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RECLAMATION (article 24) - PAYS-BAS - C118 - 2006 (Présentée: 2003 - Rapport: 2006)

Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TÜRK-IS)

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Rapport du comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération des syndicats d'ouvriers de Turquie (TURK-IS)en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant l'inexécution par les Pays-Bas de la convention (n° 118) sur l'égalité de traitement (sécurité sociale), 1962

Rapport du comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération des syndicats d'ouvriers de Turquie (TURK-IS)en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant l'inexécution par les Pays-Bas de la convention (n° 118) sur l'égalité de traitement (sécurité sociale), 1962

Décision

Décision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

I. Introduction

I. Introduction
  1. 1. Par une communication datée du 18 juin 2003, la Confédération des syndicats d'ouvriers de Turquie (TURK-IS), invoquant l'article 24 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, a présenté une réclamation alléguant que le gouvernement des Pays-Bas n'avait pas respecté les dispositions de la convention (n° 118) sur l'égalité de traitement (sécurité sociale), 1962.
  2. 2. Le 20 décembre 2004, le gouvernement des Pays-Bas a déposé l'instrument de dénonciation, par les Pays-Bas, de la convention n° 118, qui a été enregistré par le Bureau le même jour. Conformément à l'article 16 de la convention, cette dénonciation a pris effet le 20 décembre 2005, un an après la date de son enregistrement. Comme, à compter de cette date, les Pays-Bas ont cessé d'être partie à la convention, l'examen de la réclamation et les conclusions formulées par le comité portent sur la période antérieure au 20 décembre 2005, lorsque les Pays-Bas étaient encore liés par cet instrument.
  3. 3. La disposition de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail visant la présentation de réclamations est la suivante:
  4. Article 24
  5. Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  6. 4. La procédure à suivre lorsqu'une, réclamation est adressée, au Bureau est régie par le Règlement concernant la procédure pour l'examen de réclamations présentées en vertu-de l'article 24 et de l'article 25 de la Constitution de l'OIT (Note_1) Conformément à l'article 1 et à l'article 2, paragraphe 1, de ce Règlement, le Directeur général a communiqué la réclamation au gouvernement des Pays-Bas'et Fa transmise au. bureau du Conseil d'administration. A sa 288e session (novembre 2003), le Conseil d'administration, sur recommandation de son bureau (Note_2), a décidé que la réclamation était recevable et, à sa session suivante en mars 2004, il a désigné un comité chargé de l'examiner, dont les membres étaient M.Michel Thierry (membre gouvernemental, France), président, Mme Lucia Sasso-Mazzufferi (membre employeur, Italie) et M. Simon Steyne (membre travailleur, Royaume-Uni). A sa 296e session (juin 2006), il a désigné Mme Lidija Horyatic (membre employeur, Croatie) pourremplacer Mme Lucia Sasso-Mazzufferi, qui n'est plus membre du Conseil d'administration.
  7. 5. Le comité a tenu sa première réunion le 23 mars 2004. Conformément à l'article 4, paragraphe 1, du Règlement, il a invité le gouvernement à envoyer ses observations au sujet de la réclamation avant le 31 mai 2004. Il a également invité l'organisation plaignante à fournir d'éventuelles informations complémentaires au plus tard à la même date.
  8. 6. Des informations complémentaires émanant de TURK-IS ont été fournies par télécopie le 24 mai 2004 et communiquées par le Bureau au gouvernement des Pays-Bas. Par une lettre datée du 11 juin 2004, le gouvernement a communiqué ses observations au sujet de la réclamation.
  9. 7. Le comité a tenu sa dernière réunion à Genève, le 9 novembre 2006, et adopté son rapport. Il est conscient de la technicité et de la complexité du sujet traité, qui suppose une connaissance approfondie du droit international de la sécurité sociale. Certains passages ont été mis en évidence pour faciliter la compréhension et la consultation du rapport. En outre, le comité a demandé au Bureau de résumer les principales questions posées et ses conclusions dans un langage simple, dépourvu de jargon juridique. Ce résumé figure en annexe.

II. Examen de la réclamation

II. Examen de la réclamation
  • Allégations formulées par la Confédération des syndicats d'ouvriers de Turquie (TÙRK-IS)
    1. 8. TURK-IS fait référence à la situation des travailleurs, turcs qui ont travaillé aux Pays-Bas et ont acquis le droit à une prestation d'invalidité permanente (WAO) et à une prestation complémentaire (TW). Selon TURK-IS, la prestation.complémentaire n'est pas une forme d'assistance sociale versée à la personne invalide indépendamment de son droit à la WAO, mais un élément complémentaire qui fait partie intégrante de la prestation d'invalidité permanente. Les travailleurs concernés ont reçu la WAO et la prestation complémentaire pendant des années. Toutefois, depuis le 1er janvier 2000, en vertu d'une modification de la législation néerlandaise, il a été mis fin au versement de la prestation complémentaire aux personnes résidant en dehors du territoire néerlandais, sous réserve d'une période transitoire de trois ans. Se référant à l'article 3, paragraphe 1, de la convention, TURK-IS allègue que la cessation du paiement de la prestation complémentaire à l'étranger entraîne une discrimination à l'encontre des travailleurs d'autres, nationalités qui-résident dans d'autres pays et constitue une violation de la convention n° 118 de l'OIT. A cet égard, la confédération se réfère à des décisions des tribunaux néerlandais, dont la Cour d'appel centrale d'Utrecht, qui à conclu que la prestation complémentaire faisait partie intégrante de la WÀO et ne pouvait pas être considérée comme une prestation non contributive (Note_3) Toute restriction dé son versement aux bénéficiaires de la WAO résidant à l'extérieur des Pays-Bas est donc contraire à l'article 5, paragraphe 1, de la convention. TURK-IS en conclut que la pratique des Pays-Bas constitue une violation de la convention n° 118.
    2. 9. Dans les informations complémentaires fournies par télécopie le 24 mai 2004, TURK-IS indique que le refus de verser la prestation complémentaire a eu des conséquences négatives pour environ 2 500 bénéficiaires de la WAO résidant en Turquie, qui sont confrontés à des problèmes considérables en raison des conditions économiques difficiles et des taux d'inflation élevés'et qui ont besoin d'un revenu plus important pour maintenir leur niveau de vie. A cet égard, TURK-IS indique que le niveau de la prestation complémentaire est déterminé en fonction du niveau de vie minimum aux Pays-Bas où le PNB par tête est de 23 300 dollars E.-U. par habitant, tandis qu'en Turquie il est de 2 490 dollars E.-U.
    3. 10. Le comité note que les allégations susmentionnées sont fondées sur les dispositions de la loi néerlandaise du 27 mai 1999 sur les restrictions à l'exportation des prestations (Wet Beperking Export Uitkeringen, ci-après BEU), de la loi du 6 novembre 1986 sur les prestations complémentaires (Toeslagenwet, ci-après TW) et de la loi sur l'assurance invalidité (WAO), ainsi que sur la décision n° 02/1308 TW et al, du 14 mars 2003, de la Cour d'appel centrale d'Utrecht {Centrale Raad van Beroep - CRvB), qui est la plus haute juridiction des Pays-Bas pour les questions de sécurité sociale. Le versement des prestations de la sécurité sociale néerlandaise à l'étranger est également régi par les dispositions des accords bilatéraux et multilatéraux pertinents en matière de sécurité sociale, dont la Convention européenne de sécurité sociale et la convention n° 118. En vertu de l'article 94 de la Constitution néerlandaise, il ne doit pas être tenu compte des dispositions nationales qui sont contraires aux dispositions de traités internationaux directement applicables. La CRvB a reconnu que la convention n° 118 renfermait des dispositions directement applicables au sens de cet article de la Constitution néerlandaise. On trouvera dans les sections du rapport ci-après les informations factuelles à la disposition du comité sur le versement des prestations de la sécurité sociale néerlandaise à l'étranger.
  • La loi sur les restrictions à l'exportation des prestations (BEU)
    1. 11. Selon les informations fournies par le gouvernement, jusqu'au 1er janvier 2000, les bénéficiaires des prestations de la sécurité sociale néerlandaise, sans distinction;,de nationalité, pouvaient percevoir leurs prestations dans le monde entier. Au plan juridique, c'est le principe de la personnalité qui s'appliquait. En 1996, environ 250 000 prestations ont été versées en dehors dés Pays-Bas, parmi lesquelles plus de 130 000 l'ont été à l'intérieur de l'Union européenne (UE)/l'Espace économique européen (EEE).Le 1er janvier 2000, la BEU, telle que modifiée par la loi du 22 décembre 1999, est entrée en vigueur. Le principe de la1 territorialité s'est substitué au principe de la personnalité pour déterminer le droit d'une personne de percevoir des prestations de la sécurité sociale néerlandaise. Conformément à la BEU, une personne, quelle que soit sa nationalité, n'a aucun droit de percevoir des prestations de sécurité sociale si elle, ou la personne au nom de laquelle elle demande la prestation, n'a pas vécu aux Pays-Bas durant une période supérieure à trois mois.
    2. 12. Le gouvernement néerlandais indique que la BEU a été adoptée pour améliorer la procédure d'enquête concernant les prestations versées aux personnes qui vivent à l'étranger. La restriction à l'exportation des prestations ne s'applique pas si un traité comportant des arrangements contractuels visant à s'assurer qu'une personne a droit à une prestation a été conclu avec le pays concerné. Les personnes qui résident dans un pays qui n'est pas partie à un tel traité conclu avec les Pays-Bas ne sont pas admissibles au bénéfice de prestations néerlandaises. Les dispositions transitoires de la BEU prévoyaient un report de la restriction à l'exportation de trois ans (jusqu'au 31 décembre 2002) pour les personnes percevant une prestation et vivant en dehors des Pays-Bas au 1er janvier 2000. La période transitoire a été.prolongée d'une année jusqu'au 31 décembre 2003, compte tenu du fait que, le 1er janvier 2003, les Pays-Bas étaient encore en train de négocier des traités de surveillance avec 36 pays. Selon les informations fournies par le gouvernement dans son dernier rapport sur la convention n° 118, au 1er mai 2004, 39 traités de contrôle bilatéraux au total avaient été signés. Ils couvraient près de 99 pour cent du nombre total de bénéficiaires résidant à l'extérieur des Pays-Bas.
  • La loi sur les prestations complémentaires (TW)
    1. 13. La loi sur les prestations complémentaires (TW) est entrée en vigueur le Ier janvier 1987. Elle prévoit le versement d'un complément aux prestations accordées au titre des dispositifs assurance chômage, maladie et invalidité à concurrence du niveau du revenu minimum garanti aux Pays-Bas pour les requérants dont le revenu total (plus celui de leur partenaire) est inférieur à ce niveau. Le complément TW est soumis à conditions de ressources. L'ensemble du revenu du requérant et de son partenaire provenant de leur travail, y compris la plupart des prestations de sécurité sociale, est pris en compte pour fixer le montant de la prestation. Il n'est pas tenu compte des biens tels que le domicile privé et l'épargne. Aucune cotisation n'est perçue pour les compléments TW, qui sont. financés sur le budget de l'Etat.
    2. 14. La BEU a aussi amendé la TW par l'ajout d'un nouvel article 4 a). En vertu de l'alinéa 1 de l'article 4 a), les personnes qui ne vivent pas aux Pays-Bas ne sont pas admises au bénéfice du complément TW. En vertu de l'alinéa 3, le fait de ne pas vivre aux Pays-Bas est assimilé à la non-résidence dans le pays pour une période ininterrompue de plus de trois mois. Partant, les bénéficiaires qui ont choisi de vivre dans un pays étranger le 1er janvier 2000 ou après cette date ont perdu le droit de percevoir le complément TW. Cependant, l'article XI de la BEU énonce des règles transitoires relatives à ce droit pour les personnes qui étaient admises à bénéficier de ce complément le jour précédant l'entrée en vigueur de la BEU et qui ne vivaient pas aux Pays-Bas à cette date. La première année après l'entrée en vigueur de la BEU (2000), ces personnes devaient percevoir, le montant auquel elles auraient eu droit si elles vivaient aux Pays-Bas. La deuxième année (2001), il leur a été versé les deux tiers de ce.montant, et la troisième année (2002) un tiers. Au ler janvier 2003, tous les versements des prestations, TW. à l'étranger ont cessé.
    3. 15. La TW prévoit une interdiction totale.de l'exportation des compléments qui ne peut pas être abrogée par untraité bilatéral. Elle, diffère à cet égard, des prestations de: sécurité, sociale de base; qui'peuvent toujours être exportées, pour-autant que les Pays-Bas, aient conclu un traité avec le pays en question. Selon-le gouvernement, cette différence d'approche est due au caractère non contributif de la prestation TW et au fait qu'elle complète la prestation de sécurité sociale de base pour la relever jusqu'au niveau minimum d'assistance sociale pertinent aux Pays-Bas. Le complément n'est donc pas exportable de la même façon que l'assistance sociale. Le gouvernement souligne que l'interdiction prévue par la TW est appliquée quelle que soit la nationalité du bénéficiaire. Ainsi, les ressortissants néerlandais comme les ressortissants turcs perçoivent une prestation d'invalidité lorsqu'ils vivent en Turquie, mais pas le complément accordé au titre de la TW. Une fois qu'ils retournent aux Pays-Bas, ils sont à nouveau admissibles au bénéfice du complément TW.
  • Accords de sécurité sociale entre les Pays-Bas et la Turquie
    1. 16. Le 5 avril 1996, les Pays-Bas et la Turquie ont conclu un traité bilatéral dans le domaine de la sécurité sociale (Série des traités néerlandais, 1966, n° 155). En 2000, les Pays-Bas et la Turquie ont signé un traité bilatéral amendé en matière de sécurité sociale, ainsi qu'un accord complémentaire (Série des traités néerlandais, 2000, n° 25), prévoyant des dispositions d'application comme prévu par la BEU. Ces dispositions comprennent l'identification officielle du bénéficiaire par l'institution compétente du pays de résidence, la vérification des demandes et des versements, et les contrôles médicaux et administratifs requis par la législation néerlandaise pour les requérants résidant en Turquie. Le traité amendé n'est pas encore entré en vigueur.
    2. 17. Depuis 1977, la Convention européenne de sécurité sociale (CESS) signée le 14 décembre 1972, à laquelle les Pays-Bas et la Turquie sont parties, s'est largement substituée au traité bilatéral de 1966 (Note_4). Conformément à l'article 11, paragraphe 1, de cette convention, «les prestations en espèces d'invalidité, de vieillesse ou de survivants, les rentes d'accident du travail ou de maladie professionnelle et les allocations au décès, acquises au titre de la législation de l'une ou de plusieurs des parties contractantes ne peuvent subir aucune réduction, ni modification, ni suspension, ni suppression, ni confiscation du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire d'une partie contractante autre que celui où se trouve l'institution débitrice». Comme les Pays-Bas et,la Turquie, sont tous deux parties à la CESS, le gouvernement néerlandais a confirmé que, conformément à cette disposition de la CESS, toutes les prestations de la sécurité sociaie néerlandaise, y compris la prestation WAO, continuaient d'être accordées aux bénéficiaires vivant en Turquie.
    3. 18. S'agissant de la prestation TW, la situation est différente. Conformément à l'article 11, paragraphe 3, de la CESS, les dispositions de l'alinéa 1 dudit article ne s'appliquent pas aux prestations à caractère non contributif, dans la mesure où elles sont inscrites à l'annexe VI de la convention. De l'avis du gouvernement néerlandais, conformément à l'article 11, paragraphes, de la CESS, il est possible d'interdire l'exportation des prestations à caractère non contributif si elles sont dûment inscrites à l'annexe VI de la CESS. Le 26 février 2002, la prestation TW a été inscrite par le gouvernement à l'annexe VI de la CESS avec effet rétroactif au 1er janvier 2000. Cet amendement a été publié dans la Série des traités néerlandais du 18 octobre 2002, n° 185, et est entré en vigueur le 1er décembre 2002. Le fait d'avoir inscrit la prestation TW à l'annexe VI a libéré les Pays-Bas de l'obligation d'exporter cette-prestation en Turquie, qui leur incombait en vertu de la CESS.
  • Décision de la Cour d'appel centrale d'Utrecht
    1. 19. Dans sa décision du 14 mars 2003, la Cour d'appel centrale (CRvB) à conclu que l'application de la BEU aux'prestations de sécurité sociale versées au titre de la TW entraînait un manquement à l'obligation de verser le complément TW aux bénéficiaires de la prestation d'invalidité (WAO) résidant à l'étranger qui incombait aux Pays-Bas en vertu de l'article 5, paragraphe 1, de la convention n° 118. Cette décision était fondée sur les arguments ci-après.
    2. 20. La CRvB a considéré que les compléments prévus par la TW qui sont accordés pour compléter les prestations versées au titre de la WAO devaient être considérés comme une prestation d'invalidité au sens de l'article 2, paragraphe 1 d), de la convention n° 118 au motif que le terme «prestations» désignait toutes les prestations, y compris les compléments. La CRvB a par ailleurs décidé que le complément TW d'une prestation WAO ne devait pas être considéré comme une prestation à caractère non contributif au sens de l'article 2, paragraphe 6 a), de la convention n° 118 (Note_5), parce que le droit à un complément ne peut exister que si l'intéressé remplit les conditions requises pour bénéficier d'une prestation WAO, dont l'octroi est fondé sur l'activité professionnelle. Une éventuelle incertitude au sujet de la nature de la prestation TW découlant du fait que le droit à un tel complément n'est qu'indirectement subordonné au versement de cotisations et au travail ne saurait être interprétée au détriment des bénéficiaires, car les Pays-Bas n'ont ni éliminé ni réduit cette incertitude de la manière prévue à l'article 2, paragraphe 6, de la convention n° 118, en notifiant au BIT que les prestations au titre de la TW ont un caractère non contributif, ce qui a aussi empêché le BIT d'exercer un contrôle sur cette question.
    3. 21. La CRvB, estimant que le complément TW était une : prestation d'invalidité à caractère contributif, l'a examiné au regard non pas de l'article 5, paragraphe 2 (Note_6), mais de l'article 5, paragraphe 1, de la convention n°118. Elle a considéré que l'article 5, paragraphe 1, imposait aux parties à la convention une obligation stricte et inconditionnelle d'exporter les prestations, obligation qui ne pouvait être limitée, ni subordonnée à d'autres accords bilatéraux ou multilatéraux entre les parties. En conséquence, elle a conclu que l'élimination progressive du complément TW et sa suppression du fait de la résidence à l'extérieur des Pays-Bas enfreignaient l'article 5, paragraphe 1, de la convention n° 118 et que les Pays-Bas devaient donc exporter cette prestation en Turquie.
  • Notification faite par les Pays-Bas au titre de l'article 2, paragraphe 6, de la convention
    1. 22. Dans une note verbale datée du 22 mai 2003, le gouvernement des Pays-Bas a adressé au BIT une notification au titre de rarticle'2, paragraphe 6, de la convention n° 118 déclarant qu'il considérait, entre autres choses, que les prestations accordées en vertu de la TW du 6 novembre 1986, a compter du 1er janvier 2000, étaient des prestations du type (non contributif) mentionne au paragraphe 6 a) de l'article 2 de la convention, parce que l'octroi de ces prestations ne dépendait ni de la participation financière directe des personnes. protégées ou de leur employeur, ni d'une période de stage. Les prestations à caractère non contributif, selon le gouvernement, ne peuvent pas être exportées. Depuis l'entrée en vigueur de la BEU le 1er janvier 2000, une personne qui ne réside pas aux Pays-Bas n'est plus admissible au bénéfice d'un complément au titre de la TW.
    2. 23. La notification susmentionnée a été enregistrée par le Bureau le 23 mai 2003, date de la réception de la note verbale. Elle a été communiquée à tous les Membres de l'OIT et au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies aux fins d'enregistrement conformément à l'article 102 de la Charte des Nations Unies.
    3. 24. Dans son observation de 2003 (Note_7), la commission d'experts a examiné l'effet de la déclaration du gouvernement concernant le caractère non contributif de la prestation TW sur l'application de la convention. Tout en notant que le gouvernement néerlandais n'avait pas respecté le délai fixé par la convention pour présenter la notification, elle a considéré que cela n'invalidait pas les informations contenues dans la déclaration. Cependant, du fait que le délai n'avait pas été respecté, ce n'est qu'avec retard que la commission avait pu exercer son contrôle de l'application de la convention et que tous les Membres de l'OIT et les personnes protégées par la convention avaient été informés de la nature de la prestation TW. Comme la procédure de notification établie par les paragraphes 6 et 7 de l'article 2 n'envisage pas son application rétroactive, la commission d'experts a souligné que la notification faite par les Pays-Bas prenait effet aux fins de la convention à compter de la date de son enregistrement par le Bureau (le 23 mai 2003), et non pas rétroactivement à compter du 1er janvier 2000 comme l'alléguait le gouvernement.
    4. 25. En ce qui concerne l'allégation du gouvernement selon laquelle la notification du caractère non contributif des prestations spécifiées donnait aux Pays-Bas la possibilité de restreindre l'exportation de ces prestations en recourant aux dispositions facultatives de l'article 5, paragraphe 2, de la convention, la commission d'experts a souligné que le fait d'avoir fait une telle notification ne suffisait pas en soi à garantir l'applicabilité automatique, des dispositions facultatives de la convention à ces prestations, laquelle devait être établie par les organes de contrôle de l'OIT. La commission d'experts a réservé le droit d'examiner la notification du gouvernement au sujet du caractère non contributif des prestations en question et l'applicabilité des dispositions facultatives de la convention à ces prestations qui en découlait, une fois que tous les éléments pertinents de la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale auraient été mis à sa disposition. Il a ensuite été décidé qu'elle ne reprendrait l'examen de ce cas qu'une fois la procédure spéciale de réclamation épuisée.
  • Observations formulées par le gouvernement des Pays-Bas au sujet de la réclamation
    1. 26. Dans une lettre.datée du 11 juin 2004, le gouvernement a communiqué ses observations au sujet de la réclamation; Des informations additionnelles ont été fournies dans le rapport sur l'application de. la convention pour la période commençant au ler juin 2001, présenté'au BIT en septembre 2004.
    2. 27. Le gouvernement des Pays-Bas a indiqué qu' à son avis la promulgation de la BEU ne porte nullement atteinte à l'application du principe général énoncé dans la convention n° 118 concernant l'égalité de traitement en matière de'sécurité sociale. Sur la base de cette loi, aucune personne, qu'elle soit néerlandaise ou de n'importe quelle autre nationalité, n'a le droit de percevoir des prestations de sécurité sociale si elle, ou la personne au nom de laquelle elle demande la prestation, ne vit pas aux Pays-Bas. Cette restriction à l'exportation des prestations ne s'applique pas si un traité a été conclu avec le pays concerné.
    3. 28. S'agissant du caractère non exportable de la prestation TW, en réponse au jugement de la CRvB, le gouvernement a adressé une notification au BIT dans laquelle cette prestation est définie comme une prestation non contributive au sens de l'article 2, paragraphe 6 a), de la convention n° 118. De l'avis du gouvernement, cela signifie que c'est le paragraphe 2, et non le paragraphe 1, de l'article 5 de la convention qui est désormais applicable et, conformément audit paragraphe 2, il est possible d'attacher des conditions à l'exportation des prestations non contributives, telles que la conclusion d'autres accords à cette fin. Comme tel est le cas, il n'y a aucune obligation en vertu de la convention n° 118 d'exporter le complément TW. La notification du gouvernement des Pays-Bas au titre de l'article 2, paragraphe 6, de la convention doit être considérée en tenant compte de ces éléments. Cette notification a été publiée dans la Série des traités néerlandais, 2003, n° 73. Le gouvernement des Pays-Bas conclut donc que les Pays-Bas ne manquent pas à leur obligation de se conformer à la convention n° 118.
    4. 29. S'agissant du versement actuel du complément TW aux bénéficiaires vivant à l'étranger, dans environ 3 000 cas, les compléments ont été progressivement supprimés conformément aux dispositions transitoires de la BEU. Parmi ces cas, 1 400 concernent des personnes vivant en Turquie. Le montant des compléments accordés aux bénéficiaires vivant en Turquie est d'environ cinq millions d'euros. Conformément à la décision de la CRvB, l'organisme chargé de la mise en ÷uvre des régimes d'assurance des salariés (UWV) a continué dé verser les compléments TW qui avaient été progressivement supprimés ou abolis ou qui n'avaient pas été octroyés aux requérants vivant en Turquie, sur la période s'étendant jusqu'au 1er juillet 2003. Le |er juillet 2003, il a de nouveau été mis fin à l'exportation du complément TW vers la Turquie sur la base de la notification du caractèrenon contributif de ce complément faite au titre de la convention n° 118.

    Conclusions du comité

    Conclusions du comité
  • Relation entre les allégations et les dispositions de la convention
    1. 30. En vertu de l'article 2, paragraphe 2 f), du Règlement concernant la procédure applicable à l'examen des réclamations au titre des articles 24 et 25 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, la réclamation «doit indiquer sur quel point le Membre mis en cause n'aurait pas assuré dans les limites de sa juridiction, l'application effective de ladite convention». Selon ce qu'allègue la réclamation, les Pays-Bas enfreignent l'article 3, paragraphe 1, de la convention du fait de «l'établissement d'une discrimination contre des travailleurs de nationalités différentes résidant dans d'autres pays» et l'article 5, paragraphe 1, de la convention du fait de «la cessation du versement de la prestation complémentaire aux bénéficiaires de la WAO qui résident à l'extérieur des Pays-Bas».
    2. 31. L'article 3, paragraphe 1, dela convention disposé ce qui suit:
    3. 1. Tout Membre pour lequel la présente convention est en vigueur doit accorder, sur son territoire, aux ressortissants de tout autre Membre'pour, lequel ladite convention, est également en vigueur, l'égalité de traitement avec ses propres ressortissants au regard de sa législation, tant, en ce qui concerne l'assujettissement que le droit aux prestations, dans toute, branche de sécurité sociale pour laquelle il a accepté les obligations de là convention.
    4. L'article 5 de la convention dispose ce qui suit:
    5. 1. En plus des dispositions,de l'article 4, tout Membre qui a accepté les obligations de la présente convention, pour l'une ou plusieurs des branches de sécurité sociale dont il s'agit au présent paragraphe, doit assurer, à ses propres ressortissants et aux ressortissants de tout autre Membre ayant accepté les obligations de la présente convention pour une branche correspondante, en cas de résidence à l'étranger, le service des prestations d'invalidité, des prestations de vieillesse, des prestations de survivants et des allocations au décès, ainsi que le service des rentes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, sous réserve des mesures à prendre à cet effet, en tant que de besoin, conformément aux dispositions de l'article 8.
    6. 2. Toutefois, en cas de résidence à l'étranger, le service des prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants du type visé au paragraphe 6 a) de l'article 2 peut être subordonné à la participation des Membres intéressés au système de conservation des droits prévu à l'article 7.
    7. 3. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux prestations accordées au titre de régimes transitoires.
    8. 32. Tandis que l'article 3, paragraphe 1, établit le principe général d'égalité de traitement en matière de sécurité sociale entre les non-nationaux et les nationaux sur le territoire du Membre, l'article 5, paragraphe 1, de la convention établit une obligation additionnelle - accorder certaines prestations de sécurité sociale aux bénéficiaires résidant à l'étranger - qui va au-delà des limites strictes de l'égalité de traitement. Comme ces dispositions établissent deux obligations distinctes, bien que complémentaires, le fait qu'un Membre manque à l'obligation d'exporter des prestations n'entraînerait pas nécessairement un manquement à l'obligation d'assurer l'égalité de traitement à l'intérieur du pays (Note_8).
    9. 33. Le comité souligne que l'article 3, paragraphe 1, prescrit l'égalité de traitement, sur.le territoire d'un Etat, tandis que la réclamation allègue l'existence d'une discrimination . visant les travailleurs résidant dans d'autres pays. Dans le cadre juridique de la convention n° 118, il y a discrimination uniquement en cas de traitement inégal des non-nationaux par rapport aux nationaux dii Membre concerné en vertu de sa législation. Une condition de résidence sur le territoire de l'Etat imposée en ce qui concerne l'octroi de prestations ne. constituerait donc pas une discrimination si elle était appliquée également aux nationaux et aux non-nationaux. Conformément à la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale mentionnée dans la réclamation, les ressortissants étrangers qui cessent de vivre aux Pays-Bas ou qui recommencent à y vivre perdent ou regagnent le droit à bénéficier de la prestation TW dans les mêmes conditions que les ressortissants néerlandais. Dans son observation au sujet de la réclamation, le gouvernement des Pays-Bas indique que «la nationalité n'est pas un critère pour déterminer le droit aux prestations de sécurité sociale en vertu de la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale. (...) D'autre, part, l'interdiction à l'exportation énoncée dans la TW est appliquée quelle que soit, la nationalité du bénéficiaire. Ainsi, les ressortissants néerlandais comme les ressortissants, turcs perçoivent la prestation d'invalidité lorsqu'ils vivent en Turquie, mais pas le complément au titre de la. TW- Une fois qu'ils retournent aux Pays-Bas, ils ont dans les deux cas (de nouveau) droit au complément TW.» Comme elle est appliquée également aux nationaux et aux non-nationaux, cette législation est conforme à la définition de l'égalité de traitement juridique et n'établit pas de discrimination à l'encontre des travailleurs étrangers à cet égard. En ce qui concerne la référence aux «travailleurs d'autres nationalités», dont TURK-IS considère qu'ils sont affectés, il convient de ne pas perdre de vue que l'obligation d'accorder les prestations à l'étranger qui incombe aux Pays-Bas ne couvre que les nationaux des pays qui ont accepté les obligations de la convention en ce qui concerne la même branche de sécurité sociale, compte tenu du type de prestation en question et des conditions de réciprocité applicables dans chaque cas particulier. Ainsi, la mesure dans laquelle d'«autres nationalités» peuvent être affectées par ladite législation ne peut être évaluée que pour chaque pays pris individuellement et aucune généralisation n'est possible.
    10. 34. Compte tenu de ces considérations, le comité constate que la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale susmentionnée est conforme à l'article 3, paragraphe 1, de la convention. Il limitera donc son examen de la réclamation qui va suivre aux allégations qui impliquent que les Pays-Bas n'auraient pas respecté l'article 5, paragraphe 1, de la convention en raison de la cessation de l'octroi du complément TW aux ressortissants turcs qui perçoivent la prestation d'invalidité permanente néerlandaise (WAO) et qui résident actuellement en Turquie.
  • Relation entre les allégations et les branches de sécurité sociale visées par l'article 5 de la convention
    1. 35. L'article 5, paragraphe I, de la convention est applicable à quatre des neuf branches de sécurité sociale visées par la convention (prestations d'invalidité, prestations de vieillesse, prestations de survivants etcapital décès, et pensions d'accidents du travail et de maladies professionnelles) et repose sur la prescription selon laquelle il doit y avoir, réciprocité branche par branche entre les Membres concernés. Pour examiner la réclamation, il est donc nécessaire de déterminer à l'égard de quelle branche de sécurité sociale les Pays-Bas manquent, selon les allégations, aux obligations, de l'article 5, paragraphe 1, si le principe de réciprocité entre les Pays-Bas et la Turquie est observé ou non dans le cadre de cette branche, et si la prestation TW fait partie de cette branche.
    2. 36. Lorsqu'elle fait référence à l'article 5, paragraphe 1, de la convention, la réclamation ne précise pas explicitement la branche de sécurité sociale acceptée par les Pays-Bas à l'égard de laquelle il est manqué aux obligations de la convention. Selon la réclamation, la violation de l'article 5, paragraphe 1, découle du fait que la prestation TW n'est pas accordée, prestation dont TURK-IS considère qu'elle «fait partie intégrante de la pension d'invalidité (WAO, prestation d'invalidité permanente)». La réclamation fait d'autre part référence à la décision de la CRvB, qui a jugé que «les compléments au titre de la TW qui sont accordés pour compléter les prestations au titre de la loi sur l'assurance invalidité (WAO) doivent être considérés comme une prestation d'invalidité au sens de l'article 2, paragraphe 1 d), de la convention». Le comité note donc que la'réclamation allègue qu'il y a violation de l'article 5, paragraphe 1, de la convention en ce qui concerne la branche" des prestations d'invalidité qui a été acceptée tant par les Pays-Bas que par la Turquie et à l'égard de laquelle ces pays sont liés par le régime de réciprocité automatique pour l'octroi de prestations d'invalidité aux bénéficiaires résidant à l'étranger.
    3. 37. Le comité noté d'autre part que la prestation WAO du système de sécurité sociale néerlandais couvre l'invalidité permanente due à des causes générales ainsi qu'à dés causes liées à l'emploi, sans distinction entre les deux. La réclamation fait référence aux «travailleurs turcs'qui ont travaillé aux Pays-Bas et ont acquis le droit à une pension d'invalidité (la WAO, ou préstation d'invalidité permanente) en vertu dé la législation néerlandaise», ce qui laisse penser que, dans la majorité des cas, la prestation WAO a été acquise par les travailleurs turcs en raison d'accidents ou de maladies liés au travail survenus au cours de leur emploi aux Pays-Bas. Contrairement à l'invalidité résultant de causes générales, qui est couverte, par la branche des prestations d'invalidité, l'invalidité résultant d'accidents ou de maladies liés au travail est reconnue par la conventiori comme une éventualité distincte couverte par la branche de sécurité sociale des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles mentionnée à l'article 2, paragraphe 1 g), pour laquelle les Pays-Bas et la Turquie ont aussi accepté les obligations de la convention. La WAO est mentionnée par le gouvernement comme étant la législation en vigueur en ce qui concerne la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles conformément à l'article 2, paragraphe 1 g), de la convention (Note_9). Le fait que la WAO n'établit pas de distinction entre l'invalidité liée à l'emploi et l'invalidité générale ne signifie pas que, aux fins de l'application de la convention, les prestations accordées au titre de la WAO devraient être considérées exclusivement dans le cadre de la branche des prestations d'invalidité mentionnée à l'article 2, paragraphe 1 d), de la convention. Au contraire, dans la mesure où les prestations WAO sont censées fournir une indemnisation pour les accidents ou les maladies liés à l'emploi, ces prestations, ainsi que le complément TW correspondant, devraient être examinées également dans le cadre de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles, comme il est indiqué à l'article 2, paragraphe 1 g), de la convention n° 118.
    4. 38. La distinction entre les prestations accordées dans le cadre de la branche des prestations d'invalidité et celles qui sont accordées dans le cadre de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles a une conséquence importante en ce qui concerne l'obligation de les exporter à l'étranger énoncée à l'article 5 de la convention, en fonction de leur caractère contributif bu non contributif, tel que défini à l'article 2, paragraphe 6. De fait, tandis que le paragraphe 1 de l'article 5 est applicable aux prestations accordées dans le cadre des deux branches, quel que soit leur caractère, le paragraphe 2 s'applique seulement aux prestations non contributives accordées dans le cadre, de la branche des prestations d'invalidité. Plus précisément, l'article 5 établit une obligation inconditionnelle d'exporter les pensions d'invalidité résultant de causes liéès à l'emploi, y compris tous compléments ou suppléments, qu'ils aient un caractère contributif ou non. Il établit aussi cette obligation en ce qui concerne les prestations d'invalidité résultant de causes générales, y compris tous compléments ou suppléments de caractère contributif. En revanche, l'exportation des prestations d'invalidité résultant de causes générales, y compris tous compléments ou suppléments qui ont un caractère non contributif, telles que définies à l'article 2, paragraphe 6) a), de la convention, peut être assujettie à certaines conditions au titre du paragraphe 2 de l'article 5. En effet, abstraction faite pour le moment de toute autre considération, l'application de ces dispositions de la convention à la prestation WAO et au complément TW correspondant entraînerait les situations hypothétiques suivantes. A supposer que, comme l'allègue le gouvernement, la prestation TW soit un complément non contributif à la pension WAO contributive, l'octroi de la prestation WAO en raison dé causes liées à l'emploi ainsi que du complément TW de la prestation WAO, en cas de résidence à 1'étranger, doit être assuré au titre de l'article 5, paragraphe 1, de la convention, sans aucune restriction et sans tenir compte du caractère non contributif du complément TW. L'octroi de cette prestation à l'étranger ne peut donc pas être subordonné à la participation des Membres concernés, à des dispositifs de conservation des droits conformément au paragraphe 2 de l'article 5. En cas d'invalidité résultant de causes générales, la prestation WAO, qui est contributive, doit aussi être exportée sans conditions conformément à l'article 5, paragraphe 1, de la convention, tandis que l'exportation du complément TW non contributif correspondant peut être assujettie à la condition prévue à l'article 5, paragraphe 2.
    5. 39. A ce stade, il apparaîtrait donc que les Pays-Bas enfreindraient l'article 5, paragraphe 1, de la convention dans tous les cas où ils ont mis fin à l'exportation du complément TW en faveur des bénéficiaires turcs de la prestation WAO accordée pour indemniser un accident ou une maladie liés à l'emploi. Cette conclusion ne dépend pas de la détermination du caractère - contributif ou non contributif- de la prestation TW et ne pourrait être infirmée que s'il était constaté que la prestation ne relève pas de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles, telle que définie par la convention, en particulier relativement à l'application de l'article 5.
    6. 40. En ce qui concerne la cessation de l'exportation du complément TW en faveur des bénéficiaires turcs de la prestation WAO accordée pour indemniser une invalidité à caractère général, les Pays-Bas enfreindraient l'article 5, paragraphe 1, de la convention uniquement si les dispositions facultatives de l'article 5, paragraphe 2, étaient inapplicables dans ce cas. Les raisons d'une telle situation pourraient être soit le fait que la prestation TW n'est pas reconnue comme étant à caractère non contributif, soit le fait que les Pays- Bas ne satisferaient pas à leur obligation de participer à des dispositifs de conservation des droits en ce qui concerne les prestations non contributives. D'autre part, la cessation de l'exportation du complément TW de la prestation d'invalidité générale WAO ne serait pas contraire aux dispositions de l'article 5 s'il était constaté que la prestation TW ne relève pas de la branche des prestations d'invalidité au sens de la convention, en'particulier relativement à l'application de l'article 5. Pour confirmer ou infirmer ces conclusions, il faut tout d'abord déterminer si et dans quelle mesure la prestation TW relève de la convention et des branches de sécurité, sociale respectives visées par la convention.
  • La prestation TW relève-t-elle des branches de sécurité sociale visées par la convention?
    1. 41. En réponse à la réclamation, le gouvernement des Pays-Bas indique que la TW «prévoit un complément à certaines prestations d'assurance sociale (chômage, maladie, invalidité)» sans désigner telle ou telle branche en particulier et fait valoir qu'«il n'y a aucune obligation d'exporter le complément TW au titre de la convention n° 118» dans le cadre de l'une quelconque de ces branches. Le gouvernement a adopté la même position dans sa notification concernant le caractère de la prestation TW au titre de l'article 2, paragraphe 6, de la convention, qui exige qu'un Membre précise la «branche (...) de sécurité sociale (pour laquelle il existe une législation prévoyant des prestations du type indiqué dans les alinéas a) et b))» dudit paragraphe. la notofocation présentée par les Pays-Bas ne précisait pas de branche de sécurité sociale particulière pour laquelle il existe une législation prévoyant la prestation TW complémentaire et indiquait que la TW constituait un instrument législatif distinct prévoyant des compléments dans le cadré non pas d'une, mais de trois branches de sécurité sociale complètement différentes.
    2. 42. Le comité note que le gouvernement ne traité pas la prestation TW branche par branche, mais qu'il souligne les caractéristiques du dispositif relatif à la prestation TW (législation distincte, couverture plus étendue, éventualité couverte différente, critères d'admissibilité différents, condition de revenu, financement par l'impôt), qui le distinguent des prestations d'assurance accordées dans le cadré des branches en question. Le comité note en particulier que la TW constitue un instrument législatif distinct qui ne relève pas de telle où telle branche particulière du système de sécurité sociale néerlandais, mais établit un dispositif de prestations autonome en sus dès régimes d'assurance nationaux existants, (loi générale sur les pensions de vieillesse (AOW), loi générale sur les membres de la famille survivants (ANW), loi générale sur les frais médicaux exceptionnels (AWBZ) et des régimes d'assurance des salariés (WAO), loi sur l'assurance santé (FW), loi sur les prestations de chômage (WW)j. Selon le document intitulé «Une brève enquête de sécurité sociale aux Pays-Bas, Résumé semestriel, janvier 2004» (p. 2), publié par le ministère des Affaires sociales et de l'Emploi, le dispositif relatif à la prestation TW fait partie du système de dispositions sociales qui visent à garantir un revenu familial minimum à tous les résidents: «Outre les régimes d'assurance nationaux, il existe deux dispositions sociales qui complètent les revenus (familiaux), pour les porter au niveau du revenu minimum garanti, en fonction de la situation des ménages en question. Les dispositions sociales exposées dans cette brochure sont la loi sur les prestations complémentaires (TW), la Wajong (loi sur l'aide en cas d'invalidité pour les jeunes handicapés), la loi sur les dispositions en matière de revenu pour les personnes âgées au chômage et partiellement invalides (IOAW), la loi sur les dispositions en matière de revenu pour les personnes âgées qui avaient précédemment le statut de travailleur indépendant et qui sont partiellement invalides (IOAZ), et la loi sur l'assistance nationale (ABW).» Dans son observation au sujet de la réclamation, le gouvernement souligne aussi «le fait que la TW prévoit un complément en sus de la prestation d'assurance sociale correspondante, à concurrence de l'aide sociale minimum pertinente aux Pays-Bas». Comme elle couvre tous les régimes existants d'assurance des salariés du système de sécurité sociale des Pays-Bas, la TW ne vise pas les risques spécifiques couverts par les branches respectives, mais établit un mécanisme garantissant l'application dans ces branches du revenu minimum universel aux Pays-Bas. De ce point de vue, le dispositif établi par la TW n'entre pas dans le champ d'application de la convention, car il couvre une éventualité - un revenu inférieur au minimum national garanti - qui n'est pas envisagée par les branches de sécurité sociale traditionnelles auxquelles la convention s'applique en vertu de son article 2, paragraphe 1.
    3. 43. En raison de son champ d'application beaucoup plus large, qui comprend.-de multiples branches, et de l'éventualité distincte couverte, on ne saurait guère dire que le dispositif relatif à la prestation TW correspond à la notion traditionnelle de «branche de sécurité sociale», telle qu'elle est conçue dans les normes de l'OIT en matière de sécurité sociale, y compris la convention n° 118. Toutefois, faute d'une définition de l'expression «branches de sécurité sociale» dans la convention elle-même, on peut se poser la question de savoir si, aux fins de l'application générale du principe d'égalité de traitement en matière de sécurité sociale, le complément TW pourrait encore être considéré branche par branche dans le cadre législatif de chacune des branches de sécurité sociale pour lesquelles il complète les prestations. A cet égard, pour examiner les allégations de non-respect de l'article 5, paragraphe 1, de la convention, le comité doit examiner la question de savoir si le complément TW entre dans le champ d'application de la branche des prestations d'invalidité et de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
    4. 44. Comme indiqué par la commission d'experts dans son étude d'ensemble, la convention n° 118 a été conçue pour couvrir les mêmes branches de sécurité- sociale que celles qui sont couvertes par la convention n° 102 afin de garantir la cohérence de l'application des normes de l'OIT en matière de sécurité sociale. La question suivante s'est donc posée: «Le contenu de ces branches devrait-il être déterminé par référence à une norme internationale uniforme ou le soin de déterminer ce contenu deyrait-il être laissé à chaque pays? Lès travaux préparatoires paraissent indiquer que la Conférence n'entendait pas laisser à chaque Etat, qui ratifierait la convention la liberté de déterminer le contenu dés branches pour lesquelles il l'aurait ratifiée mais qu'elle semblait plutôt considérer que la gamme des prestations couvertes par chacune de ces branches devait correspondre à celle qui était énoncée dans des instruments, connexes établissant les normes de protection relatives à chacune de ces branches. Ainsi, par exemple, pour déterminer les prestations que, l'on doit considérer comme faisant partie de la branche «soins médicaux», il conviendrait de se référer aux dispositions pertinentes de la convention (n° 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952 (Note_10).» Dans le même ordre d'idée, il serait approprié de se référer aux dispositions pertinentes de la convention n° 102 pour déterminer les prestations qui devraient être considérées comme relevant de la branche des prestations d'invalidité ou de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles au sens de l'article 2, paragraphe 1 d) ou g), de la convention n° 118.
    5. 45. Du point de vue de la convention n° 102, la prestation TW ne relèverait pas de la branche «prestations d'invalidité» parce que le but du dispositif TW, qui est de garantir le revenu minimum, ne correspond pas à l'éventualité de l'«inaptitude à exercer une activité professionnelle» couverte par la prestation d'invalidité (art. 54). On pourrait en dire autant de l'éventualité de la perte permanente de la capacité de gain ou de la diminution correspondante de l'intégrité physique dues à un accident du travail ou à une maladie professionnelle prescrite, telle qu'elle est couverte par la prestation en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles (art. 32). Une autre raison est que la prestation TW est modulée en fonction des ressources. La caractéristique qui distingue les normes de l'OIT concernant les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles (Partie VI de la convention n° 102 et convention n° 121) est qu'elles ne reconnaissent pas que les prestations modulées en fonction des ressources constituent une forme appropriée de protection contre le risque d'invalidité permanente due à un accident du travail ou une maladie professionnelle. Dans le cas de la branche des prestations d'invalidité, les prestations modulées en fonction des ressources ne peuvent être prises en considération que lorsque le dispositif couvre tous les résidents dont les ressources pendant l'éventualité n'excèdent pas des limites prescrites (article 55 c) de la convention n° 102 et article 9, paragraphe 1 c), de la convention n° 128), mais il n'en est pas tenu compte dans le cas des dispositifs couvrant les salariés. Aux Pays-Bas, le complément TW n'est versé qu'aux personnes qui sont admissibles au bénéfice de la prestation WAO, qui couvre les. salariés mais pas les résidents. En conséquence, le complément TW n'est pas pris en compte par la commission d'experts aux fins d'évaluer l'application par les Pays-Bas de la Partie II (Prestations d'invalidité) de la convention n°128 ou de la Partie IX (Prestations d'invalidité) du Code européen de sécurité sociale, ,qui correspond à la Partie IX (Prestations d'invalidité) de la convention n° 102. Comme,le complément TW n'est pas reconnu comme constituant la forme appropriée de protection dans le cadre des conventions de l'OIT énonçant les prescriptions de fond que doivent respecter les prestations d'invalidité et les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, le comité ne voit pas de raisons obligeant à le reconnaître comme tel au titre de la convention n° 118, surtout en l'absence de toute définition de l'expression «branches de sécurité sociale» dans cet instrument. Le comité conclut donc que les prestations accordées ail titre de la TW ne relèvent pas de la branche des prestations d'invalidité et de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles auxquelles la convention n° 118 s'applique.
  • Application de l'article 5 de la convention
    1. 46. S'il peut sembler approprié de se référer aux dispositions des conventions pertinentes en matière de sécurité sociale pour déterminer le contenu des branchés de sécurité sociale mentionnées dans la convention n° 118, il convient également de, ne pas oublier que, compte tenu de ses objectifs, qui sont de garantir l'égalité de traitement, l'octroi des prestations à l'étranger et la conservation des droits des migrants, la convention n° 118 vise à avoir une portée très large. Cette approche se reflète dans la définition particulièrement large du terme «prestations (Note_11)>> et la définition non moins large du terme «législation» prévoyant de telles prestations incluses dans l'article 1 a) et b) de la convention. Prises ensemble, ces définitions permettent d'appliquer la convention à l'éventail de prestations le plus large dans le cadre juridique des systèmes de sécurité sociale nationaux. De ce point de vue, on peut se demanderai, compte tenu de la spécificité du système de sécurité sociale néerlandais, il serait possible de considérer la prestation TW comme faisant partie de la branche des prestations d'invalidité, ne serait-ce qu'aux fins de la conservation des droits et de l'octroi des prestations à l'étranger. Si la réponse à cette question doit être laissée à la libre appréciation des autorités nationales compétentes, une telle interprétation extensive tenant compte du fait que le système de sécurité sociale néerlandais incorpore la prestation TW dans ses diverses branches ne serait pas contraire aux objectifs généraux et à l'esprit de la convention (Note_12). C'est une interprétation extensive de ce type que la Cour d'appel centrale a adoptée pour évaluer l'application de l'article 5 de la convention dans le contexte du système de sécurité sociale néerlandais, lorsqu'elle a décidé que le complément TW de la prestation WAO devait être considéré comme une prestation d'invalidité au sens de la convention aux fins de déterminer s'il devrait être payable à l'étranger. Comparant cette décision avec l'interprétation plus restrictive du contenu de la branche des prestations d'invalidité de la convention donnée par le comité au paragraphe 45 ci-dessus, il convient de garder à l'esprit qu'il appartient essentiellement à l'Etat Membre concerné de juger si sa législation et sa pratique nationales sont ou peuvent être ou non compatibles avec les dispositions de la convention internationale du travail en question, sous réserve des procédures de contrôle de l'OIT. Les conventions de l'OIT sont censées prescrire des normes minimales et devraient être interprétées comme telles par les organes de contrôle de l'OIT, y compris le présent comité. Néanmoins, les Etats Membres peuvent, en s'appuyant sur les dispositions qu'elles contiennent, accorder des conditions plus favorables aux travailleurs concernés. Cependant, une fois adoptées, les dispositions plus favorables ne peuvent être abrogées pour la seule raison qu'elles sont plus protectrices que la convention en question (Note_13). Dans, cet esprit, le comité considère que les termes et les objectifs généraux de la convention n° 118 laissent aux autorités nationales compétentes, un pouvoir d'appréciation suffisant pour étendre son champ d'application à des prestations de sécurité sociale particulières, telles que le complément TW, qui font partie de leur système de sécurité sociale national et des branches qui le composent. En revanche, le comité ne jouit pas de la même latitude pour tenir compte, des caractéristiques spécifiques des systèmes de sécurité sociale nationaux, car il est tenu d'appliquer les dispositions de, la convention de la même manière à tous ces systèmes de façon à garantir la cohérence nécessaire de l'application des conventions de l'OIT en matière de sécurité sociale. En raison de cette différence d'approche, le comité considère, qu'il est nécessaire d'examiner l'application de l'article 5 par les Pays-Bas également à la lumière, de la décision, de la CRvB.
    2. 47. L'organisation plaignante considère que le complément TW fait partie intégrante de la prestation d'invalidité, soulignant que les travailleurs turcs recevaient la prestation WAO ainsi que le complément TW «depuis des années» et qu'ils sont confrontés à des difficultés considérables du fait de sa cessation. Elle souligne le côté social et humain du problème auquel sont confrontés les travailleurs migrants qui ont considéré le complément TW comme un droit acquis dans la branche néerlandaise des prestations d'invalidité, dont la conservation est l'un des principaux objectifs de la convention. De ce point-de vue, la méthode de conservation des droits qui est applicable - soit par l'exportation directe de la prestation, soit par la conclusion d'accords multilatéraux ou bilatéraux - dépend du point de savoir si la prestation TW est considérée comme une prestation contributive ou non contributive. L'organisation plaignante considère que la prestation TW est directement exportable dans la mesure où elle fait partie de la prestation WAO contributive. La CRvB a fait observer que toute incertitude découlant du fait que le caractère non contributif de la prestation TW n'a pas été dûment notifié par les Pays-Bas conformément à l'article 2, paragraphe 6, de la convention ne saurait être interprétée au détriment des bénéficiaires résidant à l'étranger, qui devraient donc continuer de percevoir le complément TW directement dans leur pays de résidence. En revanche, le gouvernement néerlandais, ayant adressé une notification au titre de la convention concernant le caractère non contributif de la prestation TW, fait valoir que, conformément à l'article 5, paragraphe 2, la deuxième méthode est applicable et qu'il est par conséquent possible de subordonner l'exportation de la prestation TW vers la Turquie à la conclusion d'un accord bilatéral à cette fin. Selon le gouvernement, la possibilité d'assujettir l'exportation des prestations non contributives à certaines conditions, comme la conclusion d'un accord bilatéral, offerte par l'article 5, paragraphe 2, de la convention, libère entièrement les Pays-Bas de l'obligation d'exporter la prestation TW conformément aux-dispositions de la convention. Enfin, dans sa notification au titre de l'article 2, paragraphe 6, de la convention, le gouvernement a simplement déclaré que les prestations non contributives ne pouvaient pas être exportées.
    3. 48. Le comité souhaite souligner que rien dans le texte de la convention elle-même ni dans les travaux préparatoires ne vient à l'appui de l'opinion selon laquelle les prestations. non contributives ne peuvent pas être exportées. Au contraire, sur les trois types de.prestations mentionnés dans la convention - contributives, non contributives et prestations, accordées au titre de régimes transitoires -, seules ces dernières sont expressément exclues par le paragraphe'3 de l'article 5; les autres types de prestations entrent dans le champ, d'application de l'article 5, qui a pour objet de garantir l'octroi de ces prestations à l'étranger. Si l'exportation des prestations non contributives peut être subordonnée à la conclusion d'autres accords bilatéraux ou multilatéraux à cette fin, comme indiqué à l'article 5, paragraphe 2, cette possibilité exceptionnelle ne libère pas un Membre de l'obligation d'exporter ces prestations établie par la convention. Comme le but de la convention est l'octroi de prestations de sécurité sociale à l'étranger, le Membre demeure assujetti à l'obligation de s'efforcer de bonne foi de conclure de tels accords bilatéraux ou multilatéraux en vue d'atteindre ce but également en ce qui concerne les prestations non contributives (Note_14). En revanche, cette obligation n'est pas absolue et, si les deux Membres ne peuvent pas parvenir à un accord, cela ne devrait pas être interprété comme un manquement à l'application de l'article 5, paragraphe 2.
    4. 49. Le comité rappelle à cet égard que la TW, telle que modifiée par la BEU,a imposé une interdiction totale à l'exportation des compléments TW, qui ne peut être abrogée par un traité bilatéral et que, conformément à cette législation, le gouvernement a déclaré que les prestations non contributives n'étaient pas exportables,-de même que l'aide sociale, et a par conséquent exclu la prestation TW des dispositions des accords multilatéraux en matière de sécurité sociale relatives à P exportation, tels que la CESS. Il relève, d'autre part, que le traité en matière de sécurité sociale conclu en 2000 entre les Pays-Bas et la Turquie n'aborde pas la question de la prestation TW et que le gouvernement néerlandais n'a exprimé aucune intention de régler la question de son exportation par des négociations bilatérales. Il apparaît donc que la législation et la politique néerlandaises actuelles font obstacle à la négociation et à la conclusion d'un quelconque accord bilatéral ou multilatéral prévoyant l'exportation des prestations non contributives néerlandaises vers d'autres Membres parties à la convention n° 118. De fait, en entreprenant de telles négociations, le gouvernement néerlandais violerait sa propre législation, qui prescrit une interdiction totale de l'exportation de la prestation TW. Cela étant, le comité souhaite souligner que le fait de recourir à la disposition facultative de l'article 5, paragraphe 2, de la convention, qui envisage l'exportation de prestations non contributives par la participation à des accords bilatéraux ou multilatéraux, sans manifester d'intention réelle de conclure de tels accords de bonne foi, serait contraire à la lettre et à l'esprit de cet article de la convention. Utiliser cette disposition facultative pour justifier le rejet total de l'obligation incombant au Membre d'exporter les prestations non contributives quelles que soient les conditions constituerait une utilisation abusive de l'article 5, paragraphe 2, de la convention et ne serait pas conforme au principe général de la mise en ÷uvre de bonne foi des obligations découlant des traités internationaux.
    5. 50. De ce point de vue, la prohibition totale et inconditionnelle du versement de la prestation TW à l'étranger imposée par la TW, modifiée par la BEU, serait incompatible avec le but de l'article 5 de la convention et fait obstacle à la possibilité pour les Pays-Bas d'invoquer les dispositions facultatives énoncées dans le paragraphe 2 de cet article, nonobstant la notification qu'ils ont faite au titre de l'article 2, paragraphe 6. Cela voudrait dire également que la décision du gouvernement néerlandais d'interrompre les versements à l'étranger du complément TW de la prestation WAO à compter du 1er juillet 2003, en dépit de la décision contraire, de la CRvB, ne peut pas être justifiée en se référant aux dispositions facultatives de l'article 5, paragraphe 2, de la convention (Note_15). Ainsi, dans 1a mesure où, dans le cadre du système de sécurité sociale néerlandais, la CRvB a jugé que la prestation TW faisait partie de la branche des prestations, d'invalidité aux fins de l'application de l'article 5 de la convention, les Pays-Bas demeurent liés par l'obligation de l'accorder aux bénéficiaires de la prestation WAO résidant en Turquie, conformément à l'article 5, paragraphe 1, de la convention.
    6. 51. Sans préjudice de la position de la GRvB, qui est libre d'interpréter les dispositions de la convention à la lumière du système de sécurité sociale néerlandais, le comité se considère lié par l'interprétation strictement juridique de la convention en harmonie avec les autres normes internationales en matière de sécurité sociale. Selon cette approche, qui garantit une application égale des dispositions de la convention aux systèmes de sécurité, sociale de tous les Etats Membres, le comité conclut, pour les raisons exposées aux paragraphes 42 et 45 de son rapport, que le dispositif relatif à la prestation TW dans son ensemble n'entre pas dans le champ d'application de la convention et que le complément TW de la prestation WAO ne relève ni de la branche des prestations d'invalidité, ni de la branche des prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles visées par l'article 5 de la convention. Le comité n 'estime donc pas que les Pays-Bas enfreignent l'article 5, paragraphe 1, de la convention n° 118 au motif qu'ils ont mis fin à l'octroi du complément TW aux bénéficiaires de la prestation WAO résidant en Turquie.
  • Résumé des conclusions du comité
    1. 52. La réclamation allègue que les Pays-Bas enfreignent l'article 3, paragraphe 1, et l'article 5, paragraphe 1, de la convention en raison de la cessation du versement du complément TW aux bénéficiaires de la prestation WAO résidant à l'extérieur des Pays-Bas, ce qui entraîne une discrimination à l'encontre des travailleurs de nationalités différentes résidant dans d'autres pays (paragr. 30).
    2. 53. Ayant examiné la législation néerlandaise en matière de sécurité sociale au regard de l'article 3, paragraphe 1, le comité constate qu'elle accorde l'égalité de traitement sur le territoire des Pays-Bas à toutes les personnes protégées, quelle que soit leur nationalité, en pleine conformité avec cette disposition de la convention (paragr. 34).
    3. 54. Le comité prend acte de la spécificité du système néerlandais de sécurité sociale, qui allie les branches traditionnelles de la sécurité sociale - protection contre des risques particuliers - et un régime universel - garantie d'un revenu familial minimum à tous les résidents, indépendamment du risque. Pour assurer que les prestations d'assurance sociale ne tombent pas' en deçà dû revenu minimum universel des Pays-Bas, le système est complété par différentes mesures sociales, comme la TW, qui comblent l'écart entre la prestation en question et le minimum garanti. La TW établit ce mécanisme pour toutes les branches du système néerlandais de sécurité sociale qui protègent les salariés contre les risques de maladie, de chômage et d'invalidité. Le comité estime que, de par sa raison d'être, sa structure et ses caractéristiques, la TW n'est pas assimilable aux branches traditionnelles de sécurité sociale (paragr. 42).
    4. 55. S'agissant de l'article 5, paragraphe 1, de la convention, l'analyse du dispositif relatif à la prestation TW amène le comité à conclure que le complément TW de la prestation WAO ne relève pas des branches de sécurité sociale (prestations d'invalidité et prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles) auxquelles l'article 5, paragraphe 1, s'applique (paragr. 45), tandis que le dispositif TW dans son ensemble, en raison de ses caractéristiques spécifiques, n'entre pas dans le champ d'application de la convention défini par l'article 2, paragraphe 1 (paragr.42). Les compléments TW n'entrant pas en ligne de compte aux fins d'application de la convention, le comité considère que les Pays-Bas n'enfreignent pas l'article 5, paragraphe 1, de la convention (paragr. 51).
    5. 56. Enfin, le comité rappelle que les Pays-Bas ont dénoncé la convention n° 118 à compter dû 20 décembre 2005. En conséquence, les conclusions formulées par le comité visent la période antérieure à cette date, lorsque la convention était encore en vigueur pour lés Pays- Bas.

    IV. Recommandations du comité

    IV. Recommandations du comité
    1. 57. Compte tenu des conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d'administration:
    2. a) d'approuver le présent rapport et en particulier les conclusions énoncées aux paragraphes 53 à 55 concernant l'application par les Pays-Bas des articles 3, paragraphe 1, et 5, paragraphe 1, de la convention (n° 118) sur l'égalité de traitement (sécurité sociale), 1962; et
    3. b) de déclarer close la procédure engagée relativement à cette réclamation.
    4. Genève, le 9 novembre 2006.
    5. Point appelant une décision: paragraphe 57.
    6. Note 1
    7. Adopté par le Conseil d'administration à sa 57e session (8 avril 1932) et modifié à sa 82e session (5 fév. l938)à sa 242e session (7 mars 1988) et à sa 291e session (18 nov. 2004)
    8. Note 2
    9. Document GB.288/18/2.
    10. Note 3
    11. «La distinction faite entre les 'prestations contributives' et les «prestations.non contributives» joue un rôle important dans l'application de la convention n° 118, ces dernières faisant l'objet de dispositions spéciales en relation avec les conditions de la ratification (art. 2, paragr. 6 a)), la condition de résidence à laquelle peut être subordonnée l'application du principe de l'égalité de traitement (art. 4, paragr. 2) et le versement de certaines prestations à l'étranger (art. 5, paragr. 2). Dans la pratique, cependant, il n'est pas toujours facile de déterminer si une prestation doit être considérée 'contributive' ou 'non contributive' (au sens du paragr. 6 a) de l'article 2 de la -convention). BIT: Egalité de traitement (sécurité sociale) Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III (Partie 1B), Conférence internationale du Travail, 63e session, Genève, 1977, paragr. 21, p. 6.
    12. Note 4
    13. En vertu de l'article 5, paragraphe 1, de la CESS, celle ci. se substitue, en ce qui concerne les personnes auxquelles elle s'applique, à toute convention de sécurité sociale liant deux ou plusieurs de ses parties contractantes.
    14. Note 5
    15. En vertu de l'article 2, paragraphe 6 a), de la convention, les prestations non contributives sont «des prestations autres que celles dont l'octroi dépend soit d'une participation financière directe des personnes protégées ou de leur employeur, soit d'une condition de stage professionnel».
    16. Note 6
    17. L'article 5, paragraphe 2, de la convention permet, en cas de résidence à l'étranger, desubordonner le service de certaines prestations non contributives à la signature d'accords bilatéraux ou multilatéraux entre les parties.
    18. Note 7
    19. BIT: Rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III (Partie 1A), Conférence internationale du Travail, 92e session, Genève, 2004, pp. 363 et 364.
    20. Note 8
    21. Pour mettre en évidence la différence entre l'obligation d'accorder des prestations sur un pied d'égalité à l'intérieur du pays et l'obligation de les verser à l'étranger, on peut souligner que l'égalité de traitement sans le versement de prestations à l'étranger serait parfaitement conforme, par exemple, à la convention (n° 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, qui, "tout en établissant l'égalité de traitement des résidents non nationaux (art. 68, paragr. 1) autorise la suspension du versement d'une prestation «aussi longtemps que l'intéressé ne se trouve pas sur le territoire du Membre» (art. 69 a)).
    22. Note 9
    23. La WAO est aussi la principale législation donnant effet à la Partie VI (Prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles) du Code européen de sécurité sociale, ainsi qu'à la convention (n° 121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, 1964, qui a remplacé les obligations antérieures des Pays Bas au titre de la Partie VI (Prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles) de la convention n°102.
    24. Note 10
    25. BIT: Egalite de traitement (sécurité sociale). Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III (Partie 4B), Conférence internationale du Travail, 63e session, Genève, 1977, paragr. 36, p. 9.
    26. Note 11
    27. Comme le confirment les travaux préparatoires de la convention, ce terme doit être pris dans son acception la plus large. Voir BIT: Egalité de traitement des nationaux et des non-nationaux en matière de sécurité sociale, rapport V(l), Conférence internationale du Travail, 46e session, Genève, 1962, p. 25.
    28. Note 12
    29. Soulignant l'objectif «profondément humain et social» de la convention qui est d'apporter un minimum de sécurité économique aux travailleurs migrants qui rentrent dans leur pays d'origine, la commission d'experts a insisté sur la nécessité de «garder à l'esprit ces objectifs simples et humains», et sur le fait que «les problèmes techniques, parfois extrêmement complexes, que pose la convention n° 118 ne doivent pas faire perdre de vue le caractère social de ses dispositions ni l'urgence des questions qu'elles recouvrent». Voir BIT: Egalité de traitement (sécurité sociale). Etude d'ensemble, op. cit., paragr. 134 et 136, p. 67.
    30. Note 13
    31. Le principe de la non-rétrogression est inscrit dans l'article 19 8) de la Constitution de l'OIT, qui est ainsi libellé: «En aucun cas l'adoption d'une convention ou d'une recommandation par la Conférence ou la ratifieation d'une convention par unMembre ne devront être considérées comme affectant toute loi, toute sentence, toute coutume ou tout accord qui assurent des conditions plus favorables aux travailleurs intéressés que celles prévues par la convention ou la recommandation.»
    32. Note 14
    33. A cet égard, la commission d'experts a attiré l'attention sur «la différence entre le régime applicable aux prestations 'non contributives' (au sens du paragraphe 6 a) de l'article 2), qui peut être subordonné à la participation à un système de conservation des droits et le régime applicable aux prestations mentionnées au paragraphe 1 de l'article 5 dont le service à l'étranger ne peut être subordonné à la conclusion d'un accord ou d'un instrument du type prévu à l'article 8. Cette différence de régime est importante dans la pratique spécialement lorsqu'il s'agit des perspectives de ratification de cette convention. Ainsi, le défaut de paiement à l'étranger des rentes d'invalidité, de vieillesse et de survivants que prévoit la loi de 1964 sur la sécurité sociale (dans sa teneur modifiée) de la Nouvelle-Zélande n'est pas contraire à l'article 5 de la convention, car il s'agit de prestations non contributives. Le seul engagement que prendrait ce pays s'il ratifiait la convention serait de s'efforcer, de bonne foi, de participer au système de conservation des droits prévu à l'article 7.» Voir BIT: Egalité de traitement (sécurité sociale). Etude d'ensemble, op. cit., note 5, p. 52.
    34. Note 15
    35. Cela concerne en particulier le complément TW de la prestation WAO accordée en cas de la prestation WAO accordée en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle, au titre de l'article 5, paragraphe 1, de la convention.
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