Afficher en : Anglais - Espagnol
- 1226. La plainte est présentée dans une communication du Syndicat des travailleurs d’International Wiring Systems (IWSWU), en date du 29 septembre 2008.
- 1227. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 15 janvier 2010.
- 1228. Le gouvernement des Philippines a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 1229. Dans sa communication du 29 septembre 2008, l’IWSWU déclare que le gouvernement des Philippines aurait commis des violations des conventions nos 87 et 98. Il dénonce notamment les menaces et actes de harcèlement de la part de militaires à l’encontre de ses dirigeants et de leurs familles; des actes d’ingérence des forces armées des Philippines (AFP) dans les affaires syndicales, visant à dissuader les membres syndicaux de participer à la négociation collective; ainsi qu’une campagne de dénigrement contre des membres de l’IWSWU et leurs familles, entraînant des risques pour leur sûreté et leur sécurité.
- 1230. L’organisation plaignante soutient que ces actes sont commis par le gouvernement par l’intermédiaire des forces armées des Philippines, en particulier celles qui relèvent du commandement du nord de Luzon, Camp Aquino, ville de Tarlac, et facilités par la collaboration des fonctionnaires des barangay (conseils de village), du ministère du Travail et de l’Emploi et de la direction de l’International Wiring Systems (Phils) Corporation (IWSPC).
- 1231. L’IWSWU déclare être une organisation de travailleurs légitime, active au sein de l’IWSPC depuis 1996 et enregistrée au ministère du Travail et de l’Emploi. Sur les 6 048 travailleurs employés par l’entreprise, 3 116 sont membres de ce syndicat. L’organisation syndicale est dirigée par l’assemblée générale des membres (l’organe décisionnel le plus élevé), le comité directeur et le comité exécutif composés de 50 responsables élus.
- 1232. L’IWSWU déclare subir depuis plus de douze ans des tentatives de déstabilisation, tant de la part de l’entreprise que du ministère du Travail et de l’Emploi, qui apportent leur soutien, y compris en menant ouvertement campagne, aux travailleurs qui font concurrence à la direction du syndicat. Malgré ces tentatives, la direction de l’IWSWU n’a pas seulement persisté à promouvoir le bien-être de ses membres mais s’est aussi fixé pour tâche d’aider d’autres travailleurs d’usines voisines de la province de Tarlac par le biais de l’éducation et en leur offrant une assistance juridique gratuite pour les questions relatives au travail. Promouvoir et défendre les droits légitimes des travailleurs et aider les résidents des communautés voisines, tels sont les principaux objectifs du syndicat.
- 1233. L’IWSWU allègue que les menaces et les actes de harcèlement de la part des militaires ont commencé en 1998 alors que Mme Angelina Ladera était présidente du syndicat. Depuis 1998, des hommes non identifiés, que l’on pense être des militaires, avaient tenté de l’enlever. Cette dernière a été placée sous surveillance intensive et, en 2005, les militaires ont fait figurer son nom sur le document intitulé «Order of battle and knowing the enemy», un exposé PowerPoint où les militaires stigmatisent diverses organisations en les présentant comme des bastions du Parti communiste. Craignant pour sa vie et sa sécurité, Mme Ladera a démissionné de l’IWSWU en 2005. Même après sa démission, Mme Ladera a poursuivi ses activités syndicales. Maintenue sous surveillance, elle devait fuir en permanence. M. Norly Pampoza, un autre ancien président de l’IWSWU, a également démissionné à la fin de 2006 après que son nom eut été inscrit sur une liste établie par les militaires.
- 1234. L’organisation plaignante soutient qu’en 2008 les militaires ont multiplié leurs menaces et actes de harcèlement à l’encontre de ses dirigeants et de leurs familles. En particulier, l’IWSWU allègue qu’en mars 2008 des militaires des AFP, relevant du commandement du sud de Luzon, ont commencé à se rendre au domicile de responsables syndicaux pour les inviter à des séminaires organisés par les militaires sur des questions touchant au travail et aux syndicats. Le 6 mars 2008, Ricardo Sosa, président du comité directeur de l’IWSWU, a reçu une invitation des militaires à se rendre au barangay (conseil de village) pour assister à une séance d’orientation anti-insurrectionnelle, organisée par les militaires le 7 mars 2008. A cette réunion, les militaires ont présenté l’IWSWU comme une entité de la mouvance gauchiste (communistes). M. Sosa a reçu d’autres invitations les 11 et 12 mars ainsi que le 29 avril 2008, les militaires s’étant rendus à son domicile. En juillet 2008, lui et un autre membre du comité directeur du syndicat ont été approchés par du personnel militaire, qui les a priés de ne pas poser trop de questions au cours de la négociation collective qui allait avoir lieu prochainement car cela risquerait d’entraîner la fermeture de l’usine. L’organisation plaignante affirme que ces visites ont suscité des craintes dans les familles des deux militants syndicaux.
- 1235. Le 7 juin 2008, M. Dexter P. Datu, président du syndicat, et M. Ramon Lopez, son vice-président, ont été menacés par quatre hommes qui se sont présentés comme étant des militaires et des représentants du ministère du Travail et de l’Emploi et qui leur auraient dit que, s’ils aimaient leurs familles, ils devraient cesser leurs activités. Le 10 août 2008, des militaires ont organisé un débat sur des questions telles que la relation entre la direction de l’entreprise et ses employés, la négociation collective à venir et le soutien apporté par les travailleurs au syndicat. L’organisation plaignante affirme que des hommes en civil qui s’étaient présentés comme des militaires et des représentants du ministère du Travail et de l’Emploi rendaient régulièrement visite aux responsables syndicaux à leur domicile, soit tôt le matin, soit tard le soir, pour discréditer le président du syndicat en affirmant qu’il soutenait le Parti communiste et la Nouvelle armée populaire. On leur a également demandé de ne pas poser trop de questions durant les négociations qui allaient avoir lieu prochainement en vue de la signature d’une convention collective afin de ne pas provoquer la fermeture de l’entreprise.
- 1236. L’IWSWU soutient que les militaires, par l’intermédiaire de fonctionnaires des barangay, demandaient aux responsables et aux membres du syndicat d’assister à des séminaires et à des réunions. En tant que résidents, les syndicalistes ne pouvaient pas refuser ces invitations. Lors de ces soi-disant séminaires, les militaires discutaient de questions relatives au travail, des problèmes du syndicat et de son incapacité à répondre aux préoccupations des travailleurs. D’après l’IWSWU, les militaires ont toujours affirmé que ces séminaires étaient coordonnés de concert avec les autorités municipales de Tarlac et avec le ministère du Travail et de l’Emploi.
- 1237. L’organisation plaignante allègue que l’entreprise est au courant des opérations menées par les militaires contre le syndicat et ses responsables, voire impliquée. A cet égard, elle considère que le fait que les adresses et données personnelles de tous les membres du syndicat soient connues des militaires alors que seule la direction de l’entreprise dispose de ces informations prouve qu’il y a connivence entre les deux.
- 1238. L’IWSWU affirme en outre que la direction de l’IWSPC s’ingère dans les affaires internes du syndicat dans le but de l’affaiblir. Selon l’organisation plaignante, la direction a refusé de reconnaître le syndicat et nommé ce qu’elle appelle ses propres responsables syndicaux provisoires. En novembre 2001, lors d’une négociation collective entre la direction de l’entreprise et l’IWSWU, la direction a organisé une réunion de travailleurs au sein de l’entreprise. Pour s’assurer que les travailleurs participeraient à cette réunion, elle a arrêté la production pendant une heure. Son but, à cette réunion, était de destituer les responsables dûment élus du syndicat, dirigé à l’époque par M. Pampoza, et de nommer ses propres responsables syndicaux provisoires. La direction a ensuite reconnu au groupe de personnes ainsi nommées la qualité de représentants syndicaux et signé, en une semaine, une convention collective pour la période allant du 1er juillet 2001 au 30 juin 2004. Le président national de la Fédération des syndicats démocratiques (FDTU), à laquelle le syndicat était alors affilié, a envoyé une lettre à la direction de l’entreprise, indiquant que les responsables provisoires nommés étaient des responsables reconnus par la FDTU. La direction a aussi demandé au ministère du Travail et de l’Emploi de reconnaître la légitimité de la direction syndicale qui avait été nommée.
- 1239. Entre-temps, les responsables syndicaux dûment élus ont continué d’affirmer par divers moyens leur droit à représenter les travailleurs de l’entreprise. Ils ont déposé une plainte auprès du bureau régional du ministère du Travail et de l’Emploi pour contester la destitution et, avec le soutien des travailleurs, mené des actions de protestation au sein de l’entreprise et à proximité du parc industriel de Luisita. Pour mettre un terme aux activités des dirigeants dûment élus de l’IWSWU, la direction de l’entreprise a procédé à des retenues sur les cotisations des membres du syndicat et refusé de verser les salaires des deux responsables syndicaux officiant à temps complet, comme le prévoit la convention collective.
- 1240. En réponse aux dossiers qui lui étaient soumis, le directeur régional du ministère du Travail et de l’Emploi est intervenu en novembre 2001 et, avec l’approbation de la direction, a demandé la tenue d’un référendum pour sortir de ce qu’ils ont appelé une crise de direction syndicale. Pour que l’élection soit valable, il fallait que 50 pour cent des membres du syndicat participent au référendum. Ce chiffre n’a pas été atteint. Le directeur régional a alors assumé le rôle de syndicat intérimaire, agissant comme s’il était le président du syndicat. Toutes les transactions entre la direction et le syndicat, notamment la collecte mensuelle des cotisations syndicales, passaient par lui. Le 20 août 2002, le ministère du Travail et de l’Emploi a organisé une autre élection syndicale. Les responsables syndicaux dûment élus ont participé à cette élection, à l’exception du président du syndicat en raison du recours exercé devant le tribunal. L’élection a dégagé une forte majorité, et le droit des représentants élus à représenter le syndicat a été réaffirmé.
- 1241. En février 2004, quelques mois avant l’expiration de la convention collective, la cour d’appel a rendu une décision sur la plainte déposée par les responsables élus contre la destitution. Selon les termes de cette décision, « … l’élection organisée en août 2002 est annulée et les pétitionnaires sont réintégrés en tant que responsables syndicaux légitimes jusqu’à ce qu’il soit mis légalement un terme à leur mandat».
- 1242. Le 5 mars 2005, l’IWSWU s’est désaffiliée de la FDTU et a demandé à se faire enregistrer en tant qu’organisation syndicale indépendante auprès du ministère du Travail et de l’Emploi. La FDTU a rejeté cette demande de désaffiliation. Son président national a envoyé une lettre à la direction de l’entreprise en insistant pour qu’elle reconnaisse une certaine Victoria Tigco en tant que présidente provisoire de l’IWSWU-FDTU et demandé à l’entreprise de mener avec elle toutes transactions en rapport avec le syndicat, et non plus avec les responsables syndicaux dûment élus dirigés par M. Pampoza, président du syndicat.
- 1243. Tirant parti de la lettre du FDTU sans avoir connaissance de la décision de justice reconnaissant la légitimité du syndicat, la direction a déposé un dossier auprès du bureau régional du ministère du Travail et de l’Emploi, demandant que la question opposant l’IWSWU indépendante et la FDTU soit réglée avant le début de la négociation collective. Le ministère a facilité une réunion de conciliation, et un accord a été trouvé le 30 août 2006 pour engager une négociation collective. Une nouvelle convention collective a été signée le 25 octobre 2006.
- 1244. Alors que le ministère a publié un décret affirmant la légitimité de ses responsables officiant actuellement sous la direction de Dexter Datu, l’IWSWU dit craindre que ne se renouvellent, dans le prolongement des négociations visant à conclure une nouvelle convention collective avec effet au 30 juin 2009, les actes d’intimidation qui accompagnent généralement la négociation collective. Il indique en outre que la direction de l’entreprise a exercé un recours contre la décision du ministère auprès de la cour d’appel.
- 1245. A titre de mesure préventive, le syndicat a écrit en juillet 2008 aux autorités municipales et au conseil municipal de Tarlac en leur demandant de diligenter une enquête sur la persistance des menaces et des actes de harcèlement à l’encontre de responsables et de membres de l’IWSWU et d’intervenir pour mettre fin aux actes d’intimidation. Le syndicat a également demandé l’assistance des autorités municipales pour lui garantir une protection d’urgence contre toute violence physique éventuelle de la part des militaires et de leurs agents. Cependant, les autorités municipales de Tarlac n’ont pas donné suite à cette requête du syndicat, malgré une série de relances.
- 1246. Le 13 août 2008, le syndicat a participé à un dialogue avec la Commission des droits de l’homme (CDH) et officiellement déposé une plainte auprès de celle-ci. Son président s’est engagé à mener une enquête et a promis d’engager le dialogue avec les AFP. Le 26 septembre, les enquêteurs de la CDH se sont rendus sur place; cependant, la plupart des membres du comité exécutif du syndicat n’étaient pas à l’usine, une autre audition étant organisée dans la province voisine de Pampanga. En septembre, le Centre des droits syndicaux et humains (CTUHR) a adressé un appel urgent à la Commission du travail et de l’emploi et à la Commission des droits de l’homme de la Chambre des représentants pour que l’une et l’autre examinent ces affaires. Le 26 septembre, la Commission des droits de l’homme a mené sur place une enquête sur les atteintes aux droits de l’homme dans la région centrale de Luzon. Le syndicat doit encore recevoir des nouvelles de la Commission du travail et de l’emploi. La CTUHR a suivi l’affaire, mais on lui a dit que la Commission du travail et de l’emploi avait des difficultés à se réunir en raison de contraintes budgétaires et n’avait donc pas pu examiner l’affaire.
- 1247. L’IWSWU demande qu’il soit mis fin sans délai aux actes de harcèlement de la part des militaires à l’encontre de ses responsables, ainsi qu’à la campagne de dénigrement contre l’IWSWU et ses dirigeants; que le personnel militaire se retire immédiatement de la Hacienda Luisita; que cesse toute ingérence de l’Etat dans les affaires syndicales; que soit menée une enquête approfondie sur les cas d’ingérence de la part des autorités publiques, en particulier des militaires, dans les relations entre partenaires sociaux. Il somme le gouvernement de prendre des mesures législatives afin de formuler des lois du travail qui soient conformes aux normes internationales du travail et à autoriser (inviter) immédiatement une mission de haut niveau de l’OIT à se rendre aux Philippines pour y examiner les violations des droits du travail, en particulier dans les zones de libre échange.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 1248. Dans sa communication en date du 15 janvier 2010, le gouvernement indique que l’OIT a envoyé une mission de haut niveau aux Philippines du 22 au 29 septembre 2009. A cet égard, il indique avoir défini dans leurs grandes lignes, suite à cette mission, quatre engagements majeurs pour garantir le plein respect des principes de liberté syndicale dans le pays:
- 1. Le gouvernement assurera dans les meilleurs délais l’instruction, l’action pénale et le règlement des affaires en instance concernant le harcèlement et l’assassinat de dirigeants syndicalistes et de militants syndicaux.
- 2. Le gouvernement créera une commission tripartite de haut niveau de suivi des cas et établira le Conseil tripartite national de la paix du travail (NTIPC), sous la présidence du Secrétaire au travail et à l’emploi.
- 3. Le gouvernement œuvrera, en étroite collaboration avec le BIT, ses partenaires sociaux du secteur des travailleurs et du secteur des employeurs, et d’autres parties prenantes, à la mise en place d’un programme de coopération technique visant à sensibiliser toutes les institutions publiques pertinentes, y compris les partenaires sociaux, et à renforcer leurs capacités pour la promotion et la protection des droits du travail.
- 4. Le gouvernement travaille aux projets de réformes législatives visant à renforcer le syndicalisme et à lever les obstacles à l’exercice effectif des droits du travail.
- 1249. Concernant les allégations de militarisation et les interventions présumées de militaires dans ce cas, le gouvernement indique que le bureau régional du ministère du Travail et de l’emploi a soumis un rapport sur son engagement important dans cette région en ce qui concerne l’aide en moyens de subsistance, de la formation des syndicats, ainsi que dans le secteur informel. Ce rapport a réaffirmé que le bureau régional n’avait en aucun cas autorisé des membres de son personnel à s’ingérer dans les activités syndicales ou à participer à des actions visant à stigmatiser l’IWSWU comme bastion communiste ni à s’ingérer dans ses activités syndicales. En fait, ses décisions dans les différents dossiers ont été favorables à l’organisation plaignante.
- 1250. Le gouvernement indique en outre que la mission de haut niveau a proposé un programme combinant des activités de sensibilisation des militaires et de la police aux droits de l’homme, aux droits syndicaux et aux libertés civiles, qui pourrait être administré conjointement avec la Commission des droits de l’homme des Philippines. Il a aussi proposé une mise à jour des Directives relatives à la conduite de la police nationale philippine (PNP), des agents de sécurité privés et du personnel de sécurité des entreprises pendant les grèves, les lock-out et les conflits du travail («les Directives»). Suite aux suggestions de la mission, le gouvernement a tenu, en collaboration avec le BIT, une Conférence tripartite nationale sur les principes de liberté syndicale du 2 au 4 décembre 2009, visant spécifiquement la PNP, les AFP et l’Administration chargée des zones économiques des Philippines (PEZA). Dans leur déclaration commune, les partenaires tripartites, la PNP et les AFP reconnaissent la nécessité de sensibiliser la police et les AFP: en intégrant une composante droits syndicaux dans le module des droits de l’homme destiné aux nouvelles recrues et appelé à une large diffusion; en faisant connaître le mécanisme de discipline administrative de la PNP, qui s’applique en cas de violation des droits syndicaux par son personnel; et en prévoyant une section «droits syndicaux» aux «guichets des droits de l’homme» de la PNP et des AFP. Dans cette déclaration commune sur les zones économiques, les parties sont convenues d’intensifier la tenue de séminaires d’éducation sur les rapports entre travailleurs et employeurs dans les zones économiques afin d’assurer le respect des lois du travail aux Philippines.
- 1251. Le gouvernement indique par ailleurs que les directives sont en cours de révision à l’échelon des instances exécutives et en concertation avec les partenaires tripartites aux niveaux sectoriel, régional et national. Les directives prendront effet en mars 2010 et seront incluses dans le module de formation et de sensibilisation qui doit être élaboré avec l’OIT et sera mis en œuvre d’ici au second semestre 2010.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 1252. Le comité note que le présent cas concerne des allégations de menaces et d’actes de harcèlement de la part de militaires à l’encontre de responsables de l’IWSWU et de leurs familles; des actes d’ingérence des forces armées des Philippines (AFP) dans les affaires syndicales, visant à dissuader les membres du syndicat de participer à la négociation collective; et une campagne de dénigrement contre des membres de l’IWSWU et leurs familles, entraînant des risques pour leur sûreté et leur sécurité.
- 1253. De manière liminaire, le comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes contre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. Un climat de violence, de menaces et d’intimidation de quelque ordre que ce soit à l’encontre des dirigeants syndicaux et de leurs familles ne favorise pas le libre exercice et la pleine jouissance des droits et libertés garantis par les conventions nos 87 et 98, et tous les Etats ont le devoir indéniable de promouvoir et de défendre un climat social où le respect de la loi règne en tant que seul moyen de garantir et de respecter la vie. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 44 et 58.]
- 1254. Le comité prend note avec intérêt du rapport de la mission de haut niveau du BIT effectuée aux Philippines du 22 septembre au 1er octobre 2009. Le comité apprécie la coopération dont les autorités philippines ont fait preuve en permettant à la mission de rencontrer un grand nombre de hauts fonctionnaires et d’officiers de l’armée; des représentants d’organisations d’employeurs et de travailleurs, notamment celles qui sont impliquées dans les cas dont le comité est saisi; des représentants du Congrès, de la Cour suprême, de la cour d’appel, de la Commission des droits de l’homme, de la PEZA et d’organismes chargés de régler les conflits du travail ou de faire respecter la loi (notamment les AFP et la PNP), etc. Le comité note avec intérêt que la mission a rendu visite à l’IWSPC pour rencontrer la direction et l’IWSWU et qu’elle a eu des discussions avec les AFP, les autorités régionales, le ministère du Travail et de l’Emploi et la PEZA à Tarlac.
- 1255. A cet égard, le comité note que la direction de l’entreprise a eu une attitude positive et manifesté la volonté de conclure une convention collective en octobre 2009. D’après les représentants de l’entreprise, la direction trouve plus aisé de dialoguer avec quelques représentants que de négocier avec les travailleurs individuellement et s’est engagée à coopérer avec l’IWSWU au cours du processus de négociation collective à venir. En ce qui concerne les préoccupations de l’IWSWU en matière d’insécurité, les représentants de l’entreprise ont contesté toute participation et assuré que l’entreprise n’avait jamais divulgué aucune information confidentielle concernant les syndicalistes. Ils ont aussi reconnu qu’il y avait eu quelques problèmes liés aux divisions entre les travailleurs, mais que ces problèmes appartenaient au passé et qu’ils étaient survenus, pour la plupart, sous la précédente direction de l’entreprise. Malgré les impasses où se sont trouvées les négociations dans le passé, les parties ont toujours réussi à trouver un terrain d’entente. D’une manière générale, l’entreprise était très ouverte au renforcement des capacités et à la formation.
- 1256. Le comité note avec intérêt que, suite à la mission, une Conférence tripartite nationale sur les principes de liberté syndicale a été organisée aux Philippines en décembre 2009, conjointement par le gouvernement et le BIT. Cette activité portait spécifiquement sur les AFP, la PNP et la PEZA. Le comité se félicite de la déclaration commune des participants, qui reconnaît la nécessité de sensibiliser le personnel de la PNP et des AFP à la question des droits de l’homme, des libertés civiles et des droits syndicaux, et définit à grands traits les moyens requis à cette fin. A cet égard, le comité note avec un intérêt particulier l’information fournie par le gouvernement selon laquelle les Directives relatives à la conduite de la police nationale philippine, des agents de sécurité privés et du personnel de sécurité des entreprises pendant les grèves, les lock-out et les conflits du travail sont en cours de révision à l’échelon des instances exécutives et en concertation avec les partenaires tripartites aux niveaux sectoriel, régional et national. Selon le gouvernement, ces directives, qui entreront en vigueur en mars, seront incorporées dans le module de formation et de sensibilisation qui doit être élaboré avec l’OIT et sera mis en œuvre d’ici au second semestre 2010.
- 1257. Le comité accueille avec satisfaction l’information fournie par le gouvernement concernant quatre mesures concrètes qu’il entend mettre en œuvre pour garantir le plein respect des principes de liberté syndicale. A cet égard, il attend de la part du gouvernement qu’il diligente une enquête indépendante sur tous les cas allégués d’ingérence dans les affaires syndicales, ainsi que sur les menaces et les actes de harcèlement de la part des autorités publiques et de militaires à l’encontre de syndicalistes, garantisse des réparations intégrales et appropriées, et lui demande en particulier de veiller à ce que les membres de l’IWSWU ne fassent plus l’objet d’actes de harcèlement au motif de leur appartenance syndicale. Il attend en outre de la part du gouvernement qu’il prenne des mesures propres à empêcher à l’avenir toute menace et tout acte de harcèlement à l’encontre de syndicalistes et de leurs familles, ainsi que toute ingérence dans les affaires syndicales par les autorités publiques et par le personnel des AFP et de la PNP.
- 1258. Le comité rappelle à cet égard que le respect des principes de liberté syndicale suppose que les autorités publiques et les employeurs fassent preuve d’une grande retenue en ce qui concerne toute intervention dans les affaires internes des syndicats. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 859.] En ce qui concerne l’allégation spécifique selon laquelle le ministère du Travail et de l’Emploi a organisé l’élection syndicale et y a participé, le comité rappelle que la présence d’autorités gouvernementales lors d’élections syndicales risque de porter atteinte à la liberté syndicale et, en particulier, d’être incompatible avec le principe selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d’élire leurs représentants en toute liberté, et les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 438.]
- 1259. Relevant dans le rapport de mission que les représentants des forces armées que la mission a rencontrés ont confirmé avoir tenu des réunions communautaires où les militaires entreprennent d’initier les travailleurs à l’exercice de leurs droits syndicaux, ainsi que l’a déclaré l’organisation plaignante, le comité encourage le gouvernement à tenir, en collaboration avec les partenaires sociaux et l’OIT, de nouvelles séances de formation sur les droits de l’homme, les libertés civiles et les droits syndicaux pour aider le personnel des AFP et de la PNP à mieux cerner les limites de leur rôle en ce qui concerne les droits à la liberté syndicale, et l’exhorte à garantir aux travailleurs le plein et légitime exercice de ces droits et libertés dans un climat exempt de crainte.
- 1260. Le comité encourage en outre le gouvernement à poursuivre ses efforts visant à renforcer les institutions publiques chargées de combattre l’impunité et, notamment, à créer un comité tripartite de haut niveau de suivi des cas dans le cadre du NTIPC.
- 1261. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation en ce qui concerne les mesures qu’il s’est engagé à prendre pour garantir le plein respect des conventions nos 87 et 98, ratifiées par les Philippines. Le comité demande au Bureau de continuer à fournir son assistance technique au gouvernement des Philippines à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1262. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité attend du gouvernement qu’il diligente une enquête indépendante sur les cas allégués d’ingérence dans les affaires syndicales ainsi que sur les menaces et les actes de harcèlement à l’encontre de syndicalistes de la part des autorités publiques et de militaires, garantisse des réparations intégrales et appropriées, et lui demande en particulier de veiller à ce que les membres de l’IWSWU ne fassent plus l’objet d’actes de harcèlement au motif de leur appartenance syndicale. Il attend également de la part du gouvernement qu’il prenne des mesures propres à empêcher à l’avenir toute menace et tout acte de harcèlement à l’encontre de syndicalistes et de leurs familles, ainsi que toute ingérence dans les affaires syndicales par des fonctionnaires de l’Etat et par le personnel des AFP et de la PNP.
- b) Le comité encourage le gouvernement à tenir, en collaboration avec les partenaires sociaux et l’OIT, de nouvelles séances de formation sur les droits de l’homme, les libertés civiles et les droits syndicaux pour aider les autorités publiques et le personnel des AFP et de la PNP à mieux cerner les limites de leur rôle en ce qui concerne les droits à la liberté syndicale, et l’exhorte à garantir aux travailleurs le plein et légitime exercice de ces droits et de ces libertés dans un climat exempt de crainte.
- c) Le comité encourage également le gouvernement à poursuivre ses efforts tendant à renforcer les institutions publiques chargées de combattre l’impunité et, notamment, à créer un comité tripartite de haut niveau de suivi des cas dans le cadre du NTIPC.
- d) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de toutes mesures prises aux fins des recommandations susvisées.
Mission de haut niveau de l'OIT aux Philippines sur la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Mission de haut niveau de l'OIT aux Philippines sur la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948- (22 septembre - 1er octobre 2009)
- I. Informations générales et mandat
- Les Philippines ont ratifié la convention no 87 le 29 décembre 1953.
- L'application par les Philippines de la convention no 87 a fait l'objet d'une discussion au sein de la Commission de l'application des normes à la 96e session de la Conférence internationale du Travail (juin 2007), suite à la présentation de plusieurs plaintes par des syndicats et compte tenu des questions de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (CEACR), restées en suspens depuis de nombreuses années, au sujet de l'application de la convention no 87 de l'OIT. Sur cette base, la Commission de l'application des normes de la Conférence de 2007 a demandé au gouvernement des Philippines d'accepter l'envoi d'une mission de haut niveau du BIT. Le gouvernement des Philippines a accepté cette mission lors de la 98e session de la CIT en juin 2009 dans le cadre de la Commission de l'application des normes.
- En outre, huit cas étaient en instance devant le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT, à savoir des cas actifs impliquant
- - la Société des automobiles Toyota (Philippines) (cas nos 2252 et 2652);
- - le syndicat Kilusang Mayo Uno (KMU) (cas no 2528);
- - l'hôtel Dusit et l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation, de l'agriculture, de l'hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) (cas no 2716);
- - International Wiring Systems (cas no 2669);
- et des cas en suivi impliquant:
- - le syndicat des employés de Telefunken travaillant dans le secteur des semi-conducteurs (cas no 1914);
- - l'Université de San Agustin et la Fédération des travailleurs libres - Conseil des Visayas (cas no 2488);
- - l'Office de l'enseignement technique et de la formation professionnelle (TESDA) et la Confédération indépendante des travailleurs de la fonction publique (PSLINK) appuyée par l'Internationale des services publics (ISP) (cas no 2546).
- La mission de haut niveau s'est fixé les objectifs suivants:
- - obtenir une meilleure compréhension de l'application par les Philippines de la convention no 87 dans la théorie et dans la pratique, et fournir aux organes de contrôle de l'OIT des informations détaillées sur la situation des syndicats sur le terrain;
- - clarifier les problèmes et carences en matière d'application de la convention no 87 et identifier les domaines dans lesquels le Bureau pourrait apporter un soutien et une aide technique, afin de proposer des solutions en phase avec les commentaires des organes de contrôle de l'OIT;
- - identifier d'autres domaines de formation et de développement des capacités afin d'améliorer l'application de la convention no 87 et des principes de la liberté syndicale.
- La mission de haut niveau se composait de Mme Cleopatra Doumbia-Henry, directrice, Département des normes internationales du travail, BIT, Genève; Mme Karen Curtis, directrice adjointe, Département des normes internationales du travail, BIT, Genève; et M. Tim De Meyer, spécialiste principal des normes internationales du travail et de la législation du travail, Bureau sous-régional de l'OIT pour l'Asie de l'Est (Bangkok).
- II. Responsables et autres personnes rencontrées par la mission
- La mission a rencontré d'abord un large éventail de hauts fonctionnaires et officiers de l'armée pour expliquer son mandat, les principes et les normes sur la liberté syndicale et le fonctionnement du système de contrôle de l'OIT. Par la suite, la mission s'est entretenue avec des représentants des organisations d'employeurs et de travailleurs d'abord collectivement, puis lors de séances individuelles au cours desquelles les travailleurs et les employeurs directement impliqués dans les cas du CLS en instance ont été entendus et, dans certains cas, des allégations supplémentaires ont été présentées à la mission.
- La mission a également rencontré séparément des représentants:
- - du Congrès;
- - de la Cour suprême, ainsi que le président de la Cour d'appel;
- - de la Commission philippine des droits de l'homme;
- - de l'Autorité de la zone économique des Philippines (PEZA);
- - de l'Office de l'enseignement technique et de la formation professionnelle (TESDA);
- - des agences chargées du règlement des litiges professionnels, à savoir le Bureau des relations professionnelles (BLR), le Conseil national des relations professionnelles (NLRC) et le Comité national de conciliation et de médiation (NCMB);
- - des entités chargées de l'application de la loi et de la sécurité, notamment le ministère de la Justice (DOJ), le ministère de la Défense nationale (DND), les Forces armées des Philippines (AFP) et la Police nationale philippine (PNP);
- - de la Commission de la fonction publique et du Conseil de gestion du travail dans le secteur public.
- Les rencontres prévues avec la commission Melo et avec un représentant de l'employeur dans les cas concernant l'hôtel Dusit et la société Telefunken ne se sont pas matérialisées.
- La mission a effectué deux visites sur site, à savoir chez la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMCP), à Santa Rosa, Laguna, et chez la société International Wiring Systems Corp., à San Miguel, Tarlac City.
- Le programme complet est joint en annexe 1.
- III. Informations obtenues
- Briefing avec les fonctionnaires du gouvernement
- (22 septembre)
- Ce briefing a réuni un large éventail de hauts fonctionnaires des ministères du Travail et de l'Emploi (DOLE), de l'Intérieur et de l'Administration locale (DILG), des Affaires étrangères, du Commerce et de l'Industrie, et de la Défense nationale; le Comité présidentiel des droits de l'homme (présidé par le Secrétaire exécutif Eduardo Ermita); des commandants régionaux des AFP; et la PNP.
- Dans son allocution d'ouverture, M. Romeo C. Lagman (sous-secrétaire, DOLE) a insisté sur le caractère démocratique des Philippines, se référant au respect de l'Etat de droit, à la séparation des pouvoirs et à la protection des droits de l'homme. Il a rappelé que les Philippines ont été le premier Etat membre de l'ANASE à mettre en place un organe constitutionnel pour la promotion et la protection des droits de l'homme. Il a nié toute volonté de supprimer la liberté syndicale. Le Kilusang Mayo Uno (KMU) existe depuis 1980. S'il n'est pas encore enregistré, il n'en représente pas moins une base autoproclamée de quelque 300 000 travailleurs depuis vingt-neuf ans, et ce sans aucune ingérence. Les 66 assassinats faisant l'objet de la plainte ne sont pas liés à l'activité syndicale des victimes mais constituent des crimes de droit commun, un litige professionnel n'ayant effectivement fourni la toile de fond que dans 13 cas. M. Lagman a souligné que la plupart des meurtres n'entrent par conséquent pas dans le champ de la convention no 87. Il a réfuté les allégations de climat d'impunité, estimant que les regrettables massacres tels que celui de l'Hacienda Luisita sont l'exception plutôt que la norme. La police militaire n'a pas été envoyée dans les zones où la présence des syndicats est forte. Il a souligné que les Philippines connaissent une paix sociale relative et que les grèves font partie du passé. Seuls quelques arrêts de travail ont été enregistrés depuis le début de l'année. Les grands syndicats n'ont aucune plainte sérieuse à formuler, et les petits groupes militants peuvent exercer leur droit d'exprimer leurs doléances sans crainte.
- Dans sa présentation, la sous-secrétaire Rosalinda D. Baldoz (DOLE) a résumé les réformes de la législation du travail déjà entreprises dans le but de donner effet à la convention no 87 et, en particulier, a mentionné l'adoption de la loi no 9481, dont les organes de contrôle ont pris note.
- En ce qui concerne les domaines où la réforme de la législation du travail pourrait se poursuivre, le DOLE a avancé les propositions suivantes:
- - modifier l'article 234(c) afin d'aligner l'obligation d'affiliation de 20 pour cent du personnel pour les syndicats indépendants sur celle relative à l'octroi des privilèges syndicaux aux sections locales des fédérations nationales;
- - modifier l'article 237(a) pour réduire le nombre de sections locales affiliées à des fins d'enregistrement des fédérations et syndicats nationaux de dix à cinq pour autant qu'un nombre minimum de 1 000 membres soit atteint;
- - abroger l'exigence d'une autorisation préalable du Secrétaire du travail pour que les syndicats enregistrés puissent recevoir une aide étrangère (article 270);
- - modifier l'article 264(a) (actes prohibés) et l'article 272 afin de supprimer la peine d'emprisonnement pour participation à des grèves illégales en raison de l'inobservation des exigences procédurales;
- - maintenir le pouvoir du Secrétaire chargé du travail d'exercer sa compétence sur les litiges professionnels affectant les intérêts nationaux au titre de l'article 263(g), mais modifier les règles d'application sur les grèves et les piquets de grève en vertu de l'arrêté ministériel no 40/2003, de manière à fournir des lignes directrices pour l'exercice de ce pouvoir. La procédure amendée prévoirait le dépôt d'une demande de saisine par une des parties au différend et l'organisation d'une rencontre entre les parties avant toute prise de compétence.
- En ce qui concerne le cas KMU du CLS (no 2528), la sous-secrétaire Baldoz a donné des détails tirés des rapports de la PNP.
- L'affaire porte sur les meurtres présumés de 39 syndicalistes, 16 cas de harcèlement et 11 enlèvements ou disparitions forcées, pour un total de 66 cas entre 2001 et 2009.
- Des difficultés ont été rencontrées pour identifier les victimes des meurtres en tant que syndicalistes ou défenseurs des droits syndicaux en raison de l'absence de documents officiels attestant de leur affiliation à un syndicat. Par conséquent, seuls 13 cas impliquant 18 victimes ont été considérés par le gouvernement comme étant éventuellement liés au travail, c'est-à-dire que la victime était soit dirigeant, soit membre d'un syndicat, indépendamment de l'existence d'une grève ou d'un litige professionnel au moment de son décès, ou d'indices laissant supposer une possible relation avec des problèmes sociaux.
- Plus graves sont les difficultés rencontrées lors de l'enquête et des poursuites en raison d'un certain nombre de facteurs, entre autres l'absence de témoins ou le refus de coopérer de la part des membres de la famille immédiate; l'absence de plainte ou de rapport déposé devant les autorités compétentes; la distinction entre les activités menées dans l'exercice des droits syndicaux légitimes et les activités découlant d'opérations insurrectionnelles.
- Le rapport de la PNP montre que, dans les 39 cas d'accusation de meurtres de syndicalistes, 16 plaintes ont été déposées, dont une impliquant une arrestation légale et non un meurtre; un cas relève d'une opération de police légitime; un cas est considéré comme clos; un cas concerne un enlèvement présumé; et 19 cas font l'objet d'enquêtes en cours. Le rapport établi par la PNP dans les 16 dossiers enregistrés montre également que trois cas impliquaient le Parti communiste des Philippines - Nouvelle armée populaire (CPP/NPA); un cas portait sur la PNP elle-même; huit cas touchaient des suspects civils; trois cas concernaient des gardes de sécurité; et un cas concernait l'armée. En ce qui concerne la situation des dossiers, le rapport de la PNP indique que neuf dossiers sont traités au niveau des tribunaux et les sept autres sont entre les mains du procureur. Pour ce qui est des 24 suspects identifiés dans les 16 dossiers enregistrés, dix ont été arrêtés, quatre sont morts, trois se sont constitués prisonniers et sept sont en cavale. Le rapport de la PNP sur 19 cas faisant encore l'objet d'une enquête montre que, dans deux cas, le plaignant a déménagé sans donner d'adresse; dans six cas, le plaignant a renoncé aux poursuites; et 11 cas restent ouverts.
- Le rapport établi par la PNP sur les 11 cas d'enlèvement présumé montre que, dans deux cas, les victimes ont été transférées dans des lieux inconnus; dans un cas, aucune plainte n'a été déposée; dans un cas, aucun rapport d'incident n'a été rédigé; six cas font encore l'objet d'une enquête; et, dans un cas, l'organisation de la victime présumée n'existe pas. Sur les 11 cas, sept se sont produits en 2006, trois en 2007 et seulement un en 2008. Quatre cas ont été classés, huit cas ont été rejetés, quatre cas étaient en cours de procès, 20 cas étaient encore à l'enquête, un cas n'a pas été enregistré, un cas a été abandonné ou clos, et un cas a été rejeté.
- Le rapport établi par la PNP sur les 16 cas de harcèlement présumé montre que, dans trois cas, un mandat d'arrêt a été délivré; dans trois cas, aucun acte de harcèlement n'avait eu lieu; six cas sont en cours d'enquête; dans trois cas, le plaignant a déménagé à l'étranger ou à une adresse inconnue; et, dans un cas, l'organisation de la victime présumée n'existe pas.
- Le rapport établi par la PNP sur les 66 cas peut donc se résumer comme suit: dans six cas, la victime présumée a déménagé à l'étranger ou à une adresse inconnue; un cas d'enlèvement présumé; un cas clos; quatre opérations policières légitimes; 16 dossiers enregistrés; 20 cas feront l'objet d'enquête; huit plaignants renonçant aux poursuites; quatre cas sans plainte; aucun incident signalé dans deux cas; organisation de la victime inexistante dans un cas; et aucun acte de harcèlement dans trois cas.
- Enfin, la sous-secrétaire Baldoz a formulé des propositions pour combler les lacunes dans l'application de la loi grâce au renforcement des liens institutionnels entre le DOLE et les autres autorités compétentes:
- - avec la PNP, qui dépend du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales (DILG), avec l'Autorité de la zone des Philippines (PEZA) qui dépend du ministère du Commerce et de l'Industrie (DTI), et avec leurs bureaux régionaux à travers les directives communes existantes sur la conduite du personnel de la PNP, des gardes de sécurité privés et des gardes d'entreprises lors des grèves, lock-out et conflits professionnels en général;
- - avec la PNP-DILG, avec la PEZA-DTI, et avec leurs bureaux régionaux, ainsi qu'avec la Commission de la fonction publique et le Conseil de gestion du travail dans le secteur public (CSC-PSLMC) à travers la formation des travailleurs sur les normes internationales du travail et en particulier la convention no 87;
- - avec la PNP, le ministère de la Justice (DOJ) et le Comité présidentiel des droits de l'homme (PHRC), à travers le suivi des affaires concernant des syndicalistes. La proposition d'inclure les organisations syndicales dans le suivi des cas est accueillie avec satisfaction;
- - avec le Bureau présidentiel de liaison en matière législative (PLLO) et les commissions du Congrès sur le travail, à travers la participation active aux audiences publiques;
- - avec le DTI et la PEZA, à travers le suivi de l'application du Protocole d'accord social sur le travail et les questions sociales découlant des activités des multinationales;
- - avec la PNP-DILG, le DOJ et les groupes de travail du Comité présidentiel des droits de l'homme (PHRC), afin de collaborer étroitement à la mise en œuvre durable des initiatives des divers organismes gouvernementaux impliqués dans l'administration du système de justice pénale en ce qui concerne les cas présumés de meurtre, de harcèlement et d'enlèvement de syndicalistes.
- Une autre réponse est le renforcement des capacités au sein de l'administration du travail par la formation des hauts fonctionnaires, des directeurs du Bureau et des directeurs régionaux, de médiateurs-arbitres, de conciliateurs-médiateurs, d'arbitres du travail, de juristes, d'inspecteurs du travail, des shérifs et du personnel de soutien technique, du secrétariat du Conseil tripartite pour la paix industrielle aux niveaux national, régional, provincial et municipal, et des conseils industriels tripartites eux-mêmes.
- Le Programme commun 2008-2010 pour le travail décent, qui a pour thème "Réduire les déficits de travail décent", constitue un cadre utile pour un programme de coopération technique et d'aide. Certaines de ces réponses et initiatives sont déjà incluses - notamment sur l'objectif stratégique no 1 (droits fondamentaux au travail) et l'objectif stratégique no 4 (tripartisme et dialogue social) -, tandis que d'autres actions prioritaires adoptées de commun accord peuvent être intégrées sur la base du rapport final de la mission sur les résultats.
- M. Ricardo R. Blancaflor, sous-secrétaire du ministère de la Justice, a donné un aperçu du système de justice pénale aux Philippines, en particulier pour ce qui a trait aux allégations d'exécutions extrajudiciaires, d'enlèvements et d'actes de harcèlement. Il a expliqué que le système de justice pénale repose sur cinq piliers: communauté, enquête, poursuite, justice et correction. De nombreux cas ont été rejetés par les autorités de poursuites parce que l'enquête n'avait pas été menée de manière adéquate. Ce sont la PNP et le Bureau national des enquêtes (NBI) qui ont diligenté les enquêtes, et non les autorités responsables pour les poursuites. Seul le NBI est autorisé à délivrer des mandats d'arrêt, et non l'AFP. La tâche de l'accusation est d'évaluer les conclusions ou les plaintes et de consigner les informations correspondantes.
- Les retards dans les poursuites dans les cas liés à la convention no 87 étaient dus à plusieurs facteurs. Premièrement, le nombre trop important d'affaires: chaque procureur traite en moyenne 650 cas; entre 30 et 40 affaires pénales sont inscrites au rôle chaque jour, et 3-4 sont envoyées pour jugement le même jour. Par conséquent, c'est une chance si une affaire pénale passe en séance trois fois par an. Certains tribunaux n'ont pas de procureur attitré. Deuxièmement, la procédure repose en grande partie sur les témoignages plutôt que sur les preuves médico-légales. Troisièmement, la plupart du temps, les témoins reviennent sur leurs déclarations après avoir conclu un accord avec les délinquants, et certains sont même menacés.
- Sur les 12 cas considérés comme liés au travail, trois ont fait l'objet d'une enquête; deux ont été rejetés après examen préliminaire; trois ont été rejetés par le tribunal; et quatre sont en instance auprès du tribunal. L'impression d'une culture de l'impunité et de manque de sollicitude pour les témoins est due à des propos inexacts et incomplets. Les médias ont à peine couvert les cas où des militaires ont effectivement été arrêtés, et ont par contre préféré cibler les cas où aucun progrès n'a été accompli dans l'identification et l'arrestation des suspects. En outre, le Programme de protection des témoins (WPP) couvre actuellement toutes les personnes impliquées dans la poursuite de 14 cas exceptionnels, 16 meurtres de travailleurs des médias, 26 assassinats politiques et quatre cas de rébellion et de coup d'Etat. Le sous-secrétaire a souligné que le WPP n'avait jamais perdu de témoin, sauf un récemment qui avait renoncé à sa protection. Il a rappelé que le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires avait constaté des progrès au niveau de l'enquête et de l'accusation dans au moins quatre affaires récentes concernant des meurtres de travailleurs des médias. En réponse aux questions sur la loi sur la sécurité des personnes, il a déclaré que cette loi n'est pas encore entrée en vigueur en raison d'un recours en inconstitutionnalité, dont le jugement n'a pas encore été rendu.
- Rencontre générale avec les employeurs sur le mandat
- La mission a rencontré les représentants des employeurs suivants:
- - M. Ancheta Tan, Président émérite, Confédération des employeurs des Philippines (ECOP);
- - M. Rene Soriano, Président honoraire, ECOP;
- - M. Mario O. Mamon, ECOP;
- - M. Miguel Varela, ECOP;
- - M. Sabino Padilla, cabinet d'avocats Padilla (avocat dans le cas concernant l'Université de San Agustin);
- - M. David T. Go, Société des automobiles Toyota (Philippines);
- - M. Joseph Matthew Sobrevega, Société des automobiles Toyota (Philippines);
- - M. Jose Maria A. Aligada, Société des automobiles Toyota (Philippines);
- - M. Eric Mercado, International Wiring Systems;
- - Mme Stella Ninfa B. Mendoza, International Wiring Systems;
- - Mme Digna Remolana, International Wiring Systems;
- - M. Nestor Cusi, International Wiring Systems.
- M. Ancheta K. Tan (ECOP) a déclaré que l'ECOP se réjouissait de la fermeture de certains cas qui avaient fait l'aller-retour entre la commission d'experts et la Commission de la Conférence, alors que les Philippines sont un des pays les plus libres au monde et le dernier susceptible de faire l'objet d'une enquête. Il a estimé qu'il n'était pas nécessaire d'étudier les cas dans lesquels où la plus haute autorité du pays avait rendu une décision finale. Les questions liées au travail doivent être séparées des affaires déjà traitées par M. Philip Alston, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.
- Les employeurs présents ont également exprimé leur inquiétude quant à leur manque d'implication dans les cas soumis au Comité de la liberté syndicale (CLS). Dans certains cas, l'employeur n'était même pas au courant qu'une plainte avait été présentée au BIT ou ne savait pas ce qui faisait l'objet de la plainte. Ils ont demandé instamment au BIT d'intervenir auprès du gouvernement afin de s'assurer que les employeurs ont été dûment informés pour qu'ils puissent se défendre face aux accusations.
- Les employeurs considéraient d'ailleurs certains cas comme "fictifs", vu que la Cour suprême avait déjà rendu un jugement définitif et que beaucoup de travailleurs avaient accepté une indemnité de licenciement. Un des cas concernait également en outre une société qui, apparemment, n'existait plus et avait été scindée en trois sociétés distinctes. Dans ce cas, la question de la réintégration n'était plus d'actualité et seule la question des droits à la pension pourrait éventuellement être envisagée.
- Les employeurs présents se sont engagés à coopérer et à fournir toutes les informations qui permettraient de clore les cas actifs. M. Padilla a recommandé qu'un protocole soit mis en place afin que les employeurs soient systématiquement informés et puissent coordonner étroitement avec le gouvernement la réponse aux plaintes qui les concernent.
- Rencontre générale avec les travailleurs sur le mandat
- La réunion, à laquelle de nombreuses personnes ont participé, a essentiellement consisté à répondre aux questions relatives à la nature de la mission. Un certain nombre de syndicats ont exprimé leurs préoccupations quant à la corruption en général et sur la position constante du gouvernement, qui répète que l'OIT n'émet que des recommandations ou que les problèmes sont déjà résolus à la suite d'une décision de la Cour suprême. Le KMU a souligné que, depuis la visite du Rapporteur spécial, les assassinats extrajudiciaires avaient encore augmenté, passant du nombre déjà élevé de 64 à 92. Le rapport Alston, qui a été évoqué par les organes de contrôle, devrait être une base plus active pour l'examen du gouvernement.
- Tous les syndicats ont exprimé le ferme espoir que la mission déboucherait sur plus qu'un simple exercice sur papier. Le combat des travailleurs philippins est extrêmement difficile, et les attentes élevées quant à l'obtention de résultats tangibles par la mission.
- Rencontres avec les travailleurs
- L'Alliance progressiste du travail (APL) a présenté une "position commune" au nom de 19 organisations syndicales, citant 50 cas de violation de la convention no 87 (dont acte). En particulier, elle s'est référée à des passages du Code du travail limitant la liberté syndicale, à des violences à l'encontre de syndicalistes et à la protection inefficace par le système juridique, aux obstacles dans le système de justice du travail, à la négociation et aux actions pacifiques concertées, à la répression du syndicalisme dans le secteur public et aux faiblesses des mécanismes d'élaboration et d'application des politiques pour ce secteur.
- Le Congrès syndical des Philippines (TUCP), qui rassemble 24 fédérations, a également lu une déclaration.
- Le KMU a prononcé une déclaration sur les infractions présumées de la convention no 87 suivantes:
- - le seuil d'affiliation de 20 pour cent prévu à l'article 234(d) du Code du travail;
- - l'arrêté départemental (DO) no 18-02 de 2002 qui favorise le travail sous-traité;
- - le recours accru aux travailleurs intérimaires ou à durée déterminée;
- - le droit des employeurs à demander la conciliation dans les litiges sur l'enregistrement;
- - les exécutions extrajudiciaires, de loin la pire violation, qui affaiblissent les syndicats en les privant de leurs membres et dirigeants;
- - le dépôt de dossiers montés de toutes pièces, la formulation de fausses accusations criminelles et l'ignorance d'une procédure régulière (par exemple à l'Hacienda Luisita);
- - la présence de forces armées sur les lieux de travail, de sorte que même les négociations bipartites fructueuses sont impossibles;
- - les agressions physiques durant les grèves, qui empêchent les travailleurs de s'organiser et de négocier collectivement;
- - l'article 263(g) du Code du travail, qui autorise la prise de compétence sur les litiges et permet aux employeurs de faire appel à l'armée quand des travailleurs ne tiennent pas compte des injonctions de retour au travail;
- - l'article 263, qui impose un vote à la majorité et une interdiction de grève de sept jours, ce qui rend plus facile d'interdire les syndicats ou de réduire l'efficacité d'une grève;
- - les frais d'inscription au rôle sont souvent trop élevés pour les syndicats ordinaires;
- - les ingérences dans les élections syndicales, et les menaces de poursuites pénales;
- - la criminalisation des conflits professionnels et l'emprisonnement parfois prolongé de travailleurs.
- La Fédération des travailleurs libres (FFW) a souligné la violation des libertés civiles et l'utilisation de l'emploi non régulier comme tactique antisyndicale. La priorité ne devrait pas être donnée seulement à la modification de la législation, parce que le gouvernement répondrait toujours qu'il y a une loi en gestation mais que la question ne peut être évoquée, sauf si le Président l'autorise. Le BIT devrait fournir une plus grande assistance technique, notamment aux tribunaux du travail. Les obstacles juridiques doivent être levés afin que les procédures soient raccourcies au maximum; actuellement, des affaires peuvent traîner dans les tribunaux pendant dix ans ou plus. Enfin, si les organes tripartites ne manquent pas aux Philippines, il semble toutefois y avoir un manque de dialogue social dans de nombreux aspects, de sorte que les problèmes ne font pas l'objet d'une discussion et restent irrésolus.
- D'autres représentants syndicaux ont repris de nombreux points soulevés par les centrales nationales, en ajoutant quelques faits nouveaux et formulant des recommandations:
- - Très peu de syndicats sont déjà reconnus par les employeurs comme des partenaires de négociation, ce qui suggère un mauvais climat de dialogue social.
- - La mission devrait se référer à la visite de M. Alston en 2007 et à son rapport de 2008, qui va très loin dans la reconnaissance d'attaques systématiques contre les syndicalistes progressistes militants dans le cadre de la lutte contre l'insurrection.
- - Les organisations représentant les travailleurs contractuels aux fins de la négociation collective ne parviennent pas à être reconnues comme des syndicats.
- - Une formation approfondie est nécessaire, également pour les juges.
- - (Secteur public) Le président régional de plus haut rang de la Confédération des employés du secteur public de Leyte, le professeur Aqui, a été tué devant ses élèves par les militaires. Les fonctionnaires sont privés du droit de grève depuis 1987. En attendant, les politiques de privatisation ont entraîné des pertes d'emploi de 40 à 60 pour cent dans les organismes contrôlés par le gouvernement. En vertu du décret no 180, il n'y a pas de représentation générale des travailleurs au Conseil de gestion du travail dans le secteur public parce que tous les membres votants proviennent de la direction, tandis que les cinq membres non votants représentent la confédération.
- - Le DOLE envisage toujours le secteur bancaire comme un secteur d'intérêt national pour ce qui est du droit de grève.
- - (PSLINK) Le chapitre 12 de l'arrêté d'application amendé du décret no 180 devrait être modifié.
- - Philippine Airlines (PAL) envisage de sous-traiter la restauration, la manutention du fret, la réservation, les services médicaux et toute une gamme d'autres services qui emploient 4 000 personnes au sol. L'adjudicataire sera Macro Asia, une société appartenant au même propriétaire que PAL. Depuis le syndicat a été accrédité en 2002, aucune convention collective n'a été conclue, en raison d'un moratoire sur la négociation collective.
- - La mission devrait se pencher sur le rôle du DOLE et de l'armée à Mindanao, où les témoins des incidents sont régulièrement obligés de se cacher dans les montagnes et où les menaces se poursuivent.
- - (Secteur public - ISP) Le seuil de 30 pour cent d'affiliés pour l'enregistrement des syndicats devrait être abaissé à 10 pour cent car il n'existe aucune protection sans enregistrement. Un seul syndicat devrait représenter tous les enseignants. Les primes annulées par la Cour des comptes devraient être rétablies et confirmées par la Cour suprême.
- - Le secteur de l'électricité a été privatisé et NAPOCOR a été divisée en entreprises de plus petite taille. Environ 8 850 travailleurs licenciés ont été réembauchés par les différentes composantes (division, production, distribution, gestion des actifs et passifs), mais ont dû accepter des réductions de salaire allant jusqu'à 30 pour cent. La marge de manœuvre des syndicats est réduite depuis 2005 et la suppression des mécanismes de précompte. La BAD a reconnu dans son accord de prêt que l'indemnité de départ des travailleurs licenciés est un coût légitime de la restructuration, mais rien ne s'est passé.
- - Un protocole d'accord de la Commission de la fonction publique considère l'absence simultanée de cinq personnes comme une action concertée.
- Rencontres avec les organisations plaignantes
- La mission a rencontré les organisations plaignantes et les employeurs impliqués dans les cas en instance du CLS. Ce qui suit est un résumé des informations pertinentes recueillies.
- Syndicat national des travailleurs de l'hôtellerie, de la restauration et des branches connexes - Hôtel Dusit Nikko
- (cas no 2716 du CLS)
- Les représentants syndicaux soupçonnent que des fonds réservés aux frais de service pour la réintégration des travailleurs licenciés aient servi à payer des pots-de-vin. En tout cas, des millions de pesos ont déjà été dépensés en pots-de-vin, et le syndicat a donc demandé un audit. Le directeur de l'époque de l'hôtel Dusit Nikko a entre-temps été transféré à l'hôtel Dusit Dubai. Une autre requête pendante devant la Cour suprême contestait le fait qu'un juge parti à la retraite en 2004 ait participé à la résolution de février 2009. Cette résolution a précipitamment refusé le réexamen de l'affaire, décidant de ne pas élever la délibération au banc, et ce bien qu'une résolution en banc constitue la règle normale pour une annulation. Un clerc d'avocat qui avait reconnu avoir commis une "erreur humaine" a pris sa retraite anticipée en juin 2009. Le syndicat a fait valoir qu'il a suivi la règle de droit, mais qu'à son avis aucune des décisions prises dans cette affaire n'était conforme à cette règle. Le syndicat a indiqué que pas moins de trois affaires étaient en cours devant le barreau des Philippines, demandant la radiation d'avocats pour falsification de documents ou production de documents contraires à l'éthique. Dans le cas d'espèce, la cour n'a pas répondu à la question de savoir pourquoi des travailleuses ont été licenciées alors qu'elles ne s'étaient pas fait couper les cheveux courts. Le syndicat soupçonne la Cour suprême d'avoir tenté d'éluder ses arguments. Par exemple, elle a estimé que le syndicat s'était rendu coupable d'obstruction des entrées et des sorties, alors que le Secrétaire du travail avait témoigné du contraire et que le Centre Ayala - où l'hôtel est situé - avait été bouclé à l'époque par des gardes de sécurité et des policiers en tenue de combat, ce qui rendait cette obstruction impossible.
- Association des travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCWA) (cas du CLS nos 2252 et 2652)
- L'affaire concerne le refus persistant de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPC) de reconnaître et de négocier avec l'organisation plaignante, l'Association des travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCWA), malgré l'accréditation du syndicat par le ministère du Travail (DOLE) en tant qu'agent de négociation exclusif; TMPC a en outre licencié 227 travailleurs et déposé une plainte au pénal contre les autres dirigeants et membres pour organisation de grèves de protestation contre ce refus. La Commission nationale des relations du travail (NLRC) a jugé par la suite ces licenciements valables, mais a toutefois demandé à TMPC de verser une indemnité de licenciement équivalant à un mois de salaire par année de service. Quelque 122 travailleurs n'ont pas accepté le programme d'indemnisation. En février 2006, le DOLE a autorisé un nouveau processus d'élection en vue d'accréditation en tant qu'agent de négociation; le scrutin correspondant a eu lieu le 16 février 2006 et a conduit à l'accréditation de l'Organisation des travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCLO) - qui aurait été établi sous la domination de l'employeur - en tant qu'agent de négociation unique et exclusif pour tous les employés.
- Lors de la réunion, le syndicat a présenté un mémorandum écrit (dont acte). En avril 2008, la Cour suprême a confirmé le licenciement des membres du syndicat. Une centaine de membres du syndicat continuent à travailler à l'usine, tandis que 103 travailleurs licenciés n'acceptent toujours pas l'indemnité de départ de la compagnie. Plusieurs plaintes contre les violations continues concernant le scrutin d'accréditation par Toyota sont en instance devant le NCMB, mais Toyota continue d'ignorer les audiences. Des 26 membres contre lesquels une action pénale a été déposée pour grève illégale, neuf persistent à ne pas accepter l'indemnité de licenciement. C'est pour ces derniers que les accusations criminelles doivent encore être levées.
- La TMPCWA a allégué que certains membres du personnel de Toyota sont des officiers de l'armée et qu'un autre est consultant pour Toyota. Les militaires de la 202e brigade d'infanterie, dont un détachement était installé près du bureau du syndicat à l'intérieur même de l'usine, n'ont quitté l'endroit qu'en mai 2009 dans le cadre de l'acceptation de la mission de haut niveau par le gouvernement philippin, mais quatre d'entre eux sont devenus gardes du corps de la direction. Vers la même époque, une organisatrice de la communauté (Mme Ka-Sabeng Arriola), qui plaidait pour le départ des militaires, a été tuée.
- Le syndicat a considéré que l'invitation envoyée à des policiers en armes à visiter l'usine constituait une forme d'intimidation; d'autres tentatives visant à corrompre les membres du syndicat en leur proposant des fonctions de supervision et à recourir à des tactiques d'intimidation en cas de refus ont été relevées. La direction a installé sept caméras de vidéosurveillance dans la ligne de production, ce qui a pour effet de limiter l'activité du syndicat.
- Certains membres du nouveau syndicat désormais accrédités chez Toyota étaient également affiliés à la TMPCWA, mais le nouveau syndicat en tant que tel n'était pas intéressé par le développement d'une relation avec la TMPCWA. La Fédération internationale des organisations de travailleurs de la métallurgie (FIOM) a tenté d'unifier les deux syndicats, mais le nouveau n'a pas donné son accord avant le deuxième scrutin d'accréditation et a même fait campagne contre la TMPCWA lors du premier scrutin. Il a conclu une convention collective, et un moratoire sur la négociation collective est aujourd'hui en vigueur.
- La TMPCWA a rappelé que les premières tentatives de création d'un syndicat à l'usine Toyota remontent à 1990, et que la direction l'a systématiquement entravée, avec comme point culminant un arrêt de la Cour suprême définissant largement le personnel de maîtrise et l'excluant des syndicats. Les travailleurs ont persévéré dans leurs tentatives de former un syndicat indépendant mais ils ont été constamment défiés par la direction et, même quand ils avaient finalement gagné le scrutin d'accréditation, ils ont été réduits à l'impuissance par des recours judiciaires complexes qui ont retardé leur reconnaissance effective et abouti à la tenue d'un nouveau scrutin avant la décision définitive sur la question de fond.
- La TMPCWA a néanmoins exprimé sa volonté de trouver par la négociation des solutions à l'impasse, faute de réintégration totale. Alors que, à ses yeux, Toyota n'accepterait pas la réintégration de ses dirigeants, la TMPCWA envisagerait l'étude d'une proposition de ne rétablir que ses membres si les poursuites pénales à l'encontre des dirigeants sont retirées.
- Fédération des travailleurs libres (FFW) - Conseil des Visayas (cas no 2488)
- Le cas concerne le licenciement des responsables de l'Union des employés de l'Université de San Agustin (USAEU-FFW).
- Le syndicat a présenté un résumé des faits (dont acte) déjà exposés en détail dans la section de fond de l'affaire (voir 346e rapport du Comité de la liberté syndicale). Selon l'USAEU-FFW, les nouveaux dirigeants syndicaux ont été triés sur le volet par la direction de l'université, et le DOLE a encouragé cette ingérence. L'impact de la grève s'est peu à peu réduit suite à des tentatives persistantes de destruction par les autorités de la ville pendant une période de quatre ans et neuf mois. Ni la pétition envoyée au Président, ni celle adressée au président du Sénat, ni une plainte déposée auprès du médiateur du ministère de la Justice n'ont eu le moindre effet. Les pratiques antisyndicales se sont répétées dans d'autres établissements gérés par des ordres de l'Eglise catholique (par exemple l'hôpital des Visayas). Pour ne rien arranger, les dirigeants syndicaux licenciés ont ressenti les effets d'une mise à l'index lorsqu'ils postulaient pour un emploi dans d'autres institutions d'enseignement. Ils ont estimé qu'il était difficile pour eux d'accepter une solution de rechange à la réintégration et de se conformer à une décision qu'ils trouvent profondément injuste et qui affecterait d'autres travailleurs dans le pays. Ils ont fourni un dossier complet avec ce qu'ils considèrent comme des preuves de falsifications et d'irrégularités dans les décisions de la Cour suprême et de la NLRC. La décision finale sur la légalité de leur licenciement était toujours pendante devant la Cour d'appel de Cebu.
- Syndicat des employés de Telefunken travaillant dans le secteur des semi-conducteurs (TSEU) (cas no 1914)
- Le cas concerne environ 1 500 dirigeants et membres du Syndicat des employés de Telefunken travaillant dans le secteur des semi-conducteurs (TSEU) qui, après avoir été licenciés pour leur participation à une grève du 14 au 16 septembre 1995 et n'ayant pas pu obtenir leur réintégration, tentent maintenant d'obtenir le paiement des prestations de retraite pour la période où ils ont travaillé dans l'entreprise. Le Comité de la liberté syndicale a exprimé son profond regret devant l'absence manifeste d'équité dans ce cas, en raison de la trop longue période de temps pendant laquelle la question de la réintégration est restée en instance (cinq ans), de la décision finale qui a infirmé une série d'arrêts antérieurs en faveur des travailleurs, y compris de la Cour suprême, et du nombre particulièrement élevé de travailleurs licenciés (1 500 environ), et devant le déni des droits acquis de ces travailleurs en termes de pension. Le comité avait exhorté le gouvernement à intervenir auprès des parties, en vue de parvenir sans délai à une solution mutuellement satisfaisante pour le paiement des prestations de retraite aux travailleurs licenciés.
- Le syndicat a présenté un mémoire (dont acte) qui rappelle les faits documentés dans les nombreux rapports du comité au fil des années. Le syndicat a souligné qu'il avait toujours reconnu qu'il serait difficile de réintégrer 1 500 personnes, mais qu'il avait espéré que le DOLE pourrait fournir un mécanisme permettant de négocier un calendrier de rapport avec la direction. En fait, c'est exactement ce qui a été fait pour un premier lot de 800 travailleurs. Aucune rencontre ultérieure n'a eu lieu, et les titres exécutoires du Secrétaire du travail (SOLE) de l'époque ont été ignorés par la direction. La Cour suprême a rejeté la requête de la société et a pris la décision définitive et exécutoire de réintégrer les autres employés. Plusieurs autres ordres d'exécution des décisions du secrétaire et de la Cour suprême ont été ignorés par la compagnie. Les tentatives de cette dernière de se soustraire à ses responsabilités légales par le biais d'une scission en trois sociétés distinctes (Vishay, Automotive et Temic) ont été contrées par une décision de la Cour suprême stipulant que "la société ne doit pas se soustraire à ses responsabilités pour le licenciement illégal de ses employés sur la base d'allégations non étayées de transfert de propriété". Plusieurs autres propositions de réexamen par la société ont été rejetées ces derniers temps de manière irrévocable. Exaspéré, le syndicat a occupé le bureau du Secrétaire du travail pendant près d'un mois, organisé une grève de la faim avec des membres des familles dans la région, passant même Noël dans le bureau. Entre-temps, le syndicat a déclaré que la société avait fait pression sur le palais présidentiel pour qu'il reconnaisse l'entreprise comme un secteur vital pour l'économie. Le 31 décembre 1998, l'armée est intervenue avec des chars pour expulser par la force les travailleurs et leurs familles du bureau du SOLE. Incapable de faire exécuter ses ordres, le SOLE a alors modifié sa position, stigmatisant le syndicat pour un incident lors duquel un certain nombre de travailleurs participant au piquet étaient entrés de force dans les locaux de l'entreprise pour se rétablir eux-mêmes. Le SOLE a déclaré la grève illégale mais a ordonné le paiement des arriérés de salaires et des autres avantages et l'octroi d'une aide financière aux grévistes. La Cour d'appel a infirmé les deux décisions du SOLE.
- Le syndicat a exprimé le désir de parler des indemnités de licenciement et des prestations de retraite après un grand nombre d'années dans l'entreprise et en conformité avec ce qui était indiqué dans le manuel de la société sur ce sujet. Les avocats qui ont calculé le coût des prestations de retraite ont déclaré que la société ne pouvait pas payer pour tout le monde, mais le syndicat a estimé qu'il ne pouvait pas être chargé de procéder à une sélection sans risquer de diviser les travailleurs. Sur les 1 500 travailleurs licenciés à l'origine, environ 1 000 ne travaillaient plus du tout en raison de leur âge.
- La mission a ensuite rencontré des représentants des syndicats actuels des trois entreprises issues de la scission. Le nouveau syndicat de Vishay/TSPIC est parvenu à négocier ses propres conventions collectives au cours des dix dernières années (périodes allant de 2000 à 2002 et de 2005 à 2009). Le syndicat de Vishay Phils a lui aussi négocié des conventions collectives (périodes allant de 1998 à 1999, de 2001 à 2003 et de 2006 à 2008).
- Ces syndicats ont appuyé sans réserve la cause des travailleurs licenciés de Telefunken.
- La FFW a pensé qu'il pourrait encore y avoir un fonds fiduciaire pour le plan de retraite de chacun des travailleurs licenciés, ce qui pourrait aider à trouver un règlement pour l'affaire en suspens.
- Confédération indépendante des travailleurs de la fonction publique (PSLINK), appuyée par l'Internationale des services publics (ISP) (cas no 2546)
- Le cas concerne des actes de discrimination (tentatives de restriction de la liberté d'expression, mises à pied, mutations, cessations d'emploi, retenues d'incitations financières et procès en diffamation contre un dirigeant syndical) à l'encontre de syndicalistes, en représailles de leur participation à des procédures liées à une campagne anticorruption et des manifestations visant l'Office de l'enseignement technique et de la formation professionnelle (TESDA).
- Lors de la réunion, la mission a écouté les témoignages de cinq dirigeants syndicaux directement touchés. Les témoignages sont exposés dans un "mémoire écrit" (dont acte). Les dirigeants syndicaux ont fait état de harcèlement; de la peur croissante chez les anciens collègues, qui craignent d'être déplacés ou licenciés; de l'aliénation subséquente de ces collègues; de la stigmatisation en tant que fauteurs de troubles; de la privation des avantages découlant des conventions collectives pour avoir causé la discorde; et du manque général de protection de ceux qui dénoncent des faits de corruption.
- Un comptable avait été licencié pour faute grave et frappé de sanctions accessoires telles que la confiscation des prestations de retraite, la perte d'éligibilité et l'interdiction perpétuelle de travailler dans la fonction publique. La Commission de la fonction publique a statué en juillet 2009 que le fonctionnaire ne s'était rendu coupable que d'une faute simple, passible de six mois de mise à pied et que, conformément à cette décision, il aurait dû être réintégré depuis un certain temps. Le directeur général de la TESDA a toutefois fait appel de cette décision, et le fonctionnaire était sans travail depuis deux ans et demi.
- Une spécialiste principale avait été accusée de diffamation pour avoir fait circuler des dépliants critiques à l'égard du directeur général de la TESDA. Le tribunal régional chargé de l'affaire avait tenté de parvenir à un règlement à l'amiable en échange de l'abandon des accusations de corruption contre le directeur général. Au début de 2009, elle avait déposé une plainte pour harcèlement sexuel contre son supérieur hiérarchique, et le directeur général avait transmis le dossier au bureau du Président, mais l'affaire de corruption qu'elle avait dénoncée était en instance devant le Comité présidentiel anticorruption. Le directeur général a alors décidé de la muter, malgré sa situation de parent unique, dans un bureau éloigné dans le district de Camanada, tandis que la personne accusée de harcèlement est restée au bureau central. Elle espérait qu'il serait envisagé de la déplacer vers un lieu de travail beaucoup plus proche, comme le centre provincial de formation de Rizal, afin de tenir compte de responsabilités familiales.
- Un spécialiste principal a déclaré, en outre, que des hommes armés avaient à un certain moment commencé à délivrer les citations à comparaître, alors que cela était normalement fait par courrier.
- Dans tous ces cas, des décisions avaient été rendues par la CSC, soit totalement en leur faveur, soit déterminant qu'une faute simple avait été commise et que ces travailleurs devaient être de retour à leur poste. Ces décisions ont systématiquement fait l'objet d'un appel et, en attendant, les travailleurs étaient privés de leurs moyens de subsistance et de vivre d'expédients, ce qui a eu un effet dévastateur sur leur vie quotidienne et celle de leurs familles. Si le Comité présidentiel anticorruption a condamné le directeur général de la TESDA en ce qui concerne les accusations de corruption, sa décision a été infirmée par le Secrétaire exécutif.
- Kilusang Mayo Uno (KMU) (cas no 2528)
- Le cas concerne les allégations suivantes: i) exécutions sommaires de 39 dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs informels de 2001 à 2006; ii) neuf enlèvements et disparitions forcées de dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs informels commis par des éléments de l'armée et des forces de police entre janvier 2001 et juin 2006; iii) harcèlement, intimidation et menaces graves de l'armée et des forces de police contre des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs informels; iv) militarisation des lieux de travail dans des entreprises en grève, en cas de litige professionnel et quand les syndicats existants ou en cours d'établissement sont considérés comme progressistes ou militants, par le biais de l'envoi de détachements militaires et/ou du déploiement d'éléments de la police et de l'armée sous le prétexte d'opérations de contre-insurrection; et v) arrestation, détention et charges criminelles retenues contre des dirigeants, membres, organisateurs et sympathisants syndicaux et travailleurs informels en raison de leur implication et de leur participation active aux activités économiques et politiques légitimes des syndicats et des associations de travailleurs de l'économie informelle.
- La mission a entendu d'autres déclarations de dirigeants et membres syndicaux affiliés au KMU à deux occasions distinctes. Ces personnes ont parcouru de longues distances pour témoigner devant la mission de haut niveau et ont déposé une documentation détaillée et des déclarations sous serment à l'appui de leur cause. Les craintes qu'elles avaient pour leur sécurité étaient manifestes et elles ont demandé de rencontrer la mission dans un lieu sûr. Les allégations se divisent en deux grandes catégories: les nouvelles allégations d'assassinats, d'enlèvements, d'actes de harcèlement, d'arrestations et de manœuvres d'intimidation, et les allégations de violations du droit d'organisation et de négociation collective commises par les employeurs, en particulier dans les zones économiques. Le KMU a officiellement présenté ces informations en tant qu'allégations nouvelles devant le CLS.
- Rencontre avec la TESDA
- Les fonctionnaires suivants ont participé à la réunion:
- - Mme Milagros Dawa-Hernandez, directrice générale adjointe, EFTP sectoriels (TESDA);
- - Mme Marissa G. Legaspi, directrice exécutive, Bureau de la planification;
- - Mme Pilar G. de Leon, directrice exécutive, Bureau du chef des services de l'administration (OCSA);
- - Mme Rebecca C. Chato, directrice, Bureau des relations du travail, DOLE;
- - Mme Rosalinda Baldoz, sous-secrétaire, DOLE;
- - Mme Imelda T. Ong, bureau juridique du Procureur.
- La réunion était présidée par la directrice générale adjointe. Mme Pilar a expliqué que l'Association des travailleurs concernés (ACE) de la TESDA employés (affiliée au TUCP) a remporté le scrutin d'accréditation en 2001, ce qui a été contesté par le "Groupe Annie Geron". Le syndicat SAMAKA TESDA (dont Annie Geron est la présidente) est affilié à PSLINK (Confédération indépendante des travailleurs de la fonction publique), dont Annie Geron est la secrétaire générale.
- Mme Pilar a expliqué en outre que la TESDA a été impliquée dans des litiges avec Annie Geron et Rafael Saus. En mai 2008, la CSC a confirmé la décision du Directeur général de licencier Annie Geron pour absence non justifiée. Cette décision a été confirmée par la Cour d'appel, et le recours formé par la suite a été rejeté par la Cour suprême pour des raisons techniques.
- Rafael Saus et deux autres personnes ne se sont pas conformés à une mutation car elle n'aurait pas été dans l'intérêt du service. Après enquête et procédure disciplinaire, le DOLE a recommandé leur licenciement en mai 2008, et en octobre 2008 le Directeur général les a licenciés tous les trois pour faute grave. Ils ont interjeté appel contre la décision de renvoi. La CSC a statué en faveur de la faute simple et d'une suspension disciplinaire de six mois sans salaire. Un recours contre la suspension est toujours en instance auprès de la CSC, mais Mme Dawa-Hernandez se demande si la décision de la CSC primerait la confirmation antérieure du licenciement par la Cour suprême. Si la CSC confirme les six mois de suspension, la TESDA devrait résoudre la question de la réintégration. Mme Dawa-Hernandez a souligné que la TESDA octroyait les meilleurs avantages mais que, quand on en vient à une procédure régulière, elle est pieds et poings liés et doit suivre tout un ensemble de règles.
- Pour ce qui est de la destitution de Ramon Geron (qui a été licencié pour défaut d'éligibilité au poste de directeur provincial), l'éligibilité est une obligation pour la nomination à un niveau exécutif, et la TESDA ne peut pas redéfinir la position d'une personne non désignée par le Président. La TESDA doit suivre la CSC et la Commission exécutive du déroulement des carrières qui doit décider si une personne est qualifiée pour une fonction de direction. Actuellement, la TESDA estime que Geron est en congé prolongé, et ses arriérés de salaires sont déjà calculés au cas où la CSC déciderait qu'il est en effet qualifié et doit être rétabli en fonction. Quand Ramon Geron a été destitué, il a effectivement remis sa démission et demandé des prestations de retraite. Si, dans le secteur privé, la réintégration est automatique en cas de décision en ce sens et dans l'attente de la décision définitive en appel, dans le secteur public elle doit être ordonnée. La Cour des comptes n'autorisera pas la TESDA à réintégrer Ramon tant que la motion de réexamen est toujours en instance à la CSC. Il a été objecté qu'il pourrait être utile d'étudier la question de la réintégration des fonctionnaires parce que ces règles touchent plus de 7 000 fonctionnaires de haut rang.
- Rencontre avec l'Autorité de la zone économique des Philippines (PEZA) et le ministère du Commerce et de l'Industrie (DTI)
- Les personnes suivantes ont participé à la réunion:
- - Mme Lilia B. De Lima, directrice générale, PEZA;
- - Mme Norma Cajulis, spécialiste en relations internationales, PEZA;
- - Mme Rachel Angeles, spécialiste en relations internationales, PEZA;
- - M. Justo Porfirio ll. Yusingco, directeur général adjoint aux finances, PEZA;
- - Mme Ann Claire C. Cabochan, directrice;
- - Mme Maria Salome C. Rebosura, chef de la division des relations bilatérales, DTI;
- - M. Antonio Ferrer;
- - M. Ronald Chua;
- - Mme Carina Vertucio.
- Mme De Lima a fait une présentation PowerPoint sur la PEZA (dont acte). Elle a souligné que, chaque année, un million de personnes atteignent l'âge de travailler aux Philippines. La loi sur les zones économiques spéciales de 1995 a donc été adoptée pour appuyer la promotion des investissements, la création d'emplois et la génération d'exportation. Environ 86 pour cent des exportations de produits manufacturés proviennent des zones économiques. Elle a décrit les différents types d'"écozones PEZA", soulignant les deux sujets non négociables dans ces écozones, à savoir les droits des travailleurs philippins et la protection de l'environnement. La loi de la République (RA) no 7916 prévoit très clairement que le Code du travail régit les relations entre les travailleurs et la direction dans les entreprises enregistrées des écozones, et un protocole d'accord avec le DOLE stipule que ce dernier reste responsable du règlement des différends du travail dans ces zones. Les entreprises et leurs sous-traitants ont dû s'engager à ne pas recourir au travail des enfants. Au total, on compte 71 syndicats, présents dans 63 entreprises de 22 écozones. Mme De Lima a précisé qu'il n'existe pas encore de syndicat dans le secteur des technologies de l'information, le chiffre de 71 syndicats dans 63 sociétés devant être mis dans le contexte d'un nombre total de 2 000 entreprises. Les syndicats représentent un nombre total de 608 387 salariés (2,58 pour cent). La PEZA effectue des inspections annuelles dans les écozones afin de surveiller de manière proactive la santé et la sécurité des travailleurs. Elle envoie entre un et cinq délégués dans chacune des zones, les autres inspections étant menées par des experts privés. Dans la période allant de 2004 à 2009, elle a enregistré 195 litiges liés au travail, 160 cas de médiation, 85 préavis de grève et sept grèves réelles. Au cours de la même période, elle a organisé des séminaires portant sur les normes du travail, les relations professionnelles, le genre et le développement, et les programmes de subsistance. Pendant la crise, les entreprises du secteur électronique ont adopté des programmes de rétention des travailleurs, prévoyant par exemple la réduction de la rémunération lors des absences ou la rotation de la main-d'œuvre. Dans certaines zones, la PEZA avait mis en place des guichets uniques d'aide aux travailleurs (POSWAC). Elle a supervisé l'adoption de bonnes pratiques en matière d'amélioration des relations professionnelles favorisant les mécanismes de dialogue social tels que les conseils et commissions paritaires, les tables rondes des travailleurs et les assemblées publiques locales. Elle a organisé des séminaires de travail pour son personnel sur des sujets tels que la résolution extrajudiciaire des différends (avec la NLRC/le DOLE); les relations professionnelles (avec le DOLE); et la formation de formateurs Start Your Business/Grow Your Business (avec le BIT). Enfin, elle a organisé un séminaire (avec le BIT et le DOLE) pour les policiers de la PEZA et les gardes de sécurité de Jantro sur la convention no 87, sur les directives communes existantes sur la conduite du personnel de la PNP, des gardes de sécurité privés et des gardes d'entreprises lors des grèves, lock-out et conflits professionnels en général, et sur les bases en matière de gestion des conflits et de conciliation-médiation.
- En réponse à certaines questions concernant l'organisation syndicale, Mme De Lima a signalé que les syndicats étaient tous deux été constitués de manière indépendante dans les zones et qu'ils sont apparus à la suite de campagnes menées par des organisateurs syndicaux extérieurs aux zones, qui jouissaient d'un libre accès. En ce qui concerne les graves allégations de militarisation, Mme De Lima a souligné que la PNP était présente dans les barangays pour maintenir la paix et l'ordre, à la différence de l'AFP, qui est responsable de la sécurité du pays. Parfois, l'aide de la PNP, et non de l'armée, a été demandée. Il n'y a pas de présence militaire dans les écozones. Quelque 28 conventions collectives d'entreprise sont en vigueur dans les zones. Les salaires et les conditions de travail dans les zones sont généralement plus élevés qu'à l'extérieur des zones.
- Université de San Agustin
- M. Padilla, dont le cabinet d'avocats représente l'Université de San Agustin, a été rejoint plus tard dans la discussion par son père, partenaire dans l'entreprise.
- Face à l'impasse des négociations, l'université n'a pas voulu que l'affaire soit soumise à la médiation du NCMB parce que la convention collective prévoit un mécanisme de grief et contient une clause "ni grève ni lock-out". Malheureusement, le NCMB n'a pas statué sur la motion demandant de considérer le cas irrecevable et de renvoyer les parties à l'arbitrage volontaire, afin de permettre aux parties de choisir l'arbitre. Ainsi, quand les syndicats ont pu légalement faire grève et déposer un préavis, l'université a été contrainte de demander la prise de compétence. Le Secrétaire du travail tend à être favorable aux travailleurs dans de tels cas et a accepté l'affaire. L'université aurait préféré l'arbitrage volontaire. Dans d'autres cas impliquant des universités, le NCMB a renvoyé les parties à l'arbitrage volontaire, et ces affaires ont été résolues sans grande controverse.
- En ce qui concerne la situation actuelle de l'affaire, il a indiqué que le syndicat avait élu de nouveaux dirigeants et que l'université était prête à s'asseoir avec le nouveau syndicat pour résoudre les problèmes économiques. Les plaignants ont remis en question les nouveaux agents, mais ceux-ci ont été certifiés par le DOLE. Lorsque les plaignants ont déposé plainte pour licenciement illégal devant le NLRC, ils ont joint les recommandations du CLS, et le NLRC a décidé que cinq des dix personnes avaient été licenciées abusivement. En appel, la décision a été annulée en raison de l'illégalité de la grève, ce qui fait que les licenciements ne sont plus illégaux. La Cour de cassation a confirmé cette décision, tout comme la Cour suprême. La jurisprudence est telle que, quand on a consenti à l'arbitrage volontaire, la grève est illégale. Si l'université était disposée à examiner la question lorsque l'affaire était en instance, le résultat est maintenant clair. Le NCMB a été réprimandé par la Cour suprême pour ne pas avoir émis d'ordre de reprise du travail et ne pas avoir renvoyé les parties à l'arbitrage volontaire. M. Padilla a déclaré que, en cas de prise de compétence, le Secrétaire du travail prend souvent un retour de manivelle, ce qui débouche sur une décision biaisée. En outre, les plaignants ont demandé une indemnisation importante pour dommages moraux (de l'ordre de 7 millions de pesos). Il a ajouté qu'il s'agissait d'une vue de l'esprit que cinq personnes ont été licenciées pour des raisons de discrimination antisyndicale, et a déclaré que le licenciement était dû à leur manque de qualifications. Cette question a été discutée avec la FFW, mais cette organisation est aujourd'hui dissoute.
- Visite au Laguna Technopark à Santa Rosa
- Les personnes suivantes ont participé à un briefing général au Technopark:
- - Mme Arlene Nazareno, maire de Santa Rosa;
- - Col. Aurelio B. Baladad Inf (GSC) PA, 202e brigade d'infanterie, 2e division d'infanterie, DA, Brgy Antipolo, Rizal, Laguna;
- - Mme Linda Baldoz, DOLE;
- - Mme Norma Cajulis, PEZA;
- - Mme Rachel Angeles, PEZA;
- - M. Justo Porfirio Yusingco, PEZA;
- - M. Labador, surintendant, PNP;
- - Mme Rona Abien, représentante du Laguna Technopark;
- - M. Antonio Ferrer.
- Le Laguna Technopark a été inauguré en 1989 et couvre une superficie de 387 hectares. Il est déclaré zone PEZA. Actuellement, il regroupe 134 entreprises, y compris des sociétés de restauration pour le marché local. C'est un des plus grands parcs économiques du pays.
- Le colonel Baladad a illustré le rôle des AFP dans une présentation PowerPoint intitulée "L'organisation communautaire et l'équipe de développement" (dont acte). Il a souligné que les AFP respectaient le droit humanitaire international et qu'il n'y a pas de cas de violations des droits de l'homme. Bien que la brigade ait stationné dans le barangay du 16 janvier au 23 décembre 2008, elle n'est plus présente parce qu'elle a fait son travail en conférant aux villages communautaires un avantage, et elle est désormais passée dans d'autres régions qui ont besoin de son aide. Le maire avait invité la brigade à prendre ses quartiers dans la salle polyvalente, située à 1 500 mètres du Technopark et à 2 000 mètres de l'usine Toyota, et la brigade ne résidait donc pas à l'intérieur de la zone. La brigade réalise des programmes de développement communautaire. Afin d'accomplir leur mission de maintien de la sécurité, les AFP ont besoin de la coopération de la société civile et du secteur privé. La brigade promeut la paix et passe progressivement de la gestion des conflits à la gestion de la coopération.
- Il a également expliqué que la brigade a mis en œuvre, en collaboration avec la mairie, des programmes de subsistance pour 200 mères de famille ainsi qu'un programme d'alimentation pendant plus de six mois, en coopération avec l'Eglise. Des campagnes de propreté ont été organisées en vue d'éradiquer la dengue. Une campagne d'information a renforcé l'éducation et la sensibilisation aux questions de santé de la population locale et des jeunes en décrochage scolaire. La condition physique a elle aussi été promue. Un programme de surveillance de quartier a été mis en place au barangay Tanod. La brigade a reçu un certificat de reconnaissance, les habitants du village ont émis une résolution de soutien et de nombreuses lettres d'appui ont été reçues.
- Le colonel Baladad a résumé son point de vue sur les faits:
- 1. Aucune plainte n'a été déposée auprès du NLRC pour harcèlement antisyndical, et d'ailleurs il n'y a pas de harcèlement. La brigade réalisait un programme de responsabilité militaire, sur invitation.
- 2. Les AFP n'ont pas mis en place un détachement, elles se sont occupées de développement communautaire.
- 3. Il est vrai que des officiers militaires ont demandé des noms en janvier 2008, mais uniquement parce que les AFP ne peuvent pas entreprendre le développement sans sonder la communauté. Ces manœuvres entraient dans le cadre d'une étude initiale de soutien.
- 4. Il n'est pas vrai que la brigade peut entrer librement dans les locaux de Toyota. La brigade entreprend un travail social et économique dans la communauté à une distance de deux kilomètres de l'usine. L'armée n'a jamais utilisé la force.
- Au cours de la discussion, le colonel a précisé qu'il avait pris des cours auprès de la Commission des droits de l'homme et qu'il avait suivi une formation sur le droit humanitaire international à Genève pendant deux semaines. Il pense que les AFP ont une compréhension assez bonne des droits de l'homme et des droits syndicaux, même si d'autres cours de formation dans les zones rurales pourraient s'avérer utiles. Les AFP ont approché les syndicats pour expliquer le rôle de l'armée dans le passé. Il y a quelques années, les AFP ont tenté d'expliquer qu'elles ne luttent pas seulement contre les groupes armés, mais aussi contre la pauvreté et la maladie. Il a précisé que les écozones possédaient leurs propres gardes de sécurité, et que les AFP ne pouvaient pas y pénétrer à leur guise mais devaient d'abord obtenir une autorisation. Sur les relations avec la PNP, il a expliqué que la PNP est principalement responsable des zones urbaines et de la sécurité dans les zones rurales. S'il y a un poste de police juste à l'extérieur du Laguna Technopark, il n'y a pas de détachement de l'armée.
- Le surintendant a expliqué que la fonction de la PNP consiste à maintenir la paix et l'ordre. Lors des grands rassemblements, la PNP protège les manifestants autant que les cibles de leurs griefs. La PNP a reçu les plaintes des travailleurs et de la direction. Il n'y a pas souvent de grèves au Technopark, mais des manifestations nationales venues d'autres régions passent parfois par Santa Rosa. La PNP reste généralement à une distance d'environ 100 mètres du lieu de rassemblement. Les interventions et arrestations sont très rares, et même nulles ces dernières années. Une formation aux droits de l'homme est dispensée dans le cadre du programme obligatoire. Les unités de la PNP intervenant lors de troubles civils ont reçu des instructions avant leur déploiement. La PNP est ouverte à la formation spécifique sur les relations industrielles.
- Le maire a conclu en soulignant que l'une des raisons pour lesquelles les investisseurs étaient venus à Laguna était que le Laguna Technopark était un endroit calme où les grèves sont inexistantes. Elle s'est réjouie du fait que les AFP aient répondu à l'invitation. La population de la ville a triplé grâce aux possibilités d'emploi. Les entreprises ont versé des incitations spéciales et assumé leur responsabilité sociale. Le Code du travail a été appliqué, et 10 des 90 entreprises manufacturières comptent une présence syndicale. Les syndicalistes ne sont pas gênés dans leurs activités.
- Rencontre avec la direction de la Société des automobiles Toyota (Philippines) au Laguna Technopark
- Les personnes suivantes représentaient la direction à la réunion:
- - M. David Go, vice-président;
- - M. Aligada;
- - M. Rommel T. Guttierez, vice-président chargés des affaires internes;
- - M. Lito;
- - M. Leody;
- - M. Joseph Sobrevega;
- - Mme Cristina Arevalo, Département des ressources humaines.
- M. Lito a donné une présentation PowerPoint (dont acte) exposant les faits déjà documentés dans le cas du Comité de la liberté syndicale. Lors de la discussion, M. Lito a expliqué que le poste de police tout proche sert la communauté et non Toyota. Il n'y a pas de porte arrière. En fait, la communauté est rassemblée autour de l'écozone et elle n'est même pas entièrement clôturée, les habitants allant et venant pour ramasser du bois. Des agents de sécurité armés de pistolets ont peut-être été pris pour des militaires. Le seul moment où les AFP sont intervenues, c'est lorsque le Président Arroyo a tenu une réunion de son cabinet dans les locaux de l'usine et qu'il a fallu de la place pour faire atterrir un hélicoptère. Environ 100 agents de sécurité avaient accompagné le Président, et les personnes en charge de la logistique avaient organisé une visite de l'usine. La PNP s'est rendue à l'usine car elle est le plus important client de Toyota. Toyota a convenu d'une réunion dans ses locaux afin de lancer les négociations sur un contrat portant sur l'achat de plus de 1 000 véhicules et la formation à leur utilisation. Des techniciens de la police ont également été formés dans les autres usines de Toyota des Visayas, de Mindanao et de Luçon. Ils n'ont pas déposé leurs armes à cette occasion mais, normalement, les armes sont conservées à l'entrée. Comme la direction a compris que les travailleurs pouvaient être impressionnés, le personnel a été informé lors d'une réunion que la police pourrait entrer, mais uniquement pour une visite de l'usine. Le Président Arroyo a visité le site à deux reprises, en 2002 et en 2008. A part dans ces cas, la PNP n'a jamais demandé à pénétrer sur le site.
- La direction de Toyota a déclaré ne pas avoir connaissance du tract dont des membres de la TMPCWA ont prétendu qu'il avait été laissé dans les vestiaires pour discréditer le syndicat.
- Mme Arevalo a souligné que l'équité envers tous les employés était la référence absolue. Même les membres de la TCMPWA dont les prestations avaient été mauvaises dans le passé ont eu des possibilités de promotion. Les questions qui préoccupent les travailleurs sont toujours soulevées conformément aux "lignes du parti", comme cela a été le cas pour une récente enquête sur le lieu de travail. Un chef d'équipe était chargé du contrôle de qualité au sein d'un groupe de cinq travailleurs. Les chefs d'équipe pouvaient être promus au rang de chef de groupe, puis de contremaître. Des membres de la TCMPWA ont été promus chefs d'équipe. Des négociations collectives sont actuellement en cours avec les deux syndicats pour la période allant jusqu'en 2011. Depuis 2001, le syndicat des cadres a voulu synchroniser les augmentations avec les hausses annuelles précédentes, de sorte que celles-ci ont débuté en juillet. La marge de négociation est mince. L'environnement commercial devrait connaître une évolution significative l'année prochaine à la suite d'un nouvel accord de libre-échange. D'autres marques produisent plus, et l'industrie automobile est touchée par l'absence de marché intérieur important. L'ALE ne sera bénéfique que si Toyota reste compétitive parce que, dans le passé, les constructeurs automobiles s'en sont allés quand les obstacles ont été levés. TMPC fournit une aide financière à caractère humanitaire à 58 pour cent des 233 travailleurs licenciés. La TMPCLO a demandé à TMPC de le faire car ses membres comptent encore de nombreux amis parmi les travailleurs licenciés.
- TMPC a noté que le versement d'une indemnité de licenciement, ordonné par le NLRC, a été annulé par la Cour suprême. TMPC ne serait en aucun cas disposée à réengager les travailleurs licenciés, ni les dirigeants ni les membres du syndicat. Tout d'abord, la tension a été très forte lorsque la TMPCWA a barricadé les portes, et les liens ne peuvent être renoués. Ensuite, la sécurité est probablement le facteur le plus important dans la production de voitures. La direction de TMPC a déclaré que la TMPCWA s'était livrée à des actes de sabotage à plusieurs reprises et a été contrainte de licencier le travailleur concerné. TMPC ne peut pas se permettre de prendre des risques avec la sécurité de ses voitures. Elle a bien repris certains anciens "membres" de la TMPCWA, mais uniquement ceux qui ne s'étaient pas livrés à des débrayages répétés. Il n'y a pas eu de représailles contre les travailleurs réembauchés. TMPC a organisé une audience disciplinaire pour chacun des 233 licenciés parce que c'était leur droit et que TMPC n'a eu aucun scrupule a mettre en œuvre le manuel. Les travailleurs licenciés ont affirmé qu'ils avaient le droit d'arrêter le travail, pas de faire grève. Ils ont contesté la décision du Bureau des relations du travail (BLR) d'effectuer une vérification des électeurs en question. Le licenciement était fondé sur des documents exposant les actions disciplinaires et sur une copie du manuel sur lequel l'action disciplinaire se base. Le nouveau personnel est formé au contenu du manuel. TMPC pense qu'il pourrait être utile d'organiser une formation sur la liberté syndicale et la négociation collective, de sorte à montrer son engagement envers ces principes et de s'assurer que tout le monde a la même compréhension de la loi.
- La mission a visité la ligne de production et a eu l'occasion de parler à plusieurs travailleurs affiliés à la TMPCWA, qui ont exprimé leur gratitude pour l'attention accordée à leur cause. Un membre de la TMPCWA s'est plaint que le syndicat n'était même pas reconnu aux fins de représentation de ses affiliés dans les procédures de dépôt de griefs individuels, comme dans le cas récent du licenciement (non lié à l'activité syndicale) de 76 travailleurs, dont sept membres de la TMPCWA. La direction craint la réaction de la TMPCLO si elle est vue en train de négocier avec la TMPCWA. Il a signalé que les AFP possédaient un champ de tir à proximité de l'usine. Il soupçonne également que les tracts dénonçant la TMPCWA laissés dans le vestiaire ont été produits par la direction.
- Un membre de la TMPCWA de rang 4 avec seize ans de service a fait état de discrimination antisyndicale parce qu'il n'a pas été promu, même après avoir passé l'examen requis.
- En réponse à la question des promotions du rang 4 au rang 5, la direction de TMPC a signalé que la TMPCWA a probablement incité ses membres à refuser la promotion, parce que les bénéficiaires auraient été tenus de quitter ce syndicat et de s'affilier au syndicat des cadres. La crainte du licenciement parmi certains travailleurs est inspirée par la règle du "dernier entré, premier sorti", dont le syndicat exige l'application lorsque des licenciements sont nécessaires. La convention collective contient une clause de sécurité syndicale pour le syndicat majoritaire, sauf pour une "période de liberté" de soixante jours avant le début des nouvelles négociations. La direction de TMPC a insisté sur la protection de la liberté d'adhérer à un syndicat minoritaire.
- Rencontre avec l'Organisation des travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCLO) et le Syndicat des cadres de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCSU)
- Les principaux intervenants de la réunion étaient Angel Dimalanta (président du TMPCSU) et Francisco Mero (Alliance des travailleurs de l'industrie automobile, AIWA, qui est la fédération à laquelle les syndicats de TMPC et les syndicats d'entreprise d'autres constructeurs automobiles sont affiliés) (Note 1).
- M. Dimalanta a donné une présentation PowerPoint (dont acte) sur l'histoire du TMPCSU. Il a été président du premier syndicat de TMPC, le Syndicat des travailleurs de la Société des automobiles Toyota (Philippines) (TMPCLU), fondé en 1992. Le TMPCLU n'a jamais été reconnu parce qu'il regroupait les cadres, et a ensuite été absorbé par la TMPCWA, à qui la certification en tant qu'agent exclusif de négociation collective a finalement été refusée également. C'est ce dernier incident qui a conduit à l'arrêt de travail et au licenciement des dirigeants et des membres de la TMPCWA, et jeté les bases de la plainte devant le CLS. Il a expliqué qu'en 1998 les membres fidèles et déterminés du défunt TMPCLU avaient promis de poursuivre la lutte jusqu'à ce qu'un syndicat puisse voir le jour au sein de TMPC. Il a été convenu que ce groupe constitue un syndicat des cadres et, plus tard, vienne en aide aux travailleurs qui ne sont pas affiliés à l'organisation de négociation. Comme ces membres de l'équipe sont pour la plupart de rang 5 ou supérieur, la préoccupation immédiate est de travailler en silence pour réorganiser le syndicat. Le TMPCSU a été formé en avril 1999, a remporté un scrutin de certification en décembre 2000 et a conclu sa première convention collective en septembre 2001. La convention collective actuelle court jusqu'en 2011 pour les dispositions politiques, et jusqu'en 2009 pour les dispositions d'ordre économique.
- La TMPCLO a suivi avec une présentation PowerPoint extrêmement détaillée (dont acte) sur son histoire et sa structure et sur les avantages qu'elle a négociés avec TMPC par rapport à ceux obtenus dans d'autres usines de montage de voitures. M. Mero a fait remarquer que Mitsubishi offrait effectivement les meilleurs avantages parce qu'elle s'est séparée de Chrysler en 1965, et que le syndicat existait depuis lors. Chez Mitsubishi, la plupart des voitures et autres privilèges ont déjà été convertis en salaires. Toyota affiche le plus haut volume de production en Thaïlande et le plus bas aux Philippines.
- Au cours du débat, M. Angel Dilamante a souligné le problème de la loi qui exclut les cadres sans toutefois définir correctement cette catégorie de travailleurs. Cette loi a été utilisée par la direction pour couper les organisateurs syndicaux de leur base légitime, mais cet argument n'a malheureusement jamais été suivi par la Cour suprême. Les syndicats sont également particulièrement préoccupés par la décision de la Cour suprême dans l'affaire de l'hôtel Dusit Nikko. M. Dilamante estime que critiquer la direction n'est pas la même chose qu'une grève et constitue seulement une expression de mécontentement.
- Avec l'introduction des zones économiques, l'organisation des travailleurs est devenue plus difficile. Les gardes de sécurité de la PEZA ont le pouvoir d'escorter les organisateurs syndicaux parce que le terrain n'est que loué par le gouvernement tandis que la propriété reste privée (dans le cas du Laguna Technopark, il est propriété de la famille Ayala), et la règle prévoit qu'aucune grève ne peut avoir lieu sur un terrain privé.
- En ce qui concerne les licenciements de membres de la TMPCWA, M. Dimalanta a expliqué que seuls des membres de la base ont été licenciés parce qu'ils avaient abusivement arrêté le travail, appelé à une audience et organisé un piquet pendant trois jours sans introduire de demande de congé, alors que tous les dirigeants syndicaux étaient en congé officiel. La direction avait déjà tenté de créer un syndicat mais avait échoué. Le TMPCSU (syndicat des cadres) a entrepris des efforts de réconciliation avec la TMPCWA de 2002 à 2005, mais en vain. Le Code du travail prévoit qu'un syndicat peut être enregistré s'il rassemble 20 pour cent de la main-d'œuvre; donc, s'il peut y avoir cinq syndicats, un seul est reconnu aux fins de la négociation collective. Les syndicats veulent contrôler l'unité de négociation, et c'est ainsi que la rivalité s'installe entre eux. Il a également déclaré que, dans de nombreux cas, des dirigeants syndicaux avaient en réalité été tués par d'autres syndicats.
- Rencontre à l'hôtel Central Park, Luisita Park
- (Tarlac City)
- - M. Genaro Mendoza, maire de Tarlac City;
- - Chef de la police de Tarlac City et trois surintendants;
- - Brig. gén. Gominto Pirino, AFP;
- - personnel de la PEZA.
- Les autorités de police ont donné un aperçu de la situation de la paix et de l'ordre, ainsi que leurs programmes visant à l'améliorer avec l'aide de la communauté, notamment un programme de garde de nuit. Elles ont souligné que le poste de police le plus proche était à 300 mètres du Luisita Park, bien que celui-ci soit considéré comme un lieu stratégique. Les forces de police ne sont pas autorisées à entrer dans le parc sans la permission de la PEZA.
- Le représentant des AFP a ensuite informé la réunion sur son approche de la paix industrielle. Il a expliqué que les AFP ne tolèrent pas le harcèlement, qu'il vienne du syndicat ou de la direction, les avantages réciproques dépendant de relations de travail harmonieuses. Les AFP ne s'occupent que de l'insurrection et n'assument pas de fonctions liées aux relations professionnelles. Les forces d'imposition de la loi n'interviendraient que lorsque tous les moyens pacifiques de règlement des différends ont été épuisés. En novembre 2006, l'intervention lors d'une manifestation a dégénéré et quelques manifestants ont jeté des pierres sur la police, qui s'est défendue. Si un litige professionnel conduisait à des troubles, la police veillerait à ce que personne ne soit été blessé. Les règles d'engagement ont été mises au point pour que les forces de police puissent faire face à des actes de violence lors de rassemblements. Les forces de police ne peuvent pas intervenir à leur gré dans les conflits liés au travail; elles doivent être mandatées par le DOLE, sauf en cas de violence ou si un crime spécifique a été commis. L'année dernière, il y a eu deux cas de ce genre (par exemple chez Blooming Apparel à San Rafael, où des pneus avaient été brûlés et la police devait veiller à ce que la violence résultant de la fermeture de l'entreprise ne se propage pas à l'extérieur).
- En ce qui concerne la situation à l'Hacienda Luisita, les AFP ont expliqué que l'Hacienda englobait 11 barangays, où vivent la plupart des paysans et des ouvriers. Les AFP ont été confrontées à une insurrection qui recrutait essentiellement parmi les travailleurs. Afin d'isoler les travailleurs, les AFP ont déployé le Système intégré de sûreté du territoire et de sécurité publique et le Système intégré de défense territoriale, enseignant à la population comment se protéger contre les campagnes de sensibilisation mensongères. Une des mesures prévoit que l'armée mène des activités humanitaires, ainsi que des campagnes d'information publique et de sensibilisation en collaboration avec les autorités civiles. Plusieurs mesures de contrôle sont en place pour veiller à ce que le personnel applique les programmes de sensibilisation du public sur la tromperie du programme communiste en conformité avec le droit humanitaire international et les règles d'engagement dans la région. Le représentant des AFP s'est dit surpris par le cas du CLS et a plaidé pour une formation sur la convention no 87, dont il a reconnu connaître beaucoup trop peu. Il a également expliqué que les AFP disposaient d'une unité de dispersion de la foule, dont la police peut demander l'intervention si elle est débordée, mais uniquement quand elle a été dûment mandatée par le DOLE. Les personnes qui se sentent intimidées peuvent se tourner vers la police, un des bureaux régionaux de la Commission des droits de l'homme ou du Conseil d'application de la loi sur la police, qui relève administrativement de la compétence du gouvernement local. Dans de nombreux cas, les plaignants se sont adressés aux politiciens locaux, tout en demandant un soutien à la police.
- Le bureau régional du DOLE (représenté par M. Nathaniel V. Lacambra, directeur régional) a expliqué qu'en 2008 les AFP ont demandé et bénéficié d'une formation sur des sujets tels que les droits et obligations des travailleurs, le droit d'organisation syndicale, le scrutin de certification, et l'organiser de grèves au sein des forcées armées. Le bureau régional a élaboré un module complet mais doit à présent proposer la même formation à la police. Le DOLE est fort peu présent dans les régions, tandis que la PNP et les AFP sont sur le terrain partout et pourraient jouer un rôle dans le renforcement de la santé et la sécurité au travail par exemple.
- Beaucoup de conflits à l'Hacienda Luisita sont résolus lors de réunions, comme un récent incident au cours duquel la direction a demandé la liberté d'entrée et de sortie. Le "cas" de l'Hacienda Luisita (Note 2) n'est plus considéré comme un litige professionnel mais comme un différend de nature agraire. Les problèmes entre le Syndicat unifié des travailleurs de Luisita et l'employeur ont déjà été réglés.
- Le cas impliquant International Wiring Systems est devenu problématique depuis la renégociation de la convention collective. Le syndicat aurait pu s'adresser au bureau régional du DOLE mais a apparemment préféré se tourner vers l'OIT.
- Les syndicats sont présents dans cinq entreprises du Luisita Park. Dans les zones rurales, 1,5 million de pesos ont été affectés à des programmes de subsistance gérés par la PNP et les AFP dans le but de garder les gens hors des griffes des communistes. Le DOLE a reçu des plaintes verbales et écrites concernant uniquement les normes du travail et des questions professionnelles. Les allégations de crimes ont été renvoyées à la police.
- Les modules de formation existants pour l'enseignement des travailleurs réunissant les dirigeants syndicaux et les AFP couvrent la législation du travail, les relations humaines et la productivité. La mission a demandé si le syndicat avait été lié à l'insurrection, ce qui aurait pu justifier la stigmatisation et la méfiance de la part du gouvernement. A cet égard, le DOLE a signalé que le syndicat avait été invité au Conseil régional tripartite de la paix sociale dans la région, mais il n'a pas le sentiment que le syndicat cherche vraiment à résoudre ses problèmes par un engagement coopératif.
- Le maire a reconnu qu'il avait effectivement reçu une plainte de l'IWSWU. Il n'avait pas encore eu l'occasion de se pencher sur cette affaire mais s'est engagé à le faire.
- Rencontre avec la direction d'International Wiring Systems Philippines Corporation (IWSPC)
- et le Syndicat des travailleurs d'International
- Wiring Systems (IWSWU)
- Le 29 septembre 2008, l'IWSWU a déposé une plainte contenant des allégations de violation des droits syndicaux aux Philippines (cas no 2669). Plus précisément, le cas concerne des allégations de menaces de la part de l'armée et de harcèlement contre les dirigeants de l'IWSWU et leurs familles, et l'ingérence des AFP dans les affaires syndicales en dissuadant les membres des syndicats à s'engager dans la négociation collective, et la stigmatisation des membres de l'IWSWU et de leurs familles au détriment de leur sécurité. Le cas n'a pas encore été examiné par le Comité de la liberté syndicale.
- Le président du syndicat (M. Dexter P. Datu) a expliqué que, sur les 3 034 travailleurs de l'entreprise, le syndicat comptait 2 820 affiliés. Un accord prévoit un monopole syndical mais, à la fin de 2008, 1 800 travailleurs -- certains d'entre eux régulièrement réembauchés comme travailleurs contractuels - ne pouvaient pas adhérer au syndicat.
- Le président du syndicat a présenté une communication écrite (dont acte) contenant de nouvelles allégations de harcèlement par l'armée, en particulier l'invitation systématique des membres syndicaux à participer à des assemblées où des militaires discutent de syndicalisation.
- M. Richard D. Sosa (président du conseil d'administration de l'IWSWU) a expliqué qu'en décembre 2008 il avait été harcelé par des visites répétées à son domicile de militaires en civil se présentant comme des statisticiens nationaux. Il les a reconnus parce qu'ils lui ont été présentés en tant que tels lors d'un forum de l'armée. Il a également reçu des menaces de mort par courrier. Les officiers militaires n'étaient pas accompagnés de représentants du DOLE. La question a été soulevée avec le DOLE mais ce dernier n'a pas réagi, pas plus que la direction.
- M. Michael Ogali (membre du conseil d'administration de l'IWSWU) a expliqué que des officiers militaires se sont rendus à plusieurs reprises à son domicile pour l'inviter à assister à une rencontre de sensibilisation dans le barangay. Chaque barangay organise de telles rencontres pour les travailleurs syndiqués et, si la plupart d'entre eux y participent, certains ne s'y rendent pas, et d'autres n'ont pas pu être contactés parce qu'ils vivent dans 20 endroits différents pour échapper aux traques. Bien que la direction de l'entreprise ne force pas les travailleurs à participer aux forums, M. Ogali pense qu'elle a coopéré avec les militaires en fournissant les noms et adresses. Il a également déclaré que les militaires l'avaient accusé d'être un membre de la NPA, tout simplement parce que ses parents étaient pasteurs. Son oncle a lui aussi fait l'objet de réunions de sensibilisation du barangay. Le "groupe de Dexter Datu" a reçu des avertissements parce que Dexter Datu serait membre du CPP. Le lien a été établi à la suite de son implication antérieure dans "l'affaire Luisita".
- Mme Noel Flores a signalé que l'armée lui avait rendu visite pour l'inviter à la caserne. Lors de la rencontre, les militaires lui ont conseillé de ne pas formuler d'exigences déraisonnables dans le cadre des prochaines négociations collectives pour empêcher la compagnie de sombrer. Elle a répondu qu'on était en temps de paix et que cela ne regardait pas le gouvernement.
- M. Rodel Licup (Vice-président adjoint aux affaires extérieures) a relaté un autre événement où il a été demandé d'expliquer aux militaires le lien entre l'IWSWU et la NPA, Tarlac City étant le berceau de Bucanos, le fondateur de la NPA. Il a été averti que le CPP/NPA tentait d'infiltrer les syndicats. M. Licup a nié l'accusation, assurant aux agents qu'il ne disait pas aux travailleurs de rejoindre le CPP, mais uniquement les rangs du syndicat.
- Le syndicat se demande si la direction a joué un rôle dans ces visites d'intimidation. Les militaires avaient apparemment l'accès aux dossiers du personnel et aux horaires des travailleurs. Le syndicat a interrogé la direction à la suite d'indications de l'armée laissant entendre qu'elle coorganisait les forums de sensibilisation, mais la direction a assuré le syndicat qu'elle n'avait rien à voir avec cela. Le syndicat a également demandé pourquoi le maire de la ville n'a jamais réagi à sa plainte. Le maire a dit qu'il allait en discuter avec le Bureau de commandement du Nord Luçon.
- La direction d'IWSPC a, un jour, intenté une procédure de dissolution contre le syndicat pour avoir tenté d'arrêter la production. Elle a essayé de saper le pouvoir de ses dirigeants en ne reconnaissant pas les représentants syndicaux élus et en remettant en question l'indépendance du syndicat en raison de son affiliation à la Fédération des syndicats démocratiques. L'IWSWU n'est pour le moment affilié à aucune fédération nationale. Les négociations collectives en cours sont difficiles parce que la direction n'est pas disposée à céder aux revendications syndicales, évoquant un manque à gagner en raison de la crise financière mondiale. Le syndicat a toutefois remarqué que l'entreprise est en expansion, que la production a doublé et donc que la société semble être en bonne santé. Cependant, l'entreprise a proposé un moratoire sur les avantages pendant deux ans.
- Si le syndicat n'est pas d'accord, il peut demander une conciliation par le DOLE mais il ne lui fait guère confiance, ses décisions ayant tendance à aller dans le sens de la société. Parmi les nombreux cas présentés par le syndicat, il n'en a gagné qu'un. En septembre dernier, le DOLE a convoqué une réunion tripartite lors de laquelle des militaires ont montré une vidéo sur la grève à l'Hacienda Luisita. IWSPC était représentée par son vice-président. Le thème de la réunion était la supervision des syndicats à Luçon par les militaires. Le syndicat a estimé que l'acquiescement tacite de la direction sur ce sujet signifiait qu'elle associée aux actions de l'armée à cet égard.
- M. Datu s'est réjoui des possibilités de formation permettant d'expliquer, en particulier, la limite entre les activités syndicales légitimes et les activités purement politiques qui ont une incidence sur la sécurité. Il a souligné, toutefois, que le syndicat avait également besoin d'une recommandation qui permettrait d'éviter à l'avenir des situations de harcèlement et de mauvaise conduite similaires.
- Rencontre avec la direction d'IWSPC dans les locaux de l'usine du Luisita Park
- IWSPC était représentée à cette réunion par le président (M. Takashi Takagaki), le vice-président responsable de la production (M. Eric V. Mercado) et deux membres du personnel.
- M. Mercado a fait une présentation PowerPoint sur l'entreprise (dont acte).
- Au cours du débat, M. Mercado a indiqué que la compagnie réembauchait des travailleurs licenciés précédemment parce que le volume de production avait repris après une chute importante dans la première moitié de l'année. IWSPC devrait afficher une perte nette à la fin de l'année. Parmi les travailleurs réguliers, seuls ceux qui demandent à partir ont été licenciés.
- M. Mercado a expliqué l'approche de l'entreprise vis-à-vis des travailleurs contractuels (à savoir engagés sur la base d'un projet et à durée déterminée). L'environnement commercial a changé, avec un plus grand nombre de projets spécifiques d'environ trois mois et une fluctuation plus importante du volume. Les travailleurs contractuels sont par conséquent une nécessité. D'autre part, un plus grand nombre de travailleurs contractuels implique davantage d'investissements dans la formation et, compte tenu de la durée moyenne des projets, le projet est parfois plus court que la formation. Les travailleurs sont tenus au courant chaque semaine de l'évolution des affaires.
- Il a souligné que quatre conventions collectives de trois ans chacune ont été conclues, et que de bonnes relations sont maintenues avec les différents dirigeants syndicaux. Il s'attend à ce que les négociations collectives en cours soient conclues en octobre. L'entreprise et le syndicat ont conclu un accord de monopole syndical.
- M. Mercado a confirmé que l'IWSWU avait soulevé des questions sur l'insécurité mais que la société a nié toute implication. Il y a 52 entreprises de fabrication dans le voisinage. En ce qui concerne IWSPC, toutes les données telles que les fichiers personnels et les horaires sont confidentielles, et M. Mercado a assuré que les informations ne proviennent pas de la direction. M. Takagaki a pleinement appuyé cette déclaration et a remis à la mission une lettre officielle indiquant que la direction n'a jamais fourni de telles informations à l'armée.
- Les blocages des négociations ont été soumis au NCMB dans le passé mais, après la période de réflexion, les deux parties avaient été en mesure de s'entendre. M. Mercado a confirmé que le bureau régional du DOLE a le sentiment que l'IWSWU cherche à l'éviter, mais il pense que cela pourrait être le résultat des réunions que le DOLE a organisées avec l'armée.
- Il a rappelé qu'il y avait eu des divisions entre les travailleurs et qu'à un certain moment un syndicat avait intenté une action en justice, mais c'était désormais du passé. La direction a trouvé beaucoup plus facile de dialoguer avec quelques représentants que de négocier individuellement avec les travailleurs, et s'est engagée à collaborer avec le syndicat lors de la prochaine négociation collective.
- L'entreprise était très ouverte et favorable au renforcement des capacités et à la formation.
- Rencontre avec le Bureau des relations professionnelles (BLR), le Conseil national des relations professionnelles (NLRC) et le Comité national de conciliation et de médiation (NCMB) le matin du 28 septembre
- Les participants à la réunion étaient:
- - Mme Baldoz, sous-secrétaire, et M. Padilla, DOLE;
- - M. Chato, directeur, BLR;
- - M. Ubaldo, directeur exécutif, NCMB;
- - M. Velasco, commissaire, M. Ricardo Gloria, Directeur, et M. Herminio Banico, NCLR.
- Le NLRC a remis un rapport sur les résultats de 2008 (dont acte) et présenté quelques chiffres.
- Contexte du système de règlement des litiges professionnels
- Le Comité national des relations professionnelles (NLRC) est un tribunal du travail tripartite. Il est rattaché au DOLE pour la coordination des politiques. Le président est assisté par des commissaires qui siègent dans sept divisions. A travers les arbitres du travail des bureaux régionaux, dirigés par des arbitres principaux, le NLRC entend et tranche dans des affaires concernant des pratiques de travail déloyales; des différends en matière de licenciement; des demandes de réintégration dans des cas impliquant les salaires, les taux de rémunération, les horaires de travail et d'autres modalités et conditions d'emploi; des plaintes résultant de toute violation de l'article 264 sur les actes prohibés, y compris les questions relatives à la légalité des grèves et des lock-out; toutes les autres plaintes découlant des relations employeur-employé; et des cas certifiés par le Secrétaire du travail.
- Le NLRC résout les différends par l'arbitrage obligatoire. Les décisions des arbitres du travail peuvent faire l'objet d'un appel devant la commission, dont la décision peut remonter par voie de certiorari devant la Cour d'appel et la Cour suprême.
- Le Conseil national de conciliation et de médiation (NCMB) est un organisme rattaché au DOLE, tant pour le contrôle administratif que pour la coordination des politiques. Grâce à ses antennes régionales, dirigées par un directeur et dotées de conciliateurs-médiateurs, le NCMB:
- - règle les litiges professionnels, notamment ceux résultant des préavis de grève pour pratiques déloyales et blocage des négociations, grâce à des modes volontaires tels que la médiation préventive et la médiation de conciliation;
- - promeut la résolution des différends au niveau du site à travers des programmes de règlement des griefs et de coopération dans la gestion du travail;
- - encourage le recours à l'arbitrage volontaire pour le règlement et la résolution des litiges professionnelles et des autres cas liés au travail.
- Le NCMB est assisté par le Conseil consultatif d'arbitrage volontaire tripartite (TVAAC) dans la formulation des politiques et programmes sur l'arbitrage volontaire.
- En vertu de l'article 263(g) du Code du travail, les litiges professionnels impliquant des secteurs indispensables à l'intérêt national peuvent faire l'objet d'une prise de compétence par le SOLE qui soit tranche l'affaire, soit la renvoie au Comité national des relations professionnelles. Les décisions du SOLE et du NLRC sur les cas d'intérêt national peuvent faire l'objet d'un appel par voie de certiorari devant la Cour d'appel et la Cour suprême.
- Lors du briefing avec les fonctionnaires gouvernementaux du 22 septembre, la sous-secrétaire Baldoz (DOLE) avait déjà illustré la position du gouvernement, selon lequel le pouvoir du SOLE, en vertu de l'article 263(g), a été utilisé avec parcimonie et à bon escient. A peine 4 pour cent des cas impliquant des différends susceptibles de se traduire par des grèves ont fait l'objet d'une prise de compétence. En outre, l'exercice de ce pouvoir a toujours été soumis à un contrôle judiciaire. Ces trente-cinq dernières années, l'utilisation plus efficace et plus large des modes volontaires de règlement des litiges par l'arbitrage obligatoire et le recours à la grève en tout dernier ressort ont contribué à l'émergence d'un climat de stabilité et de maturité dans les relations patronat-syndicats dans le pays.
- Le NLRC a déclaré recevoir 33 000 cas par an au niveau des branches régionales, dont 43 pour cent sont réglés. Il est parvenu à réduire sa charge de travail de plus de 3 000 cas en utilisant d'autres moyens tels que la création de groupes de travail, l'établissement de niveaux minimaux de performances, la rigueur dans la surveillance du rendement, le retrait des indemnités après le troisième avertissement. Son volume de personnel est resté à peu près le même. Toujours au niveau du comité, la charge de travail a réduite. Le NLRC s'efforce de résoudre les affaires au premier niveau dans les neuf mois, d'atteindre un taux de succès de 95 pour cent, tandis que 85 pour cent des cas pourraient être réglés dans les huit mois. Sur le plan de l'exécution, si les décisions prises au niveau du comité sont définitives, un appel est possible par voie de certiorari devant la Cour d'appel et la Cour suprême. En décembre 2007, la Cour suprême a modifié les règles, étendant la "courtoisie judiciaire" en statuant que les décisions inférieures peuvent être exécutées si un recours en certiorari est déposé. Sur les neuf mois nécessaires pour régler une affaire, la conciliation en prend trois ou quatre, et le NLRC donne cinq mois pour l'exécution. Les défauts d'exécution sont principalement dus au fait qu'une entreprise ferme ou n'a pas d'actifs, ou que les répondants n'ont pas pu être localisés. Les décisions de réintégration sont également exécutoires en attendant l'appel, du moins si l'employeur existe toujours. Le NLRC a estimé que la fermeture des entreprises ne constitue pas un problème systématique, bien qu'il y ait eu quelques cas isolés. Dans certains cas, le NLRC a été en mesure de percer le secret de l'identité de l'entreprise et de traiter la réintégration comme une continuation des activités de la première société. Le NLRC espère pouvoir continuer à organiser des séminaires pour les arbitres au premier niveau. Il n'y a eu que quelques cas de jugements.
- Le NCMB a avancé le chiffre de 869 cas de prise de compétence, soit 2,21 pour cent des 9 320 cas de non-grève traités, et de 582 renvois au NLRC, soit 1,9 pour cent du total. Le Secrétaire du Travail et de l'Emploi (SOLE) a déterminé la compétence. Il a été envisagé de modifier la réglementation afin que, quand une demande de prise de compétence est déposée auprès du SOLE, une conférence obligatoire des parties doit être convoquée. Aucune considération n'a été donnée à la définition plus précise de l'"intérêt national" ni à la formulation de lignes directrices à ce sujet.
- Le NCMB ne dispose pas de données sur la provenance des demandes de prise de compétence. La procédure commence par un préavis de grève, une réunion et ensuite un vote sur la grève. La période qui suit n'est pas limitée aussi longtemps que les parties sont prêtes à s'asseoir autour de la table. La mission a recommandé de clarifier les règles sur les ordonnances de retour au travail et le délai dans lequel ces ordonnances doivent être exécutées. Dans le cas de l'Université de San Agustin, il s'est écoulé neuf heures entre le début de la grève et l'ordonnance, et le retour au travail devait être immédiat. En d'autres termes, il était attendu d'eux un retour immédiat au travail. Si, dans la plupart des cas, c'est l'employeur qui demande la prise de compétence, le droit de grève est très rapidement malmené. Alors que le NCMB pourrait entre-temps poursuivre ses efforts de conciliation, un arbitrage est fort probable. Le NCMB ne possède pas de statistiques sur le temps moyen qui s'écoule entre un préavis de grève et une demande de prise de compétence.
- Réunion au ministère de la Justice
- La réunion a eu lieu à l'occasion du 112e anniversaire du Secrétariat de la justice. Les principales personnes présentes étaient:
- - le sous-secrétaire Blancaflor et un adjoint au procureur, ministère de la Justice (DOJ);
- - le sous-secrétaire Valenzuela, ministère de la Défense nationale (DND);
- - le col. Galvez, le lt-col. Loy et le major Salgado, AFP;
- - le gén. Bacalzo, le gén. Rapal et le major Libay, PNP.
- La PNP a fait une présentation PowerPoint (dont acte) sur 66 cas liés au travail qu'elle a enregistrés entre 2001 et 2009.
- Le sous-secrétaire a souligné que bon nombre des 66 cas d'allégations de violences contre les syndicalistes n'étaient pas liés au travail parce qu'aucun lien avec un syndicat n'avait été prouvé. Il n'y a eu aucun litige, aucune grève, aucun blocage des négociations ni aucune négociation ou convention collective. Dans la plupart des cas, il n'y a pas eu de témoins, ce qui est une pierre d'achoppement importante pour l'avancée des poursuites aux Philippines.
- En réponse à la remarque de la mission que la simple appartenance à un syndicat fait d'un cas une affaire liée au travail, comme dans le cas du Syndicat des travailleurs de International Wiring Systems (IWSWU) par exemple, le sous-secrétaire a répondu que le DOJ ne peut poursuivre quiconque sans disposer de pièces telles que les détails spécifiques du harcèlement. Il a cependant appris que l'IWSWU avait écrit au maire car il n'avait confiance ni en la PNP ni en les AFP.
- Le Groupe de travail 211 (Note 3) a considéré les affaires liées au travail comme une priorité. Il fait déjà tout ce qu'il peut pour renforcer la confiance au sein de la communauté, et a intensifié le suivi national des cas impliquant des violences politiques et des exécutions extrajudiciaires en instance devant divers bureaux du procureur et tribunaux du pays. A cet égard, il a conclu un protocole d'entente avec les médias et les différentes facultés de droit. En vertu de ce protocole d'accord, des volontaires accrédités désignés par les médias et les facultés de droit ont pu assister aux audiences, se tenir au courant de la procédure et enregistrer les incidents dans les fiches de suivi des cas.
- Sur les 66 cas, 24 ont été reconnus comme étant liés aux efforts de lutte contre l'insurrection. Le GT 211 a statué que neuf assassinats relevaient de son mandat, en ce sens qu'ils avaient un lien avec les syndicats. Cinq des 16 cas de harcèlement ont été renvoyés à la Commission des droits de l'homme. Les Philippines se sont dotées d'une Commission des droits de l'homme, d'un médiateur et d'autres mécanismes vers lesquels la population peut se tourner. Le sous-secrétaire a souligné que le parquet n'avait pas enquêté, mais agi sur des faits rapportés par les trois agences en charge de l'enquête. Le DOJ ne peut pas s'appuyer seulement sur les perceptions de méfiance au sein de la collectivité pour entamer des poursuites.
- Le sous-secrétaire a fait une présentation PowerPoint (dont acte) expliquant que la culture de l'impunité est un mythe créé par la couverture médiatique des assassinats, mais que le suivi et la résolution finale ne bénéficient jamais de la même attention. Le groupe de travail est parvenu à accélérer la résolution des affaires de meurtres de travailleurs des médias, qui prend aujourd'hui à peine trois semaines. Personne n'a été épargné dans ce processus, qu'il s'agisse de maires ou d'officiers de l'armée. Dans le cas de l'assassinat d'un leader paysan à l'Hacienda Luisita, les AFP ont livré calmement un officier suspecté qui avait échappé à l'arrestation pendant une longue période.
- Le DND a expliqué que son mandat et celui des AFP englobe non seulement la défense du territoire, mais aussi la sécurité intérieure, le développement communautaire, l'aide humanitaire et le secours en cas de catastrophe. Il a souligné que la plupart des cas de harcèlement ont été perçus comme telles parce que les opérations de contre-insurrection contre les 5 000 hommes de la NPA ont parfois donné à croire que des citoyens pouvaient être associés à l'insurrection. L'implication dans les litiges professionnels ne fait pas partie du mandat du DND, mais il est arrivé que le DND pense qu'il y avait un lien avec son mandat et enquête de manière plus approfondie. Il y a un problème de confiance du public dans l'application de la loi. Le DND a beaucoup investi dans la confiance du peuple philippin, et c'est presque toujours son aide que la population reçoit en premier. La première étape d'une lutte réussie contre l'insurrection consiste à faire participer la communauté et à établir de bonnes relations. Les AFP ont dû sortir de leurs casernes et rénover des écoles, les militaires ne pouvaient pas vivre seulement à l'intérieur de leurs camps, et cela a pu déboucher sur des impressions de harcèlement. Les AFP ont estimé qu'il entrait dans leurs attributions de protéger les citoyens et de les empêcher de rejoindre l'insurrection. Parler aux membres syndicaux n'était pas du harcèlement, mais tout simplement un dialogue avec des membres de la communauté. Il entre dans la fonction d'imposition de la loi de réduire la marge de manœuvre des criminels. Partout où il y a danger et besoin, un membre syndical est susceptible de s'engager dans l'action contre le gouvernement.
- La mission a rappelé que l'armée avait clairement un rôle clé à jouer dans le maintien de l'ordre dans le pays, mais qu'il fallait mieux comprendre la signification des relations professionnelles et l'importance de ne pas stigmatiser les syndicats et leurs dirigeants en établissant des liens faciles avec les insurgés. Le DND a expliqué qu'il était beaucoup plus facile et plus efficace de parler aux communautés, aux agriculteurs et aux professionnels en tant que groupes. Les AFP ont également dû engager des travailleurs lorsqu'elles se sont adressées aux communautés, afin de les sensibiliser aux raisons de la présence de l'armée. La mission a recommandé un dialogue plus régulier, peut-être au niveau régional, et donné des orientations sur l'importance du respect des libertés civiles fondamentales dans le contexte de l'activité syndicale légitime.
- Le sous-secrétaire a conclu en déclarant que le mandat du groupe de travail englobait les violences politiques, et que ce dernier ne se penchait que sur les homicides et non sur les enlèvements ou les cas de harcèlement. Sur les 39 assassinats liés au travail, 20 ont fait l'objet d'une enquête, 16 ont été classés, et des condamnations ont été prononcées dans deux cas. Le cas soumis à l'enquête a posé problème en raison de l'absence de témoins. Le sous-secrétaire a assuré que le Programme de protection des témoins n'avait pas perdu un seul témoin, bien qu'il couvre actuellement 450 personnes dans un large éventail de dossiers d'assassinats et de trafic de drogue.
- Les quatre agences gouvernementales présentes à la réunion ont remis une présentation PowerPoint (dont acte) décrivant le statut individuel des cas présumés de meurtres, d'enlèvements et de harcèlement en suspens.
- Rencontre avec le Président de la Cour suprême,
- M. Reynato S. Puno, et avec le Président
- de la Cour d'appel, M. Vasquez
- La mission a présenté son mandat et ses objectifs. Elle avait noté le recours fréquent au pouvoir judiciaire dans les litiges professionnels. Un des cas impliquant un arrêt de la Cour suprême est malheureusement maintenant devant le CLS. La mission a souligné que le CLS respecte le système judiciaire national quand il estime qu'il existe une justice indépendante et opérationnelle, mais que son travail consiste aussi à rappeler les principes directeurs internationaux.
- M. Puno a signalé qu'il ne pouvait pas discuter de cas en instance devant la Cour suprême ou la Cour d'appel. Il a souligné que, bien que les organes de contrôle pourraient être en désaccord avec une ou deux décisions, ces décisions ont dans l'ensemble été acceptées par les travailleurs. La justice a statué sur des milliers de cas issus de procédures de règlement de litiges professionnels. Il n'y a pas de statistiques spécifiques mais toutes les juridictions (tribunaux du travail, cours d'appel et Cour suprême) conservent des archives, et copies des décisions peuvent être facilement obtenues.
- Sur la question de savoir si la Cour suprême pourrait se référer aux conventions internationales, M. Puno a précisé que la Cour suprême suivait essentiellement la Constitution, mais que le droit international est dûment pris en considération et progressivement mis en œuvre par l'interprétation. Les cas d'interprétation sont disponibles sur l'Internet et les tribunaux sont libres de les utiliser. M. Puno s'est félicité de l'invitation adressée à la magistrature à participer à des programmes de formation. L'Académie de justice des Philippines est l'organisme chargé de la formation continue des juges et elle peut être approchée par l'intermédiaire de M. Puno.
- M. Puno a parlé de son initiative proactive d'organisation du Sommet consultatif national sur les exécutions extrajudiciaires en juin 2007 (Note 4). Il a expliqué que la protection des droits de l'homme est une grande priorité pour lui. La première année, il s'est concentré sur le premier ensemble de droits, à savoir les droits civils et politiques, et a passé quelque temps à réfléchir sur la manière dont la justice pouvait offrir une réponse appropriée à la situation. En 2007, il a développé la procédure d'amparo (Note 5) et la procédure de habeas data (Note 6). La deuxième année, il s'est tourné vers les droits des pauvres, sa deuxième préoccupation. Il a créé un deuxième forum, le "Forum sur le renforcement de l'accès à la justice: combler les lacunes et lever les obstacles". En 2008, il a lancé le programme "La justice sur roues" (JOW), des salles d'audience mobiles qui se rendent dans les prisons locales et fournissent une assistance juridique gratuite aux prisonniers pauvres impliqués dans une procédure pénale. Le programme JOW a permis de libérer quelque 2 300 prisonniers en deux ans. M. Pulo a également créé le projet pilote du tribunal des petites plaintes, qui a fourni un moyen rapide et peu coûteux de régler les litiges impliquant les pauvres. L'idée de base était d'établir une procédure sommaire pour les litiges portant sur un montant inférieur à 100 000 pesos en matière civile. Arrivé maintenant dans sa troisième année, il se focalise sur sa troisième préoccupation, à savoir un environnement salubre. Il est en train de mettre au point une "procédure de Kalikasan" visant à promouvoir la justice environnementale et à affronter le problème des plaintes déposées contre des militants écologistes. Toutes ces initiatives constituent de bons exemples pour d'autres pays asiatiques.
- En réponse à la question de savoir si la procédure d'amparo pourrait être étendue de sorte à renforcer la protection des droits des travailleurs et à affronter la séparation floue entre les activités syndicales légitimes et les véritables menaces pour la sécurité publique, M. Puno a indiqué qu'il incombait au Congrès de prendre l'initiative d'élaborer un ensemble complet de mesures visant à protéger les droits des personnes.
- M. Puno a estimé que le Programme de protection des témoins (WPP) s'est avéré insuffisant sous certains aspects. La cour examine ce programme sur la base de la procédure d'amparo. Des audiences ont été tenues sur une nouvelle règle d'accréditation des institutions privées en tant que fournisseurs d'abri aux familles et aux témoins (Note 7), et on espérait que la mesure pourra être adoptée avant la fin de l'année. La Cour suprême travaille avec la Commission des droits de l'homme à cet égard.
- La mission a soulevé la question des travailleurs, en particulier de la fonction publique, qui n'ont pas été réintégrés car les décisions de réintégration ont été suspendues par le recours en appel, et des effets souvent dévastateurs sur leur vie car ils doivent souvent attendre le jugement définitif pendant de nombreuses années. M. Puno a déclaré que, en principe, un titre exécutoire est valable s'il n'y a pas d'ordonnance restrictive temporaire (TRO). Au cours des deux dernières années, des TRO n'ont été délivrées que dans moins de 5 pour cent des cas. En vertu du Code du travail (code applicable au secteur privé), les décisions sont immédiatement exécutoires et les TRO sont exceptionnelles. M. Puno a estimé que, dans de très rares cas, le tribunal est intervenu dans les décisions du NLRC. La Cour suprême a contrôlé l'émission de TRO, en particulier pour éviter les problèmes de discrimination.
- M. Puno a expliqué que des règles ont été établies pour élever les décisions d'un tribunal divisionnaire au banc. Le tribunal en banc n'est normalement préparé qu'à reconsidérer l'interprétation du tribunal divisionnaire si une nouvelle jurisprudence est en cause, si une décision est contraire à l'interprétation d'une autre cour divisionnaire ou s'il y a un impact sur l'industrie. Aucun aspect supplémentaire n'est en principe traité dans l'examen. Cela ne signifie pas qu'une question particulière ne peut pas revenir par le biais d'une nouvelle affaire. Il faut faire attention avec l'interprétation de la liberté d'expression dans le contexte du droit syndical. L'interprétation dans l'affaire Dusit ne concerne pas seulement la coiffure des travailleurs, mais aussi des actes de violence commis par les travailleurs. Cette décision a été confirmée à toutes les instances, y compris par la Cour d'appel. La décision s'articulait sur les violations de la loi et de la convention collective commises par les travailleurs, de sorte que l'aspect particulier de la liberté d'expression pouvait être légalement supprimé. L'OIT ne devait pas craindre une interprétation erronée dans ce domaine, car deux anciens secrétaires au Travail siégent actuellement à la Cour suprême, à savoir MM. Quisumbing et Brion.
- Rencontre avec des membres du Congrès
- Les principaux participants à la réunion étaient:
- - M. Lorenzo R. Tanada III, président de la Commission des droits de l'homme;
- - M. Magtanggol T. Gunigundo, président de la Commission du travail et de l'emploi;
- - Mme Fely D. Parcon, secrétaire de la Commission des droits de l'homme.
- M. Gunigundo a expliqué le fonctionnement du Congrès. Il a abordé la question de la prise de compétence pour l'intérêt national (article 263(g) du Code du travail). Il a souligné qu'une notion prévalait quant à la signification de l'intérêt national et que ce sujet nécessiterait une étude approfondie. Le dernier Congrès (13e Congrès) était sur la bonne voie avec le projet de loi no 1941. Après le renvoi du projet de loi à ce Congrès, la campagne avait commencé autour de la question. Le Congrès actuel n'a pas encore été en mesure de réunir le quorum requis et se trouvait presque toute façon en fin de mandat.
- La mission a souligné que les décisions à prendre étaient sur la table depuis longtemps, et s'est demandé s'il était possible que ce Congrès adopte un amendement. M. Gunigindo a répondu qu'il y avait seulement une petite fenêtre d'opportunité car, à partir de janvier, les membres du Congrès partiraient en campagne en vue des élections à venir. Considérant également qu'après les élections les présidents des commissions pourraient changer, il est impossible de prévoir comment le 15e Congrès se positionnera sur cette question.
- M. Tanada a résumé la longue liste de priorités que le Congrès a dû gérer. Les 13e et 14e Congrès avaient passé beaucoup de temps sur un projet de loi prévoyant l'indemnisation des victimes du régime Marcos. Le Sénat et la Chambre ont adopté une première version, mais il n'a pas encore été remis à l'ordre du jour de la plénière. La Commission des droits de l'homme de la Chambre a tenu 16 audiences et a rédigé un premier rapport sur la question des exécutions extrajudiciaires, et espère publier un rapport avant le 10 décembre. Un projet de loi sur la torture a été adopté par le Congrès et attend désormais la signature présidentielle. Un projet de loi sur les disparitions forcées est arrivé à la plénière après avoir été adopté par la Chambre et le Sénat. Ensuite, il y a un projet de loi controversé visant à renforcer la Commission des droits de l'homme (CHR). Les Philippines ont prévu cette commission dans la Constitution de 1987 et sont le seul pays dans ce cas. Le projet de loi prévoit des mesures telles que le renforcement du droit de visite de la commission dans les centres de détention, ou un pouvoir résiduel de poursuite. Les nouveaux pouvoirs de poursuite ont fait l'objet d'une controverse. En vertu des nouvelles règles, la CHR peut recommander officiellement au gouvernement d'engager des poursuites et demander de rejeter une recommandation ou d'agir sur la base de celle-ci. Si le gouvernement n'agit pas, la CHR procède à une enquête préliminaire elle-même et envoie les résultats. Si le gouvernement persiste dans son inaction, la CHR se substitue au procureur. La protection des témoins, qui n'était plus gérée par le ministère de la Justice (DOJ), a également été incluse dans le projet de loi. Les témoins pourraient choisir la protection soit du DOJ, soit de la CHR. Les projets de loi sur les disparitions forcées et sur la CHR avaient une bonne chance d'être adoptés par le 14e Congrès. Le projet de loi sur les déplacements internes devra probablement être déposé à nouveau. Les forces de sécurité n'ont pas admis que des faits tels que des disparitions forcées se produisaient. Le DOJ n'a pas été en mesure de poursuivre chaque cas, et c'est la CHR qui a reçu la majorité des plaintes. Il s'est avéré qu'il n'y avait pas de confiance suffisante en le DOJ.
- La mission s'est enquise des autres projets de loi qui auraient pu répondre à nombre de questions en suspens. M. Gunigundo a présenté un tableau montrant cinq projets de loi sur la prise de compétence. Il a expliqué qu'il était le seul membre de la majorité à avoir rédigé le projet de loi no 2112, et que les autres auteurs appartenaient au bras politique du KMU. Il a reconnu que le Code du travail de 1974 nécessitait de nombreuses retouches, mais il est difficile de le réécrire entièrement. Une révision au coup par coup est concevable, mais d'autres projets de loi ont jusqu'à présent bénéficié de la priorité, notamment ceux sur la promotion de l'emploi des étudiants, sur la fiscalité des salariés, et sur les lieux d'allaitement. M. Gunigundo a estimé que, bien que de nombreux syndicats aient mis en question la prise de compétence devant la Cour suprême, le présent secrétaire du Travail recourait prudemment à l'arbitrage obligatoire.
- M. Gunigundo a expliqué, au sujet de l'utilisation abusive de la contractualisation, que la commission de la Chambre avait adopté le projet de loi no 6532 (Note 8), qui a été transmis à la Commission des règles. Le projet de loi porte le nombre de travailleurs occasionnels et contractuels qu'une entreprise peut embaucher de 10 à 20 pour cent, mais fixerait encore une limite légale. Le projet de loi a suscité une forte opposition des chambres de commerce étrangères (Note 9). Le lobbying s'explique probablement par l'absence d'un contre-projet de loi au Sénat.
- Les deux membres du Congrès se sont réjouis de l'offre d'assistance technique et de sensibilisation aux questions liées à la liberté syndicale.
- Rencontre avec la Commission des droits de l'homme des Philippines
- La commission était représentée par:
- - Mme Leila M. De Lima, présidente;
- - M. Jose Manuel Mamanag, commissaire;
- - Mme Jessica Gambol Schuck, avocate;
- - M. Dennis Mosquer, avocat;
- - M. Robert Alcantara, avocat.
- La présidente a expliqué le mandat de la commission. Le mandat des quatre commissaires et de la présidente expire en 2015. Le mandat principal de la CHRP couvre les droits civils et politiques. La CHRP suit les droits de l'homme tels que définis par les traités internationaux en la matière, dont neuf ont été ratifiés par les Philippines. La commission s'est engagée dans la défense des droits de l'homme et organise des formations sur ce sujet, notamment pour les forces de sécurité, en collaboration avec les ONG et la société civile. Elle a recommandé des mesures législatives au Congrès. La CHRP possède un droit de visite illimité (pas d'autorisation ni d'avis préalable nécessaire) à l'intérieur même de la juridiction de la police et des forces armées. La CHRP s'est vu refuser l'accès dans quelques cas, mais il règne généralement une bonne entente avec la police, et la CHRP a bénéficié de la coopération des AFP. La CHRP a un mandat consultatif auprès du gouvernement sur toutes les questions, telles que la militarisation ou des plans d'annuler le domaine ancestral de Mindanao.
- La présidente ne possède que des pouvoirs de nomination, mais la CHRP est totalement indépendante et conforme aux Principes de Paris (statut A) (Note 10). Elle a pu présenter des rapports parallèles indépendants aux organes de contrôle des traités des Nations Unies. Elle doit être distinguée du Comité présidentiel des droits de l'homme (PHRC), qui a été créé par un décret exécutif du Président. La CHRP repose sur le PHRC en sa capacité de promotion et a aidé à la formulation des plans d'actions nationaux sur les droits de l'homme. Elle emploie 680 personnes à travers le pays, dont 20-25 à Manille. Elle peut même demander une expertise médico-légale dans le cadre de ses pouvoirs d'investigation.
- Le projet de charte cherche à conférer à la commission des pouvoirs d'enquête plus étendus. La commission serait dotée d'un programme distinct de protection des témoins, parce que trop peu d'affaires ont débouché sur des poursuites et des condamnations en raison du manque de témoins. La charte fournirait les moyens nécessaires pour gérer des hébergements sécurisés des témoins. La CHRP devrait également être dotée de pouvoirs de poursuite, en raison du nombre anormalement bas de poursuites. Normalement, seul le DOJ ou le médiateur de l'armée possèdent de tels pouvoirs. Philip Alston était opposé à ces pouvoirs parce que la commission perdrait de son indépendance, et parce que le cumul des fonctions de défenseur des droits de l'homme et de procureur pourrait provoquer un problème de respect des droits des accusés. Le compromis a consisté à n'accorder à la CHRP que des pouvoirs résiduels, ce qui laisse au DOJ et au médiateur la possibilité de prendre l'initiative dans la procédure judiciaire, et de n'activer les pouvoirs de la commission que si aucune mesure n'est prise dans un délai de quatre-vingt-dix jours.
- Par rapport aux records de 2006-07, les assassinats extrajudiciaires ont diminué à la suite de la visite de Philip Alston, mais ils ont de nouveau augmenté, même si bon nombre sont liés à l'insurrection. Les AFP ont reçu des instructions pour écraser l'insurrection en 2010. Mindanao est exposée à des atteintes permanentes aux droits des peuples autochtones. Dans les régions où les communistes avaient organisé un cabinet fantôme et où l'exploitation minière était sécurisée par l'armée, les populations autochtones ont souvent été prises dans des tirs croisés.
- Les résultats enregistrés par le gouvernement en matière d'éducation aux droits de l'homme et de formation semblent corrects. En matière de protection toutefois, les progrès ne sont pas évidents au niveau des assassinats extrajudiciaires, des arrestations arbitraires et des détentions illégales, la plupart des auteurs venant des rangs des autorités. Les AFP ont maintenu des listes d'"ordre de bataille" reprenant des syndicalistes et des dirigeants religieux. Cela a été souvent nié et la pratique effective dépendait du commandant en charge, mais elle a également été reconnue par un général dans des affaires récentes.
- La CHRP a estimé que le gouvernement menait une guerre de propagande, mettant les travailleurs dans le camp des communistes et tirant une ligne entre le travail et les questions de sécurité. La CHRP a non seulement rappelé les principes relatifs aux droits de l'homme, mais aussi apporté une aide dans l'examen des questions liées au travail. Les méthodes musclées des AFP ont souvent fait déraper le contrôle de la situation sécuritaire vers les exécutions extrajudiciaires.
- La compétence principale dans les cas liés au travail revient au DOLE, et la CHRP a transmis ces cas au DOLE ou proposé des résolutions sur une base consultative. Elle a enquêté et émis des résolutions catégoriques dans les cas d'exécutions extrajudiciaires, mais même ceux-ci ont été classés faute de témoins. Dans le secteur minier, la CHRP a reçu des plaintes selon lesquelles les dirigeants sollicitaient la coopération de la police ou des forces armées pour sécuriser la zone d'opération.
- Certaines plaintes ont fait apparaître qu'aux Philippines également des entreprises locales et multinationales violaient les droits de l'homme et que les insurgés prélevaient un "impôt révolutionnaire".
- Le gouvernement a toujours été mal à l'aise avec les conclusions de la CHRP, même s'il n'a jamais reçu de commentaires négatifs de la part du Président. Le précédent secrétaire à la Justice a parfois été dédaigneux, tout comme un grand nombre d'officiers moyens qui voient en la CHRP une pierre d'achoppement.
- La CHRP a reçu des plaintes de personnes sommées de suivre une formation militaire (ou des séances d'endoctrinement). Certaines se sont plaintes du comportement des AFP, qui surveillaient les opinions individuelles, et des villageois se sont plaints d'avoir été contraints de rejoindre des groupes paramilitaires.
- La CHRP est en train de finaliser ses "règles de procédures omnibus" et de les collationner avec la "loi antipaperasserie". Jusqu'à présent, il y avait un délai obligatoire pendant lequel une plainte devait recevoir une réponse. Dans la pratique, les enquêtes prenaient seulement un mois, et la rédaction de la résolution un peu plus longtemps. En fonction de la quantité d'informations à examiner, certains cas ont duré de quelques mois à plus d'un an. Les nouvelles règles imposeraient un traitement en moins d'un an.
- La CHRP a recommandé en particulier un suivi plus ciblé des enquêtes menées par tous les organes, y compris le Groupe de travail 211 et le Bureau national d'enquête; l'évaluation et la hiérarchisation des initiatives législatives en instance en matière de droits des travailleurs; et le soutien à l'adoption immédiate de la nouvelle charte de la CHRP.
- Rencontre avec des membres de la Commission
- de la fonction publique et du Conseil de gestion
- du travail dans le secteur public (PSLMC)
- La CSC a été décrite comme un organisme quasi judiciaire chargé de prendre des décisions sur les nominations et de juger des actes administratifs. Le PSLMC est un organe bipartite réunissant non seulement des fonctionnaires de divers ministères, mais aussi des représentants des syndicats des travailleurs des collectivités locales. Il examine des milliers d'affaires afin de rendre des décisions au plus tard un an à compter de l'appel. Il a été indiqué que la CSC ne peut rien faire si ses décisions ne sont pas appliquées, sauf dans le cas où une TRO a été émise. Le président de la CSC n'a pas été en mesure de discuter des détails des décisions dans l'affaire PSLINK et de leur application, notamment parce que sa nomination, qui remonte à plus d'un an et en vertu de laquelle il avait agi, vient d'être rejetée par le Congrès.
- IV. Conclusions et recommandations
- En premier lieu, la mission souhaite exprimer sa profonde gratitude au gouvernement pour avoir facilité les rencontres avec tous les départements et institutions compétents et avec les parties concernées par les plaintes en instance. Les efforts déployés à cet égard sont essentiels à la réussite de la mission. La mission a été impressionnée par la quantité de documents et d'informations reçus de toutes les parties et par la démonstration d'un désir sincère d'être pleinement entendu et de faire part de son point de vue de manière mature et engagée.
- La mission a relevé que les questions soulevées en ce qui concerne la liberté syndicale pouvaient être classées en deux grandes catégories: 1) celles liées à la violence, à l'intimidation, aux menaces et au harcèlement de syndicalistes et à l'absence de condamnations pour ces crimes; et 2) les obstacles à l'exercice effectif dans la pratique des droits syndicaux.
- Violence contre les syndicalistes
- En ce qui concerne la violence contre les syndicalistes, la mission a noté que de nombreux efforts ont été faits par le gouvernement pour renforcer les structures existantes et en créer de nouvelles, afin de donner suite aux plaintes en vue de condamner les coupables. Bien qu'il reste d'importantes divergences d'opinion quant à l'étendue des violences et à leurs liens avec le syndicalisme, la mission a été impressionnée par les nombreuses personnes qui ont parcouru de longues distances pour parler de leur cas, les liens pertinents avec leurs activités syndicales et le manque de mesures prises dans ces affaires. Certaines de ces réunions ont eu lieu dans des endroits tenus secrets parce que les témoins craignaient pour leur sécurité.
- Ces affaires ont été transmises au gouvernement en tant que nouvelles allégations et informations supplémentaires dans le cadre de la plainte pour violence contre des syndicalistes déposée par le KMU, et seront examinées par le Comité de la liberté syndicale en mars 2010. En attendant, la mission de haut niveau a recommandé au gouvernement, compte tenu de la gravité des informations fournies et des allégations, de mettre en place une structure tripartite pour examiner chacune des allégations et permettre une détermination commune des liens avec le syndicalisme, et d'accélérer et de surveiller les mesures de suivi.
- A l'heure actuelle, les progrès dans la poursuite et la condamnation des auteurs de violences contre les syndicalistes restent tout à fait insuffisants. Si le Groupe de travail 211 a fourni de nombreuses informations sur le statut de ces cas, on n'enregistre généralement pas de progrès réels dans les condamnations. Chaque cas doit être soigneusement examiné, même en l'absence d'un dépôt formel de charges, et une protection appropriée doit être offerte aux témoins, afin que ces cas puissent aller de l'avant. Les enquêtes doivent se concentrer non seulement sur les auteurs, mais également sur les instigateurs intellectuels, afin que la vraie justice prévale et pour prévenir de manière significative toute violence future contre des syndicalistes. Si le gouvernement a montré que même l'armée n'est pas à l'abri de poursuites à la suite de l'arrestation récente d'un soldat de première classe pour huit exécutions extrajudiciaires, il est crucial que la responsabilité dans la chaîne de commandement soit dûment déterminée lorsque des crimes sont commis par des militaires ou la police, afin que des instructions appropriées puissent être données à tous les niveaux et que les personnes chargées du contrôle soient tenues responsables, afin de prévenir efficacement que de tels actes ne se reproduisent.
- Au-delà de la question de la violence directe, la mission a entendu des récits d'intimidation de la part des forces armées, qui doivent être examinées et corrigées. Dans le cadre de la campagne anti-insurrectionnelle, les forces armées auraient pris dans certaines zones, en particulier dans les zones économiques spéciales, l'initiative d'inviter les travailleurs à des forums communautaires d'éducation des travailleurs à l'exercice de leur droit d'organisation. De nombreux travailleurs ont estimé que cela constituait une menace particulièrement grave et un avertissement à ne pas adhérer à certains syndicats que l'armée n'apprécie pas. La tenue de ces réunions communautaires n'a pas été niée par les forces armées, mais les officiers que la mission a rencontrés ont aussi admis leur manque d'expérience ou de connaissances en matière de droits syndicaux et se sont réjouis de pouvoir suivre une formation sur ce sujet. Une telle formation pourrait également aider les forces de l'ordre à mieux comprendre les limites de leur rôle, et leur prodiguer des conseils en matière de droits syndicaux et de garantie de l'exercice plein et légitime par les travailleurs de ces droits dans un climat exempt de peur. La mission a proposé un programme combiné sur les droits de l'homme, les droits syndicaux et les libertés civiles pour les forces de l'ordre, qui pourrait être réalisé en collaboration avec la Commission des droits de l'homme des Philippines (CHRP). Les directives communes sur la conduite du personnel de la PNP, des gardes de sécurité privés et des gardes d'entreprises lors des grèves, lock-out et conflits professionnels en général nécessitent peut-être une mise à jour elles aussi.
- Les institutions publiques compétentes pour la lutte contre l'impunité doivent continuer à être renforcées. La proposition de charte de la CHRP semble aller dans la bonne direction car elle renforcerait les pouvoirs de cet organe de répondre aux plaintes individuelles et lui donnerait la capacité de protéger les témoins. Comme le programme actuel de protection des témoins ne répond pas aux attentes des personnes rencontrées par la mission, un système alternatif pourrait constituer une option valable. L'existence d'une commission indépendante des droits de l'homme consacrée par la Constitution est un formidable atout dans le pays, et la mission recommande que la proposition législative de lui conférer des pouvoirs légaux soit soutenue par le gouvernement et expédiée par le Congrès avant la fin de ses travaux.
- Obstacles à l'exercice effectif des droits syndicaux
- La mission a entendu de nombreuses histoires d'entraves et d'obstacles au plein exercice de la liberté syndicale. Les syndicats ont présenté diverses situations où ils avaient été dans l'impossibilité d'exercer leurs droits pendant des décennies et où les avancées dans ce domaine étaient rares et espacées. En particulier, les syndicats ont dressé un tableau où les droits syndicaux sont rarement respectés par l'employeur qui préfère un lieu de travail libre de toute présence syndicale ou dans lequel les syndicats sont soumis. Là où des syndicats indépendants existent, la négociation collective est difficile et les grèves finissent généralement entre les mains du secrétaire du Travail dans le cadre de l'exercice de prise de compétence visée à l'article 263(g) du Code du travail.
- La mission a toutefois également appris que de nombreux efforts étaient déployés par les autorités compétentes, y compris le DOLE, la CSC, le PSLMC, le NMCB et la PEZA, pour aider à résoudre les litiges sur une base volontaire et défendre les droits des travailleurs en cas de discrimination antisyndicale ou d'ingérence. La mission a été informée que le Secrétaire du travail et de l'emploi s'efforçait ces derniers temps d'éviter l'usage de ses pouvoirs en vertu de l'article 263(g). Néanmoins, il est apparu que, malgré la bonne volonté des parties chargées d'appliquer la loi, les décisions prises ont été régulièrement portées en appel et que de batailles juridiques longues s'ensuivent, avec des appels successifs jusqu'à la Cour suprême qui, dans certains cas, émet un jugement sur l'opportunité d'un détail dans l'application de la loi qu'il aurait été préférable de laisser à la discrétion de l'autorité d'exécution. Au fil des années, cela semble avoir débouché sur une certaine jurisprudence dans le domaine du droit du travail, que beaucoup estiment compliquée et impossible à appliquer correctement.
- De nombreuses plaintes ont été formulées au sujet des difficultés rencontrées dans les tentatives d'organisation dans les zones économiques spéciales, et un des syndicats a donné des informations sur une nouvelle plainte devant le Comité de la liberté syndicale. La mission a toutefois relevé que les lois nationales sont pleinement applicables dans les zones, et le chef de l'autorité de la zone a été catégorique dans l'importance qu'elle attachait au respect des droits syndicaux. En outre, la mission a noté que les syndicats étaient présents dans 63 des 2 000 entreprises des zones économiques spéciales (ce qui représente 2,58 pour cent des travailleurs de ces zones) et que, dans au moins un cas où elle a eu l'occasion de rencontrer les syndicats et la représentation de l'entreprise au plus haut niveau, il semble y avoir une approche sérieuse et respectueuse des relations professionnelles et de la liberté syndicale. La directrice générale de la PEZA et son personnel sont impatients de suivre une formation complémentaire dans le domaine de la liberté syndicale, afin de garantir au mieux le plein respect du Code du travail et des principes internationaux pertinents.
- La mission se félicite de l'intérêt et de l'enthousiasme de tous ceux qui se sont réunis pour en apprendre davantage sur les normes internationales du travail et les principes élaborés dans le domaine de la liberté syndicale, et invite le Bureau à aider le gouvernement dans l'élaboration d'un programme approprié de formation continue et de coopération technique dans ce domaine. Les partenaires sociaux ont également exprimé leur intérêt et pourraient bénéficier non seulement d'ateliers de sensibilisation sur leurs droits, mais aussi d'activités de renforcement des capacités de s'engager les uns avec les autres à développer des relations professionnelles solides et harmonieuses à tous les niveaux.
- En ce qui concerne les cas spécifiques encore en instance, les informations recueillies seront transmises au Comité de la liberté syndicale en vue d'une évaluation en mars 2010. Dans les cas où le comité avait déjà tiré ses conclusions, formulé des recommandations et demandé au gouvernement de prendre les mesures appropriées, la mission observe que les parties se trouvent dans une impasse depuis de nombreuses années et sont incapables de trouver une solution. Dans certains de ces cas, cela a signifié pour certains travailleurs la perte de leurs moyens de subsistance depuis des années, au fil des appels successifs interjetés contre les décisions de réintégration. L'impact sur ces personnes et leurs familles est énorme et pénible. Dans d'autres cas, les tentatives visant à certifier les syndicats ont été systématiquement bloquées ou fait l'objet d'un appel, des scrutins organisés malgré l'absence de solution des questions originelles. La mission a exhorté le gouvernement à étudier ces cas à la lumière des recommandations du Comité de la liberté syndicale et à chercher des façons inventives de résoudre de manière satisfaisante ces affaires de longue date.
- La mission a été impressionnée par la qualité et le dévouement de tant de personnes dans leurs divers rôles et responsabilités et leur volonté sincère de faire progresser le pays d'une manière constructive et engagée. Elle s'engage à accompagner le gouvernement et les partenaires sociaux de toutes les façons possibles et est convaincue que, si les assurances données sont effectivement suivies de faits, des progrès importants seront accomplis pour assurer une plus grande application de la convention no 87 dans la théorie et la pratique aux Philippines.
- V. Remerciements
- La mission souhaite exprimer aux autorités philippines sa profonde gratitude pour la coopération reçue dans l'accomplissement de son mandat. Toutes les réunions prévues ont pu avoir lieu à temps, malgré les délais très serrés et les demandes supplémentaires à l'égard des fonctionnaires à la suite de la tempête tropicale qui a frappé Manille le 26 septembre. La mission exprime également sa profonde gratitude pour tous les arrangements et les préparatifs effectués par le BSR de Manille, qui étaient essentiels à sa réussite. A cet égard, elle souhaite remercier en particulier la directrice Linda Wirth et l'assistante principale de programme Diane Respall.