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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 340, Mars 2006

Cas no 2412 (Népal) - Date de la plainte: 15-MARS -05 - Clos

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  1. 1113. Les plaintes sont présentées dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datée du 15 mars 2005 et dans des communications de l’Organisation des employés du gouvernement du Népal (NEGEO) datées respectivement du 2 juin et du 23 août 2005.
  2. 1114. Le gouvernement a formulé ses observations dans des communications datées respectivement du 12 avril, du 18 août et du 19 septembre 2005.
  3. 1115. Le Népal a ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, mais n’a pas ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 1116. Dans sa communication datée du 15 mars 2005, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue que, après le renversement du gouvernement par le Roi, tous les droits syndicaux ont été suspendus et les réunions de plus de cinq personnes ont été bannies par un décret promulgué le 31 janvier 2005. Depuis lors, la peur règne parmi les membres, activistes et dirigeants des syndicats, bon nombre d’entre eux se cachant par crainte d’être arrêtés. Bien des dirigeants de la Centrale syndicale du Népal (NTUC), de la Fédération générale des syndicats népalais (GEFONT) et de la Confédération démocratique des syndicats népalais (DECONT) figureraient parmi les 1 400 personnes que le gouvernement comptait arrêter ou placer sous étroite surveillance. Selon la CISL, environ 25 syndicalistes auraient été arrêtés depuis la proclamation royale du 1er février, dont certains ont été détenus jusqu’à trois mois et plusieurs ont été maltraités pendant leur détention.
  2. 1117. En outre, la CISL allègue que plusieurs dirigeants syndicaux ont été forcés de s’exiler. Ce serait le cas du président de la NTUC, M. Laxman Basnet. Le 1er février 2005, ce dernier a participé à la réunion du bureau de la CISL-ORAP à l’hôtel Soaltec Crown Plaza. Après la proclamation du Roi à 10 heures, l’armée s’est rendue au siège de la NTUC à 11 heures. La police s’est ensuite rendue à l’hôtel; elle n’a pas investi les lieux, en raison de la présence de nombreux dirigeants syndicaux internationaux, mais a posté ses agents à l’extérieur et devant la voiture de M. Basnet. Toutefois, ce dernier a réussi à quitter l’hôtel sans être vu et a dû se cacher. La police est venue à son domicile à trois reprises et a fouillé sa maison à deux de ces occasions.
  3. 1118. Outre les menaces d’arrestation de dirigeants syndicaux ou de toute personne organisant des activités syndicales, la capacité des syndicats de fonctionner était en outre sapée par un ensemble de restrictions imposées par la proclamation royale du 1er février. Ainsi, les réunions syndicales devaient avoir lieu uniquement dans les bureaux des syndicats, qui étaient souvent trop petits pour accueillir de tels rassemblements (les syndicats désireux de se réunir ailleurs devaient demander l’autorisation préalable des chefs de district). Par ailleurs, les procédures d’enregistrement des syndicats ou de réenregistrement imposées par la proclamation royale manquaient de clarté. Les sanctions prévues pour violation de la proclamation royale pouvaient aller jusqu’à un an d’emprisonnement.
  4. 1119. La CISL ajoute qu’on lui a signalé des incursions de l’armée dans les bureaux de syndicats. Des soldats auraient fouillé les bureaux de la NTUC à plusieurs reprises. Des documents syndicaux ont été saisis. Les bureaux de la GEFONT ont été placés sous surveillance. Les 15 et 16 février, des policiers se sont rendus au bureau de la GEFONT et, le 17, ont procédé à une fouille sans mandat de perquisition. N’ayant rien trouvé, ils ont fermé le bureau du syndicat et n’ont rendu la clé que le soir même.
  5. 1120. Selon la CISL, un climat de peur règne chez tous les syndicalistes, et les membres de syndicats de journalistes se sentent particulièrement visés, le Roi ayant pris des mesures pour s’arroger le contrôle des médias et des télécommunications. Le président de la Fédération des journalistes népalais, Tara Nath Dahal, et d’autres journalistes se cachent ou se sont exilés pour éviter d’être arrêtés.
  6. 1121. La CISL signale également que le ministre de l’Education harcèle et menace les syndicats d’enseignants népali, l’Association nationale des enseignants du Népal (NNTA) et l’Association des enseignants du Népal (NTA). Le 7 mars, dans les médias, le ministre a accusé les syndicats d’allégeance politique en ajoutant que les enseignants ne devraient pas faire de politique. Selon les plaignants, le gouvernement a affirmé que, si un syndicat doit exister pour les enseignants, il ne devrait pas y en avoir plus d’un commun à l’ensemble.
  7. 1122. La CISL indique par ailleurs avoir été informée que le Comité syndical pour l’égalité des sexes (TUC-GEP) qui représente les trois centrales nationales – la GEFONT, la NTUC et la DECONT – avait obtenu la permission de célébrer la Journée internationale de la femme en organisant le 8 mars un rassemblement et un colloque sur les droits des femmes. Toutefois, le 7 mars après 18 heures, les autorités ont appelé les syndicats pour revenir sur leur permission et bannir l’événement. Elles ont menacé les organisatrices. En revanche, les syndicats étaient autorisés à se réunir dans un hôtel à condition de s’en tenir strictement aux sujets de l’égalité des sexes et des politiques en la matière. La réunion a eu lieu en présence d’un agent de sécurité. D’autres organisations et des syndiqués ont prévu des rassemblements pour marquer la Journée de la femme. Des forces de sécurité ont été déployées pour les surveiller. Un total de 226 arrestations a eu lieu dans tout le pays: 36 à Katmandou, 97 à Janakpur, 23 à Pokhara, 35 à Tanahu, 7 à Dhangadhi et 28 à Chitwan. A Pokhara, la police a chargé un rassemblement, et deux syndicalistes ont été blessés. A Butwal, après un rassemblement et une réunion de masse, la police a menacé d’arrêter M. Kamal Gautam, chef de zone de la GEFONT. A Mahendranagar, la police a fouillé et a menacé d’arrêter un chef de zone nouvellement élu à la GEFONT, Dharmanda Pant, suite à une conférence qu’il avait organisée à l’occasion de la Journée internationale de la femme.
  8. 1123. Enfin, la CISL allègue que, dans un avis publié le 7 février, le Roi a ordonné à tous les syndicats du secteur public de fermer temporairement. Dans ses communications du 2 juin et du 23 août 2005, l’Organisation des employés du gouvernement du Népal (NEGEO), créée en 1990 et reconnue par le gouvernement en vertu de la loi sur la fonction publique, allègue pour sa part que, en adoptant l’ordonnance modifiant cette loi et, en particulier l’article 53, le gouvernement a éliminé les dispositions autorisant l’existence d’une organisation nationale de fonctionnaires et a banni les activités de la NEGEO. Celle-ci craint que le nouveau mode d’organisation par profession ne vise à fragmenter le mouvement syndical dans la fonction publique. En outre, selon le plaignant, le ministre de l’Administration générale avait annoncé que l’ordonnance visait à placer les nouvelles organisations sous le contrôle du gouvernement. Il blâmait l’organisation existante pour son allégeance politique et affirmait que le gouvernement devait remédier à la situation.
  9. 1124. Le 3 août 2005, après l’adoption de l’ordonnance, le bureau administratif de district à Katmandou a publié un avis selon lequel l’enregistrement de toutes les organisations de fonctionnaires était révoqué. La NEGEO a déposé une requête devant la Cour suprême dénonçant cette interdiction inconstitutionnelle. Dans l’extrême ouest du pays, le chef du district de Bajhang a mis sous clé le bureau de district de la NEGEO et a confisqué tout ce qui s’y trouvait. La NEGEO allègue que le gouvernement a adopté la modification de la loi sur la fonction publique, qui impose également des restrictions au régime de sécurité sociale et à d’autres droits importants des travailleurs, sans consulter ses partenaires sociaux ni même prendre en compte leurs objections. Les nouvelles dispositions prévoient des «associations d’employés dirigées» correspondant chacune à un secteur d’activité (comptabilité, administration générale, affaires juridiques, etc.), soit une douzaine d’associations. Toujours selon le plaignant, le droit d’association est accordé, aux termes de la nouvelle ordonnance, aux employés non fonctionnaires, qui sont en faveur du gouvernement royal.
  10. B. Réponse du gouvernement
  11. 1125. Dans ses communications datées du 12 avril et du 19 septembre 2005, le gouvernement indique, au sujet des allégations de la CISL, que l’on ne peut comprendre l’évolution récente de la situation politique au Népal sans tenir compte des changements survenus dans le paysage politique général du Royaume ces dernières années. Par leurs actes de violence subversive, des groupes terroristes semaient l’anarchie dans plusieurs régions du pays, mettant en danger la vie de millions de Népalais. Les événements du 1er février visaient à protéger la population contre les auteurs de ces actes de violence, à améliorer la loi, à assurer les approvisionnements essentiels et à rétablir un climat de sécurité. Le gouvernement affirme que les situations d’urgence diffèrent des situations normales et exigent des mesures plus strictes. Toutefois, il attire l’attention du comité sur le fait que, depuis lors, l’état d’urgence a été levé.
  12. 1126. Le gouvernement nie l’allégation selon laquelle toutes les libertés civiles ont été suspendues. Il ajoute qu’il a du mal à concevoir comment l’on peut jouir de libertés dans un climat de terreur provoqué par la sédition. Pour que les libertés civiles l’emportent, il faut d’abord et avant tout que le processus politique normal fonctionne et que la population puisse vivre en paix. Toutefois, même pendant l’état d’urgence, le paragraphe 12 c) de la Constitution, qui garantit la liberté d’association, n’a pas été suspendu, ce qui signifie que les syndicats pouvaient fonctionner pendant cette période. Le gouvernement comprend que l’état d’urgence restreint la liberté de toutes les couches de la société, les syndicats y compris. Toutefois, le gouvernement réfute l’allégation selon laquelle 1 400 personnes étaient ciblées pour arrestation ou étroite surveillance; il affirme qu’une surveillance générale s’imposait effectivement pour éviter des victimes innocentes et qu’elle n’était pas préjudiciable aux syndicats ni dirigée contre eux. Il y a eu très peu de cas d’arrestation et de détention depuis la levée de l’état d’urgence, mais aucun pour le seul motif d’activité ou d’appartenance syndicale. On n’a signalé aucun cas de mauvais traitement, de torture ou de privation. Qui plus est, on a mis un point d’honneur à rendre la période de détention la plus courte possible. Actuellement, il n’y a pas d’activiste syndical en détention. La plupart des détenus ont été libérés bien avant la levée de l’état d’urgence, après enquête préliminaire. Le gouvernement s’est dit convaincu que ni la Constitution de l’OIT ni les conventions ou recommandations pertinentes n’écartent la possibilité d’imposer certaines restrictions lorsque la situation l’exige. Le gouvernement estime que, l’état d’urgence étant levé depuis longtemps, toutes les allégations faites à ce sujet n’ont plus aucune raison d’être.
  13. 1127. Le gouvernement affirme que le processus du dialogue social n’a pas été interrompu, nonobstant l’état d’urgence. Le ministère du Travail et de la Gestion des transports était en liaison permanente avec les dirigeants syndicaux pendant cette période. Des consultations tripartites sur diverses questions relatives à la législation et au travail se sont déroulées sans encombre. Les représentants de toutes les fédérations nationales syndicales ont pris librement part à ces consultations. Les bureaux du travail responsables de l’administration des activités syndicales ont été enjoints à s’acquitter de leurs fonctions normales comme l’enregistrement des syndicats.
  14. 1128. Pour ce qui concerne les allégations de la NEGEO, le gouvernement, dans sa communication du 18 août 2005, confirme que la loi sur la fonction publique a été modifiée le 14 juillet 2005. Il indique que cette modification fait partie intégrante du programme de réforme global prévu depuis longtemps à l’échelle nationale pour améliorer l’efficience et l’efficacité de l’administration publique, compte tenu de la situation socio-économique du pays. Les tentatives de réforme n’ont rien d’un complot; l’optimisation de l’effectif de la fonction publique est une fonction normale et un droit légitime de tout gouvernement. La réforme des régimes de sécurité sociale, y compris des pensions, a été dictée par des impératifs économiques et par les montants exorbitants à débourser pour les retraites. Un nouveau régime plus supportable a donc été mis en place, basé sur les cotisations des employés et la contribution de l’Etat, pratique acceptée dans le monde entier. Par ailleurs, la loi dans sa version modifiée n’affecte en rien la sécurité d’emploi.
  15. 1129. Le gouvernement affirme que, tout en reconnaissant aux fonctionnaires le droit de constituer une organisation et d’y adhérer pour la promotion et la défense de leurs intérêts professionnels, l’article 6 de la convention no 98, que le Népal a ratifiée, stipule que celle-ci ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics. Il précise en outre que la loi sur la fonction publique s’applique seulement aux fonctionnaires engagés dans l’administration de l’Etat. Des lois distinctes régissent les employés des autres secteurs et des entreprises publiques. Toutefois, la loi sur la fonction publique dans sa version modifiée n’empêche pas les fonctionnaires engagés dans l’administration de l’Etat de constituer leurs organisations professionnelles. Elle leur permet plutôt de créer des organisations professionnelles fondées sur leurs intérêts professionnels respectifs. Le paragraphe 53(1) de la loi modifiée stipule expressément que «les fonctionnaires peuvent constituer leurs organisations fondées sur la diversité des professions». De même, conformément au paragraphe 53(2) de la loi, ces organisations peuvent présenter leurs suggestions au gouvernement relativement aux réformes politiques et judiciaires, protégeant ainsi leur droit d’association. Dans l’intervalle, le gouvernement, de concert avec les fonctionnaires, rédigera les dispositions du règlement sur la fonction publique régissant la constitution d’organisations. Le gouvernement ajoute que cette réforme ou modification n’affecte en rien la loi sur le travail ni la loi sur les syndicats. L’allégation d’organisations «dirigées» de la NEGEO est donc injustifiée. En outre, l’allégation selon laquelle le droit d’association ne sera conféré qu’aux employés non fonctionnaires qui sont en faveur du gouvernement n’est pas fondée.
  16. 1130. Au sujet de la dissolution de la NEGEO, le gouvernement indique qu’elle s’imposait pour faciliter l’introduction des nouvelles modalités régissant les organisations professionnelles. Le but visé était non de restreindre le droit d’association, mais de faire place à une organisation valable et un dialogue constructif fondés sur les intérêts professionnels des employés concernés.
  17. 1131. Le gouvernement ajoute que non seulement la nouvelle loi sur la fonction publique garantit aux fonctionnaires le droit d’association, mais elle répond également mieux aux besoins des employés en énonçant des dispositions supplémentaires pour le traitement et le règlement des griefs.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1132. Le comité note que les plaignants – en l’occurrence la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et l’Organisation des employés du gouvernement du Népal (NEGEO) – allèguent que, après le coup d’Etat royal survenu au Népal en février 2005, toutes les libertés civiles ont été suspendues en raison de l’état d’urgence, et que tous les droits syndicaux ainsi que les réunions de plus de cinq personnes ont été bannis. Le climat de peur qui en a résulté a forcé bon nombre de membres, d’activistes et de dirigeants du mouvement syndical népali à s’exiler, par crainte d’être arrêtés. Les plaignants allèguent également que plusieurs dirigeants syndicaux ont été arrêtés, des bureaux de syndicats ont été fouillés sans raison, et que le ministre de l’Education a harcelé et menacé les syndicats d’enseignants, l’Association nationale des enseignants du Népal (NNTA) et l’Association des enseignants du Népal (NTA). Enfin, il est allégué que tous les syndicats du secteur public ont été suspendus et que la loi sur la fonction publique a été modifiée pour interdire les activités de la NEGEO.
  2. 1133. Le comité note les allégations présentées par la CISL dans sa communication du 15 mars 2005 concernant la suspension des libertés civiles et des droits des syndicats, y compris le droit d’organiser des réunions publiques pendant l’état d’urgence. Selon les plaignants, la proclamation royale du 1er février 2005 a imposé toutes sortes de restrictions à l’enregistrement et au fonctionnement des syndicats. Les plaignants allèguent que, même si la proclamation royale manquait de clarté, les sanctions prévues pour violation de ses dispositions pouvaient aller jusqu’à un an d’emprisonnement. Le gouvernement ne fournit pas de précisions à ce sujet, se contentant d’affirmer que le processus du dialogue social n’a jamais été interrompu pendant l’état d’urgence. Bien que la promulgation de règlements d’exception autorisant le gouvernement à soumettre l’organisation de réunions publiques à des restrictions applicables non seulement aux réunions publiques syndicales, mais à toutes les réunions publiques, et suscitée par des événements que le gouvernement a considérés comme étant à ce point sérieux qu’ils justifiaient la proclamation d’un état d’exception, ne constitue pas en elle-même une violation de la liberté syndicale, le comité rappelle également qu’en cas d’état d’urgence il est souhaitable que, dans toute la mesure possible, le gouvernement ait recours, dans ses rapports avec les organisations professionnelles et leurs représentants, à des mesures prévues par le droit commun, plutôt qu’à des mesures d’exception qui risquent de comporter, par leur nature même, certaines restrictions à des droits fondamentaux. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 188 et 190.] Le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle l’état d’urgence a depuis été levé et espère que le gouvernement gardera à l’esprit ces principes fondamentaux à l’avenir, dans l’éventualité d’une nouvelle situation d’urgence.
  3. 1134. En ce qui a trait aux allégations de fouilles injustifiées de locaux de la Centrale syndicale du Népal (NTUC) et de la Fédération générale des syndicats népalais (GEFONT), ainsi que du domicile de M. Basnet, le président de la NTUC, et la confiscation de documents syndicaux dans les bureaux de la NTUC, le comité note que le gouvernement ne fournit aucune précision à ce sujet. Le comité estime que l’on ne peut invoquer l’état d’urgence pour justifier l’entrée de la police ou de l’armée dans les locaux de syndicats sans mandat de perquisition. Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que tous les documents saisis dans les bureaux de la NTUC soient restitués sans délai et de le tenir informé à cet égard.
  4. 1135. Par ailleurs, le comité note les allégations de menaces d’arrestation, d’arrestation et de mauvais traitement de personnes détenues par suite des événements du 1er février 2005, ainsi que des rassemblements du 8 mars. Le comité note que, selon la CISL, 25 syndicalistes ont été arrêtés par suite de la proclamation royale du 1er février. La CISL allègue que certains ont été détenus jusqu’à trois mois, dont plusieurs maltraités pendant leur détention. Certains ont été forcés de s’exiler par crainte d’être arrêtés, comme le président de la NTUC, M. Basnet, et les dirigeants syndicaux de la Fédération des journalistes népalais. En outre, les rassemblements de la Journée de la femme ont donné lieu à 226 arrestations. Le comité note la déclaration du gouvernement selon laquelle les cas d’arrestation et de détention ont été très rares, aucun n’ayant eu pour seul motif l’activité ou l’appartenance syndicale. On n’a signalé non plus aucun cas de mauvais traitement, de torture ou de privation. Selon le gouvernement, on a mis un point d’honneur à rendre la période de détention la plus courte possible. Le gouvernement affirme que, actuellement, il n’y a pas d’activiste syndical en détention. La plupart des détenus ont été libérés avant la levée de l’état d’urgence, après enquête préliminaire.
  5. 1136. A cet égard, le comité rappelle tout d’abord que les mesures de détention préventive doivent être limitées dans le temps à de très brèves périodes uniquement destinées à faciliter le déroulement d’une enquête judiciaire. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 195.] A la lumière des faits contradictoires présentés respectivement par les plaignants et le gouvernement sur la question des mauvais traitements et des périodes de détention pouvant aller jusqu’à trois mois, ainsi que des menaces d’arrestation constantes présumées qui auraient forcé des syndicalistes à l’exil, le comité demande au gouvernement de mener une enquête indépendante en la matière pour que les mesures appropriées soient prises, incluant la réparation du préjudice causé et l’imposition de sanctions aux responsables. En outre, dans l’éventualité où l’enquête indépendante confirme le bien-fondé des allégations de menaces d’arrestation constantes, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que les autorités concernées reçoivent les instructions requises pour ne pas faire obstacle à l’exercice légitime d’activités syndicales par la menace d’arrestation, de manière à ce que les dirigeants syndicaux puissent se prévaloir librement de leurs droits syndicaux. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l’enquête indépendante.
  6. 1137. Le comité note par ailleurs l’allégation de harcèlement et d’intimidation de la part du ministre de l’Education à l’endroit des syndicats d’enseignants népali, la NNTA et la NTA. Selon les plaignants, le 7 mars, dans les médias, le ministre a accusé les syndicats d’allégeance politique et a affirmé que, si un syndicat doit exister pour les enseignants, il ne devrait pas y en avoir plus d’un commun à l’ensemble. Le gouvernement n’a pas répondu à cette allégation. Etant donné que de telles déclarations faites par les autorités constituent de sérieux actes d’ingérence dans les affaires internes des syndicats, et qu’elles sont donc incompatibles avec les principes de liberté d’association, le comité demande au gouvernement de s’abstenir de commettre de tels actes d’ingérence et de donner les instructions qui conviennent aux autorités compétentes pour que de tels actes ne se reproduisent plus à l’avenir. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  7. 1138. Le comité note l’allégation de la NEGEO selon laquelle la loi sur la fonction publique a été modifiée sans consultation des partenaires sociaux. Selon les plaignants, les nouvelles dispositions prévoient des «associations d’employés dirigées», ouvrant la voie à la fragmentation des associations, le droit d’association n’étant accordé qu’à ceux qui sont en faveur du gouvernement royal. Dans sa réponse, le gouvernement réfute ces allégations et affirme que la loi sur la fonction publique ne s’applique qu’aux fonctionnaires engagés dans l’administration de l’Etat, des lois distinctes régissant les employés des autres secteurs et des entreprises publiques. Toutefois, la version modifiée de la loi sur la fonction publique n’empêche pas les fonctionnaires engagés dans l’administration de l’Etat de constituer leurs organisations professionnelles. Elle leur permet plutôt de créer des organisations professionnelles fondées sur leurs intérêts professionnels respectifs. Le gouvernement ajoute que cette modification n’affecte en rien la loi sur le travail ni la loi sur les syndicats.
  8. 1139. Le comité regrette que la NEGEO n’ait pas été consultée lors de la rédaction des modifications apportées à la loi sur la fonction publique. Le comité attire l’attention du gouvernement sur l’importance d’une consultation des organisations de travailleurs avant l’adoption de toute loi touchant les droits de ces dernières [voir Recueil, op. cit., paragr. 929 et 930], et demande au gouvernement de veiller à l’application de ce principe à l’avenir.
  9. 1140. Le comité note que, dans sa version modifiée, la loi sur la fonction publique autoriserait seulement les organisations de la fonction publique à constituer des organisations par groupe professionnel. Le comité note par ailleurs que le bannissement des activités de la NEGEO et la confiscation de ses biens résultent directement de cette modification. Selon le gouvernement, ces mesures s’imposaient pour faciliter l’introduction des nouvelles modalités régissant les organisations professionnelles. Le but visé était non de restreindre le droit d’association, mais de faire place à une organisation valable et un dialogue constructif fondés sur les intérêts professionnels des employés concernés. Par ailleurs, le gouvernement n’a pas répondu aux allégations selon lesquelles des biens de la NEGEO ont été confisqués. Le comité estime que les raisons invoquées par le gouvernement ne justifient pas l’interdiction des activités d’une organisation syndicale. En outre, le comité rappelle que les fonctionnaires doivent bénéficier comme tous les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, du droit de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier, sans autorisation préalable, afin de promouvoir et de défendre leurs intérêts. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 213.] Le comité rappelle également que les organisations de fonctionnaires ne doivent pas être limitées aux employés d’un ministère, d’un département ou d’un service et qu’elles devraient avoir le droit de s’affilier à une fédération ou confédération de leur choix. Etant donné que la loi sur la fonction publique dans sa version modifiée, et l’interdiction des activités de la NEGEO qui a suivi, équivaut à une restriction imposée à la constitution d’organisations autres que professionnelles et porte sérieusement atteinte aux droits de ces travailleurs et de leurs organisations de former des organisations interprofessionnelles nationales pour défendre leurs intérêts, le comité exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires, dont la modification de la loi, pour que les fonctionnaires soient autorisés à constituer de telles organisations et à s’affilier aux fédérations et confédérations de leur choix, et pour que la NEGEO puisse exercer librement ses activités à nouveau et que ses biens lui soient restitués sans délai. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  10. 1141. Le comité demande au gouvernement d’examiner la possibilité d’une mission de contacts directs dans le pays, afin de promouvoir la pleine mise en œuvre de la liberté syndicale.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 1142. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
  2. a) Le comité rappelle que, en cas d’état d’urgence, il est souhaitable que le gouvernement, dans ses rapports avec les organisations professionnelles et leurs représentants, se fie dans la mesure du possible au droit commun plutôt qu’aux mesures d’urgence, lesquelles sont susceptibles, par définition, d’imposer certaines restrictions au droit fondamental. Il espère que le gouvernement gardera à l’esprit ces principes de base à l’avenir, dans l’éventualité d’une nouvelle situation d’urgence.
  3. b) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que tous les documents saisis dans les bureaux de la NTUC soient restitués sans délai.
  4. c) En ce qui a trait aux allégations de mauvais traitement de détenus, d’arrestations et de menaces d’arrestation:
  5. – le comité demande au gouvernement de mener une enquête indépendante en la matière pour que les mesures appropriées soient prises, incluant la réparation du préjudice causé et l’imposition de sanctions aux responsables;
  6. – en outre, dans l’éventualité où l’enquête indépendante confirme le bien-fondé des allégations de menaces d’arrestation constantes, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que les autorités concernées reçoivent les instructions requises pour ne pas faire obstacle à l’exercice légitime d’activités syndicales par la menace d’arrestation, de manière à ce que les dirigeants syndicaux puissent se prévaloir librement de leurs droits syndicaux;
  7. – le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de l’enquête indépendante.
  8. d) Le comité demande au gouvernement de s’abstenir de commettre des actes d’ingérence dans les affaires syndicales et de donner les instructions appropriées aux autorités compétentes pour que de tels actes d’ingérence dans les affaires internes des syndicats ne se reproduisent plus.
  9. e) Le comité regrette que la NEGEO n’ait pas été consultée lors de la rédaction des modifications apportées à la loi sur la fonction publique. Le comité attire l’attention du gouvernement sur l’importance d’une consultation préalable des organisations de travailleurs avant l’adoption de toute loi touchant les droits de ces dernières. Il demande au gouvernement de veiller à l’application de ce principe à l’avenir.
  10. f) Le comité exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires, dont la modification de la loi, pour que les fonctionnaires soient autorisés à constituer des organisations interprofessionnelles nationales et à s’affilier aux fédérations et confédérations de leur choix, et pour que la NEGEO puisse exercer librement ses activités à nouveau et que ses biens lui soient restitués sans délai.
  11. g) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des suites données aux recommandations précitées.
  12. h) Le comité demande au gouvernement d’examiner la possibilité d’une mission de contacts directs dans le pays, afin de promouvoir la pleine mise en œuvre de la liberté syndicale.
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