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Rapport définitif - Rapport No. 346, Juin 2007

Cas no 2503 (Mexique) - Date de la plainte: 24-FÉVR.-06 - Clos

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  1. 1192. La plainte figure dans une communication de la Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC) du 24 février 2006. Le gouvernement a adressé ses observations dans une communication du 22 janvier 2007.
  2. 1193. Le Mexique a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il n’a pas ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 1194. Dans sa communication du 24 février 2006, la Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC) indique que M. Isaías González Cuevas est le président élu du Congrès du travail, et MM. Napoleón Gómez Urrutia et Ignacio Cuauhtemoc Paleta sont les secrétaires généraux, respectivement, de la CROC et du Syndicat des mineurs de la République mexicaine, ainsi que de la Confédération régionale ouvrière mexicaine (CROM). La CROC ajoute que les travailleurs ont constitué, il y a quarante ans, le regroupement «Congrès du travail», qui est régi par ses propres statuts. Conformément aux statuts, le président du Congrès du travail a convoqué une assemblée élective le 15 février 2006 au siège du congrès à Mexico. Y ont assisté 15 des 25 organisations officiellement reconnues comme membres du congrès. M. Isaías González Cuevas et MM. Napoleón Gómez Urrutia et Ignacio Cuauhtemoc Paleta se sont rendus à l’assemblée en tant que président et vice-présidents, respectivement. Ils ont été élus avec 15 voix pour représenter le Congrès du travail pendant un an. Toutefois, selon la CROC, un groupe conduit par le président sortant, M. Víctor Flores, s’est rendu dans un local à l’extérieur de ceux du Congrès du travail et, sans satisfaire aux conditions de l’assemblée, a prolongé le mandat du président du Congrès du travail sortant, ce qui constitue une violation des statuts du Congrès du travail. En effet, 1) l’assemblée avait été convoquée pour une élection; 2) les statuts ne prévoient pas la prolongation du mandat du président; 3) selon les statuts, le président sortant ne pouvait pas briguer sa réélection puisqu’il avait déjà eu recours à cette possibilité; et 4) l’assemblée devait se tenir au siège même du Congrès du travail. Selon la CROC, les personnes qui se sont réunies ailleurs qu’au siège du Congrès du travail ont adressé un acte notarié au secrétariat du Travail dans lequel elles ont indiqué que le président sortant (M. Víctor Flores) avait été reconduit dans ses fonctions. Or ces personnes n’avaient pas la faculté de le décider. Pourtant, le secrétariat du Travail a pris note de l’acte notarié que lui ont adressé ces personnes qui n’étaient pas investies des facultés prévues par les statuts et, avec une célérité surprenante, a jugé valide la reconduction du mandat de la commission exécutive, sans s’assurer que les conditions statutaires avaient été respectées. Le secrétariat du Travail n’a pas accusé réception des documents présentés par les signataires de la présente plainte.
  2. 1195. La CROC estime que le secrétariat du Travail a enfreint ainsi la liberté syndicale, la Constitution de l’OIT et les conventions nos 87 et 98.
  3. B. Réponse du gouvernement
  4. 1196. Dans sa communication du 22 janvier 2007, le gouvernement juge infondées les allégations de la CROC à savoir que le secrétariat du Travail et de la Prévision sociale aurait enfreint les statuts du Congrès du travail en prenant note de la reconduction du mandat de M. Víctor Flores en tant que président de cette organisation syndicale. Selon la CROC, le secrétariat se serait de la sorte attribué des facultés qu’il n’a pas. Le gouvernement estime que c’est faux et donc que le principe de la liberté syndicale n’a pas été enfreint.
  5. 1197. Les faits mentionnés par la CROC découlent d’un conflit à l’intérieur du syndicat, entre deux fractions d’organisations membres du Congrès du travail, qui a eu lieu pendant l’élection de son président. Comme il ressort des principes suivants du Comité de la liberté syndicale, ces faits ne relèvent pas de la compétence du comité.
  6. n Une situation qui n’implique pas de différend entre le gouvernement et les organisations syndicales, mais ne résulte que d’un conflit au sein même du mouvement syndical, est du seul ressort des parties intéressées. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration, quatrième édition (révisée), 1996, paragr. 962.]
  7. n Les conflits qui éclatent au sein d’un syndicat échappent à la compétence du comité et doivent être tranchés par les parties elles-mêmes avec ou sans l’assistance de l’autorité judiciaire ou d’un médiateur indépendant. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 972.]
  8. n Dans des cas de conflits internes, le comité a signalé que l’intervention de la justice permettrait de clarifier la situation du point de vue légal et de normaliser la gestion et la représentation de la centrale syndicale en cause. Un autre moyen de procéder à cette normalisation consisterait à désigner un médiateur indépendant, en accord avec les parties intéressées, en vue de chercher conjointement la solution des problèmes existants et, le cas échéant, de procéder à de nouvelles élections. Dans l’un et l’autre de ces cas, le gouvernement devrait reconnaître les dirigeants qui apparaîtraient comme les représentants légitimes de l’organisation. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 973.]
  9. 1198. Par conséquent, le Comité de la liberté syndicale ne doit pas examiner la présente communication, et le gouvernement mexicain ne peut pas juger la plainte recevable. Toutefois, afin de contribuer de bonne foi aux travaux du Comité de la liberté syndicale, et prenant en considération le fait que le mandat du comité se limite à l’examen des communications faisant état d’atteintes au principe de la liberté syndicale et du droit de négociation collective, le gouvernement se permet de formuler des commentaires à propos des faits que la CROC évoque dans sa communication.
  10. 1199. Le gouvernement indique qu’à aucun moment il n’est intervenu dans la vie ou l’organisation interne du Congrès du travail. Quoi qu’il en soit, au sujet des faits imputés au secrétariat du Travail et de la Prévision sociale, il convient d’indiquer que celui-ci, dans l’exercice de ses facultés et attributions, n’a fait que prendre note de la reconduction du mandat de la commission exécutive de l’organisation syndicale en question, et n’est pas du tout intervenu dans les élections qui ont débouché sur la reconduction en question.
  11. 1200. Le gouvernement souligne que les faits évoqués par la CROC n’indiquent pas qu’il ait porté atteinte au principe de la liberté syndicale et au droit d’association consacrés dans la convention no 87 de l’OIT.
  12. 1201. La CROC n’indique pas dans sa communication avoir été empêchée d’exercer librement son droit de se constituer, avec une personnalité juridique et un patrimoine propres, pour défendre les intérêts de ses membres selon les modalités qu’elle estime pertinentes. Elle n’a pas été empêchée non plus d’exercer son droit d’élaborer ses statuts et règlements, d’élire librement ses représentants, d’organiser son administration et ses activités, et de formuler son programme d’action.
  13. 1202. Les faits que la CROC évoque n’ont pas trait non plus au droit de négociation collective consacré dans la convention no 98. Le Mexique n’a pas ratifié cette convention. La CROC indique que le secrétariat du Travail et de la Prévision sociale a pris note du document notarié que lui a soumis une fraction du Congrès du travail à la suite des élections qui ont débouché sur la reconduction du mandat de président de M. Víctor Flores. Selon la CROC, les statuts du Congrès du travail ne prévoient pas cette reconduction. La CROC ajoute que le secrétariat du Travail et de la Prévision sociale a aussitôt reconnu la reconduction du mandat de président de M. Flores sans s’assurer que les conditions prévues par les statuts étaient réunies et qu’il n’a pas accusé réception des documents sur l’élection qu’une autre fraction du Congrès du travail a organisée parallèlement – fraction à laquelle la CROC appartient. A cette occasion, ont été élus MM. Isaías González Cuevas, Napoleón Gómez Urrutia et Ignacio Cuauhtemoc Paleta, dans des conditions conformes à la loi et aux statuts du Congrès du travail.
  14. 1203. Le gouvernement indique que, respectant la volonté des organisations syndicales du Congrès du travail telle qu’énoncée dans les statuts du congrès, la Direction générale de l’enregistrement des associations a pris note le 17 février 2006 de la reconduction du mandat de la commission exécutive en question jusqu’au 18 décembre 2006. La direction s’est fondée sur les articles 371, paragraphe VIII, dernière phrase, et 377, paragraphe II, de la loi fédérale du travail; sur l’article 19, paragraphe III, du Règlement intérieur du secrétariat du Travail et de la Prévision sociale; et sur les articles 9, paragraphe II, et 18, 21, 23 et 30, paragraphe XI, des statuts du Congrès du travail. Elle s’est fondée aussi sur le fait que le quorum était réuni puisque étaient représentées 26 des 35 organisations qui figurent sur la liste la plus récente dont la direction générale dispose.
  15. 1204. M. Isaías González Cuevas, secrétaire général de la CROC, a déposé le 10 mars 2006 à la Direction générale de l’enregistrement des associations du secrétariat du Travail et de la Prévision sociale un document et des pièces jointes dans lequel il a demandé qu’il soit pris note de la commission exécutive et des commissions permanentes du Congrès du travail.
  16. 1205. Ce document indique que, le 15 février 2006, le Conseil national s’est réuni en assemblée plénière extraordinaire afin de reconduire la commission exécutive et les commissions permanentes pour la période sociale du 18 février 2006 au 18 février 2007. Ont été élus, comme ils l’indiquent, président du Congrès du travail M. Isaías González Cuevas, et vice-présidents MM. Napoleón Gómez Urrutia et Ignacio Cuauhtemoc Paleta.
  17. 1206. Le 28 avril 2006, la Direction générale de l’enregistrement des associations a indiqué à M. Isaías González Cuevas ce qui suit:
  18. Le 17 février 2006, la Direction générale de l’enregistrement des associations a pris note de la reconduction du mandat de la commission exécutive jusqu’au 18 décembre 2006. La direction se fonde sur les articles 371, paragraphe VIII, dernière phrase, et 377, paragraphe II, de la loi fédérale du travail; sur l’article 19, paragraphe III, du Règlement intérieur du secrétariat du Travail et de la Prévision sociale, et sur les articles 9, paragraphe II, et 18, 21, 23 et 30, paragraphe XI, des statuts du Congrès du travail, le quorum nécessaire ayant été réuni puisque étaient représentées 26 des 35 associations reconnues par la direction générale.
  19. 1207. On peut conclure de ce qui précède que la Direction générale de l’enregistrement des associations, dans l’exercice de ses facultés, n’a fait que prendre note de la reconduction de la commission exécutive du Congrès du travail, jusqu’au 18 décembre 2006, comme le lui avaient demandé les représentants de cette organisation syndicale. Cette reconduction avait été approuvée par 26 des 35 associations qui composent le congrès.
  20. 1208. A propos de l’allégation de la CROC selon laquelle la reconduction n’est pas prévue dans les statuts du Congrès du travail, il convient de souligner que cette allégation est infondée. De fait, l’article 27 des statuts en question indique expressément ce qui suit:
  21. Article 27. Le président et les vice-présidents de la commission exécutive exercent leurs fonctions pendant un an à compter de la date de leur élection et peuvent être réélus pour un an.
  22. 1209. Il apparaît donc que les statuts mêmes du Congrès du travail permettent de reconduire le mandat du président de la commission exécutive pour un an. On peut en déduire que la reconduction du mandat de cette commission ne porte pas atteinte aux statuts du Congrès du travail.
  23. 1210. Le fait qu’il a été pris note, le 17 février 2006, de la reconduction de la commission exécutive du Congrès du travail a été contesté par M. Isaías González Cuevas et par d’autres personnes par le dépôt d’un recours en protection (amparo) no 424/2006 devant le tribunal de district en matière de travail du District fédéral.
  24. 1211. En outre, le gouvernement indique que, le 22 novembre 2006, conformément aux articles 21, 22, 23 (paragraphe IV), 24, 25, 27 et suivants applicables aux statuts du Congrès du travail, celui-ci a tenu une assemblée plénière extraordinaire. A cette occasion, à la suite d’élections internes, le Congrès du travail a élu le président et les vice-présidents de la commission exécutive, ainsi que les présidents et vice-présidents des commissions permanentes qui forment la commission exécutive du Congrès du travail, pour la période du 24 novembre 2006 au 24 novembre 2007.
  25. 1212. Le 23 novembre 2006, à la demande expresse de cette organisation syndicale formulée par écrit le 22 novembre 2006, la Direction générale de l’enregistrement des associations a pris note de la nouvelle commission exécutive du Congrès du travail, laquelle a élu président M. Enrique Aguilar Borrego, en se fondant sur l’article 377 (paragraphe II) de la loi fédérale du travail; sur l’article 19 (paragraphe III) du Règlement intérieur du secrétariat du Travail et de la Prévision sociale; et sur les articles 24, 25, 27, 33, 35 et 36 des statuts du Congrès du travail. Par conséquent, la reconnaissance de la commission exécutive du Congrès du travail, en date du 17 février 2006, qui avait donné lieu à la présentation de la plainte de la CROC, est restée sans effet.
  26. 1213. Enfin, le gouvernement formule les conclusions suivantes:
  27. – La communication de la CROC se réfère à un conflit interne entre les syndicats. Etant donné qu’il n’est pas permis au gouvernement d’intervenir dans l’organisation des syndicats, il ne peut pas agir officieusement. Il ressort des faits mentionnés par la CROC qu’il s’agit d’un conflit entre syndicats et que, par conséquent, il doit être réglé en première instance par les syndicats et leurs membres, conformément aux normes internes, c’est-à-dire en appliquant les statuts du Congrès du travail. De fait, le 22 novembre 2006, le Congrès du travail a convoqué une assemblée plénière extraordinaire de son conseil national pour élire une nouvelle commission exécutive.
  28. – La CROC a disposé des moyens juridiques nécessaires pour contester la reconduction du mandat de la commission exécutive du Congrès du travail dont il avait été pris note le 17 février 2006. La CROC a intenté une action en amparo (no 424/2006) devant le tribunal de district en matière de travail du District fédéral. Cette action ne devrait pas aboutir étant donné que les motifs qui la fondaient n’existent plus et que la situation juridique a donc changé.
  29. – La CROC n’expose pas ni n’explique dûment les raisons ou causes juridiquement valables sur lesquelles elle s’appuie pour affirmer que les droits syndicaux ont été enfreints. Le fait que la procédure d’élection interne de la commission exécutive ne lui a pas été favorable n’est pas une raison pour reprocher au gouvernement d’être intervenu ou d’avoir enfreint les droits syndicaux.
  30. – Le Comité de la liberté syndicale ne doit pas prendre en compte la présente communication étant donné que ce qui fondait la communication, à savoir la reconnaissance le 17 février 2006 de la reconduction de la commission exécutive par la Direction générale de l’enregistrement des associations, n’a plus d’effet.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1214. Le comité observe que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue que le secrétariat du Travail et de la Prévision sociale a pris note (reconnu la validité) illicitement de la reconduction de la commission exécutive du Congrès du travail présidée par M. Víctor Flores, au détriment de la commission exécutive présidée par M. Isaías González Cuevas, qui, selon l’organisation plaignante, est la seule à avoir été élue conformément aux statuts.
  2. 1215. Le comité note que, selon le gouvernement, la reconduction de la commission exécutive présidée par M. Víctor Flores est licite, étant donné que le quorum nécessaire a été atteint (présence et approbation de 26 des 35 organisations du Conseil du travail). Le gouvernement souligne que les statuts (qui permettent la réélection de la commission exécutive) rendent possible une reconduction, et que le présent cas constitue un conflit interne du Congrès du travail.
  3. 1216. Le gouvernement souligne enfin que M. Isaías González Cuevas et d’autres personnes ont intenté une action en amparo contre la reconduction susmentionnée devant l’autorité judiciaire.
  4. 1217. Le comité note les déclarations du gouvernement sur l’évolution de la situation qui démontrent que: 1) l’organisation syndicale a réglé le conflit interne au syndicat, objet de la plainte; en effet, la commission exécutive présidée par M. Víctor Flores a cessé de fonctionner au bout de neuf mois, lorsque l’assemblée extraordinaire du 22 novembre 2006 du Congrès du travail a élu une nouvelle commission exécutive; et 2) il est prévisible que l’autorité judiciaire ne donnera pas suite à l’action en amparo intentée par M. Isaías González Cuevas, étant donné que les faits qui ont motivé cette action (la reconnaissance de validité de la commission exécutive présidée par M. Víctor Flores) n’ont plus de fondement. Dans ces conditions, le comité estime que ce cas n’exige pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1218. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à décider que le cas présent ne nécessite pas un examen plus approfondi.
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