Allégations: Les organisations plaignantes allèguent que la révision unilatérale
par le gouvernement des «directives pour l’innovation dans les institutions publiques» et du
«guide d’évaluation de la gestion des institutions publiques» a indûment restreint
les négociations libres et volontaires sur les avantages sociaux dans les institutions
publiques
- 585. La plainte figure dans une communication datée du 20 juillet 2022 de
la Fédération des syndicats coréens (FKTU), de la Fédération des syndicats coréens de
l’industrie publique (FKPITU), du Syndicat de l’industrie financière coréenne (KFIU) et
de la Fédération des syndicats coréens du secteur public (FKPTU). Dans une communication
datée du 20 juillet 2022, UNI Global Union soutient les allégations de son organisation
affiliée, le KFIU.
- 586. Le gouvernement a fourni ses observations dans une communication
datée du 3 février 2023.
- 587. La République de Corée a ratifié la convention (no 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur
le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 588. Dans leur communication du 20 juillet 2022, la FKTU, la FKPITU, le
KFIU et la FKPTU déclarent que, dans sa révision de 2021 du guide d’évaluation de la
gestion des institutions publiques (ci après guide d’évaluation de la gestion) et des
directives pour l’innovation dans les institutions publiques (ci-après directives pour
l’innovation), le ministère de l’Économie et des Finances (MOEF) a ajouté un nouvel
indicateur d’évaluation de la gestion des questions liées à la protection sociale dans
les institutions publiques, y compris les prêts par l’entreprise, ce qui, dans la
pratique, limite la liberté des travailleurs et des employeurs de déterminer ces
questions par le biais de la libre négociation collective. Les organisations plaignantes
allèguent que les avantages sociaux font partie des questions qui étaient auparavant
déterminées par la négociation collective dans le cadre du «fonctionnement autonome des
institutions publiques», garanti par la loi sur la gestion des institutions publiques
(AMPI), et que les révisions de 2021 empiètent sur les obligations du gouvernement de la
République de Corée en vertu de la convention no 98, y compris l’obligation de respecter
et de protéger la négociation autonome entre les travailleurs et les employeurs et de
s’abstenir d’avoir une incidence sur la négociation collective par des moyens
contraignants.
- 589. Les organisations plaignantes déclarent que l’AMPI prévoit que le
gouvernement garantit le fonctionnement autonome des institutions publiques, mais aussi
que le ministre de l’Économie et des Finances établit des directives après délibération
et résolution par le Comité directeur et les notifie aux dirigeants des institutions
publiques concernées. En ce qui concerne les prêts par l’entreprise, les organisations
plaignantes allèguent que, jusqu’en 2021, les directives pour l’innovation ne
prévoyaient que les dispositions suivantes: i) les institutions publiques peuvent
accorder des prêts pour les fonds pour le logement à partir de leur budget ou des fonds
d’aide sociale, tandis que les prêts pour les fonds de stabilisation des conditions de
vie ne peuvent être accordés qu’à partir des fonds d’aide sociale, sauf en cas de
délocalisation de l’entreprise, lorsque la stabilisation des conditions de vie peut
également être financée par le budget; et ii) les taux d’intérêt doivent être déterminés
en tenant compte des taux du marché, les prêts sans intérêt étant en principe interdits.
Selon les organisations plaignantes, dans ce cadre, les prêts au logement et aux moyens
de subsistance étaient accordés conformément aux accords entre les travailleurs et la
direction conclus dans le cadre de négociations collectives. Mais la version révisée des
directives pour l’innovation, datée du 29 juillet 2021, a introduit l’interdiction
d’accorder des prêts par l’entreprise pour l’achat d’une maison de plus de 85 mètres
carrés, a fixé des limites au montant du prêt et spécifié le taux d’intérêt à appliquer.
En outre, le 1er octobre 2021, le Comité directeur du MOEF a décidé d’inclure dans le
guide d’évaluation de la gestion un nouvel indicateur concernant l’amélioration du
système de prêts par l’entreprise, conformément aux directives pour l’innovation
révisées. Les organisations plaignantes précisent que, étant donné que les résultats de
l’évaluation de la gestion des institutions publiques ont un impact direct sur le
paiement fondé sur les résultats – les travailleurs des institutions publiques qui sont
évalués en dessous de la note D ne recevront aucun paiement fondé sur les résultats –,
ces évaluations servent de moyen contraignant pour invalider la négociation
collective.
- 590. En ce qui concerne la contribution de l’employeur aux fonds de
prévoyance des salariés, les organisations plaignantes allèguent que la loi-cadre sur la
protection sociale des travailleurs ne contient pas de restrictions spécifiques
concernant la contribution des propriétaires d’entreprise aux fonds de prévoyance des
salariés de l’entreprise, si ce n’est que le montant de cette contribution sera
déterminé par le conseil du fonds de réadaptation. Néanmoins, les directives du
gouvernement ont établi un cadre à cet égard, prévoyant que les contributions seront
versées aux fonds en tenant compte du montant de la contribution par employé, du niveau
de contribution des entreprises privées du même secteur et des ressources financières
requises pour les projets de protection sociale. Les organisations plaignantes allèguent
que ces dispositions des directives budgétaires rendent impossible la résolution de la
question par le biais de négociations autonomes entre les travailleurs et la
direction.
- 591. Les organisations plaignantes se réfèrent à la décision du tribunal
de district de Suwon du 11 janvier 2011 concernant l’indemnité des chercheurs des
instituts de recherche financés par le gouvernement et désignés comme institutions
publiques, qui stipule que les directives gouvernementales ne modifient pas le contenu
des conventions collectives existantes et ne constituent pas une base pour exclure
l’application de la loi sur les normes du travail (LSA). Elles affirment que, en dépit
de cette décision, en révisant ses directives et le guide d’évaluation de la gestion, le
gouvernement s’immisce dans les négociations autonomes entre les travailleurs et la
direction portant sur les questions telles que le coût total de la main-d’œuvre, la
protection sociale et le fonds de prévoyance de l’entreprise. Les organisations
plaignantes soulignent en particulier que, bien que les questions liées à la protection
sociale doivent être déterminées de manière autonome entre les travailleurs et la
direction, la portée et les détails spécifiques fixés dans les directives rendent les
négociations à ce sujet pratiquement impossibles, en particulier au vu des conséquences
néfastes possibles en cas d’évaluation négative d’une institution publique, à savoir
notamment le licenciement du chef de l’agence, des mesures d’avertissement et le
paiement différentiel des salaires fondés sur les performances. Selon les organisations
plaignantes, étant donné que le champ et les limites des négociations sont déterminés de
l’extérieur et que les travailleurs et la direction ne peuvent déterminer les conditions
de travail que dans ce cadre limité, il y a violation du droit à la négociation
collective. Le gouvernement oblige pratiquement la négociation collective à reprendre
les détails des critères d’évaluation de la gestion, car les employeurs des institutions
publiques ne peuvent pas prendre le risque d’une évaluation défavorable et n’ont pas
d’autre choix que de modifier les questions de négociation collective conformément aux
directives et au guide d’évaluation de la direction. Les organisations plaignantes
soulignent que le gouvernement a révisé les directives et le guide d’évaluation de la
gestion en fonction de nécessités financières, de manière unilatérale et sans
préavis.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 592. Dans sa communication du 3 février 2023, le gouvernement rejette
l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle il a porté atteinte au droit
de négociation collective des travailleurs et des employeurs des institutions publiques
en révisant ses directives et son guide d’évaluation de la gestion. Concernant
l’allégation selon laquelle les directives ont été révisées unilatéralement et sans
préavis, le gouvernement indique que, lors de l’établissement des directives
budgétaires, il a procédé à des consultations tripartites par l’intermédiaire du Conseil
économique, social et du travail. Il précise à cet égard que le Comité de développement
du secteur public (PSDC) était l’organe tripartite – composé d’un président, de neuf
commissaires représentant respectivement les travailleurs, les employeurs et le
gouvernement, et de cinq commissaires de l’intérêt public –, par l’intermédiaire duquel
les consultations ont été menées du 17 septembre 2014 au 30 avril 2015. À l’époque, le
PSDC était organisé dans le cadre du «Conseil tripartite pour le développement
économique et social», aujourd’hui connu sous le nom de Conseil économique, social et du
travail. Au cours de sa période de fonctionnement, le PSDC a discuté de questions liées
aux «directives budgétaires de 2015», aux plans d’amélioration du système de gestion du
secteur public, aux stratégies rationnelles sur la gestion de la main-d’œuvre et au
système salarial.
- 593. Le gouvernement indique en outre que, en novembre 2014, le PSDC a
examiné les propositions des travailleurs concernant les directives budgétaires,
notamment lors de deux réunions de travail avec le MOEF et les représentants des
travailleurs. Bien qu’aucun accord final n’ait été conclu entre le gouvernement et les
travailleurs et qu’aucune recommandation n’ait été adoptée à l’époque, les deux parties
ont obtenu par le dialogue des résultats satisfaisants dans l’amélioration du système
lié au taux de contribution des fonds de prévoyance des salariés, et le gouvernement a
par la suite révisé partiellement les directives budgétaires de 2015 afin de refléter
les critères demandés par les travailleurs. Dans la version révisée des directives, cinq
taux de contribution ont été prévus (5, 4, 3, 2 et 0 pour cent du bénéfice net de
l’entreprise avant impôt) correspondant à cinq fourchettes du montant cumulé du fonds
par personne (5 ou moins, 5 10, 10 15, 15 25 et plus de 25 millions de wons
sud-coréens), alors qu’il y avait auparavant trois taux de contribution (5, 2 et 0 pour
cent du bénéfice net avant impôt, correspondant à 5 ou moins, 5 20 et plus de
20 millions de wons sud-coréens du montant cumulé du fonds par personne). Selon la
communication du gouvernement, les directives budgétaires de 2014 et les directives
budgétaires révisées de 2015 prévoyaient toutes deux que le montant de la contribution
par salarié et le niveau de contribution des entreprises privées du même secteur ou de
secteurs similaires seraient pris en compte pour fixer le montant des contributions et
que toutes les autres contributions spéciales étaient interdites.
- 594. Le gouvernement cite des dispositions de la législation nationale
garantissant la liberté syndicale et le droit à la négociation collective, notamment
l’article 94 de la LSA, qui dispose que l’employeur doit, en ce qui concerne
l’élaboration ou la modification des règles d’emploi, entendre l’avis d’un syndicat s’il
existe un tel syndicat composé de la majorité des travailleurs de l’entreprise ou du
lieu de travail concerné, ou autrement entendre l’avis de la majorité desdits
travailleurs; et qu’en cas de modification des règles d’emploi défavorable aux salariés,
l’employeur doit obtenir leur consentement à cet égard. Il indique en outre que, bien
que les directives pour le budget et l’innovation soient notifiées aux institutions
publiques, selon la législation nationale, ces institutions doivent d’abord suivre leur
propre processus décisionnel pour confirmer les questions liées aux salaires, à la
protection sociale, à la contribution aux fonds de prévoyance des salariés et aux
programmes de prêts par l’entreprise, proposer des cadres de révision tels que les
règles d’emploi ou les conventions collectives couvrant ces questions et recevoir
l’accord des groupes de travailleurs (syndicats ou représentants) à ce sujet.
L’opposition des travailleurs peut faire échec à la modification des règles d’emploi ou
des conventions collectives conformément aux directives du gouvernement. En pareil cas,
la gestion d’une institution n’est considérée comme insuffisante dans le rapport
d’évaluation la concernant que dans des domaines pertinents tels que les salaires et les
dépenses sociales.
- 595. En réponse à l’allégation selon laquelle ses directives portent
atteinte au droit des travailleurs du secteur public à la négociation collective et à la
convention no 98, le gouvernement indique que, dans un arrêt daté du 31 janvier 2002, la
Cour constitutionnelle a statué que les directives budgétaires sont notifiées aux
institutions investies par le gouvernement en tant qu’acte interne de gestion et que,
par conséquent, les parties à la négociation collective ne peuvent pas leur attribuer
aucune faute, car elles ne constituent pas un exercice de la puissance publique sur les
travailleurs, mais un acte de supervision interne entre le gouvernement et les
institutions publiques. Le gouvernement souligne à cet égard que les directives ne lient
pas directement les institutions publiques, et qu’elles ne font que proposer des
recommandations internes à l’institution bénéficiaire. Il indique en outre que ces
arguments s’appliquent également aux directives pour l’innovation et que, s’agissant
spécifiquement des prêts par l’entreprise, la modification des règlements internes en
vue de les aligner sur les dispositions des directives pour l’innovation requiert
l’accord du syndicat conformément aux articles 4 et 94 de la LSA. Selon le gouvernement,
les travailleurs et la direction peuvent décider de ne pas appliquer les directives
concernant les limites des prêts et les taux d’intérêt. Par conséquent, le gouvernement
conclut qu’il n’a pas porté atteinte au droit à la négociation collective sur cette
question dans les institutions publiques.
- 596. En réponse à l’allégation de violation du droit de négociation
collective par la révision du guide d’évaluation de la gestion, le gouvernement indique
qu’il procède à des évaluations de la gestion afin de renforcer la publicité et
l’efficacité de la gestion et d’encourager l’amélioration des services publics. Les
normes et méthodes d’évaluation sont présentées à l’avance dans le guide, mais celui-ci
n’a pas de force contraignante pour les institutions publiques ou les travailleurs, et
si les institutions publiques n’obtiennent pas de bons résultats pour certains
indicateurs, elles seront seulement évaluées comme insuffisantes dans l’amélioration de
la gestion concernant ces indicateurs. Ainsi, dans le guide 2021, l’exécution du coût
total de la main-d’œuvre dans le cadre des directives budgétaires et le respect du
système de prêts par l’entreprise dans le cadre des directives pour l’innovation sont
présentés comme des indicateurs d’évaluation. Néanmoins, trois institutions ont exécuté
un coût total de la main-d’œuvre supérieur à la limite fixée et de nombreuses
institutions ont appliqué des critères différents aux prêts par l’entreprise. Le
gouvernement conclut en conséquence que les évaluations de la gestion et le guide
correspondant n’enfreignent pas le droit à la négociation collective.
- 597. En réponse à l’allégation de violation du droit de négociation
collective par la restriction unilatérale du coût total de la main-d’œuvre dans les
directives budgétaires, le gouvernement indique que la fixation d’un plafond pour le
coût total de la main-d’œuvre dans les directives vise à prévenir une expansion
excessive et une gestion laxiste du secteur public et que, comme la plupart des
institutions publiques utilisent le soutien budgétaire du gouvernement et bénéficient de
droits commerciaux exclusifs, une gestion stricte de leur coût de la main-d’œuvre est
essentielle. Néanmoins, chaque institution peut décider de manière autonome de méthodes
de paiement et de montants spécifiques dans les limites du plafond fixé. En outre, le
gouvernement applique le système de manière flexible, par exemple en appliquant le taux
d’augmentation de manière différenciée en fonction du niveau de rémunération des
institutions, en vue de réduire l’écart salarial entre les différentes institutions
publiques. Le gouvernement souligne à nouveau que l’on ne peut pas considérer que les
réglementations sur le coût total de main d’œuvre violent le droit à la négociation
collective dans les institutions publiques, car les directives budgétaires n’invalident
pas les conventions collectives qui ont déjà pris effet et les agences gouvernementales
ne bloquent ni ne restreignent l’effectivité de ces conventions. Il réitère que les
directives ne lient pas les conventions collectives et ne requièrent pas l’approbation
du gouvernement pour les conventions collectives conclues. Enfin, selon le gouvernement,
la norme des directives budgétaires concernant le taux de paiement fondé sur les
résultats est également proposée comme un modèle idéal et est utilisée pour la gestion
et la supervision gouvernementale des institutions publiques.
- 598. En réponse à l’allégation d’ingérence dans les négociations
collectives concernant les prêts par l’entreprise, le gouvernement indique que les
institutions publiques fournissent des fonds de logement et des fonds de stabilité de
vie à leurs salariés par le biais de ce système de prêts et réitère que les directives
pour l’innovation, dont la révision de 2021 a renforcé les exigences sur les limites et
les taux d’intérêt des prêts par l’entreprise, ne lient pas directement les institutions
publiques et sont seulement proposées par le ministère de l’Économie et des Finances
pour l’innovation en matière de gestion. Tout changement défavorable aux travailleurs
dans les règles existantes concernant les prêts au sein d’une institution publique
nécessitera l’accord des syndicats. Le gouvernement indique en outre que la décision du
tribunal de district de Suwon du 11 janvier 2012, citée par les organisations
plaignantes, confirme que les directives du gouvernement ne peuvent pas modifier le
contenu des conventions collectives. Il souligne à nouveau le caractère spécifique des
institutions publiques, qui réalisent des bénéfices en échange de la fourniture de
services exclusifs désignés par le gouvernement ou qui bénéficient d’autres formes
d’aide financière publique leur procurant d’importants avantages concurrentiels. Selon
le gouvernement, les dispositions des directives pour l’innovation concernant les
avantages sociaux et les prêts par l’entreprise sont des recommandations de gestion
adressées aux employeurs des institutions publiques. Le gouvernement conclut en
conséquence que ces dispositions sont compatibles avec la libre conclusion de
conventions collectives dans les institutions publiques.
- 599. Rejetant l’allégation selon laquelle la réglementation par les
directives budgétaires du niveau des contributions aux fonds de prévoyance des salariés
rend impossible toute négociation autonome entre les travailleurs et la direction sur
cette question, le gouvernement indique que l’article 61.1 de la loi-cadre sur la
protection sociale des travailleurs prévoit qu’un propriétaire d’entreprise peut verser
un montant fixé par le conseil du fonds de prévoyance, sur la base de 5 pour cent du
revenu net avant déduction de l’impôt sur les sociétés ou sur le revenu de l’année
précédente, à titre de ressources financières pour le fonds de prévoyance des
travailleurs de l’entreprise, et que la disposition des directives relatives au
plafonnement de la contribution est compatible avec cette disposition de la loi-cadre.
Le gouvernement se réfère en outre à un arrêt de la Cour suprême dans un cas concernant
la Korea District Heating Corporation (Société coréenne de chauffage urbain), où le
conseil du fonds de prévoyance avait décidé de verser une contribution de 2 pour cent du
bénéfice avant impôt, en vue de se conformer aux directives pour la budgétisation 2010.
La communication du gouvernement cite un extrait de l’arrêt de la Cour suprême selon
lequel, étant donné que l’obligation du défendeur de contribuer aux fonds de prévoyance
n’intervient que lorsque le conseil a convenu ou décidé du taux de contribution, le
plaignant ne peut pas demander immédiatement au défendeur de remplir l’obligation de
contribuer en vertu de l’accord (la convention collective du personnel et de la
direction de la Korea District Heating Corporation prescrivant de conserver 5 pour cent
des bénéfices nets avant impôt pour le fonds de prévoyance des travailleurs de
l’entreprise) dans ce cas.
- 600. Le gouvernement indique en outre que, en vertu de l’article 51(2)(1)
de l’AMPI, lorsqu’une institution publique a l’intention de verser une contribution à un
fonds déterminé de prévoyance par l’entreprise, elle doit d’abord consulter le ministère
de l’Économie et des Finances. Cette consultation préalable vise à empêcher les
investissements inconsidérés des institutions publiques qui, contrairement aux
entreprises privées, fonctionnent avec des taxes ou génèrent des bénéfices grâce à la
fourniture de services exclusifs désignés par le gouvernement. Selon le gouvernement,
les dispositions pertinentes des directives budgétaires précisent les procédures de ces
consultations préliminaires, dont l’objet est le montant de la contribution à présenter
au cours du processus de consultation entre les travailleurs et la direction. En fin de
compte, le montant de la contribution est déterminé par le conseil social du fonds, qui
est composé d’un nombre égal de membres des travailleurs et de la direction. Ce montant
peut différer des résultats de la consultation préalable. Par conséquent, les directives
budgétaires n’ont pas de force contraignante à cet égard et n’interfèrent pas dans les
négociations collectives en la matière.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 601. Le comité note que ce cas concerne l’ingérence alléguée du
gouvernement dans la négociation collective au sein des institutions publiques par le
biais de la publication de directives et de rapports d’évaluation de la gestion. Il
rappelle que la question de l’impact des directives du gouvernement et des évaluations
de la gestion sur la négociation collective dans le secteur public a été soulevée dans
plusieurs cas précédents concernant la République de Corée, notamment dans les cas
nos 2829 et 3237 [voir 365e rapport, paragr. 430 582, et 386e rapport, paragr. 160 213],
et plus récemment dans le cas no 3430. [Voir 403e rapport, paragr. 438 495.]
- 602. Le comité note que la plainte porte principalement sur l’impact des
directives et évaluations du gouvernement sur la négociation collective concernant deux
questions: les prêts par l’entreprise et le niveau de la contribution de l’employeur aux
fonds de prévoyance des salariés. En particulier, le comité note que les organisations
plaignantes allèguent que la révision unilatérale de 2021 des directives pour
l’innovation dans les institutions publiques (ci-après directives pour l’innovation) et
du guide d’évaluation de la gestion des institutions publiques (ci-après le guide
d’évaluation de la gestion) a entraîné l’ajout de nouveaux indicateurs d’évaluation de
la gestion concernant la rémunération et la protection sociale, y compris le respect des
nouvelles directives sur les prêts par l’entreprise. Le comité note que, selon les
organisations plaignantes, ces changements ne laissent pas d’autre choix aux employeurs
des institutions publiques que de modifier les règles internes antérieures régissant les
avantages sociaux – qui ont été définies par la négociation collective – en vue de se
conformer aux nouvelles directives, car on ne peut attendre d’eux qu’ils maintiennent
les règles existantes au prix de résultats défavorables en matière d’évaluation de la
gestion. Le comité prend note de l’allégation des organisations plaignantes selon
laquelle, étant donné que les directives, telles qu’elles sont appliquées par le biais
de l’évaluation de la gestion, déterminent la portée et les limites des négociations
entre les syndicats et la direction, le gouvernement a, par leur adoption, porté
atteinte au droit à la libre négociation collective dans les institutions
publiques.
- 603. Le comité note que, en réponse à ces allégations, le gouvernement
confirme que les modifications alléguées ont été apportées aux directives et au guide
d’évaluation de la gestion, mais il indique que les directives ne sont pas directement
contraignantes pour les institutions publiques et que toute modification du règlement
intérieur qui serait défavorable aux travailleurs nécessiterait le consentement du
syndicat ou de la majorité des travailleurs pour devenir effective. Par conséquent, le
gouvernement rejette l’allégation selon laquelle la révision des directives et du guide
d’évaluation porte atteinte au droit de négociation collective dans les institutions
publiques. Le comité prend également note des indications du gouvernement en réponse à
l’allégation selon laquelle les directives ont été révisées unilatéralement, indiquant
que des consultations tripartites ont eu lieu avant l’adoption des directives
budgétaires de 2015, et que, bien qu’elles n’aient pas abouti à un accord formel entre
les travailleurs et le gouvernement, ce dernier a partiellement révisé les directives
budgétaires de 2015 pour refléter les demandes des travailleurs concernant les critères
de détermination du taux de contribution aux fonds de prévoyance des salariés. Le comité
note toutefois que le gouvernement ne fait référence à aucune consultation menée avant
la révision de 2021 des directives pour l’innovation, ou concernant spécifiquement le
système recommandé pour l’octroi de prêts par l’entreprise, sur lequel se concentrent
les allégations des organisations plaignantes.
- 604. Le comité rappelle que, dans son examen du cas no 3430, qui porte,
entre autres, sur l’impact des recommandations incluses dans les directives pour
l’innovation de 2021 sur la négociation collective concernant les prêts par l’entreprise
[voir 403e rapport, paragr. 489], il a noté que: «[…] la négociation collective sur les
conditions d’emploi dans les institutions publiques de la République de Corée est
complètement décentralisée et se déroule au niveau de chaque institution publique.
Néanmoins, en ce qui a trait à certaines conditions d’emploi évoquées dans la plainte,
le gouvernement a formulé des normes et des politiques générales sous la forme de
“recommandations” présentées dans les directives qui sont applicables à toutes les
institutions publiques relevant du contrôle du ministère de l’Économie et des Finances.
Ces recommandations ne sont pas juridiquement contraignantes mais sont intégrées dans
les indicateurs utilisés pour évaluer la gestion des institutions publiques, évaluation
qui détermine les disponibilités budgétaires pour les exercices à venir. En tant que
telles, ces recommandations servent de cadre non contraignant juridiquement mais
exécutoire dans la pratique pour la négociation collective au niveau de l’institution
individuelle». [Voir 403e rapport, paragr. 481.] Le comité a estimé que, compte tenu des
caractéristiques particulières de la plupart des institutions publiques, telles que le
fait qu’elles reçoivent un soutien budgétaire de l’État et qu’elles jouissent de droits
commerciaux exclusifs, un cadre peut être défini pour l’exercice du droit de négociation
collective dans ces institutions en vue d’assurer la préservation de l’intérêt public.
Néanmoins, le comité a également considéré que, pour être compatible avec le droit à la
négociation libre et volontaire, ce cadre devrait laisser une place significative à la
négociation collective et qu’il est essentiel que les travailleurs et leurs
organisations puissent participer pleinement et de façon significative à la
détermination de ce cadre global de négociation, ce qui implique notamment qu’ils aient
à leur disposition toutes les données financières, budgétaires ou autres, leur
permettant d’apprécier la situation en toute connaissance de cause. [Voir 403e rapport,
paragr. 482.] Le comité estime que ces considérations s’appliquent de manière identique
au présent cas. Il examinera ensuite si les directives du gouvernement concernant les
prêts par l’entreprise et le taux de contribution de l’employeur aux fonds de prévoyance
des salariés laissent encore un rôle important à la négociation collective sur ces
questions et si les travailleurs et leurs organisations ont été en mesure de participer
pleinement et utilement à la conception du cadre mis en place par les directives et
appliqué par le biais des évaluations de la gestion.
- 605. En ce qui concerne le taux de contribution de l’employeur aux fonds
de prévoyance des salariés, le comité note que les organisations plaignantes allèguent
que la loi-cadre sur la protection sociale des travailleurs autorise les propriétaires
d’entreprise à contribuer aux fonds dans les limites prescrites par la loi sans prévoir
de restrictions spécifiques, si ce n’est que le montant doit être déterminé par le
«conseil du fonds de réadaptation». Toutefois, les directives du gouvernement
établissent des normes détaillées à cet égard qui imposent des restrictions strictes aux
négociations autonomes entre les travailleurs et la direction. Le comité note également
l’indication du gouvernement selon laquelle les critères de contribution ont été
partiellement révisés lors de la révision de 2015 des directives budgétaires pour tenir
compte des demandes des travailleurs, exprimées lors des consultations tripartites
tenues en 2014; toutefois, le gouvernement ne fait pas référence à d’autres
consultations tripartites sur la question depuis 2014.
- 606. Le comité note que la norme pertinente des directives budgétaires de
2015 lie le niveau de la contribution de l’employeur aux fonds de prévoyance des
salariés au montant cumulé du fonds par personne et exclut la contribution de
l’employeur lorsque ce montant atteint 25 millions de wons sud-coréens. Il note en outre
que la décision finale sur le taux de contribution de l’employeur appartient au «conseil
du fonds prévoyance», qui est composé d’un nombre égal de membres des travailleurs et de
la direction. Le comité prend note de la référence du gouvernement à l’arrêt de la Cour
suprême concernant le cas de la Korea District Heating Corporation, où le conseil du
fonds de prévoyance avait fixé le niveau de la contribution de l’employeur à 2 pour cent
du revenu avant impôt en vue de se conformer aux directives de budgétisation de 2010,
alors que la convention collective de l’entreprise prévoyait une contribution de 5 pour
cent. Le comité note que l’arrêt de la Cour suprême a validé la prévalence de la
décision du conseil du fonds de prévoyance sur la convention collective. Il note
également l’indication du gouvernement selon laquelle le niveau de contribution proposé
pour décision au conseil du fonds de prévoyance est le résultat de consultations
préliminaires entre l’institution publique concernée et le MOEF, et que les dispositions
pertinentes des directives budgétaires sont appliquées dans le cadre de ces
consultations préliminaires mais ne sont pas contraignantes pour le conseil du fonds de
prévoyance, dont la décision peut différer des résultats des consultations
préliminaires. Néanmoins, le comité note que le texte de la disposition pertinente des
directives budgétaires prévoit que «le montant des contributions aux fonds de prévoyance
des salariés sera déterminé en fonction des critères énoncés ci-dessous…». En outre, le
guide d’évaluation de la gestion de 2021 définit un indicateur de 1,5 point qui couvre
l’amélioration du système d’avantages sociaux, y compris les prêts par l’entreprise, et
qui répond à la question de savoir si l’institution a consacré un montant excessif aux
avantages sociaux par rapport à l’année précédente. Compte tenu de ce qui précède, le
comité comprend que, bien que les conseils des fonds de prévoyance n’aient aucune
obligation légale de suivre les directives, dans la pratique, ils peuvent se sentir
obligés de ne pas les ignorer afin d’éviter de mauvaises notes lors de l’évaluation de
la gestion. Le comité considère donc que le système actuel est susceptible de réduire
l’espace de négociation collective libre et volontaire dans la détermination du niveau
de contribution de l’employeur aux fonds de prévoyance des salariés.
- 607. En ce qui concerne les conditions d’attribution des prêts par
l’entreprise, le comité note que, selon les organisations plaignantes, jusqu’en 2021,
les directives pour l’innovation ne contenaient que des dispositions générales
concernant l’attribution des prêts qui permettaient aux parties à la négociation
collective au sein de chaque institution publique de définir les règles applicables par
voie d’accord et que les prêts étaient attribués conformément à ces accords. Mais la
révision de 2021 a recommandé l’introduction de restrictions significatives concernant
les conditions d’attribution des prêts au logement. Le comité note que les directives
pour l’innovation révisées fixent également des limites au montant des prêts au logement
et des prêts de stabilisation des ménages, augmentent les taux d’intérêt applicables et
exigent l’application du ratio prêt-valeur lors de l’attribution des prêts au logement.
Les organisations plaignantes allèguent que le gouvernement a rendu les négociations
autonomes de facto impossibles en fixant des détails spécifiques dans les directives et
en intégrant ces critères dans un indicateur d’évaluation de la gestion. Le comité note
que le gouvernement rejette cette allégation, en indiquant que les directives pour
l’innovation ne sont pas directement contraignantes pour les institutions publiques et
que le consentement des travailleurs est indispensable pour modifier les accords
précédemment applicables concernant les prêts par l’entreprise. Le comité note en outre
que, selon le gouvernement, les travailleurs et la direction peuvent décider de ne pas
appliquer les normes des directives concernant les limites des prêts et les taux
d’intérêt et que de nombreuses institutions publiques ne suivent pas les recommandations
des directives concernant les prêts par l’entreprise. Compte tenu du fait que le
gouvernement ne fournit aucune indication sur la participation des organisations de
travailleurs au processus de révision des directives pour l’innovation, le comité
observe que, en ce qui concerne les prêts par l’entreprise, les directives pour
l’innovation, telles qu’elles sont appliquées par le biais des évaluations de la
gestion, sont susceptibles de restreindre le champ de la négociation collective dans les
institutions publiques sur la base d’un cadre qui a été conçu sans une participation
significative des travailleurs et de leurs organisations.
- 608. Le comité rappelle que, dans le cas no 3430, il avait prié le
gouvernement de mettre en place un mécanisme de consultation régulière qui permette aux
organisations représentant les travailleurs des institutions publiques de participer
pleinement et utilement à la formulation des directives relatives aux conditions de
travail. Le comité considère donc de la même manière que, pour assurer le respect
effectif du droit des travailleurs et des employeurs des institutions publiques à la
négociation collective en ce qui concerne les questions d’avantages sociaux, le
gouvernement devrait soumettre ces questions à la consultation des organisations
représentant les travailleurs des institutions publiques et veiller à ce que les
directives pertinentes respectent pleinement l’autonomie des parties en matière de
négociation collective de leurs conditions. Le comité prie le gouvernement de le tenir
informé des mesures prises à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 609. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil
d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité prie le
gouvernement de soumettre les questions relatives aux avantages sociaux soulevées
dans le présent cas à une consultation avec les organisations représentant les
travailleurs des institutions publiques et de veiller à ce que les directives
pertinentes respectent pleinement l’autonomie des parties dans la négociation
collective de leurs conditions. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé
des mesures prises à cet égard.