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RECLAMATION (article 24) - CHILI - C035, C036, C037, C038 - 2000

Syndicats nationaux de travailleurs d'entreprise des fonds de pension (AFP) du secteur privé

Clos

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Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par le Chili de la convention (n° 35) sur l'assurance-vieillesse (industrie, etc.), 1933, de la convention (n° 36) sur l'assurance-vieillesse (agriculture), 1933, de la convention (n° 37) sur l'assurance-invalidité (industrie, etc.), 1933, et de la convention (n° 38) sur l'assurance-invalidité (agriculture), 1933, présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par certains syndicats nationaux de travailleurs d'entreprises des fonds de pension (AFP) du secteur privé

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par le Chili de la convention (n° 35) sur l'assurance-vieillesse (industrie, etc.), 1933, de la convention (n° 36) sur l'assurance-vieillesse (agriculture), 1933, de la convention (n° 37) sur l'assurance-invalidité (industrie, etc.), 1933, et de la convention (n° 38) sur l'assurance-invalidité (agriculture), 1933, présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT par certains syndicats nationaux de travailleurs d'entreprises des fonds de pension (AFP) du secteur privé

Decision

Decision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. I. Introduction
  2. 1. Par lettre reçue le 17 avril 1998 par le directeur de l'Equipe consultative multidisciplinaire pour les pays du sud de l'Amérique latine, les dirigeants du Syndicat national des travailleurs AFP Provida SA, du Syndicat national n° 2 des travailleurs AFP Habitat SA, du Syndicat national des travailleurs AFP Fomenta SA, du Syndicat national des travailleurs AFP Protecciôn SA, du Syndicat national des travailleurs AFP Santa Maria SA et du Syndicat national des travailleurs AFP Aporta SA, invoquant l'article 24 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, ont adressé au Bureau une réclamation alléguant l'inexécution par le Chili de la convention (n° 35) sur l'assurance-vieillesse (industrie, etc.), 1933, de la convention (n° 36) sur l'assurance-vieillesse (agriculture), 1933, de la convention (n° 37) sur l'assurance-invalidité (industrie, etc.), 1933, et de la convention (n°38) sur l'assurance-invalidité (agriculture), 1933.
  3. 2. La réclamation en question a trait à quatre conventions qui ont été ratifiées par le Chili et sont en vigueur dans ce pays (Note_1).
  4. 3. Les dispositions pertinentes de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail concernant la soumission des réclamations sont les suivantes:
  5. Article 24
  6. Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause, et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  7. Article 25
  8. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  9. 4. La procédure à suivre en cas de réclamation est régie par le Règlement révisé adopté par le Conseil d'administration à sa 212e session en mars 1980 (Note_2).
  10. 5. Conformément aux articles 1 et 2, paragraphe 1, de ce Règlement, le Directeur général a communiqué la réclamation au gouvernement du Chili et l'a transmise au bureau du Conseil d'administration.
  11. 6. Le Conseil d'administration à sa 273e session (novembre 1998), sur recommandation de son bureau, a déclaré la réclamation recevable (Note_3). Il a désigné le comité chargé de l'examen de la réclamation, composé de M. A. Ducreux (membre gouvernemental, Panama, président), de M. Daniel Carlos L. Funes de Rioja (membre employeur, Argentine) et de M. J. Olivio Miranda Oliveira (membre travailleur, Brésil).
  12. 7. Le comité a décidé, en vertu du paragraphe 1 de l'article 4 du Règlement, d'inviter le gouvernement à soumettre ses observations sur la réclamation avant le 30 mars 1999.
  13. 8. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications en date du 9 avril 1999 et du 12 mai 1999 et a transmis des informations complémentaires par une lettre en date du 21 juillet 1999.
  14. 9. A sa 276e session (novembre 1999), le Conseil d'administration a désigné M. Victor Rodrîguez Cedeno, membre gouvernemental du Venezuela, en remplacement de M. A Ducreux (Note_4).
  15. 10. Le comité s'est réuni à Genève en mars 2000 et a adopté son rapport.
  16. II. Examen de la réclamation
  17. A. Allégations formulées par les organisations plaignantes
  18. 11. Dans leur communication, les dirigeants des six syndicats nationaux de travailleurs de sociétés d'administration des fonds de pensions (Administradoras de Fondos de Pensiones-AFPs) précités allèguent que les règles essentielles du régime d'administration privée du système de sécurité sociale existant au Chili sont contraires aux conventions nos 35, 36, 37 et 38 de l'OIT, en particulier en ce qui concerne la gestion privée des fonds de pensions des travailleurs. Le gouvernement chilien devrait par conséquent mettre ce système en conformité avec les dispositions pertinentes des conventions précitées et envisager de ratifier d'urgence les conventions internationales du travail nos 102 et 128.
  19. Genèse du nouveau système de prévoyance
  20. 12. Les organisations plaignantes décrivent brièvement l'évolution du système de sécurité sociale au Chili depuis les années vingt. Le système de pensions en vigueur avant 1980 reposait sur les cotisations versées par les employeurs et par les travailleurs, qui contribuaient à couvrir le coût des pensions de vieillesse, d'invalidité et de survivants. Il s'agissait d'un régime de répartition dans lequel les inactifs étaient financièrement pris en charge par les actifs. A ce sujet, il y avait 12,2 travailleurs actifs pour un retraité en 1955 contre 2,5 actifs pour un retraité en 1980, la charge financière supportée par les actifs ayant ainsi été multipliée par cinq en seulement vingt cinq ans. Face à cette situation, le gouvernement alors au pouvoir s'est orienté, dès 1979, vers une privatisation du système de sécurité sociale. Les décrets-lois nos 3500 et 3501, adoptés le 13 novembre 1980, ont ainsi instauré un système de prévoyance individuelle, dans la gestion duquel l'Etat ne joue qu'un rôle secondaire, et ont supprimé le système de répartition fondé sur la solidarité, qui était en vigueur depuis plus de cinq décennies. Depuis lors, les pensions sont gérées par les sociétés d'administration des fonds de pensions (AFPs), institutions privées constituées en sociétés anonymes, qui sont chargées de gérer les ressources et les prestations, ainsi que par l'Institut de normalisation en matière de prévoyance (INP) qui gère les ressources de l'ancien système de prévoyance. Ce dernier, qui s'est maintenu pendant de nombreuses années, avait pour avantage de mettre les pensions à l'abri des fluctuations des marchés financiers et d'assurer la solidarité entre les générations, étant donné que les travailleurs «passifs» pouvaient bénéficier des augmentations de productivité et de salaire obtenues par les travailleurs «actifs». A la suite du coup d'Etat de 1973, ce système de répartition a été remplacé par un système de capitalisation individuelle dans lequel les travailleurs déposent des fonds sur un compte individuel. Les fonds capitalisés sur ces comptes sont gérés par les AFPs qui décident de leur placement. Selon les syndicats, les travailleurs n'ont pas été associés aux discussions ayant abouti à la mise en place du nouveau système de prévoyance et, malgré l'avènement de la démocratie, les travailleurs et leurs principales organisations syndicales demeurent à l'écart de la gestion du système ainsi que des débats sur ses imperfections, son manque d'équité et d'efficacité et sur les mesures qu'il conviendrait de prendre pour remédier à ces déficiences.
  21. Caractéristiques du nouveau système
  22. 13. Le régime de retraite imposé au Chili à partir de 1980 repose sur un système de capitalisation individuelle géré par les AFPs. Ces dernières sont des sociétés anonymes nationales ou étrangères à but lucratif qui gèrent un fonds de pensions et versent au travailleur affilié les prestations prévues par la loi. Pour cette gestion, les AFPs perçoivent n° 18646 de 1987). Ces commissions sont à la charge des travailleurs et sont directement prélevées sur leur compte individuel. Conformément aux règles établies par la loi, les AFPs doivent procéder à des placements financiers sûrs et rentables en diversifiant la nature des investissements. Les six syndicats plaignants considèrent que le système actuel présente un certain nombre de problèmes et de déficiences: a) soumission aux fluctuations du marché et, en particulier, aux variations de la valeur des actions; b) frais administratifs très élevés et supportés par les assurés: la commission prélevée par les AFPs sur les comptes individuels représente 30 pour cent de la cotisation mensuelle versée par le travailleur; c) tendance à la formation de holdings ou de monopoles: les fonds capitalisés sont concentrés auprès d'un nombre restreint d'APPs; d) inefficacité du système de contrôle du respect des règles en matière de prévoyance et des mécanismes légaux de recouvrement judiciaire des cotisations des travailleurs, ce qui permet aux employeurs de ne pas verser à l'organisme compétent les cotisations déclarées (la dette afférente aux cotisations de sécurité sociale s'élèverait à 300 millions de dollars et les juridictions du travail seraient saisies de 15 000 demandes en recouvrement de cotisations impayées); et e) les travailleurs et les organisations syndicales ne sont pas associés à la gestion des AFPs ni aux méthodes d'investissement de l'argent déposé sur les fonds de pensions.
  23. Conventions internationales dont l'application est affectée par le régime de gestion privée des pensions
  24. 14. Selon la réclamation, le système de prévoyance actuel porte gravement atteinte aux principes énoncés aux alinéas 1, 2 et 4 de l'article 10 des conventions nos 35 et 36 et aux alinéas 1, 2 et 4 de l'article 11 des conventions nos 37 et 38. En effet, les sociétés qui gèrent les fonds de pensions sont des sociétés commerciales privées qui agissent conformément au droit commercial chilien et poursuivent un but lucratif. De plus, ni les travailleurs assurés ni leurs éventuels représentants ne sont associés à la gestion des AFPs.
  25. Situation des agents de vente employés par les AFPs
  26. 15. Les plaignants décrivent la conjoncture socio-économique au Chili en dénonçant la tendance à la déréglementation et à la flexibilisation des normes du travail, tendance qui engendre une précarisation croissante de l'emploi et des conditions de travail. Les gouvernements de la concertation des partis pour la démocratie ont refusé d'associer les travailleurs et leur principale organisation syndicale, la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), aux discussions concernant la politique macroéconomique. En outre, au cours des conflits du travail de grande ampleur survenus ces dernières années, le ministère du Travail a refusé d'intervenir dans les affaires internes des entreprises au motif qu'une telle ingérence serait contraire à la politique de libre concurrence et au principe selon lequel les parties au conflit doivent être traitées sur un pied d'égalité. Par ailleurs, la direction du travail dispose de moyens extrêmement limités pour veiller au respect de la législation du travail à l'échelle nationale. Il convient également de mentionner la crise que traverse depuis de nombreuses années le mouvement syndical avec une proportion de travailleurs syndiqués qui ne dépasserait pas 10 pour cent de la population active. C'est dans ce contexte socio-économique que, depuis novembre 1997, 13 000 agents de vente de services de prévoyance, sur un total de 22 000, ont été licenciés par les différentes AFPs. Pour les organisations plaignantes, ces licenciements massifs résultent de l'adoption par l'autorité administrative (Superintendance des AFPs), en novembre 1997, des circulaires nos 998 et 999 qui ont assujetti l'opération de transfert (traspaso) à de nouvelles formalités administratives. Le transfert est l'opération par laquelle le travailleur décide de transmettre la gestion de son capital-pension à une nouvelle AFP, laquelle verse une commission au vendeur qui est à l'origine de ce transfert. Les nouvelles formalités administratives plus complexes imposées par ces circulaires ont dissuadé les travailleurs de procéder à de telles opérations de transfert. La baisse sensible et généralisée du nombre d'ordres de transfert a eu des répercussions pécuniaires sur les vendeurs pour qui les commissions constituent l'élément principal de leur rémunération. Les AFPs ont quant à elles licencié des milliers de vendeurs au motif qu'ils n'avaient pas rempli les objectifs définis dans leur contrat de travail. La majorité de ces licenciements a eu pour fondement le manquement grave aux obligations contractuelles (alinéa 7 de l'article 160 du Code du travail), cause de résiliation du contrat qui prive l'employé de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que de l'indemnité pour temps de service. Les plaignants considèrent que le non-respect des objectifs définis dans les contrats de travail n'est pas imputable à la négligence ou à l'insuffisance professionnelle des travailleurs licenciés mais à la modification des conditions du marché des services de prévoyance, qui résulte elle-même de l'application des nouvelles règles en matière de transfert imposées par la Superintendance des APPs dans les circulaires nos 998 et 999. La modification des conditions du marché des services de prévoyance correspond, dans le cas des travailleurs des AFPs, à l'un des motifs de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur prévus à l'article 161 du Code du travail. Cette cause de rupture du contrat n'a pas été invoquée par les AFPs dans la mesure où ces dernières auraient été obligées de verser à chaque travailleur licencié l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité pour temps de service. En publiant, conformément aux compétences réglementaires qui lui sont conférées, les circulaires précitées, l'autorité administrative a déréglementé et flexibilisé le secteur de la vente des services de prévoyance. Les AFPs se sont servies de ces circulaires pour opérer leur rationalisation et leur modernisation. Elles ont adapté leur effectif aux besoins du marché en procédant au licenciement de milliers de travailleurs; licenciement justifié par une cause de rupture du contrat de travail qui prive les personnes licenciées du droit de percevoir l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité pour temps de service. A cet égard, les juridictions du travail sont saisies de milliers de plaintes pour licenciement abusif. L'autorité administrative a, quant à elle, décliné toute responsabilité dans cette affaire en affirmant qu'elle avait agi dans son domaine de compétence et que les mesures prises étaient indispensables, étant donné le grand nombre de fraudes dont les travailleurs des AFPs étaient à l'origine pour obtenir les commissions liées à la vente des services de prévoyance. Il convient de préciser que, malgré le licenciement de milliers de travailleurs des AFPs, les frais prélevés par les AFPs sur les comptes individuels des travailleurs pour la gestion desdits comptes n'ont pas diminué et que les irrégularités imputées aux travailleurs des AFPs par l'autorité administrative sont des cas isolés qui n'ont donné lieu à la saisine d'aucune juridiction pénale. Enfin, selon la réclamation, le gouvernement chilien devrait mettre un terme à la politique de déréglementation et de flexibilisation du marché du travail qui se traduit notamment par une précarisation généralisée de l'emploi.
  27. B. Observations du gouvernement
  28. 16. Dans sa première lettre en date du 9 avril 1999, le gouvernement communique une note technique de la Superintendance des AFPs en réponse à la réclamation. Selon la Superintendance, le nouveau système de pensions repose sur le principe de la capitalisation individuelle et est, par essence, différent des systèmes de répartition traditionnels. Les sociétés d'administration privées ont une participation directe dans le système puisqu'elles sont chargées d'investir les ressources capitalisées sur les fonds de pensions des travailleurs: le but lucratif des sociétés est donc indéniable. Bien que consacrant des principes différents de ceux opérant dans les systèmes de répartition traditionnels, le nouveau système de pensions a pour but d'obtenir des pensions plus justes et plus dignes pour les personnes qui terminent leur vie «active». En ce qui concerne les allégations relatives au licenciement massif de 13 000 travailleurs des AFPs comme résultat de l'adoption des circulaires nos 998 et 999, la Superintendance précise que ces deux circulaires ne traitent pas du même sujet. La circulaire n° 998 définit les formalités administratives devant être respectées pour effectuer une opération de transfert tandis que la circulaire n° 999 impose aux agents de vente qui désirent intégrer une AFP à partir du 1er août 1998 un examen obligatoire portant sur les caractéristiques essentielles du nouveau système de pensions. A partir de novembre 1997, on constate une réduction du personnel de vente des AFPs. Ce personnel, trop nombreux par rapport aux nécessités du marché, concourrait à l'augmentation des coûts de fonctionnement du système et par-là même à l'augmentation du montant des commissions à la charge des affiliés. En outre, les vendeurs se livraient une guerre commerciale qui les incitait à commettre des irrégularités pour conclure des ordres de transferts. Pour toutes ces raisons, les sociétés d'administration se sont restructurées et certaines d'entre elles ont cherché à fusionner de manière à diminuer certains coûts et réduire leur personnel de vente au strict nécessaire. Par ailleurs, l'imposition de nouvelles formalités administratives pour la réalisation d'opérations de transfert a certes provoqué une baisse sensible du nombre d'ordres de transfert et par conséquent une diminution des revenus des agents de vente, mais la situation s'est depuis lors régularisée et les vendeurs qui sont restés dans le système bénéficient actuellement d'une augmentation de leur productivité.
  29. 17. Dans une communication ultérieure en date du 12 mai 1999, le gouvernement présente ses observations sur les points suivants:
  30. a) Contribution des employeurs à la formation des ressources de l'assurance. Dans le nouveau système de pensions, les salariés financent eux-mêmes les prestations pour leur vie «passive». Les employeurs participent néanmoins à la constitution des ressources de l'assurance par le biais, d'une part, de l'augmentation d'un pourcentage sur les salaires qu'ils ont accordée en 1980, augmentation équivalant au montant des cotisations et, d'autre part, des dépôts convenus (depôsitos convenidos). Ces dépôts sont des sommes d'argent qui peuvent être négociées individuellement ou collectivement par le ou les salarié(s) et son employeur et qui sont déposées par l'employeur sur le compte individuel du travailleur (depuis 1992, les dépôts effectués par les employeurs sur les comptes individuels des travailleurs ont été en augmentation constante).
  31. b) Participation des pouvoirs publics à la formation des ressources. Face à la situation de crise dans laquelle se trouvaient les caisses de l'ancien système de prévoyance, l'Etat a délégué la gestion de la branche assurance vieillesse à des sociétés privées (les AFPs), tout en gardant un contrôle important sur ces sociétés à travers la Superintendance des AFPs. Le décret-loi n° 3500 a également prévu la participation de l'Etat à la constitution des ressources dans la mesure où, d'une part, l'Etat garantit une pension minimum aux affiliés quand ceux-ci n'ont pas cumulé le capital nécessaire sur leur compte individuel pour obtenir une pension ou quand l'AFP fait faillite et, d'autre part, l'Etat émet et assure le paiement des bons de reconnaissance (bonos de reconocimiento) qui correspondent aux cotisations versées par les travailleurs sous l'ancien système de prévoyance majorées d'un intérêt annuel de 4 pour cent.
  32. c) Gestion de l'assurance. Le système de capitalisation individuelle mis en place en 1980 confie la gestion des fonds de pensions aux AFPs qui, en échange d'une gestion efficace, perçoivent des commissions à la charge des affiliés. Le caractère lucratif de cette gestion privée a favorisé la concurrence entre les différentes AFPs qui ont cherché à attirer les affiliés en leur offrant un meilleur service, une meilleure rentabilité de leurs investissements et des coûts de fonctionnement moindres. A cet égard, des mesures ont été prises, ces dernières années, pour renforcer la transparence des informations devant être fournies aux affiliés à propos de la rentabilité obtenue par chaque fonds de pensions et des commissions prélevées par chaque AFP de manière à ce que les affiliés soient correctement informés pour pouvoir choisir l'entité qui gérera au mieux leur compte. Les travailleurs ou leurs organisations représentatives peuvent légalement constituer leur propre AFP (article 220 du Code du travail) de manière à exercer un contrôle direct sur la gestion des fonds capitalisés et éventuellement prévoir dans les statuts de leur AFP que les bénéfices obtenus seront redistribués aux travailleurs actionnaires sous la forme d'avantages sociaux. En vertu de cette faculté, les syndicats ou les organisations professionnelles ont constitué cinq AFPs (les AFPs Aporta SA, Future SA, Magister SA, Previpan SA et Fomenta SA). Le capital social de deux d'entre elles continue à être totalement détenu par des organisations de travailleurs (les AFPs Aporta SA et Fomenta SA). Ainsi, même si les AFPs, en leur qualité de sociétés anonymes, poursuivent un but lucratif, certaines connaissent une participation importante des travailleurs ou de leurs organisations représentatives.
  33. d) Participation des assurés à la gestion des institutions d'assurance. Le décret-loi n° 3500 ne prévoit pas de mécanisme obligatoire de participation directe des travailleurs à la gestion des fonds administrés par l'AFP à laquelle ils se sont affiliés mais prévoit, en revanche, le droit de chaque travailleur de s'affilier à l'AFP dont la gestion lui convient le mieux et d'en changer autant de fois qu'il lui semblera opportun. Face aux problèmes financiers et administratifs rencontrés par le régime traditionnel de répartition et dans le but de protéger les fonds de prévoyance des travailleurs et de leur accorder des pensions d'un montant digne, le gouvernement du Chili a mis en place un système d'administration privée des pensions financé par un régime de capitalisation individuelle et supervisé par l'Etat. Il existe actuellement huit AFPs qui cumulaient, au 28 février 1999, 31 029 millions de dollars sur leurs fonds de pensions.
  34. e) Situation des agents de vente des AFPs. Les AFPs ont pris conscience que la guerre commerciale à laquelle elles se livraient pour attirer de nouveaux affiliés n'avait pas permis de réduire le montant des commissions à la charge des affiliés mais accroissait leurs coûts de fonctionnement. Ces coûts découlaient en grande partie du nombre excessif d'ordres de transferts réalisés (1 574 189 transferts pour 3 296 361 cotisants), lui-même favorisé par les pratiques irrégulières auxquelles les agents de vente avaient recours. Une restructuration du système s'est donc révélée nécessaire; elle s'est matérialisée par une réduction du personnel de vente et par la recherche de fusions entre AFPs. Ces fusions et leurs répercussions sur le marché du travail n'ont pas de lien direct avec les circulaires nos 998 et 999 adoptées par la Superintendance des AFPs.
  35. f) Autres informations. Le gouvernement relève que les plaignants omettent de citer les avantages qui découlent du nouveau système. Ainsi, les pensions attribuées aux travailleurs affiliés au nouveau système sont en moyenne supérieures de 40 pour cent à celles attribuées par l'ancien système. Par ailleurs, si les fonds gérés par les AFPs et investis sur le marché financier sont soumis aux fluctuations de ce marché, ils doivent cependant être investis, conformément à la loi, selon certains critères de rentabilité et de sécurité de manière à minimiser les risques de fluctuations. Dans les faits, depuis la création du système, le taux de rentabilité des fonds a dépassé 11 pour cent par an. Compte tenu des répercussions négatives de la baisse du marché des actions en 1998 sur les fonds de pensions, le gouvernement a présenté un projet de loi visant à créer un deuxième fonds dont les ressources devront exclusivement être investies dans des placements à taux fixe. Ce second fonds diminuerait les risques de fluctuation du portefeuille d'investissements. Concernant les coûts d'administration élevés du système, le gouvernement précise que, contrairement aux allégations du syndicat, ces coûts n'atteignent pas 30 pour cent du montant des cotisations des travailleurs puisque ce pourcentage comprend également le coût de l'assurance invalidité et survivants. La commission moyenne prélevée par les AFPs est de 2,7 pour cent, taux duquel il faut soustraire 1 pour cent correspondant au coût de ladite assurance. Enfin, la dette en matière de cotisations de sécurité sociale n'atteint pas 300 millions de dollars comme l'affirment les syndicats mais 171 956 000 dollars, dette pour laquelle les AFPs créditrices ont déjà intenté des actions en recouvrement judiciaire.
  36. 18. Dans une nouvelle communication en date du 21 juillet 1999, le gouvernement a transmis la réponse des dirigeants des AFPs Aporta-Fomenta, Habitat, Santa Maria et Provida aux allégations présentées par les syndicats. Selon ces dirigeants, les imperfections de l'ancien système de sécurité sociale ont conduit à son changement radical. Le système était coûteux; il ne remplissait pas les objectifs qui lui étaient fixés, d'autant moins si l'on considère la part importante du revenu national qui lui était allouée; il était discriminatoire et injuste quant à la manière dont ce revenu était redistribué parmi la population protégée, et insuffisant et inadapté quant à la protection accordée à une grande partie de la population. Le système traversait, en outre, une crise financière grave qui rendait nécessaire une réforme intégrale. Le régime des pensions connaissait quant à lui une importante détérioration du rapport actifs/passifs en raison de l'évolution démographique, de l'augmentation de l'espérance de vie et de la fraude de la part des travailleurs dans le paiement de leurs cotisations. Tous ces éléments ont conduit à une réforme du système de sécurité sociale qui s'éloigne des critères classiques de la sécurité sociale et par conséquent des anciennes conventions pertinentes de l'OIT. Les principales différences entre la législation chilienne (décret-loi n° 3500) et les conventions pertinentes de l'OIT résident dans la nature juridique des entités chargées de gérer les fonds de prévoyance et dans la participation des cotisants à l'administration desdits fonds. En ce qui concerne la nature juridique des entités chargées de gérer les ressources du système, seule la gestion opérationnelle revient aux entités privées (AFPs). En effet, le nouveau système de pensions reste un système public obligatoire établi par la loi. L'administration de ce système relève de l'Etat qui s'est réservé trois fonctions essentielles: un rôle normatif, la surveillance et le contrôle des acteurs du système et principalement les AFPs et, enfin, la responsabilité du bon fonctionnement du nouveau système vis-à-vis des affiliés. Le bon fonctionnement et la transparence du système actuel résultent de la gestion privée des ressources et de la liberté d'affiliation des travailleurs, éléments qui sont à la base d'un modèle compétitif recherchant l'efficacité. En ce qui concerne l'absence de solidarité du système invoquée par les organisations plaignantes, il convient de souligner que, si celui-ci est fondé sur la capitalisation individuelle, il revêt néanmoins des éléments de solidarité. Ainsi, l'assurance invalidité et survivants opère sur la base d'un système de répartition financé par les cotisations de tous les affiliés d'une même AFP; leurs cotisations financent les pensions invalidité ou survivants des affiliés victimes d'un sinistre. Par ailleurs, l'Etat finance les pensions minima sur la base de ressources provenant de l'impôt. Enfin, troisième élément de solidarité du système, les commissions prélevées par les AFPs sont proportionnelles à la rémunération des cotisants. Concernant Y absence de participation des assurés à la gestion des fonds, les dirigeants des AFPs précitées considèrent que le nouveau système de pensions ne nécessite pas que les travailleurs soient représentés par des mandataires, dans la mesure où la loi leur permet d'exercer directement un certain nombre de prérogatives dont la plus importante est de pouvoir changer d'AFP. Les travailleurs qui ne sont pas satisfaits de la gestion menée par leur AFP peuvent en changer pour s'affilier auprès d'une autre dont la gestion leur conviendra mieux. Il est d'autant plus aisé d'accepter la gestion privée au sein du système de pensions que, pour des raisons structurelles, le modèle traditionnel de prévoyance est partout dans le monde en crise, et ce quel qu'en soit le gestionnaire. Dans le système de capitalisation individuelle, la gestion privée et la liberté d'affiliation sont les éléments qui permettent l'efficacité du système dans son ensemble. La problématique n'est pas de savoir qui gère le système mais qui gère le mieux le système. En ce qui concerne les autres inconvénients du système dénoncés par les syndicats (soumission aux fluctuations du marché, coûts d'administration élevés, tendance à la formation de monopoles et insuffisance du système de contrôle) ainsi que la situation des agents de vente des AFPs, les observations présentées par les dirigeants des AFPs précitées sont identiques à celles présentées par le gouvernement et la Superintendance dans les deux premières communications. En conclusion, les dirigeants des AFPs Aporta-Fomenta, Habitat, Santa Maria et Provida reconnaissent que le décret-loi n° 3500 ne permet pas de donner-effet à certaines dispositions des conventions pertinentes de l'OIT. Ceci ne devrait toutefois pas être une cause de préoccupation mais devrait amener à une réflexion sur la nécessité de réviser, soixante ans après leur adoption, certains postulats de ces conventions qui semblent avoir été érigés en principes intangibles. Après quelques réticences initiales, les travailleurs chiliens, quant à eux, ont nettement adhéré au nouveau système de pensions comme le confirme la création d'AFPs dont ils sont propriétaires.
  37. C. Conclusions du comité
  38. Examen antérieur de l'application des conventions nos 35 à 38 par les organes de contrôle de TOIT
  39. 19. Le comité note que, depuis la mise en place du nouveau système de pensions en 1980, l'application par le Chili des conventions nos 35 à 38 a fait l'objet de nombreux commentaires de la part des organes de contrôle de l'OIT. A sa session de novembre 1986, le Conseil d'administration a examiné une réclamation présentée par le Conseil national de coordination syndicale du Chili alléguant l'inexécution par le gouvernement du Chili entre autres des conventions nos 35, 37 et 38. Dans ses conclusions (Note_5), le comité chargé d'examiner ladite réclamation avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre en oeuvre ses recommandations et d'en tenir informé la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, dans le cadre des rapports communiqués au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT. Par la suite, la commission d'experts a soulevé dans de nombreuses observations plusieurs points.au sujet du système privé des pensions introduit par le gouvernement en 1980 qui ne seraient pas compatibles avec certaines dispositions des conventions nos 35 à 38. Par ailleurs, la Commission de l'application des normes de la Conférence a également examiné en 1987, 1992, 1993 et 1995 l'application des conventions précitées. Elle a recommandé, en 1995, au gouvernement d'examiner attentivement les recommandations de la commission d'experts afin de mettre au point les moyens permettant de rendre compatible le nouveau système de pensions avec les conventions. Enfin, à sa session de mars 1999, le Conseil d'administration a examiné une réclamation présentée par le Collège des professeurs du Chili A.G. alléguant l'inexécution par le gouvernement du Chili des conventions nos 35 et 37. Dans ses conclusions (Note_6), le comité chargé d'examiner ladite réclamation s'était déclaré préoccupé par les graves conséquences que le non-pàiement des cotisations de sécurité sociale a sur les droits des travailleurs, notamment en matière de pensions, et a insisté pour que les services compétents exercent leurs fonctions et renforcent leurs activités de contrôle et pour que des sanctions adéquates soient infligées et strictement appliquées, de manière à éviter que les cas de non-paiement des cotisations ne se reproduisent à l'avenir.
  40. 20. Le comité constate que la présente réclamation porte sur le principe de la conformité du régime d'administration privée de la sécurité sociale, mis en place en 1980 par le décret-loi n° 3500, et plus particulièrement la gestion privée des fonds de pensions, avec les conventions nos 35 à 38. Le comité a pris note des informations détaillées fournies sur les questions soulevées par la réclamation et se propose de traiter uniquement des aspects relevant de l'application des dispositions des conventions en cause. Les commentaires d'ordre général formulés par les syndicats et par le gouvernement ne seront pris en compte que dans la mesure où ils concernent l'application d'une disposition particulière des conventions précitées.
  41. 21. Le comité constate également que le gouvernement fournit des informations au sujet de la nature du système ainsi qu'au sujet de la contribution des employeurs à la constitution des ressources de l'assurance et de la participation des pouvoirs publics à la formation des ressources. Dans la mesure où les organisations plaignantes ne font pas référence dans leurs allégations à ces points ni aux dispositions des conventions y relatives, ces informations ne seront pas prises en compte dans le cadre de ce rapport. Le comité considère en revanche nécessaire que ces informations soient examinées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, laquelle a déjà soulevé ces points dans de nombreuses observations.
  42. 22. En ce qui concerne la situation des agents de vente des AFPs, les syndicats plaignants contestent la cause de licenciement invoquée par les AFPs pour procéder au licenciement maçsif de 13 000 agents de vente de services de prévoyance, cause de licenciement qui a privé ces travailleurs de certaines indemnités. Le gouvernement indique pour sa part que ces licenciements résultent de la restructuration du système. Cette restructuration, qui s'est révélée nécessaire pour lutter contre certaines pratiques irrégulières dont usaient lesdits agents et pour réduire les coûts de fonctionnement du système, s'est matérialisée par une réduction du personnel employé. Le comité considère qu'il n'est pas en mesure d'examiner la situation de ces travailleurs étant donné que cette dernière ne concerne pas l'application des conventions dont il est allégué l'inexécution. Elle ne semble pas non plus concerner l'application de toute autre convention ratifiée par le Chili.
  43. 23. Les autres allégations des plaignants portent principalement sur les questions suivantes: a) la gestion des fonds de pensions; b) la participation des assurés à l'administration du système; et c) le système de contrôle en ce qui concerne le versement des cotisations de sécurité sociale.
  44. a) Gestion privée des fonds de pensions
  45. 24. Le comité rappelle que, conformément à l'article 10, paragraphe 1, des conventions nos 35 et 36 et à l'article-11, paragraphe 1, des conventions nos 37 et 38, «l'assurance sera gérée soit par des institutions créées par les pouvoirs publics et qui ne poursuivront aucun but lucratif, soit par des fonds publics d'assurance».
  46. 25. Le comité observe que le système de pensions établi en 1980 par le décret-loi n° 3500 est basé sur un régime de capitalisation individuelle dont la gestion est confiée à des sociétés d'administration des fonds de pensions (AFPs). Celles-ci sont constituées sous la forme de sociétés anonymes de droit privé à but lucratif ce qui n'est pas envisagé par les dispositions susmentionnées des conventions. Les AFPs perçoivent les cotisations de leurs affiliés qu'elles versent sur leur compte individuel de capitalisation et investissent l'ensemble des ressources cumulées sur leurs fonds de pensions selon des critères de rentabilité et de sécurité déterminés par la loi. En contrepartie de cette gestion, les AFPs perçoivent une commission qu'elles prélèvent directement sur le compte individuel de chaque affilié. L'Etat exerce un contrôle sur les AFPs par le biais d'une autorité publique: la Superintendance des AFPs. Il est en outre garant du bon fonctionnement du système vis-à-vis des affiliés.
  47. 26. Le comité estime que, afin de donner effet à l'article 10, paragraphe 1, des conventions nos 35 et 36 et de l'article 11, paragraphe 1, des conventions nos 37 et 38, le système doit être géré par des institutions ne poursuivant aucun but lucratif.
  48. 27. Le comité relève cependant à cet égard, d'après les informations transmises par le gouvernement, que les syndicats et les organisations professionnelles sont légalement habilités à constituer une AFP en détenant une partie ou la totalité du capital social. Lorsque, par le biais de leurs organisations professionnelles, les travailleurs sont les uniques propriétaires de l'AFP, les bénéfices qui résultent de la gestion du fonds leur sont redistribués intégralement. Le comité constate que, conformément au paragraphe 2 de l'article 10 des conventions nos 35 et 36 et au paragraphe 2 de l'article 11 des conventions nos 37 et 38 selon lesquels «la législation nationale pourra également confier la gestion de l'assurance à des institutions créées par l'initiative des intéressés ou de leurs groupements et dûment reconnues par les pouvoirs publics», les organisations professionnelles ont pu participer à la constitution d'AFPs (voir les informations communiquées par le gouvernement, paragraphe 17 c) supra). Aussi le comité estime-t-il qu'il devrait être demandé au gouvernement de fournir dans son prochain rapport sur l'application des conventions des informations détaillées sur: le nombre des AFPs dont le capital social appartient en partie ou totalement aux syndicats ou aux organisations de travailleurs par rapport au nombre total des APPs, le pourcentage du capital détenu par ces organisations, le nombre de travailleurs concernés par rapport au nombre total des travailleurs affiliés au nouveau système de pensions, la constitution de nouvelles AFPs et, le cas échéant, toute nouvelle mesure prise pour favoriser la constitution d'AFPs par les travailleurs ou leurs organisations professionnelles.
  49. b) Participation des assurés à la gestion des AFPs
  50. 28. Le comité rappelle que, conformément à l'article 10, paragraphe 4, des conventions nos 35 et 36 et à l'article 11, paragraphe 4, des conventions nos 37 et 38, «les représentants des assurés participeront à la gestion des institutions d'assurance dans les conditions déterminées par la législation nationale».
  51. 29. Le comité constate que le gouvernement ne conteste pas les allégations des syndicats plaignants selon lesquelles ni les travailleurs ni leurs organisations syndicales ne sont associés à la gestion du système des AFPs. Le gouvernement confirme qu'il n'existe pas de mécanisme obligatoire prévoyant l'intervention des affiliés dans l'administration et la gestion du fonds de pensions administré par leur AFP. Le système privé permet la participation des travailleurs à la gestion des AFPs quand ceux-ci acquièrent un pourcentage du capital social, ce qui leur permet d'exercer tous les droits que la loi reconnaît aux actionnaires. En outre, la législation accorde aux affiliés le droit de changer d'AFP. Les affiliés qui sont en désaccord avec la gestion de leur AFP peuvent s'affilier auprès d'une AFP dont la gestion leur convient davantage.
  52. 30. Lé comité note la possibilité offerte aux travailleurs ou à leurs organisations professionnelles de constituer une AFP ou d'acquérir une partie de son capital social. Il constate toutefois que, dans ces deux hypothèses, la participation à la gestion de l'institution d'assurance ne résulte pas de la qualité d'assuré ou de représentant professionnel mais de la qualité d'actionnaire. La question de la participation des assurés des autres AFPs à la gestion du système demeure dans la mesure où cette participation ne découle pas de la législation en vigueur. Le comité relève que les travailleurs ou leurs représentants participent au capital social d'un nombre limité d'AFPs (voir paragraphe 17 c) supra)alors que, d'après l'ensemble des informations communiquées par le gouvernement, la tendance ne serait pas à la création de nouvelles AFPs mais plutôt à une diminution de leur nombre, diminution résultant notamment de fusions. Le comité considère, par ailleurs, que si la possibilité est offerte à l'affilié de changer d'AFP, et ainsi de pouvoir sanctionner la gestion menée, celle-ci ne saurait être assimilée à une participation de l'assuré à la gestion du système au sens des conventions. Dans ces conditions, le comité estime que la législation et la pratique nationales ne garantissent pas la participation des représentants à la gestion du système.
  53. c) Contrôle du système: problème des arriérés en matière de cotisations de sécurité sociale
  54. 31. Dans leur communication, les syndicats plaignants font état de l'inefficacité du système de contrôle du respect des règles en matière de paiement des cotisations de sécurité sociale et des mécanismes légaux de recouvrement judiciaire des cotisations des travailleurs. Les employeurs déclarent les cotisations de leurs travailleurs sans les verser aux organismes gestionnaires compétents, ce qui a généré une dette en matière de cotisations de sécurité sociale qui, selon les plaignants, atteindrait 300 millions de dollars. Le gouvernement indique pour sa part que cette dette atteint 171 956 000 dollars et que les AFPs créditrices ont déjà intenté les actions en recouvrement judiciaire.
  55. 32. Le comité estime que le versement effectif des cotisations de sécurité sociale est un élément fondamental du bon fonctionnement du système de pensions. Il rappelle à ce sujet que le problème du paiement effectif des cotisations de sécurité sociale par les employeurs aux organismes de prévoyance compétents a déjà été examiné en 1999, dans le cadre de la réclamation présentée par le Collège des professeurs du Chili A.G. Bien que la situation examinée concernait plus spécifiquement les cotisations du personnel enseignant, le comité juge utile de rappeler certaines conclusions que le comité désigné pour examiner ladite réclamation avait formulées (Note_7), notamment en ce qui concerne la responsabilité de l'Etat dans le contrôle administratif et financier de la gestion de l'assurance, découlant de l'article 10, paragraphe 5, des conventions nos 35 et 36 et de l'article 11, paragraphe 5, des conventions nos 37 et 38 (Note_8). Ainsi, l'Etat ne peut se désintéresser des résultats de la gestion de l'assurance confiée aux institutions autonomes et doit se réserver un droit de contrôle. L'Etat est responsable de l'application intégrale et conforme à la loi des dispositions gouvernant le système d'assurance, y compris celles relatives au paiement des cotisations.
  56. 33. Le comité considère que le montant des cotisations de sécurité sociale impayées dont fait état le gouvernement né doit pas être sous-estimé. Il insiste, en conséquence, pour que les services compétents exercent et renforcent leurs activités de contrôle sur les employeurs et pour que des sanctions dissuasives soient infligées afin d'éviter de nouveaux cas de non- paiement des cotisations de sécurité sociale qui, en accroissant la dette y afférente, pourraient avoir des répercussions sur la viabilité et la crédibilité du système. Le gouvernement devrait être invité à préciser dans ses prochains rapports sur l'application des conventions le montant des cotisations encore dues et à fournir des informations sur l'issue des procédures de recouvrement judiciaire initiées (Note_9).
  57. 34. En conclusion, le comité constate que, depuis la mise en place du nouveau système de pensions en 1980 par le décret-loi n° 3500, certaines dispositions des conventions nos 35 à 38 ne sont pas appliquées. Les organes de contrôle de l'OIT ont demandé depuis de nombreuses années au gouvernement de prendre les mesures pertinentes pour modifier le décret-loi précité. A cet effet, le comité suggère au gouvernement, comme l'ont déjà suggéré la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations et la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail, d'envisager la possibilité d'avoir recours à l'assistance technique du BIT afin d'examiner de quelle manière la législation et la pratique nationales pourraient donner effet à ces conventions.
  58. 35. Le comité tient également à rappeler la décision prise par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996), invitant les Etats parties aux conventions nos 35 à 40 à envisager la possibilité de ratifier la convention (n°128) concernant les prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants, 1967, et, le cas échéant, à dénoncer à cette occasion les conventions nos 35 à 40 étant donné que le Conseil d'administration a décidé de mettre à l'écart avec effet immédiat ces dernières conventions. Le comité estime que le gouvernement devrait être invité à fournir des informations sur les mesures qui auraient été prises en vue de donner suite à cette décision du Conseil d'administration.
  59. III. Recommandations du comité
  60. 36. Le comité recommande au Conseil d'administration:
  61. a) d'approuver le présent rapport;
  62. b) de prier le gouvernement du Chili, compte tenu des conclusions qui figurent aux paragraphes 18 à 35 du rapport ainsi que dans les observations formulées par la commission d'experts depuis de nombreuses années, de prendre les mesures nécessaires pour que:
  63. i) le système soit géré par des institutions ne poursuivant aucun but lucratif, conformément aux dispositions des conventions nos 35 et 36 (article 10, paragraphe 1) et des conventions nos 37 et 38 (article 11, paragraphe 1), sous réserve des cas où la gestion serait confiée à des institutions créées par l'initiative des intéressés ou de leurs groupements et dûment reconnues par les pouvoirs publics, conformément aux conventions nos 35 et 36 (article 10, paragraphe 2) et aux conventions nos 37 et 38 (article 11,paragraphe 2).
  64. ii) les représentants des assurés participent à la gestion du système dans les conditions déterminées par la législation nationale, conformément aux dispositions des conventions nos 35 et 36 (article 10, paragraphe 4) et des conventions n°s 37 et 38 (article 11,paragraphe 4).
  65. iii) les services compétents exercent et renforcent leurs activités de contrôle sur les employeurs et que des sanctions adéquates soient infligées afin d'éviter de nouveaux cas de non-paiement des cotisations de sécurité sociale;
  66. c) d'inviter le gouvernement à fournir, dans les prochains rapports qu'il devra présenter en vertu de l'article 22 de la Constitution de VOIT, des informations complètes sur les mesures prises pour donner effet aux recommandations formulées aux paragraphes qui précèdent ainsi que les informations demandées aux paragraphes 27, 33 et en particulier au paragraphe 35 des conclusions du présent rapport afin de permettre à la Commission d'expert pour l'application des conventions et recommandations de poursuivre l'examen des problèmes soulevés par l'application des conventions;
  67. d) de déclarer close la procédure engagée devant le Conseil d'administration à la suite de la réclamation des syndicats nationaux de travailleurs de sociétés d'administration des fonds de pensions susmentionnés relative à l'application par le Chili des conventions nos 35 à 38.
  68. Genève, le 28 mars 2000.
  69. (Signé)
  70. M. V. Rodriguez Cedeno,
  71. Président.
  72. M. D.C.L. Funes de Rioja.
  73. M. J.O. Miranda Oliveira.
  74. Point appelant une décision: paragraphe 36.
  75. Note 1
  76. Conventions nos. 35, 36, 37 et 38 ratifiées le 18 octobre 1935
  77. Note 2
  78. Voir Bulletin officiel, vol. LXIV, 1981, série A, n° 1, pp. 99-101.
  79. Note 3
  80. Document GB .273/15/4 et procès-verbaux de la 273e session, document GB.273/PV (Rev.), p. VI/I.
  81. Note 4
  82. Document GB.276/16/2 et procès-verbaux de la 276e session, document GB. 276/PV (Rev.).
  83. Note 5
  84. Document GB.234/23/28.
  85. Note 6
  86. Document GB.274/16/4.
  87. Note 7
  88. Document GB.274/16/4, paragr. 26.
  89. Note 8
  90. Selon ces dispositions, «les institutions d'assurance autonomes seront placées sous le contrôle financier et administratif des pouvoirs publics».
  91. Note 9
  92. Voir à cet égard l'observation relative à l'application de la convention n° 35 formulée en 1999 par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
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