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- 763. La plainte figure dans une communication de l’Assemblée intersyndicale des travailleurs - Congrès national des travailleurs (PIT-CNT) et de la Confédération des organisations de fonctionnaires de l’Etat (COFE), datée de juin 2003. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 30 décembre 2003.
- 764. L’Uruguay a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants - 765. Dans leur communication de juin 2003, l’Assemblée intersyndicale des travailleurs - Congrès national des travailleurs (PIT-CNT) et la Confédération des organisations de fonctionnaires de l’Etat (COFE) allèguent que, dans l’administration centrale, c’est-à-dire pour les fonctionnaires qui dépendent des ministères de l’Etat, à de rares exceptions près, la négociation collective, de quelque nature qu’elle soit, n’a pas cours pour réglementer les conditions d’emploi. Plus encore, les autorités ont fait une totale abstraction de la revendication des syndicats, selon laquelle les réformes des structures organisationnelles n’ont pas été négociées, bien que certains de leurs éléments aient été très liés à la profession et à l’emploi, et qu’elles aient considérablement modifié et empiré les conditions de travail.
- 766. Concernant la législation, l’unique tentative de réglementation a été l’article 739 de la loi no 16736 du 5 janvier 1996 qui a créé, au sein du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, une Commission permanente des relations professionnelles pour l’administration centrale et les organismes énumérés dans l’article 220 de la Constitution de la République (pouvoir judiciaire, Cour des comptes, Tribunal des contentieux administratifs, Cour électorale, entités autonomes et services décentralisés, à l’exception des services industriels et commerciaux). Cette commission est dotée d’un mandat très clair: conseiller en matière de salaires, de conditions d’emploi et d’autres thèmes réglementés par les conventions internationales du travail.
- 767. Cependant, cette loi ne respecte pas les dispositions de la convention no 154 de l’OIT, ni en ce qui concerne la composition de la commission, puisqu’elle n’est pas bipartite, ni en ce qui concerne son mandat, qui se limite au conseil. Par ailleurs, cette commission n’a pas été officiellement instituée et elle ne fonctionne pas encore. Elle n’a été convoquée que deux fois, et elle ne s’est penchée ni sur les revendications ni sur les attentes des syndicats de fonctionnaires, ce qui a motivé les observations de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations dans les rapports des années 1998 (69e session), 1999 (70e session), 2000 (71e session) et 2001 (72e session).
- 768. Les plaignants indiquent que l’administration centrale accuse une tendance très nette à la précarisation des relations du travail, due à une sape de la stabilité professionnelle, à l’accès à la fonction par le biais de contrats de durée déterminée et à la violation des droits syndicaux et des libertés et garanties qui en sont les fondements. Cette situation découle de l’imposition unilatérale des conditions d’emploi et de l’absence de négociation collective. A cet égard, les plaignants font mention de quelques cas: 1) les projets de réforme de l’Etat, par le biais de la loi budgétaire no 16736, et ses décrets réglementaires, des normes relatives au budget et à la présentation des comptes et, surtout, de la loi de présentation des comptes no 17556 du 18 septembre 2002 et son décret réglementaire. Selon les plaignants, ces normes ont permis d’institutionnaliser le régime d’exclusion compulsive du fonctionnaire des cadres de l’administration, et la catégorie de fonctionnaires stables a cédé le pas à celle de fonctionnaires assujettis à des contrats précaires; dans certains cas, les autorités ont exprimé leur intention d’obliger les fonctionnaires déjà précarisés à se constituer en entreprise individuelle; 2) pour ce qui est des salaires, le décret no 43/003 du 30 janvier 2003 qui concerne les augmentations de salaires futures des fonctionnaires relevant du budget national et de l’article 221 de la Constitution de la République et le décret no 191/003 du 16 mai 2003 («Ajustement des salaires des fonctionnaires») constituent de nouveaux exemples des diverses décisions qui ont été prises unilatéralement et en l’absence de négociation. Selon les plaignants, le premier décret transforme l’augmentation de salaire en délivrance de tickets d’alimentation; le deuxième décret prévoit une augmentation salariale contrevenant aux normes établissant les indices à prendre en compte ainsi qu’à la convention no 154 sur la négociation collective.
- 769. Les plaignants ajoutent que, dans les rares cas où il y a eu négociation collective, l’administration n’a donné aucune suite à ces accords. C’est le cas des conventions conclues entre la Fédération des fonctionnaires de la santé publique et le ministère de la Santé publique en date du 30 novembre et du 27 décembre 2000, concernant la réglementation de la prestation d’assistance pour invalidité, dont le décret no 346/002 en date du 3 septembre 2002 a par la suite réglementé l’application de l’extension de cette prestation aux handicapés.
- 770. Les organisations plaignantes ajoutent que, pour ce qui est de la jouissance des libertés syndicales et du droit syndical, on a relevé des cas où ces libertés et ce droit sont méconnus, en violation des dispositions de la convention no 151. Parmi les cas les plus graves, on peut citer les réductions de salaire infligées à des dirigeants qui ont participé à des manifestations syndicales. Une dirigeante de l’Association des fonctionnaires du ministère de l’Industrie, Mme Leonor Quefan, s’est vu infliger une de ces réductions de salaire et elle a saisi la Cour des contentieux, qui lui a donné raison; la dirigeante de l’Association des fonctionnaires du Service de radiodiffusion, Mme Anahí Oldán, a été une autre de ces victimes, et elle a saisi la justice. Les organisations plaignantes allèguent par ailleurs que les travailleurs affiliés à l’Association des travailleurs de la Direction nationale des transports du ministère des Transports et des Travaux publics ont décidé en assemblée l’application d’une mesure syndicale, qui a été communiquée aux autorités; ces dernières ont immédiatement actionné le mécanisme disciplinaire contre ces dirigeants.
- 771. Enfin, les organisations plaignantes indiquent que le fait que l’Etat fasse fi du droit à la négociation collective est un élément négatif, non seulement en ce qui concerne les conditions de travail actuelles dans la fonction publique, mais aussi parce qu’il provoque d’alarmantes résurgences de répression contre l’exercice des droits civils fondamentaux. Dans ce contexte, les organisations plaignantes allèguent qu’à la date de la présentation de la plainte près de 100 fonctionnaires de la Cour électorale ont été sanctionnés uniquement parce qu’ils avaient exercé leur droit de revendication vis-à-vis de certaines conditions de travail. La sanction a été l’unique réponse apportée à leurs revendications, sans qu’ils puissent appliquer leur droit de défense préalable. En outre, lorsqu’ils ont appliqué les mécanismes de recours prévus dans la Constitution de la République contre cette sanction, une autre sanction plus grave encore leur a été imposée.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement - 772. Dans sa communication du 30 décembre 2003, le gouvernement signale en premier lieu que, pour bien poser le problème, il est indispensable de préciser le concept d’«administration centrale». Il s’agit en fait du pouvoir exécutif et des divers ministères ou secrétariats d’Etat. Il faut également distinguer les entités autonomes et les services décentralisés qui sont liés au pouvoir exécutif par le biais des divers ministères.
- 773. Le gouvernement fait savoir que les fonctionnaires en général et ceux de l’administration centrale en particulier sont régis par des statuts (ensemble organique de normes constitutionnelles, juridiques et réglementaires) qui réglementent leurs droits, leurs devoirs et leurs obligations. Ces droits sont notamment liés à la stabilité de la fonction, aux promotions, à la rémunération et à la procédure disciplinaire administrative et ils sont assortis de toutes les garanties, ainsi que du droit au recours en justice. Ces statuts, qui selon le gouvernement ont la même précédence que la Constitution depuis 1934, constituent une garantie solide pour les fonctionnaires, tant pour la protection de leur carrière administrative que pour celle des droits du citoyen et des droits concernant la liberté syndicale et la négociation collective. L’un des éléments les plus caractéristiques du statut des fonctionnaires en Uruguay, qui les distingue d’ailleurs des travailleurs du privé, régis par un système de stabilité relative, est le concept d’inamovibilité, qui implique que l’Etat ne peut annuler le contrat d’un fonctionnaire, sauf en cas d’ineptie, d’omission ou de délit, après enquête administrative assortie de toutes les garanties, et avec l’autorisation du Sénat de la République. La destitution des employés de l’Etat pour ineptie, omission ou délit incombe au Président de la République, qui agit avec le ministre ou les ministres concernés ou avec son conseil des ministres, et dans tous les cas, avec l’accord de la Chambre des sénateurs.
- 774. Le gouvernement fait savoir que l’Uruguay n’est pas passé par un processus de privatisation très approfondi; la pièce maîtresse de sa stratégie de développement a été un processus de réforme de l’Etat orienté vers la réduction de sa pression sur l’économie, et vers la prestation d’un meilleur service public; ce processus a permis de surmonter, en quelque sorte, le débat «prééminence de l’Etat contre privatisation». L’un des instruments de cette réforme a été la loi no 16736 du 5 janvier 1996 qui a permis de créer le Comité exécutif pour la réforme de l’Etat (CEPRE), composé du directeur du Bureau de la planification et du budget, qui le préside, du ministre de l’Economie et des Finances, et du directeur du Bureau du service public. Cet organisme est chargé de surveiller la progression de la réforme de l’Etat dans l’administration centrale, et de contrôler la restructuration administrative projetée par chaque ministère. La même loi autorise le pouvoir exécutif à sous-traiter à des tiers la prestation d’activités accessoires ou d’appui, en donnant la préférence à des entreprises constituées par des ex-fonctionnaires ou par des fonctionnaires mis en disponibilité pour convenance personnelle.
- 775. En ce qui concerne la restructuration de l’administration centrale, le pouvoir exécutif a approuvé le décret no 186/96 daté du 16 mai 1996. La réforme de l’Etat doit se concentrer sur les principales tâches qui lui incombent, et la redistribution à ces tâches des ressources destinées jusque-là à des activités peu productives, ou ne devant pas être assumées directement par l’Etat, comme les services de réparation, d’imprimerie, de nettoyage, de maintenance, de surveillance, de transport de biens et de personnes, d’architecture, les services médicaux, les cantines, qui peuvent être sous-traités à des tiers. Le décret no 361/96 en date du 12 septembre 1996 réglemente le régime de réinsertion au travail et dans l’entreprise des fonctionnaires, ainsi que le régime de congé pour convenance personnelle, correspondant aux postes et aux fonctions faisant l’objet d’un contrat avec l’administration publique. Ce processus a été qualifié d’ajustement structurel visant à restreindre les activités assumées directement par l’Etat, à rationaliser les services existants, à diminuer le nombre des fonctionnaires, et à introduire des changements dans la gestion et dans le système de rémunération, ainsi qu’une politique active de transfert du fonctionnaire vers le secteur privé, par le biais de mécanismes de réinsertion au travail et dans l’entreprise. Parallèlement, on s’est efforcé d’encourager la participation des fonctionnaires, à travers leurs organisations les plus représentatives, à la Commission permanente des relations professionnelles. Par conséquent, «l’exclusion compulsive» évoquée par les organisations plaignantes ne correspond pas à la réalité, puisque le fonctionnaire peut choisir entre diverses options, avec la garantie de disposer d’une durée de temps suffisante et de procédures adéquates.
- 776. Le gouvernement ajoute que la loi no 17556 du 18 septembre 2002 (présentation des comptes et bilan budgétaire de l’exercice 2001) a été récemment sanctionnée; cette loi prévoit la poursuite du processus de restructuration du personnel de l’administration publique, réitère les limites du recrutement, crée des incitations au départ à la retraite, modifie le système de rémunération et crée un statut du personnel pour les fonctionnaires au bénéfice d’un contrat de travail de durée déterminée. En fait, cette loi n’a pas créé le concept des contrats de durée déterminée, puisqu’il existait déjà. Elle représente simplement un nouvel apport, tant pour le travailleur que pour l’Etat, concernant les droits et obligations de ce mode de recrutement qui, loin de précariser une situation donnée, établit des certitudes juridiques et explicite une série de droits comme les avantages sociaux, le congé annuel, la couverture du risque de maladie, l’assurance chômage et l’indemnité de licenciement.
- 777. Le gouvernement fait savoir que le droit positif uruguayen n’a pas limité la liberté syndicale et a respecté l’autonomie et l’autarcie de l’organisation syndicale. L’absence de réglementation hétéronome de l’organisation syndicale est peut-être l’élément le plus caractéristique de ce droit, et il intègre déjà une conscience juridique nationale. En vertu du cadre juridique national, et nantis des garanties les plus élevées, les fonctionnaires uruguayens ont créé et mis au point diverses structures syndicales (COFE, ADEOM, AEBU), qui font partie de la Fédération syndicale PIT-CNT. Dès 1990, ces organisations ont commencé à conclure des conventions collectives au niveau des entités industrielles et commerciales ainsi qu’à celui des pouvoirs locaux départementaux. Bien que l’entité rectrice de la sécurité sociale, à savoir la Banque de prévoyance sociale, intégrée par les partenaires sociaux, pratiquait déjà la négociation collective avec beaucoup de fluidité à cette époque, l’article 224 de la loi no 16462 du 11 janvier 1994 et la loi d’interprétation no 16560 du 19 août 1994 l’ont expressément autorisée à conclure des conventions collectives avec le personnel, sans accord préalable du Bureau de la planification et du budget, et à verser des avances, lorsqu’elle n’a pas reçu l’approbation du Bureau.
- 778. La loi budgétaire no 16736 du 5 janvier 1996 prévoit la création de la Commission permanente des relations professionnelles pour l’administration centrale et les organismes cités dans l’article 220 de la Constitution de la République, c’est-à-dire le pouvoir judiciaire, le Tribunal des contentieux administratifs, les entités autonomes, les services décentralisés non industriels et commerciaux; le mandat de cette commission est de conseiller en matière de salaires, de conditions d’emploi et concernant toute question réglementée par les conventions internationales du travail. A cet égard, il faut noter que cette commission a été très active après sa création, mais elle n’a pas siégé récemment, bien qu’il soit prévu expressément que n’importe laquelle des parties concernées peut la convoquer lorsqu’elle le juge utile à ses intérêts. Dans les faits, aucune des organisations ne l’a convoquée parce qu’en marge de cette commission les relations professionnelles se développent d’une manière tout à fait normale dans le secteur public, si l’on prend en compte le fait que les fonctionnaires accusent les taux de syndicalisation les plus élevés.
- 779. Le gouvernement signale qu’entre 1995 et 1999 la négociation collective a été libre et fluide, tant au niveau des entreprises publiques qu’à celui des pouvoirs locaux départementaux. Et même s’il n’y a pas eu de conventions collectives dans l’administration centrale, un forum de négociation s’est créé dans plusieurs organismes qui font partie du gouvernement central; ce forum a permis aux syndicats de faire des revendications dont l’administration a tenu compte dans ses prévisions budgétaires. C’est le cas de la Fédération uruguayenne des instituteurs (FUM) qui a mis au point une intense stratégie de mobilisation et de participation et qui a réussi à influencer la transformation du secteur. On peut également citer le cas de la Fédération des fonctionnaires de la santé publique (FFSP), qui au cours de la même période a participé à la définition des questions salariales pour son secteur, exerçant ainsi une influence sur le budget quinquennal et la loi de présentation des comptes.
- 780. Le gouvernement explique qu’entre 1995 et 1999 les entreprises publiques ont préservé deux domaines de négociation: un domaine centralisé et de nature générale dans le Bureau de la planification et du budget, et un autre décentralisé dans chacune des entreprises. La négociation centralisée n’a jamais été interrompue et plusieurs conventions ont été conclues à ce niveau, dans l’Administration nationale des ports (ANP), dans le secteur des télécommunications (ANTEL), dans l’Entreprise publique d’alimentation électrique (UTE), dans l’Administration nationale du courrier (ANC), dans la Banque de prévoyance sociale (BPS) et d’autres encore. A l’instar des entreprises publiques, la banque d’Etat a conclu en 1998 une convention centralisée couvrant les quatre banques officielles, conçue comme un cadre d’amélioration et d’homogénéisation des relations de travail dans ce secteur, et qui a permis de l’adapter à la conjoncture sociale économique nationale et régionale.
- 781. En 2000 et 2001, les éléments caractéristiques de la période antérieure se sont maintenus dans le secteur public. On n’a pas enregistré de convention dans l’administration centrale et la négociation est restée fluide dans les entreprises publiques et dans la banque d’Etat. A cet égard, il convient de noter la convention conclue par l’Administration nationale des combustibles, de l’alcool et du Portland (ANCAP) en mars 2000; il s’agit d’un accord-cadre dont il est tenu compte ensuite dans les accords de sections adaptés aux objectifs de celles-ci.
- 782. Selon le gouvernement, on peut déduire de ce qui précède que la négociation collective existe dans le secteur public et que, dans un contexte régional et international extrêmement complexe et limité en matière de ressources économiques, elle a permis à la société d’articuler les intérêts légitimes des fonctionnaires avec ceux de l’ensemble de la société, puisque cette dernière fournit les ressources qui financent le budget tout en bénéficiant des services que prête l’Etat.
- 783. En définitive, le gouvernement réaffirme que les facilités qu’offre le ministère du Travail et de la Sécurité sociale aux parties qui souhaitent aborder une négociation collective sont demeurées inchangées et que cette négociation collective n’est assujettie à aucune limitation, de quelque nature que ce soit. Nulle dérogation à la loi ou dénonciation de conventions internationales du travail ne permettent de conclure que la législation du pays a sombré dans la déréglementation des conditions de travail ou la précarité de l’emploi.
- 784. Concernant les commentaires de la COFE relatifs aux lois de réforme de l’Etat, notamment les lois nos 16736 et 17556, le gouvernement souligne que l’application de ces normes n’a pas entraîné l’exclusion compulsive du fonctionnaire, ni révélé de tendance à la précarisation de l’emploi; elle a donné lieu, au contraire, à une plus grande sécurité juridique et à la reconnaissance expresse des droits du travail et de la sécurité sociale.
- 785. En ce qui concerne les salaires, le gouvernement fait savoir que le décret no 43/003 du 30 janvier 2003 a autorisé les fonctionnaires des organismes relevant du budget national et de l’article 221 de la Constitution de la République à demander un prêt sur la base de futures augmentations de salaire, qui sera financé par la Division du crédit social de la Banque de la République orientale de l’Uruguay; le décret no 501/003 du 5 décembre 2003 prévoit que les avances sur les futures augmentations de salaire prévues par ce même décret «seront versées par le Bureau «de rentas generales» relevant du budget national, à charge de chacune des rubriques correspondantes».
- 786. Pour ce qui est des allégations relatives au non-respect des conventions collectives conclues par l’administration centrale, le gouvernement fait savoir que les fonctionnaires, individuellement ou collectivement, sont protégés par les mécanismes juridiques mis en place par l’Etat de droit. Témoin le cas des fonctionnaires du ministère de la Santé publique et l’accord récemment signé avec l’organisation représentative du personnel médical et non médical.
- 787. Pour ce qui est des cas concernant Mme Leonor Quefan, fonctionnaire du ministère de l’Industrie et de l’Energie, et Mme Anahí Oldán, fonctionnaire du SODRE, ainsi que la situation des travailleurs affiliés à l’Association des travailleurs de la Direction nationale du transport du ministère des Transports et des Travaux publics, le gouvernement fait savoir que des informations pertinentes ont été demandées à ces organisations publiques et que ces informations seront transmises dès que possible. Quoi qu’il en soit, le gouvernement fait savoir que les fonctionnaires jouissent des garanties les plus élevées, tant dans l’administration que pour ce qui est de la justice, qui est absolument libre de toute ingérence de l’administration.
- 788. Enfin, pour ce qui est des allégations de la COFE concernant les fonctionnaires de la Cour électorale, le gouvernement indique que le problème posé est totalement étranger aux thèmes de la liberté syndicale dans son acception la plus large, et que par conséquent il ne relève pas des compétences naturelles du comité (le gouvernement explique qu’il s’agit du droit de revendication exercé par une collectivité de fonctionnaires, qui n’est pas de nature syndicale; ou demande la révocation d’une circulaire qui réglemente le droit au recours au référendum contre les lois nationales). Actuellement, le Tribunal des contentieux administratifs est saisi de ce litige et doit tenter de le résoudre.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité - 789. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent: i) qu’il n’existe pratiquement pas de négociation collective pour réglementer les conditions d’emploi dans l’administration publique centrale (à savoir que, lorsqu’une convention collective est conclue, l’administration ne la respecte pas et la Commission permanente des relations professionnelles pour l’administration centrale, créée en 1996, et dont le mandat est de conseiller en matière de salaire, de conditions d’emploi et d’autres thèmes liés aux conventions internationales du travail, n’a été convoquée que deux fois); ii) que le gouvernement impose unilatéralement, par le biais de lois ou de décrets, des conditions d’emploi qui affectent les fonctionnaires (réinsertion professionnelle, réduction des activités relevant directement de l’Etat, réduction du nombre des fonctionnaires, restructuration du personnel, instauration des contrats de durée déterminée, etc.); iii) que des actes de discrimination antisyndicale auraient été commis à l’encontre de dirigeants syndicaux et de fonctionnaires ayant exercé des activités syndicales légitimes (concrètement, les plaignants allèguent que: 1) les dirigeantes syndicales, Mmes Leonor Quefan et Anahí Oldán, ont été victimes de réductions de salaire; 2) des mesures disciplinaires ont été prises contre les travailleurs membres de l’Association des travailleurs de la Direction nationale des transports du ministère des Transports et des Travaux publics après qu’ils aient décidé en assemblée l’application d’une mesure syndicale, et 3) des sanctions ont été imposées à des fonctionnaires de la Cour électorale qui avaient exercé un droit de revendication lié à certaines conditions de travail).
- 790. En ce qui concerne l’allégation relative à l’absence de négociation collective dans l’administration centrale, le comité note que, selon le gouvernement: 1) les fonctionnaires en général, et ceux de l’administration centrale en particulier, sont régis par des statuts qui réglementent leurs droits, leurs devoirs et leurs obligations; 2) à partir de 1990, les organisations de fonctionnaires ont commencé à conclure des conventions collectives au niveau des entités industrielles et commerciales et des pouvoirs locaux départementaux; 3) la Commission permanente des relations professionnelles pour l’administration centrale a été très active après sa création mais elle n’a été convoquée ces derniers temps par aucune des parties; 4) certes, il n’y a pas de convention collective dans l’administration centrale; cependant, dans plusieurs organismes qui composent le gouvernement central, une instance de négociation permet aux syndicats de présenter des revendications dont l’administration tient compte dans ses prévisions budgétaires; 5) en 2000 et 2001, il y a eu des négociations dans les entreprises publiques et la banque d’Etat, et on n’a enregistré aucune convention dans l’administration centrale, et 6) la négociation collective existe dans le secteur public, et les facilités fournies par le gouvernement aux parties qui veulent entamer une négociation collective demeurent inchangées.
- 791. A cet égard, le comité observe qu’à sa session de juin 2003 il a examiné une plainte présentée contre le gouvernement de l’Uruguay, où l’absence de négociations collectives dans l’administration centrale était aussi alléguée. [Voir 331e rapport, cas no 2209.] Dans ces conditions, le comité renvoie aux conclusions formulées à cette occasion et qui sont réitérées ci-après [voir 331e rapport, paragr. 733]:
- Par ailleurs, à propos de l’absence de négociation collective dans l’administration centrale (selon le gouvernement, la négociation collective est fluide dans d’autres domaines du secteur public), le comité rappelle que la convention no 154 sur la négociation collective, que l’Uruguay a ratifiée en 1989, dispose à son article 1 qu’elle «s’applique à toutes les branches d’activité économique» et que, «pour ce qui concerne la fonction publique, des modalités particulières d’application de la […] convention peuvent être fixées par la législation ou la pratique nationales» et, à son article 2, que «le terme ‘négociation collective’ s’applique à toutes les négociations qui ont lieu entre un employeur, un groupe d’employeurs ou une ou plusieurs organisations d’employeurs, d’une part, et une ou plusieurs organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de a) fixer les conditions de travail et d’emploi». Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir la pleine application de la convention no 154 et promouvoir aussi la négociation collective dans l’administration centrale publique par le biais de mécanismes appropriés, en consultation avec les organisations syndicales intéressées.
- 792. En ce qui concerne les allégations relatives à l’imposition unilatérale, par le gouvernement, de conditions d’emploi qui affectent les fonctionnaires, par la promulgation de lois ou de décrets, le comité note que le gouvernement fait référence à la nécessité, au contenu et à l’impact des lois et décrets qui sont promulgués dans le cadre d’un processus de réforme de l’Etat. A cet égard, étant donné la gravité des allégations, le comité souligne que, même si les mesures adoptées dans chaque pays dans le cadre de la réforme de l’Etat relèvent essentiellement des pouvoirs publics, dans la mesure où elles peuvent affecter les conditions d’emploi des fonctionnaires ou des travailleurs du secteur public (comme il semble que ce soit le cas en ce qui concerne les lois et décrets mentionnés par les organisations plaignantes), les organisations de travailleurs devraient être consultées avant l’adoption de ces mesures. Enfin, le comité rappelle que tous les agents de la fonction publique, à l’exception de ceux qui sont commis à l’administration de l’Etat, devraient bénéficier du droit de négociation collective, et une priorité devrait être accordée à la négociation collective comme moyen de règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions et modalités d’emploi dans le secteur public et qu’il est essentiel que l’introduction d’un projet de loi affectant la négociation collective ou les conditions d’emploi soit précédée de consultations complètes et détaillées avec les organisations intéressées de travailleurs et d’employeurs. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 793 et 931.] Le comité prie instamment le gouvernement d’encourager, dans ce type de cas, la consultation des organisations intéressées.
- 793. Pour ce qui est des allégations relatives au non-respect des conventions conclues entre la Fédération des fonctionnaires de la santé publique et le ministère de la Santé publique en date du 30 novembre et du 27 décembre 2000, le comité note que le gouvernement indique que les parties ont conclu un nouvel accord le 12 septembre 2003 (dont il transmet copie en annexe à sa réponse).
- 794. Concernant les allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale liés aux réductions de salaire qu’ont subi les dirigeantes syndicales, Mmes Leonor Quefan et Anahí Oldán, les mesures disciplinaires prises à l’encontre des travailleurs membres de l’Association des travailleurs de la Direction nationale des transports du ministère des Transports et des Travaux publics, qui avaient décidé l’adoption d’une mesure syndicale en assemblée, le comité note que le gouvernement indique qu’il a demandé des informations aux organismes de l’Etat concernés, qu’il transmettra ces informations dès que possible, et que les fonctionnaires jouissent des garanties les plus élevées tant dans le domaine administratif que dans celui de la justice. Observant que les allégations portent sur des faits qui se sont produits dans l’administration publique centrale il y a plus de huit mois, le comité regrette que le gouvernement n’ait pas envoyé d’observations et lui demande de les envoyer dès que possible.
- 795. Concernant les allégations relatives à l’imposition de sanctions à des fonctionnaires de la Cour électorale qui avaient exercé leur droit de revendication concernant certaines conditions de travail, le comité note que le gouvernement indique qu’il s’agit du droit de revendication exercé par un regroupement de fonctionnaires qui n’est pas de nature syndicale, et que le problème posé est absolument étranger aux questions de liberté syndicale (il s’agit de la demande de révocation d’une circulaire qui réglementait le droit au recours au référendum contre les lois nationales). Le comité note également la réponse du gouvernement selon laquelle cette question a été soumise à un tribunal administratif qui doit la résoudre. Compte tenu de ces explications, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 796. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne les allégations relatives à l’absence de négociation collective dans l’administration centrale, le comité rappelle que la convention no 154 sur la négociation collective, ratifiée par l’Uruguay en 1989, prévoit en son article 1 qu’«elle s’applique à toutes les branches d’activité économique» et que, «pour ce qui concerne la fonction publique», des modalités particulières d’application peuvent être fixées par la législation ou la pratique nationales» et, en son article 2, que «le terme ‘négociation collective’ s’applique à toutes les négociations qui ont lieu entre un employeur, un groupe d’employeurs ou une ou plusieurs organisations d’employeurs, d’une part, et une ou plusieurs organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de fixer les conditions de travail et d’emploi». Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir la pleine application de la convention no 154 et promouvoir la négociation collective également dans l’administration centrale publique par voie de mécanismes adéquats, en consultation avec les organisations syndicales intéressées.
- b) Pour ce qui est des allégations relatives à l’imposition unilatérale, par le gouvernement, de conditions d’emploi qui affectent les fonctionnaires, par voie de promulgation de lois ou de décrets, le comité souligne que, même si les mesures adoptées dans un pays dans le cadre d’une réforme de l’Etat relèvent essentiellement des pouvoirs publics, les organisations de travailleurs devraient être consultées avant leur adoption, dans la mesure où elles peuvent affecter les conditions d’emploi des fonctionnaires ou des travailleurs du secteur public (comme cela semble être le cas avec les lois et décrets mentionnés par les organisations plaignantes). Le comité prie instamment le gouvernement d’encourager la consultation, dans ce type de cas, des organisations intéressées et de tenir compte des principes mentionnés dans les conclusions.
- c) Pour ce qui est des allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale tels que les réductions de salaire infligées aux dirigeantes syndicales Mmes Leonor Quefan et Anahí Oldán, et des mesures disciplinaires prises contre les travailleurs membres de l’Association des travailleurs de la Direction nationale des transports du ministère des Transports et des Travaux publics, qui avaient décidé en assemblée l’adoption d’une mesure syndicale, le comité, observant que les allégations font référence à des faits survenus dans l’administration centrale il y a déjà plus de huit mois, regrette l’absence d’observations du gouvernement, et demande à ce dernier d’envoyer dès que possible ses observations à cet égard.