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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration - Rapport No. 328, Juin 2002

Cas no 1961 (Cuba) - Date de la plainte: 26-MARS -98 - Clos

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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration

Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
  1. 28. Dans le cadre du suivi des recommandations sur ce cas, soumis par la Confédération mondiale du travail (CMT), cette dernière a présenté dans une communication du 8 décembre 2000 deux nouvelles allégations précises concernant la détention de syndicalistes du Conseil unitaire des travailleurs cubains (CUTC) et la détention de journalistes, des entraves au fonctionnement et aux activités de cette organisation (tenue d’un congrès), des atteintes au droit d’expression, des intimidations et des menaces. Le gouvernement a répondu de manière générale à ces allégations dans une communication en date du 16 septembre 2001. A sa réunion de novembre 2001, le comité a prié le gouvernement de répondre de manière précise à chacune des allégations présentées par la CMT. [Voir 326e rapport, paragr. 73 et 74.]
  2. 29. La CMT signale dans sa communication du 8 décembre 2000 que, dans des communications adressées antérieurement au Comité de la liberté syndicale, elle avait décrit les restrictions que le gouvernement a imposées en vue de limiter la liberté syndicale à Cuba par des actes répétés de harcèlement, de détention et par l’établissement de listes noires, et insiste en particulier sur le fait qu’il n’existe aucun syndicat indépendant dans ce pays et que les travailleurs ne peuvent s’organiser librement en dehors du syndicat officiel créé par le gouvernement. En outre, la confédération a mis en évidence à diverses reprises le harcèlement systématique et la persécution dont sont victimes les dirigeants du CUTC dans l’exercice légitime de leurs activités syndicales.
  3. 30. La CMT ajoute que le CUTC -- affilié à la Centrale latino-américaine des travailleurs -- avait fixé les dates d’un congrès aux 20 et 21 octobre 2000 et avait entamé les travaux préparatoires dès la première semaine d’août 2000. Le Département de la sécurité de l’Etat (DES) a intensifié les actes de harcèlement contre les membres du CUTC en vue d’éviter la tenue de la deuxième réunion préparatoire, fixée pour le 8 de ce mois. Quelques dirigeants ont été arrêtés, d’autres ont été assignés à résidence et d’autres ont été appréhendés sur le lieu de la réunion et contraints de rentrer chez eux sous la menace d’une arrestation. Malgré cette répression et cette ingérence dans les activités syndicales, le CUTC a confirmé la tenue de son congrès pour les 20 et 21 octobre. Au mois d’octobre, M. Sixto Rolando Calero (délégué pour la province de Camagüey), par exemple, et son épouse ont été arrêtés lors d’une opération de police ordonnée par le chef du DES pour le Conseil Esmeralda. Leurs papiers d’identité leur ont été confisqués.
  4. 31. Par ailleurs, le CUTC a annoncé publiquement son intention d’organiser son congrès. A cet effet, une conférence de presse préalable a été fixée pour le vendredi 13 octobre 2000 à 11 heures du matin. Tôt le matin du 12 octobre, des agents de la sécurité de l’Etat ont arrêté Pedro Pablo Alvarez Ramos, secrétaire général du CUTC, au moment où il sortait de son domicile. Dans la nuit du même jour, il a été remis en liberté. Pendant sa détention, les agents de la sécurité ont fait pression sur lui pour qu’il renonce à organiser la conférence de presse le lendemain et à poursuivre les travaux préparatoires en vue du congrès. Dans la matinée du 13 octobre, Pedro Pablo Alvarez Ramos et ses compagnons se rendaient sur les lieux où devait avoir lieu la conférence de presse à 11 heures du matin (627 calle San Francisco, entre le 12 et le 13, Conseil du 10 octobre, province de La Havane), mais les lieux étaient entièrement cernés par des agents du DES. M. Pedro Pablo Alvarez Ramos fut de nouveau arrêté par les agents et emmené dans le centre de détention 10 du même conseil. Les forces de sécurité ont aussi confisqué les documents syndicaux qui étaient en leur possession ainsi qu’un drapeau cubain. Dans la matinée du même 13 octobre, Mme Gladys Linares Blanco, autre dirigeante importante du CUTC, et son mari, M. Umberto Mones Lafita, tous deux propriétaires de la maison où devait avoir lieu la conférence de presse, ont été arrêtés. Parmi les autres dirigeants du CUTC qui ont été arrêtés lors de cette vague de répression figure M. Carmelo Agustín Días Fernández, membre de la presse indépendante présente pour la conférence. De nombreux journalistes de la presse indépendante qui s’approchaient pour participer à la conférence de presse ont été appréhendés par les forces de sécurité et contraints de battre en retraite. De même, à Güines, MM. Pedro Pablo Hernández Mijares et Víctor Rolando Arroyo (journalistes indépendants bien connus de Pinar del Río) ont été arrêtés alors qu’ils se dirigeaient vers la capitale. Lors de leur détention, ils ont été frappés puis ont été emmenés dans la province occidentale de Pinar del Río. Finalement ils ont été remis en liberté et abandonnés sur l’autoroute reliant Guanajay à Artemisa.
  5. 32. Vendredi soir, tous les dirigeants du CUTC détenus dans le centre 10 de La Havane avaient été remis en liberté, à l’exception de M. Pedro Pablo Alvarez Ramos. Selon des informations parvenues ultérieurement à la CMT, M. Pedro Pablo Alvarez Ramos a été arrêté par mandat no 0900-2000 pour avoir résisté à son arrestation. Or, chaque fois qu’il a été arrêté, M. Pedro Pablo Alvarez Ramos n’a jamais résisté aux forces de sécurité, même lorsque ces arrestations constituaient des violations manifestes de ses droits les plus élémentaires. Et tout cela pour avoir tenté d’organiser de manière pacifique un congrès syndical, ce dont les autorités avaient été informées officiellement.
  6. 33. Dans sa communication du 14 septembre 2001, le gouvernement déclare, au sujet des allégations relatives à la détention des diverses personnes mentionnées dans la plainte qui exerceraient des activités syndicales, que, selon l’enquête réalisée, aucune des personnes mentionnées dans le document n’est retenue en prison, mais qu’elles se trouvent à leur domicile et n’ont pas été importunées par les «forces de sécurité» comme il est indiqué dans les observations de la CMT. Les personnes mentionnées sont qualifiées par la CMT de «dirigeants ou syndicalistes». A cet égard, le gouvernement a signalé que ladite organisation syndicale n’a jamais pu prouver qu’elle exerçait des activités syndicales sur un lieu de travail. Vu l’absence d’un contexte de relations professionnelles, on ne peut attribuer une représentativité syndicale à des personnes qui ne dirigent ni ne représentent aucun ensemble de travailleurs dans aucun lieu de travail du pays. A Cuba, 98 pour cent de la population active est affiliée à des organisations syndicales de base qui font elles-mêmes partie de 19 syndicats nationaux représentant les différentes branches d’activité économique. Quant à la mise en question par la CMT du droit des travailleurs de créer librement des organisations de leur choix, il existe à Cuba 19 syndicats nationaux de branche librement créés par les travailleurs et non pas par la loi, ni par des contraintes, pressions, répressions ou violences exercées par les pouvoirs publics.
  7. 34. Ces larges activités syndicales s’exercent sans ingérence, répression ni contrainte. Dans ce sens, les libertés publiques sont reconnues, protégées et exercées conformément à la loi.
  8. 35. Aux termes de l’article 14 du Code du travail, «les travailleurs ont le droit de se réunir, de discuter et d’exprimer librement leurs opinions sur toute question ou affaire les concernant».
  9. 36. Pour ce qui est des allégations relatives à la liberté d’expression, la pratique syndicale mentionnée est une preuve des formes les plus diverses de liberté d’expression exercée par les travailleurs et par leurs dirigeants légitimes dans toutes les tribunes des structures syndicales ou administratives et des entreprises, tout cela étant reconnu et protégé aussi bien par la Constitution de la République que par le Code du travail.
  10. 37. Les organes de contrôle de l’OIT ont déclaré et réaffirmé qu’il importe d’évaluer l’application pratique des conventions ratifiées, de sorte que le Comité de la liberté syndicale ne devrait pas négliger la réalité et la pratique des droits syndicaux dans le pays, en ne prêtant attention qu’à des situations fondées sur les témoignages douteux de personnes qui violent la loi et qui n’ont aucun lien avec les activités syndicales réellement exercées dans le pays.
  11. 38. Dans sa communication du 20 février 2002, le gouvernement ajoute que les personnes mentionnées dans la communication de la CMT n’ont pas été en mesure de prouver l’exercice de quelconques activités syndicales. Devant l’absence d’un contexte des relations professionnelles, on ne peut donc attribuer une représentativité syndicale à des personnes qui ne dirigent ni ne représentent aucun ensemble de travailleurs dans aucun lieu de travail du pays.
  12. 39. L’affirmation de la CMT selon laquelle à Cuba les syndicats sont créés par le gouvernement est dénuée de tout fondement; la CMT ne sait pas qu’à l’issue d’un vaste processus unitaire qui remonte au siècle passé la Centrale des travailleurs de Cuba a été créée en 1938, par la volonté des travailleurs eux-mêmes, et non par des textes législatifs. Cette unité n’a cessé de se confirmer pendant tous les congrès syndicaux. Il n’existe dans le pays ni climat de violence ni pressions ni menaces, comme en témoignent la participation des travailleurs aux activités syndicales et un taux de syndicalisation de plus de 98 pour cent. Aucun syndicaliste ou dirigeant syndical n’est arrêté. A Cuba, 98 pour cent de la population active est affiliée à un syndicat de son choix. Le droit d’organisation collective est protégé par l’article 13 du Code du travail en tant qu’acte volontaire des travailleurs, sans nécessité d’obtenir une autorisation préalable. Il est totalement faux d’évoquer, comme le fait la CMT, des actes de violence ou des listes noires, alors qu’en réalité ce sont les personnes mentionnées par la CMT qui se fondent sur un prétendu syndicalisme pour violer la loi. Ces personnes ne représentent aucun ensemble de travailleurs, n’ont été élues dans aucun lieu de travail, et n’ont jamais prouvé lors de la procédure entamée devant le Comité de la liberté syndicale qu’elles exerçaient des activités de nature syndicale.
  13. 40. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles aucune des personnes mentionnées dans la plainte n’est en prison. Le gouvernement prétend que les personnes en question n’ont pas été en mesure de prouver l’exercice de quelconques activités syndicales, met en question leur qualité de «dirigeants ou syndicalistes», qualifie le CUTC de «prétendue» organisation syndicale et signale que ces personnes ne dirigent ni ne représentent aucune association de travailleurs et n’ont pas prouvé non plus qu’elles réalisaient des activités de nature syndicale. A cet égard, le comité signale que le CUTC est affilié à la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) et à la CMT, organisations syndicales internationales, que dans les annexes à la demande d’affiliation à la CMT (envoyée par l’organisation plaignante) figurent 400 signatures de travailleurs cubains, ainsi qu’une communication du CUTC de 1995 au registre des inscriptions (ministère de la Justice) demandant «l’enregistrement dans le registre correspondant des inscriptions» et mentionnant ensuite quatre organisations de travailleurs; par ailleurs, le comité fait ressortir que les allégations de la CMT s’inscrivent dans l’organisation d’un congrès national. Le comité relève que, selon le gouvernement, on n’arrête ni syndicalistes ni dirigeants syndicaux et il est totalement faux d’évoquer des actes de violence et des listes noires. Le comité souligne cependant que le gouvernement n’a pas fait expressément mention de l’arrestation de M. Sixto Rolando Calero et de son épouse, de Pedro Pablo Alvarez Ramos (à plusieurs reprises), de Gladys Linares Blanco et de son mari, Humberto Mones Lafita, de Carmelo Agustín Díaz Fernández et de Pedro Pablo Hernández Mijares, tous, selon la CMT, dirigeants syndicaux ou syndicalistes arrêtés dans les circonstances décrites par l’organisation plaignante, de même que du journaliste Víctor Rolando Arroyo. Le comité ne peut que déplorer vivement ces arrestations et les mauvais traitements évoqués par la CMT.
  14. 41. De même, le comité ne peut que constater que le gouvernement se refuse toujours à reconnaître le CUTC, alors que sa demande d’inscription remonte à plus de six ans, et prie instamment le gouvernement de garantir le libre fonctionnement de ce syndicat et de veiller à ce que les autorités s’abstiennent de toute intervention qui puisse porter atteinte aux droits fondamentaux de cette organisation. Le comité appelle l’attention du gouvernement sur le fait que «le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix implique notamment la possibilité de créer, dans un climat de pleine sécurité, des organisations indépendantes de celles qui existent déjà et de tout parti politique», et que «la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques, en général, et des libertés syndicales, en particulier». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1996, paragr. 273 et 71.]
  15. 42. Par ailleurs, le comité observe que le gouvernement ne s’est jamais référé expressément aux autres actes concrets que l’organisation plaignante reproche aux autorités de commettre pour faire obstacle à la tenue du congrès national du CUT (harcèlement des membres du CUTC, menaces d’arrestation, confiscation de papiers d’identité, pressions exercées pour empêcher une conférence de presse, intimidation policière par les agents du DES qui ont cerné le lieu où devait se tenir la conférence de presse). A cet égard, le comité ne peut que déplorer ces actes de menace et d’intimidation qui s’ajoutent aux arrestations et détentions mentionnées dans les paragraphes antérieurs et montrent ainsi que l’exercice des droits syndicaux des organisations indépendantes de la structure syndicale officielle est extrêmement difficile, voire impossible. Pour ce qui est des allégations relatives aux restrictions imposées à la liberté d’expression, le comité constate que le gouvernement se borne une nouvelle fois à formuler des déclarations de nature générale. Le comité souligne donc que «le droit d’exprimer des opinions par la voie de la presse ou autrement est l’un des éléments essentiels des droits syndicaux» et que «le droit d’une organisation d’employeurs ou de travailleurs d’exprimer ses opinions sans censure par le truchement de la presse indépendante ne doit pas être différencié du droit d’exprimer ses opinions dans des journaux exclusivement professionnels ou syndicaux». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 153 et 156.]
  16. 43. Enfin, le comité prie le gouvernement de garantir à l’avenir le libre exercice des activités du CUTC dans un climat exempt de menaces et d’intimidations et de garantir le droit d’opinion et d’expression des organisations de travailleurs indépendantes de la structure syndicale officielle, ainsi que de veiller à ce que les documents confisqués soient rendus aux personnes mentionnées dans les allégations. Compte tenu de l’insuffisance de la réponse du gouvernement, le comité lui demande de fournir des informations sur l’ensemble des questions soulevées dans ce cas.
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