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RECLAMATION (article 24) - GUATEMALA - C144 - 2003

1. Unité d'action syndicale et populaire (UASP), 2. Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA)

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Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par le Guatemala de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, présentée par l'Unité d'action syndicale et populaire (UASP) et l'Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par le Guatemala de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, présentée par l'Unité d'action syndicale et populaire (UASP) et l'Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT

Decision

Decision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. I. Introduction
  2. 1. Dans des communications datées des 12 juillet et 14 août 2001, l'Unité d'action syndicale et populaire (UASP) et l'Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), invoquant l'article 24 de la Constitution de l'OIT, ont présenté une réclamation alléguant le non-respect par le gouvernement du Guatemala des dispositions de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976.
  3. 2. Les dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail concernant la soumission des réclamations sont les suivantes:
  4. Article 24
  5. Réclamations au sujet de l'application d'une convention
  6. Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause, et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  7. Article 25
  8. Possibilité de rendre la réclamation publique
  9. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  10. 3. Conformément aux dispositions de l'article 1 du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations, révisé par le Conseil d'administration à sa 212e session (mars 1980), le Directeur général a accusé réception de la réclamation et en a informé le gouvernement du Guatemala.
  11. 4. En application des dispositions de l'article 2, paragraphe 1, du Règlement visé, le Directeur général a transmis la réclamation au bureau du Conseil d'administration (282e session, novembre 2001), lequel, conformément au paragraphe 3 de l'article susmentionné, a informé le Conseil d'administration de la recevabilité de la réclamation. En vertu de l'article 2, paragraphe 2, du Règlement susmentionné, le bureau du Conseil d'administration a indiqué:
  12. a) que la réclamation a été adressée au Bureau international du Travail sous forme écrite;
  13. b) qu'elle émane de deux organisations professionnelles de travailleurs;
  14. c) qu'elle se réfère expressément à l'article 24 de la Constitution de l'OIT;
  15. d) qu'elle vise un Etat Membre de l'Organisation: le Guatemala;
  16. e) qu'elle porte sur une convention ratifiée par le Guatemala et qui demeure en vigueur dans ce pays (Note 1);
  17. f) que la réclamation indique les points à propos desquels le Guatemala n'aurait pas respecté les dispositions de la convention no 144, dans les limites de sa juridiction.
  18. 5. Le bureau du Conseil d'administration a fait observer que les conditions requises pour se prononcer sur la recevabilité de la réclamation étaient réunies. En outre, il a rappelé qu'au cours de sa 282e session le Conseil d'administration examinerait également d'autres questions se rapportant au Guatemala (Note 2). Par ailleurs, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations doit examiner le rapport sur l'application de la convention no 144 présenté par le gouvernement du Guatemala. Compte tenu de cela, le Conseil d'administration a décidé de déclarer la réclamation recevable et d'ajourner à sa session de mars 2002 la désignation d'un comité chargé de l'examiner.
  19. 6. A sa 283e session (mars 2002), le Conseil d'administration, sur la recommandation de son bureau, a désigné un comité chargé de l'examen de la réclamation, présidé par Mme Rovirosa Priego (Mexique, membre gouvernemental) et composé de M. De Regil (membre employeur) et de Mme Anderson (membre travailleur).
  20. 7. Conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphe 1, du Règlement, le comité a invité le gouvernement à soumettre une déclaration par écrit avant le 30 septembre 2002. De même, les deux organisations professionnelles de travailleurs ont été invitées à fournir au comité, si elles le souhaitent, des renseignements complémentaires dans le délai susmentionné.
  21. 8. Le comité a pris note des déclarations écrites du gouvernement du Guatemala en date du 10 décembre 2001 et 19 septembre 2002.
  22. 9. Après avoir tenu des consultations informelles à l'occasion de la 285e session (novembre 2002) du Conseil d'administration, le comité s'est réuni à Genève en mars 2003 et a adopté le présent rapport.
  23. II. Examen de la réclamation
  24. A. Allégations formulées par les organisations plaignantes
  25. 10. Dans leur communication, les organisations plaignantes ont rappelé que le Comité tripartite sur les questions internationales du travail, créé en 1995 par accord ministériel, se réunit périodiquement pour aborder des questions d'intérêt pour les travailleurs et les employeurs et qu'il avait formulé des recommandations quant à l'adoption de textes législatifs relatifs au monde du travail, lesquels ont été soumis au Congrès de la République, comme par exemple les réformes du Code du travail adoptées en 1998 pour donner suite aux accords de paix.
  26. 11. Les organisations plaignantes se sont dites très préoccupées par le fait que les autorités au pouvoir en janvier 2000 ont porté atteinte aux prérogatives du comité tripartite en lui interdisant d'examiner des questions qui légalement étaient de son ressort. Elles estiment tout particulièrement préoccupant que le ministère du Travail ait refusé de soumettre au comité tripartite le projet de Code de procédure du travail que l'on s'était efforcé de promouvoir au cours de l'année passée et, plus alarmant encore, qu'il ait omis de le saisir de réformes proposées par l'organe exécutif en 2001 pour aligner la législation nationale avec la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
  27. 12. Selon les organisations plaignantes, le ministère du Travail aurait motivé sa conduite en affirmant que, si pour la prise de décisions il faut que le comité tripartite parvienne à un consensus, cela équivaut dans la pratique à accorder un droit de veto à chacun des acteurs sociaux. Les organisations plaignantes ne partagent pas ce point de vue car, selon elles, le fait qu'il faille parvenir au consensus n'exempte en aucun cas le gouvernement de son obligation de consultation. En tout état de cause, s'il s'avérait impossible pour le comité tripartite de parvenir à un accord après avoir examiné un thème en profondeur, il va sans dire que le gouvernement devrait faire le nécessaire pour remplir ses obligations et, en l'occurrence, tenir compte du point de vue des travailleurs et des employeurs.
  28. 13. Les organisations plaignantes ont fait valoir à cet égard les propos formulés par le représentant des travailleurs du Guatemala au cours de la 87e session de la Conférence internationale du Travail (Genève, juin 1999), à savoir que «l'approche de l'OIT qui consiste à aborder les problèmes par le biais du dialogue social est tout à fait correcte, surtout parce qu'il s'agit d'une démarche volontaire, acceptée par tous les mandants, ce qui signifie que les Membres acceptent des obligations en pleine connaissance de cause et que cet engagement conscient doit être respecté sans aucune excuse ... l'OIT a un très grand avantage, comme le dit dans son rapport le Directeur général. En effet, elle peut réunir autour de sa table des gouvernements, des employeurs, des travailleurs. A notre avis, cela ne suffira pas sans une véritable volonté de parvenir à des compromis et de respecter les engagements. Par conséquent, toute la structure de l'OIT peut s'avérer insuffisante si les mandants ne se conduisent pas de façon responsable (Note 3).»
  29. 14. Les organisations plaignantes affirment que, par son attitude, le ministre du Travail menaçait de mettre en échec l'unique instance de dialogue qu'avait le secteur productif pour examiner des questions d'intérêt, exprimer ses points de vue et résoudre les différends, et rappellent qu'il a fallu plus de six ans pour concrétiser les efforts de promotion du dialogue social, lequel a fait la preuve de son sérieux et de son dynamisme. En persistant dans son attitude, le ministère du Travail violerait ses engagements à l'égard de l'Organisation et pourrait nuire de façon irrémédiable aux relations du secteur productif du Guatemala.
  30. 15. Les organisations plaignantes souhaitent mettre en avant que la violation répétée des dispositions de la convention no 144 par le gouvernement du Guatemala doit cesser et qu'il faut faire les efforts nécessaires pour remédier à cette situation et pour que le dialogue amorcé par le secteur productif puisse reprendre.
  31. B. Observations du gouvernement
  32. 16. Dans sa communication en date du 10 décembre 2001 (reçue après la déclaration de recevabilité mais avant la désignation du comité), le gouvernement a fait savoir que le Comité tripartite sur les questions internationales du travail avait inscrit à l'ordre du jour de la réunion du 2 mars 2000 l'examen de la réforme du Code du travail. Le gouvernement a fourni de nombreux documents, parmi lesquels l'ordre du jour et le compte rendu de la réunion du 2 mars 2000, ainsi que des coupures de presse relatant les faits.
  33. Consultations de l'année 2000 dans le cadre des réformes du Code du travail
  34. 17. Le gouvernement indique qu'il a présenté à l'organe législatif un projet de loi en rapport avec les réformes du Code du travail. L'organe législatif a sollicité l'avis des employeurs et des travailleurs. N'ayant pu parvenir à un accord bipartite, il a demandé au Comité tripartite sur les questions internationales du travail d'organiser de nouvelles discussions afin qu'employeurs, travailleurs et autorités relevant du ministère du Travail s'entendent à propos des réformes législatives. Une fois employeurs et travailleurs parvenus à un accord, l'organe exécutif a présenté à l'organe législatif les propositions de réformes législatives qui ont abouti à l'adoption par le Congrès de la République du décret législatif no 13-2001, lequel ne porte que sur huit des trente-sept articles du projet initial du fait des désaccords entre employeurs et travailleurs.
  35. 18. Le gouvernement fait savoir que les réformes apportées au Code du travail en vertu du décret du Congrès de la République du 25 avril 2001 (Note 4) (décret législatif no 13-2001) ne répondaient pas à toutes les exigences formulées par les organes de contrôle de l'OIT ni aux critères requis pour bénéficier des tarifs douaniers préférentiels généralisés appliqués par les Etats-Unis. Elles ne satisfont pas non plus aux critères requis dans le cadre de l'initiative du bassin des Caraïbes. Finalement, le Congrès de la République a été saisi d'un nouveau projet de loi qui a abouti à un décret en date du 14 mai 2001 (Note 5) (décret législatif no 18-2001).
  36. Consultations de l'année 2000 dans le cadre des réformes du Code de procédure du travail
  37. 19. Pour ce qui est des réformes au Code de procédure du travail, le gouvernement affirme qu'il a organisé les consultations voulues. Il transmet une copie des communications en date du 23 août 2000 envoyées aux représentants des organisations d'employeurs, de travailleurs et d'autres institutions intéressées (comme la Cour suprême du justice), dans lesquelles ces derniers sont invités à examiner le projet de nouveau Code de procédure du travail et à fournir une réponse pour le 22 septembre 2000. Dans une communication datée du 7 septembre 2000, l'Union des travailleurs du Guatemala (UGT) fait observer qu'avant d'examiner le projet de Code de procédure du travail il faudrait donner la priorité aux réformes du Code du travail. Le ministre du Travail et de la Prévision sociale a répondu à cinq organisations d'employeurs et de travailleurs, le 11 septembre 2000, qu'il importait de traiter la question des réformes du Code de procédure du travail et a repoussé de trente jours la date limite à laquelle les partenaires sociaux pouvaient faire part de leur opinion. Une réunion du Comité tripartite sur les questions internationales du travail a été convoquée pour le 28 novembre 2000 afin de connaître l'avis des membres du comité sur le projet de Code de procédure du travail, mais les informations examinées par le comité semblent indiquer que cette réunion n'a pas pu avoir lieu.
  38. 20. Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement nie ne pas avoir engagé des consultations. Il estime que, si les centrales syndicales ni d'ailleurs les représentants des employeurs ne font pas part de leur opinion, il ne peut pour autant s'abstenir d'accomplir sa tâche. Il rappelle que le règlement du comité tripartite, en son article 11, paragraphe 2, établit que «le comité ne peut être saisi d'une question que si son inscription à l'ordre du jour définitif, tel qu'adopté au début de la session, est approuvée à l'unanimité». L'on ne saurait par conséquent accuser le gouvernement d'avoir refusé de traiter certaines questions alors que le règlement du comité subordonne l'examen des questions, et donc le résultat final, au fait que leur choix doit être fait à l'unanimité.
  39. 21. Le gouvernement est favorable au fait d'aborder les problèmes par la voie du dialogue, mais il faut pour cela que les employeurs et les travailleurs parviennent à s'entendre et appliquent les accords qu'ils ont conclus dans le strict respect du droit du travail afin de promouvoir des conditions de travail décent, respectueuses de la dignité des travailleurs.
  40. 22. Le gouvernement estime qu'un traitement démocratique et tripartite des problèmes doit reposer sur une philosophie saine d'acceptation des différences et de concessions mutuelles. Il réaffirme que les consultations relatives à la convention no 144 ont été faites conformément aux règlements applicables.
  41. Travaux du Comité tripartite sur les questions internationales du travail en 2002
  42. 23. Dans une communication datée de septembre 2002, le gouvernement réaffirme son attachement au règlement des problèmes par la voie du dialogue, outil indispensable pour parvenir au consensus. Il rappelle en outre que les réformes du Code du travail sont déjà entrées en vigueur. Quant aux réformes du Code de procédure du travail, les consultations en la matière se poursuivent et le gouvernement apprécierait de connaître l'opinion des employeurs, des travailleurs et des organisations de la société civile avant de procéder à leur approbation.
  43. 24. En ce qui concerne les travaux du Comité tripartite sur les questions internationales du travail, le gouvernement communique copie de la nouvelle composition du comité, ainsi que de son ordre du jour pour 2002-03. Conformément à l'accord ministériel no 400-2002, du 29 août 2002, le comité tripartite est composé des personnes désignées par les organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives du pays.
  44. 25. Le compte rendu de la réunion du comité tripartite, tenue le 12 septembre 2002, communiqué par le gouvernement mentionne, notamment, les points suivants: questions liées aux réformes du droit du travail qui sont en cours, analyse des commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, cas examinés par le Comité de la liberté syndicale, réforme de certaines dispositions du Code pénal, questions relatives à l'application de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, soumission au Congrès de la République des conventions, recommandations et protocoles en vue de leur ratification ou approbation et propositions de modification du règlement du Comité tripartite sur les questions internationales du travail.
  45. C. Conclusions du comité
  46. 26. Le comité établit ses conclusions sur la base des observations des organisations plaignantes et des déclarations émanant du gouvernement, reflétées dans les paragraphes précédents. Il a également tenu compte des commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations faisant suite à l'examen des rapports gouvernementaux sur l'application de la convention no 144, ainsi que des renseignements se rapportant directement à la réclamation qui se trouvent dans les rapports du Comité de la liberté syndicale. Il a en outre jugé opportun de prendre en considération certaines activités de coopération technique effectuées par le Bureau, directement liées aux questions évoquées dans la réclamation.
  47. 27. Le comité rappelle que l'obligation fondamentale qui incombe aux Etats parties en vertu de l'article 2, paragraphe 1, de la convention no 144 est que chaque Etat «s'engage à mettre en uvre des procédures qui assurent des consultations efficaces entre les représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs». Comme l'indique la commission d'experts dans son étude d'ensemble de 2000 (Note 6), les consultations requises par la convention n'imposent pas la recherche d'un accord mais ont pour but d'éclairer la prise de décisions par l'autorité compétente. Pour que les consultations aient un sens, elles ne doivent pas se limiter à des démarches de pure forme mais retenir toute l'attention de l'autorité compétente. Si les autorités publiques doivent procéder à ces consultations de bonne foi, elles ne sont pas tenues de se conformer aux avis recueillis et elles conservent pleinement la responsabilité de la décision. En ce sens, il a été relevé dès la première phase des travaux préparatoires des instruments que c'était «un principe généralement admis» que «les résultats des consultations ne devaient pas être considérés comme ayant un caractère contraignant et que la décision devait être prise en dernier ressort par le gouvernement ou le législateur, selon le cas».
  48. 28. En outre, la convention dispose, à l'article 2, paragraphe 2, que «la nature et la forme des procédures» qui assurent des consultations efficaces ayant pour objet les activités de l'Organisation énumérées à l'article 5, paragraphe 1, seront déterminées dans chaque pays, conformément à la pratique nationale, après consultation des organisations représentatives. La recommandation (no 52) sur les consultations tripartites relatives aux activités de l'Organisation internationale du Travail, 1976, énumère au paragraphe 3 quelques exemples des formes que peuvent revêtir les procédures de consultation tripartite (institution d'une commission spécialement chargée des questions concernant les activités de l'OIT, constitution d'un certain nombre d'organismes dotés d'une responsabilité spéciale pour des matières déterminées, envoi de communications écrites lorsqu'elles sont acceptées comme appropriées et suffisantes par ceux qui participent aux procédures consultatives).
  49. 29. Le comité note que, depuis l'entrée en vigueur de la convention no 144, le gouvernement du Guatemala a institué le Comité tripartite sur les questions internationales du travail en vertu de l'accord ministériel no 93 du 13 décembre 1995, estimant qu'il «importait de garantir la participation effective des organisations d'employeurs et de travailleurs à l'élaboration de la législation du travail et au contrôle de son application, notamment en ce qui concerne les normes internationales du travail et l'examen des questions pouvant permettre de renforcer les relations professionnelles dans le pays».
  50. 30. Le comité accorde une importance particulière à la demande directe formulée en décembre 2001 par la commission d'experts à l'occasion de l'examen du rapport du gouvernement:
  51. Dans son dernier rapport détaillé, reçu en septembre 2001, le gouvernement a transmis des informations sur le fonctionnement de la commission tripartite chargée des questions internationales du travail ainsi que sur les consultations écrites réalisées auprès des organisations d'employeurs et de travailleurs à propos des sujets traités dans la convention. Le gouvernement indique également que le règlement relatif au fonctionnement de la commission tripartite susmentionnée garantit l'égalité des parties, étant donné que l'ordre du jour, les thèmes étudiés, les conclusions et les recommandations sont adoptés par consensus absolu. La commission note que la nécessité de parvenir à un consensus absolu pourrait conduire à réduire l'efficacité des consultations requises par la convention. A cet égard, elle rappelle que les consultations requises par la convention n'imposent pas la recherche d'un accord; les consultations ont pour but d'éclairer la prise de décisions par l'autorité compétente (voir paragr. 29 et 30 de l'étude d'ensemble de 2000) (Note 7). La commission espère que le gouvernement et les partenaires sociaux pourront établir un dialogue social constructif par le biais des consultations requises par la convention et ainsi donner plus pleinement effet à cette dernière.
  52. 31. En outre, le comité juge opportun de souligner que le fait de requérir un consensus absolu (voir le règlement du Comité tripartite sur les questions internationales du travail) pourrait s'être traduit, en 2000, par une baisse de l'efficacité des consultations entreprises au sein du comité.
  53. 32. En effet, dans son étude d'ensemble de 2000, la commission d'experts a souligné que «les représentants des employeurs et des travailleurs qui participent à la consultation ne doivent en rien être liés par la décision ou la position adoptée par le gouvernement à l'issue de celle-ci. Il serait en effet contraire au principe d'autonomie des employeurs et des travailleurs à l'égard des gouvernements qui s'applique aux travaux des organes de l'OIT qu'ils soient tenus de se conformer à la position du gouvernement au seul motif qu'ils auraient été consultés (Note 8).» La commission d'experts ajoute que «pour être «efficaces», les consultations doivent nécessairement être préalables à la décision définitive (...). Ce qui importe, c'est que les personnes consultées soient en mesure de faire valoir leur opinion avant que la décision définitive du gouvernement ne soit arrêtée. L'efficacité des consultations supposera donc, dans la pratique, que les représentants des employeurs et des travailleurs disposent suffisamment à l'avance de tous les éléments nécessaires à la formation de leur propre opinion (Note 9).»
  54. 33. Le comité note que les consultations organisées au Guatemala en 2000, dans le cadre du Comité tripartite sur les questions internationales du travail, avaient pour objet de parvenir à un consensus en ce qui concerne les réformes législatives visant à mettre la législation nationale en conformité avec certaines questions d'ordre législatif ayant trait à l'application des conventions nos 87 et 98, comme recommandé par les organes de contrôle. Le comité estime donc opportun de se reporter aux informations fournies dans le rapport de la mission de contacts directs effectuée au Guatemala du 23 au 27 avril 2001 (Note 10), qui rendent compte dans le détail des avancées et des obstacles rencontrés en 2000 et en 2001 dans le cadre du processus de consultation entre partenaires sociaux et des mesures législatives visées. Le comité indique en outre qu'à la demande de la mission les partenaires sociaux ont accepté «de renoncer à certaines positions antérieures (prises notamment par la Centrale des employeurs et le ministère du Travail) qui avaient conduit à l'élaboration et à l'appui de divers projets pour lesquels les partenaires ne s'étaient pas consultés réciproquement».
  55. 34. Le comité note qu'en novembre 2001 il avait noté avec intérêt que le gouvernement et les partenaires sociaux étaient convenus que le dialogue social institué avec l'aide du BIT devait permettre d'identifier «des solutions de remplacement pour remédier à l'inefficacité croissante des institutions, mise en évidence par les questions soulevées par le Comité de la liberté syndicale: entre autres aspects, il convient de mentionner la réforme des procédures pour améliorer le règlement des conflits individuels et collectifs du travail (qui doit notamment accélérer les procédures et garantir le respect des normes, ainsi que l'exécution des décisions des juges), la conception de techniques et de mécanismes nouveaux de prévention et d'autorèglement des conflits» (Note 11).
  56. 35. Après avoir pris note des informations et des documents transmis par l'équipe multidisciplinaire du BIT à San José (Costa Rica), le comité souligne que les questions soulevées dans le compte rendu de la réunion du Comité tripartite sur les questions internationales du travail, tenue le 12 septembre 2002, ont été suivies d'effet. Ainsi, le 6 novembre 2002, un atelier tripartite a été organisé avec la participation des spécialistes de l'équipe multidisciplinaire de San José au cours duquel les orientations en matière de politique de l'emploi pour la stratégie de réduction de la pauvreté au Guatemala ont été examinées. Le comité note qu'à la suite de cet atelier il a été décidé de poursuivre les discussions dans le cadre du comité tripartite et de rechercher des consensus pour élaborer des programmes, des projets et des instruments spécifiques afin de donner la priorité aux politiques de l'emploi pouvant être intégrées dans la stratégie susmentionnée.
  57. 36. Le comité tripartite a par ailleurs examiné d'autres questions visées par la convention (soumission des instruments adoptés par la Conférence, suivi des observations des organes de contrôle de l'OIT, réforme de son Règlement intérieur).
  58. 37. Le comité note également que le gouvernement et les partenaires sociaux ont bénéficié de l'aide fournie dans le cadre du projet «Tripartisme et dialogue social en Amérique centrale: renforcement du processus de consolidation de la démocratie PRODIAC», qui peut faciliter les travaux du comité tripartite (Note 12).
  59. 38. Le comité estime, à la lumière des informations disponibles, que les difficultés rencontrées en 2000 en ce qui concerne les consultations tripartites ont été surmontées.
  60. 39. Dans ces circonstances, il rappelle la résolution concernant le tripartisme et le dialogue social, adoptée par la Conférence à sa 90e session (juin 2002), dans laquelle il est souligné que «le dialogue social et le tripartisme se sont avérés des moyens précieux et démocratiques de traiter des préoccupations sociales, de forger un consensus, de faciliter l'élaboration des normes internationales du travail et d'examiner un vaste éventail de questions concernant le travail pour lesquelles les partenaires sociaux jouent un rôle direct, légitime et irremplaçable». Cette résolution invite aussi les gouvernements ainsi que les organisations d'employeurs et de travailleurs à promouvoir et à renforcer le tripartisme et le dialogue social.
  61. 40. Cela étant, le Guatemala ayant ratifié la convention n° 144 et devant, à ce titre, adopter des mesures pour mettre en uvre les dispositions de cet instrument, il incombe au gouvernement et aux organisations d'employeurs et de travailleurs de promouvoir et de renforcer le tripartisme et le dialogue social dans tous les domaines visés par cette convention. Pour que les consultations aboutissent, les participants doivent avoir une attitude propice au dialogue (aptitude à prendre en compte l'opinion des autres parties, respect de chaque participant, respect des engagements, volonté de régler les situations conflictuelles).
  62. 41. Comme il est dit par ailleurs dans la résolution mentionnée, «le dialogue social et le tripartisme sont des procédés modernes et dynamiques qui ont une capacité inégalée et de grandes possibilités de contribuer au progrès dans beaucoup de situations et sur beaucoup de points difficiles et stimulants». Le comité espère que le gouvernement et les partenaires sociaux, conformément à la pratique nationale et, le cas échéant, en faisant appel à l'expérience et aux orientations de l'OIT, poursuivront leurs efforts en vue de promouvoir le dialogue social et le tripartisme au Guatemala.
  63. 42. S'agissant de la réclamation à proprement parler, le comité estime que le gouvernement a agi en toute bonne foi pour la consultation des organisations représentatives des employeurs et des travailleurs sur les réformes dans le domaine du travail en invitant de façon répétée les partenaires sociaux à faire part de leurs observations. Selon le comité, les démarches entreprises satisfont aux exigences de la convention.
  64. D. Recommandations du comité
  65. 43. Le comité recommande au Conseil d'administration:
  66. a) d'approuver le présent rapport;
  67. b) d'inviter le gouvernement du Guatemala, compte tenu des conclusions qui figurent aux paragraphes 27 à 42 du présent rapport, à lui fournir, dans les prochains rapports qu'il soumettra en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT, des informations sur les activités du Comité tripartite sur les questions internationales du travail, y compris des informations concrètes sur les progrès réalisés, le cas échéant avec l'assistance technique du Bureau, en matière de consultations tripartites portant sur des questions visées par la convention no 144;
  68. c) de déclarer close la procédure de réclamation engagée par deux organisations de travailleurs auprès du Conseil d'administration pour inexécution par le Guatemala de la convention no 144.
  69. Genève, le 19 mars 2003.
  70. (Signé) Mme S. Rovirosa Priego,
  71. M. Jorge A. De Regil,
  72. Mme Hilde Anderson.
  73. Point appelant une décision:
  74. paragraphe 43.
  75. Note 1
  76. Le Guatemala a ratifié la convention no 144 le 13 juin 1989.
  77. Note 2
  78. Voir le 326e rapport du Comité de la liberté syndicale (doc. GB.282/6) et, en particulier, les paragraphes 82 à 95 concernant le cas no 1970 (Guatemala), qui se rapportent à la mission de contacts directs effectuée au Guatemala du 23 au 27 avril 2001.
  79. Note 3
  80. Conférence internationale du Travail, 87e session, Compte rendu provisoire no 18, vol. I, pp. 18 à 34, Genève, 1999.
  81. Note 4
  82. Diario de Centro América, 25 mai 2001, no 68, pp. 1-2.
  83. Note 5
  84. Diario de Centro América, 25 mai 2001, no 68, pp. 2-5.
  85. Note 6
  86. Voir étude d'ensemble des rapports de 2000 sur la convention no 144 et la recommandation no 152, Conférence internationale du Travail, 88e session (Genève, mai-juin 2000), rapport III (partie 1B), paragr. 29.
  87. Note 7
  88. On trouvera les extraits mentionnés dans les paragraphes indiqués de l'étude d'ensemble.
  89. Note 8
  90. Paragraphe 30 de l'étude d'ensemble de 2000.
  91. Note 9
  92. Paragraphe 31 de l'étude d'ensemble de 2000.
  93. Note 10
  94. Voir 326e rapport du Comité de la liberté syndicale, doc. GB.282/6, et en particulier la partie VI sur la «réforme partielle du Code du travail adoptée par le Congrès de la République durant le séjour de la mission et la réforme partielle adoptée par la suite» ainsi que la partie intitulée «les divers projets de Code de procédure du travail».
  95. Note 11
  96. Voir le paragraphe 91 du 326e rapport du Comité de la liberté syndicale, doc. GB.282/6, op. cit.
  97. Note 12
  98. Dans l'Accord de Saint-Domingue en vue de l'examen tripartite de questions relatives au monde du travail («agenda laboral») au niveau sous-régional, signé le 24 mai 2002, sous les auspices de l'OIT et des représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs des pays suivants: Belize, Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama et République dominicaine, il est fait référence au renforcement de la capacité des acteurs du processus productif, des travailleurs et des employeurs ainsi que des instances bipartites et/ou tripartites à instaurer un dialogue social (5e point de l'ordre du jour de cette manifestation tripartite sous-régionale).
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