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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 371, Mars 2014

Cas no 2892 (Türkiye) - Date de la plainte: 04-AOÛT -11 - Cas de suivi fermés en raison de l'absence d'informations de la part du plaignant ou du gouvernement au cours des 18 mois écoulés depuis l'examen de ce cas par le Comité.

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Allégations: L’organisation plaignante allègue que la législation en vigueur interdit aux magistrats et aux procureurs de constituer des organisations et que, sur la base de cette législation, le tribunal du travail a ordonné sa dissolution. Elle allègue également des actes de discrimination antisyndicale qui se sont traduits par la mutation de ses dirigeants

  1. 926. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de mars 2013 et a présenté, à cette occasion, un rapport intérimaire au Conseil d’administration [367e rapport, paragr. 1226-1239, approuvé par le Conseil d’administration à sa 317e session (mars 2013)].
  2. 927. Le gouvernement a fait part d’observations complémentaires dans une communication datée du 6 septembre 2013.
  3. 928. La Turquie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971 et de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 929. Lors de son précédent examen du cas en mars 2013, le comité a formulé les recommandations suivantes [367e rapport, paragr. 1239]:
    • a) Le comité prie le gouvernement d’intensifier ses efforts, en consultation avec les partenaires sociaux, pour mettre la loi no 4688 en conformité avec la convention no 87 pour ce qui est des droits syndicaux des magistrats et des procureurs. Le comité invite le gouvernement à recourir, s’il le désire, à l’assistance technique du Bureau à cet égard.
    • b) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour enregistrer immédiatement le YARGI-SEN en tant qu’organisation syndicale de magistrats et de procureurs afin qu’il puisse fonctionner, exercer ses activités et jouir des droits reconnus par la convention pour promouvoir et défendre les intérêts de ces catégories de fonctionnaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
    • c) Le comité prie le gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les actes allégués de discrimination antisyndicale dont font l’objet les dirigeants syndicaux Dr Rusen Gültekin, Omer Faruk et Ahmet Tasurt et de fournir des informations détaillées sur les résultats de cette enquête et sur les mesures prises pour remédier à la situation si le caractère antisyndical de ces actes était avéré.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 930. Dans sa communication datée du 6 septembre 2013, le gouvernement indique que, conformément au troisième paragraphe de l’article 51 de la Constitution turque, l’exercice du droit de constituer des syndicats est réglementé par la législation en vigueur. A cet égard, le gouvernement indique que, conformément à l’article 47 du Code civil turc (no 4721), les groupes organisés de personnes doivent remplir les conditions fixées par la loi pour obtenir le statut de personne morale. Il ajoute que, conformément à l’article 4 de la loi relative aux syndicats et à la convention collective des fonctionnaires (loi no 4688), telle que modifiée par la loi no 6286 datée d’avril 2012, les syndicats sont constitués en vue d’exercer des activités dans toute la Turquie par des fonctionnaires travaillant dans une branche du secteur public, et la constitution de syndicats organisés par profession ou par lieu de travail est interdite. Bien que l’article 15 de la loi no 4688 consacre le principe selon lequel tous les fonctionnaires jouissent des droits syndicaux, il ne s’applique pas à un nombre restreint d’entre eux du fait de la nature de leurs fonctions. L’article 15(b) de la loi en question dispose que les membres de juridictions supérieures – magistrats, procureurs et autres personnes considérées comme membres de cette profession – ne peuvent pas constituer de syndicats ni adhérer à un syndicat.
  2. 931. Le gouvernement indique en outre qu’il a tenu compte du paragraphe 1 de l’article premier de la convention no 151, qui dispose que la mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente convention s’appliqueront aux agents de niveau élevé dont les fonctions sont normalement considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à suivre ou à des tâches de direction ou aux agents dont les responsabilités ont un caractère hautement confidentiel sera déterminée par la législation nationale. Le gouvernement se réfère également à l’article 8 de la convention no 87, qui dispose que, dans l’exercice des droits qui leur sont reconnus par la présente convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l’instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité.
  3. 932. Le gouvernement indique que la demande faite par YARGI-SEN au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de la République turque n’a pas été acceptée car elle n’était pas conforme aux articles 4 et 15 de la loi no 4688. La législation interdit la constitution de syndicats de profession. Les magistrats et les procureurs, ainsi que les personnes considérées comme membres de cette profession, ne peuvent par conséquent pas constituer de syndicats ou en devenir membres. Dans ce contexte, le 15e tribunal du travail d’Ankara s’est prononcé, le 28 juillet 2011, en faveur de la dissolution du YARGI-SEN pour violation de l’interdiction de constituer des syndicats de profession. Cette décision a été confirmée par le département pénal no 9 de la Cour suprême en date du 21 février 2012.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 933. Le comité prend note des informations communiquées par le gouvernement. Le comité note avec regret que le gouvernement se contente de répéter que l’article 15(b) de la loi no 4688, telle que modifiée par la loi no 6289 datée d’avril 2012, interdit toujours aux magistrats et aux procureurs de devenir membres d’un syndicat et d’en constituer, et que, conformément à l’article 4, la constitution de syndicats organisés par profession ou par lieu de travail est interdite. Le comité regrette profondément les mesures insuffisantes prises ou envisagées par le gouvernement pour rendre ces dispositions conformes aux principes de la liberté syndicale, comme il le lui avait précédemment demandé. Il rappelle une nouvelle fois qu’il estime que l’article 15 de la loi no 4688, qui interdit aux magistrats et aux procureurs de constituer des syndicats, et l’article 4 de la même loi, qui interdit la constitution de syndicats organisés par profession ou par lieu de travail, sont contraires aux principes de la liberté syndicale énoncés dans les conventions portant sur ces sujets, qui prévoient que les travailleurs, «sans distinction d’aucune sorte», ont le droit de constituer des organisations «de leur choix» et de s’y affilier sans autorisation préalable. En ce qui concerne les exceptions admises sous la convention no 151 évoquées par le gouvernement, le comité souligne que, si la convention no 151 admet que certaines catégories de fonctionnaires (y compris ceux dont les responsabilités ont un caractère hautement confidentiel) puissent être exclues des dispositions générales qui garantissent aux agents publics la protection contre la discrimination antisyndicale ou qui leur assurent des méthodes de participation à la détermination de leurs conditions d’emploi, cette exclusion ne peut pas être interprétée comme affectant ou réduisant en quelque manière le droit fondamental d’organisation garanti à tous les travailleurs par la convention no 87. Par conséquent, le comité prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts, en consultation avec les partenaires sociaux, pour mettre la loi no 4688 en conformité avec la convention no 87 et de garantir aux magistrats et procureurs le droit de constituer des syndicats en vue de défendre leurs intérêts professionnels. Le comité invite le gouvernement à recourir, s’il le désire, à l’assistance technique du Bureau à cet égard et attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
  2. 934. Le comité note que, selon le gouvernement, la constitution du YARGI-SEN en tant qu’organisation syndicale étant contraire aux dispositions de la loi no 4688, le 15e tribunal du travail d’Ankara s’était prononcé, le 28 juillet 2011, en faveur de la dissolution du YARGI-SEN pour violation de l’interdiction de constituer des syndicats de profession. Cette décision a été confirmée par le département pénal no 9 de la Cour suprême en date du 21 février 2012. Estimant que la dissolution d’organisations syndicales est une mesure qui ne devrait intervenir que dans des cas de gravité extrême et ne devrait en aucun cas être fondée sur des motifs qu’il a déjà jugés contraires aux principes de la liberté syndicale énoncés dans les conventions portant sur ces sujets, le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour enregistrer immédiatement le YARGI-SEN en tant qu’organisation syndicale de magistrats et de procureurs afin qu’il puisse fonctionner, exercer ses activités et jouir des droits reconnus par la convention pour promouvoir et défendre les intérêts de ces catégories de fonctionnaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
  3. 935. Le comité regrette profondément que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations concernant la recommandation c); aussi, le comité le prie une nouvelle fois instamment de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les actes allégués de discrimination antisyndicale qui se sont traduits par la mutation forcée des dirigeants syndicaux Dr Rusen Gültekin, Omer Faruk et Ahmet Tasurt et, si le caractère antisyndical de ces actes est avéré, de prendre les mesures appropriées pour remédier à la situation. Le comité demande au gouvernement de lui faire part de la situation actuelle de ces dirigeants syndicaux et de le tenir informé des résultats de l’enquête et de toutes les mesures de suivi qui auront été prises.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 936. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement d’intensifier ses efforts, en consultation avec les partenaires sociaux, pour mettre la loi no 4688 en conformité avec la convention no 87 afin de garantir aux magistrats et aux procureurs le droit de constituer des syndicats en vue de défendre leurs intérêts professionnels. Il invite le gouvernement à recourir, s’il le désire, à l’assistance technique du Bureau à cet égard. Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
    • b) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour enregistrer immédiatement le YARGI-SEN en tant qu’organisation syndicale de magistrats et de procureurs afin qu’il puisse fonctionner, exercer ses activités et jouir des droits reconnus par la convention pour promouvoir et défendre les intérêts de ces catégories de fonctionnaires. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation à ce sujet.
    • c) Le comité prie instamment une nouvelle fois le gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les actes allégués de discrimination antisyndicale qui se sont traduits par la mutation forcée des dirigeants syndicaux Dr Rusen Gültekin, Omer Faruk et Ahmet Tasurt et, si le caractère antisyndical de ces actes est avéré, de prendre les mesures appropriées pour remédier à la situation. Le comité demande au gouvernement de lui faire part de la situation actuelle de ces dirigeants syndicaux et de le tenir informé des résultats de l’enquête et de toutes les mesures de suivi qui auront été prises.
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