Afficher en : Anglais - Espagnol
Allégations: les organisations plaignantes allèguent le non-respect de
conventions collectives de travail de la part du Service national d’apprentissage et de la
municipalité de Bucaramanga
- 129. La plainte s’articule autour de cinq communications datées du 27 mai
et du 7 juin 2016, du 24 mai et du 30 octobre 2018, ainsi que du 12 juin 2019,
présentées par la Confédération générale du travail (CGT), le Syndicat des travailleurs
du secteur de la construction et de l’entretien des travaux publics des municipalités de
Santander (SINTRAOBRAS) et le Syndicat des travailleurs de la municipalité de
Bucaramanga (SINTRAMUNICIPIO).
- 130. Le gouvernement de la Colombie a envoyé ses observations concernant
ces allégations dans huit communications datées du 13 juillet 2017, du 23 octobre et du
12 décembre 2018, du 30 mai 2019, du 29 mai 2023, ainsi que des 17, 23 et 25 avril
2024.
- 131. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 151) sur les
relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la
négociation collective, 1981.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 132. Dans leur communication du 27 mai 2016, les organisations
plaignantes allèguent le non-respect de certaines dispositions d’une convention
collective de travail conclue entre le Service national d’apprentissage (SENA) et le
Syndicat des travailleurs officiels du SENA (SINTRASENA), en particulier en ce qui
concerne les prêts pour l’accession au logement, l’indemnité de résidence et la pension
de retraite. Selon les organisations plaignantes: i) le SENA a enfreint les articles 35,
36, 37, 38 et 39 de la convention collective, qui portent sur le fonds national pour le
logement, ainsi que l’article 82, qui garantit aux travailleurs officiels un principe de
faveur en ce qui concerne l’indemnité de résidence; et ii) bien que l’article 109 de la
convention collective renferme des dispositions en matière de pensions, l’acte
législatif no 01 du 22 juillet 2005 prévoit qu’à compter du 31 juillet 2010, les règles
des conventions collectives relatives aux pensions ne sont plus en vigueur.
- 133. Dans leurs communications du 7 juin 2016 ainsi que du 24 mai et du
30 octobre 2018, les organisations plaignantes allèguent que la municipalité de
Bucaramanga (ci-après, «la municipalité») n’a pas respecté la convention collective de
travail conclue le 18 décembre 2015 avec le SINTRAOBRAS et le SINTRAMUNICIPIO, dont la
première clause prévoit qu’à compter du 1er janvier 2016, la municipalité «pourra
licencier les travailleurs officiels qu’elle emploie uniquement pour un motif légitime
avéré». Elles affirment que le maire a: i) par les décrets nos 055 et 056 du 2 mai 2016,
requalifié certains postes occupés par des membres et des dirigeants des syndicats
susmentionnés en supprimant 27 postes de travailleur officiel (emplois de chauffeur de
véhicules municipaux et de gardien) et en créant 27 postes d’agent public (emplois de
conducteur et d’auxiliaire des services généraux); et ii) par la décision no 0270 du
3 mai 2016, affecté sans solution de continuité les 27 travailleurs concernés à ces
emplois temporaires.
- 134. Les organisations plaignantes déclarent que ces actes administratifs
constituent une violation flagrante du droit à la liberté syndicale. Elles affirment que
le maire a unilatéralement et arbitrairement décidé de passer outre au champ
d’application et au contenu des contrats passés avec les 27 travailleurs officiels, ce
qui est contraire à la loi. Selon les organisations plaignantes, cette restructuration
des emplois a: i) rendu le principe d’organisation syndicale inopérant; ii) privé
certains dirigeants du SINTRAMUNICIPIO de leurs congés syndicaux permanents, auxquels
les agents publics n’ont pas droit; et iii) engendré pour les syndicats concernés
d’innombrables frais de justice pour la défense de leurs dirigeants et de leurs
membres.
- 135. Les organisations plaignantes indiquent que 13 travailleurs ont
introduit des demandes en nullité simple contre les décrets nos 055 et 056. Elles font
en outre savoir que, le 25 juillet 2016, une plainte pénale a été déposée concernant la
modification de la nature du statut des 27 travailleurs officiels, requalifiés en agents
publics, ce qui a conduit à la présentation d’une une action pénale contre le maire de
Bucaramanga et deux de ses conseillers pour violation des droits de réunion et
d’association.
- 136. De plus, les organisations plaignantes indiquent que quatre des
travailleurs concernés ont introduit des actions individuelles contre la municipalité de
Bucaramanga. Elles font savoir que: i) Mme Rubiela Jiménez Marín, secrétaire suppléante
du comité directeur du SINTRAOBRAS, et Mme Noyolis Jiménez Siderol, secrétaire du comité
directeur du SINTRAOBRAS, ont engagé des actions spéciales en réintégration fondées sur
leur immunité syndicale, lesquelles ont été rejetées au terme de longues procédures
judiciaires; et ii) MM. Yeins Alexis Virviescas Vargas et Juan Guillermo Herrera
Larrota, membres du SINTRAOBRAS, ont entamé des actions en nullité et en rétablissement
de leurs droits contre de la modification de la nature de leur contrat.
- 137. Par ailleurs, les organisations plaignantes soutiennent que, si
l’administration municipale a octroyé au SINTRAMUNICIPIO, il y a plus de quarante ans,
une partie du lot du groupe scolaire Camacho Carreño, où se trouve le siège du syndicat,
elle refuse d’appliquer cet accord depuis que le ministère de l’Éducation nationale a
décidé de construire à Bucaramanga, à l’aide de ressources nationales, un nouveau grand
établissement scolaire sur ce terrain.
- 138. Les organisations plaignantes font en outre savoir que le 28 février
2018, dans le cadre d’une visite de la Commission spéciale de traitement des conflits
déférés à l’OIT (CETCOIT) à Bucaramanga, des représentants du SINTRAOBRAS et du
SINTRAMUNICIPIO ont rencontré des représentants de l’administration municipale, sans
toutefois parvenir à une solution.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 139. Dans sa communication du 13 juillet 2017, le gouvernement déclare,
en réponse aux allégations concernant le SINTRASENA: i) que la violation présumée des
articles de la convention collective relatifs au fonds national pour le logement n’est
pas établie; ii) que, comme l’indiquent les décisions de justice rendues dans le cadre
des demandes introduites par des travailleurs contre le SENA, celui-ci n’enfreint pas
l’article 82 relatif à l’indemnité de résidence; et iii) conformément à l’acte
législatif no 01 du 22 juillet 2005, il n’est pas possible d’établir, de maintenir ou de
prolonger dans le temps, d’une quelconque manière, des prestations de retraite par
l’effet de conventions collectives qui méconnaissent les règles édictées dans ledit
acte.
- 140. Dans sa communication du 23 octobre 2018, le gouvernement fait
savoir que le 16 octobre 2018, le présent cas a été examiné dans le cadre de la CETCOIT,
et le SENA et le SINTRASENA ont signé un accord en ce qui concerne le fonds national
pour le logement et l’indemnité de résidence. Par sa communication du 30 mai 2019, le
gouvernement indique que le 28 mai 2019, une réunion de suivi de l’accord obtenu dans le
cadre de la CETCOIT a été organisée et que les parties ont déclaré que les engagements
pris en matière de logement avaient été tenus et que ceux relatifs à l’indemnité de
résidence étaient en voie d’être appliqués pour définir le montant de l’augmentation de
cette indemnité. Dans une communication du 25 avril 2024, le Gouvernement indique que:
i) selon le SINTRASENA, les engagements relatifs à l’indemnité de résidence n’ont pas
encore été respectés; et ii) il demandera la tenue d’une nouvelle réunion de suivi au
sein de la CETCOIT.
- 141. Dans ses communications du 12 décembre 2018, du 29 mai 2023, et des
17, 23 et 25 avril 2024, le gouvernement répond aux allégations concernant le
SINTRAOBRAS et le SINTRAMUNICIPIO et présente les observations de la municipalité à cet
égard. Celle-ci soutient que les allégations portées contre elle n’ont aucun rapport
avec le droit syndical et que le comité n’est pas compétent pour examiner les questions
telles que les conditions générales de travail, la sécurité sociale et les licenciements
qui peuvent résulter des programmes d’ajustement structurel et d’assouplissement, qui ne
sont pas en lien avec la liberté syndicale.
- 142. La municipalité déclare que, dans un rapport élaboré par l’organe de
contrôle municipal en septembre 2009, il a été constaté que certains fonctionnaires
ayant le statut de travailleur officiel accomplissaient des tâches qui, en réalité,
correspondaient à la catégorie des agents publics étant donné que, selon la loi et de la
jurisprudence existante, les fonctionnaires sont des agents publics et le statut de
travailleur officiel est uniquement réservé à ceux d’entre eux qui travaillent dans le
secteur de la construction ou de l’entretien de travaux publics. Elle affirme qu’au
terme d’une analyse technique, juridique et financière réalisée par la suite, le
secrétariat administratif a conclu que, dans les faits, les modalités contractuelles des
postes de chauffeur de véhicules municipaux et de gardien n’étaient pas en adéquation
avec leur nature juridique.
- 143. La municipalité explique que, sur la base des résultats de l’analyse
susmentionnée, elle a adopté: i) le décret no 055 de 2016 par lequel elle a requalifié
les postes de chauffeur de véhicules municipaux et de gardien en les supprimant de la
catégorie des travailleurs officiels et en créant les postes de conducteur et
d’auxiliaire des services généraux; ii) le décret no 056 de 2016, qui définit les
fonctions des postes créés; et iii) la décision no 0270 de 2016, qui affecte sans
solution de continuité tout le personnel qui occupait avant les postes de chauffeur de
véhicules municipaux et de gardien aux nouveaux postes de conducteur et d’auxiliaire des
services généraux. La municipalité indique qu’à aucun moment, les travailleurs concernés
n’ont été licenciés de l’administration municipale et qu’ils ont continué d’être
rémunérés. Cependant, les intéressés n’ayant pas passé de concours, la seule catégorie à
laquelle ils pouvaient être assimilés était celle des agents publics recrutés à titre
provisoire.
- 144. La municipalité indique qu’en vertu des articles 313 et 315 de la
Constitution politique, le maire est compétent pour supprimer et créer des postes dans
les services municipaux. Elle fait en outre référence à l’article 11 de la loi no 11 de
1986 et à l’article 292 du décret-loi no 1333 de 1986, qui disposent que les
fonctionnaires municipaux ont le statut d’agent public, à l’exception des travailleurs
du secteur de la construction et de l’entretien des travaux publics. Par conséquent, la
municipalité considère que la détermination du statut d’agent public ou de travailleur
officiel ne fait pas partie des prérogatives de négociation des parties et ne peut donc
se faire au moyen d’une convention collective.
- 145. Pour ce qui est des recours judiciaires qui demandent la nullité du
décret no 055 de 2016, la municipalité fait savoir que: i) la demande présentée par
M. Jorge Alberto Vera Villamizar et d’autres travailleurs a été rejetée en première
instance par un jugement rendu le 28 novembre 2017 par la onzième chambre du Tribunal
administratif de la circonscription Bucaramanga (procédure orale) et, en deuxième
instance, par une décision du Tribunal administratif de Santander du 26 septembre 2019;
et ii) le Conseil d’État a confirmé ces décisions par un jugement rendu le 27 février
2020 dans le cadre d’une demande de protection.
- 146. La municipalité fournit également des informations sur les recours
individuels formés par les dirigeantes du SINTRAOBRAS. Pour ce qui est de Mme Jiménez
Marín, elle indique ce qui suit: i) l’intéressée a engagé une procédure spéciale
d’immunité syndicale devant la troisième chambre du Tribunal du travail de la
circonscription de Bucaramanga, qui a en partie fait droit à ses demandes dans une
décision du 8 septembre 2016; ii) après que les parties ont interjeté appel, le Tribunal
supérieur de Bucaramanga n’a pas retenu la responsabilité de la municipalité de
Bucaramanga dans sa décision du 31 janvier 2017; et iii) Mme Jiménez Marín a introduit
une demande de protection, que la Cour suprême de justice a rejetée par une décision du
11 mai 2017. En ce qui concerne Mme Jiménez Siderol, la municipalité fournit les
informations suivantes: i) l’intéressée a engagé une procédure spéciale d’immunité
syndicale devant la cinquième chambre du Tribunal du travail de la circonscription de
Bucaramanga, qui a en partie fait droit à ses demandes dans une décision du 8 novembre
2016; ii) après que les parties ont interjeté appel, le Tribunal supérieur de
Bucaramanga n’a pas retenu la responsabilité de la municipalité de Bucaramanga dans sa
décision du 31 janvier 2017; et iii) Mme Jiménez Siderol a introduit une demande de
protection, que la Cour suprême de justice a rejetée par une décision du 4 mai
2017.
- 147. Pour ce qui est des recours individuels formés par les membres du
SINTRAOBRAS, la municipalité indique que M. Virviescas Vargas: i) a introduit un recours
contre la municipalité de Bucaramanga devant le Tribunal administratif de Santander, qui
l’a débouté par sa décision du 23 février 2022; et ii) a formé un appel dont le Conseil
d’État est actuellement saisi. De plus, la municipalité fait savoir que M. Herrera
Larrota: i) a introduit un recours contre la municipalité de Bucaramanga devant la
deuxième chambre du Tribunal administratif de la circonscription de Bucaramanga, qui l’a
débouté par sa décision du 13 décembre 2018; et ii) a formé un appel qui est
actuellement en instance devant le Tribunal administratif de Santander.
- 148. Pour sa part, le gouvernement signale que, dans la décision
susmentionnée de la onzième chambre du Tribunal administratif de la circonscription de
Bucaramanga (procédure orale) sur la légalité du décret no 055 de 2016, le tribunal a
déterminé que ledit décret ne portait pas atteinte aux droits syndicaux des plaignants
dans la mesure où il avait permis de rendre conforme à la législation une situation
irrégulière qui concernait 27 travailleurs et que la requalification effectuée se
fondait sur l’analyse technique requise pour ce type de procédure. Le gouvernement est
d’avis que cette requalification était nécessaire et que rien ne montre qu’elle ait été
entreprise à des fins de persécution syndicale, signalant par la même occasion que la
municipalité compte actuellement 14 organisations syndicales. Le gouvernement informe
également que, par un jugement daté du 24 avril 2023, le septième tribunal pénal
municipal de connaissance a rendu un jugement d’acquittement en faveur du maire de
Bucaramanga et de ses conseillers concernant l’action pénale intentée contre eux,
jugement confirmé en deuxième instance le 18 avril 2024, décision qui, à son tour, a
fait l’objet d’un recours en reconsidération.
- 149. Pour ce qui est du siège du SINTRAMUNICIPIO, le gouvernement indique
que celui-ci a été demandé alors qu’un projet d’infrastructure allait être exécuté pour
réformer complètement le bâtiment principal de l’établissement scolaire Camacho Carreño.
Le gouvernement indique qu’après avoir reçu une plainte administrative contre la
municipalité de Bucaramanga, le ministère du Travail a lancé une enquête concernant les
atteintes qui auraient été portées aux normes du travail dans le cadre de l’octroi d’un
lot pour la construction du siège du SINTRAMUNICIPIO et, par sa décision du 19 octobre
2019, le ministère a conclu qu’il n’avait pas été prouvé que les accords conclus par les
parties en 1970 et 1977 étaient juridiquement valables et il a donc classé la plainte.
Le gouvernement indique que les parties n’ont pas formé de recours contre cette
décision.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 150. Le comité note que, dans le cas présent, relatif à des allégations
de violation du droit de négociation collective dans le secteur public, les
organisations plaignantes allèguent, d’une part, que certains articles de la convention
collective conclue entre le SENA et le SINTRASENA ont été enfreints et, d’autre part,
que la municipalité de Bucaramanga n’a pas respecté: i) la convention collective signée
avec le SINTRAOBRAS et le SINTRAMUNICIPIO, lorsqu’elle a modifié la nature juridique de
certains postes; et ii) un accord passé avec le SINTRAMUNICIPIO concernant l’octroi d’un
lot sur lequel se trouve le siège de ladite organisation syndicale. Le comité note que
le gouvernement, pour sa part: i) indique qu’un accord a été signé en octobre 2018 par
le SENA et le SINTRASENA devant la CETCOIT; et ii) déclare que la modification de la
nature juridique d’un ensemble de postes par la municipalité de Bucaramanga ne répondait
pas à des motifs antisyndicaux et était nécessaire pour que la légalité soit respectée,
et fournit des informations sur l’avancement des procédures administratives et
judiciaires lancées en la matière.
- 151. En ce qui concerne le SINTRASENA, le comité note que, selon les
organisations plaignantes: i) le SENA n’a pas respecté les articles 35, 36, 37, 38 et 39
(fonds national pour le logement), ainsi que l’article 82 (indemnité de résidence) de la
convention collective conclue par les parties; et ii) l’acte législatif no 01 du
22 juillet 2005 porte atteinte à l’article 109 de la convention collective en ce qu’il
établit qu’à compter du 31 juillet 2010, les règles des conventions collectives
relatives aux pensions ne sont plus applicables. Le comité note également que le
gouvernement indique que: i) pour ce qui est du fonds national pour le logement et de
l’indemnité de résidence, les parties sont parvenues à un accord devant la CETCOIT le
16 octobre 2018; ii) dans le cadre d’une réunion de suivi, tenue le 28 mai 2019, les
parties ont affirmé que les engagements pris en matière de logement avaient été tenus et
que ceux relatifs à l’indemnité de résidence étaient en voie d’application; iii) selon
ce qu’a indiqué le SINTRASENA en avril 2024, les engagements relatifs à l’indemnité de
résidence n’ont pas encore été respectés, raison pour laquelle le gouvernement demandera
une nouvelle réunion de suivi au sein de la CETCOIT; et iv) pour ce qui est des
pensions, il n’est pas possible d’établir, de maintenir ou de prolonger au-delà du
31 juillet 2010 des prestations de retraite par l’effet de conventions collectives qui
méconnaissent les règles édictées dans l’acte législatif no 01 du 22 juillet 2005.
- 152. Le comité note avec intérêt l’accord conclu par le SENA et le
SINTRASENA devant la CETCOIT en ce qui concerne le logement et l’indemnité de résidence,
tout en notant que le SINTRASENA considère que la partie de l’accord relative à
l’indemnité de résidence n’a pas encore été respectée. Prenant bonne note du fait que le
gouvernement demandera une nouvelle réunion de suivi de la CETCOIT, le comité veut
croire que le gouvernement veillera, avec la participation de la CETCOIT, à ce que tous
les éléments de l’accord conclu entre les parties soient respectés.
- 153. Pour ce qui est de l’effet de l’acte législatif no 01 du 22 juillet
2005 sur les pensions prévues par les conventions collectives, le comité renvoie aux
conclusions et recommandations qu’il a adoptées dans le cadre du cas no 2434 et du suivi
des aspects législatifs dudit cas par la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations dans le cadre de l’application des conventions nos 98 et
154.
- 154. Pour ce qui est des allégations relatives à la convention collective
signée par la municipalité de Bucaramanga, le SINTRAOBRAS et le SINTRAMUNICIPIO, le
comité note que les organisations plaignantes soutiennent que: i) la convention
collective conclue en décembre 2015 par lesdits syndicats et la municipalité prévoit
qu’à compter du 1er janvier 2016, les travailleurs officiels pourront être licenciés
uniquement pour un motif légitime avéré; ii) le maire a enfreint ladite convention en
adoptant les décrets nos 055 et 056 du 2 mai 2016, ainsi que la décision no 0270 du
3 mai 2016, qui ont eu pour effet de supprimer 27 postes de travailleur officiel
(chauffeurs et gardiens) pourvus par des membres et des dirigeants du SINTRAOBRAS et du
SINTRAMUNICIPIO et de créer 27 postes d’agent public pourvus par des non-titulaires,
auxquels les travailleurs concernés ont été affectés; iii) cette restructuration a rendu
le principe d’organisation syndicale inefficace, privé certains dirigeants du
SINTRAMUNICIPIO de leur congés syndicaux permanents et engendré d’innombrables frais de
justice pour lesdits syndicats; iv) des actions en nullité simple ont été introduites
contre les décrets no 055 et 056; v) une action pénale a été lancée contre le maire et
deux de ses conseillers pour violation des droits de réunion et d’association; vi) des
actions spéciales en réintégration fondées sur l’immunité syndicale, déposées par
Mmes Rubiela Jiménez Marín et Noyolis Jiménez Siderol, dirigeantes du SINTRAOBRAS, ont
été rejetées au terme de longues procédures judiciaires; et vii) MM. Yeins Alexis
Virviescas Vargas et Juan Guillermo Herrera Larrota, membres du SINTRAOBRAS, ont
introduit des actions individuelles en nullité et rétablissement de leurs droits.
- 155. Le comité note également que la municipalité, dans ses observations
transmises par le gouvernement, soutient que: i) les questions telles que les conditions
générales de travail, la sécurité sociale et les licenciements qui résultent de
programmes d’ajustement structurel et d’assouplissement n’ont pas de lien avec la
liberté syndicale et le comité n’est donc pas compétent pour les examiner; ii) selon la
législation du pays, les fonctionnaires sont des agents publics, à l’exception de ceux
qui travaillent dans le secteur de la construction ou de l’entretien de travaux publics,
qui ont le statut de travailleur officiel; iii) les décrets nos 055 et 056 et la
décision no 0270 ont été édictés sur la base d’un rapport élaboré en 2009 par l’organe
de contrôle municipal, qui a permis de constater que certains travailleurs officiels
s’acquittaient de tâches qui, en réalité, correspondaient à la catégorie des agents
publics, et d’une analyse technique, juridique et financière effectuée par le
secrétariat administratif de la municipalité; iv) les travailleurs concernés n’ont pas
été licenciés, mais comme ils n’avaient réussi aucun concours le seul statut auquel ils
pouvaient prétendre était celui d’agent public non titulaire; v) une demande en nullité
déposée par plusieurs travailleurs concernés contre le décret no 055 a été rejetée par
la onzième chambre du Tribunal administratif de la circonscription de Bucaramanga
(procédure orale) le 28 novembre 2017, décision confirmée par le Tribunal administratif
de Santander le 26 septembre 2019 et par le Conseil d’État le 27 février 2020; vi) le
Tribunal administratif de Santander a rejeté, par une décision du 23 février 2022,
l’action individuelle introduite par M. Virviescas Vargas, qui a interjeté appel devant
le Conseil d’État; et vii) la deuxième chambre du Tribunal administratif de la
circonscription de Bucaramanga a rejeté, par une décision du 13 décembre 2018, l’action
individuelle introduite par M. Herrera Larrota, qui a formé un appel actuellement en
instance devant le Tribunal administratif de Santander.
- 156. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement: i) signale que,
dans sa décision par laquelle elle a confirmé la légalité du décret no 055, la onzième
chambre du Tribunal administratif de la circonscription de Bucaramanga (procédure orale)
a établi qu’il n’y avait pas eu violation des droits syndicaux des plaignants, étant
donné que le décret a permis de rendre conforme au droit une situation irrégulière et
que la requalification effectuée se fondait sur l’analyse technique requise;
ii) soutient que la requalification était nécessaire et ne semble pas avoir été
effectuée à des fins de persécution syndicale, dans la mesure où la municipalité compte
14 organisations syndicales; et iii) informe que le 24 avril 2023, le septième tribunal
pénal municipal de connaissance a rendu un jugement d’acquittement en faveur du maire de
Bucaramanga et de ses conseillers dans le cadre de l’action pénale intentée contre eux,
jugement confirmé en deuxième instance le 18 avril 2024, décision qui, à son tour, a
fait l’objet d’un recours en reconsidération.
- 157. Notant que la municipalité conteste sa compétence s’agissant
d’examiner la requalification des 27 postes en question, le comité souligne que, s’il
n’est pas compétent pour se prononcer sur la question de savoir si les fonctionnaires
qui occupent certains postes doivent avoir le statut de travailleur officiel ou d’agent
public, il est de son devoir de s’assurer que les principes de liberté syndicale et de
négociation collective soient respectés dans le secteur public et que c’est donc
uniquement sous cet angle qu’il examine le processus de requalification en
question.
- 158. Le comité prend note des versions divergentes soutenues par les
organisations plaignantes et la municipalité en ce qui concerne les motivations derrière
la modification de la nature juridique des 27 postes de travailleur officiel requalifiés
en postes d’agent public (dans l’ordre juridique colombien, l’emploi des travailleurs
officiels est régi par leur contrat de travail, et celui des agents publics, par leur
statut; en outre, les postes d’agent public titulaire sont accessibles par voie de
concours public). Le comité note que, si les organisations plaignantes affirment qu’il a
été procédé à cette restructuration pour éluder un compromis obtenu par la négociation
collective, la municipalité soutient que la mesure visait seulement à corriger une
situation irrégulière. Sur la base des éléments fournis par les parties, le comité fait
observer que: i) le décret no 055 de mai 2016 par lequel 27 postes de travailleur
officiel ont été requalifiés en postes d’agent public a mis en application des
recommandations formulées par l’organe de contrôle municipal en 2009 et sa légalité a
été confirmée par les différents niveaux de la justice contentieuse-administrative du
pays; ii) en conséquence de ladite requalification, 27 travailleurs syndicalisés engagés
par la municipalité au titre d’un contrat à durée indéterminée ont acquis le statut
d’agent public non titulaire étant donné qu’ils n’avaient pas réussi un concours;
iii) le décret en question a été adopté quelques mois après la négociation et l’entrée
en vigueur d’une convention collective dont la première clause visait à accroître la
stabilité de l’emploi des travailleurs officiels de la municipalité; et iv) il n’est pas
établi que l’objet du décret susmentionné ait donné lieu à des consultations avec les
organisations syndicales.
- 159. Le comité observe que, si la requalification effectuée au moyen du
décret no 055 a eu pour effet de corriger une irrégularité et n’a pas formellement
enfreint la première clause de la convention collective conclue par le SINTRAOBRAS, le
SINTRAMUNICIPIO et la municipalité, elle a néanmoins engendré une dégradation de la
sécurité de l’emploi des travailleurs concernés, qui sont tous membres ou dirigeants de
syndicats, alors que l’objectif de ladite clause, récemment négociée par les parties,
était au contraire d’accroître la stabilité de l’emploi des fonctionnaires de la
municipalité. Le comité rappelle l’importance qu’il attache à l’obligation de négocier
de bonne foi pour le maintien d’un développement harmonieux des relations
professionnelles [voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale,
sixième édition, 2018, paragr. 1327] et rappelle qu’il a souligné l’importance de
consulter les organisations syndicales au moment d’élaborer les programmes de
restructuration, car elles ont un rôle fondamental à jouer afin que ces derniers
affectent le moins de travailleurs possible. [Voir Compilation, paragr. 1557.] Le comité
s’attend à ce que les éléments susmentionnés soient dûment pris en compte à
l’avenir.
- 160. En ce qui concerne les allégations relatives au siège du
SINTRAMUNICIPIO, le comité note que les organisations plaignantes déclarent que: i) il y
a plus de quarante ans, la municipalité de Bucaramanga a octroyé au SINTRAMUNICIPIO un
lot sur lequel se trouve le siège de l’organisation; et ii) la municipalité refuse de
continuer d’appliquer cet accord afin que soit construit un nouvel établissement
scolaire sur ce terrain. Le comité note également que le gouvernement: i) confirme que
le siège a été demandé, car un projet d’infrastructure allait être réalisé; et
ii) indique qu’à la suite de l’ouverture d’une plainte administrative, le ministère du
Travail a mené une enquête sur l’octroi du lot concerné et, par une décision du
19 octobre 2019, a conclu qu’il n’avait pas été démontré que les accords conclus par les
parties en 1970 et 1977 étaient juridiquement valables.
- 161. Tout en prenant dûment note de la décision émise par le ministère du
Travail, le comité rappelle qu’il a souligné la nécessité d’assurer l’équilibre entre
deux éléments: i) les facilités dans l’entreprise doivent être de nature à permettre aux
syndicats de remplir rapidement et efficacement leurs fonctions; et ii) leur octroi ne
devrait pas entraver le fonctionnement de l’entreprise intéressée. [Voir Compilation,
paragr. 1580.] Compte tenu de ce qui précède, le comité invite s’attend à ce que le
gouvernement à faciliter le dialogue entre la municipalité et le SINTRAMUNICIPIO afin
d’assurer que la résolution du litige garantisse la réalisation des activités dont la
municipalité a la responsabilité et le bon fonctionnement de l’organisation
syndicale.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 162. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil
d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- Le comité veut croire
que le gouvernement veillera, avec la participation de la CETCOIT, à ce que tous les
éléments de l’accord conclu entre le SENA et le SINTRASENA soient
respectés.
- Le comité s’attend à ce que les éléments mentionnés dans ses
conclusions en ce qui concerne l’obligation de négocier de bonne foi et l’importance
de consulter les organisations syndicales dans le cadre de l’élaboration des
programmes de restructuration soient dûment pris en compte à l’avenir.
- Le
comité invite s’attend à ce que le gouvernement à faciliter le dialogue entre la
municipalité et le SINTRAMUNICIPIO afin d’assurer que la résolution du litige
relatif au siège du syndicat garantisse la réalisation des activités dont la
municipalité a la responsabilité et le bon fonctionnement de l’organisation
syndicale.
- Le comité considère que le présent cas n’appelle pas un examen
plus approfondi et qu’il est clos.