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RECLAMATION (article 24) - PEROU - C004, C041, C045, C102 - 1996

1. Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP)

Clos

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Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution par le Pérou de la convention (n° 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919; de la convention (n° 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934; et de la convention (n° 45) des travaux souterrains (femmes), 1935

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution par le Pérou de la convention (n° 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919; de la convention (n° 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934; et de la convention (n° 45) des travaux souterrains (femmes), 1935

Decision

Decision
  1. Convention no. 102: non-recevable. Procédure close (GB. 264/17/2). Conventions nos. 4, 41 et 45: le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. I. Introduction
  2. 1. Dans une communication datée du 21 août 1995, la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP), invoquant l'article 24 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, a adressé au Bureau une réclamation alléguant l'inexécution par le gouvernement du Pérou de la convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, de la convention (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934, et de la convention (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935. Le Pérou a ratifié ces trois conventions le 8 novembre 1945.
  3. 2. Les dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail relatives à la présentation des réclamations sont les suivantes:
  4. Article 24
  5. Toute réclamation adressée du Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  6. Article 25
  7. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  8. 3. La procédure à suivre en cas de réclamation est régie par le Règlement révisé par le Conseil d'administration à sa 212e session (mars 1980).
  9. 4. En vertu de l'article 2, paragraphe 1, de ce Règlement, le Directeur général a transmis la réclamation au bureau du Conseil d'administration.
  10. 5. A sa 264e session, le Conseil d'administration, se fondant sur la rapport présenté par son bureau, a décidé que la réclamation était recevable pour ce qui est des conventions nos 4, 41 et 45 et a désigné un comité chargé de l'examiner, composé de M. Ducreux (membre gouvernemental, Panama, président), de M. Durling (membre employeur, Panama) et de M. Ramirez Leon (membre travailleur, Venezuela). Conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphe 1, alinéas a) et c), du Règlement, le comité a invité le gouvernement à fournir, avant le 1er février 1996, les observations qu'il jugerait utile de communiquer au sujet de la réclamation. Le gouvernement a communiqué ses observations par une lettre datée du 5 février 1996 (reçue au Bureau le 4 mars 1996).
  11. 6. Le comité s'est réuni à Genève le 19 juin 1996 afin d'examiner la réclamation ainsi que les observations reçues.
  12. II. Examen de la réclamation
  13. 1. Allégations présentées par la Confédération générale des travailleurs du Pérou
  14. 7. La Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) allègue que le Pérou, en adoptant la loi no 26513 qui abroge un certain nombre de textes législatifs et réglementaires antérieurs, n'assure pas l'application des dispositions des conventions (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934, et (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935.
  15. 8. L'adoption de cette loi, approuvée par le pouvoir exécutif par le décret présidentiel no 5-95 TR (publié au journal officiel "El Peruano" du 18 août 1995), a entraîné l'abrogation des dispositions qui avaient institué la limitation du travail de nuit des femmes et des mineurs, la durée maximale de la journée de travail normale pour ces deux catégories de travailleurs, l'interdiction d'employer des femmes dans les mines et les travaux souterrains et -- en général -- dans tous les milieux qui pourraient présenter un danger pour leur santé. Ont également été abrogées les dispositions relatives à l'octroi d'une heure journalière rémunérée pendant laquelle les femmes étaient autorisées à allaiter leur enfant de moins d'un an, à l'obligation de créer ou d'aménager un local faisant office de crèche et qui puisse accueillir des enfants de moins d'un an, à la possibilité d'accorder des allocations spéciales en cas de licenciements arbitraires dont seraient victimes les femmes, et particulièrement les femmes enceintes, etc. En conséquence, la CGTP estime que le gouvernement du Pérou ne respecte pas l'obligation d'appliquer et de rendre effectives les dispositions des conventions internationales du travail précitées.
  16. 2. Observations présentées par le gouvernement du Pérou
  17. 9. Dans ses observations, le gouvernement reconnaît que la troisième disposition complémentaire, transitoire, abrogative et finale de la loi no 26513, qui modifie le décret no 728, abroge les deux lois nos 2851 et 4239 qui prévoyaient des avantages pour les femmes au travail.
  18. 10. Le gouvernement indique qu'à l'évidence l'abrogation de ces deux lois semble laisser un vide juridique pour ce qui est de l'interdiction de travailler des femmes dans des milieux qui affectent leur santé comme les mines ou les carrières. Il rappelle cependant que les conventions ratifiées par l'Etat sont incorporées à l'ordre juridique péruvien et qu'il n'est pas nécessaire que des lois répètent ce qui est contenu dans les conventions sauf à le développer avec plus de précisions. L'interdiction est toujours en vigueur dans la mesure où les conventions ratifiées n'ont pas été dénoncées. Aucune disposition législative ou réglementaire permettant les travaux souterrains pour les femmes n'ayant été adoptée, aucune violation de cette convention n'en est résultée.
  19. 11. Le cas des conventions nos 4 et 41 qui établissent des limitations au travail de nuit des femmes est, aux yeux du gouvernement, différent. Il existe dans la société péruvienne des possibilités de travail posté, notamment de nuit, ce qui, joint à la demande toujours plus grande d'emploi des jeunes qui entrent sur le marché du travail, rend difficile, sinon impossible, de maintenir ces restrictions.
  20. 12. Le gouvernement précise que la Commission spéciale chargée d'élaborer l'avant-projet de loi relatif à la mère travailleuse, composée de représentants du gouvernement, des employeurs et des travailleurs, a recommandé au Cabinet ministériel, par une communication datée du 14 novembre 1995, la dénonciation des conventions nos 4 et 41 sur le travail de nuit des femmes et no 45 des travaux souterrains (femmes), afin de replacer la problématique de la femme travailleuse dans un contexte juridique cohérent. Le gouvernement péruvien n'a pas eu l'intention de violer des conventions et n'a pas adopté de mesures qui les violeraient. Il existe au contraire une volonté de promouvoir un meilleur emploi de la main-d'oeuvre féminine en égalisant le coût de celle-ci sur le coût de la main-d'oeuvre masculine.
  21. 13. Le gouvernement conclut de ce qui précède que la réclamation de la CGTP doit être rejetée.
  22. 3. Examen de l'application des conventions par les organes de contrôle de l'OIT
  23. 14. La Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a envoyé directement au gouvernement des demandes sur l'application de la convention (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934. La dernière demande directe (1994) constatait qu'un projet de loi qui aurait eu pour conséquence de modifier la période de nuit prévue par la loi no 2851, dans un sens qui n'aurait pas été conforme aux dispositions de la convention, n'avait pas été adopté et que les dispositions de la loi no 2851, donnant effet à la convention no 41, étaient maintenues. En outre, la commission avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l'application pratique de l'article 1 du décret-loi no 25921 du 27 novembre 1992, qui concerne la procédure de modification des postes de travail, des jours et des heures de travail. Il n'y a pas de commentaires pendants concernant les conventions (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, et (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935.
  24. III. Conclusions du comité
  25. 15. Le comité rappelle que sa compétence est limitée à l'examen de l'application par le Pérou des conventions (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934, et (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935, conformément à la décision adoptée par le Conseil d'administration du BIT, à sa 264e session, sur la base du rapport présenté par son bureau (Note 1). En conséquence, conformément au mandat qui lui a été confié par le Conseil d'administration, le comité n'examinera les allégations de l'organisation réclamante et les observations du gouvernement que pour autant qu'elles concernent des conventions pour lesquelles le Conseil d'administration a considéré que la réclamation était recevable (Note 2).
  26. 16. Compte tenu des éléments à sa disposition, le comité note que le gouvernement reconnaît dans ses observations que la nouvelle législation a pour effet d'abroger les lois nos 2581 et 4239 qui assuraient l'application en droit des obligations souscrites par le Pérou en ratifiant les conventions nos 4, 41 et 45. Il relève que le gouvernement développe deux arguments à l'appui de sa position selon laquelle il n'y a eu ni violation ni intention de ne pas respecter les conventions internationales du travail ratifiées.
  27. 17. Le premier de ces arguments, qui ne concerne que la convention no 45 des travaux souterrains (femmes), est fondé sur le fait que, au Pérou, les conventions internationales du travail étant incorporées à l'ordre juridique interne s'appliquent automatiquement dans la mesure où il n'existe pas dans la législation nationale de dispositions contraires. Le comité rappelle à cet égard les principes qui ont été constamment soutenus par la commission d'experts et la Commission de la Conférence en vertu desquels:
  28. a) l'incorporation dans le droit national des dispositions des conventions ratifiées, du seul fait de la ratification, ne suffit pas à leur donner effet sur le plan interne dans tous les cas où les dispositions ne sont pas self-executing, c'est-à-dire appellent des mesures spéciales pour être mises en application;
  29. b) la nécessité de telles mesures apparaît en outre spécialement dans la plupart des cas lorsqu'une loi postérieure à la ratification introduit des normes incompatibles avec celles qu'établit une convention ratifiée;
  30. c) des mesures spéciales sont également nécessaires pour prévoir des sanctions en cas d'inobservation des normes contenues dans les conventions ratifiées (Note 3).
  31. 18. Le comité relève que le fait de ne pas avoir adopté une législation ou une réglementation qui autoriserait le travail souterrain des femmes dans les mines ne saurait être considéré comme une mesure suffisante pour assurer que la convention, quand bien même elle serait incorporée à l'ordre juridique péruvien, soit appliquée en droit. Le comité considère que des mesures de publicité appropriées doivent être prises pour que tous les intéressés soient informés de la portée des modifications apportées à la législation nationale et pour éviter ainsi toute incertitude quant à l'état du droit applicable.
  32. 19. Le second argument, fondé sur des questions d'opportunité, concerne les conventions nos 4 et 41 qui interdisent l'emploi de nuit des femmes à des travaux manuels dans l'industrie. Le comité note qu'il ressort des explications fournies par le gouvernement que la réglementation donnant effet à ces instruments a été abrogée pour des raisons de fait, la volonté de promouvoir un meilleur emploi de la main-d'oeuvre féminine en égalisant le coût de celle-ci sur le coût de la main-d'oeuvre masculine. Il résulte de cette abrogation que, tant que ces instruments sont en vigueur pour le Pérou, les obligations internationales souscrites par ce pays en les ratifiant ne sont pas respectées, notamment vis-à-vis des Etats Membres qui sont liés par ces conventions.
  33. 20. Le comité rappelle que la Conférence internationale du Travail a adopté, en 1990, une convention no 171 et une recommandation no 178 sur le travail de nuit et un protocole relatif à la convention no 89 sur le travail de nuit (femmes) qui répondent, en utilisant des approches différentes, tant aux préoccupations concernant l'emploi des femmes, préoccupations que le gouvernement du Pérou partage avec un grand nombre d'autres Etats Membres, qu'à la protection contre des formes de travail qui ont des conséquences négatives sur la santé et la vie familiale et sociale des travailleurs.
  34. IV. Recommandations du comité
  35. 21. A la lumière des conclusions qui précèdent, le comité recommande au Conseil d'administration:
  36. a) d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions formulées aux paragraphes 18 et 19, concernant l'application en droit de la convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, de la convention (no 41) (révisée) du travail de nuit (femmes), 1934, et de la convention (no 45) des travaux souterrains (femmes), 1935;
  37. b) d'inviter le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect des obligations qu'il a souscrites en ratifiant ces conventions et, dans le cadre des rapports dus en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT, à fournir des informations sur les mesures prises à cet égard;
  38. c) de déclarer close la présente procédure.
  39. Note 1
  40. Document GB.264/17/2.
  41. Note 2
  42. Sur proposition du bureau du Conseil, le Conseil d'administration a considéré que la réclamation portant sur l'application de la convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, n'était pas recevable, la réclamation n'indiquant pas sur quels points le Pérou n'aurait pas assuré l'application effective de cet instrument.
  43. Note 3
  44. CIT, 47e session, rapport III (4A), rapport général, paragr. 35; voir également CIT, 54e session, rapport III (4A), rapport général, paragr. 18-19.
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