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- 1263. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de mai-juin 2009 et présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 354e rapport, paragr. 1117 à 1149, approuvé par le Conseil d’administration à sa 297e session.]
- 1264. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 3 septembre 2009.
- 1265. La Tunisie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas - 1266. Lors de sa réunion de mai-juin 2009, le comité a formulé les recommandations suivantes:
- a) Le comité veut croire que, dans la mesure où la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT) se conforme aux formalités prescrites dans le Code du travail relatives à la constitution d’un syndicat professionnel, les autorités ne manqueront pas de reconnaître rapidement à cette dernière la personnalité juridique. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard et, le cas échéant, d’indiquer tout élément éventuellement retenu par le gouvernorat de Tunis pour refuser l’enregistrement de la CGTT.
- b) Le comité prie le gouvernement de préciser les dispositions législatives qui prévoient le recours contre tout obstacle au dépôt des statuts des syndicats, y compris le refus éventuel d’enregistrement.
- c) Le comité demande au gouvernement de garantir pleinement à toutes les organisations de travailleurs, y compris au comité de liaison de la CGTT, le droit d’organiser des réunions publiques rentrant dans l’exercice d’un droit syndical dans la mesure où elles respectent les dispositions générales relatives aux réunions publiques applicables à tous, et de ne recourir à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé.
- d) Le comité demande au gouvernement d’indiquer les motifs de l’interdiction par les autorités de la tenue de deux conférences de presse de la CGTT relatives à sa constitution.
- e) Compte tenu de la déclaration du gouvernement concernant l’UGTT qu’il considère comme la seule organisation syndicale légalement constituée, le comité le prie instamment de préciser le statut reconnu aux organisations syndicales constituées dans les entreprises de la région de Gafsa qui, selon l’organisation plaignante, ont adressé leurs statuts et la composition de leur direction par pli recommandé au gouverneur de Gafsa le 26 juillet 2007. Le cas échéant, le comité demande au gouvernement d’indiquer les motifs pour lesquels ces organisations ne seraient pas considérées comme légalement constituées.
- f) Le comité prie le gouvernement de préciser les critères objectifs et préétablis qui ont été fixés pour déterminer la représentativité des partenaires sociaux en application de l’article 39 du Code du travail dans l’entreprise CPG ou dans le secteur minier de la région de Gafsa. Dans l’éventualité où de tels critères n’auraient pas encore été fixés, le comité espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour les fixer en consultation avec les partenaires sociaux et qu’il l’en tiendra informé.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 1267. Dans une communication en date du 3 septembre 2009, le gouvernement transmet ses observations concernant les recommandations du comité.
- 1268. S’agissant des recommandations du comité concernant le refus d’enregistrement de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), le gouvernement réitère que les dispositions du Code du travail prévoient que la constitution d’un syndicat n’obéit à aucune formalité particulière et ne prescrivent pas de reconnaissance de la part des autorités pour octroyer la personnalité civile et l’autonomie financière. Le gouvernement déclare ainsi que le refus d’enregistrement de la CGTT par le gouvernorat de Tunis n’est pas avéré dans la mesure où l’administration n’a pas à intervenir dans une procédure de constitution d’un syndicat. Le gouvernement précise que la constitution d’un syndicat s’effectue d’une manière individuelle, personnelle et directe qui ne peut être entravée par un quelconque obstacle. Seulement, dans la mesure où il est prouvé que l’administration aurait entravé cette procédure, le tribunal administratif serait l’instance compétente pour statuer sur tout recours pour excès de pouvoir, cela conformément à l’article 3 de la loi no 72-40 du 1er juin 1972 relative au tribunal administratif telle qu’amendée par la loi no 2002-11 du 4 février 2002.
- 1269. S’agissant des recommandations du comité relatives au droit des syndicats d’organiser des réunions publiques, le gouvernement réitère que toutes les organisations syndicales peuvent tenir des réunions publiques à condition de respecter les formalités administratives prévues par la loi no 69-4 du 24 janvier 1969 réglementant les réunions publiques, les cortèges, les défilés, les manifestations et les attroupements. Aussi, le recours à la force publique n’est requis que dans des situations où la sécurité des biens et des personnes l’exige. Il rappelle que l’intervention des forces de l’ordre obéit à des règles d’intervention fixées par la loi.
- 1270. Le gouvernement réfute une nouvelle fois les allégations de la CGTT relatives à l’interdiction par les autorités de la tenue de deux conférences de presse de l’organisation concernant sa constitution. Selon le gouvernement, l’organisation plaignante n’en apporte pas la preuve, et aucun recours n’a été déposé contre une prétendue interdiction de la part des autorités.
- 1271. S’agissant des syndicats constitués dans les entreprises de la région de Gafsa qui, selon l’organisation plaignante, ont adressé leurs statuts et la composition de leur direction par pli recommandé au gouverneur de Gafsa le 26 juillet 2007, le gouvernement déclare que ces allégations ne sont corroborées d’aucune justification. Par ailleurs, le gouvernement déclare que, si aucun des syndicats qui auraient prétendument été constitués n’a encore vu le jour, cela tend à confirmer que les formalités de dépôt n’ont jamais été accomplies.
- 1272. Enfin, le gouvernement déclare que, si l’article 39 du Code du travail consacre le principe de la plus grande représentativité pour déterminer l’organisation qui sera amenée à conclure une convention collective dans le cadre de la branche d’activité et dans le territoire considéré, les critères pour établir cette représentativité sont en cours d’élaboration. Le gouvernement ajoute que les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs seront consultées en temps opportun sur la question. Il conclut en indiquant que les dispositions de l’article 39 ne sont applicables qu’en cas de différend entre organisations syndicales légalement constituées, ce qui n’est pas établi dans le présent cas.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 1273. Le comité rappelle que dans le présent cas les allégations de l’organisation plaignante portent notamment sur le refus des autorités d’enregistrer la constitution de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT) et d’autoriser la tenue de conférences de presse par ladite organisation syndicale pour informer l’opinion publique de sa constitution, sur le silence des autorités et d’une entreprise minière publique de la région de Gafsa face aux revendications de syndicats nouvellement constitués.
- 1274. S’agissant de l’enregistrement de la CGTT, le comité rappelle qu’il avait indiqué que, si l’organisation plaignante se conformait aux formalités prescrites dans le Code du travail relatives à la constitution d’un syndicat professionnel, les autorités ne devraient pas manquer de lui reconnaître rapidement la personnalité juridique. Le comité avait ainsi demandé au gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard et, le cas échéant, d’indiquer tout élément éventuellement retenu par le gouvernorat de Tunis pour refuser l’enregistrement de la CGTT selon les allégations de l’organisation plaignante. Le comité relève que dans sa réponse le gouvernement réitère que la CGTT n’a pas accompli les formalités légales requises pour la constitution d’un syndicat et que les allégations de refus d’enregistrement de la CGTT par le gouvernorat de Tunis sont infondées dans la mesure où l’administration n’a pas à intervenir dans une procédure de constitution d’un syndicat.
- 1275. Le comité rappelle que, selon l’organisation plaignante, l’initiative prise par les fondateurs de la CGTT de déposer les statuts de l’organisation remonte à février 2007, à savoir depuis près de trois années, sans résultat. Le comité ne peut qu’exprimer une nouvelle fois sa préoccupation devant ce délai particulièrement long, cela malgré les explications du gouvernement sur l’aspect déclaratoire de la procédure d’enregistrement des syndicats. Le comité rappelle les principes suivants concernant la constitution d’une organisation syndicale: les formalités prescrites par la loi pour créer un syndicat ne doivent pas être appliquées de manière à retarder ou à empêcher la formation des organisations syndicales, et tout retard provoqué par les autorités dans l’enregistrement d’un syndicat constitue une violation de l’article 2 de la convention no 87. De même, une longue procédure d’enregistrement constitue un obstacle sérieux à la création d’organisations et équivaut à un déni du droit des travailleurs de créer des organisations sans autorisation préalable. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 279 et 307.] Le comité prie une nouvelle fois le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau concernant l’enregistrement de la CGTT et veut croire que, si cette dernière se conforme aux formalités prescrites dans le Code du travail relatives à la constitution d’un syndicat professionnel, les autorités ne manqueront pas de reconnaître rapidement à cette dernière la personnalité juridique.
- 1276. S’agissant de sa requête au gouvernement d’indiquer les motifs de l’interdiction par les autorités de la tenue de deux conférences de presse de la CGTT relative à sa constitution, le comité note que le gouvernement réfute une nouvelle fois les allégations de l’organisation plaignante en indiquant qu’aucune preuve n’est apportée pour les appuyer, et qu’aucun recours n’a été déposé contre l’administration sur ce point. Le comité note que les informations fournies sur cette question par l’organisation plaignante et le gouvernement demeurent contradictoires. Il se voit contraint de rappeler que le droit d’organiser des réunions publiques constitue un aspect important des droits syndicaux. A cet égard, le comité a toujours opéré une distinction entre les manifestations ayant un objet purement syndical, qu’il considère comme rentrant dans l’exercice d’un droit syndical, et celles qui tendent à d’autres fins. L’autorisation administrative de tenir des réunions et manifestations publiques n’est pas en soi une exigence abusive du point de vue des principes de la liberté syndicale. Le maintien de l’ordre public n’est pas incompatible avec le droit de manifestation dès lors que les autorités qui l’exercent peuvent s’entendre avec les organisateurs de la manifestation sur les lieux de celle-ci et les conditions dans lesquelles elle est appelée à se dérouler. Il ne faut pas que l’autorisation de tenir des réunions et des manifestations publiques, ce qui constitue un droit syndical important, soit arbitrairement refusée. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 134, 141 et 142.] Le gouvernement est prié de veiller au respect des principes rappelés ci-dessus en garantissant à toutes les organisations représentatives, y compris au comité de liaison de la CGTT, le droit d’organiser des réunions publiques rentrant dans l’exercice d’un droit syndical dans la mesure où elles respectent les dispositions générales relatives aux réunions publiques applicables à tous, et de recourir à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé.
- 1277. S’agissant de sa recommandation concernant le statut des organisations syndicales constituées dans les entreprises de la région de Gafsa qui, selon l’organisation plaignante, ont adressé leurs statuts et la composition de leur direction par pli recommandé au gouverneur de Gafsa le 26 juillet 2007, le comité prend note de la déclaration du gouvernement réitérant que les allégations de l’organisation plaignante ne sont corroborées d’aucune justification et qu’aucun des syndicats n’a encore vu le jour dans la mesure où les formalités de dépôt n’ont jamais été accomplies. A cet égard, le comité invite l’organisation plaignante à communiquer aux autorités toute pièce utile à l’appui de ses allégations selon lesquelles les formalités adéquates ont été effectuées en juillet 2007. Dans la mesure où l’organisation plaignante ou les organisations syndicales concernées fourniront les pièces justificatives à l’appui de leurs allégations, le comité attend du gouvernement et des autorités compétentes qu’ils prennent les mesures nécessaires pour que les organisations syndicales qui auront satisfait aux formalités prévues par la loi soient enregistrées sans délai. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 1278. S’agissant de sa recommandation concernant les critères objectifs et préétablis qui auront été fixés pour déterminer la représentativité des partenaires sociaux en application de l’article 39 du Code du travail dans la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) ou dans le secteur minier de la région de Gafsa, le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle de tels critères sont en cours d’élaboration et que les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs seront consultées en temps opportun sur la question. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
- 1279. Enfin, le comité rappelle que les gouvernements devraient reconnaître l’importance de présenter des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre et non se limiter à des observations de caractère général, en particulier lorsque le cas a fait l’objet d’un examen approfondi par le comité et de recommandations. La procédure devant le comité requiert des gouvernements qu’ils répondent de manière détaillée et en temps opportun, de manière à permettre un examen effectif de la part du comité. Le comité attend du gouvernement qu’il prenne toutes les mesures nécessaires en vue de la résolution rapide du présent cas conformément aux principes de la liberté syndicale et qu’il fournisse sans délai des informations détaillées sur les progrès accomplis à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1280. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité prie de nouveau le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau concernant l’enregistrement de la Confédération générale tunisienne du travail (CGTT) et veut croire que, si cette dernière se conforme aux formalités prescrites dans le Code du travail relatives à la constitution d’un syndicat professionnel, les autorités ne manqueront pas de lui reconnaître rapidement la personnalité juridique.
- b) Le comité invite l’organisation plaignante à communiquer aux autorités toute pièce utile à l’appui de ses allégations selon lesquelles les formalités adéquates ont été effectuées en juillet 2007. Dans la mesure où l’organisation plaignante ou les organisations syndicales concernées fourniront les pièces justificatives à l’appui de leurs allégations, le comité attend du gouvernement et des autorités compétentes qu’ils prennent les mesures nécessaires pour que les organisations syndicales qui auront satisfait aux formalités prévues par la loi soient enregistrées sans délai. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- c) Notant l’indication du gouvernement selon laquelle les critères objectifs et préétablis pour déterminer la représentativité des partenaires sociaux en application de l’article 39 du Code du travail sont en cours d’élaboration et que les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs seront consultées en temps opportun sur la question, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard.
- d) Le comité attend du gouvernement qu’il prenne toutes les mesures nécessaires en vue de la résolution rapide du présent cas conformément aux principes de la liberté syndicale et qu’il fournisse sans délai des informations détaillées sur les progrès accomplis à cet égard.