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RECLAMATION (article 24) - BOLIVIE - C026, C131 - 1984

1. Confédération des employeurs privés de Bolivie

Clos

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Rapport du Comité désigné pour examiner la réclamation présentée par la Confédération des employeurs privés de Bolivie en vertu de l'article 24 de la Constitution et alléguant l'inexécution par la Bolivie de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, et de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970

Rapport du Comité désigné pour examiner la réclamation présentée par la Confédération des employeurs privés de Bolivie en vertu de l'article 24 de la Constitution et alléguant l'inexécution par la Bolivie de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, et de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970

Decision

Decision
  1. Le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité tripartite. Procédure close.

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. Introduction
  2. 1. Par une lettre en date du 13 février 1984 (Note 1), la Confédération des employeurs privés de Bolivie a adressé une réclamation au titre de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution par le gouvernement de la Bolivie de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, et de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970.
  3. 2. La convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, a été ratifiée par le gouvernement de la Bolivie le 19 juillet 1954. La convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970, a été ratifiée par le gouvernement de la Bolivie, le 31 janvier 1977. Ces deux conventions sont toujours en vigueur en Bolivie.
  4. 3. Les dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail relatives aux réclamations sont les suivantes:
  5. Article 24
  6. Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause, et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable.
  7. Article 25
  8. Si aucune déclaration n'est reçue du gouvernement mis en cause dans un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au Conseil d'administration, ce dernier aura le droit de rendre publiques la réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
  9. 4. La procédure à suivre pour l'examen des réclamations est régie par le Règlement révisé adopté par le Conseil d'administration à sa 212e session (mars 1980) (Note 2).
  10. 5. Conformément aux articles 1 et 2 du Règlement, le Directeur général a accusé réception de la réclamation, en a informé le gouvernement de la Bolivie et l'a transmise au bureau du Conseil d'administration.
  11. 6. A sa 226e session, le Conseil d'administration, sur recommandation de son bureau, a décidé que la réclamation était recevable (Note 3). A sa 227e session, le Conseil d'administration a désigné un comité chargé d'examiner la réclamation, composé de M. K.G.A. Hill (membre gouvernemental, président), de M. José María Lacasa Aso (membre employeur) et de M. Alfonso Sánchez Madariaga (membre travailleur) (Note 4).
  12. 7. Le comité a invité le gouvernement de la Bolivie à faire une déclaration au sujet de la réclamation avant le 15 septembre 1984. Par une lettre en date du 1er octobre 1984, le gouvernement a requis une prolongation du délai au 15 octobre 1984. Le gouvernement a communiqué sa déclaration dans une lettre en date du 4 octobre 1984.
  13. 8. Le comité a également invité la Confédération des employeurs privés de Bolivie à fournir des informations complémentaires avant le 15 août 1984. Dans une communication en date du 13 août 1984, la confédération a fourni des informations complémentaires qui ont été immédiatement communiquées au gouvernement.
  14. Examen de la réclamation
  15. Allégations présentées
  16. 9. Dans sa lettre du 13 février 1984, la Confédération des employeurs privés de Bolivie déclare que le gouvernement de la Bolivie, par le décret suprême no 19263 du 5 novembre 1982, complété par le décret no 19462 du 15 mars 1983, a établi un nouveau mécanisme de fixation du salaire minimum. Ce nouveau mécanisme de fixation du salaire minimum a introduit le principe de "l'échelle mobile". La confédération allègue que cette méthode de fixation du salaire minimum a été adoptée par le gouvernement sans avis ni consultation des organisations représentatives des employeurs qui, en conséquence, n'ont participé ni à l'étude ni au processus d'approbation et d'adoption de ces mesures. La confédération déclare ne pas savoir si les organisations de travailleurs ont participé à cette phase.
  17. 10. La Confédération des employeurs privés ajoute que les employeurs n'ont pu participer, non plus, à l'application du mécanisme de référence alors que la Centrale ouvrière bolivienne (COB) y a pris part dans le cadre de négociations bipartites, comme en témoigne le texte de l'accord sur les salaires minima en date du 29 janvier 1983 conclu entre le gouvernement et la COB. Dans les informations complémentaires communiquées le 13 août 1984, la confédération se réfère également à une commission mixte, composée de représentants du gouvernement et de la COB, instituée pour analyser la politique des salaires et étudier de nouvelles méthodes pour protéger le pouvoir d'achat des salariés, sans que des représentants des organisations d'employeurs en fassent partie.
  18. 11. Sur la base des faits ci-dessus mentionnés, la Confédération des employeurs privés allègue que l'obligation de consultations tripartites prévue par les conventions nos 26 et 131 n'a pas été respectée. Elle allègue également que les infractions spécifiques à ces deux conventions ne sont qu'un des aspects d'un processus plus général d'exclusion des représentants des employeurs des consultations tripartites. La confédération se réfère aux dispositions spécifiques des deux conventions que prévoient de telles consultations (voir paragr. 16 ci-après).
  19. 12. La Confédération des employeurs privés déclare en outre, dans sa communication en date du 13 août 1984, que cette réclamation ne constitue nullement une quelconque observation sur la nécessité d'augmenter les salaires ni une objection quant au montant ou aux niveaux des salaires fixés en application des dispositions internes contestées, lesquelles ont été respectées et les augmentations salariales versées dans leur totalité.
  20. Observations du gouvernement
  21. 13. Dans sa déclaration, le gouvernement rappelle en premier lieu les dispositions de la législation nationale en matière de fixation des salaires ainsi que les décrets d'application pris à cet effet. Le gouvernement ne conteste pas la description de la situation de fait présentée par l'organisation plaignante, ni les allégations selon lesquelles les obligations prévues par les conventions nos 26 et 131 n'ont pas été, dans cette circonstance, respectées. Le gouvernement indique, dans sa réponse, que si, pour ces cas précis, il n'a pas satisfait à l'obligation d'une consultation préalable avec les organisations d'employeurs, cette conduite exceptionnelle est due à une situation sociale et économique critique qui imposait des mesures immédiates afin de modifier un régime salarial injuste pour les travailleurs. Le gouvernement déclare que la Bolivie traverse l'une des crises économiques les plus sérieuses de son histoire, conséquence de la récession économique mondiale qui n'a pas encore été surmontée dans les pays en développement tels que la Bolivie. Cette situation affecte le pays dans son ensemble et en particulier les travailleurs qui font face à une diminution de leur pouvoir d'achat. Dans ces circonstances, il a été nécessaire d'adopter des mesures d'urgence pour répondre à des situations dramatiques de pénurie qui ont conduit le gouvernement à prendre des mesures comme celles auxquelles la Confédération des employeurs privés fait objection.
  22. 14. Le gouvernement indique cependant qu'en procédant de la sorte il n'était pas dans son intention de créer un précédent pour l'avenir ni de se soustraire à ses obligations en matière de normes internationales du travail. Le gouvernement déclare qu'à l'avenir non seulement il respectera strictement ces normes mais également qu'il renforcera et poursuivra avec vigueur leur application en ce qui concerne la consultation et la participation tripartites, en particulier en matière de salaires. Le gouvernement se réfère en outre à des mesures concrètes prises pour favoriser la consultation tripartite. Il déclare que le Président de la République a renouvelé son invitation au dialogue avec les employeurs et les travailleurs afin de trouver des solutions aux divers aspects de la crise économique. Le gouvernement déclare également que des dispositions légales seront adoptées dans un proche avenir en vue d'une restructuration du Conseil national des salaires avec participation paritaire des travailleurs et des employeurs. Enfin, le gouvernement indique qu'en août 1984 il a conclu, avec la Confédération des employeurs privés et la Centrale ouvrière bolivienne, un accord portant sur la relance de l'économie du pays.
  23. 15. Le gouvernement déclare également avoir l'impression que les raisons qui ont poussé l'organisation plaignante à déposer cette réclamation sont d'obtenir un soutien international en faveur de certains milieux d'employeurs qui s'opposent à la répartition équitable des effets de la crise que tente de réaliser le gouvernement. Celui-ci déclare que ce sont les employeurs eux-mêmes qui n'ont pas voulu participer à un dialogue tripartite. Il donne, à titre d'exemple, le refus simultané de la Chambre nationale des industries à une demande formulée par la Confédération générale des travailleurs des industries manufacturières visant à fixer un niveau minimum des salaires dans ce secteur et à la politique salariale du gouvernement. Dans un autre cas, l'Association nationale des mines moyennes a fait savoir, dans une communication adressée au ministre des Mines, en date du 25 septembre 1984, que par décision de la Confédération des employeurs privés de Bolivie l'association ne participerait pas à une conférence des pays producteurs d'étain en octobre 1984. Le gouvernement rappelle l'importance capitale que tient l'industrie de l'étain en Bolivie et pour cette raison regrette que les employeurs aient refusé de participer à cette réunion. Le gouvernement déclare que l'attitude intransigeante et souvent hostile des employeurs privés à l'égard de l'actuel gouvernement constitutionnel a également été dénoncée par les représentants des travailleurs de Bolivie à la 70e session de la Conférence internationale du Travail (1984). Selon le gouvernement, durant les précédents régimes, les organisations d'employeurs n'ont pas démontré la même ardeur que celle dont ils font preuve actuellement pour défendre le tripartisme ni pour se conformer aux normes internationales de l'OIT, et les exemples cités démontrent l'attitude adoptée par les employeurs privés pour paralyser et repousser la concertation tripartite, dans d'autres domaines concernant les relations de travail.
  24. Conclusions du comité
  25. 16. Le comité note que la réclamation allègue l'inexécution de l'article 2 et de l'article 3, paragraphe 2 (1), de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, ainsi que de l'article 4, paragraphe 2, de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970. L'article 2 de la convention no 26 stipule que le champ d'application des méthodes de fixation des salaires minima adoptées en application de la convention sera déterminé "après consultation des organisations patronales et ouvrières". L'article 3, paragraphe 2 (1), de la même convention prévoit qu'"avant d'appliquer les méthodes à une industrie ou partie d'industrie déterminée les représentants des employeurs et des travailleurs intéressés, y compris les représentants de leurs organisations respectives, si de telles organisations existent, devront être consultés...". L'article 4, paragraphe 2, de la convention no 131 prévoit que "des dispositions seront prises pour consulter pleinement les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs intéressées... au sujet de l'établissement et de l'application des méthodes visées ci-dessus, ou des modifications qui y seraient apportées".
  26. 17. Le comité rappelle en outre que l'article 3, paragraphe 2 (2), de la convention no 26 prévoit que "les employeurs et travailleurs intéressés devront participer à l'application des méthodes sous la forme et dans la mesure qui pourront être déterminées par la législation nationale mais, dans tous les cas, en nombre égal, et sur un pied d'égalité". L'article 4, paragraphe 3, de la convention no 131 stipule que "Dans les cas appropriés, compte tenu de la nature des méthodes de fixation des salaires minima existants, des dispositions seront également prises pour permettre que participent directement à leur application a) des représentants d'organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées..., cette participation devant s'effectuer sur un pied d'égalité."
  27. 18. Le comité note que, dans son premier rapport (1983) dû au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT à la suite de la ratification de la convention no 131, le gouvernement a déclaré que les mesures prises en matière de politique salariale avaient été adoptées en consultation avec les organisations de travailleurs et "dans certains cas avec les organisations d'employeurs". Il note, en outre, que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, dans un commentaire adressé au gouvernement en 1984, a souligné qu'aux termes de l'article 4, paragraphe 2, de la convention les organisations d'employeurs et de travailleurs devaient être consultées, et a prié le gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour donner effet à cette disposition de la convention.
  28. 19. Dans sa déclaration, le gouvernement ne conteste pas les faits allégués ni la non-application des dispositions pertinentes de ces deux conventions. Les deux conventions prévoient des consultations avec les organisations représentatives des employeurs et des travailleurs concernés à différentes étapes, lorsque de telles organisations existent. Ces organisations existent en Bolivie. Les représentants des employeurs n'ont pas été consultés à propos du champ d'application des méthodes de fixation des salaires minima, comme le prévoit l'article 2, ni "avant d'appliquer les méthodes à une industrie ou partie d'industrie déterminée", comme le prévoit l'article 3, paragraphe 2 (1), de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928. Les représentants des employeurs n'ont pas non plus été consultés "au sujet de l'établissement et de l'application des méthodes (de fixation des salaires minima) ... ou des modifications qui y seraient apportées" comme le prévoit l'article 4, paragraphe 2, de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970.
  29. 20. Le comité, nonobstant la déclaration de la Confédération des employeurs privés selon laquelle la réclamation ne constitue nullement une observation quelconque sur la nécessité d'augmenter les salaires, et notant la situation économique et sociale critique à laquelle s'est référé le gouvernement, conclut néanmoins que le gouvernement n'a pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution des dispositions susvisées de ces deux conventions dans ce cas particulier.
  30. 21. Le comité note en outre les déclarations de nature plus générale, formulées à la fois par l'organisation plaignante et par le gouvernement, et attribuant l'échec de la mise en place de consultations tripartites aux attitudes et aux actions respectives de l'autre partie. Le comité est d'avis que ces questions sont en dehors de son mandat. Il désire seulement rappeler que le tripartisme et les consultations tripartites sur des questions d'intérêt commun constituent des principes fondamentaux de l'Organisation internationale du Travail. Si l'obligation d'entamer des consultations tripartites revient au gouvernement d'un Etat Membre, de véritables consultations ne peuvent avoir lieu sans une participation active et voulue de toutes les parties concernées.
  31. 22. A cet égard, le comité note avec intérêt la déclaration du gouvernement selon laquelle le Président de la République a récemment réitéré son invitation au dialogue avec les employeurs et les travailleurs afin de rechercher des solutions à la crise économique actuelle, et que le gouvernement se propose d'adopter, dans un proche avenir, des mesures légales dans le but de restructurer le Conseil national des salaires sur la base d'une participation paritaire des représentants des travailleurs et des employeurs. Il note en outre qu'un accord visant la relance de l'économie du pays a été conclu entre les trois parties, en août 1984.
  32. Recommandations du comité
  33. 23. Le comité recommande au Conseil d'administration:
  34. a) d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes, à savoir que:
  35. i) le gouvernement n'a pas assuré l'application satisfaisante de l'article 2 et de l'article 3, paragraphe 2 (1), de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, et de l'article 4, paragraphe 2, de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970, relatifs aux consultations avec les organisations d'employeurs au sujet de l'établissement, de l'application et de la modification des méthodes de fixation des salaires minima;
  36. ii) des mesures devraient être prises par le gouvernement afin d'assurer les consultations requises avec les organisations d'employeurs comme avec celles de travailleurs, conformément aux dispositions ci-dessus mentionnées des conventions concernées, ainsi que la participation de ces organisations à l'application des méthodes de fixation des salaires minima conformément à l'article 3, paragraphe 2 (2), de la convention no 26 et à l'article 4, paragraphe 3, de la convention no 131;
  37. iii) le gouvernement devrait fournir des informations à cet égard dans ses rapports sur l'application des conventions nos 26 et 131, afin de permettre à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de suivre les développements intervenus en la matière;
  38. b) de déclarer close la présente procédure engagée à la suite de la réclamation de la Confédération des employeurs privés de Bolivie concernant l'application par le gouvernement de Bolivie de la convention (no 26) sur les méthodes de fixation des salaires minima, 1928, et de la convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970.
  39. Genève, 7 novembre 1984. (Signé) K.G.A. Hill,
  40. Président.
  41. José María Lacasa Aso
  42. Alfonso Sánchez Madariaga
  43. Note 1
  44. Document GB.226/13/9, annexe.
  45. Note 2
  46. Voir Bulletin officiel, vol. LXIV, 1981, Série A, no 1, pp. 99-101.
  47. Note 3
  48. Document GB.226/13/9.
  49. Note 4
  50. Document GB.227/5/1.
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