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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 391, Octobre 2019

Cas no 3279 (Equateur) - Date de la plainte: 15-MAI -17 - En suivi

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Allégations: L’organisation plaignante allègue que, pendant près de dix ans, le gouvernement a mené des attaques contre l’UNE qui ont abouti à la dissolution de l’organisation par voie administrative en 2016

  1. 253. La plainte figure dans une communication de l’Union nationale des éducateurs (UNE) en date du 15 mai 2017.
  2. 254. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications en date des 28 février et 24 octobre 2018.
  3. 255. L’Equateur a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 256. Dans sa communication en date du 15 mai 2017, l’organisation plaignante indique que l’UNE rassemble les enseignants depuis 1944 et défend depuis de nombreuses années l’éducation et les droits des travailleurs du secteur de l’éducation. L’organisation plaignante indique que, en 2009, le gouvernement a tenté de mettre en place un système d’évaluation des enseignants dont l’une des conséquences potentielles pour ces derniers était la perte de leur emploi et que, face au refus du gouvernement d’engager un dialogue à cet égard, elle a appelé à une grève nationale qui s’est achevée après plusieurs semaines lorsque les enseignants avaient obtenu l’assurance qu’ils ne risquaient pas de perdre leur emploi. L’organisation plaignante allègue que, à partir de ce moment, le gouvernement a mené des actions contre l’UNE en vue de la discréditer aux yeux de l’opinion publique à travers des campagnes de harcèlement et de stigmatisation des actions syndicales de l’organisation diffusées par les organes nationaux de radio, de presse et de télévision.
  2. 257. L’organisation plaignante allègue que le gouvernement refuse d’enregistrer le comité exécutif national de l’UNE, élu en novembre 2013, ainsi que les comités exécutifs des 23 provinces dans lesquelles l’UNE compte un siège. L’organisation plaignante déclare que l’enregistrement a été refusé pour des manquements supposés de sa part, auxquels elle avait répondu point par point. Elle allègue en outre que les dirigeants de l’UNE ne bénéficient pas de congés syndicaux et qu’aucune cotisation syndicale n’est prélevée, que cette allégation avait été présentée dans le cadre du cas no 2755 et que le gouvernement n’avait pas donné suite aux recommandations formulées dans ledit cas. L’organisation plaignante indique que des procédures administratives ont été ouvertes contre des enseignants et des dirigeants et que certains ont été licenciés ou mutés ou que leurs heures de travail avaient été réduites ou augmentées de manière exagérée. En outre, Mme Mery Zamora, ancienne présidente de l’UNE, avait fait l’objet de poursuites pénales engagées par les autorités publiques. L’organisation plaignante ajoute que, en 2015, le ministère de l’Education avait créé une organisation parallèle, dénommée «Réseau des enseignants pour la révolution éducative», et que le gouvernement avait fait pression sur les enseignants pour qu’ils se désaffilient de l’UNE et adhèrent au nouveau syndicat.
  3. 258. L’organisation plaignante allègue que, face au refus persistant des autorités d’enregistrer le comité exécutif de l’UNE, les enseignants avaient convoqué une assemblée extraordinaire le 14 mai 2016 afin de reprendre le processus d’enregistrement de leur comité exécutif depuis le début et que, en juillet 2016, le sous-secrétariat à l’éducation avait engagé le processus de dissolution de l’UNE par voie administrative en s’appuyant sur le décret exécutif no 16 et avait déclaré la dissolution de l’organisation par décision du 18 août 2016. L’organisation plaignante indique que, aux fins de la liquidation de ses actifs, la police nationale avait effectué des perquisitions des locaux de ses différents sièges et confisqué des biens. Une commission de liquidation avait été désignée et avait licencié les employés, vendu les biens immobiliers et bloqué les comptes courants de l’organisation sur lesquels étaient déposées les cotisations de retraite des enseignants. L’organisation plaignante indique que, face à cette situation, elle avait déposé un recours contentieux administratif et un recours extraordinaire en protection, qui avait été rejeté. En outre, le gouvernement s’était saisi de la Caisse de prévoyance des enseignants équatoriens, dont les fonds s’élevaient à 400 millions de dollars, et avait transféré son administration à la banque de l’Institut équatorien de sécurité sociale, s’ingérant de manière injustifiée dans les activités, la gestion des actifs et l’administration du fonds créé en 1991 par l’UNE.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 259. Dans ses communications en date des 28 février et 24 octobre 2018, le gouvernement indique que l’UNE est une organisation sociale et non une organisation syndicale et que l’annulation de la décision de dissolution émanant du ministère de l’Education ne relève ni de la compétence ni des attributions du ministère du Travail. Le gouvernement précise que, sans préjudice de ce qui précède, dans le cadre de l’ouverture au dialogue, des contacts ont été pris entre le ministère du Travail et l’avocat de l’UNE pour examiner les alternatives à la dissolution et à la liquidation de cette organisation et que, lors de ces réunions, il avait été indiqué que les parties étaient dans l’attente de l’issue du recours contentieux administratif déposé contre la décision administrative de dissolution.
  2. 260. Le gouvernement indique que, en octobre 2017, le décret no 16, qui constituait l’une des bases juridiques de la dissolution de l’UNE, avait été abrogé et remplacé par le décret exécutif no 193 en vertu duquel les conditions requises pour que les organisations sociales puissent obtenir la personnalité juridique avaient été allégées. Le gouvernement indique en outre que, en vertu de l’arrêt no 018-18-SIN-CC rendu le 1er août 2018 par la Cour constitutionnelle, les travailleurs du secteur public étaient désormais soumis au Code du travail et habilités à constituer des organisations syndicales. Le gouvernement indique avoir invité l’UNE à entamer la procédure administrative d’enregistrement en tant qu’organisation syndicale devant le ministère du Travail. Il déclare en outre qu’il encourage le dialogue tripartite et la concertation et que, à la suite de cette ouverture au dialogue, l’UNE a entamé la procédure d’enregistrement de ses organisations sociales dans plusieurs provinces du pays à travers sept directions régionales: 42 organisations sociales de l’UNE ont été enregistrées et 28 seraient en cours d’enregistrement.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 261. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue que, pendant près de dix ans, le gouvernement a mené des attaques contre l’UNE qui ont abouti à la dissolution de l’organisation par voie administrative en 2016.
  2. 262. Le comité note que, selon l’organisation plaignante: i) à partir de 2009, année au cours de laquelle l’UNE avait appelé à une grève contre le système d’évaluation des enseignants que le gouvernement souhaitait mettre en place, ce dernier avait mené une campagne visant à la discréditer, avait refusé l’enregistrement de son comité exécutif, ouvert des procédures administratives à l’encontre d’enseignants et de dirigeants, ordonné le licenciement ou la mutation de certains d’entre eux et avait engagé des poursuites pénales à leur encontre; ii) en 2015, le gouvernement avait créé une organisation syndicale d’enseignants parallèle et avait fait pression sur les enseignants pour qu’ils se désaffilient de l’UNE et adhèrent au nouveau syndicat; et iii) en juillet 2016, le ministère de l’Education avait prononcé la dissolution de l’UNE pour des manquements présumés à ses propres statuts et avait désigné une commission de liquidation qui avait licencié les employés, vendu les biens immobiliers et bloqué les comptes de l’organisation; en outre, l’administration de la caisse de prévoyance des enseignants avait été transférée à la banque de l’Institut de sécurité sociale. Le comité note que, selon les informations fournies, l’UNE a déposé un recours contentieux administratif et un recours extraordinaire en protection, qui a été rejeté. Le comité note en outre que, selon les allégations, l’UNE ne perçoit pas de cotisations syndicales, que cette allégation a été présentée dans le cadre du cas no 2755 et que le gouvernement n’aurait pas donné suite aux recommandations formulées dans ledit cas. [Voir 359e rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 52 à 55.]
  3. 263. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement indique ce qui suit: i) l’UNE est une organisation sociale et non une organisation syndicale, et l’annulation de la décision de dissolution émanant du ministère de l’Education ne relève ni de la compétence ni des attributions du ministère du Travail; ii) sans préjudice de ce qui précède, des contacts ont été pris entre le ministère du Travail et l’avocat de l’UNE pour examiner les alternatives à la dissolution et à la liquidation de cette organisation, et les parties étaient dans l’attente de l’issue du recours contentieux administratif qui était en cours d’instruction; iii) en octobre 2017, le décret no 16, qui constituait l’une des bases juridiques de la dissolution de l’UNE, a été abrogé et remplacé par le décret exécutif no 193 en vertu duquel les conditions requises pour que les organisations sociales puissent obtenir la personnalité juridique ont été allégées; et iv) le ministère du Travail a invité l’UNE à entamer la procédure administrative d’enregistrement en tant qu’organisation syndicale devant le ministère du Travail et, au mois d’avril 2018, l’UNE avait enregistré 42 organisations sociales dans le pays et 28 seraient en cours d’enregistrement.
  4. 264. Le comité observe qu’il ressort des informations fournies par l’organisation plaignante et par le gouvernement que la décision de dissolution de l’UNE arrêtée par le ministère de l’Education en 2016 n’a pas été annulée. Le comité observe en outre que les procédures judiciaires engagées par l’UNE aux fins de l’annulation de cette décision n’ont pas abouti: i) selon l’organisation plaignante, un recours extraordinaire en protection a été rejeté; et ii) d’après des informations relevant du domaine public, le recours déposé auprès du Tribunal du contentieux administratif a été classé le 20 septembre 2017.
  5. 265. Le comité observe en outre que, d’après des informations relevant du domaine public, la commission de liquidation de l’UNE a achevé son mandat et que, le 25 avril 2019, le ministère de l’Education a transmis le rapport établi par cette commission aux dirigeants de l’UNE au moment de sa dissolution. Le comité observe que le ministère de l’Education aurait restitué auxdits dirigeants les biens confisqués à l’UNE et leur aurait demandé de prendre une décision quant à l’affectation de ces biens, étant donné qu’ils appartenaient à une organisation qui était toujours en cours de liquidation.
  6. 266. Tout en prenant bonne note de l’indication du gouvernement selon laquelle il est ouvert au dialogue et à la concertation, le comité constate avec regret que, comme il ressort de ce qui précède, l’UNE, en tant qu’organisation nationale, demeure dissoute. Observant que, dans sa réponse, le gouvernement se contente d’indiquer que la décision de dissolution ne relève ni de la compétence ni des attributions du ministère du Travail puisqu’elle émane du ministère de l’Education, le comité souligne que les enseignants, comme l’ensemble des autres travailleurs, devraient bénéficier du droit à la liberté syndicale [voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 362] et que l’obligation de veiller au respect de ce droit ne se limite pas au ministère du Travail mais s’étend à l’ensemble des autorités et institutions du pays. Le comité observe en outre que la dissolution examinée dans le présent cas touche le plus grand syndicat d’enseignants du pays, qui mène des activités dans le domaine de l’éducation et défend les intérêts des travailleurs de ce secteur depuis plus de soixante-dix ans, et que sa dissolution par voie administrative a entraîné non seulement la disparition de l’organisation dans son ensemble, mais aussi la perte des avantages et des accords négociés dans différents domaines au cours de son existence.
  7. 267. Par ailleurs, prenant note du fait que l’UNE a enregistré des organisations dans plusieurs provinces du pays et que le gouvernement indique avoir invité l’UNE à entamer la procédure administrative d’enregistrement en tant que nouvelle organisation syndicale auprès du ministère du Travail, le comité veut croire que les mesures nécessaires seront prises pour veiller à ce que cet enregistrement ait lieu, si l’UNE le demande. En outre, le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la restitution intégrale des avoirs saisis à l’organisation et garantir que toute autre conséquence liée à la dissolution administrative de l’UNE est éliminée. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  8. 268. Enfin, s’agissant de l’allégation selon laquelle le gouvernement n’aurait pas mis en œuvre les recommandations formulées dans le cadre du cas no 2755 concernant le recouvrement des cotisations syndicales, le comité rappelle que ces recommandations demeurent pleinement en vigueur.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 269. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité veut croire que toutes les mesures nécessaires seront prises pour veiller à ce que l’enregistrement de l’UNE en tant qu’organisation syndicale auprès du ministère du Travail ait lieu, si l’UNE le demande. En outre, le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la restitution intégrale des avoirs saisis à l’organisation et garantir que toute autre conséquence liée à la dissolution administrative de l’UNE est éliminée. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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