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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
- 140. Le comité a examiné le cas no 2251 à sa réunion de mars 2004 [voir 333e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 289e session, paragr. 940 à 1001] et l’effet donné à ses recommandations dans le cas no 2216 à sa réunion de juin 2004. [Voir 334e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 290e session, paragr. 47 à 62.] Les allégations dans les deux cas avaient trait au Code du travail et les recommandations du comité à cet égard peuvent se résumer comme suit.
- 141. Le comité a demandé au gouvernement de modifier les articles 26, 31, 45, 410, 412 et 413(3) du Code du travail pour le mettre en conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le comité a par ailleurs demandé au gouvernement de modifier sa législation de manière à ce que les employés des chemins de fer et les personnes employées dans la fonction publique, mais qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, jouissent du droit de grève. Le comité a aussi demandé au gouvernement de lui communiquer des renseignements sur les articles 29(1) et 413(1)(b) du Code du travail, ainsi que sur plusieurs questions liées à l’exercice du droit de grève et du droit de négociation collective.
- 142. En ce qui concerne l’application concrète du droit de négociation collective, le comité a demandé au gouvernement de le tenir informé des résultats de l’enquête sur les violations du droit de négociation collective du Syndicat du centre de l’Oural (URALPROFCENTRE) commises, selon les allégations, par l’administration des Entreprises électrochimiques d’Uralsk (UECE), ainsi que de l’enquête menée sur les allégations avancées par le Syndicat du centre régional de Tyumen (CTRTUC) concernant le refus d’établir un organisme représentatif commun à des fins de négociation collective à la «Société de gestion et d’entretien des logements communaux UG».
- 143. Dans sa communication du 11 juin 2004, l’organisation plaignante dans le cas no 2216 – le Syndicat des gens de mer de Russie (RPSM) – a allégué que le gouvernement persistait à ne pas mettre en œuvre la recommandation du comité. Le RPSM a indiqué qu’il avait fait plusieurs propositions d’amendement du Code du travail visant à le mettre en conformité avec la recommandation du comité, mais que le gouvernement s’y était opposé.
- 144. Dans sa communication du 1er octobre 2004, l’organisation plaignante dans le cas no 2251 – la Confédération russe du travail (KTR) – allègue également que le gouvernement persistait à ne pas mettre en œuvre la recommandation du comité. La KTR a déclaré que, sur la base des recommandations du comité, elle avait rédigé un projet d’amendement du Code du travail. Cependant, selon la KTR, le gouvernement a rejeté le projet d’amendement présenté.
- 145. Dans sa communication du 1er mars 2005, le gouvernement déclare que, le 19 janvier 2005, le ministère de la Santé et du Développement social de la Fédération de Russie (Département des relations professionnelles) a tenu une conférence avec le RPSM et l’Organisation syndicale régionale de la flotte des chalutiers de Mourmansk. Il a été décidé à cette conférence d’établir un groupe de travail conjoint du ministère et du RPSM en vue d’élaborer des propositions pour introduire des modifications du Code du travail concernant la protection des intérêts des travailleurs postés sur les navires et dans les aéronefs. Il a également été décidé que les modifications du Code du travail devraient être mises en forme puis présentées aux groupes de travail de la Commission du travail et de la politique sociale du Parlement national de la Fédération de Russie pour y être examinées, dans la mesure où elles pourraient faire l’objet d’initiatives législatives au cours de la session de printemps 2005.
- 146. Le gouvernement a par ailleurs formulé les observations suivantes relatives aux recommandations visant à ce qu’un certain nombre de dispositions de la législation nationale soient modifiées. En ce qui concerne la question des mesures à prendre pour modifier l’article 45 du Code du travail et garantir la possibilité de mener des négociations collectives au niveau des entreprises tant dans la législation que dans la pratique, le gouvernement a indiqué que, d’après la position du bureau du Procureur général de Russie, cet article du Code du travail n’empêchait pas les syndicats de participer à la négociation collective et ne contenait aucune disposition restreignant les droits des syndicats. Au contraire, il renforçait en réalité la position et les compétences légales des syndicats qui sont établis sur une base territoriale ou sectorielle. Il définissait la notion de convention, document légal qui établit les principes généraux régissant les relations sociales, professionnelles et économiques, conclu par les représentants autorisés des travailleurs et des employeurs aux niveaux fédéral, régional, sectoriel (ou intersectoriel) et territorial.
- 147. En ce qui concerne l’article 31 du Code du travail, le gouvernement a dit qu’il ne voyait pas la nécessité de le modifier. Selon le gouvernement, cet article permettait aux travailleurs, s’il n’existait pas de syndicat dans un établissement ou s’il existait une organisation syndicale mais qu’elle représentait moins de la moitié de la main-d’œuvre, de déléguer la représentation de leurs intérêts à l’organisation syndicale ou à un autre représentant. L’existence d’un autre représentant ne pouvait pas empêcher un syndicat de remplir son rôle autorisé. La disposition accordant aux travailleurs le droit d’élire un représentant était également renforcée par l’article 29 du Code du travail.
- 148. En ce qui concerne la question de la représentation des travailleurs durant la négociation collective au niveau des entreprises par des syndicats autres que les syndicats de premier niveau, le gouvernement a indiqué que les questions relatives à la participation des syndicats à la négociation collective et à la conclusion de conventions collectives étaient régies non seulement par le Code du travail, mais aussi par d’autres lois fédérales – en particulier la loi fédérale no 10 et la loi fédérale no 175-FZ du 23 novembre 1995 «relative à la procédure régissant le règlement des conflits collectifs du travail». En vertu de l’article 29.2 du Code du travail, les intérêts des travailleurs dans un établissement en ce qui concerne la négociation collective, la conclusion et la modification des conventions collectives sont représentés par une organisation syndicale de premier niveau ou par un autre représentant élu par la main-d’œuvre. Par conséquent, le Code du travail prévoyait la possibilité de participer à la procédure de conclusion et de modification des conventions non seulement pour les organisations syndicales de premier niveau, mais aussi pour d’autres représentants élus par les travailleurs dans un établissement donné. Les travailleurs peuvent être représentés par un syndicat ou par des associations syndicales qui ont été autorisées à jouer le rôle de représentant conformément à leurs actes constitutifs ou par des organisations publiques indépendantes établies à des réunions (conférences) des travailleurs de l’établissement, de la branche ou de l’organisme et autorisées par ceux-ci (art. 2.3, loi fédérale no 175). Par conséquent, les organisations de niveau supérieur ou leurs associations peuvent aussi représenter les intérêts des travailleurs dans des établissements (entreprises) donnés dans le cadre de la négociation collective si elles ont été élues à cette fin. L’article 13 de la loi fédérale no 10 renforce le droit des syndicats, des associations syndicales, des organisations syndicales de premier niveau et des organismes qu’ils ont créés de mener des négociations collectives et de conclure des accords et des conventions collectives. Il a été tenu compte du nombre des membres représentés par une organisation ou association syndicale pour déterminer son droit de mener des négociations collectives et de conclure des conventions au nom des travailleurs aux niveaux fédéral, sectoriel ou territorial. Par conséquent, selon le gouvernement, il n’est pas nécessaire de modifier la législation actuelle dans ce domaine.
- 149. S’agissant de la modification de l’article 410 du Code du travail visant la fixation d’un niveau plus bas en ce qui concerne le quorum requis pour un vote décidant d’une action de grève, le gouvernement a fait observer qu’actuellement une réunion de travailleurs était considérée comme valable si au moins les deux tiers du total de la main-d’œuvre (ou des délégués à la conférence) étaient présents. Par conséquent, une majorité qualifiée était nécessaire pour qu’une décision soit considérée comme licite. Selon la position du gouvernement, la règle examinée n’était pas contraire aux normes internationales du travail. En particulier, les Etats parties au Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels étaient tenus de garantir le droit de faire grève, à condition qu’il soit exercé conformément à leurs lois (art. 8.1(d)).
- 150. Le gouvernement a fait par ailleurs observer que la position du plaignant en ce qui concerne la restriction du droit de grève frappant certaines catégories de travailleurs (art. 413 du Code du travail) semblait infondée. Conformément à une décision du Tribunal constitutionnel de la Fédération de Russie datée du 17 mai 1995, la réglementation du droit de grève doit établir l’équilibre nécessaire entre la protection des intérêts professionnels et la considération de l’intérêt public, qui peut être lésé par une action de grève et que l’employé était tenu de garantir. La possibilité de restreindre le droit de grève pour certaines catégories de travailleurs compte tenu de la nature de leur travail et des éventuelles conséquences d’un arrêt de travail découlait directement des dispositions de l’article 17.3 de la Constitution de la Fédération de Russie, qui disposait que les droits et les libertés d’autrui ne devaient pas être violés dans l’exercice des droits et libertés humains et civils, et de l’article 55.3 de ladite Constitution, en vertu duquel les droits et libertés humains et civils peuvent être restreints par la législation fédérale uniquement dans la mesure où cela est nécessaire pour protéger les aspects fondamentaux de l’ordre constitutionnel, le bien-être moral, la santé, les droits ou les intérêts licites d’autrui, la défense du pays ou la sécurité de l’Etat. De la sorte, les limites de toute restriction éventuelle étaient déterminées pour le législateur par la Constitution. Selon le gouvernement, la restriction du droit de grève ne contredisait pas non plus les principes et normes universellement admis de la législation du travail. Aux termes des dispositions du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, la prohibition d’une action de grève est admissible pour ce qui concerne les personnes qui font partie des forces armées, de la police ou de l’administration de l’Etat (art. 8.2). Des restrictions peuvent être établies pour d’autres personnes, si nécessaire, dans une société démocratique dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de l’ordre public ou pour protéger les droits et libertés d’autrui (art. 8.1(c)). Néanmoins, si les instruments légaux internationaux dans le domaine des droits de l’homme laissent à la législation nationale le soin de réglementer le droit de grève, celle-ci ne doit pas imposer de restrictions qui vont au-delà des limites fixées par ces instruments internationaux.
- 151. Dans sa communication du 25 mai 2005, le gouvernement déclare qu’un groupe de travail, constitué par le ministère de la Santé et du Développement social et le RPSM, a déposé ses propositions d’amendement des articles 29(3), 31(1), 37(3-6), 45(7), 372(1), 399(2) et 410(1) du Code du travail devant la Commission de la réglementation en matière sociale et de relations professionnelles, amendements qu’un groupe de travail de ladite commission a rejetés. Le gouvernement indique en outre que la Fédération des syndicats indépendants de Russie (FNPR) s’est également opposée à ces projets d’amendement. De plus, un groupe de travail tripartite du Comité du travail et de la politique sociale du Parlement central de la Fédération de Russie a également recommandé le rejet de ces propositions d’amendement. Bien que le gouvernement indique avoir annexé à sa communication les précisions relatives à ces décisions, le Bureau n’a pas reçu les annexes en question.
- 152. Le comité prend note de la réponse du gouvernement concernant diverses dispositions du Code du travail. En ce qui concerne l’article 45, le comité doit souligner une nouvelle fois que la législation ne devrait pas constituer un obstacle à la négociation collective au niveau professionnel. Il demande donc à nouveau au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris la modification des articles 26 et 45 du Code du travail, de façon à garantir, tant en droit que dans la pratique, que la négociation collective peut être menée au niveau professionnel. Tout en tenant compte de l’explication donnée par le gouvernement concernant l’article 31 du Code du travail, le comité se réfère à nouveau à la recommandation (no 91) sur les conventions collectives, 1951, qui insiste sur le rôle des organisations syndicales en tant que l’une des parties aux négociations collectives et ne mentionne les représentants des travailleurs non organisés que lorsqu’il n’existe aucune organisation syndicale dans l’entreprise. Une disposition qui autorise la négociation collective avec d’autres représentants des travailleurs, court-circuitant le syndicat existant dans l’entreprise, ne favorise pas la négociation collective. Le comité demande donc une nouvelle fois au gouvernement de modifier sa législation de façon à garantir l’application du principe susmentionné et de le tenir informé à cet égard.
- 153. En ce qui concerne le quorum requis pour un vote de grève conformément à l’article 410 du Code du travail, tout en notant le fait que le gouvernement mentionne le quorum déjà fixé pour une conférence syndicale, le comité rappelle que le respect d’un quorum de deux tiers des membres peut être difficile à atteindre, en particulier dans les cas de syndicats regroupant un grand nombre d’adhérents couvrant un large secteur géographique. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 511.] Par conséquent, le comité demande une nouvelle fois au gouvernement de modifier l’article 410 du Code du travail de façon à abaisser le quorum requis pour un vote de grève. Le comité note l’information communiquée par le gouvernement au sujet de la restriction du droit de grève frappant certaines catégories de travailleurs. Le comité rappelle que, s’agissant des restrictions au droit de grève, il avait antérieurement demandé au gouvernement: 1) d’indiquer les entreprises et les services qu’il qualifiait de «directement impliqués dans des types de production ou d’équipement extrêmement dangereux» dans lesquels le droit de grève était interdit (art. 413(b) du Code du travail); et 2) d’amender sa législation de manière à ce que les employés des chemins de fer et les personnes employées dans la fonction publique, mais qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, jouissent du droit de grève. Notant que le gouvernement n’a pas précisé les entreprises et les services mentionnés à l’article 413(b) du Code, le comité réitère sa demande à cet égard. Le comité se réfère par ailleurs au cas no 2244 dans lequel il a pris note de la nouvelle loi fédérale n° 17-FZ du 10 janvier 2003 sur le transport ferroviaire et demandé au gouvernement de modifier l’article 26 de cette loi qui disposait qu’une grève des travailleurs des chemins de fer dans des services liés au trafic, aux opérations d’aiguillage, au service fourni aux passagers et au fret était illicite et prohibée. Le comité rappelle à nouveau que le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne); et 3) dans une situation de crise nationale aiguë. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 526 et 527.] Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires de façon à mettre sa législation en conformité avec les principes exposés ci-dessus.
- 154. Notant que le gouvernement n’a pas fourni les précisions relatives aux décisions prises par les divers groupes de travail et la FNPR de rejeter les propositions d’amendement du Code du travail, le comité prie le gouvernement de transmettre cette information à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, à laquelle le comité renvoie les aspects législatifs du cas, en rapport avec les conventions nos 87 et 98, ratifiées par la Fédération de Russie.
- 155. Notant que la réponse du gouvernement se limitait aux aspects législatifs des cas, le comité demande par ailleurs au gouvernement de lui communiquer des renseignements sur les recommandations ci-après:
- - Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de l’enquête sur les violations alléguées des droits syndicaux de l’URALPROFCENTRE par l’administration de l’UECE.
- - Le comité demande au gouvernement d’ouvrir une enquête pour examiner les allégations du TRTUC concernant le refus opposé à la création d’un organe représentatif commun à des fins de négociation collective à l’échelon de la «Société de gestion de logements communaux UG».
- - Au vu de l’allégation du plaignant relative au fait que, dans la pratique, la grève est souvent reportée ou déclarée illégale, le comité demande au gouvernement de lui fournir les renseignements pertinents, y compris des données statistiques, sur l’application du droit de grève dans la pratique