Afficher en : Anglais - Espagnol
- 592. La plainte figure dans une communication présentée conjointement le 25 mai 2007 par l’Internationale de l’Education (IE) et son organisation membre, le Syndicat des enseignants coréens et des travailleurs de l’éducation (KTU). Les organisations plaignantes ont soumis des informations complémentaires dans une communication en date du 10 mars 2008.
- 593. Le gouvernement a envoyé ses observations dans deux communications en date du 23 mai et du 20 août 2008.
- 594. La République de Corée n’a ratifié ni la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Elle a ratifié la convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 595. Dans une communication en date du 25 mai 2007, l’IE et le KTU allèguent que le gouvernement continue de refuser les occasions de dialogue constructif avec le KTU au sujet d’une nouvelle politique de l’éducation; et de violer leurs droits syndicaux par l’interdiction du droit de réunion, le déni du droit de grève et la violation de la liberté d’expression.
- Absence de dialogue social avec le KTU
- au sujet d’une réforme de l’éducation
- 596. Dans leur communication du 25 mai 2007, l’IE et le KTU allèguent que le gouvernement a refusé d’impliquer les enseignants et leurs organisations professionnelles représentatives dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un système d’évaluation des enseignants. Selon les organisations plaignantes, le gouvernement a refusé non seulement la négociation collective mais aussi les occasions d’engager un dialogue constructif avec le KTU avant l’instauration d’une importante nouvelle politique de l’éducation. Environ 230 000 enseignants – sur les 400 000 qui travaillent en République de Corée – ont refusé la nouvelle politique en 2005. En réponse à cette opposition, le ministère de l’Education et du Développement des ressources humaines (MOEHRD) a convenu le 20 juin 2005 d’organiser un «Conseil spécial pour l’élévation de la qualité éducative des écoles» avec la participation de représentants du ministère ainsi que de trois organisations d’enseignants (dont le KTU) et d’associations de parents. L’accord comprenait l’engagement du MOEHRD à ne pas instaurer un système d’évaluation en recourant à la sélection d’écoles modèles. Mais, en dépit de l’accord, le MOEHRD a tenu le 20 octobre 2005 une conférence de presse pour annoncer la mise en œuvre du système d’évaluation des enseignants, et ce sans tenir compte du résultat du débat public qui devait se tenir plus tard dans la même journée. Enfin, le MOEHRD a mis unilatéralement en œuvre le système d’évaluation des enseignants le 4 novembre 2005.
- 597. Plus récemment, en février 2007, sans autre communication avec des organisations d’enseignants, un avant-projet de loi pour procéder à une évaluation des enseignants en 2008 a été soumis à une session extraordinaire de l’Assemblée nationale. Bien qu’un certain nombre de partis politiques n’aient pas soutenu l’avant-projet de législation, le 13 avril 2007, le MOEHRD l’a de nouveau soumis, sans modification et sans consultation avec les associations d’enseignants, à une séance publique de la Commission de l’éducation de l’Assemblée nationale. En juin 2007, l’Assemblée nationale a commencé à délibérer sur la modification de la loi sur les syndicats d’enseignants. Cette modification met l’accent sur la répartition du pouvoir de négociation collective entre de multiples syndicats d’enseignants, de manière qu’ils puissent regrouper leurs sujets de négociation. A l’heure actuelle, le KTU se voit refuser le droit de négocier avec le MOEHRD.
- Interdiction du droit de réunion
- et non-reconnaissance du droit de grève
- 598. Le 20 octobre 2005, des centaines de membres du KTU ont protesté contre la décision gouvernementale d’imposer de manière unilatérale le système d’évaluation des enseignants. Le MOEHRD a mobilisé des brigades de policiers pour emmener les manifestants dans les postes de police. Trois représentants d’enseignants ont été arrêtés et maintenus quatre mois en détention.
- 599. En mars 2006, le KTU a élu de nouveaux dirigeants et a continué à protester contre le système d’évaluation des enseignants. N’ayant pas réussi à instaurer un dialogue constructif avec le MOEHRD, le KTU a décidé de profiter de la disposition relative au congé annuel des enseignants pour appeler à une manifestation de protestation le 22 novembre 2006. Environ 3 000 enseignants sud-coréens ont alors pris leur congé et réaménagé leurs horaires de classe pour se joindre au rassemblement syndical à l’extérieur du bâtiment du ministère. Les organisations plaignantes affirment que, le 21 novembre 2006, à la veille du rassemblement, le MOEHRD a donné aux directeurs d’école instruction de refuser les demandes de congé annuel des enseignants ou les demandes de quitter l’école plus tôt qu’à l’accoutumée, restreignant ainsi le droit de réunion et la liberté d’expression collective des enseignants.
- 600. Alors que la loi sur les syndicats d’enseignants garantit le droit syndical et que la loi sur les syndicats de travailleurs autorise la tenue de réunions et de rassemblements, la loi sur les syndicats d’enseignants interdit le droit de grève. Dès lors, en vertu de la loi, les syndicats doivent présenter leurs revendications par d’autres moyens. L’article 15, point 4, de la Réglementation sur les fonctionnaires du service public précise que «les organisations administratives devront autoriser le congé annuel tant qu’une telle demande n’entrave pas sérieusement l’exercice du service public». Quitter l’école plus tôt qu’à l’accoutumée ou prendre son congé annuel pour participer à un rassemblement syndical est donc admissible aux termes de la loi sur les syndicats d’enseignants car, lorsque de tels actes n’entravent pas le fonctionnement normal d’une école, ils ne peuvent être considérés comme un acte de grève. Les organisations plaignantes déclarent qu’il n’y a eu en l’espèce aucune entrave à l’exercice du service public concerné, car les enseignants qui ont demandé un congé se sont fait remplacer par leurs collègues afin d’éviter de perturber le processus d’apprentissage des élèves. Les organisations plaignantes allèguent par ailleurs que des directeurs d’école ont fait obstruction aux accords d’échange de classes conclus entre enseignants.
- 601. Finalement, les demandes de congé soumises par des enseignants ont été refusées conformément aux instructions du MOEHRD susmentionnées, selon lesquelles:
- a) les directeurs d’école devront prendre la responsabilité de mettre activement en place des «activités préventives», telles que la persuasion, pour contrer les enseignants qui pourraient participer à un rassemblement;
- b) les directeurs d’école devront refuser les demandes de congé annuel ou de quitter l’école plus tôt qu’à l’accoutumée soumises par des enseignants dans le but de participer à un rassemblement (les directeurs qui l’autoriseront sans motifs valables seront sévèrement punis);
- c) les directeurs d’école devront activement propager l’idée que les actions collectives sont illégales;
- d) les directeurs d’école devront dresser des listes d’enseignants participant à la «manifestation de congé annuel» dans l’intention d’imposer des «mesures ultérieures»;
- e) les directeurs d’école devront envoyer par la poste la lettre du MOEHRD aux enseignants.
- La lettre du MOEHRD décrit la «manifestation de congé annuel» du KTU comme étant une «conduite collective illégale contraire à la Réglementation sur les fonctionnaires du service public»; et elle déclare que «le ministre punira sévèrement les participants à ce rassemblement, quel que soit leur degré de participation».
- 602. Le 21 novembre 2006, le MOEHRD a publié un communiqué de presse déclarant que «la manifestation était une conduite collective illégale et un vestige d’autoritarisme empiétant sur le droit d’apprendre des élèves». Le MOEHRD et les directeurs des Bureaux métropolitains de l’éducation de Séoul et Busan ont adressé un appel au KTU soulignant qu’«il n’est pas pédagogique que des enseignants s’engagent dans des actions collectives en dehors de l’école».
- 603. Dans leur communication en date du 20 mai 2007, l’IE et le KTU allèguent d’autre part que, à la suite du rassemblement du 22 novembre 2006, le MOEHRD a annoncé qu’il prendrait des mesures disciplinaires à l’encontre des enseignants en fonction de la fréquence de leur participation à des absences sur leurs congés annuels ou de leurs sorties d’école plus tôt qu’à l’accoutumée dans l’objectif de se joindre à des manifestations syndicales depuis 2000. Le ministère a explicitement déclaré que les enseignants ayant assisté de manière répétée à des manifestations de congé annuel avaient été répertoriés pour faire l’objet de mesures disciplinaires plus sévères, telles que des réductions de salaire. Le MOEHRD a envoyé des lettres d’avertissement aux 1 856 participants à trois rassemblements ou moins depuis l’année 2000 (y compris à la manifestation de 2006) et a pris des sanctions disciplinaires à l’encontre de 436 enseignants qui avaient participé à quatre rassemblements ou plus au cours de la même période. Sur les 436 enseignants sanctionnés, six ont fait l’objet de retenues de un à trois mois de salaire, 198 ont perdu leur prime annuelle et ont été désavantagés dans leur augmentation de salaire régulière, 156 ont été sanctionnés par d’autres désavantages et changements, et 76 ont reçu des lettres d’avertissement. Ces mesures disciplinaires ont été imposées en dépit de la ratification par le gouvernement de la convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et en dépit de la loi sur les fonctionnaires qui dispose qu’une demande de sanction disciplinaire ne peut être faite au-delà de deux ans après la survenue du motif de sanction.
- 604. Lorsque les commissions disciplinaires des bureaux de l’éducation du district se sont réunies le 25 janvier 2007, les 436 enseignants se sont vu restreindre leur droit de répondre aux accusations puisque trois minutes seulement leur ont été accordées pour donner leur réponse, alors que l’article 9 de l’ordonnance sur les sanctions disciplinaires du personnel et des cadres de l’éducation publique dispose qu’«une personne soupçonnée devra avoir une possibilité de donner des explications suffisantes» et qu’«une décision de sanction disciplinaire ne donnant aucune chance de s’expliquer devient dénuée de validité». En février 2007, les enseignants sanctionnés par des réductions de salaire ont invoqué l’invalidité des procédures disciplinaires auprès de la Commission de recours du MOEHRD, qui prévoyait d’examiner ces requêtes en mai 2007.
- 605. Dans leur communication ultérieure en date du 10 mars 2008, les organisations plaignantes indiquent que 415 enseignants ont été sanctionnés en mai 2007. Le KTU a connaissance des sanctions imposées à 248 enseignants: six d’entre eux ont vu leur salaire réduit; 204 ont été pénalisés dans leurs augmentations annuelles de salaire; 69 ont fait l’objet d’avertissements et de divers désavantages; et 136 ont reçu des avertissements. Sur les requêtes de 271 enseignants demandant l’annulation de la sanction, trois seulement ont été acceptées par le gouvernement qui, après un nouvel examen, a réduit les sanctions disciplinaires initiales de 47 cas, rejetant 198 autres cas.
- 606. Dans leur communication du 10 mars 2008, les organisations plaignantes allèguent de plus que, suite à l’élection présidentielle du 19 décembre 2007, les bureaux provinciaux de l’éducation de plusieurs provinces ont tenté de faire sortir de force de leurs écoles 125 enseignants sanctionnés entre la fin décembre 2007 et la mi-janvier 2008. Le KTU a réussi à les protéger.
- Violation de la liberté d’expression
- 607. Le 18 janvier 2007, deux enseignants de collège membres du KTU ont été arrêtés pour avoir prétendument violé la loi sur la sécurité nationale. Ces accusations, qui peuvent être passibles de la peine de mort, sont liées à des affiches et à des informations sur la politique nord-coréenne que les enseignants ont téléchargées sur l’Internet. Les syndicats font valoir que ces deux enseignants ont par le passé été félicités pour leur contribution à la pédagogie de la paix et que les informations téléchargées sont facilement accessibles à partir d’autres sources publiques. Les deux enseignants ont par la suite été relâchés sous caution et sont toujours en attente de la date de leur procès. Les organisations plaignantes soutiennent que ces arrestations ont constitué une violation de la liberté d’expression des enseignants.
- 608. Dans leur communication du 10 mars 2008, les organisations plaignantes présentent également l’allégation selon laquelle, le 29 janvier 2008, la police a arrêté M. Kim Hyeong-geun, membre du comité de réunification du KTU, qui a fait des recherches sur l’idéologie et les politiques nord-coréennes en vue de favoriser la pédagogie de la paix et la compréhension mutuelle entre les élèves sud et nord-coréens. Il a été accusé de violation de la loi sur la sécurité nationale et placé en détention dans une prison de Séoul après que le tribunal eut refusé de réexaminer la question de la légalité de son emprisonnement. Avant son arrestation, en avril 2007, la police avait perquisitionné le domicile de M. Kim, mais il n’avait à l’époque fait l’objet d’aucune accusation. Le 24 février 2008, la police a également perquisitionné le domicile et le bureau de Mme Choi Bokyong, qui avait favorisé la pédagogie de la paix dans sa classe et dans les programmes éducatifs du syndicat.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 609. Dans ses communications du 23 mai et du 20 août 2008, le gouvernement déclare que les allégations avancées dans le présent cas concernent le système d’évaluation des enseignants requis par le gouvernement. Il conteste les allégations des organisations plaignantes relatives à l’absence de dialogue social et à des tentatives de restriction des activités légales des syndicats d’enseignants pendant l’élaboration et la mise en œuvre du système. Il considère que ces allégations ne correspondent pas du tout aux faits et sont sans rapport avec les principes de la liberté syndicale.
- 610. Concernant l’allégation d’absence de dialogue social avec les associations d’enseignants sur la réforme de l’éducation, le gouvernement explique que l’un des avantages majeurs du système éducatif en République de Corée est que les enseignants peuvent s’engager dans des activités pédagogiques avec la sécurité de l’emploi car l’âge de leur retraite, leur salaire et leur statut sont pleinement garantis par la loi. Toutefois, un tel système présente un inconvénient de taille: sans une incitation pour encourager le développement personnel, il ne saurait garantir l’amélioration des compétences professionnelles des enseignants. En 2005, un sondage d’opinion a montré que 83 pour cent de la population sont favorables à un système d’évaluation des enseignants. L’Equipe d’examen de la politique relative au personnel enseignant de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a elle aussi reconnu que le régime du personnel enseignant en République de Corée garantit la stabilité des conditions de travail, des rémunérations, etc., tout en soulignant que le système actuel d’évaluation des performances n’offre pas de dispositif incitant les enseignants à enrichir leurs compétences professionnelles. Elle a donc recommandé d’instaurer un nouveau système d’évaluation des enseignants. Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement coréen a commencé à travailler sur l’instauration d’un nouveau système d’évaluation des enseignants visant à rehausser la confiance dans l’éducation publique par l’incitation des enseignants, dont le statut est garanti, à perfectionner leurs compétences et la qualité de leur enseignement. Le gouvernement fournit des précisions sur les caractéristiques de ce système, qui comprend une évaluation par des pairs de l’école élémentaire et secondaire, des activités en classe et une évaluation sur les conseils pédagogiques et l’orientation des élèves au moyen de sondages réalisés auprès d’élèves et de parents.
- 611. Le gouvernement maintient qu’il a, dans le processus d’instauration du système d’évaluation des enseignants, impliqué différentes parties concernées, notamment les enseignants et leurs organisations représentatives. Selon le gouvernement, ce processus, qui a démarré au cours de l’année 2000, comportait notamment les activités suivantes: sondage de l’opinion publique sur la réforme du système de gestion du personnel enseignant (juillet 2003 - novembre 2004); recueil et audition des avis des enseignants par le biais du cybergroupe consultatif d’enseignants (juin 2004); recherche d’un train de mesures sur la réforme du système d’évaluation des enseignants, comprenant deux débats régionaux et un débat public organisés par trois associations universitaires pour garantir l’implication d’organisations d’enseignants et de groupes de parents dans le processus (août 2004 - février 2005); réunions de consultation avec des organisations d’enseignants (20 réunions entre mai 2004 et mai 2005); création d’un organe consultatif spécial pour discuter de la mise en œuvre du système d’évaluation, composé de sept représentants issus de trois organisations d’enseignants, deux groupes de parents et du gouvernement (juin-mai 2005); recueil et audition des avis sur l’institutionnalisation du système d’évaluation auprès de quatre organisations d’enseignants, dont le KTU (août-septembre 2006); et débat public sur l’orientation de la politique d’évaluation du développement des compétences des enseignants, avec la participation d’organisations d’enseignants, dont le KTU (octobre 2006). Le gouvernement admet que le KTU (qui compte 80 000 adhérents) s’est opposé au système d’évaluation des enseignants, contrairement aux autres parties impliquées dans le processus, telles que la Fédération coréenne des associations d’enseignants (le groupe le plus important d’enseignants professionnels, avec 180 000 adhérents), des groupes de parents et des groupes de citoyens. Le fait que l’opposition du KTU n’était pas prédominante ne vient donc pas en lui-même étayer l’allégation selon laquelle le processus d’instauration du système d’évaluation des enseignants était dépourvu de dialogue entre les parties concernées.
- 612. Dans une récente communication, le gouvernement indique que le projet de loi sur le système d’évaluation des enseignants devait être présenté à l’Assemblée nationale en session plénière en mars 2007, mais il y a eu un accord entre le parti au pouvoir et l’opposition. Le projet de loi a donc été automatiquement supprimé puisqu’il n’a pas fait l’objet de discussions avant février 2008, lors de la clôture de la 17e Assemblée nationale.
- 613. Le gouvernement conteste l’allégation soutenue par le KTU selon laquelle l’organisation se voit privée de toute négociation collective avec le ministère de l’Education. Le gouvernement soutient que, selon la loi sur les syndicats d’enseignants, plusieurs syndicats sont en mesure de mener une négociation collective avec le ministère de l’Education, des Sciences et des Technologies par une seule voie de négociation. Il existe de nombreuses organisations d’enseignants en Corée. Parmi celles-ci, il y a le KFTA, établi en 1947, le KTU, établi en 1999, le Syndicat coréen de l’enseignement et des travailleurs de l’éducation (KUTE), établi en 1999 et qui regroupe environ 2 000 membres, et l’Association coréenne libérale des enseignants (KLTU), établie en 2006 et qui regroupe environ 4 700 membres. En septembre 2005, le KFTA et le KTU ont réussi à établir une seule voie de négociation et ils ont pris part à une discussion en vue de la négociation collective. Ils s’étaient entendus pour négocier en mai 2006. Toutefois, avant la tenue de cette négociation, la KLTU s’est formée et a demandé d’y prendre part. Depuis lors, les trois syndicats n’ont jamais réussi à s’accorder sur une voie de négociation en raison de leur divergence d’opinions. Par conséquent, le processus de la négociation collective a été interrompu temporairement. Il est donc faux d’affirmer que la négociation collective avec le ministère de l’Education, des Sciences et des Technologies avait été refusée.
- 614. Le gouvernement déclare par ailleurs que, dans le cadre des discussions pour déterminer s’il convenait ou non de mettre en œuvre le système d’évaluation des enseignants, le KTU s’est lancé dans une action collective pour saboter le dialogue. Le 20 octobre 2006, trois membres du KTU ont, avec une vingtaine de leurs collègues, pénétré par la force dans le lieu où devait se tenir un débat public sur le système en question et ont occupé le podium et usé de violence pour retirer le micro en scandant des slogans. Ce faisant, ils ont fait obstruction à l’exécution de fonctions officielles. Auparavant, les 14 et 19 juillet 2006, ils avaient organisé sans préavis une manifestation au cours de laquelle ils avaient investi les rues, causant de sérieux embouteillages. Le 22 octobre 2006, les trois membres du syndicat ont été arrêtés sous les chefs d’accusation de violation de la «loi sur la sanction pour violation, etc.», d’obstacle à l’exécution de fonctions officielles, de violation de la loi sur les rassemblements et manifestations et d’obstruction à la circulation. Ils ont été libérés sous caution le 28 décembre 2006. Les cas ont été jugés par le tribunal d’instance compétent, la procédure ayant été dûment respectée. Au tribunal de première instance, le 18 janvier 2007, tous trois ont été condamnés à des peines d’emprisonnement allant de sept à huit mois, en bénéficiant d’un sursis à exécution de deux ans. Toutefois, en seconde instance, la décision a été prise de suspendre la sentence pour deux syndicalistes. Les syndicalistes restants ont décidé d’interjeter appel devant la Cour suprême, qui l’a rejeté et a confirmé la sentence. Le gouvernement réitère que les trois fonctionnaires du KTU ne se sont pas engagés dans des activités syndicales légitimes mais plutôt dans des actions illégales, telles que des violences, dépassant largement les limites des droits syndicaux garantis par la Constitution.
- 615. Concernant l’allégation de déni du droit de grève dans la loi sur les syndicats d’enseignants, le gouvernement explique qu’en République de Corée de nombreux enseignants ont le même statut que les fonctionnaires. Les enseignants d’écoles privées sont soumis aux mêmes lois et règlements que les enseignants nationaux et des écoles publiques. De ce fait, les enseignants sont tenus d’exercer leur profession de bonne foi et ils ont l’interdiction de quitter leur lieu de travail sans permission et de s’engager dans un mouvement politique. Dès lors, en principe, pendant les heures de travail, les enseignants ne devraient pas s’engager dans des activités syndicales sans la permission de leur directeur d’école. Mais, lorsqu’ils s’engagent dans des activités syndicales, ils ne devraient pas enfreindre les obligations qui leur incombent au titre de la loi sur les fonctionnaires et d’autres lois et règlements y afférents. En conformité avec la loi précitée, les enseignants sont considérés comme étant des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l’Etat. La loi sur les fonctionnaires et la loi sur les syndicats d’enseignants, tout en garantissant pleinement le droit syndical des enseignants et leur droit à la négociation collective, imposent une restriction au droit à l’action collective. Cette restriction est justifiée eu égard à la nature du travail des enseignants et du rôle que l’on attend d’eux dans la société: les interruptions dans l’enseignement pourraient avoir un impact énorme sur la vie du public ainsi que sur l’éducation des élèves. A cet égard, alors qu’il n’existe pas de convention de l’OIT prévoyant le droit de grève, la position du comité concernant les services publics est la suivante: «la reconnaissance du principe de la liberté syndicale dans le cas des fonctionnaires n’implique pas nécessairement le droit de faire grève» et que «l’interdiction du droit de grève dans le service public devrait se limiter aux fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat». Le gouvernement souligne de plus que, conformément à l’article 8 de la convention no 87, «dans l’exercice des droits qui leur sont reconnus par la présente convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l’instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité».
- 616. Le gouvernement indique également que, à l’époque des discussions sur la promulgation de la loi sur les syndicats d’enseignants, même le KTU avait souscrit à l’inquiétude exprimée par la population et donné un avis favorable à la restriction du droit des enseignants à mener des actions collectives, ce qui s’était finalement traduit dans la loi. Le gouvernement souligne que cette même loi garantit aux enseignants le droit de s’organiser, de conduire des négociations collectives et de conclure des conventions collectives. A cet égard, les enseignants sont, pour des activités syndicales légitimes, exonérés de responsabilités civiles et pénales, et les employeurs se voient imposer une obligation d’engager de bonne foi des négociations collectives avec les enseignants. Les violations de cette obligation de la part des employeurs relèvent de la définition des «pratiques déloyales en matière de travail» et sont sanctionnées en conséquence.
- 617. Le gouvernement soutient par ailleurs que l’engagement des enseignants dans le dialogue social est garanti par un cadre juridique déjà existant. En conformité avec la loi spéciale sur le perfectionnement des enseignants, les organisations professionnelles peuvent exercer des droits de négociation et de tractation afin d’améliorer les conditions de travail et le traitement des enseignants et de renforcer leur protection sociale et leurs compétences professionnelles. Les syndicats d’enseignants ont également la possibilité de donner leur avis sur les politiques de l’éducation et les questions courantes y relatives, dans le cadre de réunions de consultation sur la politique à mener. De plus, si un différend survient, les syndicats d’enseignants peuvent demander à la Commission des relations de travail une médiation ou un arbitrage conformément à la loi sur les syndicats d’enseignants et ils peuvent y être impliqués à tous les stades pour protéger leurs intérêts. Un recours pour pratique déloyale en matière de travail est également disponible en cas de traitement défavorable pour avoir pris part à des activités syndicales légitimes.
- 618. S’agissant des manifestations de congé annuel de novembre 2006, le gouvernement estime que les politiques de l’éducation sont une question qui relève de l’administration compétente. Si des enseignants s’engagent dans une action collective simplement parce qu’ils ont des avis différents sur une politique donnée, cela peut entraver le fonctionnement normal des écoles et empiéter sur le droit des élèves d’apprendre. Une telle action collective sort du cadre des activités syndicales légitimes et rien ne saurait la justifier.
- 619. Selon les règlements concernés, sauf s’il existe une raison particulière, les enseignants devraient prendre leur congé annuel pendant les vacances de manière à ne pas provoquer la perte de journées d’école. En l’espèce, de nombreux professeurs ayant demandé à prendre leur congé annuel en même temps – suite à la directive du KTU de s’opposer à la proposition de système d’évaluation des enseignants –, l’administration compétente ne leur a pas permis de quitter leurs établissements car l’utilisation collective d’une telle absence était manifestement censée causer des perturbations dans l’activité normale des écoles, saper le droit des élèves d’apprendre et provoquer des réactions en retour violentes des parents.
- 620. Au cours du processus, le MOEHRD a demandé au KTU de s’abstenir de telles actions, et il a donné instruction aux Bureaux métropolitains et provinciaux de l’éducation et aux écoles de tous niveaux de gérer avec rigueur la conduite des enseignants pour veiller à ce qu’ils n’y participent pas. Pour tenter d’empêcher de telles activités collectives, le MOEHRD a envoyé aux enseignants une lettre au nom du Vice-premier ministre et a demandé aux autorités concernées et aux écoles de publier la lettre sur leurs sites Web.
- 621. Quant à l’imposition de mesures disciplinaires, le gouvernement explique qu’elles visent à maintenir l’ordre et la discipline. Les enseignants font l’objet de mesures disciplinaires s’ils enfreignent la loi sur les fonctionnaires, négligent ou contreviennent à leurs obligations ou commettent tout acte portant atteinte à leur dignité et à leur statut d’enseignant. Aux termes des lois et règlements concernés, l’utilisation du congé annuel sans permission pour protester contre le système d’évaluation des enseignants constitue une violation de la loi sur les fonctionnaires et de la Réglementation sur les fonctionnaires du service public. Pour garantir l’impartialité des mesures disciplinaires, le gouvernement a fixé des critères basés sur la fréquence de la participation à des manifestations de congé annuel sans permission.
- 622. En conséquence, un total de 421 des membres du KTU a fait l’objet de mesures disciplinaires. Sur ce total, 271 ont interjeté appel, qui a été rejeté pour 198 cas, refusé pour 23 cas et admis pour 50 (dans 46 cas, les mesures disciplinaires ont été annulées et, dans quatre cas, modifiées). Concernant l’assertion des organisations plaignantes qu’il est illégal d’imposer des mesures administratives sur la base de la fréquence de participation à des manifestations, y compris celles pour lesquelles l’état de limitations avait expiré, le gouvernement maintient que l’imposition était en conformité avec l’ordonnance sur les sanctions disciplinaires du personnel et des cadres de l’éducation publique, qui stipule que, lorsqu’elles décideront de prendre des mesures disciplinaires, les autorités concernées devront tenir compte de la conduite, des états de service, de même que des résultats et des signes de repentir du contrevenant présumé. Le cas des membres du KTU accusés d’avoir participé à des manifestations de congé annuel est passé devant plusieurs tribunaux et, le 11 mai 2007, la Cour suprême a rendu en l’espèce un jugement sans appel reconnaissant la légitimité des mesures disciplinaires.
- 623. Concernant l’allégation de violation de la liberté d’expression des enseignants, le gouvernement indique que les deux enseignants cités dans la plainte ont géré, de 2005 à 2006, un cybercafé pour le comité d’unification de l’antenne de Séoul du KTU. Ils téléchargeaient sur l’Internet des textes de louanges et de défense de Kim Jung-il, du régime socialiste nord-coréen et du plan de la Corée du Nord pour l’unification sous un système fédéral, extraits et publiés à partir de directives pour des luttes révolutionnaires en Corée du Sud, des discours, éditoriaux, thèses, etc. sur le site Web du Front démocratique national anti-impérialiste. Ils affichaient également divers matériels de propagande, notamment des appels pour l’abolition de la loi sur la sécurité nationale. Arrêtés le 20 janvier 2007, ils ont été libérés sous caution trois mois plus tard le 20 avril. Leur cas est actuellement pendant devant le tribunal de première instance.
- 624. Concernant les deux individus désignés dans la seconde communication, le gouvernement mentionne que M. Kim Hyeong-yeun a été arrêté et condamné à un an de prison, incluant deux ans de suspension de la condamnation pour cause de violation à la loi sur la sécurité nationale, en 1996. En mai 2005, il a emmené 180 étudiants de niveau primaire à participer à une cérémonie à l’hommage de patriotes (Partisans) décédés lors d’une bataille pour obtenir l’unification contre le gouvernement sud-coréen. Il a également continué à fournir des informations soutenant la révolution orthodoxe de la Corée du Nord. En avril 2006, il a affiché sur l’Internet un «rapport par Kim Young-nam sur le 94e anniversaire de naissance de Kim Il-sung» et a distribué plusieurs documents louant Kim Il-sung et le socialisme nord-coréen. Suite à une enquête, qui a conduit à une saisie et une fouille à son domicile et à l’école, il a été arrêté en janvier 2008 et a été libéré sous caution en juin 2008. L’enquête a révélé qu’il avait violé la loi et il a donc été poursuivi en justice. Le procès de première instance est en cours. Mme Choi Bokyong a été condamnée à un an de prison, incluant deux ans de suspension de la condamnation d’entrée par effraction et de violation de la loi sur les réunions et les manifestations. Entre août 2003 et février 2008, elle a affiché, sur le site Internet de l’école où elle travaillait, des documents mettant en valeur la vision nord-coréenne sur l’unification et la supériorité du socialisme nord-coréen. Elle a été arrêtée sans détention pour avoir commis ces actes en juin 2008 et elle fait actuellement l’objet d’une enquête.
- 625. Le gouvernement considère que, si les plaignants soutiennent que les actes commis par les enseignants sont une manifestation de paix dans le milieu de l’enseignement, étant donné les réalités propres à la Corée, telles que les divisions entre le Sud et le Nord de la Corée et la confrontation militaire, fournir, d’une point de vue idéologique, un enseignement biaisé à de jeunes étudiants peut représenter un grave danger à la sécurité nationale et à la liberté et constitue en ce sens une violation à la loi sur la sécurité nationale, qui n’a rien à voir avec les activités syndicales ordinaires. Les deux personnes ci-dessus mentionnées faisaient et font encore l’objet d’une enquête par les autorités compétentes, telles que le bureau des procureurs et les tribunaux, selon la procédure appropriée pour cause de violation des lois en vigueur.
- 626. Le gouvernement souligne, une nouvelle fois, que les lois susmentionnées n’ont rien à voir avec la protection et la promotion des intérêts de membres syndicaux ou des conflits de travail en général, mais constituent plutôt des activités politiques qui visent à glorifier un pays en confrontation militaire avec la Corée du Sud. Tant et aussi longtemps que ces activités seront contraires à la loi en vigueur, les membres syndicaux ne pourront pas décliner leurs responsabilités. Le gouvernement maintient que tous les droits fondamentaux, y compris la liberté d’expression, ne sont pas garantis sans condition. Selon l’article 37(2) de la Constitution coréenne, les droits fondamentaux ne peuvent être restreints par la loi que lorsque cela s’avère nécessaire pour la sécurité nationale, le maintien de l’ordre public ou l’intérêt général. Plus spécifiquement, la loi sur la sécurité nationale restreint la liberté d’expression dans la mesure requise pour contrôler des activités susceptibles de mettre en danger l’existence et la sécurité de l’Etat ou l’ordre démocratique libéral. Le gouvernement considère que, dans la mesure où il s’agit d’une question de violation de la loi sur la sécurité nationale, la sanction des deux enseignants n’a pas à être discutée au Comité de la liberté syndicale.
- 627. Le gouvernement conclut en déclarant qu’il poursuivra ses efforts en faveur du développement des compétences des enseignants, par un dialogue et une consultation permanents entre les parties concernées, telles que les professeurs à tous les niveaux, les parents, etc., et par l’instauration et la mise en œuvre des systèmes nécessaires. Il sait que ce processus nécessitera sans aucun doute un niveau de dialogue social suffisant et l’obtention d’un consensus national.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 628. Le comité note que, dans le présent cas, les organisations plaignantes, l’IE et son organisation membre, le KTU, allèguent l’absence de dialogue avec l’organisation des enseignants dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un système d’évaluation des enseignants; l’interdiction du droit de rassemblement et le déni du droit de grève; et la violation de la liberté d’expression.
- 629. En ce qui concerne la première série d’allégations, les organisations plaignantes expliquent que le gouvernement a refusé d’impliquer les enseignants et leurs organisations professionnelles représentatives dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un nouveau système d’évaluation des enseignants et qu’il a unilatéralement imposé le nouveau système en novembre 2005, en dépit du refus de la nouvelle politique par plus de la moitié des enseignants. Plus récemment, en février 2007, un avant-projet de loi pour procéder à la mise en œuvre d’une évaluation des enseignants a été soumis à l’Assemblée nationale, sans consultations avec les associations d’enseignants.
- 630. Le gouvernement conteste l’allégation d’absence de dialogue social pour ce qui concerne l’élaboration et la mise en œuvre du système d’évaluation des enseignants. Il souligne la nécessité d’une telle réforme, recommandée par l’OCDE et soutenue par le public, et il donne des précisions sur ses caractéristiques. Il soutient également que le processus d’instauration du système d’évaluation des enseignants a impliqué diverses parties concernées, notamment les enseignants et leurs organisations représentatives, les groupes de parents et d’autres groupes de la société civile. Le gouvernement énumère les activités de consultation qui ont été organisées à ce sujet. Il indique par ailleurs que, contrairement au KTU (80 000 membres), la Fédération coréenne des associations d’enseignants – le groupe le plus important d’enseignants professionnels (180 000 membres) – et les autres parties aux consultations ne se sont pas opposées à la réforme. Le gouvernement considère donc que le simple fait que la position du KTU n’était pas prédominante n’étaye pas son allégation selon laquelle le processus d’instauration du système d’évaluation des enseignants était dépourvu de dialogue entre les parties.
- 631. Le comité note que le système d’évaluation des enseignants était déjà en place depuis novembre 2005 et que, alors que les organisations plaignantes font valoir que le nouveau système a été imposé de manière unilatérale, le gouvernement insiste sur le fait que toutes les parties ont été impliquées dans un processus de consultation de grande ampleur lancé en 2000. Le comité a estimé que, alors que l’élaboration des grandes lignes de la politique générale de l’enseignement ne se prête pas à des négociations collectives entre les autorités compétentes et les organisations du personnel enseignant, bien qu’il puisse être normal de consulter à cet égard ces organisations [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 922], les questions portant sur les termes et conditions d’emploi entrent dans le champ d’application de la convention collective; ce qui s’appliquerait pareillement au système d’évaluation des enseignants. Le comité note la volonté exprimée par le gouvernement de poursuivre ses efforts en faveur du développement des compétences des enseignants, par un dialogue et une consultation permanents entre les parties concernées, telles que les professeurs à tous les niveaux, les parents, etc., et sa compréhension que ce processus nécessitera sans aucun doute un niveau de dialogue social suffisant et l’obtention d’un consensus national. En conséquence, le comité veut croire que toutes consultations à venir concernant la réforme du secteur de l’éducation, en particulier celles concernant les termes et conditions des enseignants, de même que toute législation affectant les enseignants et leurs droits syndicaux, se feront de bonne foi, dans le respect et la confiance mutuels, et que les parties disposeront de suffisamment de temps pour donner leurs points de vue et en discuter de manière exhaustive en vue de parvenir à un compromis satisfaisant.
- 632. Les organisations plaignantes allèguent, d’autre part, que les enseignants se voient dénier le droit de réunion et le droit de grève. Elles expliquent à cet égard que, compte tenu de l’interdiction du droit de grève en vertu de la loi sur les syndicats d’enseignants, la seule possibilité dont ces derniers disposent pour exprimer collectivement leur mécontentement est de participer à des manifestations, rassemblements et protestations organisés pendant leurs congés annuels. Selon les organisations plaignantes, il est possible de prendre de tels congés tant qu’ils n’entravent pas le fonctionnement normal des écoles. Dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent que, en novembre 2006, le droit de prendre un congé a été refusé à environ 3 000 enseignants qui souhaitaient participer au rassemblement syndical organisé pour protester contre le système d’évaluation des enseignants imposé par le gouvernement. Les organisations plaignantes allèguent que les demandes de congés des enseignants ont été rejetées conformément aux instructions du MOEHRD, qui décrivait la manifestation de congé annuel du KTU comme constituant «un comportement collectif illégal contre la Réglementation sur les fonctionnaires du service public» et promettait de «punir les participants à la manifestation, quel que soit leur degré de participation».
- 633. Selon la première communication des organisations plaignantes, le MOEHRD a envoyé des lettres d’avertissement aux 1 856 participants à trois rassemblements ou moins depuis l’année 2000 (y compris à la manifestation de 2006) et a pris des sanctions disciplinaires à l’encontre de 436 enseignants qui avaient participé à quatre rassemblements ou plus au cours de la même période. Sur les 436 enseignants sanctionnés, six ont fait l’objet de retenues de un à trois mois de salaire, 198 ont perdu leur prime annuelle et ont été désavantagés dans leur augmentation de salaire régulière, 156 ont été sanctionnés par d’autres désavantages et changements, et 76 ont reçu des lettres d’avertissement. Lorsque les commissions disciplinaires des bureaux de l’éducation du district se sont réunies le 25 janvier 2007, les 436 enseignants se sont vu restreindre leur droit de répondre aux accusations puisque trois minutes seulement leur ont été accordées pour donner leur réponse, contrairement à l’article 9 de l’ordonnance sur les sanctions disciplinaires du personnel et des cadres de l’éducation publique. En février 2007, les enseignants sanctionnés par des réductions de salaire ont invoqué l’invalidité des procédures disciplinaires auprès de la Commission de recours du MOEHRD, qui prévoyait d’examiner ces requêtes en mai 2007. Dans leur communication ultérieure, les organisations plaignantes indiquent que 415 enseignants ont été sanctionnés en mai 2007. Le KTU a connaissance des sanctions imposées à 248 enseignants: six d’entre eux ont vu leur salaire réduit; 204 ont été pénalisés dans leurs augmentations annuelles de salaire; 69 ont fait l’objet d’avertissements et de divers désavantages; et 136 ont reçu des avertissements. Sur les requêtes de 271 enseignants demandant l’annulation de la sanction, trois seulement ont été acceptées par le gouvernement qui, après un nouvel examen, a réduit les sanctions disciplinaires initiales de 47 cas, rejetant 198 autres cas.
- 634. Concernant cette même question, les organisations plaignantes indiquent que, en octobre 2005 déjà, des centaines de membres du KTU ont protesté contre la décision gouvernementale d’imposer de manière unilatérale le système d’évaluation des enseignants. Le MOEHRD a mobilisé des brigades de policiers pour emmener les manifestants dans les postes de police. Trois délégués d’enseignants ont été arrêtés et maintenus quatre mois en détention.
- 635. Pour ce qui concerne ces allégations, le gouvernement déclare que, le 20 octobre 2006, trois membres du KTU ont, avec une vingtaine de leurs collègues, pénétré par la force dans le lieu où devait se tenir un débat public sur le système d’évaluation des enseignants et ont occupé le podium et usé de violence pour retirer le micro en scandant des slogans. Ce faisant, ils ont fait obstruction à l’exécution de fonctions officielles. Auparavant, les 14 et 19 juillet 2006, ils avaient organisé sans préavis une manifestation au cours de laquelle ils avaient investi les rues, causant de sérieux embouteillages. Le 22 octobre 2006, les trois membres du syndicat ont été arrêtés sous les chefs d’accusation de violation de la «loi sur la sanction pour violation, etc.», d’obstacle à l’exécution de fonctions officielles, de violation de la loi sur les rassemblements et manifestations et d’obstruction à la circulation. Ils ont été libérés sous caution le 28 décembre 2006. Les cas ont été jugés par le tribunal d’instance compétent, la procédure ayant été dûment respectée. Au tribunal de première instance, le 18 janvier 2007, tous trois ont été condamnés à des peines d’emprisonnement allant de sept à huit mois, en bénéficiant d’un sursis à exécution de deux ans. Toutefois, en seconde instance, la décision a été prise de suspendre la sentence pour deux syndicalistes. Les syndicalistes restants ont décidé d’interjeter appel devant la Cour suprême, qui l’a rejeté et a confirmé la sentence. Le gouvernement réitère que les trois fonctionnaires du KTU ne se sont pas engagés dans des activités syndicales légitimes mais plutôt dans des actions illégales, telles que des violences, dépassant largement les limites des droits syndicaux garantis par la Constitution.
- 636. Concernant l’allégation de déni du droit de grève dans la loi sur les syndicats d’enseignants, le gouvernement explique qu’en République de Corée de nombreux enseignants ont le même statut que les fonctionnaires. Les enseignants d’écoles privées sont soumis aux mêmes lois et règlements que les enseignants nationaux et des écoles publiques. Ils ont l’obligation d’exercer leur profession de bonne foi et ils ont l’interdiction de quitter leur lieu de travail sans permission et de s’engager dans un mouvement politique. Dès lors, en principe, pendant les heures de travail, les enseignants ne devraient pas s’engager dans des activités syndicales sans la permission de leur directeur d’école. Mais, lorsqu’ils s’engagent dans des activités syndicales, ils ne devraient pas enfreindre les obligations qui leur incombent au titre de la loi sur les fonctionnaires et d’autres lois et règlements y afférents. En conformité avec la loi précitée, les enseignants sont considérés comme étant des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l’Etat. La loi sur les fonctionnaires et la loi sur les syndicats d’enseignants, tout en garantissant pleinement le droit syndical des enseignants et leur droit à la négociation collective, imposent une restriction au droit à l’action collective. Cette restriction est justifiée eu égard à la nature du travail des enseignants et du rôle dans la société que l’on attend d’eux: les interruptions dans l’enseignement pourraient avoir un impact énorme sur la vie du public ainsi que sur l’éducation des élèves. A cet égard, le gouvernement souligne que, alors qu’il n’existe pas de convention de l’OIT prévoyant le droit de grève, la position du comité concernant les services publics est la suivante: «la reconnaissance du principe de la liberté syndicale dans le cas des fonctionnaires n’implique pas nécessairement le droit de faire grève» et que «l’interdiction du droit de grève dans le service public devrait se limiter aux fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat». Le gouvernement souligne de plus que, conformément à l’article 8 de la convention no 87, «dans l’exercice des droits qui leur sont reconnus par la présente convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives sont tenus, à l’instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité».
- 637. Pour ce qui a trait aux manifestations de novembre 2006, le gouvernement considère tout d’abord que, si des enseignants s’engagent dans une action collective simplement parce qu’ils ont des avis différents sur une politique donnée, cela peut entraver le fonctionnement normal des écoles et, partant, empiéter sur le droit des élèves d’apprendre. Une telle action collective sort du cadre des activités syndicales légitimes et ne peut être justifiée. Il explique en second lieu que, selon les règlements concernés, sauf s’il existe une raison particulière, les enseignants devraient prendre leur congé annuel pendant les vacances de manière à ne pas provoquer la perte de journées d’école. En l’espèce, de nombreux professeurs ayant demandé à prendre leur congé annuel en même temps – suite à la directive du KTU de s’opposer à la proposition de système d’évaluation des enseignants –, l’administration compétente ne leur a pas permis de quitter leurs établissements car l’utilisation collective d’une telle absence était manifestement censée causer des perturbations dans l’activité normale des écoles, saper le droit des élèves d’apprendre et provoquer des réactions en retour violentes des parents. Le gouvernement confirme que le MOEHRD avait donné instruction aux Bureaux métropolitains et provinciaux de l’éducation et aux écoles de tous niveaux de gérer avec rigueur la conduite des enseignants pour veiller à ce qu’ils ne participent pas à des manifestations.
- 638. Concernant l’imposition de mesures disciplinaires, le gouvernement explique qu’elles visent à maintenir l’ordre et la discipline. Les enseignants font l’objet de mesures disciplinaires s’ils enfreignent la loi sur les fonctionnaires, négligent ou contreviennent à leurs obligations ou commettent tout acte portant atteinte à leur dignité et à leur statut d’enseignant, que cela soit ou non en rapport avec leur travail. En l’espèce, l’utilisation du congé annuel sans permission pour protester contre le système d’évaluation des enseignants constitue une violation de la loi sur les fonctionnaires et de la Réglementation sur les fonctionnaires du service public. Pour garantir l’impartialité des mesures disciplinaires, le gouvernement a fixé des critères basés sur la fréquence de la participation à des manifestations de congé annuel sans permission. En conséquence, 421 membres du KTU ont fait l’objet de mesures disciplinaires. Sur ce total, 271 ont interjeté appel, qui a été rejeté pour 198 cas, refusé pour 23 cas et admis pour 50 (dans 46 cas, les mesures disciplinaires ont été annulées et, dans quatre cas, modifiées). Concernant l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle il est illégal d’imposer des mesures administratives sur la base de la fréquence de participation à des manifestations, y compris celles pour lesquelles l’état de limitations avait expiré, le gouvernement déclare que l’imposition était en conformité avec l’ordonnance sur les sanctions disciplinaires du personnel et des cadres de l’éducation publique, qui stipule que, lorsqu’elles décideront de prendre des mesures disciplinaires, les autorités concernées devront tenir compte de la conduite, des états de service, de même que des résultats et des signes de repentir du contrevenant présumé. Le cas des membres du KTU accusés de participation à des manifestations de congé annuel est passé devant plusieurs tribunaux et, le 11 mai 2007, la Cour suprême a rendu en l’espèce un jugement sans appel reconnaissant la légitimité des mesures disciplinaires.
- 639. Le comité note que la principale question posée en l’espèce est celle de l’interdiction du droit d’action collective (protestations, manifestations et grèves) dans le secteur de l’éducation étant donné que, en vertu de la législation nationale, les enseignants des secteurs public et privé sont considérés comme étant des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l’Etat. De manière liminaire, le comité souligne que les manifestations et les protestations pacifiques organisées pour soutenir une position des syndicats cherchant à trouver des solutions à des problèmes posés par des politiques publiques, qui ont un impact sur leurs membres, sont des activités syndicales légitimes. Pour ce qui concerne spécifiquement le droit de grève, le comité rappelle qu’il a eu à traiter ces dernières années de nombreux cas impliquant des restrictions imposées à la liberté d’action des enseignants, notamment les cas nos 1629 et 1865 concernant la République de Corée [voir 286e et 346e rapports, respectivement]. Le comité a établi que «les travailleurs du secteur de l’éducation n’entrent pas dans la définition des services essentiels ou des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat» et devraient donc avoir le droit de faire grève, sauf pour les directeurs et directeurs adjoints d’école, qui exercent des prérogatives de puissance publique et dont le droit de grève peut être limité. [Voir 277e rapport, paragr. 285 et 289, tels que rappelés dans le cas no 1865, 346e rapport, paragr. 772.] Qui plus est, les arguments selon lesquels traditionnellement les fonctionnaires ne bénéficient pas du droit de grève parce que l’Etat en tant qu’employeur a un devoir de protection supérieur à la moyenne vis-à-vis d’eux, n’ont pas convaincu le comité de modifier sa position sur le droit de grève des enseignants. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 589.] Le comité prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, afin d’amender la législation nationale de manière à garantir que les enseignants des secteurs public et privé jouissent du droit de prendre part à des manifestations, des réunions publiques et des grèves pour défendre leurs intérêts professionnels. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- 640. En ce qui concerne les sanctions imposées aux enseignants pour avoir exercé leur droit d’action collective, le comité souligne que nul ne devrait faire l’objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime [voir Recueil, op. cit., paragr. 660] ou toute autre forme d’action collective. Pour ce qui a trait aux trois travailleurs arrêtés par suite de leur participation à une action collective, bien qu’il n’apparaît pas clairement que les trois syndicalistes mentionnés dans la plainte sont les mêmes personnes que celles indiquées par le gouvernement dans sa réponse, le comité souligne que l’exercice pacifique des droits syndicaux (grève et manifestation) par les travailleurs ne devrait pas conduire à des arrestations [voir Recueil, op. cit., paragr. 673] et à des emprisonnements. Dans le présent cas, le gouvernement déclare que, le 22 octobre 2006, les trois syndicalistes ont «pénétré par la force dans le lieu où devait se tenir un débat public sur le système d’évaluation des enseignants et ont occupé le podium et usé de violence pour retirer le micro en scandant des slogans», et qu’ils avaient auparavant participé à une manifestation pendant laquelle ils avaient «investi des routes, causant de sérieux embouteillages». Les trois syndicalistes ont été arrêtés et ont passé du temps en prison. Compte tenu que la législation interdit aux enseignants de s’engager dans des actions collectives et étant donné que le gouvernement se borne pour sa part à déclarer d’une façon générale que des actes de violence ont été commis, il apparaît au comité que les personnes en question ont en fait été sanctionnées pour avoir exercé leur droit à des activités syndicales légitimes.
- 641. De plus, le comité estime que des sanctions pour acte de grève ne devraient être possibles que dans les cas où les interdictions en question sont en conformité avec les principes de la liberté syndicale. Etant donné que les restrictions imposées aux enseignants en République de Corée en ce qui concerne leur droit à des actions collectives ne sont pas en conformité avec lesdits principes, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de dédommager intégralement les enseignants ayant subi des préjudices matériels ou autres du fait de leur participation à des manifestations. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité veut croire par ailleurs qu’aucune sanction pénale ne sera imposée à des syndicalistes pour leur organisation et leur participation à des actions collectives pacifiques.
- 642. Enfin, concernant l’allégation de violation de la liberté d’expression, les organisations plaignantes déclarent que, le 18 janvier 2007, deux enseignants de collège membres du KTU ont été arrêtés pour avoir prétendument violé la loi sur la sécurité nationale. Ces accusations, qui peuvent être passibles de la peine de mort, sont liées à des affiches et à des informations sur la politique nord-coréenne que les enseignants ont téléchargées sur l’Internet. Les syndicats font valoir que ces deux enseignants ont par le passé été félicités pour leur contribution à la pédagogie de la paix et que les informations téléchargées sont facilement accessibles à partir d’autres sources publiques. Les deux enseignants ont par la suite été relâchés sous caution et sont toujours en attente de la date de leur procès. Le 29 janvier 2008, la police a arrêté M. Kim Hyeong-geun, membre du comité de réunification du KTU, qui a fait des recherches sur l’idéologie et les politiques nord-coréennes en vue de favoriser la pédagogie de la paix et la compréhension mutuelle entre les élèves sud et nord-coréens. Il a été accusé de violation de la loi sur la sécurité nationale et placé en détention dans une prison de Séoul après que le tribunal eut refusé de réexaminer la question de la légalité de son emprisonnement. Le 24 février 2008, la police a également perquisitionné le domicile et le bureau de Mme Choi Bokyong, qui avait favorisé la pédagogie de la paix dans sa classe et dans les programmes éducatifs du syndicat.
- 643. En ce qui concerne les deux enseignants mentionnés dans la première communication des organisations plaignantes, le gouvernement indique que tous les deux ont géré, de 2005 à 2006, un cybercafé pour le comité d’unification de l’antenne de Séoul du KTU. Ils téléchargeaient sur l’Internet des textes de louanges et de défense de Kim Il-sung et Kim Jung-il, du régime socialiste nord-coréen et du plan de la Corée du Nord pour l’unification sous un système fédéral, extraits et publiés à partir de directives pour des luttes révolutionnaires en Corée du Sud, des discours, éditoriaux, thèses, etc., sur le site Web du Front démocratique national anti-impérialiste. Ils affichaient également divers matériels de propagande. Ils ont été arrêtés le 20 janvier 2007 et libérés sous caution trois mois plus tard le 20 avril. Leur cas est actuellement pendant devant le tribunal de première instance. Les deux autres enseignants, M. Kim Hyeong-gun et Mme Choi Bokyong, ont été arrêtés sous les mêmes chefs d’accusation, pour avoir fourni un enseignement mettant en valeur la révolution orthodoxe du socialisme nord-coréen. M. Kim Hyeong-gun est en attente d’une décision de son procès de première instance, tandis que Mme Choi Bokyong fait l’objet d’une enquête.
- 644. Le gouvernement maintient que tous les droits fondamentaux, y compris la liberté d’expression, ne sont pas garantis sans condition et peuvent être restreints par la loi pour préserver la sécurité nationale, l’ordre public et l’intérêt général. Il insiste que les cas des deux enseignants sont purement politiques et ne concernent en rien l’exercice des droits syndicaux. Il considère de ce fait que, dans la mesure où il s’agit d’une question de violation de la loi sur la sécurité nationale, la sanction des enseignants n’a pas à être discutée au Comité de la liberté syndicale.
- 645. Le comité note que les informations fournies par les organisations plaignantes et par le gouvernement divergent quant à la nature et à l’objet des activités pour lesquelles les deux enseignants ont été arrêtés en janvier 2007 et 2008. Même si le comité n’est pas en mesure de vérifier ces informations, il rappelle que le rôle premier de telles publications (et d’autres moyens de diffusion de l’information utilisés par des syndicats) devrait être de traiter dans leurs colonnes de questions intéressant essentiellement la défense et la promotion des intérêts des syndiqués et, plus généralement, du monde du travail. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 170.] Le comité demande aux organisations plaignantes de spécifier les raisons pour lesquelles les actes des enseignants accusés étaient liés à leurs activités syndicales. Entre-temps, le comité rappelle la résolution de 1970 relative aux droits syndicaux et leur relation avec les libertés civiles, qui met l’accent sur les libertés d’opinion et d’expression, essentielles pour l’exercice normal des droits syndicaux. Rappelant que la résolution de 1970 reconnaît que les droits conférés aux organisations de travailleurs et d’employeurs doivent être basés sur le respect de ces libertés civiles qui ont notamment été énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et que l’absence de ces libertés civiles ôte toute signification à la notion de droits syndicaux, le comité veut croire que tout jugement relatif à ces syndicalistes enseignants accusés d’avoir violé la loi sur la sécurité nationale respectera pleinement les libertés civiles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, notamment la liberté d’opinion et d’expression. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’issue donnée à ces cas et de lui transmettre les jugements définitifs.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 646. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité veut croire que toutes consultations à venir concernant la réforme du secteur de l’éducation, en particulier celles concernant les termes et conditions des enseignants, de même que toute législation affectant les enseignants et leurs droits syndicaux, se feront de bonne foi, dans le respect et la confiance mutuels, et que les parties disposeront de suffisamment de temps pour donner leurs points de vue et en discuter de manière exhaustive en vue de parvenir à un compromis satisfaisant.
- b) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, afin d’amender la législation nationale de manière à garantir que les enseignants des secteurs public et privé jouissent du droit de prendre part à des manifestations, des réunions publiques et des grèves pour défendre leurs intérêts professionnels. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- c) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en vue de dédommager intégralement les enseignants ayant subi des préjudices matériels ou autres du fait de leur participation à des manifestations. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- d) Le comité veut croire qu’aucune sanction pénale ne sera imposée à des syndicalistes pour leur organisation et leur participation à des actions collectives pacifiques.
- e) Le comité demande aux organisations plaignantes toutes informations supplémentaires au sujet de la nature des actes commis par les quatre syndicalistes accusés d’avoir violé la loi sur la sécurité nationale, et en particulier d’expliquer comment ces actes étaient liés à des activités syndicales. Le comité veut croire que tout jugement relatif à ces syndicalistes enseignants accusés d’avoir violé la loi sur la sécurité nationale respectera pleinement les libertés civiles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, notamment la liberté d’opinion et d’expression. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’issue donnée à ces cas et de lui transmettre les jugements définitifs.