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Rapport définitif - Rapport No. 392, Octobre 2020

Cas no 3321 (El Salvador) - Date de la plainte: 07-FÉVR.-18 - Clos

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Allégations: Actions visant à démanteler un syndicat par une intervention dans la désaffiliation de ses membres et le refus de reconnaître pleinement le droit syndical des travailleurs pénitentiaires

  1. 608. La plainte figure dans la communication du Syndicat national des travailleurs pénitentiaires (SITRAPEN) en date du 7 février 2018.
  2. 609. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication en date du 25 février 2019.
  3. 610. El Salvador a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 611. Dans sa communication en date du 7 février 2018, l’organisation plaignante, qui intervient dans le secteur pénitentiaire, dénonce les actions des autorités visant à favoriser son démantèlement et demande la pleine reconnaissance du droit syndical des travailleurs pénitentiaires.
  2. 612. Le SITRAPEN allègue l’existence d’une stratégie dissociative de démantèlement du syndicat par le gouvernement. L’organisation plaignante affirme que: i) les avocats de la Direction générale des centres pénitentiaires harcèlent constamment les travailleurs tout au long de leur journée de travail, en leur demandant de remplir des formulaires de désaffiliation, et ii) ils les transmettent ensuite au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale afin que ce dernier puisse autoriser les désaffiliations, en violation de la Constitution et des conventions de l’OIT.
  3. 613. L’organisation plaignante allègue que le gouvernement, dans ses actions et ses décisions, utilise l’argument selon lequel les agents pénitentiaires ne bénéficient pas du droit syndical puisqu’ils sont exclus de la carrière administrative en vertu de la loi sur la fonction publique. Ceci malgré la réforme constitutionnelle de 2009, qui a été menée pour assurer la conformité avec les normes de l’OIT et qui a levé cette restriction à la liberté syndicale.
  4. 614. L’organisation plaignante estime que le gouvernement devrait respecter le droit syndical des travailleurs pénitentiaires; que le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale devrait se déclarer incompétent et cesser d’usurper les fonctions relatives à l’affiliation des travailleurs, que la loi sur la fonction publique confère aux comités directeurs des syndicats; que toutes les désaffiliations autorisées par le ministère devraient être déclarées nulles et non avenues et que toutes les cotisations dues devraient être restituées au syndicat (la plainte est accompagnée d’une copie des décisions de désaffiliation de la Direction générale du travail).

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 615. Dans sa communication en date du 25 février 2019, le gouvernement fournit les réponses des autorités concernées aux allégations formulées dans la plainte. Selon le gouvernement:
    • i) de nombreux membres du SITRAPEN se sont présentés auprès du Département national des syndicats en affirmant que les membres du comité directeur du syndicat refusent de recevoir leurs demandes de désaffiliation. Le gouvernement ajoute que l’augmentation du nombre de désaffiliations du SITRAPEN est un phénomène qui se produit depuis la fin de l’année 2015;
    • ii) en ce qui concerne la procédure de désaffiliation d’un syndicat, qui est traitée par le Département national des syndicats, le gouvernement souligne qu’elle se déroule conformément à l’article 99 de la loi sur la fonction publique, qui prévoit que, lorsque les membres du comité directeur refusent de recevoir une demande de désaffiliation, le travailleur démissionnaire pourra s’adresser au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. En vertu de cette disposition, les représentants légaux du syndicat sont convoqués pour se voir notifier la décision du travailleur et, une fois la procédure terminée, l’ordre de confirmation de la désaffiliation est envoyé, et l’intervenant concerné est sommé de cesser de déduire les cotisations syndicales;
    • iii) à titre préventif, en pareille situation, qui s’applique également aux autres syndicats, le gouvernement exige des travailleurs qui souhaitent se désaffilier qu’ils présentent une déclaration sous serment, authentifiée par acte notarié, mentionnant le refus, par le comité directeur de leur syndicat, de recevoir leur demande de désaffiliation;
    • iv) la Constitution oblige les autorités à recevoir les demandes formulées, et la loi sur la fonction publique prévoit la possibilité pour le travailleur concerné de ne pas se présenter physiquement. C’est la raison pour laquelle il n’est donc pas possible d’accéder à la demande de l’organisation plaignante de rejeter les demandes de désaffiliation qui ne sont pas soumises en personne par le travailleur démissionnaire;
    • v) les autorités ont simplement respecté la procédure régulière, comme cela apparaît dans les décisions de désaffiliation de la Direction générale du travail annexées au texte de la plainte. Ces documents montrent que, bien que les deux parties aient été convoquées, ni les travailleurs auteurs de la demande de désaffiliation, ni les représentants syndicaux n’ont comparu à l’audience, de sorte que la désaffiliation a été établie sur la base de la documentation soumise et dûment notifiée tant aux travailleurs qu’au SITRAPEN;
    • vi) la Direction des centres pénitentiaires déclare qu’elle a agi conformément à la loi et ne pas être intervenue, ni s’être ingérée dans la liberté syndicale des membres du SITRAPEN, et le gouvernement considère, compte tenu de ce qui précède, qu’il n’existe pas de stratégie dissociative visant à démanteler le SITRAPEN ou à promouvoir la désaffiliation, comme cela est prétendu à tort dans la plainte.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 616. Le comité note que la plainte allègue une ingérence des autorités dans un syndicat du secteur pénitentiaire en favorisant la désaffiliation de ses membres; et dénonce la non-reconnaissance totale du droit syndical des travailleurs pénitentiaires.
  2. 617. Le comité note que, alors que l’organisation plaignante allègue que les autorités pénitentiaires encouragent la désaffiliation de ses membres, le gouvernement nie ces allégations et indique qu’il a suivi la procédure légalement établie lorsque le comité directeur d’un syndicat refuse de recevoir les demandes de désaffiliation de ses membres. Le gouvernement indique que, dans le cadre de cette procédure, le syndicat a été informé de la demande de désaffiliation et que ce dernier ne s’est pas présenté à l’audience à laquelle il a été convoqué. Le gouvernement souligne que le respect de cette procédure apparaît dans les décisions de désaffiliation transmises par l’organisation plaignante avec la plainte, qui corroborent les explications données par les autorités. Le gouvernement ajoute que, à titre préventif, les autorités exigent la présentation d’une déclaration sous serment du travailleur alléguant que le comité directeur n’a pas reçu sa demande de désaffiliation. L’organisation plaignante estime que par ces actions les autorités s’ingèrent dans les affaires internes du syndicat.
  3. 618. Le comité considère qu’il n’est pas contraire à la liberté syndicale qu’une règle permette aux travailleurs de communiquer leur demande de désaffiliation aux autorités compétentes lorsque le comité directeur d’un syndicat refuse de l’accepter. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle les avocats de l’employeur encourageraient les travailleurs à se désaffilier du SITRAPEN, le comité note que les autorités pénitentiaires nient tout acte d’ingérence et que l’organisation plaignante ne fournit aucun détail ou preuve qui permettrait de l’examiner. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  4. 619. Par ailleurs, le comité observe que, selon l’allégation de l’organisation plaignante que le gouvernement ne réfute pas, les autorités continueraient de se référer à des dispositions légales qui ne sont pas conformes à la liberté syndicale et qui limitent la pleine reconnaissance du droit syndical des travailleurs pénitentiaires. À cet égard, le comité note que les organes de contrôle de l’OIT ont appelé à ce que les mesures nécessaires soient prises pour modifier les dispositions législatives qui excluent certaines catégories de fonctionnaires du droit syndical (y compris les dispositions de la loi sur la fonction publique citées par l’organisation plaignante, en particulier l’article 73). À cet égard, le comité a instamment prié le gouvernement de veiller à ce que la législation nationale d’El Salvador soit amendée de manière urgente, afin de reconnaître le droit syndical aux travailleurs au service de l’État, à la seule exception éventuelle des forces armées et de la police. [Voir cas no 2085, 323e rapport, paragr. 173, 327e rapport, paragr. 57, et 328e rapport, paragr. 47.] Le comité doit rappeler, en ce qui concerne le cas spécifique abordé par la plainte, que le personnel pénitentiaire devrait jouir du droit syndical. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 357.] Le comité veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour assurer le plein respect du droit syndical du personnel pénitentiaire et renvoie les aspects législatifs de ce cas à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, et demande que, s’il le juge nécessaire, le gouvernement fasse appel à l’assistance technique du BIT à cet égard.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 620. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour assurer le plein respect du droit syndical du personnel pénitentiaire.
    • b) Le comité renvoie les aspects législatifs de ce cas à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations.
    • c) Le comité demande que, s’il le juge nécessaire, le gouvernement fasse appel à l’assistance technique du BIT à cet égard.
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