ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil >  > Plaintes Article 24/26

RECLAMATION (article 24) - REPUBLIQUE DE MOLDOVA - C095 - 2000

Fédération générale des syndicats de la République de Moldova

Clos

Afficher en : Anglais - Espagnol

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la République de Moldova de la Convention sur la protection du salaire, 1949, (No. 95), présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la République de Moldova de la Convention sur la protection du salaire, 1949, (No. 95), présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova

Decision

Decision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. Premier rapport supplémentaire: rapportdu Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la Républiquede Moldova de la convention (no 95)sur la protection du salaire, 1949, présentéeen vertu de l'article 24 de la Constitutionde l'OIT par la Fédération généraledes syndicats de la République de Moldova
  2. 1. Par lettres datées du 13 mai 1999 et du 15 février 2000, la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova, invoquant l'article 24 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, a adressé au Bureau une réclamation alléguant l'inexécution par le gouvernement de la République de Moldova de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949.
  3. 2. La réclamation porte sur une convention à laquelle la République de Moldova est partie et qui est toujours en vigueur pour elle.(Note 1)
  4. 3. Les dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail relatives à la présentation des réclamations sont les suivantes:
  5. Article 24
  6. (Réclamations au sujet de l'application d'une convention.) Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  7. Article 25
  8. (Possibilité de rendre la réclamation publique.)
  9. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  10. 4. La procédure à suivre en cas de réclamation est régie par le Règlement relatif à la procédure à suivre pour l'examen des réclamations au titre des articles 24 et 25 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, tel qu'il a été révisé par le Conseil d'administration à sa 212e session (mars 1980)(Note 2).
  11. 5. Conformément aux articles 1 et 2, paragraphe 1, de ce Règlement, le Directeur général a communiqué la réclamation au gouvernement de la République de Moldova et l'a transmise au bureau du Conseil d'administration.
  12. 6. A sa 276e session (novembre 1999), le Conseil d'administration, sur la recommandation de son bureau, a déclaré la réclamation recevable (Note 3). Il a désigné le comité chargé de l'examen de la réclamation, composé de M. Milan Majek (membre gouvernemental, Slovaquie) comme président, de Mme Lucia Sasso-Mazzufferi (membre employeur) et de M. Richard Falbr (membre travailleur).
  13. 7. En vertu de l'article 4, paragraphe 1, du Règlement, le comité a invité le gouvernement à soumettre ses observations sur la réclamation le 15 février 2000 au plus tard.
  14. 8. Dans deux lettres reçues le 15 février et le 28 mars 2000, le gouvernement a communiqué ses commentaires sur la réclamation. Le comité s'est réuni à Genève le 8 juin 2000 et a adopté son rapport. Examen de la réclamation
  15. A. Allégations présentées par l'organisation plaignante 9. Dans sa communication, la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova a allégué que le gouvernement n'avait pas pris les mesures nécessaires pour adapter la législation et la pratique nationales aux dispositions de la convention no 95, et qu'il n'existait aucun mécanisme organisationnel et juridique qui puisse garantir le respect de la réglementation applicable visant la protection du salaire.
  16. 10. Plus précisément, l'organisation plaignante affirme que, contrairement à ce qui est prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la convention no 95, qui dispose que le salaire sera payé à intervalles réguliers, et à l'article 102 du Code du travail et l'article 19 de la loi sur la rémunération, qui contiennent des dispositions similaires, en mai 1999 une centaine de milliers de travailleurs de la plupart des secteurs d'activité économique n'ont pas touché leurs salaires depuis six mois ou plus (dans certains cas depuis plus d'un an). Les arriérés de salaire de tous les secteurs d'activité économique s'élevaient, au 1er janvier 1999, à 638,2 millions de lei et les arriérés des pensions et indemnisations à 360 millions de lei. Les montants des arriérés de salaire connaissent depuis 1994 une augmentation constante et une ascension rapide, passant de 16 millions de lei en 1994 à 227 millions en 1996, et à plus de 362 millions en 1998. En 1997 et 1998, la Fédération a présenté, à maintes reprises, au Parlement et au gouvernement des propositions d'amendement à la législation en vigueur en vue de déterminer les rémunérations à verser et autres versements obligatoires à effectuer en priorité.
  17. 11. La Fédération générale des syndicats de la République de Moldova dénonce également une pratique usitée chez la plupart des employeurs, qui consiste à offrir des boissons alcoolisées et du tabac à la place du salaire, contrairement à ce qui est prévu à l'article 4, paragraphe 1, de la convention. Elle ajoute que, malgré plusieurs pétitions et appels adressés au Président de la République, au Parlement et au gouvernement pour leur demander de faire le nécessaire pour redresser la situation, aucun changement n'a été constaté. Les syndicats ont insisté pour que ce problème soit inscrit à l'ordre du jour d'un organe du gouvernement, mais ils n'ont reçu que des promesses en guise de réponse. La Fédération générale des syndicats de la République de Moldova a entrepris plusieurs actions revendicatives, dont une manifestation de protestation organisée au niveau national qui a rassemblé 40 000 salariés.
  18. 12. Dans sa lettre du 15 février 2000, l'organisation plaignante a fourni des statistiques à jour concernant les arriérés de salaire au 1er janvier 2000. Selon ces statistiques, les montants des arriérés de salaire des travailleurs s'élevaient à 552 millions de lei, soit 86,5 millions de moins qu'en janvier 1999, et les arriérés des pensions et indemnisations ont diminué de 60 millions de lei, pour s'établir à 300,4 millions.
  19. B. Observations du gouvernement
  20. 13. Dans sa communication, le gouvernement déclare que le problème des retards et du non-paiement des salaires est le résultat de la situation difficile dans laquelle se trouve l'économie nationale, et que cette situation s'est sérieusement détériorée à partir du début de 1999 en raison des graves problèmes économiques que le pays a connus. A cet égard, il appelle l'attention sur le premier rapport sur l'application de la convention no 95, qui couvre la période allant du mois d'août 1997 au mois d'août 1998, et dans lequel il a signalé que plusieurs acteurs économiques, tant publics que privés, ne s'acquittaient pas de l'obligation qui leur était faite de verser rapidement les salaires, et ce en raison d'une crise financière très grave, et que les arriérés de salaire étaient de plus de deux mois.
  21. 14. Le gouvernement explique que, devant l'aggravation de la situation en 1999, des efforts particuliers ont été faits dans tout le pays pour redresser la situation et pour trouver une solution à ce problème des arriérés de salaire. Le gouvernement renvoie, à cet égard, au protocole d'accord conclu entre le gouvernement et la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova le 23 avril 1999, qui définit les conditions à respecter pour le règlement des créances présentées par les syndicats, y compris celles concernant le paiement des salaires dus. Par ailleurs, des calendriers ont été établis pour le règlement des arriérés de salaire, avec un contrôle mensuel, ce qui a permis de ramener les montants des arriérés de salaire qui étaient de 638,6 millions de lei en janvier 1999 à 552,1 millions en janvier 2000, soit une diminution de 13,5 pour cent. Ce montant a diminué dans pratiquement tous les secteurs d'activité économique, exception faite de l'industrie de l'usinage, du secteur des transports et de la santé publique.
  22. 15. Pour ce qui est de la question du remplacement des salaires par du tabac et de l'alcool, le gouvernement renvoie à la convention collective nationale conclue le 20 mars 1998 entre le gouvernement, la Confédération nationale des employeurs et la Fédération générale des syndicats, et qui prévoit la possibilité d'un paiement partiel du salaire (pas plus de 50 pour cent) en nature, à l'exception des alcools et stupéfiants. En 1998, le paiement en nature ne représentait pas plus de 13,2 pour cent en moyenne du salaire d'un salarié, et en 1999 pas plus de 12,9 pour cent. Aucun cas de paiement partiel du salaire sous forme de stupéfiants n'a été signalé, et les cas isolés de paiement sous forme de boissons faiblement alcoolisées ne devraient pas être considérés comme contraires à la disposition de l'article 4 de la convention. Le gouvernement a toutefois reconnu la nécessité d'adopter d'autres mesures pour réglementer le paiement du salaire en nature.
  23. 16. S'agissant du principe du paiement du salaire à intervalles réguliers évoqué à l'article 12 de la convention no 95, mais aussi à l'article 102 du Code du travail et à l'article 19 de la loi sur la rémunération, le gouvernement renvoie au décret no 435-XIII, du 19 avril 1995, qui prévoit l'utilisation exclusive de 50 pour cent du revenu total de la production pour le paiement du salaire, une mesure que le gouvernement a réussi à appliquer jusqu'au 1er janvier 1999. Un nouveau projet de loi destiné à amender la loi sur la rémunération est en préparation en consultation avec les services compétents du BIT; ce texte contient des dispositions qui devraient permettre de résoudre le problème des arriérés de salaire grâce à un mécanisme de compensation des pertes de salaire qui interviendrait chaque fois que le retard dépasse un mois de l'année civile.
  24. 17. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle aucune mesure n'aurait été prise à l'encontre des employeurs qui ont enfreint les dispositions de la convention, le gouvernement déclare que, selon l'article 41 du Code pénal administratif du 29 mars 1985, toute personne chargée de payer les salaires, pensions, bourses ou autres versements de nature permanente qui commet un délit est passible d'une amende qui peut atteindre l'équivalent de 75 salaires; l'application de cette sanction est du ressort des tribunaux nationaux.
  25. 18. Pour conclure, le gouvernement précise que la réforme du dispositif de contrôle de l'application de la législation du travail a été lancée en 1999 et que l'effort de restructuration devait aboutir à la création, au sein du ministère du Travail, de la Protection sociale et de la Famille, d'un service d'inspection du travail qui serait chargé de superviser l'application de la législation nationale du travail, y compris la réglementation visant à la protection du salaire. Par ailleurs, le principe de l'élaboration d'un système de dialogue social a été approuvé en avril 1999, et un conseil chargé de l'application de ce concept avec la participation de représentants de la Fédération générale des syndicats a été mis en place en août 1999. Enfin, selon le gouvernement, une fois adoptée par le Parlement, la loi portant création du Conseil économique et social pourrait toujours aider à résoudre un certain nombre de questions, et permettre ainsi de surmonter la crise actuelle et de rétablir la stabilité socio-économique dans ce pays.
  26. 19. Dans sa lettre du 28 mars 2000, le gouvernement ajoute qu'en janvier 2000 les arriérés de salaire ont été réduits de nouveau et ramenés à 506,6 millions de lei contre 552,1 millions de lei auparavant, soit une diminution de 8,2 pour cent. Le gouvernement souligne toutefois que la situation économique actuelle du pays ne lui permet pas de régler immédiatement tous les arriérés de salaire qui ont été accumulés au cours des années par les différents gouvernements précédents, et demande instamment à la Fédération générale des syndicats de considérer cette question avec objectivité.
  27. C. Conclusions du comité
  28. 20. Le comité note que les questions soulevées par la Fédération générale des syndicats dans sa réclamation touchent essentiellement à l'application de l'article 12, paragraphe 1, et de l'article 4, paragraphe 1, de la convention no 95, qui énoncent le principe du paiement du salaire à intervalles réguliers et l'interdiction du paiement du salaire sous forme de spiritueux ou de drogues nuisibles.
  29. Non-paiement du salaire à intervalles réguliers
  30. 21. L'article 12 de la convention no 95 dispose ce qui suit:
  31. Article 12
  32. 1. Le salaire sera payé à intervalles réguliers. A moins qu'il n'existe d'autres arrangements satisfaisants qui assurent le paiement du salaire à des intervalles réguliers, les intervalles auxquels le salaire doit être payé seront prescrits par la législation nationale ou fixés par une convention collective ou une sentence arbitrale.
  33. 2. (...)
  34. 22. S'agissant de la disposition susmentionnée, le comité rappelle que l'Etat qui ratifie la convention est tenu non seulement de l'appliquer scrupuleusement aux travailleurs dont le salaire est financé directement par le budget de l'Etat, mais aussi de veiller à ce qu'elle soit appliquée par les autorités locales et les entreprises privées.
  35. 23. Le comité note que le gouvernement ne nie pas l'existence dans le pays d'un sérieux problème d'arriérés de salaire, et qu'il confirme les statistiques citées par la Fédération générale des syndicats. L'organisation plaignante et le gouvernement sont également d'accord sur le fait qu'il y a eu récemment une diminution, pour la première fois, du montant des arriérés de salaire, et ce après plusieurs années de progression constante, même si ce renversement de situation n'a pas été constaté dans tous les secteurs d'activité économique. Par ailleurs, la disposition de l'article 12, paragraphe 1, de la convention, qui prévoit le paiement du salaire à intervalles réguliers semble avoir été incorporée dans la législation nationale, en particulier dans l'article 102 du Code du travail et l'article 19 de la loi sur la rémunération. Par conséquent, la réclamation semble porter plus précisément sur le fait que le gouvernement n'aurait pas fait appliquer les dispositions pertinentes de la législation nationale, dans la mesure où le respect des obligations qui découlent d'une convention internationale du travail présuppose non seulement l'adoption des lois appropriées, mais aussi leur application pleine et entière dans la pratique.
  36. 24. Le comité note que le gouvernement se réfère à différentes mesures qui ont été prises pour résoudre le problème des arriérés de salaire, y compris le décret no 435-XIII de 1955, le projet de loi sur la rémunération, actuellement en préparation, et le protocole d'accord conclu avec la Fédération générale des syndicats, qui prévoit un calendrier de versement des arriérés de salaire. Le comité prend également note avec intérêt des statistiques les plus récentes, que la Fédération générale des syndicats ne conteste pas, et qui indiquent pour la première fois depuis quelques années une diminution de 13,5 pour cent du montant total des arriérés de salaire. Toutefois, le montant des arriérés de salaire étant toujours aussi élevé, le comité estime que la gravité de la situation reste la même et se doit donc de conclure que le gouvernement n'a pas assuré l'application effective de la disposition pertinente de la convention.
  37. 25. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle ceux qui ne s'acquittent pas de l'obligation qui leur est faite de payer les salaires rapidement ne seraient pas, ou guère, sanctionnés, le comité rappelle que, comme l'ont souligné constamment la commission d'experts et les comités du Conseil d'administration qui sont chargés d'examiner ce type de réclamations, l'application effective de la convention comprend trois aspects importants: une supervision efficace, l'application de sanctions appropriées pour prévenir et punir les infractions, et des mesures pour réparer le préjudice subi.
  38. 26. S'agissant de la supervision, le comité prend note de la remarque du gouvernement selon laquelle il poursuivrait actuellement les réformes lancées en 1999 pour mettre en place des mécanismes plus efficaces d'application de la législation nationale, y compris la création d'un service d'inspection du travail au sein du ministère du Travail, de la Protection sociale et de la Famille. Le comité espère qu'un service d'inspection du travail répondant à des normes d'efficacité et d'indépendance très strictes, sera créé dans un proche avenir, mettant ainsi fin au laxisme et à la complaisance, d'où un respect plus grand des textes de lois sur le travail.
  39. 27. S'agissant des sanctions, le comité note que le gouvernement se contente de renvoyer à l'article 41 du Code pénal administratif, qui prévoit des sanctions en cas de non-paiement du salaire, et de préciser que les tribunaux examinent ces cas et ordonnent le paiement de dommages et intérêts, comme prévu par la loi. Le gouvernement n'a pas jugé bon de fournir des précisions sur l'application de la disposition susmentionnée, comme le nombre des cas qui ont fait l'objet d'une enquête, de poursuites judiciaires et d'une condamnation, avec des précisions sur la sanction qui a été infligée ou sur les jugements rendus par les cours ou autres tribunaux au sujet du paiement du salaire à intervalles réguliers. Ceci étant, le comité pourrait difficilement se prononcer sur la question de l'efficacité des mesures de contrôle ; toutefois, le système des sanctions en vigueur ne semble pas avoir eu d'effet notable de dissuasion sur les infractions à la loi, et n'a donc guère contribué au déclin du phénomène des arriérés de salaire. Le comité recommande au gouvernement de prescrire et d'appliquer scrupuleusement des sanctions correspondant à l'ampleur du problème, conformément à l'article 15 c) de la convention.
  40. 28. S'agissant des mesures à prendre pour réparer le préjudice subi, le comité n'a pas eu de précision sur le nombre exact des travailleurs touchés, ni sur le montant moyen des arriérés de salaire et leur durée. Nonobstant la diminution du montant des arriérés de salaire constatée récemment, le comité insiste auprès du gouvernement de poursuivre et de renforcer les efforts qu'il déploie pour obtenir rapidement le versement des salaires dus. Le comité rappelle, à cet égard, que la responsabilité qui incombe au gouvernement de redresser aussi vite que possible la situation en ce qui concerne les arriérés de salaire ne se limite en aucun cas aux entreprises étatiques, mais s'étend, au contraire, aux entreprises du secteur privé. Le comité souhaite enfin souligner que la carence des gouvernements précédents face au problème des arriérés de salaire n'exonère nullement le gouvernement actuel de la République de Moldova de l'obligation qui lui est faite de redresser la situation aussi vite que possible et de s'acquitter, ce faisant, des obligations internationales qui lui incombent du fait même qu'il a accepté la convention.
  41. Paiement partiel du salaire sous formede boissons alcoolisées et de tabac
  42. 29. L'article 4 de la convention no 95 dispose ce qui suit:
  43. Article 4
  44. 1. La législation nationale, les conventions collectives ou les sentences arbitrales peuvent permettre le paiement partiel du salaire en nature dans les industries ou professions où ce mode de paiement est de pratique courante ou souhaitable en raison de la nature de l'industrie ou de la profession en cause. Le paiement du salaire sous forme de spiritueux ou de drogues nuisibles ne sera admis en aucun cas.
  45. 2. (...)
  46. 30. Le comité prend note de la précision apportée par le gouvernement, à savoir que la convention collective nationale autorise expressément le paiement partiel du salaire sous forme de prestations en nature. Le comité prend également note des chiffres cités par le gouvernement et qui indiquent une légère diminution de la proportion moyenne du salaire d'un travailleur qui est payée en nature. En outre, le comité note avec une grande préoccupation que, sans nier que les salaires sont payés sous forme de boissons alcoolisées et de tabac, le gouvernement parle de «cas isolés» et soutient que cette pratique limitée qui implique l'utilisation de boissons faiblement alcoolisées n'est nullement contraire aux dispositions de l'article 4 de la convention. D'après la Fédération générale des syndicats, cette pratique, qui consiste à offrir des boissons alcoolisées et du tabac en lieu et place d'un paiement en espèces, serait une pratique très répandue chez la plupart des employeurs. Etant donné que le caractère contradictoire de toutes ces déclarations, le comité peut difficilement évaluer l'ampleur réelle du problème. L'ampleur de la mobilisation du mouvement syndical sur cette question tendrait toutefois à indiquer qu'il a pris une certaine proportion.
  47. 31. A cet égard, le comité tient à insister sur le caractère exceptionnel de la pratique prévue à l'article 4 de la convention, et à rappeler les conditions très strictes auxquelles elle est soumise, à savoir: a) une autorisation spéciale donnée par la législation nationale, les conventions collectives ou les sentences arbitrales; b) cette autorisation ne peut être donnée pour le paiement partiel du salaire sous forme de prestations en nature; c) une autorisation ne peut être envisagée que pour les industries ou professions où le paiement du salaire en nature est de pratique courante ou souhaitable en raison de la nature de l'industrie ou de la profession en cause; d) dans les cas où il est autorisé, le paiement partiel du salaire en nature doit faire l'objet d'un contrôle très strict afin de s'assurer que les prestations offertes servent à l'usage personnel du travailleur et de sa famille et sont conformes à leur intérêt, et que la valeur attribuée à ces prestations est juste et raisonnable.
  48. 32. Le comité rappelle que l'article 4 de la convention est évidemment à lire comme une disposition qui énonce une interdiction visant tout remplacement du salaire et d'autres formes de rémunération contractuelle par des produits nocifs, tels que les spiritueux, les stupéfiants ou le tabac. Le comité rappelle, à cet égard, que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a toujours vu dans la disposition de l'article 4, paragraphe 1, de la convention, une interdiction très claire visant le paiement du salaire sous forme de spiritueux ou de drogues nuisibles quelles que soient les circonstances. Le comité estime par ailleurs que la disposition excluant les spiritueux et les drogues nuisibles de la catégorie des prestations en nature qui sont autorisées est à rapprocher de la disposition de l'article 4, paragraphe 2, de la convention qui n'admet pour paiement en nature que les prestations qui servent à l'usage personnel du travailleur et de sa famille et qui sont conformes à leur intérêt.
  49. 33. Le comité souhaite attirer l'attention sur la convention collective du 20 mars 1998, évoquée par le gouvernement dans sa réponse, et qui exclut tous les produits alcoolisés et stupéfiants quels qu'ils soient de tout arrangement autorisant le paiement partiel du salaire en nature, et sur l'article 18, paragraphe 4, de la loi sur la rémunération du 25 février 1993, qui est libellée de manière identique. Le comité exprime l'espoir que le gouvernement appliquera à la lettre les dispositions de ces textes et fera appliquer l'interdiction visant tout paiement du salaire sous forme de boissons alcoolisées et de tabac. Pour ce qui est de la convention collective du 20 mars 1998, qui prévoit la possibilité de payer jusqu'à 50 pour cent du salaire en nature, le comité rappelle les observations faites par la commission d'experts à propos de situations semblables observées dans d'autres pays et veut croire que le gouvernement saura faire en sorte que cette proportion reste raisonnable.
  50. 34. Le comité ne peut certes que faire des conjectures sur la part de la diminution récente du montant des arriérés de salaire qui s'explique par le paiement du salaire sous forme de boissons alcoolisées et de tabac, mais il souhaite rappeler, à cet égard, au gouvernement que les mesures prises en vue du paiement des salaires dus ne doivent pas aboutir à une violation d'autres dispositions de cette convention. Tout en notant que le gouvernement reconnaît la nécessité de mieux réglementer le paiement partiel du salaire en nature (ce qu'il a déjà reconnu dans le premier rapport sur l'application de la convention), le comité insiste auprès du gouvernement de faire le nécessaire pour établir dans quelle mesure les boissons alcoolisées et le tabac servent de substituts à une rémunération en espèces des travailleurs, avant de penser à adopter et appliquer les mesures qui lui permettront de s'acquitter des obligations que lui impose la convention.
  51. 35. Le comité juge essentiel que la commission d'experts continue de veiller au suivi des questions soulevées dans la présente réclamation. Il prie, par conséquent, le gouvernement de fournir, dans le rapport qu'il doit présenter, en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT, à la prochaine session de la commission d'experts, toute l'information utile sur les mesures adoptées ou prévues ayant un rapport avec les conclusions qui précèdent et sur l'évolution de la situation qui s'ensuit, y compris des précisions sur le nombre des travailleurs touchés, le montant total des salaires dus, le nombre et le type des entreprises en cause, la nature et le montant des sanctions infligées pour non-paiement du salaire, l'ampleur prise par la pratique qui consiste à payer le salaire sous forme de boissons alcoolisées ou de tabac et les mesures prises pour y mettre fin.
  52. Recommandations du comité
  53. 36. Le comité recommande au Conseil d'administration:
  54. a) d'approuver le présent rapport et, en particulier, compte tenu des conclusions figurant aux paragraphes 20 à 35 dudit rapport, d'inviter le gouvernement à informer en détail la commission d'experts de toutes les mesures adoptées ou prévues en vue:
  55. i) d'assurer le paiement du salaire à intervalles réguliers et sur l'évolution de la situation qui s'ensuit et, en particulier, sur:
  56. - le nombre des travailleurs touchés, le montant des salaires dus, la durée moyenne du retard accumulé et le nombre et la nature des entreprises en cause;
  57. - le nombre des délits punissables constatés en ce qui concerne le paiement du salaire à intervalles réguliers, et le nombre et la nature des sanctions infligées, y compris tout jugement rendu par les tribunaux compétents;
  58. - les réformes législatives en cours afin de mieux superviser l'application de la législation du travail, y compris la création d'un service d'inspection du travail;
  59. - l'état d'avancement des discussions avec les organisations de travailleurs les plus représentatives au sujet d'un calendrier annuel de paiement des arriérés de salaire, et dans quelle mesure ce calendrier est respecté, avec des précisions sur la proportion des arriérés de salaire qui est payée en nature;
  60. ii) de mettre fin à la pratique du paiement partiel du salaire sous forme de boissons alcoolisées et de tabac ou de toute autre prestation en nature qui serait contraire aux dispositions de la convention no 95, et, en particulier, sur:
  61. - le nombre des travailleurs touchés, le nombre et la nature des entreprises qui auraient recours au paiement partiel du salaire en nature sous forme de boissons alcoolisées ou de tabac et l'ampleur prise par cette pratique;
  62. - la nature des institutions ou organismes qui sont chargés de faire appliquer la législation pertinente, le nombre des plaintes qui font l'objet d'une enquête ou des infractions constatées et la nature des sanctions infligées;
  63. - toutes les initiatives qui sont prises pour réglementer de manière plus stricte et plus efficace le paiement du salaire sous forme de prestations en nature, et sur l'évolution de la situation qui s'ensuit;
  64. b) de déclarer close la procédure engagée auprès du Conseil d'administration par la présentation de la réclamation de la Fédération générale des syndicats de la République de Moldova concernant l'application par la République de Moldova de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949.
  65. Note 1
  66. Conventions nos 35 et 37, ratifiées le 18 octobre 1935.
  67. Note 2
  68. Voir Bulletin officiel, vol. LXIV, 1981, série A, no 1, pp. 99-101.
  69. Note 3
  70. Document GB.271/18/1 et procès-verbaux de la 271e session, document GB.271/PV (Rev.), p. VIII/1.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer