Allégations: L’organisation plaignante allègue la commission de nombreux actes
antisyndicaux, notamment des transferts et des licenciements de dirigeants syndicaux et de
membres d’un syndicat d’un hôpital public, ainsi que la création de tables rondes sur les
relations professionnelles (TRRP) dans le secteur de la santé publique avec des
représentants de travailleurs non syndiqués dans le but de saper le dialogue et les
négociations avec les organisations syndicales
- 291. La plainte a été présentée par la Coordination syndicale
salvadorienne par le biais de communications datées du 7 septembre et du 5 novembre
2015.
- 292. Le gouvernement d’El Salvador a envoyé ses observations sur les
allégations dans deux communications datées du 31 octobre 2016 et du 27 septembre
2019.
- 293. El Salvador a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 135) concernant les
représentants des travailleurs, 1971, la convention (no 151) sur les relations de
travail dans la fonction publique, 1978, ainsi que la convention (no 154) sur la
négociation collective, 1981.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 294. Dans sa communication du 7 septembre 2015, la Coordination syndicale
salvadorienne indique qu’elle dépose une plainte pour violation des conventions de l’OIT
sur la liberté syndicale et la négociation collective ratifiées par El Salvador en
raison de nombreux actes antisyndicaux commis au détriment du Syndicat des médecins de
l’hôpital Rosales (SIMEHR), qui dépend du ministère de la Santé (MINSAL).
- 295. L’organisation plaignante indique que le SIMEHR, organisation
constituée en 2009, a présenté à plusieurs reprises des demandes de respect de
l’article 7 de la convention no 151 afin de participer à la détermination des conditions
d’emploi des médecins de l’hôpital Rosales, que le SIMEHR considère comme désastreuses,
sous-humaines et déficientes.
- 296. Le SIMEHR affirme que, après avoir déposé une série de plaintes dans
le but d’obtenir un lieu de travail sûr avec les ressources nécessaires pour soigner
correctement les patients de l’hôpital, le directeur a pris des mesures de représailles.
Selon l’organisation plaignante, ces mesures visaient à harceler et à violer les droits
du syndicat et de ses membres, le tout sous l’œil complaisant des hautes autorités du
MINSAL et du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.
- 297. Ainsi, l’organisation plaignante allègue que le directeur de
l’hôpital Rosales a adopté une série de mesures antisyndicales au cours des années 2010
et 2011, à savoir: i) mutation arbitraire de trois médecins qui étaient responsables des
unités d’enseignement et qui, à leur tour, exerçaient les foncions de responsables
syndicaux; ii) harcèlement professionnel et mutation de l’ancien chef du service de
pathologie, membre du syndicat, par la diffusion de rapports d’audit falsifiés;
iii) violation des droits du travail et harcèlement psychologique à l’encontre d’une
spécialiste du service de pathologie, la doctoresse Genoveva Ochoa, membre du syndicat,
qui a demandé à être transférée dans un autre hôpital; et iv) violation des droits du
travail du chef de l’unité de recherche de l’hôpital Rosales, membre du syndicat, en
obligeant son supérieur immédiat à modifier à la baisse son évaluation de performance en
représailles à sa participation à une manifestation.
- 298. L’organisation plaignante allègue en outre que le directeur de
l’hôpital Rosales a commis une série de violations des droits syndicaux des dirigeants
et membres du syndicat en 2012 et 2013, à savoir: i) licenciements injustes et
arbitraires de membres du syndicat, comme celui du chef de l’unité de soins intensifs et
du chef du service d’oto-rhino-laryngologie; ii) violation des droits du docteur Alcides
Gómez Hernández, secrétaire général du syndicat, en lui infligeant un blâme en 2012 pour
des raisons qu’il n’a jamais pu prouver; l’intéressé s’est également vu refuser le droit
à la défense dans le processus de sanction; iii) fouilles injustifiées des biens de
membres du syndicat suite à une plainte pour disparition de fournitures en 2012;
iv) suspension du membre du syndicat, le docteur Guillermo Reyes en 2012 pour avoir
refusé une perquisition policière, sans avoir eu la possibilité de se défendre; enfin,
vi) refus d’accorder des congés syndicaux aux dirigeants syndicaux.
- 299. L’organisation dénonce ensuite l’imposition unilatérale, en juin
2014, du système de pointage des entrées et sorties du lieu de travail par l’utilisation
exclusive du marquage biométrique, sans consultation du syndicat, ce qui a été perçu
comme un acte de répression. L’organisation plaignante allègue en outre que cette
pratique va à l’encontre de la nature des soins médicaux spécialisés et des droits
syndicaux, car elle conduit à la mécanisation de l’activité de soins médicaux.
L’organisation plaignante déclare également que toutes ces mesures s’inscrivent dans un
schéma continu de mauvais traitements, de harcèlement au travail et de manque de
fournitures et d’équipements. L’organisation plaignante indique que, après la
ratification de la nomination du docteur Mauricio Ventura au poste de directeur de
l’hôpital Rosales, le SIMEHR a tenté, en vain, de résoudre la problématique du travail
avec le directeur de l’hôpital, ainsi qu’avec les autorités du MINSAL. À cette fin,
selon l’organisation plaignante, elle a tenu des réunions avec plusieurs hauts
fonctionnaires du MINSAL et de l’hôpital Rosales, sans parvenir à trouver une solution à
la problématique du travail à laquelle elle était confrontée.
- 300. L’organisation plaignante allègue que la situation très tendue
concernant la problématique du travail a conduit l’Assemblée des médecins à décider de
réduire le travail ambulatoire le 9 septembre 2014, en excluant certaines spécialités
critiques. L’organisation plaignante affirme que ce n’est qu’après l’adoption de cette
mesure que les autorités du MINSAL et le bureau de la Procureure chargée des droits de
l’homme (PDDH) ont décidé de prendre des mesures à ce sujet. En outre, l’organisation
plaignante affirme que, bien que le PDDH ait mis en place une table de dialogue et de
négociation entre les autorités du MINSAL et les médecins spécialistes de l’hôpital
Rosales, représentés par le SIMEHR, aucun progrès n’a été réalisé, attribuant cette
absence de progrès à l’alignement politique du PDDH et aux ambitions personnelles de la
Procureure chargée des droits de l’homme.
- 301. L’organisation plaignante indique que, le 17 septembre 2014, elle a
reçu la notification de la décision rendue par le premier juge du travail de San
Salvador déclarant illégale la grève menée par le SIMEHR depuis le 9 septembre 2014 et
sommant les grévistes de retourner à leurs postes de travail respectifs. L’organisation
plaignante indique également qu’après le rejet de l’appel interjeté devant le même
tribunal, le SIMEHR a introduit, le 20 octobre 2014, un recours en amparo devant la
Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice qui, à la date de dépôt de la
plainte en septembre 2015, n’avait pas été résolu. L’organisation plaignante poursuit en
indiquant qu’elle a été contrainte de former un recours en amparo devant le Tribunal
suprême, car en vertu de l’article 565 du Code du travail, aucun recours n’est recevable
contre une décision relative à la qualification d’une grève ou d’un arrêt de travail.
L’organisation plaignante allègue que cette disposition est contraire aux normes
internationales du travail.
- 302. L’organisation plaignante allègue en outre que le conflit a continué
à s’aggraver en raison des mesures de rétorsion prises par les autorités de l’hôpital
Rosales, à savoir: i) déductions salariales de 40 pour cent au mois de juillet 2014,
avant même le début de la réduction des tâches; ii) déductions de 100 pour cent au titre
des mois d’août 2014 et de plus de 100 pour cent du salaire au titre des mois de
septembre à octobre 2014, et de janvier à mai 2015; iii) plaintes pénales déposées le
10 septembre 2014, c’est-à-dire le lendemain de la réduction du travail, par le
directeur de l’hôpital auprès du bureau du Procureur général de la République contre le
comité exécutif du syndicat et 42 médecins spécialistes, eux-mêmes membres du syndicat,
pour les infractions présumées de refus de soins de santé (art. 176 du Code pénal) et de
manquement aux obligations (art. 231 du Code pénal); iv) plaintes auprès du premier
tribunal du travail déposées par le directeur de l’hôpital contre 82 médecins
spécialistes dans le but de déclarer la grève de réduction des tâches illégale, une
déclaration d’illégalité qui a été décrétée par le premier tribunal du travail le
17 septembre 2014; v) persécution par des membres de la police politique les 14, 15 et
16 septembre 2014, qui se sont rendus au domicile de certains membres du syndicat, sans
présenter de pièce d’identité, pour les informer qu’ils faisaient l’objet d’une enquête,
dans le but de les intimider; vi) suspension de travail d’une journée de 21 chefs de
médecins spécialistes, dont la plupart sont membres du syndicat et de son comité
exécutif; et vii) ouverture d’une procédure disciplinaire assortie de menaces de
licenciement à l’encontre des dirigeants syndicaux et de tous ceux qui n’ont pas obéi
aux ordres du directeur de l’hôpital. En outre, l’organisation plaignante allègue que,
de juin 2014 jusqu’à au moins au moment de la soumission de la présente plainte, le
7 septembre 2015, les membres du syndicat qui ont participé à la grève n’ont pas reçu
leurs salaires, ni de prestations sociales ou de sécurité sociale.
- 303. En outre, l’organisation plaignante allègue que, en juin 2015, le
directeur de l’hôpital Rosales a intenté une action devant le premier tribunal civil et
commercial pour licencier les dirigeants syndicaux et les membres du syndicat, en
violation des conventions de l’OIT ratifiées par El Salvador.
- 304. Dans sa communication du 11 novembre 2015, l’organisation plaignante
allègue que le Document d’instructions pour la constitution et le fonctionnement des
tables rondes sur les relations professionnelles du MINSAL (ci-après le document
d’instructions), adopté en août 2015, qui crée une série de tables rondes sur les
relations professionnelles (TRRP) aux niveaux national, régional et local au sein du
système de santé publique salvadorien, ainsi que dans chaque hôpital public, constitue
une violation manifeste de la liberté syndicale, au lieu de remplir son objectif
proclamé d’amélioration du climat et de l’environnement de travail. L’organisation
plaignante affirme en particulier que: i) selon les considérants du document
d’instructions, les TRRP constituent des espaces et des mécanismes appropriés pour le
dialogue, la conciliation et la concertation, afin que les problèmes existants dans
chaque institution concernant les relations professionnelles et l’amélioration des
services soient abordés en temps opportun; ii) l’article 1 du document d’instructions
établit qu’il «réglementera en outre la procédure d’adoption des accords ou des
recommandations, ainsi que les conditions formelles pour leur donner une validité ou une
efficacité dans leur application»; iii) selon l’article 5 du document d’instructions, la
table ronde nationale sur les relations professionnelles aura la composition suivante:
un délégué du cabinet ministériel; un délégué du vice-ministère des Politiques de santé;
un délégué du vice-ministère des Services de santé; un délégué de la Direction générale
des opérations; un conseiller juridique ministériel; un délégué de chaque syndicat
national dûment accrédité par le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale; un
délégué de chaque association nationale d’employés ou de travailleurs, dûment accréditée
par le ministère de l’Intérieur; et le ou les délégués des employés non affiliés aux
organisations syndicales, dans une proportion de un pour un, pour chaque syndicat ou
association; et iv) conformément à l’article 17 du document d’instructions, l’ordre du
jour des tables rondes est fixé unilatéralement en imposant une série d’exigences sur
les points qui peuvent être présentés par les représentants des tables rondes comme, par
exemple, l’obligation que les points profitent à la gestion de l’administration en
faveur des usagers du réseau des établissements de santé publique, ou de ses employés,
et qu’ils aient une viabilité technique et financière.
- 305. L’organisation plaignante, après avoir indiqué que le document
d’instructions a été adopté sans consultation préalable des organisations syndicales,
allègue que cet instrument: i) encourage la participation de représentants des
travailleurs non affiliés au détriment des syndicats; et ii) viole la procédure de
négociation bipartite, en permettant la participation de représentants élus, dominés par
les employeurs, pour obtenir la majorité des voix, annulant ainsi la participation du
syndicat à la détermination des conditions d’emploi et à la résolution des conflits.
L’organisation plaignante conclut que le mécanisme des TRRP facilitera le favoritisme ou
l’hostilité à l’égard de certaines organisations syndicales et l’intervention indue des
autorités publiques dans les activités syndicales.
B. Informations présentées par le gouvernement
B. Informations présentées par le gouvernement- 306. Dans sa communication du 31 octobre 2016, le gouvernement présente
ses observations concernant les allégations de l’organisation plaignante relatives au
caractère prétendument antisyndical du document d’instructions, en précisant que: i) il
vise uniquement à établir des espaces et des mécanismes qui favorisent le dialogue, la
conciliation et la concertation, niant ainsi toute atteinte aux droits syndicaux; ii) il
ne s’agit ni d’une loi ni d’un acte législatif formel, mais d’un instrument de soutien
administratif; et iii) il ne remplace ni n’entrave le dialogue avec les syndicats, mais
il favorise au contraire l’activité syndicale et renforce la protection contre les actes
d’ingérence. Le gouvernement ajoute que: i) les TRRP permettent la présentation des
problèmes et la recherche de solutions, sans aucunement restreindre l’action syndicale,
ni empêcher la négociation bipartite; ii) le gouvernement n’est engagé dans aucune
négociation collective et réfute les allégations de l’organisation plaignante à cet
effet; et iii) le gouvernement encourage l’inclusion des travailleurs non syndiqués dans
les TRRP et que cela est conforme à la législation en vigueur.
- 307. Dans sa communication du 27 septembre 2019, le gouvernement soumet
ses observations sur les allégations que le directeur de l’hôpital Rosales a commis des
actes de de violation des droits et de répression à l’encontre du SIMEHR et de ses
membres, les privant de leurs salaires, de leur sécurité sociale, de leur fonds de
pension, de leurs avantages sociaux, de leurs avantages économiques et de leurs
cotisations syndicales. À cet égard, le gouvernement affirme que ces allégations sont
fausses et dépourvues de tout fondement factuel et juridique. De même, en ce qui
concerne les allégations de l’organisation plaignante relatives aux conditions
déplorables et dangereuses à l’hôpital Rosales, y compris le manque d’équipements et de
médicaments, tout en reconnaissant l’insuffisance des ressources, le gouvernement
souligne les améliorations significatives qui ont eu lieu sous la direction du docteur
Mauricio Ventura, directeur de l’hôpital, comme, par exemple, la réduction des temps
d’attente et la diminution du taux de pénurie de fournitures médicales.
- 308. Le gouvernement soutient que les allégations de l’organisation
plaignante découlent du fait que les autorités administratives ont engagé une procédure
administrative à l’encontre de membres du personnel de l’hôpital Rosales pour leur refus
de se conformer aux règles institutionnelles imposées en matière de contrôle des heures
d’entrée et de sortie du personnel par des moyens biométriques. Le gouvernement indique
que l’impact financier sur leurs salaires, leur sécurité sociale et leur fonds de
pension est dû aux retenues qui auraient dû leur être appliquées en raison de leur refus
de se conformer à l’enregistrement de leur présence au travail par le biais d’un
contrôle biométrique de leurs heures d’arrivée et de départ. Le gouvernement indique que
ce refus a conduit à imputer aux intéressés des fautes administratives qui ont été
traitées dans le respect d’une procédure régulière. Le gouvernement précise que lesdites
fautes administratives ont aussi été imputées aux membres du syndicat, les mesures de
garantie conférées à un membre syndical ne constituant pas une protection permettant à
ce dernier de se soustraire à ses responsabilités ou d’échapper à une procédure
régulière.
- 309. En ce qui concerne les allégations de l’organisation plaignante
selon lesquelles les pourparlers avec les autorités du MINSAL et du PDDH visant à
établir une table de dialogue et de négociation n’ont abouti à aucun progrès, ce qui a
renforcé la répression contre les membres du syndicat et le comité exécutif par le biais
de divers actes antisyndicaux, le gouvernement déclare que, depuis la suspension des
réunions avec le PDDH, aucune décision n’a été rendue contre le directeur de l’hôpital
Rosales, le condamnant pour des actes arbitraires, des abus d’autorité ou des déductions
injustes. Il s’ensuit, selon le gouvernement, que l’institution chargée de la protection
des droits du travail a enquêté sur les faits dénoncés par l’organisation plaignante,
que ceux-ci ne sont pas prouvés, et que le PDDH n’a pas non plus demandé de nouvelles
informations sur de tels cas.
- 310. Le gouvernement indique que, dans l’administration publique
salvadorienne, le respect des droits des usagers doit être observé en priorité et que,
en vue d’améliorer les services de santé offerts à ses usagers, l’hôpital Rosales a
établi son propre cadre réglementaire institutionnel. Le gouvernement ajoute que
l’organe de contrôle compétent pour déterminer le respect de ce cadre réglementaire est
la Cour des comptes de la République, qui évalue toutes les actions, de sorte que, si
une retenue salariale non conforme à la loi est détectée, la cour sera chargée d’imposer
le remboursement de l’argent déduit de manière arbitraire.
- 311. Le gouvernement réitère une fois de plus que la problématique au
sein de l’hôpital Rosales est née de la décision des autorités de l’hôpital selon
laquelle, à partir de juillet 2014, le corps médical devrait se conformer à
l’enregistrement des présences sur leur lieu de travail au moyen du système biométrique,
conformément aux dispositions de l’article 35 du règlement contenant les règles
techniques spécifiques de l’hôpital en matière de contrôle interne.
- 312. Le gouvernement indique que, compte tenu du refus de plusieurs
médecins d’enregistrer leur présence au moyen du système biométrique lors de son
introduction en juin 2014, il a été décidé d’appliquer les retenues correspondantes à
certains médecins syndiqués. Le gouvernement indique en outre que les preuves
pertinentes ont été soumises aux tribunaux du travail et que des arguments ont été
avancés pour affirmer que les déclarations des médecins étaient fausses, puisque, selon
les preuves documentaires soumises aux tribunaux, toutes les procédures établies dans le
règlement institutionnel avaient été suivies pour procéder aux déductions. Le
gouvernement indique en outre les numéros des cas portés devant les tribunaux de la
fonction publique dans lesquels les détails des procédures par lesquelles les déductions
ont été effectuées ont été présentés.
- 313. Le gouvernement indique que la preuve que certains membres du
personnel de l’hôpital Rosales n’ont pas respecté les dispositions dudit cadre
réglementaire est la décision finale rendue par le tribunal d’éthique du gouvernement le
3 octobre 2018, dont il joint une copie à sa communication. Dans cette décision,
16 médecins ont été jugés responsables du non-respect de l’article 6 d) de la loi sur
l’éthique gouvernementale, qui interdit d’occuper deux ou plusieurs postes incompatibles
dans le secteur public.
- 314. En ce qui concerne les allégations relatives aux blâmes écrits
infligés aux membres du syndicat, le gouvernement explique que l’adoption de blâmes
écrits est prévue à l’article 43 de la loi sur la fonction publique. Le gouvernement
ajoute que l’imposition de ce type de réprimande est un pouvoir et une compétence des
supérieurs immédiats, prévus par la loi, et qu’il s’agit d’un instrument permettant
d’éviter l’anarchie dans le travail et l’administration. Le gouvernement déclare
également que seul le supérieur hiérarchique peut imposer un blâme écrit, et que les
procédures qui ont abouti à l’imposition de tels blâmes ont été ratifiées par le
Tribunal de la fonction publique dans le cadre des procédures correspondantes. En ce qui
concerne plus particulièrement la procédure disciplinaire engagée par le directeur de
l’hôpital contre le docteur Alcides Gómez Hernández, secrétaire général du SIMEHR, et
les actes discriminatoires commis à son encontre, le gouvernement indique que, dans ce
cas, une décision judiciaire a déjà été rendue en faveur de l’hôpital Rosales dans
laquelle il a été conclu que la légalité de la procédure avait été respectée et que les
règles institutionnelles pertinentes avaient été dûment appliquées.
- 315. En ce qui concerne les allégations de l’organisation plaignante
relatives aux retenues arbitraires sur les salaires, la sécurité sociale, les fonds de
pension, et les prestations économiques et sociales effectuées en faveur des
responsables syndicaux et des membres du syndicat, le gouvernement indique que, d’après
les différents cas portés devant les tribunaux contre le directeur de l’hôpital Rosales,
des jugements favorables aux intérêts de l’institution ont été rendus.
- 316. En ce qui concerne les allégations de l’organisation plaignante
selon lesquelles les congés syndicaux n’ont pas été accordés à ses membres, le
gouvernement indique que ces congés sont traités par le MINSAL et que les syndicats qui
en ont fait la demande les ont obtenus sans problème. Toutefois, le gouvernement indique
que le SIMEHR n’a engagé aucune procédure pour demander de tels congés et ne peut donc
fournir aucune preuve d’une décision refusant les demandes d’heures syndicales,
puisqu’il n’a jamais demandé un tel congé. En outre, le gouvernement affirme que les
membres de l’organisation plaignante tiennent leurs assemblées générales au jour et à
l’heure de leur choix, sans demander de congé à leur supérieur hiérarchique pour
s’absenter de leur lieu de travail.
- 317. En ce qui concerne la composition des TRRP dans le contexte de
l’hôpital Rosales, le gouvernement indique que, à l’hôpital Rosales, la plupart des
employés ne sont pas affiliés au SIMEHR, qui compte 69 médecins affiliés, alors que
l’hôpital compte un total de 2 007 fonctionnaires. Le gouvernement ajoute que les
travailleurs non affiliés disposent de leur propre mécanisme d’élection et de
participation à la constitution des TRRP. Le gouvernement déclare également que
l’hôpital Rosales n’est qu’un utilisateur du document d’instructions en question et
qu’il n’a pas participé à son élaboration.
- 318. En ce qui concerne l’action en licenciement intentée par le
directeur de l’hôpital Rosales contre des membres du syndicat et des dirigeants
syndicaux, le gouvernement fait valoir que tout fonctionnaire a le pouvoir
constitutionnel d’engager une procédure judiciaire lorsqu’il détecte une éventuelle
infraction et que le fait de ne pas le faire constitue un manquement à ce devoir
constitutionnel. Par conséquent, poursuit le gouvernement, l’ouverture d’une procédure
judiciaire à l’encontre de membres et de responsables syndicaux n’équivaut pas en soi à
une violation des droits du travail des membres du syndicat, car, selon le gouvernement,
l’appartenance à un syndicat ne signifie pas que les membres du syndicat sont libres de
ne pas remplir leurs obligations professionnelles.
- 319. S’agissant de l’allégation de l’organisation plaignante concernant
le dépôt de plaintes pour injustice manifeste auprès du Tribunal de la fonction
publique, le gouvernement indique que le Tribunal a signalé que, au cours des années
2013, 2014 et 2015, il avait reçu 45 plaintes de médecins travaillant à l’hôpital
Rosales pour injustice manifeste et que ces procédures avaient été menées à bien selon
le rapport présenté par le Tribunal de la fonction publique au moment de la présentation
de la présente communication par le gouvernement.
- 320. En ce qui concerne le fait que les membres du syndicat n’ont pas
reçu leurs salaires depuis juillet 2015 pour leur participation à la grève, le
gouvernement indique que le tribunal a entendu le cas et a jugé que les retenues
appliquées aux employés étaient conformes aux dispositions légales et que le processus
administratif qui a permis de ne pas payer ces salaires a été mené dans le respect des
garanties d’une procédure régulière. Ainsi, le tribunal a reconnu que l’action pour
injustice manifeste intentée par les membres du syndicat n’était pas fondée.
- 321. En ce qui concerne l’action en licenciement introduite en juin 2015
contre des dirigeants syndicaux et des membres du syndicat, le gouvernement indique que
cette action est désormais close et classée, puisque le premier tribunal civil et
commercial devant lequel l’action a été introduite s’est déclaré incompétent, et que
l’action a été rejetée. Le gouvernement fait également valoir que le fait que le
directeur de l’hôpital ait engagé la procédure de licenciement ne signifie pas en soi
qu’il y a eu violation des droits syndicaux, mais plutôt que le directeur de l’hôpital a
appliqué le principe de légalité énoncé à l’article 86 de la Constitution nationale d’El
Salvador.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 322. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante
allègue une série d’actes antisyndicaux qui auraient été commis entre 2010 et 2015 par
un hôpital public à l’encontre des dirigeants et des membres d’un syndicat de médecins,
le Syndicat des médecins de l’hôpital Rosales (SIMEHR), avant et après une grève en
septembre 2014 pour exiger la modification du système de contrôle des présences du
personnel médical par marquage biométrique mis en place dans l’hôpital en juin 2014. Le
comité note que l’organisation plaignante allègue également que le document
d’instructions adopté en août 2015, qui prévoit une représentation égale entre les
représentants syndicaux et les représentants des travailleurs non syndiqués, facilite
l’ingérence des autorités publiques dans la représentation des travailleurs et porte
atteinte aux droits des organisations syndicales, y compris dans le domaine de la
négociation collective.
- 323. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement déclare que:
i) les actes à l’encontre des dirigeants et membres du SIMEHR dénoncés par
l’organisation plaignante ne sont pas de nature antisyndicale mais résultent de la
non-application par certains médecins du règlement de l’hôpital, notamment des
mécanismes de contrôle des présences par marquage biométrique; ii) la grève menée en
septembre 2014 a été déclarée illégale par les tribunaux, ce qui a généré, conformément
à la réglementation en vigueur, une série de conséquences pour les médecins ayant
participé à la grève; et iii) le document d’instructions du ministère de la Santé
(MINSAL) d’août 2015 créant les tables rondes sur les relations professionnelles (TRRP)
encourage la consultation tant avec les syndicats du secteur de la santé qu’avec les
représentants des travailleurs non syndiqués et ne porte donc pas atteinte au dialogue
avec les syndicats.
- 324. Le comité note que l’organisation plaignante allègue tout d’abord la
commission, entre 2010 et 2013, d’une série d’actes antisyndicaux à l’encontre des
dirigeants et des membres du SIMEHR, comprenant, entre autres: i) la mutation arbitraire
de trois médecins qui exerçaient les fonctions de dirigeants du syndicat, et de deux
autres médecins qui étaient membres du syndicat; ii) l’imposition au docteur Alcides
Gómez Hernández, secrétaire général du syndicat, de blâmes infondés, sans lui donner la
possibilité de se défendre; iii) le licenciement du chef de l’unité de soins intensifs
et du chef du service d’oto-rhino-laryngologie; iv) la suspension en 2012 du docteur
Guillermo Reyes, membre du syndicat, pour avoir refusé une perquisition policière; et
v) le refus des congés syndicaux demandés à la fois en vertu du document d’instructions
et au directeur de l’hôpital Rosales pour que les dirigeants du SIMEHR puissent mener
leurs activités syndicales. En ce qui concerne cette première série d’allégations, le
comité note que le gouvernement affirme que: i) la qualité de dirigeant syndical ne
constitue pas une protection exonérant ce dernier de toute responsabilité pour les
fautes qu’il a pu commettre; ii) la procédure disciplinaire contre le secrétaire général
du syndicat a fait l’objet d’une action en justice et s’est conclue par une décision en
faveur de l’hôpital Rosales dans laquelle il a été établi que la procédure disciplinaire
était conforme à la loi, et que le règlement institutionnel avait été dûment appliqué;
et iii) bien que les congés syndicaux puissent être demandés sans problème en vertu du
document d’instructions, le SIMEHR n’a pas demandé de tels congés, ce qui n’a pas
empêché les membres du syndicat de tenir des assemblées sans congés accordés par leurs
supérieurs hiérarchiques.
- 325. En ce qui concerne l’octroi des congés syndicaux au SIMEHR, le
comité, tout en notant les versions divergentes des parties, prend note du document
fourni par le gouvernement consistant en une notification adressée à l’organisation
plaignante, datée du 5 février 2016, par laquelle ses représentants sont convoqués à une
deuxième réunion pour l’octroi des congés syndicaux. Sur la base de ce qui précède, le
comité veut croire que le SIMEHR peut bénéficier des congés syndicaux auxquels il a
droit et ne poursuivra donc pas l’examen de cette allégation.
- 326. En ce qui concerne les allégations relatives à une série d’actes
spécifiques à l’encontre de certains dirigeants et membres du SIMEHR commis entre 2010
et 2013, le comité, tout en prenant bonne note de la réponse du gouvernement concernant
la confirmation par les tribunaux de la légalité d’un blâme infligé au secrétaire
général du syndicat, note que: i) ni la référence ni le texte de la décision de justice
susmentionnée n’ont été joints; et ii) le gouvernement n’a fourni aucun élément de
réponse concernant les autres actes spécifiques dénoncés par l’organisation plaignante.
Rappelant que le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de
discrimination antisyndicale et doit veiller à ce que les plaintes pour des pratiques
discriminatoires de cette nature soient examinées dans le cadre d’une procédure qui doit
être prompte, impartiale et considérée comme telle par les parties intéressées [voir
Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018,
paragr. 1138], le comité prie le gouvernement de veiller dorénavant à ce que toute
allégation d’actes antisyndicaux à l’hôpital en question soit rapidement suivie
d’enquêtes effectives par les autorités compétentes afin d’assurer le plein respect de
la liberté syndicale au sein de l’hôpital.
- 327. Le comité note que l’organisation plaignante allègue également que,
en raison de l’opposition du SIMEHR à la mise en œuvre unilatérale en juin 2014 d’un
système de contrôle biométrique des présences et de l’impossibilité d’établir un
dialogue constructif avec la direction de l’hôpital et le bureau de la Procureure
chargée des droits de l’homme, le syndicat a été contraint de suspendre partiellement
son travail à compter du 9 septembre 2014. Le comité note que l’organisation plaignante
affirme que le différend relatif au contrôle biométrique des présences a conduit à une
escalade d’actes antisyndicaux à l’encontre du SIMEHR, alléguant notamment que: i) les
membres du syndicat ont été soumis à des déductions salariales de 40 pour cent au mois
de juillet 2014; ii) 100 pour cent en ce qui concerne les mois d’août 2014 et plus de
100 pour cent du salaire en ce qui concerne les mois de septembre à octobre 2014 et de
janvier à mai 2015; iii) en représailles à la réduction du travail, le directeur de
l’hôpital a déposé des plaintes pénales contre le comité exécutif du syndicat et
42 médecins spécialistes, eux-mêmes membres du syndicat, ainsi que des plaintes devant
le premier tribunal du travail contre 82 médecins spécialistes; iv) 21 chefs de médecins
spécialistes, dont la plupart sont membres du syndicat et de son comité exécutif, ont
fait l’objet d’une suspension de travail d’une journée; v) les médecins qui ont
participé à la suspension de travail ont été persécutés par des membres de la police
politique les 14, 15 et 16 septembre 2014, dans le but de les intimider; et vi) en juin
2015, une procédure disciplinaire assortie de menaces de licenciement a été engagée
contre les dirigeants du syndicat et tous ceux qui n’obéissaient pas aux ordres du
directeur de l’hôpital.
- 328. Le comité note que l’organisation plaignante ajoute que la
suspension du travail a été déclarée illégale par une décision du premier tribunal du
travail du 17 septembre 2014, que le Code du travail prévoit que la décision du tribunal
n’est pas susceptible d’appel et que le recours en amparo introduit à cet égard devant
le Tribunal suprême était en cours au moment de la présentation de la présente
plainte.
- 329. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement indique que:
i) l’impact financier sur les salaires, la sécurité sociale et les fonds de pension
mentionné dans la réclamation est dû aux déductions qui auraient dû être appliquées aux
membres du personnel qui ont refusé de se soumettre à l’enregistrement de leur présence
au travail par le biais d’un contrôle biométrique de leurs heures d’arrivée et de
départ; ii) ce refus a conduit à imputer au personnel, syndiqué ou non, des fautes
administratives qui ont été traitées dans le respect d’une procédure régulière;
iii) dans les différents cas portés devant les tribunaux contre le directeur de
l’hôpital Rosales au sujet de ces déductions, des jugements favorables aux intérêts de
l’institution ont été rendus; iv) par la décision finale du 3 octobre 2018, le tribunal
d’éthique gouvernementale a déclaré 16 médecins de l’hôpital responsables du non-respect
de la loi sur l’éthique gouvernementale, qui interdit d’occuper deux ou plusieurs postes
incompatibles dans le secteur public; v) un tribunal a jugé le cas concernant le
non-paiement des salaires des membres du syndicat pour leur participation à la grève et
a statué que les déductions effectuées sur les salaires des employés étaient conformes à
la loi et que le processus administratif qui a permis le non-paiement de ces salaires a
été mené conformément aux garanties d’une procédure régulière; et vi) l’action en
licenciement intentée en juin 2015 contre des dirigeants syndicaux et des membres du
syndicat est désormais close et classée puisque le premier tribunal civil et commercial
devant lequel l’action avait été intentée s’est déclaré incompétent et que l’action a
été rejetée. Le comité prend bonne note des informations fournies par les parties
concernant le litige né de la mise en place en juin 2014 du contrôle biométrique des
présences du personnel. Le comité tient à rappeler tout d’abord que son mandat consiste
à déterminer si, concrètement, telle ou telle législation ou pratique est conforme aux
principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les
conventions portant sur ces sujets. [Voir Compilation, paragr. 9.] Il n’est donc pas de
sa compétence d’examiner le bien-fondé et l’adéquation du système de contrôle
biométrique des présences mis en place par l’hôpital, puisqu’il n’est pas allégué qu’un
tel système ait eu pour objet ou pour effet de porter atteinte à la liberté syndicale.
Notant toutefois que le gouvernement ne conteste pas l’allégation selon laquelle le
nouveau système de contrôle des présences a été introduit unilatéralement, le comité
souligne qu’il a rappelé l’importance de consulter toutes les organisations syndicales
concernées sur les questions qui ont un impact sur les intérêts de ces dernières ou de
leurs membres. [Voir Compilation, paragr. 1521.] Le comité invite donc le gouvernement à
prendre les mesures nécessaires pour établir un cadre de dialogue constructif entre les
syndicats présents dans l’hôpital et la direction de l’hôpital et le Bureau de la
Procureure chargée des droits de l’homme sur les questions affectant leurs intérêts ou
ceux de leurs membres.
- 330. En ce qui concerne les retenues salariales après l’entrée en vigueur
du système de contrôle des présences et avant le mouvement de grève, tout en regrettant
de ne pas avoir reçu le texte des jugements mentionnés par le gouvernement, le comité
veut croire que dans ces jugements il a été veillé à ce que les retenues soient
appliquées de manière objective, indépendamment de l’affiliation ou de l’activité
syndicale des travailleurs de l’hôpital.
- 331. En ce qui concerne le mouvement de grève partielle mené depuis le
9 juillet 2014, le comité rappelle que le droit de grève est un des moyens essentiels
dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre
leurs intérêts économiques et sociaux. [Voir Compilation, paragr. 753.] Toutefois, le
comité rappelle qu’il a considéré que le droit de grève peut être restreint, voire
interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent
des fonctions d’autorité au nom de l’État; ou 2) dans les services essentiels au sens
strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans
l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la
personne [voir Compilation, paragr. 830] et que, à cet égard, il a considéré que le
secteur hospitalier pouvait être considéré comme un service essentiel. [Voir
Compilation, paragr. 840.] Enfin, le comité rappelle que les déductions de salaire pour
les jours de grève ne soulèvent pas d’objections du point de vue des principes de la
liberté syndicale. [Voir Compilation, paragr. 942.] En ce qui concerne l’allégation
selon laquelle les décisions de justice relatives à la légalité des grèves ne peuvent
être contestées, le comité note que SIMEHR a introduit un recours en amparo devant la
Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice et veut croire que ce cas a été
résolu rapidement et conformément à la liberté syndicale.
- 332. En ce qui concerne les allégations de l’organisation plaignante
concernant une série de représailles à la suite du mouvement de grève, le comité note
que le gouvernement indique qu’il a renoncé à poursuivre les actions de licenciement
après que le tribunal saisi du cas s’est déclaré incompétent et que ces cas ont été clos
et classés. Le comité regrette toutefois de constater que le gouvernement n’a pas fourni
ses commentaires sur les allégations de poursuites pénales à l’encontre de 42 dirigeants
et membres du SIMEHR et d’autres actions en justice mentionnées par l’organisation
plaignante. Tout en soulignant l’importance de mener des activités syndicales légitimes
de manière pacifique, le comité réitère sa déclaration selon laquelle la judiciarisation
pénale des relations professionnelles ne peut en aucune façon conduire à l’établissement
de relations professionnelles harmonieuses et pacifiques. [Voir Compilation,
paragr. 974.] Sur cette base, le comité veut croire que les diverses actions pénales et
judiciaires qui ont suivi le mouvement de grève mentionné par l’organisation plaignante
ont été menées à leur terme. Le comité invite également le gouvernement à prendre les
mesures nécessaires pour établir un cadre de dialogue constructif entre l’hôpital et les
différentes organisations syndicales présentes dans l’hôpital.
- 333. En outre, le comité note que l’organisation plaignante affirme que
le document d’instructions viole les principes de la liberté syndicale en ce que: i) il
encourage les actes d’ingérence en favorisant la représentation des travailleurs non
affiliés à des syndicats, qui sont subordonnés au MINSAL, à leur détriment; et ii) il
viole la procédure de négociation bipartite, en permettant que des majorités soient
obtenues avec la participation de représentants élus dominés par les employeurs et en
annulant la participation du syndicat à la détermination des conditions d’emploi et au
règlement des différends par le biais des TRRP. Le comité note également que le
gouvernement, pour sa part, a déclaré que le document d’instructions: i) vise à établir
les TRRP, qui sont des espaces et des mécanismes favorisant le dialogue, la conciliation
et la concertation; ii) ne constitue pas un acte législatif formel, mais un simple
instrument de soutien administratif; iii) permet d’inclure tous les travailleurs dans
les TRRP, y compris ceux qui ne sont pas membres d’une organisation syndicale, et ce,
conformément à la législation en vigueur, sans restreindre l’action syndicale; et iv) ne
remet pas en cause la négociation collective avec les organisations syndicales.
- 334. Le comité prend bonne note de ces différents éléments. Le comité
note que le document d’instructions susmentionné, adopté en août 2015, crée une série de
TRRP aux niveaux national, régional et local au sein du système de santé publique
salvadorien, ainsi que dans chaque hôpital public. Le comité note en particulier que:
i) selon l’article 5 du document d’instructions, un nombre égal de représentants dans
lesdites TRRP est attribué aux organisations syndicales et aux représentants (élus) des
travailleurs non syndiqués; ii) l’article 1 du document d’instructions «réglemente en
outre la procédure d’adoption des accords ou des recommandations, ainsi que les
conditions formelles pour leur conférer une validité ou une efficacité dans leur mise en
œuvre», et que l’article 13 stipule que: «[l]es membres des tables rondes sur les
relations professionnelles doivent promouvoir le consensus sur des recommandations ou
des accords pour la détermination de mesures, d’actions ou de conditions liées au
développement du travail du personnel travaillant au sein du MINSAL». Tout en notant que
les parties n’ont pas fourni de données complètes sur le taux d’affiliation syndicale
dans le secteur de la santé publique, le comité note également que: i) le document
d’instructions n’établit pas ou ne fait pas référence à des mécanismes de
représentativité qui garantiraient que les différents représentants des travailleurs
disposent d’un espace au sein des TRRP proportionnel au soutien du personnel dont ils
disposent; ii) le document d’instructions prévoit que les délégués des travailleurs non
syndiqués seront élus par l’assemblée des travailleurs non syndiqués et, par conséquent,
le document d’instructions n’envisage pas de mécanismes permettant aux organisations
syndicales d’essayer d’obtenir les votes des travailleurs non syndiqués; et iii) le
gouvernement ne mentionne pas d’autres espaces où il négocierait exclusivement avec les
organisations syndicales de la santé publique ni l’existence de conventions collectives
signées avec elles dans ce secteur.
- 335. Le comité considère que les différents éléments soulignés dans le
paragraphe précédent doivent être pris en considération lors de l’examen des allégations
de l’organisation plaignante selon lesquelles le document d’instructions permettrait aux
autorités publiques de s’immiscer dans la représentation des travailleurs du secteur de
la santé publique et porterait atteinte à la négociation collective bipartite avec les
organisations syndicales de ce secteur. À cet égard, le comité rappelle que des mesures
devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation
les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre
les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de
travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. [Voir
Compilation, paragr. 1231.] Notant également qu’El Salvador a ratifié la convention
(no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, le comité rappelle que
l’article 5 de cette convention prévoit que «[l]orsqu’une entreprise compte à la fois
des représentants syndicaux et des représentants élus, des mesures appropriées devront
être prises, chaque fois qu’il y a lieu, pour garantir que la présence de représentants
élus ne puisse servir à affaiblir la situation des syndicats intéressés ou de leurs
représentants, et pour encourager la coopération, sur toutes questions pertinentes,
entre les représentants élus, d’une part, et les syndicats intéressés et leurs
représentants, d’autre part». Au vu de ce qui précède, le comité prie le gouvernement,
en consultation avec les organisations syndicales les plus représentatives du secteur,
de prendre les mesures nécessaires pour que le document d’instructions soit révisé de
manière que le dialogue avec les représentants élus des travailleurs ne porte pas
atteinte à la position des organisations syndicales et ne se fasse pas au détriment des
processus de négociation collective avec ces dernières.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 336. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil
d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie le
gouvernement de veiller dorénavant à ce que toute allégation d’actes antisyndicaux à
l’hôpital en question soit rapidement suivie d’enquêtes effectives par les autorités
compétentes afin d’assurer le plein respect de la liberté syndicale au sein de
l’hôpital.
- b) Le comité invite le gouvernement à prendre les mesures
nécessaires pour établir un cadre de dialogue constructif entre les syndicats
présents dans l’hôpital et la direction de l’hôpital et le Bureau de la Procureure
chargée des droits de l’homme sur les questions affectant leurs intérêts ou ceux de
leurs membres.
- c) En ce qui concerne les retenues salariales pour non-respect
du système de contrôle de l’assiduité, le comité veut croire que les tribunaux ont
veillé à ce que les retenues soient appliquées de manière objective, indépendamment
de l’affiliation ou de l’activité syndicale des travailleurs de
l’hôpital.
- d) Le comité veut croire que le recours en amparo intenté par le
Syndicat des médecins de l’hôpital Rosales (SIMEHR) devant la Chambre
constitutionnelle de la Cour suprême de justice a été résolu rapidement et
conformément à la liberté syndicale.
- e) Le comité veut croire que les diverses
actions pénales et judiciaires qui ont suivi le mouvement de grève mentionné par
l’organisation plaignante ont été menées à leur terme. Le comité invite également le
gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour établir un cadre de dialogue
constructif entre l’hôpital et les organisations syndicales présentes dans
l’hôpital.
- f) le comité prie le gouvernement, en consultation avec les
organisations syndicales les plus représentatives du secteur, de prendre les mesures
nécessaires pour que le document d’instructions pour la constitution et le
fonctionnement des tables rondes sur les relations professionnelles du ministère de
la Santé (MINSAL) soit révisé de manière que le dialogue avec les représentants élus
des travailleurs ne porte pas atteinte à la position des organisations syndicales et
ne se fasse pas au détriment des processus de négociation collective avec ces
dernières.
- g) Le comité considère que ce cas n’appelle pas un examen plus
approfondi et qu’il est clos.