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RECLAMATION (article 24) - ESPAGNE - C111, C117 - 1987

1. Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat

Clos

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Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT et alléguant l'inexécution par l'Espagne de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et de la convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962

Rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT et alléguant l'inexécution par l'Espagne de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et de la convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962

Decision

Decision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. I. Introduction
  2. 1. Par une lettre en date du 3 juin 1986, la Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat, invoquant l'article 24 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, a présenté une réclamation alléguant l'inexécution par l'Espagne de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et de la convention no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962.
  3. 2. Cette réclamation fait référence à deux conventions ratifiées par l'Espagne et qui demeurent en vigueur pour ce pays (Note 1).
  4. 3. Les dispositions pertinentes de la Constitution de l'OIT relatives à la présentation de réclamations sont les suivantes:
  5. Article 24
  6. Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  7. Article 25
  8. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  9. 4. La procédure qui doit être suivie en cas de réclamation est régie par le Règlement révisé adopté par le Conseil d'administration à sa 212e session (mars 1980) (Note 2).
  10. 5. En vertu des articles 1 et 2, paragraphe 1, de ce Règlement, le Directeur général a accusé réception de la réclamation, en a informé le gouvernement de l'Espagne et l'a transmise au bureau du Conseil d'administration.
  11. 6. A sa 234e session (novembre 1984), le Conseil d'administration, sur recommandation de son bureau, a décidé que la réclamation était recevable et a institué un comité chargé de l'examiner, composé de M. Gabriel Ducray (membre gouvernemental, France, président), Mme Lucia Sasso-Mazzufferi (membre employeur, Italie) et M. Ramón Antonio Baldassini (membre travailleur, Argentine). M. Ducray ne faisant plus partie de la délégation du gouvernement de la France au Conseil d'administration, ce dernier a désigné M. Giovanni Falchi (membre gouvernemental, Italie) pour le remplacer au sein du comité (Note 3).
  12. 7. En vertu de l'article 4, paragraphe 1, alinéas a) et c), du Règlement, le comité a décidé: a) d'inviter la fédération plaignante à fournir, avant le 28 février 1987, tous renseignements complémentaires qu'elle souhaiterait porter à la connaissance du comité; b) d'inviter le gouvernement à présenter ses observations au sujet de la réclamation avant le 28 février 1987, étant entendu que les renseignements complémentaires qu'aurait fournis la fédération plaignante seraient également communiqués au gouvernement. Le comité a décidé par la suite de prolonger jusqu'au 15 avril 1987 le délai fixé au gouvernement pour présenter ses observations.
  13. 8. La fédération plaignante a fourni des renseignements complémentaires par lettres en date du 19 janvier et du 11 février 1987; ces renseignements furent communiqués immédiatement au gouvernement.
  14. 9. Le gouvernement a présenté, par communications en date du 6 février et du 15 avril 1987, ses observations au sujet des allégations formulées par la fédération plaignante.
  15. 10. Le comité s'est réuni une première fois en novembre 1986, puis à nouveau en mars et juin 1987, et finalement en novembre 1987 pour adopter son rapport.
  16. II. Examen de la réclamation
  17. 1. Allégations présentées
  18. 11. La fédération plaignante allègue un traitement discriminatoire qui, selon elle, se traduit, en particulier, par une augmentation de salaire inférieure à celle que la loi des budgets généraux de l'Etat a prévue en faveur des travailleurs de l'administration publique à laquelle les membres de la fédération en question ont été intégrés.
  19. 12. La fédération plaignante signale que, par décret-loi royal no 23/77 du 1er avril 1977, les stations radiophoniques ainsi que les quotidiens du "Movimiento" dissous ont été absorbés, dans le cadre de la restructuration, par un nouvel organisme autonome d'Etat appelé "Moyens de communication sociale de l'Etat" (MCSE). Le décret royal no 1434/79 du 16 juin 1979 a établi dans son article premier l'obligation de respecter en tout cas les droits élémentaires relatifs à l'équivalence professionnelle dans le nouvel emploi et à la rémunération des travailleurs qui exerçaient leur activité dans l'un des quotidiens absorbés par le MCSE lorsque ces travailleurs ont été intégrés à l'administration publique.
  20. 13. Conformément à la loi no 11/82 du 13 avril 1982, l'organisme autonome MCSE a été supprimé et, en vertu du décret royal no 1357/83 du 25 janvier 1983, le processus de vente aux enchères de 21 des 27 périodiques qui continuaient à paraître a pris fin en mai 1984. La fédération précise qu'environ 4.000 travailleurs étaient employés dans ces journaux.
  21. 14. D'après la fédération plaignante, le décret royal no 1434/79 qui prévoyait que "l'administration de l'Etat se subrogera en ce qui concerne les droits et obligations découlant de la relation de travail actuellement établie entre le personnel mentionné et l'organisme autonome Moyens de communication sociale de l'Etat" implique par conséquent, outre le respect des droits professionnels, la reconnaissance par l'administration de l'Etat des "bénéfices sociaux et autres avantages" prévus par la convention collective du MCSE approuvée par la Direction générale du travail le 16 mai 1983.
  22. 15. La fédération plaignante indique que, lorsque les nouvelles conventions collectives des ministères dans lesquels se trouvent des travailleurs du MCSE ont été négociées, ces travailleurs ont été considérés comme une entité particulière; c'est pourquoi, selon elle, l'administration de l'Etat n'a pas tenu compte des droits qui leur avaient été reconnus antérieurement, ce qui constitue un acte discriminatoire. La fédération plaignante relève que cette situation a été reconnue par certains tribunaux et se réfère à cet égard à une série d'arrêts rendus par divers tribunaux, tout en indiquant que le gouvernement ne les a pas encore exécutés.
  23. 16. La fédération estime que, conformément aux dispositions du décret royal no 1434/79, la subrogation de l'administration de l'Etat aux droits et obligations du personnel qui s'intègre à celle-ci suppose le respect de tous les droits et expectatives, c'est pourquoi le droit aux augmentations de salaire ne doit être ni modifié ni restreint. En outre, les conditions plus avantageuses dont ils bénéficiaient doivent être maintenues dans la nouvelle relation de travail et être considérées comme droits acquis.
  24. 17. Selon la fédération, il importait de respecter les dispositions de l'article 3, paragraphe 3, de la Charte des travailleurs sous peine de contrevenir aux dispositions de l'article 14 de la Constitution espagnole, ainsi que de l'article 17 de ladite Charte et, par conséquent, de l'article 14, paragraphe 1, alinéa i), de la convention no 117 et de l'article premier, paragraphe 1, alinéas a) et b), de la convention no 111.
  25. 18. La fédération plaignante estime que les dispositions relatives aux conventions collectives régissant les relations de travail dans chaque ministère ne doivent pas aller à l'encontre d'une obligation de caractère international assumée par le gouvernement de l'Espagne.
  26. 19. La fédération plaignante estime également que ses membres font l'objet de discriminations non seulement sur le plan de leurs salaires, mais encore sur celui de leurs activités professionnelles, car ils ne peuvent exercer des activités en rapport avec leur formation et leur expérience; par ailleurs, l'administration de l'Etat n'a pas accordé à la fédération des travailleurs du MCSE la représentativité requise afin de pouvoir participer à la négociation collective.
  27. 2. Observations du gouvernement
  28. 20. Dans sa réponse, le gouvernement précise, en premier lieu, que les conditions de travail du personnel de l'administration de l'Etat peuvent être régies par divers accords ou conventions. Le gouvernement indique à ce propos qu'une réduction du nombre des conventions collectives en vigueur est en cours. Il signale à cet égard le dernier accord-cadre du 31 janvier 1986, au bénéfice du personnel de l'administration de l'Etat, de ses organismes autonomes et de l'administration de la sécurité sociale, conclu avec les organisations syndicales les plus représentatives. Le chapitre XI.B dudit accord prévoit une série de dispositions tendant à réglementer les éventuels surplus de salaire d'un ou de plusieurs groupes de travailleurs de l'administration par rapport à d'autres groupes. Ces dispositions réglementent également l'application du principe de compensation et d'absorption prévu à l'article 26, paragraphe 4, de la Charte des travailleurs concernant le surplus de rémunération personnelle lié aux augmentations annuelles de salaire susceptibles d'être accordées aux travailleurs de l'administration de l'Etat.
  29. 21. Le gouvernement signale que, lorsque la dissolution de l'organisme autonome MCSE a été décidée, les travailleurs de cet organisme ont été intégrés aux services de l'administration de l'Etat, de ses organismes autonomes, des communautés autonomes et de l'administration de la sécurité sociale. Cette intégration avait été prévue par les décrets royaux nos 1434/79, du 16 juin 1979, et 60/84, du 11 janvier 1984.
  30. 22. Le gouvernement précise que les modalités de l'intégration du personnel du MCSE ont fait l'objet de négociations et de diverses conventions collectives. Ces conventions prévoient pour les travailleurs du MCSE un traitement plus favorable que celui qui leur serait appliqué au titre de la Charte des travailleurs, en particulier de son article 26, alinéa 4 (Note 4). Le gouvernement indique que cette disposition supposerait, pour des temps de travail égaux et les mêmes catégories professionnelles, la compensation et l'absorption à 100 pour cent de toute augmentation de rémunération de ces travailleurs qui percevraient ainsi, dans l'ensemble et sur une année, des salaires plus élevés que ceux fixés par la convention collective applicable aux autres travailleurs. Le gouvernement précise encore à ce sujet que les travailleurs du MCSE ont été affectés à leurs nouveaux postes avec des rémunérations supérieures à celles prévues par les conventions qui leur étaient applicables en vertu de leur intégration à l'administration de l'Etat.
  31. 23. Le gouvernement signale aussi que, d'une manière générale, les conventions antérieures à l'entrée en vigueur de l'accord-cadre du 31 janvier 1986 avaient adopté la solution proposée par l'Instruction du secrétariat d'Etat aux Finances, d'avril 1985. Cette solution reposait sur les points suivants: i) l'alignement au cours de l'année 1985 des catégories professionnelles des travailleurs du MCSE à la date de la dissolution de leur organisme d'origine sur celles prévues par la nouvelle convention collective d'application, selon les termes du décret royal no 1434/79. Cet alignement devait être effectué par le ministère ou l'organisme autonome auquel seraient intégrés ces travailleurs et avec leur participation; ii) l'alignement des rémunérations par la fixation des salaires et de leurs suppléments en fonction de la catégorie professionnelle. La différence entre le total de ces rémunérations et celles perçues en 1984 constituerait un supplément personnel qui ferait l'objet de la compensation et de l'absorption prévues à l'article 26, paragraphe 4, de la Charte des travailleurs. L'Instruction susmentionnée précisait que ce supplément pourrait être absorbé et compensé par toute augmentation de rémunération susceptible d'être décidée conformément aux futures lois des budgets généraux de l'Etat ainsi que par les augmentations de caractère complémentaire (ancienneté, affectation et changement de poste, etc.), à la seule exception des heures supplémentaires, des indemnités et autres prestations spéciales.
  32. 24. Ces mécanismes de compensation et d'absorption devaient permettre de réduire progressivement la différence de traitement jusqu'à sa disparition complète, la rémunération devenant alors identique pour les mêmes catégories de travailleurs, aussi bien ceux qui travaillent déjà dans l'administration de l'Etat que ceux qui y ont été intégrés. De leur côté, les représentants de l'administration de l'Etat pouvaient proposer à la commission de négociation de chaque ministère ou organisme que ce supplément soit réglementé de façon à être garanti jusqu'à un maximum de 50 pour cent de l'augmentation relative à la catégorie professionnelle ou au niveau salarial de chaque travailleur.
  33. 25. Au cas où certains travailleurs provenant du MCSE n'accepteraient pas l'application du régime de rémunération et de travail en vertu de la convention applicable au sein du ministère ou de l'organisme d'affectation, notamment en ce qui concerne l'horaire de travail et d'autres conditions, l'absorption des suppléments serait totale, quelles que soient les augmentations, jusqu'à ce que la différence de rémunération disparaisse complètement. De plus, les travailleurs en question avaient la possibilité de mettre fin à la relation de travail existante et recevaient, le cas échéant, l'indemnisation correspondante.
  34. 26. Le gouvernement précise qu'en application de l'Instruction du secrétariat d'Etat aux Finances du 19 avril 1985 ainsi que de l'accord-cadre du 7 février 1986, mentionnés ci-dessus, les différentes situations dans les ministères ou organismes de l'Etat auxquels ont été intégrés les anciens travailleurs du MCSE entraînent également des traitements différents.
  35. 27. Le gouvernement signale que les conventions collectives sont négociées avec les organisations de travailleurs les plus représentatives de chaque ministère et organisme de l'Etat, conformément aux dispositions de l'article 87 de la Charte des travailleurs et des articles 6 et 7 de la loi organique sur la liberté syndicale. Il relève que la Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat ne jouit pas de la représentativité adéquate et, partant, n'est pas habilitée à la négociation collective en vertu des dispositions ci-dessus.
  36. 28. Le gouvernement estime que l'application des principes contenus dans l'Instruction du secrétariat d'Etat aux Finances du 19 avril 1985 et dans l'accord-cadre du 7 février 1986 ne constitue pas un traitement discriminatoire. Il signale à ce propos que le Tribunal constitutionnel, dans sa sentence no 21/82 du 14 juin 1982 relative à l'interprétation de l'article 14 de la Constitution espagnole, a arrêté que:
  37. L'égalité à laquelle se réfère l'article 14, c'est-à-dire l'égalité juridique ou égalité devant la loi, ne comporte pas nécessairement une égalité matérielle ou une égalité économique réelle et effective. Cela signifie que lorsqu'il y a des situations de fait semblables, des suites juridiques semblables doivent également leur être réservées et que, pour tenir compte de différences entre les situations de fait, il importe de constater l'existence d'une justification suffisante d'une telle différence de sorte qu'elle apparaisse à la fois fondée et raisonnable, conformément aux critères et jugements de valeur généralement acceptés.
  38. 29. Le gouvernement souligne que l'application des principes énoncés ci-dessus n'est pas contraire aux dispositions de l'article 3, paragraphe 3, de la Charte des travailleurs (Note 5), comme la fédération plaignante l'allègue, car l'application de l'Instruction du secrétariat d'Etat aux Finances de 1985 et de l'accord-cadre de 1986 est plus favorable aux travailleurs du MCSE intégrés aux ministères ou organismes de l'Etat que l'application des dispositions de l'article 26, paragraphe 4, de ladite Charte.
  39. 30. Le gouvernement fait également observer qu'il ne découle de la loi des budgets généraux de l'Etat, qui établit en dernier ressort le plafond des dépenses publiques relatives aux dépenses de personnel, aucun droit subjectif ni prétention individuelle pour le travailleur. En d'autres termes, la loi des budgets définit les augmentations de rémunération en fonction de la masse salariale globale et non pas des rémunérations individuelles qui font l'objet des négociations collectives au sein des ministères et des organismes de l'Etat. Lorsqu'il y a des différences sur le plan individuel et que des mesures sont prises pour aligner les rémunérations des travailleurs dont les fonctions sont identiques, comme c'est le cas en l'occurrence, le gouvernement estime que l'on ne contrevient pas au principe de la non-discrimination mais que l'on tend, au contraire, à sa pleine réalisation.
  40. 31. Le gouvernement rappelle que c'est dans ce contexte que la loi des budgets prévoit l'avis obligatoire du ministère de l'Economie et des Finances, qui a précisément pour objet de vérifier que les révisions de salaires, qu'elles soient unilatérales ou conventionnelles, restent dans les limites des dépenses publiques établies par la loi des budgets généraux de l'Etat. Selon le gouvernement, cet avis obligatoire n'a aucun effet sur l'existence et la validité des conventions collectives conclues conformément aux dispositions du Titre II de la Charte des travailleurs.
  41. 32. Enfin, en formulant certaines considérations relatives au contenu des décisions des tribunaux, le gouvernement signale dans ses observations que, respectant scrupuleusement ces décisions, il ne s'opposera en aucune façon à leur exécution, même si, dans certains cas, il pouvait y avoir un retard pour des raisons de procédure.
  42. 3. Conclusions du comité
  43. 33. Le comité note que la situation visée par la réclamation a trait à l'application de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, ainsi que de la convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962, l'une et l'autre ratifiées par l'Espagne et actuellement en vigueur. Les ratifications ont été enregistrées en 1967 et 1973 respectivement. L'article 1, paragraphe 1, alinéas a) et b), de la convention no 111 est rédigé comme suit:
  44. 1. Aux fins de la présente convention, le terme "discrimination" comprend:
  45. a) toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d'altérer l'égalité de chances ou de traitement en matière d'emploi ou de profession;
  46. b) toute autre distinction, exclusion ou préférence ayant pour effet de détruire ou d'altérer l'égalité de chances ou de traitement en matière d'emploi ou de profession, qui pourra être spécifiée par le Membre intéressé après consultation des organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs, s'il en existe, et d'autres organismes appropriés.
  47. L'article 14, paragraphe 1, alinéa i), de la convention no 117 est rédigé comme suit:
  48. 1. Ce devra être l'un des buts de la politique sociale de supprimer toute discrimination entre les travailleurs fondée sur la race, la couleur, le sexe, la croyance, l'appartenance à un groupement traditionnel ou l'affiliation syndicale, en matière de:
  49. ...
  50. i) taux de salaire, ceux-ci devant être établis conformément au principe "à travail égal, salaire égal", dans un même processus et une même entreprise.
  51. 34. Aux fins de l'analyse des allégations présentées par la fédération plaignante, en relation avec les dispositions des conventions précitées, le comité estime opportun de rappeler les objectifs généralement reconnus de ces deux instruments.
  52. 35. L'objectif de la convention no 117 est de promouvoir le progrès social par l'application progressive des normes pertinentes (Note 6). Ce principe est rappelé dans les dispositions de l'article 14 citées plus haut.
  53. 36. Pour la convention no 111, "l'objectif fondamental ... est l'existence et l'application dans tout Etat d'une politique nationale visant à promouvoir l'égalité de chances et de traitement en matière d'emploi et de profession afin d'éliminer toute discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale" (Note 7).
  54. 37. En tout état de cause, on peut affirmer que ces deux instruments visent la suppression de toute discrimination dans l'emploi, la profession, la formation professionnelle, le placement et les conditions de travail, dans la mesure où cette discrimination est fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale.
  55. 38. Le comité doit examiner dans ce contexte si les mesures adoptées par le gouvernement de l'Espagne à l'égard des employés et des travailleurs de l'ancien organisme autonome "Moyens de communication sociale de l'Etat" (MCSE) sont compatibles avec les dispositions des conventions en question. A cet effet, le comité a analysé non seulement les textes de la réclamation de la fédération et des observations du gouvernement, mais encore toutes les informations complémentaires ainsi que la volumineuse documentation fournie de part et d'autre.
  56. i) Mesures juridiques et administratives en rapport avec les augmentations de salaire
  57. 39. Le comité constate que, par décret royal no 1434/79 du 16 juin 1979, il est devenu légalement possible de suspendre la publication de tout journal appartenant à l'Organisme autonome de communication sociale de l'Etat. Ce décret royal a également prévu la possibilité d'intégrer le personnel de cet organisme à l'administration de l'Etat et à ses organismes autonomes en respectant, dans tous les cas, les droits élémentaires relatifs à l'équivalence professionnelle et économique dans le nouvel emploi. Le personnel touché par cette mesure pouvait néanmoins mettre fin à sa relation de travail moyennant le versement d'une indemnité. Une commission interministérielle relevant du ministère de la Présidence du gouvernement a été créée afin d'intégrer le personnel dans l'administration de l'Etat et dans ses organismes autonomes. Le décret royal no 60/84, du 11 janvier 1984 a permis d'intégrer aussi le personnel du MCSE à des communautés autonomes, à l'administration de la sécurité sociale et à tout autre organisme de l'Etat.
  58. 40. D'après les renseignements fournis par le gouvernement, 3.419 travailleurs provenant du MCSE ont été intégrés dans l'administration de l'Etat jusqu'au 31 mars 1985, dont 3.298 dans divers ministères ou organismes autonomes, et 212 dans des communautés autonomes.
  59. 41. Selon le gouvernement, les conditions de travail du personnel du MCSE avaient été réglementées précédemment par diverses conventions collectives. Celles-ci prévoyaient des conditions salariales et des avantages sociaux sensiblement supérieurs, en général, à ceux des autres travailleurs au service de l'administration de l'Etat (Note 8).
  60. 42. Jusqu'au 31 décembre 1984, d'après les informations fournies par le gouvernement, la situation des travailleurs du MCSE en ce qui concerne spécifiquement les salaires variait selon l'administration ou les organismes de l'Etat auxquels ils avaient été intégrés. Cependant, d'une manière générale, leurs salaires avaient été maintenus à leur niveau antérieur et dans certains cas des augmentations avaient été accordées selon la convention collective applicable (Note 9).
  61. 43. Le comité note que le gouvernement, compte tenu de ces diverses situations, a estimé nécessaire de réaliser l'intégration effective des travailleurs dans l'administration de l'Etat de telle manière qu'ils soient couverts par la convention collective applicable dans le ministère ou l'organisme d'affectation. Le comité constate que les Instructions du secrétariat d'Etat aux Finances ont été adoptées le 19 avril 1985, afin "d'établir les bases qui permettent de parvenir, dans un délai raisonnable, à l'égalité de rémunération et des autres conditions de travail de tous les travailleurs d'une même catégorie professionnelle relevant de la même convention, quel que soit l'organisme de provenance".
  62. 44. Les principes contenus dans les Instructions en question (et aussi les dispositions du décret royal no 1434/79 du 16 juin 1979) impliquaient qu'au cours de l'année 1985 les catégories professionnelles de ces travailleurs au moment de la dissolution de l'organisme d'origine aient fait l'objet d'un ajustement adéquat à l'une des catégories prises en compte dans la nouvelle convention collective applicable; cet ajustement, de même que celui de toutes les autres conditions de travail, devait être effectué par le ministère ou l'organisme autonome d'affectation, en consultation avec les travailleurs intéressés.
  63. 45. Les Instructions prévoyaient aussi l'ajustement de la rémunération fixant les salaires et leurs compléments en fonction de la catégorie professionnelle dans laquelle les travailleurs avaient été placés. La différence, le cas échéant, entre le salaire et ses compléments de 1984 et celui résultant de l'application de la convention collective du ministère ou de l'organisme d'affectation constituait un supplément personnel provisoire, qui ferait l'objet du traitement prévu dans l'article 26, paragraphe 4, de la Charte des travailleurs (Note 10). Selon cette disposition, le supplément personnel pouvait être absorbé ou, le cas échéant, compensé par toute augmentation de rémunération accordée dans le cadre des futures lois des budgets généraux de l'Etat ainsi que par des augmentations de caractère complémentaire (ancienneté, affectation et changement de poste, etc.) à la seule exception des heures supplémentaires, des indemnités et autres prestations spéciales.
  64. 46. Le comité note également que les responsables de chaque administration d'affectation pouvaient proposer à la commission de négociation du ministère ou de l'organisme concerné que ce supplément personnel provisoire soit garanti jusqu'à un maximum de 50 pour cent de l'augmentation accordée à la catégorie professionnelle.
  65. 47. En tout état de cause, il était précisé dans les Instructions que, si des travailleurs du MCSE n'acceptaient pas le régime applicable conformément à la convention collective en vigueur au sein du ministère d'affectation, en particulier en ce qui concerne la journée de travail et les autres conditions, l'absorption des augmentations de rémunération serait totale, jusqu'à ce que la différence de rémunération disparaisse.
  66. 48. Il était également prévu qu'aucun ministère ou organisme ne pourrait accorder des augmentations de salaire de manière unilatérale à des travailleurs venant du MCSE et que les augmentations accordées en 1984 devaient être régularisées dans le cadre de la convention collective applicable, sans préjudice de l'application des dispositions des Instructions du 19 avril 1985.
  67. 49. Le comité considère que les mesures décrites ci-dessus ont pour but d'éliminer progressivement les disparités salariales existant entre les travailleurs du MCSE incorporés dans l'administration de l'Etat et les travailleurs déjà à son service, afin de réaliser l'égalité de rémunération pour les travailleurs d'une même catégorie professionnelle. De même, il apparaît que, par les Instructions susmentionnées, le gouvernement tienne à appliquer avec souplesse les dispositions de l'article 26, paragraphe 4, de la Charte des travailleurs, évitant ainsi un gel des rémunérations des travailleurs venant du MCSE. Selon le comité, les dispositions du chapitre XI (Structure du salaire) de l'accord-cadre du 31 janvier 1986, applicable au personnel de l'administration de l'Etat, des organismes autonomes et de l'administration de la sécurité sociale, poursuivent le même objectif que les Instructions du 19 avril 1985.
  68. 50. Le comité constate que dans l'intervalle, et conformément aux lois des budgets généraux de l'Etat pour 1985 et 1986 (Note 11), les salaires des travailleurs de l'administration de l'Etat ont été augmentés de 6,5 pour cent en 1985 et de 7,2 pour cent en 1986.
  69. 51. Le comité note à ce sujet que la loi no 50/1984 (art. 10.3) de même que la loi no 46/1985 (art. 11.1), régissant toutes deux les budgets généraux de l'Etat, prescrivent, sans préjuger du résultat individuel de l'application de ladite augmentation, que la masse salariale globale ne devra pas dépasser les taux d'augmentation légaux.
  70. 52. Le comité constate que, d'après les textes susmentionnés, les pourcentages d'augmentation salariale ne doivent pas être considérés comme des pourcentages d'augmentation applicables de façon automatique à chaque travailleur individuellement, mais comme le niveau maximum d'une augmentation dont le montant individuel sera déterminé ultérieurement dans le cadre de la négociation collective.
  71. 53. En l'occurrence, et sans entrer dans les détails qu'impliquerait l'analyse des différentes conventions collectives adoptées dans les divers ministères et organismes de l'Etat, le comité constate que les textes juridiques, administratifs et conventionnels, en particulier l'Instruction du secrétariat d'Etat aux Finances du 19 avril 1985 et l'accord-cadre du 31 janvier 1986, énoncent les principes généraux et les modalités d'application des augmentations prévues par la loi pour l'ensemble de la fonction publique, sans aucune discrimination.
  72. 54. Le comité note que, selon les informations reçues, le gouvernement a fait en sorte que l'application des textes légaux, administratifs et conventionnels en question soit la moins rigide possible pour les travailleurs du MCSE, en évitant ainsi l'application pure et simple de l'article 26, paragraphe 4, de la Charte des travailleurs.
  73. 55. Le comité note que certains membres de la fédération plaignante ont fait usage des possibilités de recours devant les tribunaux et constate qu'un certain nombre de jugements ont été prononcés par différents tribunaux du pays, qui ont reconnu sur le plan individuel les augmentations salariales prévues globalement par la législation budgétaire. Le comité considère qu'en l'espèce il n'y a pas lieu d'analyser ces jugements, mais d'examiner si les mesures adoptées par le gouvernement de l'Espagne, qui font l'objet de la réclamation, sont compatibles avec les conventions no lll et no 117.
  74. 56. Le comité considère que les différences de traitement entre les travailleurs venant du MCSE et les autres travailleurs de l'administration de l'Etat, en ce qui concerne les augmentations de salaire, ne procèdent pas d'une discrimination au sens de l'article 1, paragraphe 1, alinéas a) et b), de la convention no 111 ou de l'article 14, paragraphe 1, alinéa i), de la convention no 117, mais purement et simplement de l'application de textes légaux, administratifs et conventionnels tendant à réaliser l'égalité de rémunération pour tous les travailleurs de l'administration de l'Etat, dans chaque catégorie professionnelle.
  75. ii) Autres mesures
  76. 57. La fédération plaignante allègue de surcroît que ses membres sont victimes de discrimination dans la pratique, non seulement en ce qui concerne leurs salaires, mais encore l'exercice de leur profession; en effet, ils seraient "soumis à une inactivité professionnelle", dans la mesure où on ne leur offrirait pas des activités correspondant à leur formation et à leur expérience, car ils ne seraient pas considérés comme "favorables au parti politique au pouvoir".
  77. 58. Le gouvernement, dans sa réponse, ne fait aucune allusion à cette question.
  78. 59. Le comité, en analysant la volumineuse documentation que la fédération plaignante lui a fait parvenir, n'est pas parvenu à déceler des éléments qui permettraient de constater une violation des conventions en cause.
  79. 60. La fédération plaignante, se référant à l'un des documents qu'elle a communiqués (Note 12), allègue que les représentants des travailleurs venant du MCSE et incorporés à l'administration de l'Etat, n'ont pas eu le droit d'être entendus au sein de la commission mixte chargée de l'élaboration de la convention collective applicable au personnel du ministère de l'Intérieur. Elle allègue également que les représentants des travailleurs du MCSE n'ont pas non plus fait partie des commissions paritaires qui ont pris les décisions concernant la catégorie professionnelle dans laquelle ces travailleurs devaient être classés.
  80. 61. Le gouvernement, dans sa réponse, indique que les conventions collectives en question avaient été négociées par les représentants des organisations professionnelles représentatives, conformément à l'article 87 de la Charte des travailleurs. A cet égard, il signale que la fédération plaignante n'est pas représentative au sens de l'article 87 mentionné ci-dessus et des articles 6 et 7 de la loi organique sur la liberté syndicale.
  81. 62. Le comité estime que cette question ressortirait, le cas échéant, à la compétence du Comité de la liberté syndicale, qui, par ailleurs, a déjà examiné la question de la représentativité des organisations professionnelles selon la législation espagnole (Note 13). En tout état de cause, le comité considère qu'en l'occurrence cette question n'a pas d'incidence sur l'application des conventions en cause.
  82. III. Recommandations du comité
  83. 63. Le comité recommande au Conseil d'administration:
  84. a) d'approuver le présent rapport et, en particulier, ses conclusions;
  85. b) de déclarer close la présente procédure engagée à la suite de la réclamation présentée par la Fédération étatique d'associations d'employés et de travailleurs de l'administration de l'Etat et alléguant l'inexécution par l'Espagne de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, et de la convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962.
  86. Genève, 13 novembre 1987. (signé) G. Falchi, Président,
  87. L. Sasso-Mazzufferi,
  88. R.A. Baldassini.
  89. Note 1
  90. Convention no 111 ratifiée le 6 novembre 1967; convention no 117 ratifiée le 8 mai 1973.
  91. Note 2
  92. Voir Bulletin officiel, vol. LXIV, 1981, série A, no 1, pp. 99-101.
  93. Note 3
  94. Voir documents GB.234/23/20, GB.234/PV(Priv.)(Rev.), p. VII/2, GB.236/18/2O et GB.236/PV, p. III/19O.
  95. Note 4
  96. Cet article stipule que: "Lorsque les salaires effectivement versés, pris dans leur ensemble et calculés pour une période d'une année, seront plus favorables pour le travailleur que ceux fixés dans les dispositions ou les conventions pertinentes, les montants seront compensés et les différences absorbées."
  97. Note 5
  98. Le paragraphe 3 de l'article en question prévoit: "En cas de divergence existant entre deux ou plusieurs normes de travail, qu'elles aient été établies par l'Etat ou par voie de conventions et qui devront, dans tous les cas, respecter les limites minimales fixées par voie de dispositions impératives, c'est la norme la plus favorable pour le travailleur, évaluée dans son ensemble et selon le calcul annuel des éléments pouvant être exprimés en valeur, qui sera appliquée."
  99. Note 6
  100. CIT: Compte rendu, Bureau international du Travail, Genève, 1962, p. 867.
  101. Note 7
  102. CIT: Rapport de la commission d'experts. Etude générale sur les rapports relatifs à la convention et à la recommandation concernant la discrimination (emploi et profession), 1958. Rapport III (partie 4B). BIT, Genève, 1971, p. 1.
  103. Note 8
  104. Ce fait est reconnu au paragraphe 6 des Instructions du secrétariat d'Etat aux Finances, du 19 avril 1985.
  105. Note 9
  106. Les diverses situations étaient les suivantes:
  107. a) Travailleurs arrivés dans un ministère ou organisme auquel ils ont été affectés, dont les rémunérations avaient été révisées en vertu de la convention collective applicable.
  108. b) Travailleurs auxquels a été reconnue, dans leur lieu d'affectation, leur rémunération révisée conformément aux conventions collectives applicables.
  109. c) Travailleurs déjà intégrés dont la rémunération a été augmentée d'un pourcentage égal à celui appliqué au reste des travailleurs de leur lieu d'affectation.
  110. d) Travailleurs assimilés unilatéralement à une catégorie de la convention collective applicable dans le lieu d'affectation, avec absorption totale ou partielle du surplus de rémunération.
  111. e) Travailleurs ayant accepté expressément les conditions de la convention collective en vigueur et bénéficiant ainsi d'une augmentation de 5 pour cent avec effet rétroactif.
  112. f) Enfin, travailleurs dont il n'a pas été tenu compte dans la convention collective en vigueur au sein du ministère ou de l'organisme d'affectation et dont, par conséquent, la rémunération n'a pas été révisée, mais a été maintenue a son niveau antérieur.
  113. Note 10
  114. Voir ci-dessus note de bas de page, paragr. 22.
  115. Note 11
  116. Lois no 50/1984 du 30 décembre 1984, publiée dans le Journal officiel no 313 du 31 décembre 1984, et no 46/1985 du 27 décembre 1985, publiée dans le Journal officiel no 311 du 28 décembre 1985.
  117. Note 12
  118. Document du 12 décembre 1986 adressé au "Defensor del Pueblo, Cortes Generales".
  119. Note 13
  120. Cas no 1320; Bulletin officiel, vol. LXIX, 1986, série B, no 1, 243e rapport du comité.
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