des organisations de constituer des fédérations et de s'affilier à des organisations internationales ainsi que sur des entraves qui leur sont imposées en matière de contacts internationaux.
  10. 11. La plainte de la DISK a trait à plusieurs manquements à l'application des conventions nos 87 et 98, notamment à nombre de dispositions contenues dans la Constitution, la loi sur les syndicats, la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out et d'autres textes de loi qui contreviennent aux dispositions de ces conventions. Elle porte également sur l'incidence négative du double critère imposé aux organisations syndicales pour pouvoir conclure des conventions collectives (10 pour cent au niveau de la branche et 50 pour cent des travailleurs de l'entreprise). Enfin, elle concerne des actes de discrimination antisyndicale et des actes d'ingérence des autorités dans les structures et les activités des syndicats de base affiliés à la DISK.
  11. 12. Dans sa réclamation, TURK-IS allègue que plusieurs dispositions de la législation nationale portent atteinte à la convention no 87 et évoque à maintes reprises la jurisprudence des organes de contrôle, tant celle du Comité de la liberté syndicale que celle de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, pour soutenir ces allégations.
  12. 13. Allégation relative à des atteintes au droit de réunion et de manifestation:
  13. - Interdiction faite aux confédérations, aux syndicats et à leurs sections d'organiser des réunions et des manifestations en dehors du domaine concernant leurs objectifs et leurs compétences (art. 39 de la loi no 2821 sur les syndicats du 7 mai 1983 dans sa teneur modifiée) sous peine pour leurs dirigeants de six mois à deux ans de prison (art. 59, alinéa 6, de la loi).
  14. - Présence d'un commissaire du gouvernement chargé par le plus haut fonctionnaire de la localité d'assister à l'assemblée générale d'un syndicat (art. 67 et 69 de la loi no 2829 sur les associations du 7 octobre 1983).
  15. - Pouvoir des autorités administratives de différer de trente jours à deux mois la tenue d'une réunion ou d'une manifestation (loi no 2911 du 6 octobre 1983).
  16. 14. Allégation relative aux atteintes à la liberté d'opinion et d'expression: - Interdiction faite aux syndicats de créer des stations de radio et de télévision sous peine de six mois à deux ans de prison (loi no 3984 du 13 avril 1994 relative à l'installation et à la diffusion des stations de radio et de télévision).
  17. 15. Allégation relative à des restrictions au droit des travailleurs de constituer des organisations et de s'y affilier:
  18. - Interdiction du droit de se syndiquer imposée:
  19. a) aux inspecteurs, vérificateurs aux comptes, membres des comités directeurs et autres personnes exerçant des fonctions similaires ou supérieures dans des établissements, institutions, administrations, organismes, banques et compagnies d'assurance (art. 21, alinéa 2, de la loi sur les syndicats);
  20. b) au personnel enseignant sous réserve de la loi no 625 du 18 juin 1965 concernant les établissements d'enseignement privé (art. 21, alinéa 5, de la loi);
  21. c) au personnel de sécurité des établissements privés (loi no 2495 du 22 juillet 1981 concernant la défense et la sécurité dans certaines institutions et établissements);
  22. d) aux apprentis (loi no 3308 du 5 juin 1986);
  23. e) aux conscrits des forces armées employés dans les entreprises publiques (décret no 96/11945 du 17 juillet 1987);
  24. f) aux fonctionnaires (loi no 657 du 17 juillet 1987);
  25. g) aux employés publics ayant un statut de personnel contractuel (art. 14 du décret no 399 interdisant la syndicalisation et la grève à quelque 300 000 contractuels du secteur public).
  26. - Interdiction des syndicats professionnels ou d'entreprise (art. 3 de la loi sur les syndicats).
  27. - Interdiction d'appartenir à plus d'un syndicat à la fois (art. 51 de la Constitution et 22 de la loi sur les syndicats).
  28. - Contrôle par un notaire de l'acquisition de la qualité de membre d'un syndicat et de la possibilité de démissionner d'un syndicat (art. 22 et 25 de ladite loi).
  29. 16. Allégations relatives à des restrictions au droit des organisations de travailleurs d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion et leurs activités:
  30. - Inexistence de dispositions consacrant le droit d'accès des dirigeants syndicaux dans les locaux des établissements (sites de construction, usines, plantations).
  31. - Interdiction faite aux syndicats et aux responsables syndicaux de toute activité politique sous peine de dissolution et pour les dirigeants de six mois à deux ans de prison (art. 52 de la Constitution et 37, 39, 58, alinéa 3, et 59, alinéa 6, de la loi sur les syndicats).
  32. - Interdiction faite aux députés de la grande Assemblée nationale turque d'appartenir aux directions des syndicats et des confédérations syndicales (art. 82 de la Constitution).
  33. - Limitation du nombre de membres des comités directeurs (de trois à neuf membres dans les syndicats et de cinq à 29 dans les confédérations) (art. 15 de la loi sur les syndicats).
  34. - Conditions restrictives d'éligibilité des membres fondateurs (obligation d'être turc et d'appartenir à la branche d'activité) (art. 5 de la loi).
  35. - Conditions restrictives d'éligibilité des membres fondateurs, des dirigeants et des délégués syndicaux (disqualification liée à une longue liste d'infractions qui n'ont rien à voir avec l'accomplissement d'activités syndicales) (art. 5, 9, alinéa 8, et 34, alinéa 2, de la loi).
  36. - Obligation d'avoir travaillé dix ans dans la profession pour avoir le droit d'être candidat aux élections syndicales (art. 51 de la Constitution et 14 de la loi sur les syndicats).
  37. - Perte de la qualité de membre et de toute fonction dans les organes syndicaux pour les retraités (art. 25 de la loi).
  38. - Limitation à quatre mandats consécutifs ordinaires pour l'élection aux organes d'un syndicat, de ses sections ou d'une confédération (art. 9 de la loi).
  39. - Obligation de déclaration des biens et revenus personnels du président et des dirigeants des confédérations, des syndicats et de leurs sections dans les trois mois de l'élection (art. 42 de la loi).
  40. - Limitation du nombre des délégués syndicaux (un délégué dans les entreprises jusqu'à 50 travailleurs, deux pour 51 à 100 travailleurs, trois pour 101 à 500 travailleurs, quatre pour 501 à 1 000 travailleurs, six pour 1 000 à 2 000 travailleurs et huit au-dessus de 2 000) (art. 34 de la loi).
  41. - Plafond imposé au montant des cotisations syndicales, les syndicats ne pouvant exiger d'autres cotisations de leurs membres (le montant des cotisations mensuelles que doit verser un travailleur à un syndicat de travailleurs ne doit pas excéder le salaire journalier de base du travailleur) (art. 23 de la loi).
  42. - Ingérence dans les affaires syndicales, obligation faite aux syndicats de déposer leurs biens et avoirs dans les banques d'Etat (art. 52 de la Constitution et 43 de la loi sur les syndicats).
  43. - Obligation faite aux syndicats de verser 25 pour cent de leurs revenus pour l'éducation ouvrière au Fonds pour le développement de l'apprentissage (art. 32 h) de la loi no 3308 de 1986 sur l'apprentissage).
  44. - Interdiction faite aux syndicats de verser leurs revenus et recettes aux travailleurs qui leur sont affiliés (art. 39 de la loi sur les syndicats; cette disposition interdirait les contributions de solidarité en faveur d'autres syndicats ou aux travailleurs non syndiqués licenciés lors de la campagne de recrutement).
  45. - Interdiction faite aux syndicats d'accepter l'aide d'associations, d'organisations professionnelles publiques ou de fondations sous peine d'une amende représentant cinq fois le montant de l'aide financière ou des dons reçus (art. 40 et 59, alinéa 7, de la loi).
  46. - Contrôle administratif et financier sur les syndicats, vérification des comptes au moins une fois au cours de la période normale d'un congrès et par le ministre des Finances et le ministre du Travail, ensemble ou séparément, et plus souvent si nécessaire, le refus de présenter les documents comptables étant passible de un à six mois de prison (art. 47 et 59, alinéa 5, de la loi).
  47. - Mise en place par le Président de la République d'un conseil étatique de surveillance des comptes autorisé à examiner le compte des syndicats (art. 2 de la loi no 2443 du 1er avril 1981).
  48. 17. Allégations relatives à des restrictions à l'exercice du droit de grève:
  49. - Le droit de grève ne peut s'exercer qu'en relation avec la conclusion d'une convention collective (art. 54 de la Constitution et 25 de la loi no 2822 sur les conventions collectives du travail, la grève et le lock-out).
  50. - Les apprentis ne sont pas couverts par les conventions collectives et n'ont pas le droit de grève (art. 22 de la loi no 3308 du 5 juin 1986 sur l'apprentissage).
  51. - Les conscrits employés dans les entreprises publiques n'ont pas le droit de grève (décret no 87/11945 du 12 juillet 1987).
  52. - La grève est interdite dans les zones franches d'exportation pour dix ans à partir de la création d'un établissement (loi no 3218 du 15 juin 1985); dans les dix ans suivant l'inauguration des activités dans les zones franches, la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out n'est pas applicable, cependant durant cette période les conflits du travail sont réglés par les arbitres de la Cour suprême (art. 1er transitoire de la loi no 3218).
  53. - La loi interdit la grève aux travailleurs non syndiqués et aux travailleurs syndiqués s'ils déclenchent la grève sans qu'une résolution des organes compétents du syndicat ait été adoptée.
  54. - L'incitation à la grève illégale est passible de un à trois mois de prison et la participation de trois à six mois (art. 70, alinéas 1 et 2, de la loi no 2822).
  55. - Interdiction de la grève à des fins politiques, de la grève générale et de toute grève de solidarité, de l'occupation des établissements, du ralentissement des activités, de la réduction délibérée du rendement et de toute action de résistance (art. 54 de la Constitution et 25 de la loi no 2822), sous peine de dissolution pour les syndicats (art. 58, paragr. 3, de la loi sur les syndicats) et de sanctions pénales, y compris d'emprisonnement jusqu'à un an, pour les syndicalistes (art. 72 et 73 de la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out).
  56. - Interdiction de la grève aux fonctionnaires et aux contractuels des entreprises publiques sous peine de prison (art. 26 et 27 de la loi no 657 de 1965 sur les fonctionnaires, et art. 236 du Code pénal turc, loi no 765 et décret no 399).
  57. - Interdiction de la grève dans des services non essentiels au sens strict du terme sous peine d'emprisonnement (art. 29 et 30 lus conjointement avec l'article 72 de la loi no 2822).
  58. - Interdiction de la grève aux employés de la Banque centrale républicaine de Turquie (art. 32, paragr. 3, de la loi no 1211).
  59. - Interdiction de la grève en cas de déclaration de la loi martiale ou de situation d'urgence (loi no 1402).
  60. - Imposition de l'arbitrage obligatoire de la Cour suprême d'arbitrage en cas d'interdiction ou de suspension de la grève pour résoudre les conflits collectifs (art. 54 de la Constitution).
  61. - Imposition de l'arbitrage obligatoire pour mettre fin à une grève s'accompagnant de peines d'emprisonnement jusqu'à six mois pour les grévistes qui poursuivent la grève (art. 54 de la Constitution et 33 et 75 de la loi no 2822).
  62. - Lourdeur de la procédure pour le déclenchement de la grève (acte notarial pour le dépôt du préavis de grève et la grève ne débutera que soixante jours après sa notification à l'autre partie) (art. 37 de la loi no 2822).
  63. - Préavis de six jours pour le déclenchement de la grève permettant à l'employeur dans les petites entreprises d'effectuer nombre d'actes déloyaux, y compris le licenciement de futurs grévistes et leur remplacement par d'autres travailleurs, ou de déplacer les machines.
  64. - Obligation faite aux travailleurs de quitter l'établissement au début de la grève (art. 38 de la loi no 2822) sous peine de un mois à un an de prison (art. 201 de la loi no 765 portant Code pénal).
  65. - Interdiction du paiement des salaires et des prestations sociales pendant la grève et interdiction d'inclure dans les conventions collectives des clauses contraires (art. 42 de la loi no 2822).
  66. - Interdiction faite aux travailleurs grévistes de bloquer les voies d'accès ou de sortie de l'établissement et de former des groupes devant l'établissement ou autour de celui-ci (art. 38 de la loi no 2822).
  67. - Limitation du nombre de piquets de grève à quatre, interdiction d'obstruer l'entrée et la sortie et de faire de la propagande en plaçant des affiches, signes ou slogans, autres que la mention "travailleurs en grève dans l'établissement", ou de protéger les piquets de grève sous un abri, une hutte ou une tente sous peine de un à six mois de prison (art. 48 et 79 de la loi no 2822).
  68. - Possibilité pour l'employeur de licencier les grévistes sans préavis ni indemnité et responsabilité financière des syndicats en cas de grève illégale (art. 45 de la loi no 2822).
  69. - Responsabilité financière des syndicats en cas de dommage matériel causé dans l'établissement pendant une grève dû à l'action délibérée ou à la négligence des travailleurs ou du syndicat pendant la grève (art. 54 de la Constitution et 47 de la loi no 2822).
  70. - Suspension de la grève par décision de justice si le droit de grève est exercé contrairement aux règles de la bonne foi ou de manière à porter atteinte à la société ou aux richesses nationales (art. 47 de la loi no 2822).
  71. - Décision du tribunal de mettre fin à une grève lorsque les trois quarts des membres des établissements touchés par la grève se retirent du syndicat l'ayant déclarée.
  72. - Sanction alourdie d'un tiers au moins et de la moitié au plus contre les grévistes en cas de récidive (art. 81 de la loi no 2822).
  73. 18. Allégation relative à la suspension des organisations par voie administrative:
  74. - En cas de proclamation de la loi martiale ou de situation d'urgence, les autorités administratives et militaires peuvent suspendre les activités des syndicats.
  75. 19. Allégation relative au droit des organisations de se fédérer et de s'affilier à des organisations internationales:
  76. - Interdiction de constitution des fédérations et des comités locaux.
  77. - Obstacle à l'affiliation internationale (art. 28 de la loi sur les syndicats imposant le dépôt des statuts de l'organisation internationale à laquelle les syndicats veulent s'affilier trois mois avant la demande d'affiliation).
  78. - Nécessité d'un accord préalable du Conseil des ministres pour la création d'organisations internationales (art. 1 de la loi no 3335 du 26 mars 1987) et pour recevoir une aide financière d'une organisation internationale (art. 40 de la loi sur les syndicats) sous peine de trois à six mois de prison pour le syndicat bénéficiaire et d'emprisonnement de six mois à deux ans ou d'amende du double de l'aide reçue pour les dirigeants syndicaux (art. 56 et 59, alinéa 7, de la loi sur les syndicats).
  79. 20. Allégation relative aux restrictions en matière de contacts internationaux:
  80. - Nécessité d'une autorisation du ministre de l'Intérieur pour que les dirigeants syndicaux turcs puissent se rendre à l'étranger et pour que les dirigeants syndicaux étrangers puissent se rendre en Turquie, sous peine de trois à six mois de prison (art. 43 et 82 de la loi no 2908 sur les associations).
  81. 21. La plainte de la DISK se réfère, quant à elle, à des restrictions de droit et à des restrictions de fait à l'application des conventions nos 87, 98 et 151.
  82. 22. S'agissant des éléments de droit, dans sa plainte initiale la DISK allègue que les restrictions à la liberté syndicale sont imposées par la Constitution:
  83. - L'article 51 de la Constitution interdit l'appartenance à plus d'un syndicat à la fois et exige dix ans d'activité dans la branche pour devenir dirigeant d'un syndicat ou d'une confédération.
  84. - L'article 52 interdit toute activité politique aux syndicats.
  85. 23. La DISK explique elle aussi que les restrictions sont imposées par la loi no 2821 sur les syndicats:
  86. a) Article 3: Limitation de la constitution des syndicats au niveau d'une industrie par branche d'activité.
  87. b) Article 5: Obligation d'être ressortissant turc et disqualification pénale pour des infractions politiques.
  88. c) Article 7: Imposition des éléments qui doivent obligatoirement figurer dans les statuts.
  89. d) Articles 9 à 19: Détermination des règles auxquelles doivent obéir les syndicats et les confédérations.
  90. e) Article 21: Interdiction d'affiliation syndicale au personnel enseignant des établissements d'enseignement privé.
  91. f) Articles 22 et 25: Imposition de la présence d'un notaire pour certifier de l'affiliation ou du retrait d'un membre d'un syndicat, le retrait ne prenant effet qu'au bout de trois mois.
  92. g) Article 23: Limitation du droit des syndicats et des confédérations de déterminer librement le montant des cotisations.
  93. h) Article 28: Imposition du contrôle de l'Etat et de l'autorisation préalable en matière d'affiliation aux organisations internationales de travailleurs et d'employeurs.
  94. i) Article 29: Défaut de protection spécifique en matière de garantie d'emploi pour un certain nombre de représentants des travailleurs (membres du conseil de discipline, du conseil de vérification des comptes, fonctionnaires syndicaux bénévoles).
  95. j) Article 31: Bien que cet article interdise la discrimination pour activité syndicale, il ne prévoit que l'indemnisation des travailleurs licenciés et non la réintégration dans l'emploi en application d'une décision de justice. Or, depuis 1992, date où la DISK a recommencé ses activités, 20 000 travailleurs ont été licenciés pour des motifs discriminatoires liés à la liberté syndicale. La DISK souhaite que la Turquie adopte des mesures juridiques semblables à celles prévues par la convention no 158 qu'elle vient de ratifier.
  96. k) Article 34: Limitation du nombre de délégués syndicaux qui peuvent être élus.
  97. l) Article 35: Limitation des fonctions des délégués syndicaux (ils ne peuvent exercer leurs fonctions sans gêner leur propre travail et sans porter atteinte à la discipline du travail dans l'établissement).
  98. m) Article 37: Interdiction des activités politiques aux syndicats et aux confédérations.
  99. n) Article 39: Interdiction aux syndicats et aux confédérations d'organiser des réunions et des manifestations en dehors du domaine de leur compétence.
  100. o) Articles 40 à 45: Obligation faite aux syndicats de déposer leurs avoirs dans des banques d'Etat et interdiction d'aider leurs membres.
  101. p) Article 47: Contrôle administratif et financier de l'Etat sur les syndicats et les confédérations.
  102. q) Articles 54 à 59: Dissolution par voie judiciaire et remplacement des comités directeurs par des syndics, et sanctions pénales en cas d'infraction de la part des syndicats et de leurs dirigeants (l'article 59 prévoit jusqu'à trois ans d'emprisonnement dans certains cas). Les syndicats et les fédérations peuvent être interdits pour les raisons suivantes:
  103. - non-conformité des statuts et autres documents;
  104. - aide reçue de manière non conforme;
  105. - activité politique en relation avec le parti politique;
  106. - maintien en fonctions de personnes condamnées pour des délits qui sont des obstacles pour être élus dirigeants syndicaux;
  107. - affiliation à des organisations internationales sans autorisation;
  108. - aide financière ou soutien de la part des partis politiques;
  109. - activité politique conjointe avec des associations professionnelles ou des fondations.
  110. 24. La DISK se réfère également aux restrictions imposées en application de la loi no 2908 sur les associations:
  111. - Les articles 43, 44, 67, 68 et 90 de la loi interdisent aux associations des activités autres que celles contenues dans les statuts et aux dirigeants de participer à des marches et manifestations qui ne correspondent pas aux buts de l'association, exigent l'obtention d'une autorisation préalable pour les contacts avec l'étranger et le dépôt 24 heures à l'avance devant le gouverneur de la province du texte des déclarations que vont faire les associations, imposent la présence de commissaires du gouvernement dans les assemblées générales ou les congrès, permettent aux autorités de procéder à des enregistrements audiovisuels et de faire des photographies au cours de réunions et exigent l'obtention d'une autorisation préalable du gouverneur de la ville pour ouvrir les locaux d'une association.
  112. 25. Les restrictions, selon la DISK, sont également imposées en application de la loi no 2495:
  113. - Les articles 21 et 22 de la loi interdisent de se syndiquer au personnel de sécurité.
  114. 26. La DISK allègue en outre des restrictions imposées en matière de négociation collective et l'exercice du droit de grève résultant de la Constitution:
  115. - L'article 53 n'accorde le droit de négocier collectivement qu'aux travailleurs et aux employeurs et ne permet la conclusion que d'une seule convention collective pour un même lieu de travail.
  116. - L'article 54 interdit les grèves politiques, de solidarité et générales.
  117. 27. La DISK allègue aussi des restrictions résultant de la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out, en particulier:
  118. - L'article 3 impose une convention collective pour une période donnée dans un établissement.
  119. - L'article 12 impose les critères de 10 pour cent des travailleurs de la branche et 50 pour cent des travailleurs de l'établissement pour négocier.
  120. - L'article 32 confère de trop larges pouvoirs aux autorités de recourir à la Cour supérieure d'arbitrage.
  121. - Les articles 33 et 34 confèrent au Conseil des ministres le pouvoir de suspendre la grève pendant soixante jours si elle est de nature à porter préjudice à la santé publique et à la sécurité nationale, ainsi qu'en cas de désaccord entre les parties à l'expiration du délai de suspension de soixante jours.
  122. - Les articles 25, 29, 37, 38 et 48 contiennent de nombreuses restrictions au droit de grève et aux piquets de grève.
  123. - Les articles 71 à 73 prévoient de lourdes sanctions pénales pour les contrevenants.
  124. 28. La DISK critique enfin l'interdiction des grèves pendant dix ans dans les zones franches d'exportation contenue dans la loi no 3218.
  125. 29. Par ailleurs, la plainte initiale de la DISK porte également sur plusieurs éléments de fait qui viennent corroborer ses dires en ce qui concerne les atteintes à la liberté syndicale.
  126. 30. La DISK insiste sur le fait que l'exigence de regrouper 10 pour cent des travailleurs de la branche contenue dans l'article 12 de la loi no 2822 entrave gravement le processus de négociation collective. En effet, explique-t-elle, bien que l'article 12 prévoie que les confédérations syndicales peuvent contester l'exactitude des statistiques publiées par le ministère du Travail tous les ans pour déterminer le taux de 10 pour cent des travailleurs occupés dans une branche d'activité devant le tribunal du travail d'Ankara qui doit statuer dans les quinze jours; depuis 1991, date où la DISK a repris ses activités (après avoir été dissoute pendant onze ans à la suite du coup d'Etat militaire du 12 septembre 1980), le tribunal ne statue toujours pas. Cette bataille juridique qui dure depuis deux à trois ans a pour résultat de bloquer le système des négociations collectives d'un grand nombre d'entreprises.
  127. 31. Il en est ainsi pour les travailleurs de Gida Is (syndicat des travailleurs de l'alimentation) où les trois syndicats de base, à savoir Gida Is affilié à la DISK, Tek Gida Is affilié à TURK-IS et Os Gida Is affilié à HAK IS, ont introduit une action en justice contre les statistiques du ministère du Travail sans qu'il soit encore statué; 7 524 membres de Gida Is dans 107 entreprises se voient privés du droit d'être inclus dans un accord collectif. Des situations similaires ont eu lieu pour Genel Is (syndicat des employés publics) retardant le processus de négociation collective de 200 000 employés, pour Tekstil Is (le syndicat des travailleurs du textile) en ce qui concerne 9 833 affiliés à la DISK, pour Sosyal Is (syndicat des employés du commerce et des bureaux) en ce qui concerne 4 610 affiliés à la DISK et 11 942 affiliés à TURK-IS, pour Dev Saglik Is (syndicat des travailleurs de la santé révolutionnaire) en ce qui concerne 10 000 travailleurs, pour Tumka Is (syndicat des travailleurs de la pâte à papier) en ce qui concerne 300 travailleurs, pour Deri Is (syndicat des travailleurs du cuir), pour Basin Is (syndicat des travailleurs de l'imprimerie) et pour Limiter Is (syndicat des dockers), où le tribunal a estimé que l'organisation affiliée à la DISK ne réunissait pas 10 pour cent de la branche d'activité et s'est donc vu dénier le droit de négocier collectivement.
  128. 32. La DISK soulève également la question de la violation du droit syndical résultant du défaut de protection en matière de sécurité d'emploi. Elle regrette que la loi impose le fardeau de la preuve de la discrimination antisyndicale aux travailleurs étant donné que les autres travailleurs hésitent à témoigner par crainte de représailles.
  129. 33. La DISK cite plusieurs exemples de licenciements ou de mesures préjudicielles qui ont frappé les travailleurs pour activités syndicales, en particulier:
  130. - à Genel Is, où 5 500 employés municipaux ont été licenciés après les élections municipales de mars 1994 gagnées par des maires de droite;
  131. - à Tekstil Is, où 10 000 travailleurs ont été licenciés, les employeurs ayant demandé à ces travailleurs de se syndiquer à Teksif, le syndicat affilié à TURK-IS;
  132. - à Gida Is, où 7 630 travailleurs ont été licenciés quand ce syndicat s'est mis en place;
  133. - à Lastik Is, où 618 travailleurs ont été licenciés pour des raisons similaires;
  134. - à Dev Maden Sen (syndicat des mineurs), où 43 travailleurs ont été licenciés;
  135. - à Oley Is (syndicat des travailleurs des hôtels-restaurants), où les travailleurs ont fait une pétition sur le même sujet;
  136. - à Dev Saglik Is, où 192 travailleurs de la santé ont été licenciés;
  137. - ainsi qu'à Bank Sen, où 200 travailleurs de Geronti Bank Sen ont été licenciés pour avoir refusé de démissionner de Bank Sen et de s'affilier à BanksIs comme le leur demandait leur employeur.
  138. 34. La DISK mentionne également des ingérences des autorités dans la constitution des syndicats et des confédérations:
  139. - à Bank Sen et à Dev Maden Sen, les travailleurs avaient élu leur comité exécutif, mais les autorités ont introduit des recours contre le fait que l'une n'avait élu que cinq suppléants au lieu de sept et l'autre avait élu des dirigeants syndicaux n'ayant pas dix ans d'appartenance à la profession.
  140. 35. De même, les autorités ont reproché à la DISK le contenu de certains éléments de leurs statuts approuvés lors de leur congrès extraordinaire de décembre 1991 et leur ont demandé de les éliminer lors de leur premier congrès.
  141. 36. Le texte mentionne les éléments critiqués à l'article 15 des statuts de la DISK:
  142. - Tout d'abord, le mot Turquie qui apparaît dans le nom de la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK) ne peut, d'après les autorités, être utilisé qu'avec l'autorisation du gouvernement.
  143. - Le montant d'argent liquide mis à la disposition des entreprises sociales telles que les coopératives, par les syndicats de base ou la confédération, n'est pas mentionné dans les statuts.
  144. - Par ailleurs, les statuts prévoient que le droit pour un syndicat de base de quitter la confédération doit être décidé à la majorité des deux tiers du congrès, que les membres de la commission des membres honoraires participent au congrès, que les propositions de changement de l'ordre du jour d'un congrès doivent être soumises à l'approbation de la session plénière du congrès, que les congrès extraordinaires doivent se tenir dans les deux mois de la demande, que les organisations internationales peuvent fournir une aide à la confédération, que bien que l'une des commissions statutaires devrait, aux termes de la loi sur les syndicats, s'intituler "commission disciplinaire", les statuts de la DISK prévoient seulement une commission des membres honoraires.
  145. - Enfin, les qualifications obligatoires de dirigeants syndicaux ne sont pas mentionnées dans les statuts.
  146. 37. Le Département de l'intérieur de la province d'Istanbul a demandé à Bank Sen de modifier des éléments de ses statuts lors de son premier congrès, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a même introduit un recours contre Bank Sen pour faire cesser ses activités devant la quatrième chambre du tribunal du travail d'Istanbul. Une procédure analogue a été engagée contre Sine Sen.
  147. 38. D'autres ingérences gouvernementales résultent du rappel fait par les autorités (le Département de l'intérieur de la province d'Istanbul) de la nécessité d'un dépôt trente jours à l'avance devant les autorités des noms et documents des représentants syndicaux invités ou envoyés à l'étranger sous peine de poursuites judiciaires.
  148. 39. Dans une communication ultérieure du 2 juin 1995, la DISK prend acte de l'évolution législative positive intervenue en avril 1995 en matière de loi sur les syndicats, mais elle considère que ces modifications sont insuffisantes. Elle précise en outre que la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out n'a toujours pas été amendée.
  149. B. Réponse du gouvernement
  150. 40. Le gouvernement indique dans sa réponse du 15 septembre 1995 que plusieurs dispositions de la Constitution ont été modifiées ainsi qu'un certain nombre de dispositions de la loi sur les syndicats.
  151. 41. Questions relatives à la Constitution de la République de Turquie: La loi no 4121 portant amendement de la Constitution a été publiée dans la Gazette officielle du 26 juillet 1995:
  152. - Dans le préambule de la Constitution telle qu'amendée, les paragraphes qui louaient l'intervention militaire du 1er septembre 1980 ont été abrogés.
  153. - Dans l'article 33, les voies de recours juridiques contre les activités des syndicats ont été réduites, les paragraphes 4 et 5 interdisant les activités politiques et les liens avec les partis politiques aux syndicats ont été abrogés.
  154. - L'article 52 interdisant toute activité politique aux syndicats a été abrogé, les syndicats peuvent s'engager dans des activités politiques et les dispositions restrictives en matière de ressources et de dépenses des syndicats ont été éliminées.
  155. - Dans l'article 53, le droit de se syndiquer a été accordé aux fonctionnaires et le droit de négocier collectivement a été conféré aux syndicats de fonctionnaires. Une loi spéciale réglementera la procédure en la matière.
  156. - Dans l'article 69, les modifications introduites lèvent les interdictions faites aux partis politiques de tout lien politique ou de coopération avec les syndicats.
  157. - Dans l'article 135, les modifications introduites permettent aux organisations syndicales de s'occuper de questions politiques.
  158. - Dans l'article 171, le dernier paragraphe qui interdisait aux coopératives toute activité politique a été supprimé.
  159. 42. Questions relatives à la loi no 1475 sur le travail et à la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out: Les projets de loi visant à mettre ces deux textes en conformité avec les exigences des conventions nos 87, 151 et 158 récemment ratifiées par la Turquie ont été soumis à la grande Assemblée nationale turque et font l'objet d'un débat devant les commissions parlementaires.
  160. 43. Questions relatives à la loi no 2821 sur les syndicats:
  161. - Allégation concernant l'article 3 (syndicats de travailleurs et d'employeurs). Faisant suite à la ratification des conventions nos 87 et 151, le projet de loi sur les syndicats de fonctionnaires est en cours d'élaboration. Dès qu'il sera adopté, les fonctionnaires jouiront du droit syndical. D'après le gouvernement, l'interdiction des syndicats professionnels ou d'entreprise contenue dans l'article 3 résulte du fait que, selon lui, les syndicats de branche servent mieux les intérêts de leurs membres dans les circonstances nationales en permettant la création de syndicats plus forts.
  162. - Allégation relative à l'article 5 (conditions requises pour les membres fondateurs). La loi no 4101 du 4 avril 1995 amendant la loi no 2821 sur les syndicats est entrée en vigueur le 8 avril 1995. Le gouvernement explique qu'elle amende l'article 5 en abrogeant notamment le dernier alinéa de cet article qui se référait aux disqualifications pénales qui résultaient de condamnations pour infraction aux articles 68 à 79 de la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out. En conséquence, les limitations imposées au droit syndical individuel pour condamnation à des délits relatifs à des activités syndicales ne sont plus en vigueur.
  163. - Allégation concernant l'article 7 (statuts des syndicats et des confédérations). Cet article contient des indications sur le contenu de ce qui doit être inclus dans les statuts des syndicats et ne vise en rien à restreindre le libre exercice du droit syndical.
  164. - Allégation concernant les articles 9 à 19 (ces articles traitent des organes, des organisations et de leurs fonctions ainsi que des procédures d'élection de leurs représentants). L'article 9 était surtout celui qui faisait l'objet de critiques car il limitait le nombre de fois qu'une personne pouvait être élue à une fonction syndicale. La loi no 4101 a abrogé cette disposition ainsi que le paragraphe suivant (aux termes duquel les fonctions des dirigeants syndicaux cessaient d'office s'ils acceptaient des fonctions dans la direction ou dans les commissions de vérificateurs aux comptes des entreprises ou des établissements publics). Les autres articles visent à un fonctionnement sans heurt du système de relations professionnelles et s'appliquent également aux organisations d'employeurs.
  165. - Allégation concernant l'article 21 (interdiction d'affiliation). La loi no 4101 abroge les alinéas 2 et 5 de cet article. Les enseignants jouissent donc désormais du droit syndical.
  166. - Allégation concernant l'article 22 (acquisition de la qualité de membre). Cet article interdit l'affiliation à plus d'un syndicat. Cet article vise à renforcer le mouvement syndical en empêchant la prolifération de syndicats rivaux au détriment des travailleurs.
  167. - Allégation concernant l'article 23 (cotisations). La disposition de cet article qui limite le montant des cotisations mensuelles versées par les travailleurs à un salaire journalier de base n'est applicable que pour les organisations de premier degré et pas pour les organisations de degré supérieur. Selon le gouvernement, il est conforme aux circonstances nationales et vise à protéger les travailleurs.
  168. - Allégation concernant l'article 25 (cessation de la qualité de membre). La loi no 4101 a amendé le deuxième paragraphe de l'article 25 (concernant le préavis de retrait en présence d'un notaire et le délai de trois mois nécessaire pour se retirer d'un syndicat). Le retrait d'un syndicat et l'affiliation dans un nouveau syndicat deviennent désormais effectifs au bout de trente jours. Le dernier alinéa de l'article 25 obligeant les retraités à perdre leur qualité de membre et à se retirer de toute fonction syndicale a également été modifié.
  169. - Allégation concernant l'article 28 (affiliation aux organisations internationales de travailleurs et d'employeurs). La loi no 4101 a amendé cet article pour supprimer l'autorisation préalable du gouvernement et ne lui confère que le pouvoir de recourir en justice pour obtenir une annulation d'affiliation à une organisation internationale si celle-ci ne possède pas certaines caractéristiques.
  170. - Allégation concernant l'article 29 (protection des dirigeants des syndicats et des confédérations de travailleurs). La loi ne prévoit pas la cessation de l'emploi lors de l'élection à une fonction syndicale. Pour permettre le renforcement du mouvement syndical, la loi garantit au président et aux membres du comité directeur d'un syndicat le droit d'être réembauchés afin qu'ils puissent se consacrer à plein temps à leurs fonctions. Les autres dirigeants syndicaux peuvent conserver leur emploi quand ils sont en fonctions puisqu'ils ne les exercent pas à plein temps. En revanche, la loi n'empêche pas un syndicat de négocier une telle protection dans les conventions collectives pour les autres dirigeants syndicaux.
  171. - Allégation concernant l'article 31 (protection du statut de membre). La loi sur les syndicats interdit toute forme de discrimination fondée sur l'affiliation syndicale et prévoit une amende à l'encontre des contrevenants et une indemnisation des victimes. La loi sur le travail sera amendée pour la mettre en conformité avec la convention no 158 qui entrera en vigueur en janvier 1996. Elle prévoira la réintégration.
  172. - Allégation concernant l'article 34 (nomination des délégués syndicaux et conditions qui leur sont applicables). L'article 30 de la loi garantit la protection des délégués syndicaux conformément aux conventions nos 87 et 135. L'article 34 s'efforce de réconcilier les besoins des travailleurs avec les exigences de l'entreprise et de garantir la qualification des dirigeants syndicaux.
  173. - Allégation concernant l'article 35 (fonction des délégués syndicaux). Le même raisonnement s'applique ici, la loi énumère les droits et les responsabilités des parties afin de garantir la paix sociale sur le lieu de travail.
  174. - Allégation concernant l'article 39 (interdiction de certaines réunions). La loi no 4101 abroge le dernier paragraphe de cet article. Il n'est donc plus interdit aux syndicats et aux confédérations d'organiser des réunions et des manifestations en dehors du domaine de leurs objectifs ou de leur compétence.
  175. - Allégation concernant les articles 40 à 45, 47 et 49 à 51 (recettes et dépenses des syndicats et des confédérations). Ces articles imposent certaines obligations aux syndicats de travailleurs et aux organisations d'employeurs, mais ils visent à permettre à ces organisations de mieux servir leurs membres et à ne pas s'ingérer dans l'exercice des droits syndicaux. L'article 44 a toutefois été amendé par la loi no 4101 pour leur permettre de mettre en place des facilités pour la formation technique et professionnelle de leurs membres. De même, l'article 48 a été amendé pour supprimer la suprématie des confédérations sur les syndicats de base.
  176. - Allégation concernant les articles 54 à 59 (pénalités). La loi no 4101 abroge les second et troisième paragraphes de l'article 58. Ainsi, la dissolution d'un syndicat parce que ses dirigeants ont été condamnés en application de certains articles du Code pénal turc ou de délits ayant trait à la législation sur les relations professionnelles n'est plus possible.
  177. 44. Questions concernant les autres lois: Lorsque les amendements constitutionnels auront été introduits dans la loi no 1475 sur le travail et dans la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out et que le projet de loi sur le droit syndical des fonctionnaires aura été adopté, les dispositions contraires à ces amendements contenues dans la loi no 765 portant Code pénal, la loi no 657 sur les fonctionnaires et la loi sur l'établissement et la diffusion des stations de radio et de télévision ainsi que toute autre loi ou décret encore en vigueur seront soit considérées comme nulles et non avenues, soit abrogées.
  178. 45. Le gouvernement ajoute que, quand les projets de loi en cours de préparation auront été adoptés, il fournira des informations sur les incidences des modifications sur la législation en vigueur.
  179. 46. Le gouvernement précise également qu'afin d'adopter les modifications nécessaires dans la loi no 2821 sur les syndicats, conformément aux amendements constitutionnels promulgués, une commission a été mise en place le 8 août 1995 et qu'elle continue ses travaux à cet égard.
  180. 47. Dans une communication ultérieure du 8 janvier 1996, le gouvernement indique que l'interdiction de la grève et des lock-out contenue dans l'article 22 de la loi no 3308 du 5 juin 1986 n'est applicable qu'aux élèves des écoles professionnelles qui suivent des cours de formation professionnelle dans des établissements. Quant à l'article premier transitoire de la loi no 3218 du 15 juin 1985 sur les zones franches d'exportation, il prévoit que les articles sur les grèves et les lock-out contenus dans la loi no 2822 sur les conventions collectives, la grève et le lock-out ne s'appliquent pas dans les zones franches d'exportation pendant une période de dix ans et que les conflits d'intérêts qui surviendront au cours de cette période seront résolus par le Conseil suprême d'arbitrage.
  181. 48. Le gouvernement confirme par ailleurs que la DISK et les syndicats de base qui lui sont affiliés avaient été dissous par voie judiciaire jusqu'au 16 juillet 1991, date à laquelle ces organisations ont retrouvé le droit d'organiser les travailleurs. A l'époque, la DISK et ses affiliés n'avaient pas le droit d'exercer d'activités syndicales, y compris de négocier collectivement. Les conditions régissant la reconnaissance des syndicats comme agents négociateurs sont contenues dans l'article 12 de la loi no 2822, et les syndicats qui remplissent ces conditions peuvent recourir en justice s'ils ne sont pas autorisés à négocier au nom de leurs propres membres.
  182. 49. Le gouvernement précise que le droit de créer des syndicats est garanti par la Constitution ainsi que par l'article 31 de la loi no 2821 pour toute personne au bénéfice d'un contrat de travail et par l'article 59 de cette même loi qui punit d'amende la violation de ces droits. En conséquence, les mesures de représailles contre les travailleurs pour activités syndicales relèvent des tribunaux qui ont pour tâche de statuer et de réprimer en la matière. Les syndicats qui allèguent des mesures de représailles antisyndicales doivent d'abord se pourvoir devant les tribunaux nationaux pour se faire dire droit.
  183. 50. Enfin, s'agissant de la fermeture de TUMHABER-SEN, le gouvernement indique qu'elle a été ordonnée par une décision de la Cour de cassation qui a confirmé la décision de la juridiction inférieure sur la base du fait que la loi conférant la personnalité juridique à cette association n'existe pas encore. Le gouvernement renvoie sur ce point aux commentaires qu'il formule sous les conventions nos 87 et 151 dans ses premiers rapports détaillés sur l'application de ces conventions nouvellement ratifiées, où il explique que la transformation desdites conventions dans la loi nationale n'a pas encore été effectuée.
  184. C. Conclusions du comité
  185. 51. Le comité a pris note des allégations détaillées présentées par les deux confédérations syndicales turques TURK-IS et DISK concernant des manquements graves à la liberté syndicale et à la liberté de négociation collective. Le comité prend note également des commentaires et observations détaillés fournis par le gouvernement sur ces deux plaintes ainsi que des modifications constitutionnelles et législatives intervenues dans le pays depuis le dépôt des plaintes.
  186. 52. Se référant aux recommandations qu'il avait émises depuis plusieurs années à propos d'un très grand nombre de cas, en particulier, dans les cas nos 631, 997, 999 et 1029, 1582, 1583 et 1697 concernant de graves violations de la liberté syndicale contenues dans la Constitution et dans la législation nationale, le comité prend note avec intérêt des amendements intervenus aux termes de la loi no 4101 du 4 avril 1995 portant modification de la loi sur les syndicats de 1983 et de la loi no 4121 du 23 juillet 1995 portant modification de la Constitution.
  187. 53. Le comité observe en particulier que, suite à ces amendements, l'interdiction de toute activité politique aux syndicats et de tout lien avec les partis politiques est désormais levée (abrogation ou amendement des articles 52, 59, 135 et 171 de la Constitution). Le comité note que le gouvernement s'est engagé à modifier les dispositions de la loi sur les syndicats conformément à ces amendements constitutionnels et qu'une commission a été mise en place à cet effet le 8 août 1995. Le comité exprime le ferme espoir que toutes les dispositions législatives contenues dans la loi sur les syndicats, dans la loi sur les associations, dans la loi sur l'établissement et la diffusion des stations de radio et de télévision, dans le Code pénal, dans la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out et dans toute autre loi contenant des aspects relatifs à cette interdiction seront abrogées ou modifiées pour assurer une complète conformité de la législation avec les dispositions constitutionnelles et les principes de la liberté syndicale.
  188. 54. Le comité observe également que la loi portant amendement de la Constitution a reconnu le droit de se syndiquer et de négocier collectivement aux fonctionnaires (art. 53). Le comité note que l'article 53 prévoit que les points d'accord et de désaccord signés par les parties seront soumis au Conseil des ministres et qu'une législation spéciale régira la matière. Le comité, prenant note de ce que le gouvernement indique qu'actuellement un projet de loi a fait l'objet d'un débat parlementaire, exprime le ferme espoir que le projet de loi sur les syndicats de fonctionnaires sera adopté à brève échéance et qu'il sera pleinement conforme aux exigences des conventions nos 87, 98 et 151 de l'OIT. Le comité insiste en particulier sur la nécessité d'assurer à toutes les personnes employées par les autorités publiques, qu'il s'agisse de fonctionnaires d'Etat ou des municipalités, ou d'agents publics au bénéfice d'un statut ou de contractuels au service de l'Etat, les garanties prévues par ces conventions. Il insiste aussi sur la nécessité d'adopter pour le règlement des différends du travail dans la fonction publique un mécanisme de détermination des conditions d'emploi par voie de négociation entre les parties ou par une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité telle que la médiation, la conciliation ou l'arbitrage, instituée de telle sorte qu'elle inspire la confiance des parties intéressées.
  189. 55. Le comité observe que la loi no 4101 portant amendement de la loi sur les syndicats a levé plusieurs restrictions contraires aux articles 2, 3 et 5 de la convention no 87:
  190. - Les disqualifications pénales résultant du Code pénal et des infractions à la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out ont été levées.
  191. - L'interdiction d'affiliation syndicale aux inspecteurs, vérificateurs, membres des comités directeurs et autres ainsi qu'au personnel enseignant du secteur privé a été supprimée (art. 5 et 21 de la loi sur les syndicats dans sa teneur modifiée).
  192. - La limitation de la possibilité d'être élu dirigeant syndical à quatre mandats syndicaux successifs a été abrogée (art. 9 modifié).
  193. - Le droit pour les travailleurs de se retirer d'un syndicat prend désormais effet au bout de trente jours et non plus de trois mois.
  194. - Les retraités peuvent garder leur qualité de membre et continuer à assumer des fonctions dans les organes d'un syndicat (art. 25 modifié).
  195. - L'approbation préalable du gouvernement pour l'affiliation à des organisations internationales n'est plus nécessaire et le gouvernement n'a conservé que le droit de recourir en justice pour annuler une affiliation qui ne recueillerait pas certaines caractéristiques (art. 28 modifié).
  196. - L'interdiction faite aux confédérations, aux syndicats et à leurs sections d'organiser des réunions et des manifestations en dehors du domaine concernant leurs objectifs et leurs compétences est abolie (art. 39 modifié).
  197. - Les syndicats et les confédérations peuvent engager librement leurs dépenses en ce qui concerne les facilités qu'ils souhaitent accorder en matière d'éducation technique et professionnelle de leurs membres (art. 44 modifié).
  198. - La suprématie des confédérations sur les syndicats a été supprimée (art. 48 modifié).
  199. - Et surtout la possibilité de dissoudre un syndicat ou une confédération au motif d'infraction au Code pénal ou à la loi sur les conventions collectives, la grève ou le lock-out qui aurait été commise par les dirigeants syndicaux a été abolie (art. 58 modifié).
  200. 56. Le comité doit cependant relever avec un vif regret que, malgré les assurances maintes fois réitérées par le gouvernement lors des très nombreux cas qu'il a examinés concernant la Turquie, certaines dispositions législatives continuent de porter atteinte aux droits garantis par les conventions nos 87 et 98, et que la pratique nationale est loin d'être conforme aux engagements internationaux de la Turquie. Le comité demande au gouvernement d'intensifier ses efforts en prenant des mesures urgentes pour porter remède à ces questions.
  201. 57. Maintien de l'interdiction de constituer un syndicat sur la base de la profession ou du lieu de travail (art. 3 de la loi sur les syndicats) et maintien du double critère pour négocier collectivement (art. 12 de la loi sur la négociation collective, la grève et le lock-out). Le comité note que le gouvernement se contente de déclarer que ceci sert mieux les intérêts des travailleurs et permet de renforcer les syndicats. Le comité observe que les syndicats de branche peuvent créer autant de sections locales qu'ils le souhaitent au niveau régional ou local, mais il estime que la législation n'a pas pour incidence de promouvoir et de stimuler la négociation collective sans entrave au niveau de l'entreprise. En effet, s'agissant de conventions collectives de travail d'entreprise, la législation prévoit que les établissements sont considérés comme constituant une seule unité aux fins du calcul de la majorité de plus de 50 pour cent des travailleurs pour négocier collectivement. Les conventions ne peuvent en outre être signées qu'avec des syndicats qui représentent 10 pour cent de la branche et 50 pour cent des travailleurs de l'entreprise (art. 12). Compte tenu des nombreuses et graves allégations concrètes présentées par la DISK qui portent sur un nombre important de secteurs de l'activité économique où les travailleurs ne sont pas couverts par une convention collective à cause des différends relatifs à la question de la représentativité des syndicats, le comité prie instamment le gouvernement de modifier sa législation pour la mettre en conformité avec les exigences des conventions nos 87 (art. 2) et 98 (art. 4).
  202. 58. Maintien de l'interdiction d'appartenance à plus d'un syndicat (art. 22 de la loi sur les syndicats). Le comité note que le gouvernement se contente d'indiquer que cette disposition vise à éviter la prolifération des syndicats rivaux. Le comité estime néanmoins que, si des travailleurs sont occupés dans plusieurs activités professionnelles, ils devraient pouvoir s'affilier au syndicat de leur choix couvrant ces diverses activités.
  203. 59. Maintien de la limitation du montant des cotisations syndicales (art. 23). Le comité note que le gouvernement indique seulement que cette mesure vise à protéger les travailleurs. Le comité estime qu'il devrait appartenir aux statuts des syndicats de décider en cette matière.
  204. 60. Maintien de l'obligation de dix ans de service effectif dans la branche applicable aux candidats aux élections syndicales (art. 14). Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas fourni d'informations sur les mesures qu'il envisage de prendre à cet égard. Le comité rappelle en effet l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'élire librement leurs représentants. Notant les allégations concrètes fournies par la DISK à cet égard, le comité exprime le ferme espoir que cette disposition extrêmement préjudiciable aux intérêts des syndicats sera levée à brève échéance.
  205. 61. Interdiction de la grève politique, de la grève de solidarité et de la grève qui porte préjudice à la société ou détruit la richesse nationale, limitation excessive des piquets de grève accompagnés de peine d'emprisonnement très lourdes à l'encontre des syndicats (art. 53 de la Constitution et 25 et 47, 70, 72, 73 et 79 de la loi sur les conventions collectives, la grève et le lock-out). Le comité conclut que ces restrictions excessives à l'exercice du droit de grève imposées aux travailleurs constituent une violation importante des principes de la liberté syndicale et il considère que ces limitations ne se justifieraient que si la grève perdait son caractère pacifique. En tout état de cause, l'interdiction générale de la grève de solidarité est abusive et les travailleurs devraient pouvoir exercer de telles actions si la grève initiale qu'ils soutiennent est légale. Seule l'interdiction de la grève politique peut être considérée comme admissible puisque les grèves purement politiques ne tombent pas dans le champ d'application des principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration, quatrième édition, 1996, paragr. 481.)
  206. 62. Maintien de l'interdiction de la grève au-delà des services essentiels au sens strict du terme (art. 29 et 30) de la loi no 2822, arbitrage obligatoire et clauses de temporisation de 60 jours accompagnés de peine d'emprisonnement pour les contrevenants (art. 54 de la Constitution, 33, 37 et 75 de la loi no 2822). Le comité estime que ces restrictions à l'exercice du droit de grève sont beaucoup trop importantes et il insiste en particulier sur le fait que l'arbitrage obligatoire ne devrait pouvoir être imposé que dans les services essentiels au sens strict du terme, à savoir ceux dont l'interruption risque de mettre en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne dans tout ou partie de la population. En outre, l'interdiction générale de la grève dans les banques et les transports n'est pas conforme aux principes de la liberté syndicale et devrait donc être levée. De plus, les sanctions devraient pouvoir être infligées pour faits de grève uniquement dans les cas où les grèves ne sont pas en conformité avec les principes de la liberté syndicale et elles ne devraient pas être disproportionnées par rapport à la gravité des infractions, ce qui n'est pas le cas quand les grévistes encourent des peines pouvant aller jusqu'à deux ans même trois ans de prison.
  207. 63. Restrictions graves à la liberté syndicale résultant de la loi de 1985 sur les zones franches d'exportation. Le comité regrette que le gouvernement se soit contenté de confirmer les informations des organisations plaignantes sur cette allégation. Il rappelle l'importance qu'il attache au respect de la liberté syndicale sur l'ensemble du territoire de la Turquie et prie le gouvernement de lever à brève échéance ces restrictions incompatibles avec l'application des conventions nos 87 et 98.
  208. 64. Le comité observe également avec préoccupation que le gouvernement se borne à confirmer que le syndicat TUMHABER-SEN a été dissous par voie judiciaire au motif que la transformation de la législation nationale après la ratification des conventions nos 87 et 151 n'a pas encore été effectuée et qu'aucune loi n'existe encore pour conférer la personnalité juridique à cette organisation. le comité rappelle qu'en ratifiant les conventions nos 87 et 151 en juillet 1993, le gouvernement s'est engagé à ce que l'acquisition de la personnalité juridique par les organisations de travailleurs ne soit pas subordonnée à des conditions de nature à mettre en cause l'application des dispositions des conventions sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, y compris pour les organisations de fonctionnaires. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour accorder la personnalité juridique au syndicat TUMHABER-SEN et à tous les autres syndicats de fonctionnaires publics.
  209. 65. Par ailleurs, le comité regrette profondément que le gouvernement se borne à indiquer que les mesures de représailles antisyndicales relèvent des tribunaux. Il rappelle qu'en cas de licenciement de syndicalistes en raison de leur affiliation ou de leurs activités syndicales, il a maintes fois demandé aux gouvernements de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux dirigeants et aux membres des syndicats qui ont été licenciés en raison de leurs activités syndicales légitimes d'obtenir leur réintégration dans leur poste de travail et d'appliquer aux entreprises les sanctions légales pertinentes. A cet égard, le comité note avec intérêt que la loi du travail sera amendée pour permettre la réintégration. Il prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation à ce égard. En outre, de l'avis du comité, les gouvernements devraient prendre les mesures nécessaires pour que les inspecteurs du travail puissent pénétrer librement et sans avertissement préalable dans les établissements assujettis à leur contrôle, et procéder au contrôle ou à l'enquête qu'ils jugent nécessaires pour s'assurer que les dispositions légales - notamment en matière de discrimination antisyndicale - sont strictement observées. (Voir op. cit., paragr. 753 et 756.) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures qui s'imposent pour garantir aux travailleurs une protection efficace contre les actes de discrimination antisyndicale, conformément aux engagements internationaux qu'il a pris en ratifiant en juin 1970 la convention no 98.
  210. 66. Enfin, d'une manière générale, le comité estime que la législation syndicale turque est trop détaillée et qu'elle traite de nombreuses questions qui devraient ressortir de la compétence des statuts des organisations de travailleurs et d'employeurs elles-mêmes. Le gouvernement devrait donc prendre des mesures pour simplifier la législation et laisser une plus grande autonomie aux organisations professionnelles.
  211. 67. Prenant note de ce que le gouvernement a manifesté sa ferme intention de continuer à modifier sa législation pour la mettre en conformité avec les conventions nos 87 et 151 récemment ratifiées par lui, le comité exprime le ferme espoir qu'en consultation avec les partenaires sociaux il sera à même de mettre l'ensemble de sa législation et de sa pratique en harmonie avec les principes de la liberté syndicale. Le comité suggère au gouvernement de faire appel à l'assistance technique du BIT pour résoudre les aspects législatifs soulevés dans les plaintes.
  212. 68. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ces cas au regard des conventions nos 87, 98 et 151.
  213. Recommandations du comité
  214. 69. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
  215. a) Le comité, notant avec intérêt les progrès intervenus au plan constitutionnel et législatif en Turquie, invite le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, à continuer de modifier sa législation en prenant des mesures pour la simplifier et laisser une plus grande autonomie aux organisations professionnelles afin de la mettre en pleine conformité avec les exigences des conventions nos 87, 98 et 151 ratifiées par ce pays.
  216. b) Le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour accorder la personnalité juridique aux organisations de fonctionnaires auxquelles elle est déniée, et en particulier à TUMHABER-SEN, conformément aux exigences des conventions nos 87 et 151 ratifiées par la Turquie.
  217. c) Le comité note avec intérêt que, d'après le gouvernement, la loi du travail sera amendée pour permettre la réintégration des travailleurs dans leur emploi et assurer la protection des travailleurs contre tous actes de discrimination antisyndicale (y compris le licenciement) conformément aux exigences de la convention no 98. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation à cet égard.
  218. d) Le comité suggère au gouvernement de faire appel à l'assistance technique du BIT pour résoudre les aspects législatifs soulevés dans les plaintes.
  219. e) Le comité attire l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs de ces cas au regard des conventions nos 87, 98 et 151.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer