ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil >  > Plaintes Article 24/26

RECLAMATION (article 24) - TURQUIE - C011, C098 (Présentée: 1982 - Rapport: 1992)

1. Confédération mondiale du travail (CMT), 2. Fédération syndicale mondiale (FSM), 3. Confédération internationale des syndicats libres (CISL)

Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

Rapport no. 282 du Comité de la liberté syndicale, Cas nos. 997, 999, 1029 -- Réclamation relative à la non-application par le gouvernement de la Turquie des conventions (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, et (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par la Confédération générale des syndicats de Norvège -- Plaintes contre le gouvernement de la Turquie présentées par la Confédération mondiale du travail (CMT), la Fédération syndicale mondiale (FSM), la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et plusieurs autres organisations syndicales

Rapport no. 282 du Comité de la liberté syndicale, Cas nos. 997, 999, 1029 -- Réclamation relative à la non-application par le gouvernement de la Turquie des conventions (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, et (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par la Confédération générale des syndicats de Norvège -- Plaintes contre le gouvernement de la Turquie présentées par la Confédération mondiale du travail (CMT), la Fédération syndicale mondiale (FSM), la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et plusieurs autres organisations syndicales

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. 1. Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail à Genève les 20, 21 et 27 février 1992, sous la présidence de M. Roberto Ago, ancien président du Conseil d'administration.
  2. 2. Le comité était saisi de différentes plaintes en violation des droits syndicaux en Turquie présentées par plusieurs organisations syndicales (cas nos 997, 999 et 1029), ainsi que d'une réclamation relative à la non-application par ce pays des conventions (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, et (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par la Confédération générale des syndicats de Norvège en juin 1982
  3. 3. Le comité soumet à l'approbation du Conseil d'administration un rapport sur les cas en instance et sur la réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT.
  4. 4. Le comité a examiné ces cas quant au fond à 24 reprises depuis 1981. Il a présenté à leur sujet plusieurs rapports intérimaires au Conseil d'administration, le plus récemment en novembre 1991 (voir 280e rapport du comité, approuvé par le Conseil d'administration à sa 251e session en novembre 1991).
  5. 5. Le gouvernement a envoyé une communication le 24 janvier 1992.
  6. 6. La Turquie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; néanmoins, elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921.
  7. A. Examen antérieur des cas
  8. 7. A la suite de la série de plaintes initiales qui ont été présentées après la prise du pouvoir par l'armée en septembre 1980, le comité a examiné ces cas dans une double perspective, étudiant, d'une part, leurs aspects législatifs et, d'autre part, leurs aspects factuels. En examinant le plus récent de ces cas, en novembre 1990, le comité en a résumé l'historique et a rappelé de manière assez détaillée les questions de fait et les points juridiques qu'ils soulevaient.
  9. 8. Dans le rapport intérimaire présenté au Conseil d'administration en novembre 1991, le comité a formulé les recommandations suivantes:
  10. a) Le comité demande au gouvernement de restituer les biens et avoirs de la DISK et de ses organisations affiliées. Il le prie de le tenir informé des mesures prises en ce sens ainsi que de l'évolution de la situation juridique de la DISK.
  11. b) Le comité invite le gouvernement à poursuivre ses efforts afin d'élargir et d'accélérer les discussions tripartites constructives sur les amendements à apporter aux dispositions constitutionnelles et législatives qui ne sont pas conformes aux principes de la liberté syndicale, afin que les conditions et modalités d'emploi soient régies par la négociation volontaire, conformément à l'article 4 de la convention no 98.
  12. c) Le comité prie les plaignants et le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur les allégations relatives aux événements liés à la marche des mineurs de Zonguldak à Ankara le 6 janvier 1991.
  13. B. Réponse du gouvernement
  14. 9. Dans sa communication en date du 24 janvier 1992, le gouvernement déclare qu'à la suite des dernières élections générales d'octobre 1991 le Parti de la juste voie (DYP) et le Parti social démocrate populaire (SHP), qui étaient dans l'opposition depuis 1983, sont arrivés au pouvoir au sein d'une coalition gouvernementale. Le gouvernement fait part de sa détermination de procéder aux réformes nécessaires, surtout dans le domaine de la législation du travail, pour renforcer sa compatibilité avec les normes et les principes existants au niveau international en matière de travail, dans la mesure où ils sont adaptés à la situation économique et sociale du pays et où celle-ci justifie leur application. Le programme du gouvernement présenté devant la Grande Assemblée nationale traduit cette détermination. Le gouvernement est donc fermement décidé à prendre les mesures législatives nécessaires au renforcement des libertés et des droits syndicaux.
  15. 10. Les passages pertinents du programme du gouvernement, du 25 novembre 1991, se lisent conne suit:
  16. (La Constitution de la Turquie ...) instaurera toutes les conditions d'une démocratie fondée sur la participation ... et assurera le respect des droits de l'homme, des droits et libertés individuels et des droits syndicaux tels qu'ils sont reconnus dans les pays les plus avancés ...
  17. Les droits et libertés des individus et des organisations devront être en accord avec les idées les plus avancées de notre époque.
  18. Nous proposons que la Constitution soit élaborée de telle sorte qu'elle se fonde sur un large accord entre les organisations intéressées de notre pays, notre peuple et, par dessus tout, les partis politiques. Nous croyons fermement qu'"un large consensus" est la condition indispensable d'une constitution durable ...
  19. La Turquie se doit de créer un Etat social. Notre gouvernement devra prendre les mesures nécessaires pour mettre sur pied un "Etat de droit social" fondé sur l'adhésion aux conceptions aujourd'hui reconnues dans le monde quant aux fonctions de l'Etat, et sur la réalisation d'un développement rapide, équilibré et juste.
  20. Les droits syndicaux seront institutionnalisés conformément aux normes de l'OIT. Les relations entre employeurs et travailleurs seront portées à un niveau qui permettra d'améliorer la sécurité sociale et de renforcer la paix sociale en Turquie ...
  21. Une importance particulière sera accordée à la protection de la main-d'oeuvre et au maintien de la paix dans les relations entre employeurs et travailleurs ...
  22. Les réformes législatives nécessaires seront réalisées pour garantir les libertés et les droits syndicaux des fonctionnaires. A cet effet, les initiatives requises seront prises dans le domaine constitutionnel.
  23. 11. Le gouvernement déclare que, en conséquence, il a d'ores et déjà entamé, en étroite coopération avec les organisations d'employeurs et de travailleurs, la procédure de ratification de la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, et de la convention no 151 sur les relations de travail dans la fonction publique. Le gouvernement est convaincu que la ratification de ces conventions et la mise en conformité de la législation actuelle avec les normes de l'OIT non seulement amélioreront considérablement les relations professionnelles, mais priveront aussi de tout fondement certaines allégations qui semblent de nature plus politique que technique.
  24. 12. Le gouvernement signale aussi que des études ont été entreprises par le ministère de la Justice pour introduire des amendements visant à raccourcir la durée des procès ainsi qu'à réduire et à simplifier les procédures complexes du droit pénal et du Code de procédure pénale. En outre, le gouvernement a mis en place un nouveau ministère chargé des droits de l'homme afin d'améliorer la législation et les pratiques qui s'y rapportent, en fonction des normes et règles internationales.
  25. 13. A propos des biens et des avoirs de la DISK et de ses organisations affiliées, le Parti social démocrate populaire, un des membres de la coalition, avait, alors qu'il était dans l'opposition, déposé une requête devant la Cour constitutionnelle, demandant l'abrogation de l'article 9 transitoire de la loi no 3713 sur les mesures de lutte contre le terrorisme, qui stipule que les biens et les avoirs de la DISK et de ses organisations affiliées devaient être remis au Trésor. Cette affaire est actuellement en instance devant la Cour constitutionnelle. Par ailleurs, l'ordre du jour du Conseil des ministres prévoit l'examen de dispositions législatives visant à garantir la restitution des biens et des avoirs de la DISK et de ses organisations affiliées.
  26. 14. Enfin, le gouvernement considère que l'affaire de la marche des mineurs de Zonguldak à Ankara, le 6 janvier 1991, est close, les 201 personnes qui avaient été mises en état d'arrestation ayant été libérées le jour suivant et aucune charge n'ayant été retenue contre aucun des manifestants.
  27. 15. Le gouvernement, qui entend mettre la législation nationale en conformité avec les normes contenues dans les instruments internationaux, souhaite que les explications qui précèdent et l'évolution positive en cours soient considérées par le comité non seulement comme l'expression de sa bonne volonté, mais aussi comme la manifestation de la ferme détermination d'un gouvernement qui est entré en fonctions il y a neuf semaines seulement. Le gouvernement se fera un devoir d'informer le comité de l'évolution ultérieure conformément aux procédures en vigueur.
  28. C. Conclusions du comité
  29. 16. Le comité note avec intérêt la communication du gouvernement et ses déclarations d'intention relatives aux réformes à réaliser dans le domaine de la législation du travail et des relations professionnelles en Turquie. Il observe en particulier que le gouvernement s'est fermement engagé à amender les dispositions législatives et constitutionnelles qui ne sont pas conformes avec les principes de la liberté syndicale et à ratifier les conventions nos 87 et 151. Le comité espère vivement que ces intentions seront rapidement suivies de mesures concrètes et il veut croire que le gouvernement pourra annoncer leur adoption et leur mise en oeuvre dans un proche avenir. Le comité rappelle que les dispositions qui restreignent les droits syndicaux et contreviennent aux principes de la liberté syndicale concernent:
  30. - l'interdiction faite aux syndicats de toute activité politique;
  31. - l'interdiction de diverses formes de grèves;
  32. - l'interdiction de la grève aux enseignants;
  33. - le recours à l'arbitrage obligatoire pour faire cesser une grève au-delà des interruptions du travail dues à une grève qui risquerait de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la santé ou la sécurité des personnes, et des cas de crise nationale aiguë;
  34. - le déni du droit de négocier collectivement aux syndicats ne réunissant pas 50 pour cent des travailleurs d'une entreprise et 10 pour cent des travailleurs d'un secteur d'activité.
  35. Le comité rappelle également au gouvernement que les services consultatifs du Bureau international du Travail sont à sa disposition, s'il le souhaite. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation à cet égard.
  36. 17. A propos des événements liés à la marche des mineurs de Zonguldak à Ankara, le 6 janvier 1991, le comité prend note de la libération, le jour suivant, de toutes les personnes qui avaient été placées en état d'arrestation et du fait qu'aucune charge n'a été retenue contre quiconque. Le comité rappelle les principes qu'il avait soulignés à ce sujet (280e rapport, cas no 999 et autres, paragr. 34; Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, paragr. 154-168). Il souhaite qu'à l'avenir, et conformément aux principes posés par le programme gouvernemental, les travailleurs qui souhaitent organiser des manifestations, des réunions publiques ou des défilés pacifiques soient autorisés à le faire sans ingérence des autorités. Le comité considère que cet aspect du cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.
  37. 18. A propos des biens et des avoirs de la DISK et de ses organisations affiliées, le comité prend note qu'un recours est en instance devant la Cour constitutionnelle pour contester les dispositions de la loi no 3713 qui prévoient que ces biens et avoirs doivent être remis au Trésor. Le comité note en outre que les dispositions législatives visant à garantir la restitution desdits biens et avoirs sont actuellement à l'ordre du jour du Conseil des ministres. Le comité considère que cette évolution est encourageante et espère vivement que des mesures seront prises rapidement afin que la DISK puisse recouvrer dans un proche avenir les biens et avoirs qui lui ont été confisqués en contradiction avec les principes de la liberté syndicale. A cet égard, le comité invite le gouvernement à le tenir informé de l'évolution de la situation sur les plans judiciaire ou législatif.
  38. Recommandations du comité
  39. 19. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
  40. a) Prenant note avec intérêt des déclarations d'intention du gouvernement, et en particulier de son engagement à amender les dispositions constitutionnelles et législatives qui ne sont pas conformes aux principes de la liberté syndicale, le comité espère vivement que ces intentions seront rapidement suivies de mesures concrètes et que le gouvernement pourra annoncer leur adoption et leur mise en oeuvre dans un proche avenir. Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les services consultatifs du Bureau international du Travail sont à sa disposition, s'il le souhaite. Il invite le gouvernement à le tenir informé de l'évolution de la situation à cet égard.
  41. b) Prenant note des dispositions législatives à l'étude par le Conseil des ministres en ce qui concerne la restitution des biens et avoirs de la DISK, et des procédures juridiques engagées à ce sujet, le comité espère vivement que la DISK recouvrera rapidement les biens et avoirs qui lui ont été confisqués en contradiction avec les principes de la liberté syndicale. A cet égard, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution sur les plans judiciaire ou législatif.
  42. c) Le comité appelle l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer