Allégations: L’organisation plaignante allègue que la direction de la Banque du Punjab a transféré des dirigeants syndicaux et des membres, licencié cinq dirigeants syndicaux et multiplié les recours pour empêcher l’enregistrement du Syndicat des employés de la Banque du Punjab du Pakistan
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772. La plainte figure dans une communication du Syndicat des employés de la Banque du Punjab du Pakistan datée du 25 mai 2011.
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773. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication datée du 12 mars 2012.
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774. Le Pakistan a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante
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775. Dans sa communication datée du 25 mai 2011, l’organisation plaignante indique que, le 3 avril 2005, les employés de la Banque du Punjab ont constitué le Syndicat des employés de la Banque du Punjab du Pakistan. Cette banque, qui est agréée au niveau national, appartient au gouvernement provincial du Punjab. Elle compte environ 4 000 employés, dont 2 500 sont considérés comme des travailleurs ayant le droit de constituer des syndicats en vertu de l’ordonnance sur les relations professionnelles (IRO) de 2002, alors en vigueur.
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776. Une demande d’enregistrement du syndicat a été soumise à la Commission nationale des relations professionnelles (NIRC) le 21 avril 2005. La direction avait été informée de cette demande par lettre recommandée en date du 20 avril 2005. Dès réception de la demande susmentionnée, le président de la NIRC a demandé au président de la Banque du Punjab de lui communiquer une liste des employés de la banque. Donnant suite à la requête du président de la NIRC, un administrateur de la banque s’est présenté devant la commission le 4 mai 2005 et a confirmé que les membres du syndicat comptaient parmi les employés réguliers de la banque.
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777. Par une ordonnance provisoire, la NIRC a enjoint à la direction de la Banque du Punjab de ne pas transférer, licencier ni sanctionner des responsables du syndicat pendant l’examen de la demande d’enregistrement, comme il est prévu à l’article 10 de l’IRO de 2002 alors en vigueur (l’organisation plaignante a joint la décision à sa plainte). Toutefois, en violation totale de l’ordonnance de la NIRC, la direction de la banque a transféré dix employés dans différentes régions du pays et a licencié cinq dirigeants du syndicat, dont le président, le vice-président, le secrétaire général et le secrétaire général adjoint, le 3 mai 2005.
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778. Le syndicat s’est adressé à la NIRC pour protester contre les avis de mutation et de licenciement, et celle-ci a suspendu les décisions susmentionnées qui avaient été prises par la banque (cas nos 4(2)/05 et 4(3)/05 du 16 mai 2005, joints à la plainte). La direction a introduit une requête contre l’ordonnance de la NIRC devant la Haute Cour en mai 2005. Selon l’organisation plaignante, la direction de la banque a recouru à des manœuvres dilatoires qui ont prolongé indûment l’examen du litige devant la Haute Cour.
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779. En 2007, deux années plus tard, la Haute Cour a rendu son jugement et a rejeté la requête déposée par la banque (décision W.P. no 12257-2005, jointe à la plainte). La banque a ensuite interjeté appel devant la Haute Cour. Les magistrats ont rejeté ce recours le 26 janvier 2009 après une nouvelle période de deux ans et ont transmis l’affaire à la NIRC afin qu’elle prenne les mesures correctives appropriées (décision I.C.A. 60/2007, jointe à la plainte). Le 9 septembre 2009, la NIRC a rendu une ordonnance de justification à l’égard de la Banque du Punjab, afin que celle-ci expose les motifs pour lesquels elle ne devrait pas être poursuivie pour outrage en vertu de l’article 27 de la loi sur les relations professionnelles (IRA) de 2008, et pour pratiques de travail déloyales en violation de la règle 32(1) du règlement de la NIRC (P&F) de 1973, lu conjointement avec les articles 10 et 17(d) de l’IRA de 2008 (cas no 3(05)/2005 de la NIRC, joint à la plainte). La direction a introduit une nouvelle requête devant la Haute Cour demandant une ordonnance de suspension afin de prévenir toute action de la part de la NIRC.
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780. Selon l’organisation plaignante, la Banque du Punjab et le gouvernement du Punjab ont dressé des obstacles de toutes sortes au cours des six dernières années en vue de prolonger la procédure et de priver les travailleurs de leur droit légitime d’association, ce qui constitue une violation grave de la législation nationale et de la convention no 87, ratifiée par le Pakistan. Les dirigeants du syndicat et les membres de leurs familles en subissent les dommages depuis 2005.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
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781. Dans une communication datée du 12 mars 2012, le gouvernement indique que le cas a été transmis au greffier de la NIRC en vue de l’enregistrement de l’organisation en tant que syndicat sectoriel en 2005. Le président de la commission a rendu une ordonnance de suspension en date du 4 mai 2005 visant à empêcher le licenciement ou la mutation des membres du syndicat. Toutefois, la direction de la Banque du Punjab a licencié Ch. Muhammad Farooq et d’autres membres du syndicat et a porté la question de l’enregistrement du syndicat devant la Haute Cour de Lahore. A l’issue d’une période de deux ans, la Haute Cour a renvoyé le cas devant la NIRC.
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782. Le gouvernement ajoute que la NIRC a rendu une ordonnance de justification à l’égard de la Banque du Punjab mais, encore une fois, le cas a fait l’objet d’un appel devant la Haute Cour qui a enjoint à la NIRC, le 27 janvier 2012, de transférer le dossier concernant le cas aux provinces concernées. Par ailleurs, le syndicat a formé un recours, qui est en instance devant la Haute Cour à Islamabad. La justice étant saisie de cette affaire, il a été recommandé au syndicat requérant de poursuivre l’action devant les tribunaux. Le gouvernement ajoute qu’un rapport final pourra être transmis dès qu’un jugement aura été rendu dans cette affaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
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783. Le comité rappelle que ce cas porte sur des allégations selon lesquelles la direction de la Banque du Punjab a transféré et licencié des dirigeants syndicaux et des membres et a multiplié les recours en vue d’empêcher l’enregistrement du Syndicat des employés de la Banque du Punjab du Pakistan.
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784. Le comité note que le gouvernement et l’organisation plaignante semblent être d’accord sur les faits suivants: 1) le Syndicat des employés de la Banque du Punjab du Pakistan ont présenté une demande d’enregistrement auprès de la NIRC, le 21 avril 2005; 2) par une ordonnance provisoire, la NIRC a enjoint à la direction de la banque de ne pas transférer, licencier ni sanctionner des responsables du syndicat pendant l’examen de la demande d’enregistrement; 3) la direction de la banque a transféré dix employés dans différentes régions du pays et a licencié cinq responsables du syndicat, dont le président, le vice-président, le secrétaire général et le secrétaire général adjoint, le 3 mai 2005; 4) le syndicat a déposé une plainte auprès de la NIRC contre les avis de mutation et de licenciement, et la NIRC a suspendu lesdites décisions prises par la banque; 5) la direction de la banque a déposé une requête contre les ordonnances de la NIRC devant la Haute Cour en mai 2005 et, deux ans plus tard, en 2007, la Haute Cour a rendu son jugement et a rejeté la requête déposée par la banque; 6) la banque a interjeté appel devant la Haute Cour qui l’a rejeté le 26 janvier 2009, après une nouvelle période de deux ans, et a renvoyé le cas devant la NIRC afin qu’elle prenne les mesures correctives appropriées; et 7) le 9 septembre 2009, la NIRC a rendu une ordonnance de justification à l’égard de la banque, mais la direction a encore déposé un recours devant la Haute Cour, demandant une ordonnance de suspension pour empêcher toute action de la part de la NIRC. Le gouvernement ajoute que la Haute Cour a enjoint la NIRC, le 27 janvier 2012, de transférer le dossier du cas aux provinces concernées, et le syndicat a interjeté appel, ce qui est actuellement en instance devant la Haute Cour à Islamabad.
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785. Le comité note avec une profonde préoccupation que, à ce jour, plus de sept ans se sont écoulés depuis la demande d’enregistrement déposée auprès de la NIRC et, du fait des recours successifs introduits par la banque, qui n’a pas tenu compte de l’ordonnance initiale de protection rendue par la NIRC, les travailleurs de la banque n’ont toujours pas obtenu l’enregistrement de leur syndicat, et les responsables syndicaux sont toujours licenciés depuis plus de sept ans. Le comité rappelle que l’administration dilatoire de la justice constitue un déni de justice. Une longue procédure d’enregistrement constitue un obstacle sérieux à la création d’organisations et équivaut à un déni du droit des travailleurs de créer des organisations sans autorisation préalable. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 105 et 307.]
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786. Le comité croit comprendre que les délibérations récentes ont eu lieu à une période où la législation nationale du travail n’était pas claire, ce qui peut expliquer le renvoi du cas, en janvier 2012, aux provinces concernées. [Le comité a eu l’occasion d’examiner cette question dans le cadre du cas no 2799 (Pakistan), 359e rapport, mars 2011, paragr. 970 990, et 362e rapport, novembre 2011, paragr. 98-101.] Observant néanmoins les dispositions prises récemment pour éviter un vide juridique et, plus particulièrement, l’adoption, le 14 mars 2012, de la loi sur les relations professionnelles (IRA) de 2012 qui a évité l’expiration du mandat de la NIRC et du statut juridique des syndicats nationaux et sectoriels, le comité s’attend à ce que le syndicat soit enregistré sans délai en vertu de cette nouvelle législation et prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation.
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787. Le comité note en outre avec une profonde préoccupation que, en violation manifeste des ordonnances de la NIRC, la direction de la banque a transféré dix employés dans différentes régions du pays et licencié cinq dirigeants du syndicat, dont Bashir Ahmed (vice-président), Muhammad Farooq (secrétaire général), Muhammad Ashraf Khan (secrétaire général adjoint) et le président, le 3 mai 2005, et que cette question est également encore en instance devant les tribunaux. Le comité rappelle que la discrimination antisyndicale est une des violations les plus graves de la liberté syndicale puisqu’elle peut compromettre l’existence même des syndicats. Toutes mesures prises à l’encontre de travailleurs ayant voulu constituer des organisations de travailleurs sont incompatibles avec le principe d’après lequel les travailleurs doivent avoir le droit de constituer, sans autorisation préalable, des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations. Le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de discrimination antisyndicale et doit veiller à ce que les plaintes pour des pratiques discriminatoires de cette nature soient examinées dans le cadre d’une procédure qui doit être prompte, impartiale et considérée comme telle par les parties intéressées. Les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraires à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l’absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 769, 338, 817 et 826.] Compte tenu des ordonnances d’injonction rendues par la NIRC pour la protection des dirigeants syndicaux et des membres et vu que ces employés n’ont eu droit à aucune réparation depuis plus de sept ans, le comité exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires en vue de leur réintégration immédiate dans l’attente de toute autre décision des autorités judiciaires et de le tenir informé des progrès réalisés à cet égard. Dans le cas où la réintégration ne serait pas possible vu le temps qui s’est écoulé, le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne des mesures pour assurer le paiement d’une compensation adéquate aux personnes concernées de manière à constituer des sanctions suffisamment dissuasives contre de tels actes.
Recommandations du comité
Recommandations du comité
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788. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Observant l’adoption récente de la loi sur les relations professionnelles (IRA) de 2012, le 14 mars 2012, qui a évité l’abrogation du mandat de la NIRC et du statut juridique des syndicats nationaux et sectoriels, le comité s’attend à ce que le syndicat soit enregistré sans délai en vertu de cette nouvelle législation et prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation.
- b) Compte tenu des ordonnances d’injonction rendues par la NIRC pour la protection des dirigeants syndicaux et des membres et vu que ces employés de la banque n’ont eu droit à aucune réparation depuis plus de sept ans, le comité exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires en vue de leur réintégration immédiate dans l’attente de toute autre décision des autorités judiciaires et de le tenir informé des progrès réalisés à cet égard. Dans le cas où la réintégration ne serait pas possible vu le temps qui s’est écoulé, le comité s’attend à ce que le gouvernement prenne des mesures pour assurer le paiement d’une compensation adéquate aux personnes concernées de manière à constituer des sanctions suffisamment dissuasives contre de tels actes.