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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 320, Mars 2000

Cas no 1963 (Australie) - Date de la plainte: 07-MAI -98 - Clos

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143. Par une communication datée du 7 mai 1998, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté une plainte contre le gouvernement de l'Australie pour violation de la liberté syndicale. La Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT), le Conseil australien des syndicats (ACTU) et l'Union maritime d'Australie (MUA) se sont associés à cette plainte par des communications datées respectivement des 8, 18 et 21 mai. Un certain nombre de documents, y compris des décisions judiciaires, ont été communiqués à l'appui de leurs allégations par l'ACTU et la CISL dans des communications datées respectivement des 16 juin et 11 août 1998.

  1. 143. Par une communication datée du 7 mai 1998, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté une plainte contre le gouvernement de l'Australie pour violation de la liberté syndicale. La Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT), le Conseil australien des syndicats (ACTU) et l'Union maritime d'Australie (MUA) se sont associés à cette plainte par des communications datées respectivement des 8, 18 et 21 mai. Un certain nombre de documents, y compris des décisions judiciaires, ont été communiqués à l'appui de leurs allégations par l'ACTU et la CISL dans des communications datées respectivement des 16 juin et 11 août 1998.
  2. 144. Le gouvernement a répondu aux allégations dans des communications datées des 2 juin et 4 novembre 1998 et des 4 mars et 15 avril 1999.
  3. 145. A sa réunion de juin 1999, le comité a décidé de différer l'examen du présent cas et a invité le gouvernement et les plaignants à lui transmettre toutes informations complémentaires pour examen. (Voir 316e rapport, paragr. 7.) L'ACTU et le gouvernement ont transmis des informations complémentaires dans des communications datées respectivement des 11 août et 6 octobre 1999.
  4. 146. L'Australie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 147. Dans la communication du 7 mai 1998 de la CISL, il est indiqué que l'action du gouvernement en rapport avec les mesures prises par le Patrick Group of Companies ("les entreprises Patrick") concernant l'emploi de membres de la MUA à des activités de manutention dans un certain nombre de ports australiens viole les normes et les principes de l'OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective et qu'il en va de même de certaines dispositions de la législation. En particulier, les plaignants affirment qu'une action concertée a été menée par le gouvernement et par les entreprises Patrick en vue d'éviter des mouvements de grève et de licencier des travailleurs syndiqués. La substitution de contrats individuels à des instruments collectifs est également évoquée, de même que des restrictions au droit d'établir des piquets de grève et de mener des actions de boycottage. A propos de ces actions, il est aussi fait état d'une ingérence des pouvoirs publics dans les droits liés à l'affiliation de la MUA à la Fédération internationale des ouvriers du transport.
  2. 148. Les plaignants indiquent que, le 7 avril 1998 en fin de journée, les entreprises Patrick ont annoncé publiquement leur intention de sous-traiter leurs activités de manutention et de conclure des contrats avec un certain nombre d'entreprises pour la fourniture de main-d'oeuvre. Elles étaient en mesure de le faire en raison d'une restructuration complexe intervenue quelques mois plus tôt, restructuration qui avait eu pour conséquence sur quatre des entreprises Patrick employant des travailleurs affiliés à la MUA de voir leurs actifs transférés à d'autres entreprises du groupe et d'être transformées en entreprises de fourniture de main-d'oeuvre ayant des contrats avec une autre entreprise Patrick, à savoir la Patrick Stevedores Operations No. 2 Pty. Ltd. ("Patrick Operations").
  3. 149. A la suite du démembrement des actifs, les entreprises de fourniture de main-d'oeuvre ont été déclarées insolvables. Selon les plaignants, les contrats de fourniture de main-d'oeuvre étaient en fait conçus de manière à rendre inévitable cette insolvabilité. L'entreprise Patrick Operations a désigné un administrateur pour les quatre entreprises en question, ce qui a eu pour effet de mettre fin à leurs contrats de fourniture de main-d'oeuvre. L'entreprise a ensuite indiqué que, comme il n'y avait pas de travail pour les 1 400 salariés dont le travail avait été sous-traité à des entreprises ne faisant pas partie du groupe, ces travailleurs seraient licenciés.
  4. 150. Le 7 avril en fin de journée et dans la matinée du 8 avril, les travailleurs occupant leur poste dans les entreprises Patrick en différents endroits d'Australie ont été expulsés de force dans le cadre d'une action coordonnée à laquelle a participé du personnel spécialement recruté et accompagné de chiens d'attaque. La plupart des salariés concernés ont appris par les médias qu'ils n'avaient plus de travail.
  5. 151. Selon les plaignants, trois minutes avant l'annonce faite par les entreprises Patrick, le ministre des Relations professionnelles et des Petites entreprises a publié un communiqué approuvant les mesures prises par les entreprises Patrick pour se restructurer, mettre un terme à leurs contrats avec leurs entreprises de fourniture de main-d'oeuvre et remplacer celles-ci par d'autres entreprises. Plus tard dans la soirée, le ministre a indiqué au cours d'une conférence de presse que les entreprises Patrick et le gouvernement se préparaient à cette situation depuis des semaines ("il n'y a guère eu de jours sans que nous discutions des différentes options s'offrant aux employeurs"). Le matin suivant, le ministre a présenté au Parlement un projet de loi de 1998 prévoyant d'assujettir à une taxe toutes les entreprises de manutention afin de permettre à l'Etat de financer, comme il s'y était engagé, le coût des indemnités de licenciement dues aux membres de la MUA.
  6. 152. L'action des entreprises Patrick et du gouvernement est intervenue à la veille du début des auditions organisées par le Tribunal fédéral d'Australie, auquel la MUA avait demandé que les entreprises Patrick soient invitées à ne pas licencier les travailleurs concernés. Par la suite, la MUA a obtenu de ce tribunal des ordonnances provisoires faisant obligation aux entreprises Patrick de recruter leur main-d'oeuvre auprès des entreprises de fourniture de main-d'oeuvre et leur interdisant de licencier les travailleurs. Selon le tribunal fédéral, il était possible de soutenir que les licenciements aient été motivés par l'appartenance des travailleurs à la MUA et qu'il y avait donc eu violation de l'article 298K (discrimination antisyndicale) de la loi de 1996 sur les relations de travail. Le tribunal fédéral a également estimé qu'il était possible de considérer que ces actes aboutissent à une rupture du contrat de travail des intéressés et que les propriétaires et les employeurs du groupe Patrick avaient conclu une entente illicite. Ces ordonnances ont été confirmées en appel par le tribunal puis, pour l'essentiel, par la Haute Cour. Il n'empêche que les travailleurs, même s'ils n'ont pas été licenciés au sens strict du terme, se trouvent sans emploi et ne sont pas payés, ce qui revient à un licenciement déguisé.
  7. 153. Selon les plaignants, il est établi que les entreprises Patrick ont préparé leur action pendant des mois, notamment en formant clandestinement à Doubaï des travailleurs de remplacement, y compris des membres ou d'ex-membres des forces armées australiennes, avec l'encouragement et l'assistance du gouvernement et de l'administration. Lorsque cet état de choses a été découvert et que le mouvement syndical international a porté plainte, les autorités de Doubaï sont intervenues pour mettre fin à cette formation. Des documents ont été transmis, qui corroborent l'assertion selon laquelle le gouvernement a apporté son appui à la formation des travailleurs de remplacement. Il s'agit tout d'abord d'une note adressée au ministre des Transports par son conseiller le 21 septembre 1997, dont l'auteur indique que de nouveaux entretiens ont eu lieu avec le directeur général des entreprises Patrick et fait la déclaration suivante: "Il apparaît que la date des cours pourrait être avancée à la fin janvier ... il faudrait en avoir confirmation au 1er octobre, de façon à pouvoir réactiver les réservations." Le second document est un affidavit signé le 6 mai 1998 par une personne qui dirige un bureau de placement et qui jure que le conseiller du ministre des Transports lui a demandé, le 30 juillet 1997, d'entrer en contact avec le directeur général des entreprises Patrick en vue d'un emploi éventuel. Cet emploi consistait à recruter et à former des anciens militaires en vue de travailler dans les installations portuaires australiennes. La formation devait avoir lieu à Doubaï. Selon l'intéressé, le directeur général des entreprises Patrick lui a toujours fait comprendre clairement qu'il avait le soutien du gouvernement fédéral, auquel il rendait compte de son action.
  8. 154. Les plaignants indiquent que la manipulation par les entreprises Patrick de leurs structures, afin de se soustraire à leurs obligations vis-à-vis des travailleurs, de recruter de la main-d'oeuvre de remplacement et d'éviter ainsi que le personnel soit syndiqué ou fasse grève, représente une grave violation de la liberté syndicale. Une minorité des travailleurs licenciés participaient au moment de leur licenciement à une action revendicative licite, conformément à la loi de 1996 sur les relations de travail; la majorité d'entre eux ne participaient à aucune action revendicative. Selon les plaignants, cet état de choses, s'ajoutant aux licenciements déguisés motivés par l'appartenance à un syndicat, représente une grave discrimination antisyndicale contraire aux dispositions de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
  9. 155. En outre, selon les plaignants, le droit de négociation collective a été violé car certains des travailleurs affiliés à la MUA qui ont été licenciés ainsi que l'ensemble des travailleurs de remplacement non syndiqués se sont vu offrir un emploi à condition qu'ils acceptent des contrats individuels ("accords d'embauche australiens sur les lieux de travail" - AWA). Les plaignants indiquent que ces contrats ne reconnaissent pas le rôle des syndicats dans la négociation et ne sont pas rendus publics. Ils ajoutent que la législation permet aux entreprises Patrick de faire prévaloir les contrats individuels sur les conventions collectives, mettant ainsi en évidence une disposition de la loi de 1996 sur les relations de travail contraire à la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que l'a signalé en 1998 la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
  10. 156. Les plaignants indiquent que les entreprises Patrick ont demandé et obtenu des ordonnances interdisant les piquets de grève (même pacifiques) dans certaines juridictions. Le non-respect de cette interdiction par le syndicat ou par ses membres les expose à des poursuites pour outrage qui peuvent déboucher sur des peines de prison, des amendes et des dommages-intérêts.
  11. 157. Les plaignants affirment que le gouvernement australien a ouvertement appuyé l'action des entreprises Patrick et a même participé à leur stratégie. En outre, il continue à appuyer publiquement cette action. A titre d'exemple, les plaignants citent un document, en date du 10 mars 1997, établi par le secrétaire adjoint de l'Equipe stratégique industrielle du Département des relations professionnelles pour le ministre et joint à leur plainte, dans lequel est proposée la stratégie suivante: "... il faudrait que les entreprises de manutention adoptent une stratégie réfléchie et efficace pour licencier leur personnel et le remplacer rapidement par d'autres travailleurs, d'une manière qui limite le risque de voir la commission ordonner, par exemple, la réintégration des travailleurs licenciés". Les plaignants indiquent aussi que, dans une déclaration télévisée du 9 avril 1998, le Premier ministre, à qui l'on demandait pourquoi des travailleurs de ports productifs tels que celui d'Adélaïde faisaient partie des 1 400 membres de la MUA à avoir été "mis à la porte" ce jour-là, a répondu: "Ils faisaient tous partie de ce syndicat ... Certains innocents ont été touchés." Une copie de la transcription de cet entretien télévisé est jointe à la plainte.
  12. 158. A l'appui de leurs dires, les plaignants ont également transmis un document du Cabinet en date du 7 juillet 1997 intitulé: Waterfront strategy - Supplementary paper - ("Stratégie portuaire - document complémentaire"), qui a été rendu public par un quotidien national, The Age. Ce document, signé par le ministre des Relations professionnelles et le ministre des Transports et du Développement régional, débute par une rubrique intitulée "Objectifs", à savoir:
    • -- Développement de la croissance économique et de l'emploi par la mise en place d'une activité portuaire plus fiable et plus rentable.
    • -- Suppression du contrôle exercé par la MUA et l'ACTU sur l'activité portuaire, et donc sur l'arme politique et industrielle qu'elle constitue pour ces syndicats.
    • -- Preuve de l'efficacité de la réforme gouvernementale relative aux relations professionnelles et aux transports, ce qui aura des effets sur les autres secteurs de l'économie.
      • Le document expose ensuite les deux choix stratégiques dont dispose le gouvernement selon une étude gouvernementale:
    • -- celui de l'évolution, consistant à procéder par étape et à permettre aux mécanismes de la loi sur les relations de travail de se mettre en place dans l'ensemble du système, permettant au secteur de la manutention de se réformer lui même;
    • -- celui d'une démarche dynamique en vertu de laquelle le gouvernement participerait plus activement aux changements, en collaboration avec les entreprises de manutention. Cette étude examine la perspective d'actions de revendications donnant aux entreprises de manutention la possibilité de licencier leurs salariés et d'en engager de nouveaux à des conditions différentes.
      • Le document se termine par une série de recommandations au Cabinet, parmi lesquelles "l'adoption d'une démarche dynamique". Un document similaire a été soumis au Parlement le 2 juillet 1998, dans lequel le mot "dynamique" avait été remplacé par le mot "interventionniste".
    • 159. Par ailleurs, les plaignants déclarent que des syndicalistes australiens ont été menacés de poursuites par l'administration à cause de leurs liens avec une organisation syndicale internationale, en l'occurrence la Fédération internationale des ouvriers du transport. A l'appui de cette affirmation, les plaignants joignent à leur plainte une lettre datée du 17 avril 1998 du Procureur général agissant au nom de la Commission australienne de la concurrence et de la consommation (ACCC). A cette lettre est joint un engagement que la MUA est invitée à signer en ce qui concerne sa participation, aux côtés de la Fédération internationale des ouvriers du transport, à un boycottage international. Les plaignants ont également fait parvenir une ordonnance datée du 27 mai 1998 du Tribunal fédéral d'Australie (greffe de Nouvelle-Galles du Sud) enjoignant à titre provisoire à la MUA de s'abstenir de participer à une campagne internationale de boycottage ou de demander à la Fédération internationale des ouvriers du transport de l'aider par un boycott. Selon les plaignants, cette ordonnance a pour effet non seulement de rendre les syndicats et les syndicalistes passibles d'amendes et de dommages-intérêts, mais aussi d'interdire à la MUA et aux autres syndicats de communiquer avec la Fédération internationale des ouvriers du transport. Les plaignants soulignent que le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs suppose que les représentants des syndicats nationaux aient le droit d'entretenir des contacts avec les organisations syndicales internationales auxquelles ils sont affiliés, de participer à leurs activités et de bénéficier des services et avantages qui résultent de leur affiliation.
  13. 160. Les syndicats australiens et leurs représentants ont également été menacés de poursuites par l'ACCC pour avoir lancé une action de solidarité et de boycottage. Les plaignants font remarquer que les dispositions sur lesquelles se fonderaient ces poursuites, à savoir les articles 45D et 45E de la loi sur les pratiques commerciales, sont contraires à celles de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 161. Dans sa communication du 2 juin 1998, le gouvernement rejette les accusations des plaignants en niant que des atteintes aient été portées à la liberté syndicale. A titre de réponse provisoire, il indique dans sa communication du 4 novembre 1998 que le différend entre les entreprises Patrick, d'une part, leur personnel et la MUA, d'autre part, est désormais entièrement réglé. Toutes les actions résultant du différend ont été rejetées ou abandonnées. Le gouvernement indique qu'il existe des accords approuvés par la Commission australienne des relations professionnelles, conformément aux dispositions de la législation australienne qui établissent de nouvelles conditions de travail. Tous les travailleurs qui sont licenciés conformément aux accords approuvés perçoivent l'intégralité de leurs indemnités de licenciement.
  2. 162. Le gouvernement ajoute que, tout au long du différend, les réclamations présentées par la MUA et les salariés des entreprises Patrick ont été rejetées par le Commonwealth d'Australie et par le ministre des Relations de travail et des Petites entreprises et que les responsabilités ont été contestées. Selon le gouvernement, aucun tribunal australien n'a émis de conclusions défavorables au Commonwealth ou au ministre avant le règlement de l'affaire. Le règlement obtenu signifie qu'aucune des procédures précédentes nées du différend (y compris certaines actions contre la MUA) n'a finalement abouti à un jugement. Le gouvernement signale qu'une action a récemment été engagée devant le Tribunal fédéral d'Australie par deux anciens salariés d'une entreprise de manutention. Le Commonwealth et le ministre font partie des défendeurs. D'autres anciens salariés d'une entreprise de manutention ont engagé par la suite des actions analogues. Le gouvernement indique que, "même si ces actions semblent résulter pour l'essentiel des mêmes faits que ceux ayant motivé la plainte de la CISL, les questions particulières soulevées en l'espèce ne sont pas couvertes par cette plainte. Dans l'intérêt de l'administration de la justice rendue par le Tribunal fédéral, le gouvernement doit, en répondant à la plainte de la CISL, veiller à ce que cela ne nuise pas à la procédure, ce qui l'oblige à une certaine réserve."
  3. 163. Dans sa communication du 12 avril 1999, le gouvernement déclare que les plaignants ne respectent pas la législation tendant à garantir les droits des travailleurs relatifs à la liberté syndicale et refusent d'admettre que la réforme de l'activité portuaire est une question d'intérêt public qui relève bien de la compétence gouvernementale. Tout en affirmant qu'il n'est pas à même d'apporter une réponse aux allégations portées à l'encontre des entreprises Patrick au sujet de questions que connaissent seulement leurs directeurs et administrateurs, le gouvernement déclare que ces entreprises rejettent lesdites allégations.
  4. 164. Le gouvernement attire l'attention sur la loi de 1996 sur les relations de travail ("la loi"), qui régit les relations professionnelles au niveau fédéral. Selon lui, nombre des dispositions de la loi visent à protéger les syndicats et leurs membres contre les violations de la liberté syndicale et à leur fournir des recours en cas de violation. Il s'agit en particulier de la partie XA de cette loi, qui tend à garantir le droit des employeurs, des travailleurs et des entrepreneurs indépendants d'adhérer à l'association professionnelle de leur choix ou de ne pas y adhérer ainsi qu'à les protéger contre toute discrimination fondée sur leur appartenance à une association professionnelle ou sur les fonctions de direction qu'ils exercent dans une telle association. Le gouvernement déclare qu'il n'a pris aucune mesure contraire à la partie XA ou à toute autre loi et qu'il n'entend pas apporter son soutien à des mesures de ce type. Cependant, la MUA et ses membres sont libres de contester toute mesure qu'ils jugent contraire aux lois en question. De fait, la MUA a engagé des poursuites devant le Tribunal fédéral pour violation de la partie XA, obtenant une injonction provisoire le 21 avril 1998. Par suite de cette injonction, aucune mesure n'a pu être prise pour licencier les salariés des entreprises Patrick, qui demeureront à leur poste au moins jusqu'à ce que la justice ait tranché définitivement.
  5. 165. En ce qui concerne sa politique portuaire, le gouvernement déclare qu'il a toujours apporté son appui aux actions licites visant les mesures prises pour rendre les opérations de manutention plus efficaces et plus sûres. Dès son entrée en fonctions en mars 1996, il a mis l'accent sur un ensemble de réformes économiques de grande ampleur. Il considère qu'il était essentiel d'améliorer rapidement la compétitivité et l'efficacité économique des principaux secteurs, dont celui du commerce maritime et de la manutention portuaire. Le gouvernement considère que la productivité du secteur australien de la manutention est anormalement faible - bien inférieure à celle des pays comparables - et que le nombre des conflits du travail est anormalement élevé. Il ajoute que la rentabilité de ce secteur est particulièrement importante pour la prospérité du pays, lequel est une île continent qui dépend largement de son activité portuaire. En raison de cette dépendance, qui porte sur la quasi-totalité des importations et des exportations, le gouvernement estime que les conflits professionnels qui touchent le secteur de la manutention portuaire peuvent rapidement dégénérer en crise de services essentiels.
  6. 166. Si ce secteur joue un rôle si fondamental, déclare le gouvernement, c'est parce qu'il influe à la fois sur le coût et sur la ponctualité - donc la fiabilité - du transport des marchandises importées et exportées. La flexibilité de l'emploi et de l'affectation des travailleurs est essentielle dans ce secteur en raison du caractère éminemment variable de la demande de services. Selon le gouvernement, qui s'appuie sur les conclusions de la Commission de la productivité, les difficultés auxquelles on s'est heurté pour améliorer la productivité du secteur de la manutention sont étroitement liées au quasi-monopole exercé par la MUA dans ce secteur. Le gouvernement rappelle les conclusions de la Commission de la productivité selon lesquelles le secteur de la manutention est caractérisé par des pratiques de travail complexes, rigides et autoritaires, les manutentionnaires estimant que le pouvoir de la MUA - laquelle exerce un monopole de fait sur l'embauche - constitue un obstacle fondamental à tout changement de l'organisation du travail et à toute amélioration de la productivité. Par ailleurs, le gouvernement cite la déclaration faite par le ministre lors d'une interview donnée le 4 mai 1998, à savoir que l'objectif du gouvernement est de réformer en profondeur la politique portuaire de l'Australie, afin d'introduire une véritable concurrence et de mettre un terme à un monopole qui a pour effet de maintenir la productivité à un niveau si faible que le pays est la risée du monde extérieur.
  7. 167. Le gouvernement appelle particulièrement l'attention sur deux éléments de l'exclusivité assurée par la MUA: i) avant la promulgation des dispositions de la loi qui portent sur la liberté syndicale, le monopole syndical d'embauche permettait d'agir avec impunité dans le secteur de la manutention et d'interdire l'emploi de toute personne qui n'était pas membre de la MUA; ii) les manutentionnaires des principaux ports n'avaient pratiquement aucune possibilité de décider du syndicat habilité à les représenter, car la MUA était le seul d'entre eux auquel ils étaient autorisés à s'affilier dans le cadre de la législation du travail précédente, qui a été maintenant révisée. Le gouvernement déclare que, à partir d'avril 1998, la quasi-totalité des salariés non cadres - employés, conducteurs de machines, manoeuvres et certains travailleurs d'entretien - employés dans les principaux ports étaient membres de la MUA. Les contremaîtres et les cadres étaient membres du Syndicat australien des cadres maritimes et, dans certains terminaux, les électriciens étaient membres du Syndicat australien des communications, de l'électricité, de l'électronique, de l'énergie, de l'information, des postes, de la plomberie et des services connexes (CEPU). Au fil du temps, la MUA, tout comme ses prédécesseurs, a acquis le droit de représenter les salariés non cadres, à l'exclusion des autres syndicats auxquels nombre de ses salariés avaient appartenu dans le passé. En 1978, la Fédération australienne des travailleurs de l'activité portuaire (l'un des syndicats qui se sont regroupés pour former la MUA) a adopté une politique consistant à accueillir en son sein les travailleurs de l'activité portuaire qui remplissaient les conditions leur permettant d'adhérer à d'autres syndicats. Son objectif était de s'assurer le droit de représenter les travailleurs de toute la gamme des activités de manutention. A cette époque, plusieurs autres syndicats étaient autorisés à accepter parmi leurs membres les salariés exerçant les tâches et activités suivantes: commerce, tâches administratives, tâches générales, nettoyage, entretien, manutention du grain, manutention du charbon, conduite de grue, dépôt des conteneurs et transports routiers. Nombre de ces salariés appartenaient à ces syndicats. En outre, la Fédération des travailleurs de l'activité portuaire s'est assurée le monopole de la représentation de ses salariés, à l'exclusion des autres syndicats auxquels ils appartenaient dans le passé.
  8. 168. Ce droit de représentation exclusive avait été obtenu par le syndicat qui a précédé la MUA en concluant des accords intersyndicaux, en procédant à des regroupements syndicaux et en obtenant de la Commission australienne des relations professionnelles (AIRC), en vertu de la législation précédente, des ordonnances tendant à octroyer au syndicat - à la suite de ses demandes - l'exclusivité de la représentation des travailleurs concernés. Selon le gouvernement, grâce à l'adoption de la loi de 1996 sur les relations de travail, les dispositions ont été amendées pour permettre aux travailleurs de constituer des syndicats et de les faire enregistrer, pour faciliter aux syndicats déjà enregistrés l'inscription et la représentation des travailleurs qui souhaitaient leur confier la défense et la promotion de leurs intérêts et pour élargir le droit des travailleurs de décider de s'affilier ou non à un syndicat. Le gouvernement ajoute que les réformes législatives en question s'appliquent à l'ensemble des secteurs, mais que, étant donné le quasi-monopole exercé par la MUA sur l'activité portuaire, elles prennent une importance particulière dans ce secteur. Malgré ces réformes, précise le gouvernement, la MUA s'est opposée aux tentatives des autres syndicats de représenter les travailleurs de la manutention portuaire. Le gouvernement cite comme exemples les graves actions revendicatives menées par des membres de la MUA travaillant dans le port de Newcastle en réponse au fait que certaines tâches de manutention étaient exercées par des membres du Syndicat des travailleurs des transports, dont l'emploi est réglementé par une convention entièrement nouvelle, agréée par l'AIRC en juillet 1998.
  9. 169. Le 8 avril 1998, le gouvernement a présenté au Parlement son plan de réforme de l'activité portuaire. Le gouvernement déclare que l'adoption de ce plan a été précédée de larges consultations avec les organisations d'employeurs, les syndicats, les entreprises de manutention, les compagnies maritimes, les gouvernements des Etats, les autorités portuaires et les affréteurs. La réforme s'articule autour des objectifs suivants:
    • -- mettre fin aux sureffectifs et aux pratiques de travail restrictives;
    • -- accroître la productivité grâce à l'engagement pris par les principales entreprises de manutention d'atteindre une norme de 25 mouvements de grue par heure en tant que moyenne nationale portant sur cinq ports, avec pour objectif une amélioration constante;
    • -- améliorer la fiabilité des opérations par une réduction des actions de revendication et des interruptions d'activité, obtenue elle-même par la suppression des pratiques tendant à perturber le travail;
    • -- réduire le nombre et la gravité des accidents touchant les travailleurs portuaires;
    • -- abaisser le coût des exportations et des importations tout au long de la chaîne logistique;
    • -- exploiter pleinement et efficacement les techniques classiques et nouvelles;
    • -- améliorer la formation.
  10. 170. En ce qui concerne le cas particulier des entreprises Patrick, le gouvernement expose le cadre général dans lequel s'inscrivent les faits qui ont donné lieu à plainte, notamment en ce qui touche à la structure de ces entreprises. Selon le gouvernement, les entreprises Patrick ont cherché à accroître leur efficacité et leur compétitivité économiques par une amélioration des pratiques de travail, négociant à cet effet avec la MUA et les autres syndicats compétents de l'activité portuaire et concluant avec eux diverses conventions collectives. De manière générale, ces conventions n'ont pas été rendues juridiquement applicables, comme cela aurait pu être le cas si on les avait fait agréer en vertu de la loi sur les relations de travail. Cependant, une convention relative aux activités du port de Melbourne a été agréée, convention qui, selon le gouvernement, joue un rôle important dans le différend qui s'est produit entre la MUA et les entreprises Patrick. Dans les autres cas, les conditions d'emploi fondamentales sont fixées par des sentences arbitrales rendues par la Commission australienne des relations professionnelles, la principale de ces sentences étant celle rendue en 1991 pour la manutention.
  11. 171. Toujours selon le gouvernement, les faits sur lesquels porte la plainte sont l'aboutissement d'une longue période de tensions entre les entreprises Patrick et la MUA, nées de la volonté de ces entreprises d'introduire des pratiques de travail plus efficaces et plus flexibles, pratiques auxquelles la MUA et les travailleurs se sont opposés. En décembre 1996, l'AIRC a agréé, en vertu de la loi sur les relations du travail, une convention collective conclue entre les entreprises Patrick, la MUA et le Syndicat australien des communications, de l'électricité, de l'électronique, de l'énergie, de l'information, des postes, de la plomberie et des services connexes (CEPU). Cette convention régissait les salariés employés comme manutentionnaires à Melbourne par les entreprises Patrick. Tout au long de 1997, l'entreprise et la MUA se sont efforcées de négocier un certain nombre de questions liées à l'application de la convention. Le gouvernement note les tentatives infructueuses faites au site de Melbourne pour négocier un certain nombre de questions, parmi lesquelles l'organisation du travail, le niveau des effectifs et l'introduction de nouvelles technologies. Contrairement à ce que prévoyait la convention, la productivité a diminué depuis l'entrée en vigueur de cette dernière en décembre 1996. La Commission australienne des relations professionnelles a fait un certain nombre de recommandations, notamment au sujet des départs volontaires, et a fait remarquer qu'il existait des arguments convaincants en faveur d'un programme de licenciements bien conçu. En décembre 1997, l'entreprise et la MUA ont conclu un accord relatif à l'adoption de nouvelles pratiques de travail visant à améliorer la productivité, mais les membres du syndicat ont rejeté cet accord. L'entreprise a décidé malgré tout d'appliquer les changements prévus et a obtenu de la Commission australienne des relations professionnelles des ordonnances tendant à interdire les actions de revendication. Par ailleurs, le gouvernement rappelle que des actions de ce type ont été menées et que des piquets de grève ont été établis dans un autre site de l'entreprise situé à Melbourne, en réponse à la conclusion d'accords conclus à Webb Dock en vue de sous-traiter des activités à PCS Operations, accords que les travailleurs considéraient comme une menace pour leur emploi. La Commission australienne des relations professionnelles a enjoint aux salariés de reprendre le travail après dix-huit jours, ce qui a provoqué un mouvement de protestation chez les salariés d'un autre site des docks de Melbourne.
  12. 172. Sur la question de la dénonciation des accords relatifs à l'embauche, le gouvernement confirme que, le 7 avril 1998, les entreprises Patrick ont ainsi dénoncé les accords conclus avec quatre de ces entreprises (celles qui s'occupent précisément d'embauche). Ces entreprises d'embauche avaient été créées dans le cadre de la restructuration menée en septembre 1997 en vue d'employer le personnel d'exécution du groupe. Les accords conclus pouvaient être résiliés au cas où les entreprises d'embauche ne parviendraient pas à fournir la main-d'oeuvre voulue, ce qui s'est produit à la suite d'une série d'arrêts de travail survenus dans différents sites du groupe Patrick au début de 1998. Le 7 avril 1998, une grève de sept jours a commencé au site de l'entreprise située en Nouvelle-Galles du Sud, portant ainsi à 43 le nombre total de jours de grève ayant touché les entreprises Patrick depuis le début de cette année. En raison de la résiliation des accords d'embauche, les entreprises touchées ont perdu le seul élément important de leur actif et sont devenues insolvables. Le gouvernement déclare que, selon les entreprises Patrick, il ne s'agissait pas de licencier les travailleurs en raison de leur appartenance syndicale, mais de mettre fin aux activités des entreprises concernées. Le 7 avril 1998, les entreprises Patrick ont annoncé également qu'elles avaient conclu des contrats pour la fourniture de toute une gamme de services par neuf entreprises n'appartenant pas au groupe, afin de pouvoir poursuivre les activités de manutention grâce à la main-d'oeuvre fournie par la nouvelle entreprise. Ces activités ont été fortement entravées par les piquets de grève organisés entre autres par la MUA et ses membres. Les injonctions provisoires accordées par le Tribunal fédéral le 21 avril 1998 ont eu pour effet de mettre fin aux accords conclus avec des entreprises extérieures au groupe Patrick et l'ont obligé à considérer les accords d'embauche conclus avec ses propres entreprises comme toujours valides. Le gouvernement souligne que ces points, de même que d'autres points connexes, ont été réglés par les parties avant le procès. Par ailleurs, il déclare que, selon son rapport annuel pour 1998, le nombre des conteneurs manipulés par les entreprises Patrick s'est accru de 20 pour cent, tandis que, en vertu des nouveaux accords conclus dans le cadre du règlement du litige, le nombre des travailleurs avait diminué d'environ 50 pour cent.
  13. 173. Le gouvernement expose ensuite de manière assez détaillée la série des procédures judiciaires relatives aux faits qui se sont déroulés les 7 et 8 avril 1998, notamment les efforts déployés par la MUA pour obtenir la réintégration des travailleurs intéressés et les procédures distinctes visant à réclamer des dommages-intérêts pour actes illicites, intentées par 29 défendeurs - parmi lesquels les entreprises Patrick et le gouvernement fédéral -, les procédures déclenchées par les entreprises Patrick et le service de manutention de P&O pour obtenir des injonctions tendant à imposer l'arrêt des piquets de grève sur divers sites ou à interdire ces piquets de grève et les procédures déclenchées par la Commission australienne de la concurrence et de la consommation (ACCC) à l'encontre de la MUA pour violation de la loi de 1974 sur les pratiques commerciales.
  14. 174. En ce qui concerne l'action intentée par la MUA, le gouvernement rappelle l'injonction provisoire accordée le 21 avril 1998, soulignant que, dans ce type d'injonction, le tribunal est tenu de décider si la question à trancher présente de la gravité et si les faits de la cause militent en faveur d'une ordonnance, aucun jugement définitif n'étant prononcé sur le fond de l'affaire. En appel, la Haute Cour réunie en assemblée plénière a jugé le 4 mai 1998 que certaines des ordonnances portaient atteinte au pouvoir discrétionnaire conféré aux administrateurs par la loi sur les sociétés en ce qui concerne les décisions relatives au fait de reprendre les activités commerciales, et à la forme que doivent revêtir ces activités. Des négociations ont eu lieu entre les parties, au terme desquelles elles ont demandé au Tribunal fédéral le 5 août 1998 de maintenir l'action intentée et d'annuler la procédure suivie jusque-là. Cette procédure a donc été annulée dans le cadre du règlement du différend.
  15. 175. Le gouvernement expose également les modalités des actions intentées par les employeurs - essentiellement les entreprises Patrick - en vue d'obtenir de la Cour suprême de divers Etats et de la juridiction britannique des injonctions visant principalement les piquets de grève et le blocage des terminaux portuaires. Toutes ces injonctions avaient un caractère temporaire, aucune décision définitive n'ayant été prise. En outre, le gouvernement note que les injonctions accordées en Australie dans les cas dont il a eu connaissance tendaient à empêcher des actions visant à interdire physiquement l'accès à des sites ou la sortie de ces sites, ou comportant des actes de violence ou des menaces de violence à l'égard des personnes ou des biens. L'ordre public paraissait gravement menacé en Nouvelle-Galles du Sud, à Victoria et en Australie-Occidentale. Dans un certain nombre de cas, les affrontements se sont traduits par des brutalités de la part de travailleurs participant aux piquets de grève. Le gouvernement précise les modalités des injonctions accordées, y compris des injonctions temporaires émises le 16 avril 1998 par la Cour suprême de Nouvelle-Galles du Sud au sujet de la demande des entreprises Patrick tendant à interdire à la MUA et autres parties de se livrer à des actes constituant un comportement dommageable. Pour arriver à cette décision, le juge s'est fondé sur des indices sérieux donnant à penser que ces actes avaient provoqué des dommages aux biens et aux personnes et avaient interrompu, ou à tout le moins gravement perturbé, le fonctionnement des terminaux en question. Les actes incriminés comprennent le lancement de pierres et autres objets contre des membres du personnel de sécurité, des menaces physiques, des insultes et des dommages aux biens. Par ailleurs, la Cour suprême de Victoria a émis le 20 avril 1998 une injonction interlocutoire tendant à interdire à la MUA et à toutes autres personnes de se livrer à une large gamme d'activités sur le site du terminal de Melbourne des entreprises Patrick. En motivant sa décision, le juge a fait remarquer que les documents soumis à la Cour montraient que nombre des membres des piquets de grève s'étaient livrés à de graves actions criminelles, notamment à des voies de fait et à des abus de droit sous forme de menaces, d'actes de harcèlement et d'attaques. En appel, cette injonction a été modifiée de façon à viser uniquement la MUA et certains responsables syndicaux. Le gouvernement donne des précisions sur les autres injonctions émises par la Cour suprême de Victoria et la Cour suprême d'Australie-Occidentale. Dans certains cas, des actions en justice ont été déclenchées pour non-respect des injonctions, puis ont été abandonnées; à la connaissance du gouvernement, aucune pénalité pour non-respect d'une injonction n'a été infligée à la MUA, à ses dirigeants ou à ses membres. Le règlement du conflit intervenu entre les entreprises Patrick et la MUA a entraîné le retrait de l'ensemble de ces actions. Au Royaume-Uni, les entreprises Patrick ont obtenu de la Haute Cour une injonction temporaire de sept jours contre les actions menées par la Fédération internationale des ouvriers du transport, dont le siège est à Londres, qui allaient à l'encontre des intérêts économiques de ces entreprises.
  16. 176. En ce qui concerne les actions intentées par l'ACCC contre la MUA, le gouvernement indique que les responsabilités de l'ACCC comprennent le contrôle de l'application de la loi de 1974 sur les pratiques commerciales, loi qui interdit les pratiques contraires à la concurrence, y compris certains boycotts indirects et certains boycotts qui nuisent aux échanges entre Etats, entre territoires ou avec l'étranger. Le gouvernement souligne que l'ACCC est une autorité publique indépendante et qu'il n'a pas le pouvoir de lui faire entreprendre ou abandonner une action quelconque. Il déclare que la lettre du 17 avril 1998 transmise avec la plainte ne peut être véritablement considérée comme une menace ou comme une initiative déplacée. Par l'intermédiaire du Procureur du gouvernement, l'ACCC a fait part à la MUA de ses préoccupations quant à d'éventuelles violations de la loi sur les pratiques commerciales, lui rappelant que de telles violations pouvaient entraîner des poursuites en vertu de cette loi. Ces craintes ont été ensuite exposées à la MUA afin de mettre fin aux violations constantes de la loi, mais sans succès. Le gouvernement se demande si les explications de l'ACCC n'ont pas été prises pour des menaces. Devant le refus d'obtempérer de la MUA, l'ACCC a engagé des poursuites le 22 mai 1998 devant le Tribunal fédéral, alléguant que le syndicat avait mené des activités de boycottage visant à empêcher les entreprises Patrick et d'autres entreprises de manutention de poursuivre leurs activités commerciales internationales, en contravention avec la loi sur les pratiques commerciales. Il s'agit plus particulièrement des actions suivantes:
    • -- mesures tendant à faire organiser et mettre en oeuvre par la Fédération internationale des ouvriers du transport et ses organisations affiliées un boycottage international des navires et des lignes de navigation faisant appel à une main-d'oeuvre non inscrite à la MUA pour le chargement et le déchargement des cargaisons en Australie;
    • -- menaces adressées aux navires et aux lignes de navigation pour les avertir qu'ils feraient l'objet d'un tel boycottage s'ils faisaient appel aux entreprises Patrick ou à d'autres entreprises recourant à une main-d'oeuvre extérieure à la MUA;
    • -- organisation d'une campagne de boycottage intérieur des entreprises Patrick motivée par le recours de celles-ci à une main-d'oeuvre extérieure à la MUA, campagne comprenant:
    • -- -- le retrait des travailleurs affectés aux remorqueurs et aux lignes, afin d'empêcher les navires de mouiller dans les terminaux des entreprises Patrick;
    • -- -- le blocus des terminaux des entreprises Patrick, afin d'empêcher les compagnies de transport de livrer et de charger les cargaisons.
  17. 177. Le gouvernement déclare également que les ordonnances temporaires interdisant à la MUA, à son secrétaire national et à un représentant de la Fédération internationale des ouvriers du transport de prendre des mesures quelconques en vue d'un boycottage de certains navires chargés ou déchargés en Australie à l'aide de travailleurs extérieurs au syndicat ont été prises par le Tribunal fédéral le 27 mai 1998. L'ACCC a engagé une nouvelle action auprès du Tribunal fédéral à l'encontre de la MUA le 27 mai 1998 au sujet du boycottage des manutentionnaires affectés aux navires affrétés auparavant par les entreprises Patrick et employant des travailleurs n'appartenant pas aux entreprises d'embauche du groupe Patrick. Le 12 juin 1998, la MUA a avisé le Tribunal fédéral de ce qu'elle écrirait à la Fédération internationale des ouvriers du transport pour dire qu'elle renonçait à demander à celle-ci ou à ses affiliés de lancer des appels au boycott des navires chargés en Australie par de la main-d'oeuvre extérieure à la MUA. L'ACCC a avisé le tribunal que ce geste répondait à certaines de ses préoccupations et qu'elle était disposée à suspendre la question jusqu'à ce qu'il ait été établi que ledit geste était suivi d'effet. Le gouvernement note que des discussions ont été ouvertes le 19 juin 1998 entre les parties à ce différend et l'ACCC en vue d'un éventuel règlement. Dans une lettre confidentielle à la MUA, l'ACCC a exposé les différents éléments d'un tel règlement. Une fois l'affaire réglée avec la MUA, les demandes de l'ACCC au Tribunal fédéral ont été annulées par accord mutuel. Le règlement comprenait une procédure de solution des différends visant à régler toute violation alléguée de l'engagement de la MUA de ne procéder à aucune action contrevenant aux dispositions particulières de la loi sur les pratiques commerciales.
  18. 178. Le gouvernement précise ensuite les modalités de l'accord conclu entre la MUA, les entreprises Patrick et les autres parties au différend relatif à l'activité portuaire. L'accord portant sur le règlement du différend, conclu le 5 août 1998, comporte les clauses suivantes:
    • -- homologation au titre de la loi sur les relations de travail, des conventions collectives d'entreprise conclues entre les entreprises Patrick et la MUA;
    • -- exécution d'un compromis écrit concernant les quatre entreprises d'embauche du groupe Patrick alors placées sous administration judiciaire (procédure prévue par la loi sur les sociétés pour régler la situation financière des entreprises insolvables);
    • -- interruption ou annulation de toutes les actions judiciaires en cours intentées par les parties;
    • -- versement d'une indemnité à tous les travailleurs licenciés par suite de l'accord;
    • -- accord tendant à faire que l'action intentée par l'ACCC soit annulée, réglée ou traitée d'une manière satisfaisante pour la MUA.
  19. 179. Le 2 septembre 1998, des demandes ont été déposées auprès de l'ACCC en vue de l'homologation, au titre de la loi sur les relations de travail, de la convention d'entreprise de 1998 relative aux terminaux du groupe Patrick et de la convention d'entreprise de 1998 relative aux activités générales de manutention du groupe Patrick. Ces conventions, homologuées le 3 septembre 1998, sont en vigueur pour une durée de trois ans. En outre, l'accord relatif au règlement des différends comprend les points suivants:
    • -- versement par les entreprises Patrick de 5 millions de dollars australiens sur quinze mois à un fonds de règlement (administré par un fiduciaire) au profit des petites entreprises touchées par le conflit et d'un versement complémentaire de 2,5 millions de dollars en 2001, sous réserve que certains objectifs financiers aient été atteints;
    • -- engagement de la MUA auprès du Tribunal fédéral de respecter l'article 45D(1) ou 45DB(1) de la loi sur les pratiques commerciales durant une période de deux ans (sous réserve de certaines exceptions) et de renoncer aux actions revendicatives à l'encontre des entreprises Patrick durant une période de trois ans (c'est-à-dire jusqu'à l'échéance des conventions agréées);
    • -- licenciement d'un certain nombre de membres de la MUA employés par les entreprises Patrick, certains d'entre eux devant être ensuite réembauchés par des employeurs travaillant sur les sites du groupe Patrick;
    • -- interruption ou annulation de toutes les actions en justice intentées par l'ensemble des parties.
  20. 180. Le gouvernement note que les indemnités de chômage versées aux membres de la MUA licenciés en vertu de l'accord proviennent de fonds fournis par une entreprise d'Etat. Ces fonds, dont peuvent bénéficier sous certaines conditions tous les manutentionnaires licenciés, seront ensuite recouvrés au titre de la loi de 1998 sur la taxe de manutention (imposition) et de la loi de 1998 sur la taxe de manutention (collecte). Huit cent vingt-six des 1 427 salariés du groupe Patrick ont été licenciés. Le gouvernement expose ensuite les circonstances dans lesquelles les deux lois ont été adoptées et déclare que la législation s'inscrit dans le cadre des réformes visant à supprimer les sureffectifs importants. Ces lois imposent une taxe aux activités de manutention en vue de financer les mesures administratives adoptées pour faciliter les restructurations répondant à un besoin urgent et de faire en sorte que l'industrie soit responsable de ce financement. Selon le gouvernement, il y a également lieu de noter que le ministre des Relations de travail et des Petites entreprises étudie depuis août 1996 avec la MUA et l'ACTU la réforme des activités portuaires et maritimes. Durant une réunion de décembre 1997, les parties ont été informées que des dispositions seraient prises pour financer les licenciements de ces secteurs. Le gouvernement a développé ses propositions, notamment sur le plan législatif, qui visaient à fournir une aide financière en vue de la réforme de l'industrie (notamment par le biais de licenciements) à la suite de ces décisions. Le gouvernement note également que les réformes précédentes du secteur ont été facilitées par les gouvernements en place, qui ont notamment octroyé une assistance financière au titre de la législation relative au financement des licenciements.
  21. 181. Au sujet de l'allégation selon laquelle des travailleurs auraient été expulsés par la force les 7 et 8 avril 1998, le gouvernement déclare que, à sa connaissance, ces travailleurs ont été escortés sans violence à l'extérieur des différents sites. Sur la question de Doubaï, le gouvernement affirme n'avoir eu aucune connaissance préalable de la formation qui y a été donnée aux travailleurs de remplacement. Il reconnaît avoir appris, après que cet épisode eut été divulgué publiquement, que certains membres du personnel des forces de défense australiennes, en activité ou à la retraite, étaient allés à Doubaï ou s'apprêtaient à s'y rendre pour y être formés par les entreprises Patrick en vue de remplacer les travailleurs de la manutention. Le gouvernement avait déclaré publiquement le 4 décembre 1997 que tous les militaires en activité concernés par cette affaire étaient soit en congé de longue durée, soit en congé de détente, et que tous ceux qui étaient partis là-bas sans avoir obtenu au préalable l'autorisation obligatoire d'exercer une activité extérieure feraient l'objet de sanctions disciplinaires à leur retour.
  22. 182. En ce qui concerne son soutien allégué à la politique menée par les entreprises Patrick, le gouvernement déclare qu'il faut tenir compte ici de l'importance qu'il attache à la réforme générale de l'activité portuaire et au rôle qui appartient légitimement à tout gouvernement de mener ses réformes dans le cadre de la loi. En accord avec cette politique, il a apporté son soutien aux mesures légales des employeurs, parmi lesquels les entreprises Patrick, pour améliorer la productivité, notamment en mettant un terme au monopole de la MUA sur l'embauche de la main-d'oeuvre portuaire. La question de savoir si les mesures prises par les entreprises Patrick étaient licites aurait dû être tranchée par le Tribunal fédéral, à la suite de l'action intentée par la MUA, si depuis le différend n'avait été réglé et le recours de la MUA n'avait pas été retiré.
  23. 183. En ce qui concerne le document du 10 mars 1997 cité par le plaignant, le gouvernement déclare que ce document ne proposait pas la stratégie exposée dans le passage cité, mais que cette question était soulevée dans un document beaucoup plus long, où il était dit qu'elle pourrait être débattue lors des discussions à venir entre le ministre des Relations professionnelles, le ministre des Transports et du Développement régional et les représentants des deux principales entreprises de manutention. Le gouvernement souligne que ce document ne visait pas à mettre en oeuvre une stratégie ayant pour but de licencier les travailleurs des ports australiens. Il soutient que le simple fait qu'une politique soit proposée ou débattue dans un document d'information établi par des fonctionnaires ne signifie pas que le gouvernement approuvera ou adoptera cette politique. En ce qui concerne les observations du Premier ministre selon lesquelles les travailleurs ont été "mis à la porte" en raison de leur appartenance à la MUA, le gouvernement cite d'autres passages de la même interview: "... à l'évidence, le syndicat a déclaré la guerre à l'entreprise, et ses dirigeants font la sourde oreille depuis des années aux prières des employeurs et des gouvernements précédents leur demandant de faire un effort de productivité et de compétitivité ... Lorsqu'un syndicat fermé à la raison exploite brutalement une situation de monopole, ce sont les innocents qui paient." Le gouvernement déclare que cette interview a eu lieu le jour suivant les faits dont il est question, à un moment où l'opinion publique et les médias ignoraient si les travailleurs touchés avaient été congédiés ou licenciés; en fait, comme ce n'était ni l'un ni l'autre, l'emploi par le journaliste du mot "mis à la porte" était inexact.
  24. 184. Le gouvernement cite également le document confidentiel du Cabinet en date du 7 juillet 1997 intitulé "Waterfront strategy - Supplementary paper", communiqué par les plaignants à l'appui de leurs allégations. Tout d'abord, le gouvernement déclare que ce document n'a pas été rendu public et que les plaignants n'ont pu se le procurer légalement. Il confirme ensuite que ledit document va largement dans le sens de sa politique de réforme portuaire, notamment en ce qui concerne la volonté de mettre un terme au monopole exercé par la MUA sur l'embauche du personnel. Le document note que, poussées par des impératifs économiques, les entreprises Patrick ont décidé de procéder à des réformes, sans l'aide du gouvernement si nécessaire. Le gouvernement déclare que, étant donné le refus persistant de la MUA d'accepter les mesures visant à améliorer l'efficacité et la productivité, il s'attendait à une forte résistance, sans doute sous la forme d'actions de revendication de grande ampleur et de longue durée visant à bloquer totalement l'activité portuaire. Selon le gouvernement, "si une telle action avait lieu, elle provoquerait une crise nationale, laquelle nuirait gravement à la population australienne et à l'économie australienne". Le gouvernement déclare que, faute d'être disposée à faire face à cette éventualité, la MUA risquait d'agir à l'encontre de l'intérêt public, notamment en s'opposant à toute véritable réforme de l'activité portuaire. Ainsi, le document confidentiel du Cabinet proposait un certain nombre de mesures que le gouvernement pouvait envisager de prendre pour contribuer à maintenir le fonctionnement de l'activité portuaire en cas d'actions de revendication généralisées. Cependant, comme les actions de ce type menées en 1998 n'ont pas réussi à paralyser l'activité portuaire, le gouvernement n'a pas eu besoin d'étudier plus avant les mesures à prendre en cas de crise. Le gouvernement cite également une déclaration faite devant le Parlement le 4 juin 1998 par le ministre des Relations de travail et des Petites entreprises en réponse à une question de l'opposition concernant le document confidentiel du Cabinet:
    • ... en ce qui concerne ce document, il note simplement le fait que nous avons abordé la réforme de l'activité portuaire de manière dynamique, et l'avons dit publiquement. Nous ne nous en excusons pas ... Quelle était la politique du gouvernement? Elle consistait à créer le cadre propre à faciliter les changements que les manutentionnaires et autres parties intéressées voulaient mettre en place et à leur proposer les outils politiques et réglementaires leur permettant de remettre en route leurs activités aussi vite que possible en cas d'action revendicative ...
  25. 185. En ce qui concerne les allégations de discrimination dans l'emploi, le gouvernement déclare que la participation des travailleurs intéressés à des actions revendicatives licites ne se pose pas, puisque aucun salarié n'a été congédié par suite des actions menées les 7 et 8 avril 1998 et que les mesures prises par l'entreprise n'avaient aucun lien avec les travailleurs participant à des actions de ce type, licites ou non. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les entreprises Patrick ont modifié la structure du groupe pour pouvoir licencier les travailleurs intéressés et se soustraire à leurs obligations envers leurs salariés, faciliter l'embauche de travailleurs de remplacement non syndiqués et éviter les actions revendicatives, le gouvernement déclare que les décisions relatives à la structure du groupe appartiennent à celui-ci. Il note qu'aucune conclusion probante n'a pu être atteinte, alors pourtant que le juge du Tribunal fédéral a estimé qu'il était essentiel de se demander si l'une des raisons de la restructuration du groupe n'était pas la volonté de licencier des salariés. Même si l'on admet que cette restructuration a bien eu pour effet d'entraîner les licenciements en question, il s'agit là, déclare le gouvernement, d'un phénomène courant qui ne peut par lui-même constituer une violation des principes de la liberté syndicale.
  26. 186. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle certains membres de la MUA et l'ensemble des travailleurs de remplacement non syndiqués ont été embauchés ou réembauchés à la condition qu'ils acceptent un contrat individuel (AWA) au lieu d'une convention collective, le gouvernement déclare qu'il n'est pas en mesure de dire si cette allégation est fondée. En revanche, il déclare que le règlement du différend survenu entre la MUA et les entreprises Patrick ne faisait pas obligation aux salariés intéressés de conclure un contrat individuel: les conditions d'emploi du personnel de manutention du groupe Patrick sont régies par deux conventions collectives auxquelles la MUA est partie, conventions qui ont été homologuées le 3 septembre 1998.
  27. 187. Par ailleurs, déclare le gouvernement, il est inexact d'affirmer que les AWA ne reconnaissent pas le rôle des syndicats dans la négociation et ont un caractère secret. A cet égard, le gouvernement rappelle le rapport qu'il a présenté en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT au sujet de la convention no 98 et sa réponse aux observations de l'ACTU sur l'application de cette convention. Il souligne que, s'il est vrai que les syndicats ne peuvent être parties aux AWA (lesquels sont par nature des accords individuels entre un employeur et un salarié), un salarié peut demander à un syndicat de le représenter lors de la négociation et l'employeur doit reconnaître l'agent de négociation dûment désigné. Quant à l'allégation selon laquelle les AWA ont un caractère "secret", il est exact que les informations générales les concernant ne doivent pas être divulguées par un fonctionnaire gouvernemental si cette divulgation permet d'identifier les parties à ce contrat. Cependant, une telle divulgation est possible lorsqu'elle est autorisée par la réglementation ou par l'une des parties à l'AWA sous forme écrite. L'interdiction de divulguer les informations précitées ne s'applique pas aux parties à l'AWA. Selon le gouvernement, on ne peut affirmer que, dans le cadre du système fédéral des relations professionnelles, les AWA sont en contravention quelconque avec les principes de la liberté syndicale ou de la négociation collective. Ils offrent simplement une voie nouvelle dans le cadre des mécanismes officiels à ceux qui ne souhaitent pas négocier collectivement. Par ailleurs, la loi sur les relations de travail contribue à promouvoir et à faciliter l'élaboration des conventions collectives volontaires.

C. Informations complémentaires fournies par les organisations plaignantes

C. Informations complémentaires fournies par les organisations plaignantes
  1. 188. Dans une communication du 11 août 1999, les organisations plaignantes répondent à la réponse du gouvernement. En premier lieu, elles estiment que le fait de régler le différend entre l'Union maritime d'Australie (MUA), les entreprises Patrick, les gouvernements et les tiers intéressés a un rapport avec la question de savoir si de graves violations des principes de la liberté syndicale se sont produites avant et durant le conflit. Les plaignants estiment en outre que, dans sa réponse, le gouvernement cherche à se dissocier des actions des autres parties et qu'il fuie ainsi ses responsabilités, lesquelles consistent à veiller à ce que les employeurs et tous ceux qui sont soumis au droit australien ne violent pas les droits syndicaux. Par ailleurs, le fait que la MUA a pu obtenir une injonction interlocutoire interdisant le licenciement de ses membres et l'emploi de main-d'oeuvre de remplacement ne change rien, selon elle, au fait que le gouvernement, agissant de pair avec d'autres, a mené des activités tendant à enfreindre les principes de la liberté syndicale.
  2. 189. En ce qui concerne les injonctions interlocutoires, les plaignants déclarent que, si celles-ci ont un rapport avec les constatations préliminaires relatives aux faits qui intéressent le comité, les questions à déterminer ne sont pas les mêmes. En tout état de cause, les faits dont il s'agit font toujours l'objet de procédures juridictionnelles mettant en cause des salariés employés à la place des membres de la MUA, puis licenciés lorsque le différend a été résolu. Les plaignants notent que ces procédures ont été également intentées devant la Cour fédérale par un membre de la Chambre des représentants pour obtenir accès aux documents relatifs au différend, conformément à la loi sur la liberté de l'information.
  3. 190. En ce qui concerne la politique portuaire du gouvernement, les plaignants soutiennent que les préoccupations exprimées par le gouvernement quant à la compétitivité de l'Australie en ce domaine n'ont pas de rapport avec l'existence d'une violation des principes de la liberté syndicale. Tout changement apporté aux pratiques de travail ou à l'emploi doit respecter à la fois le droit australien et le droit international. Les critiques du gouvernement à l'encontre des actions de la MUA et de ses membres au sujet des questions d'efficacité et de productivité ont été portées avant le différend dans le cadre des procédures normales de négociation collective, de conciliation et d'arbitrage. Par ailleurs, malgré les différences de productivité notables enregistrées dans les différents sites du pays des entreprises Patrick, tous les membres de la MUA ont été licenciés sans tenir compte de la productivité enregistrée dans le site où ils travaillaient. A cet égard, les plaignants rappellent la déclaration faite par le Premier ministre lors d'une interview accordée à la télévision nationale le 9 avril 1998, évoquée dans la plainte initiale. Les plaignants soutiennent que le règlement définitif du différend, qui s'est concrétisé par la convention conclue entre la MUA et les entreprises Patrick - convention homologuée par la Commission des relations professionnelles -, montre qu'il est possible de procéder à des changements sans s'en prendre aux syndicalistes et sans remplacer les conventions collectives par des contrats individuels.
  4. 191. Les plaignants déclarent que les pouvoirs publics doivent faciliter la négociation collective afin de veiller à ce que les changements se fassent de manière équitable. La manière autoritaire, arbitraire et excessive dont le gouvernement a cherché à utiliser les notions de "réforme" de l'activité portuaire et de "compétitivité" constitue une ingérence dans la négociation collective et a largement contribué à porter atteinte à la qualité des relations professionnelles et à aggraver les difficultés entraînées par le différend.
  5. 192. Les plaignants déclarent également que l'allégation relative au "monopole" qu'exercerait la MUA sur la syndicalisation des travailleurs de l'activité portuaire est également étrangère à la plainte, qui porte sur les violations des principes de la liberté syndicale. Le fait que la MUA compte un pourcentage très élevé de membres parmi les travailleurs de l'activité portuaire ne constitue pas une négation de la liberté syndicale, et le gouvernement ne fournit d'ailleurs aucune preuve de ce que les membres de la MUA se seraient plaints d'avoir été contraints d'adhérer au syndicat ou de ce qu'une personne quelconque se soit vu refuser l'embauche parce qu'elle refusait d'adhérer à la MUA. Si celle-ci représente la plupart des travailleurs de l'activité portuaire, c'est grâce à des fusions, à des accords entre syndicats et à des décisions de la Commission des relations professionnelles, toutes opérations menées conformément à la loi. Les plaignants notent que, malgré les modifications apportées en 1996, la loi sur les relations de travail offre toujours la possibilité aux syndicats de fusionner et prévoit qu'il appartient à la Commission des relations professionnelles de déterminer l'étendue de l'affiliation syndicale. Malgré les changements apportés en ce domaine, les syndicalistes qui sont restés fidèles à leur syndicat, comme les électriciens dont parle le gouvernement, ont pu rester membres du Syndicat australien des communications, de l'électricité, de l'électronique, de l'énergie, de l'information, des postes, de la plomberie et des services connexes (CEPU).
  6. 193. A cet égard, malgré les changements législatifs mentionnés par le gouvernement, qui visent à faciliter aux salariés la constitution et l'enregistrement des syndicats ainsi que l'appartenance éventuelle à ceux-ci, les plaignants déclarent n'être au courant d'aucune tentative menée par des travailleurs de l'activité portuaire pour créer un syndicat d'entreprise ou pour se faire représenter par un autre syndicat; par ailleurs, à leur connaissance, aucun salarié - ancien, présent ou futur - n'a déposé de plainte alléguant d'une violation des dispositions de la loi sur les relations de travail relatives à la liberté syndicale, en dehors du différend dont il s'agit. Les plaignants affirment que les fondements réels du désaccord manifesté par le gouvernement à l'égard de la MUA apparaissent dans son évocation du pouvoir de négociation de celle-ci et de l'importance des actions revendicatives qui ont été menées. Cependant, le fait qu'un syndicat occupe une position de négociation relativement forte ou soit prêt à engager des grèves n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale. Le différend évoqué par le gouvernement à propos des membres du Syndicat des travailleurs des transports effectuant des tâches revenant traditionnellement aux membres de la MUA est sans lien avec la liberté syndicale; il porte sur le souhait de ces travailleurs de voir leur emploi maintenu.
  7. 194. En ce qui concerne la mention par le gouvernement de la sous-traitance du mouillage de Webb Dock à PSC Operations, entreprise créée par la Fédération nationale des agriculteurs, il apparaît aux plaignants qu'il s'agissait là d'une étape dans le plan, connu du gouvernement, consistant à remplacer les membres de la MUA par des non-membres travaillant au titre de contrats individuels. En ce qui concerne la restructuration des entreprises Patrick, dans le cadre de laquelle les travailleurs de l'activité portuaire ont été transférés à des entreprises d'engagement de main-d'oeuvre n'ayant pour tous éléments d'actif que les contrats visant à fournir de la main-d'oeuvre à une autre entreprise appartenant au groupe Patrick, les salariés n'ont pas été informés de leur changement d'employeur. Les plaignants estiment que l'objet essentiel de cette restructuration était de faciliter le licenciement collectif des membres de la MUA. En fait, on a recouru à une modification de l'organisation du travail et des structures de la direction pour mettre fin à une relation d'emploi de longue durée, qui a eu pour effet de priver les travailleurs de cet emploi et de leur représentation syndicale. Lorsque les contrats d'engagement de main-d'oeuvre se sont terminés, le 7 avril 1998, les salariés ont été informés qu'il n'y avait plus de travail pour eux, tandis que les entreprises Patrick concluaient de nouveaux contrats de fourniture de main-d'oeuvre avec une entreprise créée par la Fédération nationale des agriculteurs. Les nouveaux salariés étaient employés au titre de contrats individuels (AWA).
  8. 195. Les plaignants contestent l'affirmation implicite figurant dans la réponse du gouvernement, à savoir que sa présentation au Parlement d'un projet de loi tendant à faciliter les licenciements dans l'activité portuaire, quelques heures seulement après que les entreprises Patrick eurent procédé au licenciement des membres de la MUA travaillant dans ce secteur, est une simple coïncidence. Ils déclarent que le ministre des Relations de travail et des Petites entreprises avait été pleinement informé et préparé à cette décision la veille au soir.
  9. 196. Sur la question des allégations relatives aux actes de violence qui auraient été commis à l'occasion des piquets de grève, les plaignants déclarent qu'aucune preuve n'a été apportée à l'encontre de responsables ou de membres de la MUA et qu'aucune condamnation n'a eu lieu. Le syndicat a pris des sanctions disciplinaires à l'encontre de son adhérent qui, lors d'un incident isolé, avait lancé une pierre contre un camion. Les piquets de grève ont été organisés conformément aux principes bien établis de la protestation non violente, les participants ayant reçu une formation en ce sens et ayant fait preuve d'une grande discipline. Une coopération et un dialogue constants ont été maintenus avec la police au cours des opérations. Les injonctions dont parle le gouvernement dans sa réponse visaient essentiellement les activités pacifiques des syndicalistes et celles des nombreuses personnes de la région qui s'étaient jointes à eux pour les soutenir; en tout état de cause, elles ont été accordées sans que les allégations des demandeurs aient fait l'objet d'une enquête ou d'une vérification quelconque.
  10. 197. En ce qui concerne le rôle de la Commission australienne de la concurrence et de la consommation (ACCC) dans le différend, les plaignants déclarent que ce rôle met en lumière le caractère restrictif des articles 45D et 45DB de la loi sur les pratiques commerciales. Ils rappellent à cet égard les observations faites par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations au sujet du respect par l'Australie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
  11. 198. En ce qui concerne le refus du gouvernement d'admettre que le document d'information du 10 mars 1997, dont un exemplaire a été soumis antérieurement par les plaignants, représentait sa politique ou son action projetée, les plaignants appellent l'attention sur un document d'information ultérieur, adressé le 14 avril 1997 par le secrétaire adjoint de l'Equipe stratégique industrielle du Département des relations professionnelles au ministre des Relations professionnelles. Ce document résume les entretiens qui ont eu lieu entre des responsables du Département des relations professionnelles, les entreprises Patrick et P&O Ports, une autre entreprise de manutention. Le document déclare que, selon les entreprises Patrick, la solution la moins risquée consisterait à provoquer de l'extérieur des perturbations d'une gravité suffisante pour permettre au groupe de licencier la totalité de sa main-d'oeuvre. On peut prévoir - dit le document - que les deux entreprises s'efforceront d'obtenir une aide minimum du gouvernement, à la fois pour s'assurer de la résolution de celui-ci et pour bénéficier de dispositions particulières. Il y a lieu de noter l'avis des entreprises Patrick (s'exprimant par l'entremise de M. Young à la réunion du 10 avril) selon lequel le groupe serait disposé à accepter un long arrêt de travail (six à huit semaines) si les autres manutentionnaires restaient en activité (autrement dit, s'ils ne cherchaient pas à obtenir des changements). Les entreprises Patrick ont aussi déclaré fermement que l'on ne disposerait plus d'aucun "créneau" pour agir au-delà de cette année. Les plaignants ont également soumis une lettre adressée le 21 avril 1997 par le Premier ministre, M. John Howard, au ministre des Transports et du Développement régional, dans laquelle on trouve ces déclarations: "Au sujet de nos récents entretiens sur la réforme du secteur maritime, je vous fais part de mon appui à la stratégie interventionniste dont vous avez tracé les grandes lignes. Je vous saurais gré, ainsi qu'au ministre des Relations professionnelles, de procéder rapidement à la mise en place d'un groupe chargé de répondre aux situations d'urgence."
  12. 199. Par ailleurs, les plaignants rappellent la note adressée le 21 septembre 1997 au ministre par son conseiller, dont un double a été transmis précédemment, et dans laquelle il est dit que les entreprises Patrick pourraient avancer la date des cours à la fin janvier. Les plaignants soutiennent que cette note témoigne de ce que le gouvernement était au courant du projet mis en place à Doubaï pour former la main-d'oeuvre de remplacement, qu'il ait connu ou non le lieu exact. Selon les plaignants, cette affirmation est confirmée par un accord conclu le 23 octobre 1997 entre le groupe Patrick et l'entreprise Container Terminal Management Services en vue de la sélection, du recrutement et de la formation de spécialistes de la manutention des containers dans les terminaux. Les plaignants ont également communiqué un exemplaire de la confirmation des modalités du contrat relatif aux stagiaires de Doubaï, document selon lequel l'intéressé a signé un AWA lui offrant un contrat de trois ans. Selon les plaignants, ce document montre clairement que la signature d'un AWA était une condition d'emploi à la fois pour les personnes choisies en vue de la formation à Doubaï et pour celles qui ont été engagées ultérieurement pour remplacer les membres de la MUA.

D. Nouvelle réponse du gouvernement

D. Nouvelle réponse du gouvernement
  1. 200. Dans sa communication du 6 octobre 1999, le gouvernement fournit de nouvelles informations, puis répond aux informations complémentaires fournies par les plaignants. Il rappelle qu'il s'est efforcé, depuis son entrée en fonctions en 1996, d'améliorer la compétitivité, la productivité et l'efficacité économique générale des industries essentielles, notamment de la manutention portuaire, et que son projet de réforme de l'activité portuaire a été précédé de larges consultations. Les dispositions réglementaires adoptées en juillet 1998 prévoient l'imposition d'une taxe de manutention visant notamment à rembourser un prêt ayant servi à financer les licenciements légalement décidés dans le cadre de la restructuration du secteur de la manutention.
  2. 201. Selon le gouvernement, les chiffres les plus récents du Bureau économique des transports, dont un exemplaire est joint à la réponse, font apparaître une amélioration marquée de la fiabilité et de la productivité de l'activité portuaire. Ce document, daté du 20 septembre 1999, déclare que:
    • Dans l'ensemble, la productivité nationale de la manutention, mesurée par la moyenne des résultats de cinq ports, s'est encore améliorée au cours du trimestre se terminant en juin 1999. Le niveau de productivité obtenu au cours de ce trimestre résulte essentiellement des améliorations réalisées dans les terminaux du groupe Patrick, où de nouveaux accords d'entreprise ont été conclus en septembre 1998, et partiellement des bons résultats généraux obtenus par les entreprises P&O Ports et Sea-Land au cours de leurs négociations avec la MUA.
    • Si le gouvernement se félicite de ces améliorations, il considère que l'on n'a pas encore exploité pleinement les avantages économiques que présentent pour le secteur la restructuration et la concurrence. C'est pourquoi il entend continuer, dans le cadre de sa politique économique générale et du suivi des progrès obtenus dans le secteur de la manutention, à oeuvrer en faveur d'une amélioration de la sécurité et des performances de l'activité portuaire.
  3. 202. Le gouvernement rappelle que, en vertu des deux lois de 1998 qui portent respectivement sur l'imposition et la collecte des taxes relatives au secteur de la manutention, il est possible d'imposer un droit d'un maximum de 250 millions de dollars australiens en vue de certains objectifs liés à l'amélioration de l'efficacité économique de ce secteur. Le 2 juin 1999, le ministre des Transports et des Services régionaux a présenté un projet tendant à modifier la seconde de ces deux lois. S'il est voté par le Parlement, ce projet portera à 350 millions de dollars le montant maximum du droit précité. Il vise à faire en sorte que l'on dispose de ressources suffisantes pour faire face au coût des réformes, liées ou non aux licenciements (par exemple dans le commerce électronique, les nouvelles installations portuaires, les activités de formation portant sur la santé et la sécurité professionnelles, etc.). Un exemplaire du projet de loi est joint à la réponse.
  4. 203. En ce qui concerne la poursuite des restructurations industrielles, le gouvernement déclare que 14 conventions collectives ont été conclues entre P&O Ports (l'autre principale entreprise de manutention australienne) et la MUA, ainsi qu'une sentence arbitrale, rendue par la Commission australienne des relations professionnelles à défaut d'accord. Ces conventions et cette sentence ont apporté des changements à la situation des salariés, notamment pour ce qui est des rémunérations et des conditions de travail. Par ailleurs, ils permettront d'améliorer la productivité et l'efficacité. P&O Ports prévoit de licencier quelque 400 travailleurs sur un nombre total de 1 470. Avant le 11 août 1999, huit autres entreprises de manutention ont procédé à 217 licenciements liés aux restructurations, licenciements qui ont été financés dans le cadre d'un programme mis en place à l'échelle du secteur.
  5. 204. Le gouvernement affirme que cette nouvelle restructuration est conforme à ses objectifs et qu'elle profitera à l'ensemble de l'économie nationale. Selon lui, cette manière de voir les choses ajoute du poids à son rejet antérieur de la plainte infondée selon laquelle il aurait procédé à des agissements visant à nuire à la MUA dans ses relations avec les entreprises Patrick. Toujours selon le gouvernement, les faits qui se sont déroulés depuis 1996 montrent qu'il s'est toujours efforcé d'améliorer les performances du secteur de l'activité portuaire, notamment en matière de sécurité, et qu'il a mis en place les moyens réglementaires voulus pour aider les employeurs à financer le coût considérable des réformes, qu'elles entraînent ou non des licenciements. Le cadre mis en place ne vise pas à favoriser ou à défavoriser tel ou tel camp, mais à poser des règles applicables à tous les acteurs du secteur de la manutention.
  6. 205. En ce qui concerne la poursuite du différend, le gouvernement déclare qu'il lui incombe, dans l'administration de la justice, de veiller à l'objectivité de la procédure. Il précise que la procédure juridictionnelle comprend deux instances distinctes, toutes deux devant la Cour fédérale. Dans les deux instances, les demandeurs ont modifié leur demande introductive d'instance pour répondre aux lacunes qui avaient été signalées. Les demandes modifiées ont été rejetées pour vice de forme. De nouvelles demandes ont été déposées ou sont en cours d'établissement. Le gouvernement déclare que, en raison du caractère défectueux des demandes précitées, il n'a pas encore eu à assurer sa défense; cependant, au cas où lesdites demandes seraient reformulées d'une manière acceptable par la Cour, il assurerait cette défense en affirmant qu'il n'encourt aucune responsabilité.
  7. 206. Le gouvernement fait part ensuite de ses observations sur les nouvelles informations fournies par les plaignants. Tout d'abord, il n'a jamais affirmé que le règlement du différend relatif aux entreprises Patrick signifie qu'il y a eu ou non violation des principes de la liberté syndicale avant le règlement de ce différend. Selon lui, si les plaignants ont formulé certaines allégations relatives aux faits et aux intentions des différentes parties, aucune violation n'a pu être prouvée. Par ailleurs, il nie que sa conduite ou sa politique ne fasse apparaître une telle violation ou l'intention de la commettre. En ce qui concerne la déclaration des plaignants selon laquelle le gouvernement n'a pas assumé ses responsabilités consistant à veiller au respect des droits syndicaux, le gouvernement rappelle les modifications importantes apportées à la législation fédérale des relations professionnelles avec la loi de 1996 sur les relations de travail, qui renforce la protection des droits des salariés, des syndicats, des employeurs et des associations d'employeurs. Le gouvernement rappelle que c'est sur cette législation même que la MUA devrait chercher à s'appuyer pour réfuter les allégations de discrimination qui ont été portées contre elle et ses membres en 1998.
  8. 207. En ce qui concerne les procédures intentées en vertu de la loi sur la liberté de l'information pour obtenir la divulgation de divers documents détenus par le gouvernement, celui-ci déclare ne pouvoir anticiper sur ces procédures et ne peut donc formuler d'observations sur les documents dont il s'agit.
  9. 208. En ce qui concerne les informations complémentaires communiquées par les plaignants au sujet de la politique menée par le gouvernement en matière d'activité portuaire, le gouvernement affirme que ces informations ne sont pas nouvelles ou qu'elles constituent une présentation sélective et incomplète de sa réponse antérieure. Il note que les plaignants ne contestent pas le fait que l'action menée par lui au sujet du secteur de la manutention constitue un élément de sa politique d'ensemble visant à améliorer l'efficacité économique de l'activité portuaire et qu'ils ne nient pas les faits qui témoignent de ses efforts visant à réaliser cet objectif politique, notamment en ce qui concerne la longue durée des consultations menées avec les parties intéressées.
  10. 209. Le gouvernement est d'accord avec la déclaration des plaignants selon laquelle les changements apportés aux pratiques de travail et aux modalités de l'emploi devraient être conformes au droit australien et international, et il exprime le regret que les faits qui se sont produits dans le secteur de l'activité portuaire en 1998 aient entraîné des actes de violence contre les personnes et les biens à l'occasion des piquets de grève. Par ailleurs, il note que les plaignants évoquent les procédures de conciliation et d'arbitrage à leur disposition. A cet égard, il attire l'attention sur les conclusions auxquelles a abouti la Commission australienne des relations professionnelles (AIRC) en décembre 1997, à savoir que le refus des membres de la MUA de respecter un accord tendant à modifier les pratiques de travail était injustifiable. Il attire également l'attention sur l'ordonnance rendue par l'AIRC en février 1998 pour mettre fin aux actions revendicatives menées par des membres de la MUA contre les entreprises Patrick. Selon le gouvernement, ces incidents montrent que les observations des plaignants relatives à la solution des différends professionnels par l'entremise de l'AIRC ne tiennent pas compte de la réticence manifestée par la MUA et ses membres envers la procédure de conciliation et d'arbitrage.
  11. 210. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les travailleurs employés dans tous les ports où sont implantées les entreprises Patrick ont fait l'objet de discrimination quelle que soit la productivité du site, le gouvernement déclare que l'interview du Premier ministre évoquée par les plaignants était brève et de caractère général. Il n'a pas été fait mention des complexités de la situation et, en tout état de cause, il n'y a eu aucun licenciement forcé.
  12. 211. Le gouvernement est d'accord avec les plaignants sur le fait qu'il est - et devrait toujours être - possible de procéder à des changements sans que cela ne se fasse aux dépens des membres du syndicat. Il ajoute que ce principe s'applique également aux travailleurs non syndiqués et aux employeurs. Il se déclare favorable à la négociation collective volontaire et il appelle l'attention à cet égard sur la protection accordée par la loi sur les relations de travail à ce type de négociation. Il fait cependant remarquer que ladite protection ne signifie pas qu'il ne faut pas également tenir compte des parties qui ne souhaitent pas participer à ce type de négociation. Il déclare que les plaignants ne démontrent pas le bien-fondé de leur affirmation selon laquelle le gouvernement aurait adopté la réforme de l'activité portuaire et les mesures relatives à l'amélioration de la compétitivité d'une manière autoritaire, arbitraire et déséquilibrée, et il nie avoir mené la réforme de cette manière.
  13. 212. En ce qui concerne la place prépondérante de la MUA, le gouvernement affirme qu'on a refusé aux travailleurs le choix de la représentation syndicale. Avant les modifications de 1996, il existait un cadre légal qui facilitait l'exclusion des autres syndicats d'une entreprise, quelles que soient les difficultés de délimitation. Le gouvernement déclare que l'émergence de la MUA s'est produite dans le cadre d'une législation fédérale sur l'enregistrement des syndicats qui a été jugée contraire aux principes de la liberté syndicale, puis abrogée par la suite. Le gouvernement souligne qu'il n'a ni contesté ni cherché à restreindre en aucune manière le droit des travailleurs de l'activité portuaire d'adhérer à la MUA; ce qui le préoccupe depuis de nombreuses années, c'est qu'on refuse en fait aux salariés la liberté de former leurs syndicats et d'y adhérer ou non. Selon le gouvernement, le fait que les plaignants se réfèrent à un différend concernant les membres d'un autre syndicat qui effectuent traditionnellement les tâches exécutées par les membres de la MUA revient à contester le fait que les membres de ce syndicat effectuent légalement des tâches liées à l'activité portuaire.
  14. 213. En ce qui concerne l'observation des plaignants selon laquelle le gouvernement a contesté le pouvoir de négociation et les actions revendicatives de la MUA, le gouvernement reconnaît qu'il a exprimé les préoccupations que lui causaient la mauvaise qualité des relations de travail dans le secteur de l'activité portuaire et la réticence manifestée par la MUA vis-à-vis des mesures tendant à améliorer la productivité. Il note qu'il a fourni des exemples de cette mauvaise qualité des relations de travail avant 1998 et qu'il a cité un cas faisant apparaître la réticence des membres de la MUA à respecter un accord relatif à l'amélioration de la productivité. Par ailleurs, il attire l'attention sur le fait que le financement des changements structurels grâce aux ressources mobilisées dans le cadre de la loi sur le secteur de la manutention (collecte) ne peut se faire sans que les employeurs acceptent un certain nombre d'objectifs, notamment en ce qui concerne l'amélioration de la productivité, la fiabilité, la formation, la santé et la sécurité professionnelles.
  15. 214. Sur la question des actes de violence liés aux piquets de grève, le gouvernement note que les plaignants ne nient pas que des menaces aient été proférées ni que des actes de violence aient été commis, et qu'ils admettent qu'un membre de la MUA a lancé une pierre contre un camion. En réalité, selon le gouvernement, les actes de violence ont été beaucoup plus fréquents et systématiques, comme il est indiqué dans sa réponse précédente, et les tribunaux des Etats compétents se sont gravement préoccupés de la persistance de cette violence et ont délivré des injonctions interlocutoires pour les prévenir et maintenir l'ordre public. Le gouvernement juge aberrante l'idée qu'on puisse refuser aux tribunaux la faculté d'intervenir dans de tels cas avant qu'une audience n'ait eu lieu en vue de l'examen des ordonnances définitives.
  16. 215. En ce qui concerne la loi sur les pratiques commerciales, le gouvernement fait part de son désaccord avec certains avis de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations évoqués par les plaignants. Il note que ceux-ci ne mentionnent pas les dispositions de la loi précitée qui exemptent certains actes des syndicats et des salariés des dispositions relatives au boycottage lorsqu'elles portent sur certaines questions touchant à l'emploi (art. 45DD), ni les autres dispositions qui réglementent l'application de la législation relative au boycottage dans les cas de conflit du travail (par exemple les articles 80AB et 87AA).
  17. 216. Le gouvernement mentionne ensuite les documents soumis par les plaignants et qui, selon eux, constitueraient une preuve supplémentaire du rôle qu'il aurait joué dans le différend relatif aux entreprises Patrick. Il note que ces documents sont susceptibles d'être produits dans l'affaire en instance et qu'il ne peut donc les commenter. Cependant, il attire l'attention sur ses observations précédentes relatives à son appui allégué à la stratégie des entreprises Patrick. Selon lui, il apparaît que le document du 14 avril 1997 consigne les avis exprimés par les représentants des entreprises Patrick et de P&O à une réunion ayant eu lieu cette année-là, sans qu'on y trouve de trace d'un accord ou d'un avis de sa part. Toujours selon lui, ce document montre que les entreprises Patrick envisageaient de procéder aux changements à une période et dans des circonstances fort différentes de ce qui s'est passé en 1998. Il y a également lieu de noter que, selon le document, les entreprises Patrick se sont efforcées d'obtenir une modification de la loi, mais sans succès. En ce qui concerne la lettre du Premier ministre, le gouvernement déclare qu'elle est antérieure au document du Cabinet du 7 juillet 1997 qu'il a mentionné dans sa réponse précédente. Selon lui, il s'agit simplement d'une lettre signalant que le gouvernement était disposé à mettre en place une action de type "dynamique", comme il l'a expliqué au Parlement australien le 4 juin 1998 et comme le mentionne la réponse précédente. En ce qui concerne les informations complémentaires fournies par les plaignants au sujet de la formation donnée à Doubaï, le gouvernement renvoie à sa réponse précédente.
  18. 217. Le gouvernement déclare qu'il ignore si l'affirmation des plaignants selon laquelle la conclusion d'un AWA était une condition d'emploi pour les divers salariés est exacte. Cependant, en ce qui concerne les liens établis par la loi sur les relations de travail entre les conventions approuvées et les AWA, il déclare que les observations de la commission d'experts à cet égard sont erronées et il renvoie à la déclaration qu'il a faite devant la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail en 1998.

E. Conclusions du comité

E. Conclusions du comité
  1. 218. Le comité note que les allégations relatives à des violations de la liberté syndicale contenues dans le présent cas résultent d'un ensemble complexe de faits relatifs aux mesures prises par les entreprises Patrick et le gouvernement au sujet de l'emploi de membres de la MUA à des postes de manutentionnaires dans divers ports australiens. Un certain nombre de questions se posent à cet égard:
    • i) les membres de la MUA ont-ils été victimes d'une discrimination fondée sur leur appartenance ou leurs activités syndicales?
    • ii) le droit de faire grève et d'établir des piquets de grève a-t-il été violé?
    • iii) y a-t-il eu ingérence dans les activités légitimes de boycottage et d'action indirecte?
    • iv) les droits liés à l'affiliation de la MUA à une organisation syndicale internationale ont-ils été violés?
    • v) l'introduction du contrat australien de travail (AWA) contrevient-elle à l'obligation de promouvoir la négociation collective volontaire?
      • Le comité note par ailleurs que la réponse du gouvernement soulève la question de la légitimité de certaines dispositions de sécurité syndicale, question examinée dans les informations complémentaires communiquées par les plaignants.
      • Les dispositions relatives à la sécurité syndicale
    • 219. Le comité note que le gouvernement, lorsqu'il explique le rôle qu'il a joué dans les mesures prises par les entreprises Patrick, indique clairement son opposition au "quasi-monopole" exercé par la MUA sur le travail dans le secteur portuaire. En particulier, le gouvernement évoque la clause de monopole syndical dont a bénéficié la MUA dans le passé et les droits exclusifs de représentation obtenus par elle grâce à des accords intersyndicaux, à des regroupements de syndicats et à l'obtention d'ordonnances de l'ACCC lui assurant l'exclusivité de représentation sur les travailleurs en question. Le gouvernement note toutefois que la législation qui a permis d'aboutir à cette situation a été modifiée depuis lors, ce qui a facilité aux salariés la création et l'enregistrement des syndicats et a élargi leur droit de s'affilier ou non à l'un de ces syndicats. Selon le gouvernement, le cadre juridique en place avant la modification de 1996 facilitait l'exclusion des autres syndicats des entreprises; le gouvernement se dit préoccupé de ce que, avant l'adoption de ces modifications, les salariés étaient en pratique privés du droit de créer les syndicats de leur choix et d'y adhérer ou non. Le comité note que les plaignants font remarquer que les électriciens du secteur de l'activité portuaire appartenaient (et continuent à appartenir) à un autre syndicat, à savoir le Syndicat australien des communications, de l'électricité, de l'électronique, de l'énergie, de l'information, des postes, de la plomberie et des services connexes (CEPU). Les plaignants notent également que, malgré les modifications législatives apportées en 1996, aucune tentative n'a été faite à leur connaissance par des travailleurs de l'activité portuaire pour créer un syndicat d'entreprise ou s'affilier à un autre syndicat, point que le gouvernement ne conteste pas.
  2. 220. Le comité rappelle qu'un monopole syndical doit être distingué, d'une part, des clauses et pratiques de sécurité syndicale et, d'autre part, des situations dans lesquelles les travailleurs forment volontairement une seule organisation. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 292.) Il convient en outre de faire une distinction entre les clauses de sécurité syndicale autorisées par la loi et celles qui sont imposées par la loi, seules ces dernières ayant pour résultat un système de monopole syndical contraire aux principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 321.) Selon le gouvernement, les droits de représentation exclusive de la MUA proviennent d'accords intersyndicaux, de regroupements de syndicats et de demandes faites à l'ACCC. De l'avis du comité, il apparaît qu'aucun de ces facteurs concourant à l'unité syndicale dans un secteur particulier n'est imposé par une intervention de l'Etat par voie législative, ce qui irait à l'encontre des principes de la liberté syndicale. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 289.) Le comité note également que le gouvernement reconnaît lui-même que la législation relative au monopole syndical d'embauche a été déjà modifiée il y a quelques années. Il rappelle donc qu'une unité syndicale obtenue de manière volontaire ne doit pas être interdite et doit être respectée par les autorités publiques.
    • La discrimination antisyndicale
  3. 221. Le comité note que l'allégation relative à la discrimination antisyndicale est fondée sur deux éléments principaux. Tout d'abord, selon les plaignants, les entreprises Patrick ont procédé à une restructuration visant à permettre le licenciement d'environ 1 400 membres de la MUA, licenciement auquel elles auraient procédé pour nuire au syndicat. Ensuite, le rôle du gouvernement dans cette affaire est soulevé par les plaignants.
  4. 222. Les plaignants et le gouvernement sont d'accord pour dire que les entreprises Patrick se sont restructurées en profondeur en septembre 1997, avec pour résultat de confier l'embauche des agents d'exécution à des entreprises spécialisées. Les contrats relatifs à la fourniture de main-d'oeuvre à une autre entreprise Patrick étaient le seul véritable élément d'actif de ces entreprises. Selon les plaignants, les salariés n'ont pas été informés du changement d'identité de leur employeur. Les plaignants et le gouvernement s'accordent également à dire que les entreprises d'embauche sont devenues insolvables et ont dû cesser leurs activités et licencier les travailleurs intéressés. Le comité note également que la MUA a réussi à obtenir des ordonnances judiciaires provisoires enjoignant aux entreprises Patrick de considérer les contrats d'embauche comme contraignants et de se procurer leur main-d'oeuvre auprès des entreprises précitées, ce qui a permis d'éviter le licenciement des travailleurs.
  5. 223. Le comité note que, dans un arrêt du 21 avril 1998, le Tribunal fédéral a estimé que la MUA était fondée à soutenir que les entreprises Patrick avaient contrevenu à l'article 298K de la loi de 1996 relative aux relations sur les lieux de travail, aux termes de laquelle un employeur n'est pas autorisé, que ce soit pour une raison interdite ou pour des raisons comprenant une raison interdite, à procéder ou à menacer de procéder à l'une des actions suivantes: a) congédier un salarié; b) porter préjudice à l'un de ses salariés; c) modifier la situation d'un salarié d'une façon qui lui porte préjudice. Aux termes de l'article 298L de la loi, l'une des "raisons interdites" porte sur les mesures prises parce que le salarié, l'entrepreneur indépendant ou toute autre personne intéressée: a) est, a été, se propose de devenir ou a été pressentie en vue de devenir l'un des dirigeants, délégués ou membres d'une association professionnelle ..." Le juge a déclaré que, en attribuant les fonctions relatives à l'emploi des travailleurs et celles relatives à la propriété du groupe à deux entreprises distinctes, le groupe Patrick avait mis en place une structure permettant de congédier plus facilement l'ensemble du personnel. Au vu des faits, il est possible de soutenir que la raison en était que les salariés visés étaient membres du syndicat. Par ailleurs, le juge a estimé que ces actes pouvaient être considérés comme une violation des contrats d'emploi et que les propriétaires du groupe Patrick, agissant avec d'autres, avaient pris ces mesures dans le cadre d'un plan d'ensemble visant à remplacer les travailleurs par des travailleurs non syndiqués. On peut donc soutenir que les propriétaires et employeurs du groupe Patrick ont mis en place une entente délictueuse. En ce qui concerne plus précisément la restructuration du groupe et la conclusion des accords d'embauche, le juge a déclaré que ces faits donnaient au groupe la possibilité de supprimer le seul élément d'actif véritable des employeurs, de rendre ainsi chacun d'eux insolvable et, par voie de conséquence, de leur permettre d'affirmer qu'il leur fallait licencier leur personnel, sans pour autant nuire à la bonne marche des activités de manutention des entreprises Patrick. Etant donné que l'article 13.1(b) des accords d'embauche pouvait être invoqué en cas d'arrêt de travail mineur de la part de certains salariés et que cette éventualité était de nature à se produire à un moment ou à un autre, les employeurs avaient toute latitude pour créer les conditions leur permettant de congédier les travailleurs. Si aucune des constatations citées n'a été contestée en appel, la Haute Cour a précisé que les ordonnances relatives au maintien en vigueur des accords d'embauche et leurs effets sur l'emploi des salariés ne remettaient pas en cause le pouvoir des administrateurs. Le comité note également que, selon les plaignants, les travailleurs se sont trouvés sans emploi et sans salaire alors que, techniquement, ils n'avaient pas été congédiés.
  6. 224. En ce qui concerne le rôle du gouvernement dans les faits qui ont entraîné la tentative des entreprises Patrick de résilier les accords d'embauche, avec pour effet de licencier les membres de la MUA, le comité note que le gouvernement, selon ses propres indications, souhaitait mettre fin au monopole de la MUA sur la main-d'oeuvre dans le secteur portuaire, cette mesure constituant pour lui un élément important de la restructuration générale du secteur. Le gouvernement justifie cette position par l'importance des ports dans un pays comme l'Australie, par le risque de voir les différends du travail relatifs à cette activité conduire à une crise des services essentiels et par la nécessité d'améliorer la productivité. Le comité note que, selon des statistiques récentes fournies par le gouvernement, la fiabilité et la productivité de l'activité portuaire se sont régulièrement améliorées depuis 1999, en raison pour une part des conventions d'entreprise adoptées en septembre 1998 dans le cadre du règlement du différend opposant la MUA et les entreprises Patrick.
  7. 225. Le comité note qu'environ 1 400 membres de la MUA ont été licenciés par suite de la résiliation des accords d'embauche, situation qui, selon le juge du Tribunal fédéral, a été rendue pratiquement inévitable par la restructuration des entreprises Patrick et les clauses de ces accords d'embauche. Bien qu'une injonction provisoire ait été accordée pour garantir l'emploi de ces travailleurs, le comité note que, malgré l'ordonnance de justice, les travailleurs n'ont reçu ni tâche ni salaire jusqu'à la date de soumission de la plainte, alors pourtant que nombre d'entre eux sont aujourd'hui de retour au travail à la suite du règlement du différend. Bien que les tribunaux aient pris des ordonnances provisoires et non définitives, il apparaît au comité que, compte tenu des faits - exposés assez en détail par les tribunaux -, l'un des buts de la restructuration et de la conclusion des accords d'embauche était de pouvoir remplacer les manutentionnaires syndiqués par des travailleurs non syndiqués. Au sujet des motifs des entreprises Patrick, le comité note également que le gouvernement reconnaît avoir su dès décembre 1997 que ces entreprises faisaient former des manutentionnaires de remplacement à Doubaï, soit à une date antérieure au déclenchement de l'action revendicative qui, selon le gouvernement, a entraîné la résiliation des accords d'embauche, ce qui confirme la thèse selon laquelle les mesures prises par les entreprises Patrick visaient à remplacer leur personnel syndiqué par un personnel non syndiqué.
  8. 226. A cet égard, le comité souhaite rappeler l'importance du principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales légitimes. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 690.) Dans ce contexte, le comité estime que la restructuration d'une entreprise ne doit pas menacer directement ou indirectement les travailleurs syndiqués et leurs organisations. Le comité note toutefois que les actions en justice relatives à cette question ont été annulées par accord entre les parties au règlement du différend et que les travailleurs ont soit retrouvé leur travail, soit perçu l'intégralité de leurs indemnités de licenciement.
  9. 227. Sur la question de la formation dispensée à Doubaï, le comité note que, selon le gouvernement, tous les membres en activité du personnel de la Défense qui y ont participé étaient en congé de longue durée ou en congé de détente, et tous ceux qui avaient négligé de se procurer l'approbation nécessaire pour exercer un emploi extérieur feraient l'objet de sanctions disciplinaires à leur retour. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de toute décision prise à cet égard. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures voulues pour empêcher à l'avenir la formation de personnes afin de remplacer des travailleurs exerçant une grève légitime.
    • Les grèves et les piquets de grève
  10. 228. Le comité note que l'allégation selon laquelle le gouvernement et les entreprises Patrick ont pris des mesures visant à éviter les grèves dans le secteur de l'activité portuaire est étroitement liée à celle relative à la discrimination antisyndicale. Selon les plaignants, l'un des motifs de la modification des structures du groupe Patrick était d'éviter les grèves. Alors que les plaignants déclarent qu'une minorité des travailleurs licenciés ont bien participé à une action revendicative licite, mais qu'aucun n'a participé à une action illicite, le gouvernement estime que la question de cette participation n'entre pas en ligne de compte. Le comité prend note du souci clairement exprimé par le gouvernement d'éviter toute action revendicative dans le secteur de l'activité portuaire, au motif que les conflits du travail dans ce secteur peuvent entraîner rapidement une crise des services essentiels. Le gouvernement pensait que la MUA s'opposerait aux mesures visant à réformer le secteur de l'activité portuaire et a considéré que cette opposition prendrait la forme d'actions revendicatives de grande ampleur et de longue durée tendant à bloquer entièrement l'activité du secteur portuaire, ce qui "provoquerait une crise nationale, laquelle nuirait gravement à la population australienne et à l'économie du pays". Bien que le gouvernement affirme avoir été dans la nécessité de se préparer à une telle éventualité, celle-ci ne s'est pas réalisée, et il n'a pas été nécessaire d'étudier plus avant les mesures envisagées.
  11. 229. Tout en reconnaissant l'importance des ports pour un pays comme l'Australie et le rôle clé joué par le secteur portuaire, le comité ne considère pas qu'il s'agit là d'un "service essentiel" au sens strict du terme. Le jugement du gouvernement se fonde essentiellement sur les conséquences présumées pour l'économie des actions revendicatives menées dans les ports. Le comité note toutefois que, aux termes de l'article 170MW(3) de la loi sur les relations de travail, les actions revendicatives ne sont pas protégées (ouvrant ainsi la porte aux injonctions, à la responsabilité civile et au congédiement des grévistes) si elles menacent de causer de graves dommages à l'économie australienne. Le comité note également que, en vertu de l'article 294 de la loi, l'enregistrement d'une organisation peut être annulé si elle participe - ou si ses membres participent - à une action revendicative entravant les échanges ou le commerce. Le comité rappelle que le droit de grève peut être restreint ou interdit dans le cas des services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 542.) S'il est vrai que le comité a également reconnu qu'un service non essentiel pouvait devenir essentiel si une grève dépassait une certaine durée ou une certaine étendue, mettant ainsi en péril la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population (voir Recueil, op. cit., paragr. 541), les dommages économiques ne sont pas déterminants en eux-mêmes; et, en tout état de cause, le gouvernement indique clairement que les actions revendicatives prolongées qu'il craignait ne se sont pas produites.
  12. 230. Le comité est préoccupé de constater que le fait d'établir un lien entre les restrictions aux actions revendicatives et l'entrave aux échanges et au commerce permet de porter atteinte à une large gamme d'actions légitimes. Certes, l'impact économique des actions revendicatives et leurs effets sur les échanges et le commerce sont regrettables; cependant, ils ne suffisent pas à rendre le service visé "essentiel", et le droit de grève devrait donc être maintenu. C'est pourquoi le comité demande au gouvernement de modifier la législation sur ce point. Il appelle l'attention de la commission d'experts sur cet aspect du cas.
  13. 231. En ce qui concerne plus particulièrement les activités portuaires, le comité estime que, bien qu'elles ne constituent pas un service essentiel, elles peuvent être considérées comme un service public important. Le gouvernement pourrait donc envisager d'établir un service minimum en cas de grève. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 564, qui concerne l'Office national des ports.) Le comité rappelle à cet égard que, dans la détermination des services minima et du nombre de travailleurs qui en garantissent le maintien, il importe que participent non seulement les organisations d'employeurs et les pouvoirs publics, mais aussi les organisations de travailleurs concernées. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 560.)
  14. 232. En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle des ordonnances ont été prises pour interdire les piquets de grève pacifiques, ce qui exposait le syndicat et ses membres à des poursuites judiciaires pour outrage à magistrat ainsi qu'à des peines de prison, à des amendes et à des dommages-intérêts pour non-respect de ces ordonnances, le comité prend note des décisions et ordonnances transmises par les plaignants et le gouvernement. Il note que le différend a été particulièrement grave et que la majorité desdites ordonnances visaient à interdire les accidents et dommages. Le comité rappelle qu'il a jugé légitime dans le passé une disposition légale interdisant aux piquets de grève de troubler l'ordre public et de menacer les travailleurs qui poursuivraient leurs occupations. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 585.) Il a également déclaré que, si le seul fait de participer à un piquet de grève et d'inciter fermement, mais pacifiquement, les autres salariés à ne pas rejoindre leur poste de travail ne pouvait être considéré comme une action illégitime, il en allait toutefois autrement lorsque le piquet de grève s'accompagne de violences ou d'entraves à la liberté du travail par contrainte exercée sur les non-grévistes. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 586.)
    • Le boycottage/l'action indirecte et l'affiliation internationale
  15. 233. Le comité note que la question de savoir s'il y a eu ingérence dans les activités légitimes de boycottage est étroitement liée à l'allégation selon laquelle il y aurait eu ingérence dans les droits liés à l'affiliation de la MUA à la Fédération internationale des ouvriers du transport. Cet aspect du cas résulte des actions prises par la Commission australienne de la concurrence et de la consommation (ACCC), autorité publique indépendante chargée de l'application de la loi de 1974 sur les pratiques commerciales. Les plaignants déclarent que les syndicats australiens et leurs dirigeants ont été menacés de poursuites judiciaires par l'ACCC pour avoir participé à des actions de solidarité ou de boycottage contraires à la loi sur les pratiques commerciales et s'être affiliés à une organisation internationale, à savoir la Fédération internationale des ouvriers du transport. Selon le gouvernement, les mesures prises par l'ACCC au sujet d'un boycott international ne peuvent être véritablement considérées comme une menace ou un geste inacceptable, puisque la commission, par l'intermédiaire du Procureur du gouvernement, a informé la MUA de ses craintes relatives à des violations éventuelles de la loi sur les pratiques commerciales et du fait que de telles violations pourraient entraîner des poursuites au titre de cette loi.
  16. 234. Le comité note que la question qui se pose ici n'est pas de savoir si l'ACCC a agi comme elle le devait. L'ACCC est une autorité publique indépendante qui agit selon une autorité déléguée. La question est de savoir si la loi sur les pratiques commerciales, telle qu'elle est interprétée par l'ACCC et les tribunaux, contient des dispositions non conformes aux principes de la liberté syndicale. Le comité prend note de la lettre envoyée par le Procureur du gouvernement australien au Secrétaire national de la MUA le 17 avril 1998:
    • La commission a connaissance de faits qui donnent à penser que vous menez des actions contrevenant à la loi sur les pratiques commerciales ... Ces faits indiquent que, agissant de concert, la MUA, la Fédération internationale des ouvriers du transport et d'autres ont organisé ou menacé d'organiser une action de revendication dans divers ports du monde à l'encontre de navires et d'armateurs qui utilisent en Australie les services d'entreprises de manutention recourant à du personnel non syndiqué. Il ressort de ces faits que ces menaces ont été largement diffusées par les personnes et organismes en question et pourraient être bientôt appliquées ... Se fondant sur les faits dont elle a connaissance, la commission estime qu'il semble y avoir violation de l'article 45DB de la loi. Elle estime également que la mise à exécution des menaces constituerait une (ou des) violation(s) supplémentaire(s) de cet article ... La commission étudie actuellement les mesures à prendre, et en particulier le fait de savoir s'il y a lieu d'intenter des poursuites ... Elle estime qu'il pourrait être possible de régler la question par l'acceptation par la MUA, par vous et par les autres parties intéressées d'un engagement contraignant dans le cadre de l'annexe ci-jointe.
    • Le comité note que l'engagement figurant en annexe à la lettre a une large portée:
  17. 1. John Coombs et Trevor Charles, tous deux membres de la MUA, s'engagent, de même que leurs subordonnés et agents respectifs, à ne pas chercher, de quelque manière que ce soit, à inciter la Fédération internationale des ouvriers du transport et/ou l'une quelconque de ses organisations affiliées, à mettre en oeuvre ou à menacer de mettre en oeuvre un boycott international:
    • a) de tout navire recourant en Australie à des services de manutention assurés par du personnel non syndiqué, et/ou
    • b) de tout navire appartenant à un armateur qui autorise ses navires à recourir en Australie à des services de manutention assurés par du personnel non syndiqué.
  18. 2. La MUA demandera à la Fédération internationale des ouvriers du transport de ne pas mettre en oeuvre et/ou menacer de mettre en oeuvre un boycott du type exposé à l'engagement 1 ci-dessus.
  19. 3. John Coombs et Trevor Charles, tous deux membres de la MUA, s'engagent, de même que leurs subordonnés et agents respectifs, à ne donner à la Fédération internationale des ouvriers du transport ou à l'une quelconque de ses organisations affiliées aucune information:
    • a) visant à identifier, ou
    • b) permettant à la Fédération internationale des ouvriers du transport ou à l'une quelconque de ses organisations affiliées d'identifier tout navire qui recourt en Australie à des services de manutention assurés par du personnel non syndiqué.
  20. 4. La MUA prendra toutes mesures voulues pour fournir un exemplaire de ces engagements à tous les armateurs assurant un service entre les ports australiens et les ports situés en dehors d'Australie.
    • Une injonction provisoire a été ensuite obtenue par l'ACCC. L'ordonnance délivrée le 27 mai 1998 par le juge Beaumont est rédigée dans des termes semblables, quoique plus restreints, à ceux de l'engagement demandé par le Procureur du gouvernement.
  21. 235. Le comité note que la disposition sur laquelle se fonde l'ACCC est l'article 45DB de la loi de 1974 sur les pratiques commerciales, dans sa teneur modifiée, qui interdit à quiconque de mener des actions, de concert avec une autre personne, "ayant pour but et pour résultat, certain ou probable, d'empêcher un tiers (qui n'est pas l'employeur de la première personne) de se livrer à des échanges ou du commerce comportant le mouvement de marchandises entre l'Australie et des destinations extérieures à l'Australie ou d'entraver ces opérations". Par ailleurs, les plaignants appellent l'attention sur les articles 45D et 45E, qui déclarent illicites de nombreux types d'activités de boycottage dirigées contre les personnes qui ne sont pas les employeurs de ceux qui se livrent à ces boycotts. Le comité rappelle qu'une interdiction générale des grèves de solidarité risque d'être abusive et que les travailleurs devraient pouvoir avoir recours à de tels mouvements, pour autant que la grève initiale qu'ils soutiennent soit elle-même légitime. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 486.) A cet égard, le comité note et fait sienne l'observation la plus récente de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations au sujet des dispositions de la loi sur les pratiques commerciales: "La commission regrette de devoir prendre note de ce que les modifications récemment introduites dans la loi maintiennent l'interdiction du boycott et considèrent illégales une large gamme d'actions de solidarité." (Voir rapport de la commission d'experts, rapport III, partie 1A, 1999, p. 219.) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris en modifiant la loi sur les pratiques commerciales, pour faire en sorte que les travailleurs soient en mesure de mener des actions de solidarité, à condition que la grève initiale qu'ils soutiennent soit légale. Le comité porte cet aspect du cas à l'attention de la commission d'experts.
  22. 236. En ce qui concerne plus précisément les effets des dispositions relatives au boycottage, telles qu'interprétées par l'ACCC et le tribunal, sur les droits liés à l'affiliation de la MUA à la Fédération internationale des ouvriers du transport, le comité est préoccupé de noter l'ampleur des restrictions émises dans l'engagement et l'ordonnance de justice précités, notamment en ce qui concerne les restrictions apportées au droit de la MUA de communiquer avec la Fédération internationale des ouvriers du transport et l'obligation qui lui est faite de renoncer à tout appel à une action de solidarité. Le comité rappelle que le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs implique le droit, pour les représentants des syndicats nationaux, de se tenir en contact avec les organisations syndicales internationales auxquelles ils sont affiliés, de prendre part aux activités de ces organisations et de bénéficier des services et des avantages provenant de leur adhésion. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 635.) Toutefois, l'octroi des avantages découlant de l'affiliation internationale d'une organisation syndicale ne doit pas aller à l'encontre de la légalité, étant entendu que la loi elle-même ne devrait pas être de nature à enlever toute signification à cette affiliation. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 631.) Le comité demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'à l'avenir les syndicats aient le droit de maintenir des contacts avec les organisations syndicales internationales, de prendre part aux activités légitimes de ces organisations et de bénéficier des services et des avantages provenant de leur adhésion.
    • La promotion de la négociation collective
  23. 237. Au sujet de l'allégation selon laquelle les droits relatifs à la négociation collective ont été violés, le comité note que, s'agissant en général des dispositions de la loi sur les relations de travail qui concernent les AWA, les plaignants considèrent que cette loi n'assure pas la promotion de la négociation collective. De son côté, le gouvernement soutient que le système des AWA n'est pas incompatible avec les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective et qu'il offre une voie nouvelle à ceux qui ne souhaitent pas négocier collectivement. En ce qui concerne la situation particulière des travailleurs visés dans le présent cas, le comité note que les informations fournies par les plaignants et par le gouvernement sont en contradiction directe. Les plaignants affirment qu'on a proposé à certains des travailleurs affiliés à la MUA qui avaient été licenciés et à l'ensemble des travailleurs de remplacement non syndiqués de les embaucher ou de les réembaucher à la condition qu'ils acceptent de travailler dans le cadre d'un contrat individuel (AWA), et non dans celui d'une convention collective. Selon le gouvernement, en revanche, les conditions d'emploi des manutentionnaires du groupe Patrick sont régies par deux conventions collectives qui ont été agréées le 3 septembre 1998.
  24. 238. Sur la question de la compatibilité des dispositions de la loi de 1996 sur les relations de travail qui concernent les AWA avec les droits de négociation collective, le comité note que la commission d'experts, dans ses observations de 1997 sur les obligations qui sont celles de l'Australie en vertu de la convention no 98, s'est dite gravement préoccupée par les dispositions correspondantes, et en particulier la partie VID. (Voir rapport de la commission d'experts, rapport III, partie 1A, 1998, p. 239.) Elle a rappelé ses préoccupations en 1999, déclarant en particulier que, "après avoir examiné de près les précisions et observations du gouvernement, la commission reste d'avis que la procédure des accords AWA accorde la primauté aux relations individuelles sur les relations collectives". La commission a donc prié le gouvernement de prendre des mesures pour revoir et modifier cette loi afin que la négociation collective soit non seulement garantie mais aussi encouragée au niveau choisi par les parties. (Voir rapport de la commission d'experts, rapport III, partie 1A, 2000, p. 238. )
  25. 239. Le comité demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, dont l'amendement de la législation, pour faire en sorte que les accords AWA ne viennent pas restreindre le droit légitime à la négociation collective, ou ne donnent la primauté aux relations individuelles sur les relations collectives. Il attire l'attention de la commission d'experts sur cet aspect du cas.
  26. 240. En ce qui concerne la situation particulière qui s'est posée pour les travailleurs des entreprises Patrick, le comité considère que la réorganisation du groupe ne devrait pas avoir pour effet d'ignorer le droit de négociation collective des travailleurs concernés, par l'intermédiaire de leur syndicat. Il demande au gouvernement de s'assurer à l'avenir, dans ces cas de restructuration de société, qu'il y ait un dialogue entre les parties à la convention collective et que les obligations aux termes de la convention no 98 soient respectées.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 241. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) En ce qui concerne l'opposition du gouvernement au fait que les membres de la MUA constituent une proportion élevée des travailleurs de l'activité portuaire, le comité rappelle qu'une unité syndicale obtenue volontairement ne doit pas être interdite et doit être respectée par les autorités publiques.
    • b) Notant que, selon le gouvernement, tous les membres en activité du personnel de la Défense qui ont participé aux activités de formation menées à Doubaï étaient en congé de longue durée ou en congé de détente et tous ceux qui avaient négligé de se procurer l'approbation nécessaire pour exercer un emploi extérieur feraient l'objet de sanctions disciplinaires à leur retour, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de toute décision prise à cet égard. Le comité demande également au gouvernement de prendre les mesures voulues pour empêcher à l'avenir la formation de personnes afin de remplacer des travailleurs exerçant une grève légitime.
    • c) Notant avec préoccupation que, en liant les restrictions relatives à la grève et à l'ingérence dans les activités commerciales, il est possible d'interdire une large gamme de grèves légitimes, le comité demande au gouvernement de modifier les dispositions de la loi de 1996 sur les relations de travail qui établissent un lien entre les restrictions au droit de grève et le fait de nuire aux échanges et au commerce ou qui limitent ce droit lorsque son exercice risque de causer de graves dommages à l'économie.
    • d) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris en modifiant la loi sur les pratiques commerciales, pour faire en sorte que les travailleurs aient la possibilité de se joindre aux grèves de solidarité, à condition que la grève initiale qu'ils soutiennent soit licite.
    • e) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'à l'avenir les syndicats soient autorisés à maintenir des contacts avec les organisations syndicales internationales, à participer aux activités légitimes de ces dernières et à profiter des services et des avantages qu'offre cette participation.
    • f) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, dont l'amendement de la législation, pour s'assurer que les contrats australiens de travail (AWA) ne viennent pas restreindre le droit légitime à la négociation collective ou donnent la primauté aux relations individuelles sur les relations collectives.
    • g) Notant que les réorganisations industrielles ne doivent pas avoir pour effet d'ignorer le droit de négociation collective des travailleurs concernés, par l'intermédiaire de leur syndicat, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures voulues pour qu'à l'avenir, dans de tels cas de réorganisation industrielle, il s'établisse un dialogue entre les parties à la convention collective et que les obligations de la convention no 98 soient respectées.
    • h) Le comité porte les aspects législatifs du présent cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
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