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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 18. Le présent cas, dans lequel les organisations plaignantes allèguent
que la loi de 2008 sur les services essentiels dans la fonction publique (PSESA) et la
loi portant modification de la loi sur les syndicats (TUAA) en vigueur dans la province
de la Saskatchewan empêchent les travailleurs d’exercer leur droit fondamental à la
liberté syndicale en limitant leurs possibilités de s’affilier à des syndicats,
d’entreprendre librement des négociations collectives et d’exercer leur droit de grève,
a été examiné pour la dernière fois par le comité à sa réunion de mars 2014. [Voir
371e rapport, paragr. 36-43.] A cette occasion, le comité a prié le gouvernement de le
tenir informé de la décision rendue par la Cour suprême du Canada au sujet de la
validité constitutionnelle de la PSESA et de la TUAA et de toute mesure prise en
conséquence. Le comité a également demandé au gouvernement de veiller à ce que le
gouvernement provincial prenne des mesures concrètes pour réexaminer ces deux lois, en
étroite concertation avec les partenaires sociaux concernés, en vue de les modifier
conformément à ses précédentes recommandations. Enfin, il a demandé au gouvernement de
veiller à ce que le gouvernement provincial prenne les mesures appropriées, en
concertation avec les partenaires sociaux concernés, pour instituer un mécanisme d’appel
en vue de limiter la désignation des travailleurs considérés comme «essentiels» au
strict minimum nécessaire au maintien des services essentiels en cas d’arrêt de travail,
ainsi que pour mettre en place des mécanismes de compensation.
- 19. Dans une communication datée du 2 mars 2016, la Fédération du travail
de la Saskatchewan (SFL), l’une des organisations plaignantes, a transmis la décision de
la Cour suprême du Canada relative aux questions soulevées dans ce cas.
- 20. Dans une communication datée du 14 mars 2016, le gouvernement du
Canada a transmis une réponse du gouvernement de la Saskatchewan. Le gouvernement
provincial précise que, le 1er janvier 2016, la loi portant modification de la loi sur
l’emploi (services essentiels) (loi 183) est entrée en vigueur. Cette loi modifie le
régime des services essentiels qui était en vigueur dans le cadre de la PSESA afin de
répondre aux préoccupations de la Cour suprême du Canada et du Comité de la liberté
syndicale. Le gouvernement explique que la loi modificative:
- – abandonne la
définition des «services essentiels». Les parties sont désormais tenues de négocier
à propos de ce qu’elles considèrent comme étant des «services essentiels»; elles
peuvent à cet effet s’inspirer des définitions que donne l’OIT des services
essentiels et des services minima; si elles ne parviennent pas à conclure un accord
sur les services essentiels, chacune des parties peut soumettre une requête à une
tierce instance, le tribunal des services essentiels, qui est un organe de règlement
des différends indépendant. La requête est soumise au président de la Commission des
relations de travail, ainsi qu’au ministre concerné;
- – établit des tribunaux
des services essentiels, qui se composent du président ou du vice-président de la
Commission des relations de travail, d’une personne choisie par l’employeur et d’une
personne choisie par le syndicat. Un nouveau tribunal est institué pour chaque
différend. Le tribunal est compétent pour connaître de tout recours introduit par
l’une ou l’autre des parties au litige ayant pour objet la détermination des
services essentiels pour l’entreprise concernée. La décision du tribunal a force
obligatoire pour les deux parties. Dès qu’un accord sur les services essentiels est
négocié ou édicté par un tribunal des services essentiels, les parties sont libres
d’entamer une grève ou un lock-out; elles peuvent à tout moment saisir le même
tribunal des services essentiels en vue de déterminer si un accord sur les services
essentiels interfère de façon notoire sur la conduite d’une grève ou d’un
lock-out;
- – institue une procédure de médiation/arbitrage ayant force
obligatoire lorsque le tribunal des services essentiels estime qu’un accord sur les
services essentiels interfère de façon notoire sur la conduite d’une grève ou d’un
lock-out. Les parties sont tenues de faire relever les dispositions de la convention
collective de cette procédure de médiation/arbitrage contraignante, dont la durée de
validité est limitée à soixante jours, sauf si les parties conviennent de la
prolonger.
- 21. Le gouvernement de la Saskatchewan précise que son statut reste
inchangé dans le cadre de cette nouvelle procédure du fait de la compétence qui est la
sienne de déterminer les services essentiels pour le gouvernement exécutif.
- 22. Le gouvernement estime que les modifications susmentionnées sont
conformes aux dispositions de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, et réitère son intention de collaborer avec les
parties prenantes du groupe des employeurs et du groupe des travailleurs en vue de
l’élaboration de lois, de programmes et de politiques qui permettent à la province de
poursuivre sa croissance économique et d’accroître sa prospérité tout en assurant la
protection et la sécurité de ses citoyens.
- 23. Le comité prend note avec intérêt de la décision rendue le 30 janvier
2015 par la Cour suprême du Canada qui, ayant estimé que le droit de grève est protégé
par la Charte canadienne des droits et libertés, a jugé que la loi sur les services
essentiels dans la fonction publique était inconstitutionnelle. Le comité note en
particulier que la Cour suprême a déclaré que le droit de grève est protégé aux termes
de l’article 2 d) de la Charte des droits et libertés en raison de la fonction
spécifique qu’il joue dans le cadre de la négociation collective (paragr. 77). La Cour a
également conclu au caractère inconstitutionnel de la loi de ce qu’elle restreignait les
droits des salariés concernés beaucoup plus que nécessaire au regard de l’objectif visé,
qui est d’assurer la continuité des services essentiels (paragr. 96 97). La Cour a donné
un an au gouvernement pour mettre la législation en conformité avec la Constitution
(paragr. 103).
- 24. Le comité note avec intérêt que la PSESA a été modifiée conformément
à ses recommandations le 1er janvier 2016.
- 25. Le comité note en outre que, en ce qui concerne la TUAA, la Cour
suprême a maintenu à l’unanimité la décision de la Cour d’appel reconnaissant le
caractère constitutionnel de cette loi (paragr. 102 et 175). La Cour suprême a conclu
que la TUAA ne portait pas foncièrement atteinte à la liberté de créer librement des
associations ou de s’y affilier (paragr. 100) et précisé que sa conviction était
renforcée par les considérations du juge de première instance qui avait conclu que,
comparées à celles d’autres régimes légaux régissant les relations professionnelles au
Canada, les dispositions de la TUAA n’engendraient pas de difficultés excessives
susceptibles de porter gravement atteinte au droit d’association des travailleurs
(paragr. 100).
- 26. Le comité conclut, dans ce contexte, qu’aucune modification de la
TUAA n’est actuellement envisagée. Il rappelle que, lors du premier examen de ce cas, il
avait estimé que «dans les circonstances particulières du présent cas, il pourrait bien
être excessivement difficile pour un syndicat d’obtenir le soutien de 45 pour cent des
employés avant une procédure de reconnaissance en tant qu’agent de négociation
collective, comme le stipule la loi». Le comité a fait observer que l’introduction de
cette modification signifiait en fait que «le syndicat doit faire la preuve d’un soutien
plus important pour mener ce scrutin qu’il ne le devra ensuite pour être accrédité».
[Voir 356e rapport, paragr. 379.]